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qui peine à attirer les foules avec son plaidoyer pour un


retour à la normale. Personne n’est malade et l’élection
Etats-Unis: sous le Covid, le risque d’un
du 3 novembre est au cœur de toutes les conversations.
chaos post-électoral
PAR CHRISTIAN SALMON Le Covid-19 a tout changé. Le feuilleton des primaires
ARTICLE PUBLIÉ LE LUNDI 14 SEPTEMBRE 2020
s’est interrompu avec ses caucus d’un autre âge,
ses coups de théâtre, ses rebondissements électoraux
comme le fut la victoire de Joe Biden porté jusqu’à
la nomination par des candidats félons qui n’avaient
d’autre objectif que de ruiner la candidature de Bernie
Sanders. Mais qui s’en souciait désormais ?
Du jour au lendemain, la course de petits chevaux
des primaires démocrates qui alimentait la chronique
Un partisan de Trump en Alaska. © Photo courtesy
Paxson Woelber, The Alaska Landmine/Flickr
médiatique céda la place à une tout autre chronologie.
La pandémie a bouleversé la campagne électorale La campagne électorale rendit les armes devant
américaine. Mais elle a surtout fait apparaître, sous le l’avancée du virus. Ses « storytellers » pouvaient
masque du pouvoir grotesque de Trump, les troupes remiser leurs scénarios dans leurs tiroirs ; c’est
violentes de l’Alt-right et les milices suprémacistes qui le Covid-19 qui écrivait l’histoire, une histoire qui
font peser une menace sur le scrutin. déjouait tous les pronostics et renvoyait l’élection aux
calendes grecques.
Si les conséquences n’en étaient pas aussi
potentiellement destructrices pour les États-Unis et le
reste du monde, le phénomène de décomposition qui
affecte la vie politique américaine depuis l’élection de
Donald Trump serait fascinant à observer. L’épidémie
de Covid-19 pourrait bien lui avoir porté le coup de
grâce.
Dans un monde sans Covid, la campagne électorale
battrait son plein en ce début septembre. Dans tout
le pays, les deux partis mèneraient une campagne
acharnée, frappant à des millions de portes pour attirer
les électeurs le 3 novembre. Le Parti démocrate aurait
nommé Joe Biden et sa colistière lors de sa convention
de mi-juillet à Milwaukee, tandis que les républicains
auraient confirmé la candidature de Donald Trump à
Charlotte, Caroline du Nord, sous les vivats de ses
partisans chauffés à blanc.
Dans ce monde imaginaire sans Covid, l’économie
est en plein essor et le chômage a atteint son plus
bas niveau depuis longtemps. Au cours d’une centaine
de meetings à travers le pays, Trump a pu donner la La gestion de la pandémie par Trump a pris des airs de
catastrophe nationale. © Free CCO, No Redes Sociales/Flickr
mesure de son talent basé sur l’esbroufe, le grotesque
et les mensonges habituels. Aucun obstacle ne semble Le regard des journalistes se portait ailleurs. Ils
se dresser sur le chemin de sa réélection. Aussi peut-il ne comptaient plus les délégués gagnés par les
se moquer autant qu’il le veut de « Sleepy Joe » (Biden) Biden ou Bernie en vue d’une nomination démocrate,

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mais le nombre de décès du Covid-19 qui grimpait pour encourager les électeurs à se rendre aux urnes
inexorablement jusqu’à atteindre, rappelait Bernie furent revues à la baisse. De nombreux syndicats, qui
Sanders, le nombre d’Américains tués pendant la fournissaient généralement des légions de travailleurs
Seconde Guerre mondiale. pour soutenir les campagnes démocrates, annulaient
Avec plus de 5,2 millions de cas et 180 000 décès leurs activités.
dus à la maladie, la gestion de la pandémie par Finis les cocktails de collecte de fonds, les poignées
Trump prenait des airs de catastrophe nationale. de main dans la foule. Les conventions du parti furent
Aussi longtemps que possible, celui-ci avait minimisé réduites à des événements virtuels. De nombreux États
la gravité de l’épidémie, soucieux de ne pas se sont résolus à changer rapidement les procédures de
compromettre les bons résultats économiques, son vote, privilégiant le vote par correspondance.
principal atout pour sa campagne de réélection. L’œil La pandémie a recentré l’attention des Américains en
sur les cours des marchés, il avait multiplié les mettant au premier plan les problèmes de la santé
déclarations rassurantes, joignant le geste à la parole publique, l’inégalité économique et raciale, et incité le
en serrant les mains à tout-va, sans se soucier du public à revoir les critères de sélection des dirigeants
message que son comportement adressait à l’opinion. qu’il voulait au pouvoir. Toute l’attention s’est portée
Dans une vidéo mise en ligne sur son compte Twitter, sur la gestion de la crise par Trump qui, loin d’adopter
le Washington Post a recensé « les 19 fois où Trump a les mesures d’urgence qui s’imposaient, se répandit
minimisé le coronavirus ». Dans un livre à paraître, en propos absurdes. Ce fut de sa part un festival de
Trump révèle qu’il était conscient de la gravité de la dénégations et de contradictions.
pandémie, mais qu’il l’avait sciemment cachée pour ne Le complotisme se répandit comme une traînée de
pas affoler les Américains. Du coup, plus personne ne poudre, révisant les statistiques de la pandémie,
s’accordait sur les thérapies proposées et les mesures semant le doute sur les mesures sanitaires à adopter.
sanitaires à respecter pour endiguer l’explosion de Trump avait commencé par dissimuler la gravité du
l’épidémie. L’Amérique était une vaste salle d’attente mal pour ne pas affoler la population, se défendit-
où les patients échangeaient entre eux les dernières il. En fait pour ne pas mettre en péril ses accords
nouvelles du Covid-19. commerciaux avec la Chine, ultime corde de rappel
La campagne électorale, ses stratèges et ses meetings pour une croissance économique en berne qui risquait
aux allures de foire, tout cela semblait presque de lui coûter un second mandat.
indécent. On n’avait pas le cœur à la frénésie des Peine perdue.
campagnes avec leurs ballons multicolores, leurs
La pandémie continuait ses ravages sur une population
pancartes et leurs slogans simplificateurs.
désarmée, privée de masques et systématiquement
Pendant la primaire démocrate, Joe Biden et Bernie désinformée sur les gestes barrières. Pendant ce temps,
Sanders réduisirent le nombre de leurs déplacements l’économie se contractait et le chômage repartait à
et annulèrent les grands rassemblements prévus. Les la hausse jusqu’à atteindre bientôt les niveaux de la
foules enthousiastes qui se rassemblaient autour de Grande Dépression. Trump se révéla incapable d’offrir
Sanders disparurent des écrans. On les vit s’adresser une stratégie nationale pour combattre la pandémie,
à de petits groupes de journalistes dans les salles en multipliant les tests, le traçage des contacts et les
de bal clairsemées des hôtels de leurs villes natales, mesures de quarantaine pour les cas de contamination.
Wilmington, Delaware, et Burlington, Vermont. Il fut tout autant incapable d’organiser la reprise des
Les grands meetings tout comme les petites foires, les activités économiques, d’offrir un plan d’aide aux
festivals et les marchés furent annulés. Les opérations chômeurs dont le nombre explosa pendant la crise.
de porte-à-porte traditionnelles conduites par des
armées de militants se déplaçant à travers le pays

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Lorsqu’il apparut que la pandémie ne disparaîtrait de déplacer la conversation politique nationale vers
pas par enchantement et que l’activité économique ne les questions de sécurité où les républicains pourraient
renaîtrait pas de ses cendres, le ton de la campagne être en meilleure posture.
changea. Selon Kellyanne Conway, la convention démocrate
était une production hollywoodienne. La convention
républicaine, un reality show centré sur le personnage
de Trump, omniprésent chaque soir au milieu de sa
famille. Sur la photo de gauche à droite, Donald
Trump Jr, Tiffany Trump, le président, Ivanka, Donald
Trump, la première dame Melania Trump et Barron
Trump, etc.
Deux producteurs de la série « The Apprentice »
ont supervisé l’événement : Sadoux Kim, un adjoint
de longue date du créateur de l’émission, ex-juge
de Miss Univers lorsque M. Trump était propriétaire
du concours, et Mark Burnett, un consultant de la
production. Il avait pour eux le plus beau des plateaux,
Trump tente de recadrer le débat électoral autour la Maison Blanche.
des questions de sécurité. © duncan c/Flickr

Ce fut Kellyanne Conway, la conseillère de Trump Le pouvoir grotesque de Donald Trump avait
(sur le départ), qui lâcha le morceau au cours manifesté toute son absurdité et son incompétence
d’une interview sur Fox News pendant la convention dans la gestion de la crise sanitaire. La convention
républicaine. Celle qui avait inauguré le mandat de républicaine a mis à nu, sous le masque du clown, sa
Trump en formulant un de ses concept clefs, les « violence arbitraire. Elle a fait apparaître à la lumière
faits alternatifs » (« alternative facts »), a donné le des feux d’artifice qui crépitaient au-dessus du Lincoln
ton du recadrage de la campagne de Trump incarné Memorial son double visage, grotesque et menaçant,
par le nouveau slogan « Law and Order » (« La loi et burlesque et incendiaire, impuissant devant le virus
l'ordre »). mais menaçant face aux manifestants pacifiques qui
protestaient à Kenosha après la mort de Georges
Le timing était parfait, laissa-t-elle entendre. Les Floyd.
scènes de violence qui se déroulaient à Kenosha,
Wisconsin, après les événements de Charlottesville,
Lafayette Square et Portland en fournissaient le cadre
idéal. Conway alla jusqu’à déclarer que les scènes
de désordre public étaient politiquement utiles pour
Trump. « Plus le chaos, l’anarchie, le vandalisme et
la violence règnent, déclara Conway, mieux c’est, car
cela permet de clarifier le choix de celui qui est le Un partisan de Trump tente d'intimider des manifestants de
meilleur en matière de sécurité publique et d’ordre Black Lives Matter le 7 septembre 2020 en Alaska. © Photo
courtesy Paxson Woelber, The Alaska Landmine/Flickr
public. »
Trump s’était vanté un jour de pouvoir tirer sur
Faute de croissance économique ou d’un reflux de
quelqu’un sur la Cinquième Avenue en toute impunité
l’épidémie, il fallait changer la conversation. Les
sans perdre le soutien de ses supporters. C’était une
troubles à Kenosha et à Portland ont donné au
président et à la convention républicaine une occasion

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blague. Mais cette fois il prit la défense de Kyle rues pendant des semaines ont rendu possible une
Rittenhouse, un jeune supporter de 17 ans qui était sortie de route qui risque de déboucher sur un chaos
accusé du meurtre de deux manifestants à Kenosha. post-électoral et peut-être un mandat empêché.
Désormais, il étendait ce permis de tuer à ses partisans. « Créer le chaos est le dernier espoir de Donald
« Ne vous y trompez pas : peu importe où vous vivez, Trump pour remporter la présidentielle », affirme
votre famille ne sera pas en sécurité dans l’Amérique Denis Lacorne, directeur de recherche au Centre de
des démocrates radicaux », ont prévenu pendant la recherches internationales (CERI), dans une tribune
convention républicaine Patricia et Mark McCloskey, au Monde. Les tentatives de sabotage du vote à
ce couple de juristes de St Louis (Missouri) qui avaient distance constituent la stratégie de dernier recours
menacé arme à la main des manifestants de Black d’un président américain placé devant une défaite
Lives Matter qui défilaient près de leur demeure au probable. »
mois de juin. Se préparer à un coup d’État
Bien essayé ! est-on tenté de dire face à cette tentative Trump a d’abord envisagé de retarder la date des
de recadrer le débat électoral autour les questions élections. Or la date de la présidentielle, comme le
de sécurité. Une stratégie qui n’a rien de nouveau précise l’article 2 de la Constitution, est déterminée
tant les gouvernements ont l’habitude de miser sur le par le Congrès, lequel, depuis une loi votée en 1845,
désordre pour provoquer le ralliement des majorités a choisi comme seule date possible le mardi suivant le
silencieuses… Mais il est rare qu’ils s’en vantent aussi premier lundi de novembre.
ouvertement.
Comme l’a récemment écrit le juriste Steven
C’est peut-être là que le bât blesse, car les sondages de Calabresi, l’un des cofondateurs de la très
Fox News après la convention républicaine suggèrent conservatrice Federalist Society, dans une tribune au
que la tentative de Trump de recadrer la course autour New York Times, changer la date des élections est
de la loi et de l’ordre n’a pas tourné à son avantage. inconcevable dans une démocratie constitutionnelle :
Selon le New York Times qui cite des sondages de un tel acte serait « fascisant » et ouvrirait la porte à «
Fox News, les efforts du président pour recadrer la une mise en accusation (impeachment) immédiate du
campagne autour de la loi et de l’ordre n’ont pas président ». Face aux critiques issues de son propre
fondamentalement tourné à son avantage ; Joe Biden camp, Trump a dû faire machine arrière.
mène la course sur cette question dans des États
stratégiques. Mais il a tenté une dernière manœuvre qui
visait à paralyser le dépouillement des votes par
L’impact de la pandémie a d’abord été perçu correspondance. En réduisant le nombre de postiers,
comme un empêchement, un rétrécissement et d’heures supplémentaires pour les employés des
un ralentissement de la campagne électorale, postes, de machines à trier le courrier, Trump espérait
les consignes sanitaires interdisant les grands produire une situation de chaos favorable aux électeurs
rassemblements mais aussi les débats publics. Elle a républicains qui préfèrent voter dans les bureaux de
tout autant aiguisé les contradictions de la vie politique vote, alors que les démocrates ont recours plus souvent
américaine et accéléré un processus de décomposition au vote par correspondance, surtout en période de
de la vie démocratique à l’œuvre depuis l’élection de pandémie qui touche de façon disproportionnée les
Trump. minorités ethniques.
Les appels à la violence lancés par le président de
États-Unis, son refus de reconnaître à l’avance une
quelconque défaite, ses tentatives d’empêcher le vote
par correspondance, les violences organisées dans les

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Les nombreuses protestations des élus démocrates vote, Trump remporte la Pennsylvanie, le Wisconsin
et les auditions prévues au Congrès du principal et le Michigan, trois États qui ne dépouillent pas les
responsable des services postaux, Louis DeJoy, ont bulletins de vote envoyés par la poste avant le jour de
contraint Trump à reculer et à bloquer l’initiative du l’élection. Trump déclare rapidement la victoire. Les
chef des postes. médias ont beau prétendre que c’est prématuré, les
« À supposer que l’écart des voix entre Trump et Biden supporters de Trump exultent. »
soit infime dans certains des États décisifs, conclut Les commentateurs ont beau répéter que 40 % des
Denis Lacorne, on peut s’attendre à d’interminables bulletins de vote envoyés par la poste sont en cours
délais et à l’intervention des tribunaux pour mettre fin, de dépouillement et qu’ils sont susceptibles d'être
prématurément, au comptage ou au recomptage des massivement en faveur de Joe Biden, rien n’y fait. Les
bulletins de vote, comme en Floride en 2000. Le chaos, médias pro-Trump confirment la victoire annoncée
à défaut d’un sabotage réussi du service des postes, et font pression pour que Joe Biden reconnaisse sa
est le dernier espoir d’un président aux impulsions défaite. Personne ne peut contrôler les émotions cette
fascisantes qui, ne pouvant envisager une défaite nuit-là.
probable, blâme déjà ses adversaires pour “l’élection Dans les jours qui suivent, au fur et à mesure
la plus frauduleuse dans l’histoire” du monde. » que progresse le dépouillement des votes par
« Je suis de plus en plus convaincu que l’élection correspondance, l’avance de Trump se réduit au profit
est sans grande importance, m’écrit un ami éditeur à de Joe Biden. Trump prétend y voir la preuve qu’une
New York. Trump va se déclarer vainqueur quoi qu’il fraude massive est en cours et qu’on cherche à lui
arrive, la Cour suprême le suivra, l’armée ne bougera voler l’élection. La suite de ce scénario cauchemar est
pas et l’establishment démocrate, tout en protestant déjà décrite dans un documentaire qu’on peut voir
vigoureusement, estimera qu’il est plus responsable sur Netflix, « Get Me Roger Stone » (« Appelez-moi
d’abdiquer que d'entamer une guerre civile. Tout Roger Stone ! »).
dépendra alors des réactions sur le terrain. Ce que je Ce dernier, un spin doctor spécialiste des basses
t’écris, je ne parviens même pas à l’imaginer mais en œuvres de Nixon à Trump, raconte en détail le rôle
même temps je ne vois guère d’autres possibilités… » qu’il a joué dans l’élection de G. W. Bush en 2000
en sabotant l’opération de recomptage des voix en
Floride. Ces événements sont désormais connus sous
le nom d’« émeute des Brooks Brothers ». Un véritable
hold-up électoral.
« J’ai installé mon centre de commandement à un pâté
Upper Arlington, Ohio, 8 juillet 2020. © Dan Keck/Flickr
de maisons du centre Clark, sur First Street, raconte
Stone. J’avais des talkies-walkies et des téléphones
Ce scénario catastrophe, ils sont de plus en portables, et j’étais en contact avec nos collaborateurs
plus nombreux à l’envisager d’un bout à l’autre dans l’immeuble. » Le documentaire Netflix montre
de l’échiquier politique américain. L’éditorialiste la foule qui entre dans les locaux, bouscule les agents
conservateur du New York Times, David Brook en et crée la confusion. À la fin, le recomptage est
décrit le déroulement comme le scénario d’une interrompu, ce qui permet à la Cour suprême de
série TV : « Dans la soirée du 3 novembre, les proclamer la victoire de G. W. Bush.
Américains s'installent fébriles devant leur écran en
l’attente des résultats de l’élection… Au petit jour, La même chose ne manquerait pas de se produire non
il semble que la nuit a été excellente pour Donald plus seulement dans un État mais dans plusieurs à
Trump. Au vu du premier décompte des bureaux de la fois si le comptage des votes par correspondance
se prolongeait. Le Parti républicain a mobilisé 50

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000 « observateurs du scrutin »... pour intimider les Trump n’a-t-il pas menacé de suspendre le
électeurs minoritaires le jour du scrutin ? Roger Stone financement des États qui tentent de faciliter le vote
vient d’être gracié par Trump d’une peine de 40 mois par correspondance. Ses alliés républicains à travers le
de prison. On ne sait pas quel sera son rôle au soir du pays ont adopté des lois d’identification des électeurs,
3 novembre mais on peut parier qu’il ne restera pas purgé les listes électorales et réduit le nombre de
inactif. bureaux de vote dans les zones urbaines, forçant les
« Le problème commence – mais ne s’arrêtera pas gens à faire la queue pendant des heures pour exercer
– avec Donald Trump, affirme le professeur de droit leur droit de vote.
Lawrence Douglas, même si celui-ci a une fois de plus Trump mène une guerre contre les électeurs
rappelé à la nation que perdre n’est pas une option. démocrates, en particulier les Noirs, les Latinos,
Il rejettera toute élection qu’il perdra, prétendant les Américains d’origine asiatique, les Amérindiens,
qu’elle est truquée. Aussi alarmant que cela puisse les immigrants naturalisés, les pauvres et les
être, Trump seul ne peut pas faire planter le système. jeunes… Une vieille tradition américaine, le «
Au lieu de cela, une constellation inhabituelle de disenfranchisement », c’est-à-dire la privation du droit
forces – la nécessité de s’appuyer fortement sur les de vote appliquée aux votes des Africains-Américains
bulletins de vote par correspondance en raison de la dans le sud des États-Unis…
pandémie de Covid-19 ; les divisions politiques dans Que faire si Trump remet en question la légitimité
les principaux États du Michigan, du Wisconsin et des résultats électoraux et ne concède pas la défaite ?
de la Pennsylvanie ; et un Congrès hyper-polarisé – s’interrogent dans un article de The Intercept
tous travaillent ensemble pour transformer le défi de Frances Fox Piven et Deepak Bhargava.
Trump en une crise aux proportions historiques. »
Commencer par retenir la leçon de l’élection
En travaillant à un livre sur les alternances politiques frauduleuse de G. W. Bush en 2000, affirment
aux États-Unis, Lawrence Douglas a compris que les auteurs de l’article. « Les démocrates se
le système des élections présidentielles comportait sont naïvement appuyés sur les tribunaux et les
un défaut de construction semblable à celui de responsables locaux des élections pour valider la
Tchernobyl qui, placé dans certaines conditions de victoire de Gore. Le résultat ultime de cette pathétique
stress, rendait tout le système vulnérable à une panne stratégie démocrate n’a pas été seulement une victoire
catastrophique. de Bush mais la guerre en Irak, la réponse raciste et
« Le risque d'un tel effondrement électoral est inepte à l’ouragan Katrina et des milliards de dollars
généralement plutôt faible, mais ce mois de novembre de réductions d’impôts pour les riches. »
présente – d’une manière vue pour la dernière fois Les auteurs soulignent la faiblesse de la stratégie
en 1876 – une combinaison de facteurs de stress qui démocrate qui risque de produire les mêmes effets.
pourraient conduire à un “epic fail” et au chaos. » « La campagne de Joe Biden recrute des avocats,
Douglas évoque la possibilité d’un « Armageddon pas des organisateurs, et Biden lui-même a exprimé
» électoral. une confiance déplacée en l’armée qui “escortera le
Jusqu’à récemment, les défenseurs de la démocratie jour de l'inauguration [Trump] jusqu’à la sortie de la
se concentraient principalement sur la possibilité que Maison Blanche”.»
Trump n’accepte pas les résultats d’une élection Selon eux, nombreux seront ceux qui «exhorteront à
légitime. « Mais maintenant, un danger tout aussi ne pas “politiser” le processus, à attendre patiemment
grave est apparu, écrit David Litt, un ancien porte et à parler de “l’État de droit”, à ne pas “préjuger
parole de Barack Obama, il se peut qu’il n’y ait pas des résultats”, à faire confiance au processus et
d’élections légitimes du tout. » aux tribunaux, à rester à la maison et à laisser les

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types intelligents de DC [Washington DC, la capitale l’usurpation du pouvoir prévue par le président. (Lire
– ndlr] régler les choses en notre nom. Nous devons sur ces nouveaux mouvements de résistance l’enquête
ignorer ces conseils et descendre dans la rue. » passionnante du correspondant de Mediapart
Frances Fox Piven et Deepak Bhargava, qui expriment aux États-Unis Matthieu Magnaudeix, Génération
le point de vue de la gauche radicale, appellent à Ocasio-Cortez, Les nouveaux activistes américains.)
une mobilisation non violente dans toutes les villes « Nous devons nous préparer maintenant à répondre,
des États-Unis dans le cas où Trump contesterait le affirment les auteurs de l’article, psychologiquement
résultat des élections. « Alors que les institutions, les et stratégiquement, à quelque chose qui s’apparente
normes et les élites ont échoué, il existe de nombreuses à un coup d’État. Ce sont des scénarios sombres
preuves que les protestations de masse produisent des mais plausibles, et nous ferions mieux de les affronter
changements. » plutôt que de les éviter. Le pire serait qu’un large
Et de citer le mouvement Occupy, les groupes front uni des forces anti-Trump soit pris au dépourvu
de « résistance » qui se sont mobilisés au début dans les 72 heures suivant le jour du scrutin. Nous
des années Trump, le mouvement des droits des devons jeter les bases maintenant pour le type d’action
migrants qui se sont opposés par des protestations de masse qui défend la démocratie. Ce faisant, nous
de masse au « muslim ban » de Trump et à nous rappellerons que la démocratie américaine n’est
la mise en cage des enfants à la frontière, la pas un ensemble d’institutions ou de règles, ou un
Marche des femmes, Black Lives Matter, tous ces événement qui se produit une fois tous les quatre ans ;
mouvements qui ont recruté des millions de partisans, c’est ce que font les gens ordinaires pour participer et
une base sociale puissante à partir de laquelle contester façonner la vie de notre pays. »

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