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LOCALISER LES ÉMETTEURS RADIO-

ÉLECTRIQUES
NOTE RENSEIGNEMENT, TECHNOLOGIE ET ARMEMENT N°13 /
NOVEMBRE 2019
OLIVIER DUJARDIN

Localiser des émetteurs radio-électriques (stations radar, centres de communication, postes


de commandement, brouilleurs, etc.) est une problématique ancienne. Cela ne concerne
d’ailleurs pas que le domaine militaire. Dans le civil aussi il est parfois nécessaire de trouver
la source d’un émetteur indésirable ; c’est une des fonctions de l’Agence nationale des
fréquences (ANFR). Pour cela, il n’existe aujourd’hui qu’une seule méthode : la localisation
par triangulation issue de goniométries du signal à rechercher. Le principe est toujours le
même depuis le début de l’ère de la radio. Il faut déterminer la direction d’arrivée de la/des
fréquences à localiser à partir de différentes positions et essayer de remonter jusqu’à la
source. Si différents principes de goniométrie ont été inventés, la logique reste la même.

Or aujourd’hui cette problématique se voit accorder une vive attention dans le domaine
militaire du fait des stratégies de A2/AD (Anti-Access/Area Denial). La très grande portée de
ces systèmes d’armes rend l’approche difficile et dangereuse et il est alors logique de se
tourner vers les émetteurs associés à ces systèmes (transmissions de données et radars)
pour les localiser. C’est aussi une méthode proposée pour localiser les systèmes de guerre
électronique offensifs (brouilleurs), largement utilisés par les forces russes notamment. La
logique avancée est que la localisation issue de la goniométrie des émetteurs permettra
ainsi d’y envoyer une arme pour les détruire. Mais, s’il est possible de localiser un émetteur,
cela ne signifie pas forcément qu’il peut être ciblé ; il faut tenir compte de la précision qui
peut être obtenue.

MÉTHODES DE GONIOMÉTRIE

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Différentes méthodes de goniométrie existent. Elles ont toutes leurs avantages et leurs
défauts et sont chacune vulnérables et sensibles à certains phénomènes de propagations
qui altèrent leur précision.

Radiogoniométrie d’amplitude :

Le principe est de repérer, au moyen d’une antenne (antenne tournante) ou de plusieurs


antennes couvrant 360°, la direction dans laquelle le signal reçu est le plus fort. Plusieurs
techniques de traitement existent en fonction des types d’antennes utilisés (antenne unique
directive, cardioïde, formation de faisceaux).

Radiogoniométrie Watson Watt à antennes cadres et Adcock :

Ce principe utilise deux antennes à faible ouverture perpendiculaires. Ce principe est très
sensible aux multi-trajets.

Radiogoniométrie doppler :

Cette technique utilise un effet doppler obtenu par la rotation d’une antenne à une vitesse
donnée autour d’un axe central. Le principe consiste à détecter l’angle pour lequel la
fréquence instantanée du signal reçu est maximale.

Radiogoniométrie par interférométrie :

Cette technique utilise la mesure de différence de phases entre deux antennes proches.

Radiogoniométrie par corrélation vectorielle :

Cette technique combine la radiogoniométrie d’amplitude et la radiogoniométrie par


interférométrie.

Dans le domaine de la guerre électronique, les méthodes les plus utilisées sont la
radiogoniométrie d’amplitude et celle par interférométrie ou la combinaison des deux, par
corrélation vectorielle. Mais, quelle que soit la méthode employée, la précision de la
direction va dépendre de plusieurs paramètres. D’abord, de la taille du ou des aériens
(antenne et réflecteur) utilisés : plus le réflecteur de l’antenne est grand, plus l’ouverture
angulaire est petite, ce qui améliore la précision. Ensuite de l’environnement et des
conditions de réception : les multi-trajets, les rebonds peuvent altérer la mesure de direction
d’arrivée. En effet il n’est pas rare que la direction dans laquelle le signal est le plus puissant
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ne soit pas forcément la direction d’où vient le signal. Dans certains cas l’erreur peut être de
180°, notamment si, derrière l’antenne, se trouve une structure qui focalise et renvoie le
signal (hangar, falaise…). Enfin, la fréquence à goniométrer va avoir un impact sur la
mesure angulaire car, plus la fréquence est basse, plus l’imprécision angulaire est
importante.

Radiogoniométrie par mesure de différence de temps d’arrivée entre plusieurs


antennes :

Cette méthode consiste à mesurer la différence de temps d’arrivée d’un signal entre
différentes antennes. Par corrélation de mesures, entre 3 antennes au minimum si elles sont
omni directionnelles, il est possible de déterminer la direction d’arrivée d’un signal avec une
précision qui ne dépend ni de la taille des aériens, ni du niveau de réception du signal. La
précision de mesure va dépendre de l’éloignement des antennes (plus elles sont espacées,
mieux c’est), de la précision de leur localisation, du niveau de synchronisation des
récepteurs de chacune des antennes et de la fréquence interceptée (l’incertitude temporelle
est proportionnelle à la longueur d’onde). Or, plus les antennes et les récepteurs sont
éloignés les uns des autres, plus il est difficile de les synchroniser précisément et, plus ils
sont proches, moins la mesure sera précise… Sans compter que ce principe doit
correctement associer les formes d’ondes d’un même émetteur, ce qui est loin d’être évident
dans les environnements électromagnétiquement denses où les risques de chevauchement
des ondes sont importants.

Dans les faits cette méthode est difficile à appliquer, surtout si les antennes sont mobiles les
unes par rapport aux autres (navires ou aéronefs). De plus elle reste vulnérable aux multi-
trajets des signaux qui ont tendance à perturber les mesures. Malgré ses avantages, elle
reste donc, pour des raisons techniques, peu employée en dehors de certains satellites
ROEM (Renseignement d’Origine Electromagnétique) qui, eux, n’ont à souffrir ni des multi-
trajets, ni du problème de positionnement (les constellations de satellites sont conçues pour
garder leurs positions relatives fixes par rapport aux autres) et qui, du fait de leur
éloignement, sont moins soumis aux risques d’interférences.

NIVEAU DE PRÉCISION DE LA LOCALISATION

Dans la pratique, on peut constater que la précision angulaire donnée par chacun des
procédés énumérés ci-dessus est bien moindre que celle annoncée par les fabricants de
matériel. En effet, les indications de précision de mesures sont données pour des
fréquences précises, dans des environnements contrôlés, avec des antennes spécialement
calibrées pour chaque fréquence testée. Quand la documentation technique d’une antenne
donne une précision angulaire de 1° à 10 GHz par exemple, en pratique – c’est-à-dire en

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espace libre -, on constatera une précision de l’ordre de 10° à 15°. A 1 GHz de fréquence,
quand un fournisseur donne 5°, il faut s’attendre en pratique entre 20 et 25° de précision
angulaire et ainsi de suite.

Il est évident que la précision de la localisation va dépendre à la fois des précisions


angulaires des directions d’arrivée et de la distance par rapport à l’émetteur. Ainsi à 50 km
de distance d’une source, avec une précision angulaire de 15°, la marge d’erreur sera de
(50 x tan(15)) soit 13,4 km ! A 100 km de distance, la marge d’erreur sera de 26,8 km !

Ainsi le résultat de la triangulation effectuée à 50 km de distance avec une précision de 15°


donnera, dans le meilleur des cas[1], un cercle d’incertitude d’au moins 13,4 km de
diamètre, soit une surface de 141 km². Ce diamètre sera porté à 26,8 km, soit une surface de
564 km², si la source est à 100 km.

Comme la distance influe sur la précision de la localisation, plus les capteurs sont éloignés
de la source, moins ils pourront localiser les émetteurs avec précision, d’où un des intérêts
des systèmes A2/AD[2]. Ainsi si on voulait localiser, à partir de ses émissions
radioélectriques, une batterie S-400 située à 400 km de distance, on obtiendrait, au mieux,
un cercle d’incertitude de 107 km de diamètre, soit une superficie de 8 992 km². Il devient
alors évident qu’il n’est pas possible, avec cette seule information si peu précise, de détruire
le système.

Dans la pratique, la précision de la localisation peut être améliorée au fil du temps. Si un


émetteur reste immobile plusieurs jours ou plusieurs semaines, l’accumulation des mesures
permettra statistiquement de rétrécir ce cercle.

Alors, comment connaître la précision des données de localisation issues du ROEM ?


Comme on l’a vu, cette précision va dépendre de très nombreux de paramètres : fréquence
de l’émetteur, caractéristiques des antennes, distance de l’émetteur, nombre de mesures
effectuées, conditions de propagation, etc. Or l’ensemble de ces informations sera
impossible à rassembler car, très souvent, plusieurs types de capteurs avec des
caractéristiques différentes participent à la triangulation.

De façon totalement empirique au regard de l’expérience acquise, on peut se baser sur


l’approximation suivante pour le cas le plus favorable[3] : il est possible d’espérer que dans
50% des cas la position donnée se situera dans un cercle de 10 km de rayon de la position
exacte de l’émetteur.

Cette estimation n’est valable que pour les mesures effectuées depuis la terre, la mer ou les
airs ; cela ne s’applique pas aux satellites. En effet ceux-ci, de par leur position particulière,
sont beaucoup moins soumis aux phénomènes de propagation, ce qui mécaniquement
améliore grandement leur précision. Ainsi une constellation de satellites utilisant la
goniométrie par DTOA pourra, dans des conditions favorables, obtenir des résultats de
triangulation bien meilleurs. Là encore, de façon empirique, on peut espérer, pour un
émetteur fonctionnant en bande haute, que dans 50% des cas la position donnée se situera
dans un cercle de 1 km de rayon de la position exacte de l’émetteur. Mais un satellite ne

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permet pas de maintenir une surveillance de zone dans le temps, contrairement à un
aéronef, un navire ou une station sol qui peuvent rester plusieurs heures, jours ou semaines
au même endroit.

Dans tous les cas, et quels que soient le/les moyens utilisés, il n’est pas possible d’obtenir
une localisation suffisamment précise d’un émetteur radioélectrique à partir des seules
informations d’interception permettant le ciblage avec une arme. Espérer contrer un
système d’armes, un radar, un centre de commandement ou un brouilleur en le localisant à
partir de ses seules émissions électromagnétiques est un leurre. Il n’y a que deux solutions
possibles : soit coupler cette information avec une autre source de renseignement
permettant d’affiner la position (imagerie, renseignement humain, sources ouvertes…) ; soit
utiliser un missile ARM (Anti Radiation Missile) qui remontera le signal de l’émetteur jusqu’à
sa source. Dans tous les cas il n’existe pas, aujourd’hui, de solution technique permettant de
changer cet état de fait.

Le problème est que, trop souvent, quand les industriels parlent de localisation des
émetteurs, les opérationnels entendent « ciblage », ce qui en fait n’a rien à voir et nourrit de
faux espoirs. Dans la réalité, un élément rayonnant reste difficile à localiser avec précision à
partir de ses seules émissions électromagnétiques. Si, en plus, cet élément est mobile ou se
déplace de façon régulière, il sera très difficile à cibler. C’est un élément à prendre en
compte sachant que plus des 2/3 des radars de veille aérienne, pratiquement 100% des
systèmes d’armes sol/air et 100% des équipements de guerre électronique dédiés au
brouillage sont soit mobiles, soit déplaçables en moins de 24 heures. Pour peu que la cible
change de position tous les jours, voire plusieurs fois par jour, elle sera pratiquement
impossible à cibler à partir de ses seules émissions.

[1] Si les différentes mesures de goniométries donnent exactement le même secteur, ce qui
en pratique n’est jamais le cas, et que les goniométries aient été réalisées de façon
uniforme sur 360° autour de la cible.

[2] https://www.cf2r.org/rta/deni-dacces-brouillard-de-guerre/

[3] C’est-à-dire un émetteur fonctionnant en bande haute qui a pu être intercepté et


goniométré plusieurs dizaines de fois à une distance inférieure à 100 km.

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