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Ce n’est pas le com m andem ent qui est simple, c’est la simplicité qui
commande. L’art dont parle K ant — ou dont, à la limite, il n’arrive pas à
parler, entre la Bible, la poésie, et des formes d ’union des beaux-arts... —
est l’art dont la « simplicité » (ou le « retrait », ou l’« écart ») comm ande
par elle-même, c’est-à-dire adresse ou expose à la liberté, avec la simplicité
de l’offrande : l’offrande comme loi du style.
La « finalité sans art » (sans artifice) est l’art (le style) de la finalité sans
fin, c’est-à-dire de la finalité de l’homme dans sa libre destination : il n’est
pas voué à la servilité de la représentation, mais il est destiné à la liberté de
la présentation, et à la présentation de la liberté — à son offrande, qui est
une présentation retirée ou écartée (la liberté lui est offerte, il l’offre, il est
offert par elle). Ce style com porte du com m andem ent, de l’interdit, parce
que c’est celui d ’une littérature qui s’interdit d ’être « littérature », qui se
retire des prestiges et des voluptés littéraires (que Kant com pare aux m as
sages des « Orientaux voluptueux »...) : l’effort par lequel elle se retire est
lui-même une offrande sublime. L’offrande de la littérature elle-même, en
somme, ou l’offrande de l’art tout entier — en tous les sens possibles de
l’expression.
Mais « le style », sans doute, est ici déjà un concept de trop. Comme « la
poésie », comme « la littérature », et peut-être comme « l’art ». Ils sont en
trop, assurément, s’ils restent pris dans une logique de la fiction et du désir,
autrem ent dit dans une logique du m anque et de son substitut, de la pré
sence et de sa représentation (telle qu’elle gouverne encore, au moins en
partie, la doctrine kantienne de l’art comme « symbole »). C ar rien ne m an
que, en somme, dans l’offrande. Rien ne m anque, tout est offert : le tout est
offert (ouvert), la totalité de la liberté. Mais accueillir l’offrande, ou s’offrir
à elle (la joie) suppose précisém ent la liberté d ’un geste — d’accueil et
d ’offrande. Ce geste trace une limite. Ce n’est pas le contour d’une figure
de la liberté. Mais c’est un contour, c’est un tracé, parce que cela provient
de la liberté, qui est la liberté de commencer, d ’entamer, ici ou là, un tracé,
une inscription, non au hasard, mais de m anière hasardée, risquée, jouée,
abandonnée.
27. Il est remarquable qu’un autre commandement biblique — le Fiai lux! de la Genèse — ait déjà été,
chez Longin puis chez ses commentateurs classiques, un exemple privilégié du sublime. — De l’un à l’autre
exemple, comme de l'un à l’autre commandement, on peut apprécier la continuité etla rupture.
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