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Traité élémentaire de chimie

: présenté dans un ordre


nouveau et d'après les
découvertes modernes
([Reprod. en [...]

Source gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France


Lavoisier, Antoine-Laurent de (1743-1794). Traité élémentaire de
chimie : présenté dans un ordre nouveau et d'après les
découvertes modernes ([Reprod. en fac-sim.]) par M. Lavoisier....
1789.

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TRAITÉ
ÉLÉMENTAIRE
DE CHIMIE.
TOME PREMIER.
IMPRESSIONANASTAI/TÏQUE
CULTURE ET CIVILISATION
115, AVENUE GABRIEL LEBON
BRUXELLES
1965
T R A I T E
ÉLÉMENTAIRE
DE CHIMIE,
PRÉSENTÉ DANS UN ORDRE NOUVEAU

ET D'APRÈS LES DÉCOUVERTES MODERNES


Avec Figures
Par M. Lavo isier de l'Académie des
Sciences, de la Société Royale de Médecine des
Sociétés d'Agriculture de Paris & d'Orléans de
la Société Royale de Londres de flnflitut de
Bologne de la Société Helvétique de Rafle, de
celles de Philadelphie Harlem Manchejler
Padoue &c.

TOME PREMIER.

A PARIS.,
Chez Cuchet, Libraire, rue & hôtel Serpente.
M. DCC LXXXIX.
Sous le Privilége de l'Académie des Sciences & de la
Société Royale de Médecine.
DISCOURS
PRÉLIMINAIRE.
JE n'avais
pour objet lorfque j'ai entre-
pris cet ouvrage que de donner plus de
développement au Mémoire que j'ai lu
à la féance publique de l'Académie des.
Sciences du mois d'Avril 1787, fur la
nécefïké de réformer & de perfectionner
la Nomenclature de la Chimie.
C'eft en m'occupant de ce travail, que
j'ai mieux fenti que je ne l'avais encore
fait jufqu'alors l'évidence des principes
qui ont été pofés par l'Abbé de Condillac
dans fa logique, & dans quelques autres
de fes ouvrages. Il y établit que nous ne
penfons qu'avec le fecours des mots; que
les languesfont de véritables méthodes ana-
lytiques.; que 1-'algèbre la plusfimple, la
plus exacte & la mieux adaptée à fon
objet de toutes les manières de s'énoncer
e.ft à-la-fois une langue SI. une méthode
analytique enfin que l'art de raifonner
J'e réduit ci une langue bien faite. Et en
effet tandis que je croyois ne m'occuper
que je na-
que de Nomenclature, tandis
vois pour objet que de perfectionner le
langage de la Chimie mon ouvrage
s'eft transformé infenfiblement entre mes
mains fans qu'il m'ait été poffible de
m'en défendre en un Traité élémentaire
de Chimie.
L'impofïibilité d'ifoler la. Nomencla-
-cure de la fcience &
la fcience de la
Nomenclature tient à ce que toute
fctence phyfique eft néceffairement formée
de trois chofes la férie des faits qui
conftituent la fcience; les idées qui les rap-
pellent les mots qui les expriment. Le
mot doit faire naître fidée l'idée doit
peindre le fait ce font trois empreintes
d'un même cachet; & comme ce font
les mots qui confervent les idées & qui
les tranftnettent, il en réfulte qu'on ne
perfec-
peut perfe&ionner le langage fans
tionner la fcience ni la fcience fans le
lai1gage)& que quelque certains que fuffent
les faits, quelque juftes que fuffent les
idées qu'ils auraient fait naître, ils ne
tranfinettroient encore que des impref-
fions falunes, fi nous n'avions pas des
expreflîons exa&es pour les rendre.
La première partie de ce Traité four-
nira à ceux qui voudront bien le méditer,
des preuves fréquentes de ces vérités
mais comme je me fuis vu forcé' d'y fui-
vre un ordre qui differe effentieilement
de celui qui a été adopté jufqu'à préfent
dans tous les ouvrages de Chimie, je dois
compte des motifs qui m'y ont déterminé.
C'eft un principe bien conflant, & dont
la généralité eft bien reconnue dans les
mathématiqués comme dans tous les
genres de connoiffances que nous ne
pouvons procéder pour nous inftruïre,
que du connu à l'inconnu. Dans notre
première enfance nos idées viennent de
nos befoins la fenfation de nos befoins
fait naître l'idée des objets propres à les
fatisfaire, & infenfiblement par une fuite
de tentations,, d'obtervations &. d'ana-
lyfes, il fe forme une génération fuc-
ceffive d'idées toutes liées les unes aux
autres, dont un obfervateur attentif peut
même jufqu'à un certain point, retrouver
le fil & l'enchaînement,& qui conûituent
l'enfemble de ce que nous favons.
Lorfque nous nous livrons pour la
première fois à l'étude d'une fcience
nous fommes par rapport à cette fcience,
dans un état très-analogue à celui dans
lequel font les enfans, & la marche que
nous avons à îuivre eft précifément celle
que fuit la nature dans la formation de
leurs idées. De même que dans l'enfant
l'idée eft un effet de la fenfation que
c'efl la fenfation qui fait naître fidée de
même auffi pour celui qui commence à
fe livrer à l'étude des fciences phyfiques,
les idées ne doivent être qu'une confé-
quence, une fuite immédiate d'une ex-
périence ou d'une obfervation.
Qu'il me foit permis d'ajouter que celui
qui entre dans la carrière des fciences,
eft dans une fituation moins avantageuse
que l'enfant. même qui acquiert fes pre-
mières idées; fi l'enfant s'eft trompé fur
les effets falutaires ou nuifibles des objets
qui l'environnent la nature lui donne des
moyens multipliés de fe rectifier. A chaque
inilant le jugement qu'il a porté fe trouve
redreffé par l'expérience. La privation
ou la douleur viennent à la fuite d'un
jugement faux; la jouiffance & le plaifr
à la fuite d'un jugement jufte. On ne
tarde pas avec de tels maîtres à devenir
conséquente & on raifonne bientôt jufte
quand on ne peut raifonner autrement
fous peine de privation ou de fouffrance.
Il n'en eft pas de même dans fétude
& dans la pratique des fciences les faux
jugemens que nous portons, nintéreffent
ni notre exiftence ni notre bien-être
aucun intérêt phyfique ne nous oblige
de nous rectifier l'imagination au con-
traire qui tend à nous porter continuel-
lement au-delà du vrai; l'amour-propre
& la confiance en nous-mémes, qu'il fait
fi bien nous infpirer nous follicitent à
tirer des conféquences qui ne dérivent
pas immédiatement des faits en forte que
nous fommes en quelque façon intéreffés
nous féduire nous mêmes* Il n'eft
donc pas étonnant que dans les Sciences
phyfiques en général on ait fouvent
fuppofé au lieu de conclure que les
fuppofitions transmîtes d'âge en âge, foient
devenues de plus en plus impofantes par
le poids des autorités qu'elles ont a cquifes
8c qu'elles ayent enfin été adoptées &
regardées comme des vérités fondamenta-
les même par- de très-bons efprits.,
Le feul moyen de prévenir ces écarts_,
confule à fupprimer ou au moins à fim-.
pilier autant qu'il eft poffible le raifon-
nement, qui eft de nous & qui feul peut
nous égarer à le mettre continuellement
à l'épreuve de l'expérience; à ne confer-
ver que les faits qui ne font que des don-
nées de la nature, } &qui ne peuvent nous
tromper à ne chercher la vérité que dans
l'enchaînement naturel des expériences &
des obfervations de la même manière
que les Mathématiciens parviennent à la
folution d'un problême par le fimple ar-
rangement des données & en réduifant
le raifonnement à des opérations fi fun-
ples des jugemens fi courts qu'ils ne
perdent jamais de vue l'évidence qui leur
fert de guide.
Convaincu de ces vérités je me fuis
impofé la loi de ne.procéder jamais que
du connu à l'inconnu, de ne déduire
aucune conféquence qui ne dérive immé-
diatement des expériences & des obfer-
varions, & d'enchaîner les faits & les vé-
rités chimiques dans Tordre le plus pro-
pre à en faciliter fintelligence aux com-
mençans. Il étoit impoffible qu'en m'affu-
jétilfant ce plan je ne m'écartafle pas
des routes ordinaires. C'eft en effet un
défaut commun à tous les cours & à tous
les traités de Chimie de fuppofer dès
les premiers pas des connoiffances que
l'Elève ou le Le&eur ne doivent acqué-
rir que dans les leçons fubféquentes. On
commence dans prefque tous par traiter
des principes des corps par expliquerla
table des affinités, fans s'appercevoir qu'on
eft obligé de paffer en revue dès le pre-
mier jour les principaux phénomènes de
la Chimie de fe fervir d'expreffions qui
ri ont point été définies & de fuppofer
la fcience acquifè par ceux auxquels on,
le propofe de renseigner. Aufli eft il
reconnu qu'on n'apprend que peu de chofe
dans un premier cours de Chimie. qu'une
année fuffit à peine pour familiarifer l'o-
reille avec le langage les yeux avec les
appareils, & qu'il eft prefqu'impoffible de
former un Chimifte en moins de trois ou
quatre ans.
Ces inconv.éniens tienncnt moins à
la nature des chofes qu'à la forme de
l'enseignement j & c'eft ce qui m'a dé-
terminé à donner à la Chimie une mar-
che qui me paroît plus conforme à celle
de la nature. Je ne me fuis pas diffimulé
qu'en voulant éviter un genre de difficul-
tés j2 me jettois dans un autre & qu'il
me feroit impoffible de les furmonter tou-
tes mais je crois que celles qui refirent
n'appartiennent point à l'ordre que je me
fuis prefcrit; qu'elles font plutôt une fuite
de fétat d'imperfe£tion où eft encore la
Chimie. Cette fcience préfente des lacu-
nes nombreufes qui interrompent la férie
des faits, & qui exigent des raccordemens
embarraffans & difficiles. Elle n'a pas
comme la Géométrie élémentaire l'a-
vantage d'être une fcience complette &
dont toutes les parties font étroitement
liées entr'elles; mais en même tems fa
marche a&uelle eft fi rapide les faits
s'arrangent d'une manière fi heureufe dans
la do&rine moderne, que nous pouvons
efpérer, même de nos jours, de la voir
s'approcher beaucoup du degré de per-
fection qu'elle eft fufceptible d'atteindre.
Cette loi rigoureufe dont je n'ai pas
dû m'écarter de ne rien conclure au-
delà de ce que les expériences préfentent,
& de ne jamais fuppléer au filence des
faits ne m'a pas permis de comprendre
dans cet Ouvrage la partie de la Chimie
la plus fufceptible, peut-être de devenir
un jour une fcience exa£te C'eft celle qui
traite des affinités chimiques ou attraction
éle&ives. M. Geoffroy M. Gellert
M. Bergman, M. Schéele, M. de Mor-
veau, M. Kirwan & beaucoup d'autres
ont déjà raffemblé une multitude de faits
particuliers qui n'attendent plus
que la
place qui doit leur être affignée mais
les données principales manquent,
ou du
moins celles que nous avons ne font
en-
core ni affez précifes ni affez certaines.,
pour, devenir la bafe fondamentale fur
laquelle doit repofer une partie auffi im-
portante de la Chimie, La fcience des
affinités eft d'ailleurs à la Chimie ordi-
naire ce que la Géométrie tranfcendante
efl à la Géométrie élémentaire, & je n'ai
pas cru devoir compliquer par d'auili
grandes difficultés des Elémens fimples
& faciles qui feront, à ce que j'efpère,
à la portée d'un très grand nombre de
Le£leurs.
Peut-être un fentiment d'amour-propre
a-t-il, fans que je m'en rendiffe compte
à moi -même, donné du poids à ces ré-
flexions. M. de Morveau eft au moment
de publier l'article AFFINITÉ de l'Ency-
clopédie méthodique, & j'avois bien des
motifs pour redouter de travailler en con-
currence avec lui.
On ne manquera pas d'être Surpris de
ne point trouver dans un Traité élémen-
taire de Chimie un Chapitre fur les
parties conflituantes & élémentaires des
corps mais je ferai remarquer ici que
cette tendance que nous avons à vouloir
que tous les corps de la nature ne foient
compofés que de trois ou quatre élémens,
tient à un préjugé qui nous vient originai-
rement des philofophes grecs. L'admiffion
de quatre élémens qui, par la variété de
leurs proportions compofent tous les
corps que nous connoiffons } eii une pure
hypothèfe imaginée long tems avant qu'on
eût les premières notions de la Phyfique
expérimentale & de la Chimie. On na-
voit point encore de faits & fon formoit
des fyftêmes & aujourd'hui que nous
avons raffemblé des faites, il femble que
nous nous efforcions de les repouîfer,
quand ils ne quadrent pas avec nos
préjugés tant il eft vrai que le poids
de l'autorité de ces pères de la philofo-
phie humaine fe fait encore fentif 5
& qu'elle pefera fans doute encore fur les
générations à venir.
Une chofe très -remarquable, c'eft que
tout en enfeignant la do&rine des quatre
élémens il n'eft aucun Chimifte qui par
la force des faits n'ait été conduit à en
admettre un plus grand nombre. Les pre-
miers Chimiftes qui ont écrit depuis le
renouvellement des Lettres regardoient
le foufre & le fel comme des fubftance
élémentaires qui entroient dans la com
binaifon d'un grand nombre de corps
ils reconnoiffoientdonc l'exiftence de fix
élémens, au lieu de quatre. Beccherad-
mettoit trois terres & c'étoit de leur
combinaifon & de la différence des pro-
portions que réfultoit, fuivant lui la
différence qui exifte entre les fubftance
métalliques. Stahl a modifié ce fyftême
tous les Chimistes qui lui ont fuccédé fe
font permis d'y faire des changemens
même d'en imaginer d'autres mais tous
fe font laiffé entraîner à l'efprit de leur
fiècle, qui fe contentoit d'affertions fans
preuves, ou du moins qui regardoit fou-
vent comme telles de très légères pro-
babilités.
Tout
Tout ce qu'on peut dire fur le nombre
& fur la nature des élémens fe borne
fuivant moi à des difcuilîons purement
métaphyfiques ce font des problêmes
indéterminés qu'on fe propofe 'de réfou-
dre, qui font fufceptibles d'une infinité
de folutions mais dont il eft très-
probable qu'aucune en particulier n'en
d'accord avec la nature. Je me contenterai
donc de dire que fi par le nom d'élém&ns
nous entendons défigner les molécules
fimples & indivifibles qui compofent les
corps, il eft probable que nous ne les
connoifibns pas que fi au contraire nous
attachons au nom d'élémens ou de prin-
cipes des corps l'idée du dernier terme
auquel parvient fanalyfe, toutes les fubf
tances que nous n'avons encore pu dé-
compofer par aucun moyen, font pour
nous des élémens; non pas que nous
puifüons affurer que ces corps que nous
regardons comme fimples, ne foient pas
eux-mêmes compofés de deux ou même
d'un plus grand nombre de principes
mais puifque ces principes ne fe féparent
jamais, ou plutôt puifque nousn'avons
aucun moyen de les féparer, ils agiffent
à notre égard à la manière des corps fim-
ples & nous ne devons les fuppofer
compofés qu'au moment où fexpérience
& l'observation nous en auront fourni la
preuve.
Ces réflexions fur la marche des idées,
s'appliquent naturellement au choix des
mots qui doivent les exprimer. Guidé
par le travail que nous avons fait en
commun en 1787, M. de Morveau,
M. Berthollet, M. de Fourcroy & moi
fur la Nomenclature de la Chimie j'ai
défigné autant que je l'ai pu les fubftances
fimples par des mots £impies, & ce font
elles que j'ai été obligé de nommer les pre-
mières. On peut fe rappeller que nous
nous fommes efforcés de conferver à
toutes ces fubftances les noms qu'elles
portent dans la fociété nous ne nous
femmes permis de les changer que dans
deux cas le premier à fégard des fubf-
tances nouvellement découvertes & qui
n'avoient point encore été nommées, ou
du moins pour celles qui ne favoient été
que depuis peu de tems, & dont les noms
encore nouveaux n avoient point été fanc-
tionnés par une adoption générale le
fecond lorfque les noms adoptés foit
par les anciens, foit par les modernes,
nous ont paru entraîner des idées évidem-
ment fauffes lorfqu'ils pouvoient faire
confondre la fubftance qu'ils défignoient
avec d'autres qui font douées de pro-
priétés différentes ou oppofées. Nous
n'avons fait alors aucune difficulté de
leur en fubftituer d'autres que nous avons
empruntés principalement du Grec nous
avons fait en forte qu'ils exprimaffent la
propriété la plus générale, la plus carac
tériflique de la fubftance & nous y avons
trouvé l'avantage de foulager la mémoire
des commençans qui retiennent difficile-
ment un mot nouveau lorfqu'il eft abfo-
lument vuide de fens, & de les accou-
tumer de bonne heure à n'admettre aucun
mot fans y attacher une idée.
A l'égard des corps qui font formés
de la réunion de plufieurs fubftances fini-
ples nous les avons défignés par des
noms conipofés comme le font les fubf-
tances -elles-mêmes mais comme le nom-
bre des combinaifons binaires eu: déjà
très-confidérable nous ferions tombés
dans le défordre & dans la confufion, fi
nous ne nous fùflions pas attachés à former
des claffes. Le nom de claffes & de genres
eft dans l'ordre naturel des idées, celui
qui rappelle la propriété commune à un
grand nombre d'individus celui d'efpèces
au contraire eu: celui qui ramène
f idée
aux propriétés particulières à quelques
individus.
Ces diftin&ionsne foilt pas faites comme
on pourroit le penfer, feulement par la
métaphyfique elles le font par la nature.
Un enfant dit l'Abbé de Gondillac
appelle du nom d'arbre le premier arbre
que nous lui montrons. Un fecoud arbre
qu'il voit enfuite lui rappelle la même
idée il lui donne le même nom de
même à un troifième, à un quatrième
& voilà le mot d'arbre donné d'abord à
un individu qui devient pour lui un nom
de claffe ou de genre, une idée abstraite
qui comprend tous les arbres en général.
Mais lorfque nous lui aurons fait remar-
quer que tous les arbres ne fervent pas
aux mêmes ufages que tous ne portent
pas les mêmes fruits, il apprendra bientôt
à les diftinguer par des noms fpécifiques
& particuliers. Cette logique eft celle de
toutes les fciences elle s'applique natu-
rellement à la Chimie.
Les acides, par exemple, font compofés
de deux fubftances de l'ordre de celles
que nous regardons comme fimples l'une
qui conftitue l'acidité & qui eft commune
tous c'eft de cette fubftance que doit
être emprunté le nom de claffe ou de
genre l'autre qui eft propre à chaque
acide, qui les différencie les uns des
autres, & c'eft de cette fubftances que doit
être emprunté le nom fpécifique.
Mais dans la plupart des acides, les deux
principes conftituans, le principe acidifiant
& le principe acidifié, peuvent exifler
dans des proportions différentes, qui conO
tituent toutes des points d'équilibre ou de
faturation ceft ce qu'on obferve dans
l'acide fulfurique & dans l'acide fulfu-
reux nous avons exprimé ces deux états
du même acide en faifant varier la ter-
minaifon du nom fpécifique.
Les fubfiances métalliques qui ont été
expofées à l'a&ion réunie de fair & du
feu 3 perdent leur éclat métallique, aug-
mentent de poids & prennent une appa-
rence terreufe; elles font dans cet état
coxnpofées comme les acides, d'un prin-
cipe qui. eft commun à toutes & d'un
principe particulier propre à chacune
nous avons dû également les claffer fous
un nom générique dérivé du principe
commun 5 & le nom que nous avons
adopté eft celui d'oxide; nous les avons
enfuite différenciéesles unes des autres par
le nom particulier du métal auquel elles
appartiennent.
Les fubftances comhuftibles qui dans
les acides & dans les oxides métalliques,
font un principe fpécifique & particulier,
font fufceptibles de devenir à leur tour
un principe commun à un grand nombre
de fubflances. Les combinaifons fulfu-
reufes ont été long-temps les feules con-
nues en ce genre on fait aujourd'hui,
d'après les expériences de MM. Vander-
monde, Monge & Berthollet, que le
charbon fe combine avec le fer, & peut-
être avec plufleurs autres métaux; qu'il
en réfulte, fuivant les proportions de
facier, de la plombagine, &c. On fa":
également, d'après les expériences de
Iifl. Pelletier, que le phofphore fe com-
bine avec un grand nombre de fubftances
métalliques. Nous avons encore raffem-
blé ces différentes combinaifons fous des
noms génériques dérivés de celui de la
fubftance commune avec une terminai-
fon qui rappelle cette analogie, & nous
les avons fpecifiées par un autre nom
dérivé de leur fubftance propre.
La nomenclature des êtres compofés
de trois fubftances firnples préfentoit un
peu plus de difficultés en raifon de leur
nombre & fur-tout parce qu'on ne peut
exprimer la nature de leurs principes conf-
tituans, fans employer des noms plus com-
pofés. Nous avons eu à confidérer dans
les corps qui forment cette clàie, tels
que les fels neutres, par exemple, i°. le
principe acidifiant qui eft commun à tous
s°. le principe acidrf-iable qui conftitue
leur acide propre 3°. la bafe faline, ter-
reufe, ou métallique qui détermine l'ef-
pèce particulière de fel. Nous avons em-
prunté le nom de chaque claffe de fels de
celui du principe acidifiable commun à
tous les individus de la claffe; nous avons
enfuite diftingué- chaque efpèce par le
nom delà bafe faline, terreufe, ou mé
tallique, qui lui eft particulière.
Un fel, quoique compofê des trois
mêmes principes, peut être cependant
dans des états très-diiFérens par. la feule
différence de leur proportion. La no-
menclature que nous avons adoptée au-
roit été défectueuse fi elle n'eût pas expri-
mé ces différens états, & nous y fommes
principalement parvenus par des change-
mens de terminaïfon que nous avons rendu
uniformes pour un même état des diffé-
rens fels.
Enfin nous fommes arrivés au point
que par le mot feul on reconnoît fur le
champ quelle eft la fubftances combuftible
qui entre dans la combinaifon dont il eft
queftion; fi cette fubftance combuftible
eft combinée avec le principe acidifiant,
& dans quelle proportion; dans quel état
eft cet acide à quélle bafe il eft uni s'il
y a faturation exa&e fi c'eft facide, ou
bien la bafe qui eft en excès.
.On conçoit qu'il n'a pas été poffible
de remplir ces différentes vues fans bléf-
fer quelquefois des ufages reçus &
fans adopter des dénominations qui ont
paru dures & barbares dans le premier
moment mais nous avons obfervé que
l'oreille s'accoutumoit promptement aux
mots nouveaux, fur tout lorfqu ils fe trou-
voient liés à un fyftême général & rai-
fonné. Les noms au furplus qui s'em-
ployoient avant nous tels que ceux de
poudre d'algaroth, de fél akmbràth de
pompAoiix3 d'eau phagédénique} de turbith
minéral, de colccthar 3 & beaucoup d'au-
tres, ne font ni moins durs ni moins ex-
.traordinaires il faut une grande habitude
& beaucoup de mémoire pour fe rappeller
les fubftances qu'ils expriment, & fur-
tout pour reconnoître à quel genre de
combinaifon ils appartiennent. Les noms
a huile de tartre par d'huile de
vitriol de beurre d'arfénic & d'antimoine,
de fl'eurs de Tpic t &c. font plus impro-
pres encore, parce qu'ils font naître des
idées fauffes parce qu'il n'exifte, à pro-
prement parler, dans le règne minéral,
& fur-tout dans le règne métallique, ni
beurres, ni huiles, ni fleurs; enfin parce
que les fubftances quoi défigne fous ces
noms trompeurs font de violens poifons.
On nous a reproché lorfque nous avons
publié notre Eflai de Nomenclature chi-
mique, d'avoir changé la langue que nos
maîtres axit parlée qu'ils ont illufirée &
qu'ils nous ont tranfmife mais on a ou-
blié que c'étoient Bergman & Macquer
qui avoient eux-mêmes follicité cette ré-
forme. Le .(avant Profeffeur d'UpCaI
M. Bergman, écrivoit à M. de Morveau
dans les derniers temps de fa vie ne faites
grace à aucune dénomination impropre
ceux qui favent déjà entendront toujours;
ceux qui ne favent pas encore, entendront
plus tôt.
Peut-être feroit-on plus fondé à me
reprocher de n'avoir donné dans l'Ou-
vrage que je préfente au Public, aucun
hiftorique de l'opinion de ceux qui m'ont
précédé; de n'avoir préfenté que la mienne
fans difcuter celle des autres. Il en eft
réfultC que je n'ai pas toujours rendu à
mes confrères encore moins aux Chi-
miftes étrangers, la juftice qûil étoit dans
mon intention de leur rendre mais je
prie le Lecteur de confidérer que fi l'on
accumuloit les citations dans un ouvrage
élémentaire, fi l'on s'y livroit à de lon-
gues difcufïions fur fhiflorique de la
fcience & fur les travaux de ceux qui
l'ont profeffée on perdroit de vue le vé-
ritable objet qu'on s'eft propofé, & l'on
formeroit un ouvrage d'une lecture tout-
à-fait faflidieufe pour les commençans.
Ce n'eft ni l'hiftoire de la fcience, ni celle
de l'efprit humain qu'on doit faire dans
un traité élémentaire on ne doit y cher-
cher que la facilité, la clarté on en doit
foigneufement écarter tout ce qui pour-
roit tendre à détourner l'attention. Ceft
un chemin qu'il faut continuellement ap-
planir dans lequel il ne faut laiffer fub-
fifter aucun obftacle qui punie apporter
le moindre retard. Les fciences préfentent
déjà par elles-mêmes affez de difficultés,
fans e nappeller encore qui leur font
étrangères. Les Chïmïftes s'appercevfont
facilement d'ailleurs que je n'ai prefque fait
ufage dans la première partie que des ex-
périences qui me font propres. Si quelque-
fois il a pu m'échapper d'adopter, fans
les citer, les expériences ou les opinions
de M. Berthollet de M. de Fourcroy
de M. de la Place de M. Monge & de
ceux en général qui ont adopté les mêmes
principes que moi c'eft que l'habitude
de vivre enfemble de nous communi-
quer nos idées, nos obfervations notre
manière de voir a établi entre nous une
forte de communauté d'opinions dans la-
quelle il nous eft fouvent difficile à nous-
mêmes de diftinguer ce qui nous appar-
tient plus particulièrement.
Tout ce que je viens d'expofer fur for-
dre que je me fuis efforcé de fuivre dans
la marche des preuves & des idées ridt
applicable qu'à la première partie de cet
ouvrage c'eft elle feule qui contient Ten-
femble de la doctrine que j'ai adoptée
c'eft à elle feule que j'ai cherché à donner
la forme véritablement élémentaire.
La feconde partie eft principalement
formée des tableaux de la nomenclature
des fels neutres. J'y ai joint feulement
des explications très fommaires dont
l'objet eft de faire connoître les procédés
les plus fimples pour obtenir les différentes
efpèces d'acides connus cette feconde
partie ne contient rien qui me foit prc-
pre elle ne préfente qu'un abrégé très-
concis de réfultats extraits de différens
ouvrages.
Enfin j'ai donné dans la troifième partie
une defcription détaillée de toutes les
opérations relatives à la Chimie moderne.
Un ouvrage de ce genre paroiffoit def ré
depuis long-temps & je crois qu'il fera
de quelqu'utilité. En général la pratique
des expériences, & fur-tout des expé-
riences modernes, } neft point affez répan-
due & peut-être fi, dans les différens
Mémoires que j'ai donnés à fAcadémie, je
me fuffe étendu davantage fur le détail des
manipulations me ferois-je fait plus fa-
cilement entendre & la fcience auroit-
elle fait des progrès plus rapides. L'tordre
des matières dans cette troifième partie
m'a paru à-peu-près arbitraire & je me
fuis feulement attaché à claffer dans chab
cun des huit chapitres qui la compofent
les opérations qui ont enfemble le plus
d'analogie. On s'appercevra aifément que
cette troifième partie n'a pu être extraite
d'aucun ouvrage & que dans les articles
principaux, je n'ai pu être aidé que de
ma propre expérience.
Je terminerai ce Difcours préliminaire
en tranfcrivantlittéralement quelques paf-
fages de M. l'Abbé de Condillac, qui me
paroiffent peindre avec beaucoup de vé-
rité l'état où étoit la Chimie dans des
temps très-rapprochés du nôtre (1). Ces
paffages qui n'ont point été faits exprès
n'en acquerront que plus de force, fi
fapplication en paroît jufte.
« Au lieu d'obferver les chofes que
» nous voulions connoître, nous avons
» voulu les imaginer. De fuppolition
» fauffe en fuppofition fauffe, nous nous
» fommes égarés parmi une multitude
» d'erreurs; & ces erreurs étant deve-
» nues des préjugés, nous les avons prifes
» par cette raifon pour des principes
? nous nous fommes donc égarés de plus
» en plus. Alors nous n'avons fu raifonner
» que d'après les mauvaifes habitudes que
» nous avions contractées. L'art d'abufer
» des mots fans les bien entendre a été pour
» nous l'art de raifonner. Quand
» les chofes font parvenues à ce point,
» quand les erreurs fe font ainfi accumu-
» lées il n'y a qu'un moyen de remettre
» l'ordre dans la faculté de penfer c'eft
» d'oublier tout ce que nous avons ap-

(i) Partie a, Chapitre I.


1)
prisde reprendre nos idées à leur ori-
gine, d'en fuivre la génération, & de
refaire, comme dit Bacon, l'entende-
» ment humain.
p Ce moyen eft d'autant plus difficile,
» qu'on fe croit plus inftruit. Auffi des
» Ouvrages où les fciences feroient trai-
» tées avec une grande netteté une
» grande précifion, un grand ordre f ne
o feroient-ils pas à la portée de tout le
» monde. Ceux qui n-auraient rien étu-
» dié les entendroient mieux que ceux
» qui ont fait de grandes études, & fur-
tout que ceux qui ont écrit beaucoup
» fur les fciences ».
M. l'Abbé de Condillac -ajoute à la fiu
du chapitre V « Mais enfin les fciences
p ont fait des progrès parce que les
Philofophes ont mieux obfer vé, & qu'ils
0 ont mis dans leur langage la précifion
» & fexa&itude qu'ils avoient mifes dans
» leurs obfervations ils ont corrigé la
» langue, & fon a mieux raifonné

TABLE
TABLE
DES CHAPITRES
DU TOME PREMIER.

DISCOURS préliminaire, page v

PREMIERE PARTIE.
De la formation des fluides aériformes
& de leur decompq/ition; de la combuf-
tion des corps /impies & de la formation
des acides.

CHAP. 1. Des combinaifons du calorique & de


la formation, des fluides èlafliqiies aérifor-
mes 1
CHAP. II. Vues généralesfur la formation. & la
confiitution de Catmofphère de la terre, 28
CHAP. nI. Analyfe de l'air de Vatmofphère
fa rêfolution en deux fluides élafiiques l'un
refpirable l'autre non refpirable 35
CBAP. IV. Nomenclature des différentes parties
confiitutives de Pair de l'atmojphère Si
CHAP. V. De la décompoftion duga^ ox*egène
par le foufre le phofphore & le charbon,
je la formation des acides en général S7
CHAP. VI. De la nomenclature des Acides en
général, & particulièrement de ceux tirés dû
falpétre & du fel marin 70
CHAP. VII. De la décompofiàondu Ga% oxy-
gène par les métaux & de la formation des
Oxidef, métalliques 82

CHAP. VIII. Du principe radical de l'Eau, €


de fa décompofition par le charbon & par
le fer, 87

CHAP. IX. De la quantité de Calorique qui fe


dégage des différentes efpèces de combufiion
103
Comiujlion. du Charbon, 108
Combufiion du Gal hydrogène, io9
Formation de l'Acide nitrique, lbid.
ComlufiioA de la Bougie, m
Combuflion de l'Huile d'olite, 11 j
Chap. X. De la combinaifin des Subfiances
combufiibles les unes avec les autres, 116
CRAP. XI. Confidérutâons fur les Oxides & les
Acides à plufieurs baf es & fur la compofz-
tion des matières végétales & animales 123
Chap. XII. De la décompofidon. des matières
végétales & animales par l'action du feu, 132
CHAP. XIII. De la décompofition. des Oxides
vegétaux par la fermentation vineufz, i^p
CHAP. XIV. De la fermentation putride, t if%
CHAP. XV. De la fermentation acéteufe ijp
Chap. XVI. De la formation des Sels neutres
6 des différentes hafes qui entrent dans leur
cowpqfition x6z
De la PotaJJè, x^
De la Soude X69
De l'Ammoniaque I7O
De la Chaux, de la Magnefie, de la Baryte & de
l'Alumine, I7i
Des Suhjknces métalliques, 173
Chap. XVII. Suite des réflexions fur les bafes
Jalifiables & far la formation des Sels neu-
tres, xjp
SECONDE PARTIE.
De la Combinaifon des Acides avec les
bafes falifLabhs & de la Formation
des Sels neutres.

AVEKTISS E M EN T, i89

T AS LE au des Subftances Jîmples ï$2


Ohf ervations 19$
Tableau des Radicaux ort bafes oxidables &
acidifiables, compofés, qui entrent dans les
combinaifonsà la manière des fubjlances fim-
pies X$6
Obfervat'ons 197
Qhfervat ons fur les combinaifons de la lumière & du
calorique avec différences fubflances, zoo
Tableau des combinaifons binaires de l'oxygène
avec les fubjlances métalliques & non métal
liques oxidables & acidifiables, 203
Obfervations, ibid.
Tableau des combinaifons de l'Oxygène avec les
radicaux compofés 208
Qbfervations î05
Tableau des combinaifons binaires de l'Azote
avec les fubflances fimples 21a
Obferv axions 115
Tableau des combinaifons binaires de VHydro-.
gène avec les fubflances }impies, 216
Objervations, 217
Tableau des combinaifons binaires du Soufre non
oxygéné avec les Jùbflances fimples 22o
Obfervations
Tableau des combinaifons binaires du Phofphore
non oxygéné avec les fubflances fimples 222
Obfervations
z'3
Tableau des combinaifons binaires du Charbon.
non oxygéné avec les fubflances fmples, 1 226
Observations %t.j
Obfervat'ons fur les radicaux muriatique, fluorique
fr boracique, & fur leurs combinaifons, np
Obfervav'ons fur la combinailon des métaux les uns
avec les autres 230
Tableau des combinaifonsde VA^ote ou Radical
nitrique porté à l'état d'acide nitreux par la
combinaifon. d'une fuffifante quantité d'o.xy-
gène avec les bafes falifiables dans l'ordre
de leur affinité avec cet acide, 231
Tableau des combinaifons de tA^ate cotnphtte-
ment faturé dïoxigène 6* porté à l'état d'a-
cide nitrique avec les bafes falifiables, dans
l'ordre de leur affinité avec cet acide, 232
Obfervations

Tableau des combinaifons de ¡: Acide fulfurique


ou Soufre oxygéné avec les bafes falifiables
dans l'ordre de leur affinité avec cet acide,
par la voie humide, 23S
Obfervations M°
Tableau des combinaifons de l'Acide fizlfureux
avec les bafes falifiables dans l'ordre de leur
affinité avec cet acide, 243
Obfervations, 44+
Talleau des combinai/ansdu Tkojphore quia recu
un premier degré d'oxygénation & qui a été
porté à l'état d'Acide phojphoreux avec les
bafesfalifiablesdans l'ordre de leur affinité avec
cet acide, 246
Tableau des combinaifons dit Phofphore faturé
d'oxygène, ou Acide phofphorique avec les
fnbjlances falifiables dans tordre de leur
affinité avec cet acide, 2^7
Obfervations M**
Tableau des combinaifons du Radical carboni-
que oxygéné ou Acide carbonique avec les
bafes- falifiables dans l'ordre de leur affinité
avec cet acide 2JO
Olfervaxions ^5*
Tableau des combinai/ans du Radical muriatique
oxjyeéné, ou Acide muriatique avec les bafes
falifiables dans l'ordre de leur affinité avec
cet acide 25%

Tableau des combinaifonsde l'Acide muriatique


oxigéné avec les différentes baf falifiables
avec lef quelles il efl fufcepùble de s'unir 2f 4
Olfervaùons "*
Tableau des combinaifons de l'Acide nitro-
muriatique avec les bafes falifiables rangées
par ordre alphabétique, attendu que les affi-
nités de cet acide ne font point ajfe^ con-
nues, 258
Observations *f£
Tableau des combinaifons du Radical fluorique.
oxigéné, ou Acide fluorique avec les bafes
falifiables dans l'ordre de leur affinité avec
cet acide 26r
Qbfervations, *6<
Tableau des combinaifons du Radical boracique
oxigéné, avec les différentes bafes Jalifiables
auxquelles il efl fufcepùble de s'unir dans
l'ordre de leur affinité avec cet acide 26^
Observations z6f
Tableau des combinaifons de l'Arfenic oxygéné
ou Acide arfenique avec les bafes faisables
dans l'ordre de leur affinité avec cet acide 2C8
Observations z6g
Tableau des combinaifons du Molybdène oxy-
géné ou Acide molybdique avec les bafes
falifiables par ordre alphabétique, 272
Obfervations 173
Tableau des combinaifons du Tungflène oxy-
géné, ou Acide tungjlique avec les bafes fa-
lifiables, 27g
Obfervations, %t%
Tableau des combinaifons du Radical tartareux
oxygéné ou Acide tartareux avec les bafes
falifiables dans l'ordre de leur affinité avec
cet acide 277
Obfervations, 178
Tableau des combinaifons du Radical malique
oxygéné, ou Acide malique avec les bafes
faliyables par ordre alphabétique 281
Observations 18»
Tableau des combinaifons du Radical citrique
oxygéné ou Acide citrique avec les bafes
falifiables,, dans l'ordre de leur affinité avec
cet acide 284
Obfervatlons a8y
Tableau des combinaifons du Radical pyro-
ligneux oxygéne ou Acide pyro li gneux
avec les bafes falifiables dans l'ordre de leur
affinité avec cet acide 286
Obfervations

Tableau des combinaifons du Radical pyro-


tartareux oxygéné ou Acide pyro-tartareux
avec les différentes bafes falifiables dans tor-
dre de leur affinité avec cet acide, 288
Obfervations 285
Tableau des combinaifons du .Radical pyro-mu-
queux oxygéné, ou Acidepyro- muqueux avec
les bafesfalifiables, dans l'ordre de leur affi-
nité avec cet acide, apo
Observations 19*
Table.au des combinaifons du Radical ôxagque
oxygéné ou Acide oxalique avec les bafes
falifiables dans l'ordre de leur affinité avec
cet acide 2£2
Obfervations z?î
Tableau des combinaifons du Radical crcéteux
oxygéné par un premier degré d'oxigéna-
tion avec les bafes falifiables fuivant l'ordre
de leur affinité avec cet acide, 2.9 f

Olfervatïons 2$
Tableau des combinai/ans du Radical acéteux
oxygéné par un fecond degré d'oxygénation
ou Acide acétique avec les bafes falifiables
dans l'ordre de leuraffinitéavec cet.acide, 298
Obfervations a^p
Tableau des combinaifons du Radical Jhccini-
que oxygéné, ou Acide fuccïniaue avec les
lafes Jalifiables dans l'ordre de leur affinité
avec cet acide. 300
Olfervatïons 301
Tableau des combinaifons du Radical bentoique
oxygéné, ou Acide ben^oïque avec les diffé-
rentes bafes falifiables rangées par ordre al-
phabétique, 302
Olfervatïons 3°2
Tableau des combinaifons du Radical campho-
rique oxygéné, ou Acide camphorique avec
les bafes falifiables ,par ordre alphabétiqu e, 3 04
Obfervanons 3°5
Tableau des combinaifons du Radical gal-
lique oxygéné ou Acide gallique, avec
les bafes falifiables rangées par ordre alpha-
bétique, 3c6
Obfervations, 3°7
Tableau des cotnbinaifons du Radical lactique
oxygéné ou Acide lactique avec les bafes
falifiables par ordre alphabétique, ^08
Ohfervatims 309
Tableau des cotnbinaifons du Radical faccizo-
laSiqus oxygéné ou Acide facckolaSique
avec les bafes falifiables dans l'ordre de leur
affinité avec cet acide 3' la
Observations -311
Tableau des combinaifons du Radical forrrtique
oxygéné, ou Acide formique avec les bafes
falifiables dans l'ordre de leur affinité avec
cet acide 312
Obfervations 313
Tableau des combinaifons dit Radical bom-
bique oxygéné, ou Acide bombique, avec les
fubfiances falifiables par ordre alphabéti-
que
Obfervations 3 r
Tableau des cotnhinaifons du Radical féba~
cique oxygéné ou Acide fébacique avec les
bafes falifiabtes dans l'ordre de leur affinité
avec cet acide sjQ
Obfervatîons 317
Tableau des conibinaifons du Radical lithique
oxygéné, ou Acide lithique, avec les bafes
falifiables rangées par ordre alphabéti-
que, 318
Olfervations t 319
Tableau des combinaifons dit Radical prujji-
que oxygéné, ou Acide pruffiqueavec les bafes
falifiables dans l'ordre de leur affinité avec
cet acide
Obfervations j 3 a*

TRAITÉ
TRAITÉ
ÉLÉMENTAIRE
DE CHIMIE.
PREMIERE PARTIE.
De la formation des fluides aériformes
& de leur décompofition de la combuf-
tion des corps fimples & de la formation
des acides.

CHAPITRE PREMIER.
Des combinai/ans du calorique & de la forma-
tion des fluides elafliques aériformes.
Vj'Est un phénomène conflant dans la nature
Se dont la généralité a été bien établie par
Boerhaave, que lorsqu'on échauffe un corps
quelconque, folide ou fluide, il augmente de
dïmenfîon dans tous les fens. Les faits fur lef-
quels on s'eu: fondé pour reftreindre la géné-
ralité de ce principe, ne préfentent que des
réfultats illufoires, ou du moins dans lefquels
fe compliquent des circonftances étrangères
qui en impofent mais lorfqu'on eft parvenu à
féparer les effets & à les rapporter chacun à
la caufe à laquelle ils appartiennent, on s'ap-
perçoit que Pécartement des molécules pat
la chaleur, eft une loi générale & confiante de
la Nature.
Si après avoir échauffé jufqu'à un certain
point un corps folide & en avoir ainfi écarté
de plus en plus toutes les molécules, on le
laiffe refroidir, ces mêmes molécules fe rap-
prochent les unes des autres dans la même
proportion fuivant laquelle elles avoient été
écartées le corps repafle par les mêmes de-
grés d'extenfion qu'il avoit parcourus; & f on
le ramène à la rctême température qu'il avoit
en commençant l'expérience, -il reprend fenfi-
blement le volume qu'il avoit d'abord. Mais
comme nous fommes bien éloignés de pouvoir
obtenir un degré de froid abfolu, comme nous
ne connoiffbns aucun degré de refroidiffèraent
que nous ne puiffions fuppofer fufceptible
d'être augmenté, il en réfulte que nous n'avons
pas encore pu parvenir à rapprocher le plus
qu'il efl poffible, les molécules d'aucun corps,
& que par conféquent les molécules d'aucun
corps ne fe touchent dans la Nature conclu-
fon très-fingulière & à laquelle cependant il eft
impoffible de fe refufer.
On conçoit que les molécules des corps
étant ainf continuellement follicitées par la cha-
leur à s'écarter les unes des autres, elles n'au-
roient aucune liai[on entr'elles, & qu'il n'y
auroit aucun corps folide fi elles n'étoient re-
tenues par une autre force qui tendit à les réu-
nir, & pour ainf dire à les enchaîner j & cette
force, quelle qu'en foit la caufe, a été nommée
attraélion
Ainf Ies molécules des corps peuvent être
confidérées comme obéiflant à deux forces
l'une répulfive, l'autre attractive, entre lef-
quelles elles font en équilibre. Tant que la
dernière de ces forces, l'attraction eft viflo
xieufe le corps demeure dans l'état folide fi
au contraire l'attraélion eft la plus foible, fi la
chaleur a tellement écarté les unes des autres
les molécules du corps qu'elles foient hors
de la fphère d'aâivïté de leur attradion elles
perdent l'adhérence qu'elles avoient entr'elles
Se le corps ceffe d'être un folide.
L'eau nous préfente continuellement un
exemple de ces phénomènes au-de1fous de
zéro du thermomètre françois elle eft dans
l'état folide, & elle porte le nom de glace au-
deifus de ce même terme fes molécules cef
fent d'être retenues par leur attrafiion récipro-
que. Se elle devient ce qu'on appelle un liquide
enfin au-deffus de 80 degrés, fes molécules
obéâtfent à la répulfon occaGonnée par la cha-
leur; Peau prend fétat de vapeur ou de gaz,
& elle fe transforme en un fluide aériforrne.
On en peut dire autant de tous les corps
de la Nature ils font ou folides, ou liquides,
ou dans l'état élàflique & aériforme, fuivant le
rapport qui exifle -entre la force attraétive de
leurs molécules & la force répulfive de la cha-
leur, ou, ce qui revient au même, fuivant le
degré de chaleur auquel ils font expofés.
Il eft difficile de concevoir ces phénomènes
fans admettre qu'ils font l'effet d'une fubftance
réelle & matérielle, d'un fluide très-fubtil qui
s'inf nue à travers les molécules de tous les
corps & qui les écarte & en fuppofant même
que fexiflence de ce fluide fût une hypothèfe,
on verra dans la fuite qu'elle explique d'une
manière très-heureufe les phénomènes de la
Nature.
Cette fubftance quelle qu'elle foit, étant
la caufe de la chaleur ou en d'autres termes
la fenfation que nous appellons chaleur, étant
l'effet de l'accumulation de cette fubftance, on
ne peut pas dans un langage rigoureux, la
défigner par le nom de chaleur; parce que la
même dénomination ne peut pas exprimer la
caufe & l'effet. Cefl: ce qui m'avoit déter-
miné, dans le Mémoire que j'ai publié en 1777
( Recueil de V
page 420 } à la défi-
Académie
gner fous le nom de fluide igné & de matière
de la chaleur. Depuis, dans le travail que non
avons fait en commun IVL de Morveau, M.
Berthollet M. de Fourcroy & moi, fur la
réforme du langage chimique, nous avons cru
devoir bannir ces périphrafes qui allongent le
difcours qui le rendent plus traînant moins
précis, moins clair, & qui [auvent même ne
comportent pas des idées fuffifamment juftes.
Nous avons en conféquence défigné la caufe de
la chaleur, le fluide éminemment élaftique qui
la produit, par le nom de catorique. Indépen-
damment de ce que cette expreffion remplit
notre objet dans le fyflême que nous avons
adopté elle a encore un autre avantage, c'eft
de pouvoir s'adapter à toutes fortes d'opinions 5
ptûfque rigoureufement parlant, nous ne fom-
mes pas même obligés de fuppofer que le calo-
rique foit une matière réelle il fuffit comme
on le fentira mieux par la le&ure de ce qui
va fuivre, que ce foit une caufe répulfve quel-
conque qui écarte les molécules de la matière,
& on peut àinfi en envifager les effets d'une
manière abftraite & mathématique.
La lumière eft-elle une modification du ca-
lorique, ou bien le calorique eft-ilune modi-
fication de la lumière C'eft fur quoi il eft im-
poffible de prononcer dans l'état actuel de nos
connoiffances. Ce qu'iI y a de certain, c'efl que
dans un fyflême où l'on s'eft fait une loi de
n'admettre que des faits & où l'on évite au-
tant qu'il eft poffible de rien fuppofer au-delà
de ce qu'ils préfentent, on doit provifoirement
défigner par des noms différens, ce qui pro-
duit des effets différens. Nous diffinguerons
donc la lumière du calorique mais nous n'en
conviendrons pas moins que la lumière & le
calorique ont des qualités qui leur font coin-
munes, & que dans quelques circonstances ils
fe combinent à peu près de la même manière,
& produifent une partie des mêmes effets.
Ce que je viens de dire fùfSroit déjà pour
bien déterminer l'idée qu'on doit attacher au
mot de calorique. Mais il me refle une tâche
plus difficile à remplir, cefl de donner des
idées juftes de la manière dont le calorique
agit fur les corps. Puifque cette matière fub-
tile pénètre à travers les pores de toutes les
fubilances que nous connoiffons puirqu'il
n'exige pas de va_fes à travers lefquels elle ne
s'éclzappe, & qu'il n'en eft par conféquent aucun
qui puifre la contenir fans perte; on ne peut en
connoître les propriétés que par des effets qui
la plupart, font fugitifs & difficiles à faifir.
C'eft fur les chofes qu'on ne peut ni voir, ni
palper, qu'il eft fur-tout important de fe tenir
en garde contre les écarts de l'imagination, qui
tend toujours à s'élancer au-delà du vrai, & qu'
a bien de la peine à fe renfermer dans le cercle
étroit que les faits lui circonfcrivent.
Nous venons de voir que le même corps
devenoit folide ou liquide, ou fluide aériforme
fuivant la quantité de calorique dont il étoit
pénétré, ou, pour parler d'une manière plus
rigoureufe fuivant que la force répulfive du
calorique étoit égale à l'attradion de fes molé-
cules, ou qu'elle étoit plus forte, ou plus foible
qu'elle.
Mais s'il n'exiftoit que ces deux forces, les
corps ne feroient liquides qu'à un degré indi-
vifib'ie du thermomètre, & ils pafferoient bruf-
quement de l'état de folide à celui de fluide
élaftique aériforme. Ainf l'eau, par exemple, à
l'inftant même où elle ceife d'être glace, com-
menceroit à bouillir elle fe transformeroit en
un fluide aériforme, & fes molécules s'écarte-
roient indéhniment dans l'efpace s'il n'en eft
pas ainf c'eft qu'une troiuème force,la prefliort
de l'atmofphère, met obftacle à cet écarte-
ment, & c'eft par cette raifon que l'eau de-
meure dans l'état fluide depuis zéro jufqu'à 80
degrés du thermomètre françois la quantité
de calorique qu'elle reçoit dans cet intervalle eft
infuffifante pour vaincre l'effort occafionné par
la preffion de l'atmofphère.
On voit donc que, fans la preflion de l'at-
mofphere nous n'aurions pas de liquide conf-
tant nous ne verrions les corps dans cet état
qu'au moment précis où ils fe fondent la
moindre augmentation de chaleur qu'ils rece-
vroient enfuire en écaneroit fur le champ les
parties & les difperferoit. Il y a plus fans
la preffion de l'atmofphère, nous n'aurions pas
à proprement parler, de fluides aériformes. En
effet, au moment où la force de l'attraction
feroit vaincue par la force répulfive du calo-
rique, les molécules s'éloigneroient indéfini-
mént, fans que rien limitât leur écartement, fi ce
n'efl leur propre pefanteur qui les raîïèmble-
roit pour former une atmofphère.
De fmples réflexions fur les expériences les
plus connues, fuffifent pour faire appercevoir
la vérité de ce que je viens d'énoncer. Elle fe
trouve d'ailleurs confirmée d'une manière évi-
dente par l'expérience qui fuit dont j'ai déjà
donné le détail à l'Académie en 1777. ( Voye^
Mém. page 426. )
On remplit d'éther fulfurique (1) un petit
vafe de verre étroit, A, planche VII,fig.
monté fur fon pied P. Ce vafe ne doit pas
avoir plus de douze à quinze lignes de diamètre
& environ deux pouces de hauteur. On couvre
aflu-
ce vafe avec une veille humeétée, qu'on
jettit autour du col du vafe par un grand nombre
de tours de gros fil bien ferrés pour plus grande
sûreté, on remet une feconde veille par-defîiis
la première, & on l'aflujettit de la même ma-
nière. Ce vafe doit être tellement rempli d'é-
ther qu'il ne refle aucune portion d'air entre
la liqueur & la veffie on le place enfuite fous
le récipient B C D d'une machine pneuma-
tique dont le haut B doit être garni d'une
boëte à cuir, traverfée par une tige E F dont
l'extrémité F fe termine en une pointe ou lame
très-algue: à ce même récipient doit être adapté
un baromètre G H.

(r) Je donnerai ailleurs la définition de la liqueur qu'on


propriétés. Je me
nomme éther & j'en déveloperai les
contenterai de dire dans ce moment, qu'on défigne par
très-volatile, d'une
ce nom une liqueur inflammable
pefanteur fpécifique beaucoup moindre que l'eau &
même que l'etprit-de-vin.
Lorfque tout efl ainfi difpofé, on fait le
vuide fous le récipient puis en faifant def-
cendre la tige pointue E F, on crève la veffie.
Aufli-tôt l'éther commence à bouillir avec une
étonnante rapidité, il fe vaporife & fe tranf-
forme en un fluide élaflique aériforme qui
occupe tout le récipient. Si la quantité d'éther
eft affez confdérable pour que, la vaporifation
finie, il en refle encore quelques goûtes dans
la fiole, le fluide élaffique qui s'eft produit efl
fufceptible de foutenir le baromètre adapté à
la machine pneumatique à huit ou dix pouces
environ pendant l'hiver, & à vingt & vingt-
cinq pendant les chaleurs de l'été. On peut
pour rendre cette expérience plus complette
introduire un petit thermomètre dans le vafe
A qui contient féther, & on s'apperçoit qu'il
defcend confidérablement pendant tout le tems
que dure la vaporifation.
On ne fait autre chofe dans cette expé-
rience, que de fupprimer le poids de l'atmot
phère qui, dans l'état ordinaire, pèfe fur la
furface de l'éther. & les effets qui en réfutent
prouvent évidemment deux chofes la première,
qu'au degré de température dans lequel nous
vivons l'éther feroit conilamment dans fétae
d'un fluide aériforme fi la preflîon de l'atmof-
phère n'y mettoit obftacle. La feconde que
ce pafiage de l'état liquide à fétat aériforme
eft accompagné d'un refroidiffement confidé-
rable, par la raifon que pendant la vaporifa-
tion, une partie du calorique qui étoit dans
un état de liberté, ou au moins d'équilibre
dans les corps environnans, fe combine avec
l'éther pour le porter à l'état de fluide aéri-
forme.
La même expérience réuflit avec tous les
fluides évaporables tels que l'efprit-de-vin ou
alkool, l'eau & le mercure même avec cette
différence cependant que l'atmofphère d'al-
kool qui fe forme fous le récipient ne peut
foutenir le baromètre adapté à la machine
pneumatique, en hiver, qu'à un pouce au deffus
de fon niveau, & à quatre ou cinq en été
que Peau ne le foutient qu'à quelques lignes,
& le mercure à quelques fraâions de ligne. Il
y a donc moins de fluide vaporifé lorsqu'on
opère avec falkool, que lorfqu'on opère avec
l'éther moins encore avec l'eau & fur-
tout avec le mercure par conféquent moins
de calorique employé & moins de refroidee-
ment ce qui cadre parfaitement avec le réful-
tat des expériences.
Un autre genre d'expérience prouve encore
d'une manière auffi évidente que l'état aéri-
forme eft une modification des corps & qu'elle
dépend du degré de température & de preffion
qu'ils éprouvent.
Nous avons fait voir M. de la Place &
moi, dans un Mémoire que nous avons lu à
l'Académie en 1777, mais qui n'a pas été im-
primé, que lorfque l'éther étoit foumis à une
preffion de 28 pouces de mercure, c'efl-à-dire,
à une preffion égale à celle de l'atmosphère,
il entroit en ébullition à 32 ou 33 degrés du
thermomètre de mercure. M. de Luc, qui a
fait des recherches analogues fur l'efprit-de-vin,
a reconnu qu'il éntroit en ébuIIition à 67 de-
grés. Enfin tout le monde fait que l'eau
commence à bouillir à 80 degrés. L'ébulli-
tion n'étant autre chofe que la vaporifation
d'un fluide ou le moment de fon paffage de
l'état liquide à celui d'un fluide élaflique aéri-
forme, il étoit évident qu'en tenant conHam-
ment de l'éther à une température fupérieure
à 33 degrés & au degré habituel de preffion de
l'atmosphère ) on devoit l'obtenir dans l'état d'un
fluide aériforme que la même chofe devoit
5 arriver à l'efprit-de-yin au-deflùs de 67 degrés,
& à Peau au-deffus de 80 c7eft ce qui s'eft
trouvé parfaitement confiuné par les expérien-
ces filivantes (*).

(*) Mém, Académ» 1780 page 53 y.


J'ai rempli avec de l'eau à 3S ou 36 degrés
du thermomètre un grand vafe ABCD, plan-
che VII, figure I5; je le fuppofe tranfparent
pour mieux faire fentir ce qui fe paffe dans
fon intérieur on peut encore tenir les mains
aflfez long-temps dans de l'eau à ce degré fans
s'incommoder. J'y ai plongé des bouteilles à
gouleau renverfé F, G, qui s'y font emplies,
après quoi je les ai retournées de manière
qu'elles eulfent leur gouleau en en bas &.
appliqué contre le fond du vafe.
Les chofes étant ainfi difpofées, j'ai intro-
duit de l'éther fulfurique dans un très-petit
matras, dont le col a b c étoit doublement re-
courbé j'ai plongé ce marras dans l'eau du
vafe A B C D & j'ai engagé comme on le
voit repréfenté dans la figure i5 l'extrémité
de fon col a b c dans le gouleau d'une des
bouteilles F dès que l'éther a commencé à
refièntir l'impreffion de la chaleur, il eft entré
en ébullition; & le calorique qui s'eft combiné
avec lui l'a transformé en un fluide élaflique
aériforme, dont j'ai rempli fucceffivementplu-
üeurs bouteilles F, G.
Ce n'efl: point ici le lieu d'examiner la na-
ture & les propriétés de ce fluide aériforme,
qui eft très-inflammable; mais fans anticiper
fur des connoiflànces que je ne dois pas fup-
pofer au lecteur, j'obferverai, en me fixant fur
l'objet qui nous occupe dans ce moment, que
l'éther d'après cette expérience, eft tout prêt
de ne pouvoir exifler dans la planette que nous
habitons que dans fétat aériforme, que f la
pefanteur de notre atmofphère n'équivaloit qu'à
une colonne de 20 ou 2g pouces de mercure au
lieu de 28, nous ne pourrions obtenir l'éther dans
l'état liquide, au moins pendant l'été; qne la for-
mation de l'éther feroit par conféquent impof
Cble fur les montagnes un peu élevées, & qu'il
fe convertiroit en gaz à mefure qu'il feroit
formé, à moins qu'on n'employât des ballons
très-forts pour le condenfer & qu'on ne joignît
le refroidiffement à la preffion. Enfin que le
degré de la chaleur du fang étant à peu près
celui où l'éther paffe de l'état liquide à l'état
aériforme,il doit fe vaporifer dans les premières
voies & qu'il eft très-vraifemblable que les
propriétés' de ce médicament tiennent à cet
effet, pour ainfi dire, mécanique.
Ces expérie.nces réufïment encore mieux avec
l'éther nitreux, parce qu'il fe vaporife à un de-
gré de chaleur moindre que l'éther fulfurique.
A l'égard de Palkool ou efprit-de-vin, l'expé-
rience pour l'obtenir dans l'état aériforme,
préfente un peu plus de difficulté parce que ce
fluides n'étant fufceptible de fe vaporifer qu'à
67 degrés du thermomètre de Réaumur, il faut
que l'eau du bain foit entretenue prefque bouil-
lante, & qu'à ce degré il n'eft plus poffible d'y
plonger les mains.
Il étoit évident que la même chofe devoit
arriver à l'eau; que ce fluide devoit égale-
ment fe transformer en gaz en l'expofant à
un degré de chaleur fupérieur à celui qui le
fait bouillir mais quoique convaincus de
cette vérité nous avons cru cependant, M. de
la Place & moi, devoir la confirmer par une
expérience direâe, & en voici le réfultat. Nous
avons rempli de mercure une jarre de verre
A planche VU figure 5 dont l'ouverture
étoit retournée en en bas, & nous avons paffé
deffous une foucoupe B, également remplie
de mercure. Nous avons introduit dans cette
jarre environ deux gros d'eau, qui ont gagné
le haut C D de la jarre, & qui fe font rangés
au-defïus de la furface du mercure puis
nous avons plongé le tout dans une grande
chaudière de fer E F G H, placée fur un four-
neau G H I K cette chaudière étoit remplie
d'eau falée en ébullition; dont la tempéra-
ture excédoit 8y degrés du thermomètre
on fait en effet que l'eau chargée de
fels efl fufceptible de prendre un degré de
chaleur fupérieur de plufieurs degrés à celui
de l'eau bouillante. Dès que les 2 gros d'eau,
placés dans la partie fupérieure C D de la jarre
ou tube, ont eu atteint la température de 80
degrés ou environ, ils font entrés en ébullition,
& au lieu d'occuper, comme ils le faifoient,
le petit efpace A C D, ils fe font convertis en
un fluide aériforme qui fa remplie toute en-
tière le mercure eft même defcendu un peu
au-deffous de fon niveau, & la jarre auroit
été renverfée fi elle n'avoit été très-épaifie,
par conféquent fort pefante & fi elle n'avoit
d'ailleurs été affiijettie à la foucqupe par du fil
de fer. Si-tôt qu'on retiroit la jarre du bain
d'eau falée l'eau fe condenfoit & le mercure
remontoit mais elle reprenoit l'état aériforme
quelques initans après que l'appareil avoit été
replongé.
Voilà donc un certain nombre de fubflances
qui fe transforment en fluides aériformes à des
degrés de chaleur très-voifns de ceux dans
lefquels nous vivons. Nous verrons bientôt qu'il
en eft d'autres, tels que l'acide marin ou mu-
xiatique, falkali volatil ou ammoniaque, l'acide
carbonique ou air fixe, l'acide fulfureux, &c.
qui demeurent conflamment dans l'état aéri-
forme, au degré habituel de chaleur & de
preffion de l'atmosphère.
Tous ces faits particuliers, dont il me feroit
facile
facile de multiplier les exemples, m'autorifent
à faire un principe général de ce que j'ai déjà
annoncé plus haut que prefque tous les
corps de la Nature font fufceptibles d'exif-
ter dans trois états différens dans l'état de
folidité dans l'état de liquidité, & dans l'état
aériforme, & que ces trois états d'un même
corps dépendent de la quantité de calorique
qui lui eft combinée. Je défgnerai dorénavant
ces fiuicles aériformes fous le nom générique
de gaz; & je dirai en conféquence que dans
toute efpèce de gaz, on doit diffinguer le ca-
lorique, qui fait en quelque façon l'office de
diffblvant & la fubftance qui eft combinée
avec lui & qui forme fa bafe.
C'ett à ces bafes des différens gaz qui font
encore peu connues, que nous avons été obli-
gés de donner des noms. Je les indiquerai dans
le Chapitre IV de cet Ouvrage, après que
j'aurai rendu compte de quelques phénomènes
qui accompagnent l'échauffement & le réfroi.
diffement des corps, & que j'aurai donné des
idées plus précifes fur la conflitution de notre
atmofphère.
Nous avons vu que les molécules de tous
les corps de la Nature étoient dans un état
d'équilibre entre l'attradion, qui tend à les rap-
procher & à les réunir, & les efforts du calo-
rique qui tend à les écarter. Ainf non-feule-
ment le calorique environne de toutes parts
les corps, mais encore il remplit les intervalles
que leurs molécules laiffent entr'elles. On fe
formera une idée de ces difpofitions fi l'on fe
figure un vafe rempli de petites balles de
plomb & dans lequel on verfe une fubftance
en poudre très-fine, telle que du fablon on
conçoit que cette fubftance fe répandra uni-
formément dans les intervalles que les balles
laiJTent entr'elles & les remplira. Les balles
dans cet exemple font au fablon ce que les
molécules des corps font au calorique avec
cette différence que, dans l'exemple cité, les
balles fe touchent au lieu que les molécules
des corps ne fe touchent pas ,8c qu'elles font
toujours maintenues à une petite diflance les
unes des autres par l'effort du calorique.
Si à des balles dont la figure eft ronde on
fubftituoit des hexaèdres, des odaèdres, ou
des corps d'une figure régulière quelconque &
d'une égale folidité, la capacité des vuides qu'ils
laifferoiententr'eux ne feroit plus la même & l'on
ne pourroit plus y loger une auffi grande quan-
tité de fablon. La même chofe arrive à l'égard
de tous les corps de la Nature; les intervalles
que leurs molécules biffent entr'elles ne font
capacité
pas tous d'une égale capacité cette
dépend de la figure de ces molécules, de leur
groffeur & de la diflance les unes des
autres
à laquelle elles fonc maintenues, fuivant le rap-
port qui exifle entre leur force d'attraction, &
la force répulfive qu'exerce le calorique.
C'eft dans ce fens qu'on doit entendre cette
expreffion capacité des corps pour contenir la
madère de la chuleur; expreffion fort jufle,
introduite pac les Phyfciens Anglois, qui
ont
eu les premiers des notions exaâes à cet égard.
Un exemple de ce qui fe paffe dans l'eau &
quelques réflexions fur la manière dont
ce
fluide mouille & pénètre les corps, rendra ceci
plus intelligible on ne fauroit trop s'aider dans
les chofes abilraites de comparaifons fenfibles.
Si l'on plonge dans l'eau des morceaux de
différens bois, égaux en volume, d'un- pied
cube, par exemple; ce fluide s'introduira
peu
à peu dans leurs pores ils fe gonfleront &
augmenteront de poids mais chaque efpèce
de bois admettra dans fes pores une quantité
d'eau différente; les plus légers & les plus
po-
reux en logeront davantage ceux qui feront
compares & ferrés n'en laiflèront pénétrer
qu'une très-petite quantité enfin la
propor-
tion d'eau qu'ils recevront dépendra encore de
la nature des molécules continuantes du bois,
de l'affinité plus ou moins grande qu'elles au-
ront avec l'eau, & les bois très-réfineux par
exemple quoique très-poreux, en admettront
très-peu. On pourra donc dire que les diffé-
rentes efpèces de bois ont une capacité diffé-
rente pour recevoir de l'eau; on pourra même
cotmoître par l'augmentation de poids la
quantité qu'ils en auront abforbée; mais conmé
on ignorera la quantité d'eau qu'ils conteneient
avant leur immerfion il ne fera pas poffible
de connoître la quantité abfolue qu'ils en con-
tiendront en en fortant.
Les mêmes circonflances ont lieu à l'égard
des corps qui font plongés dans le calorique;
en obfervant cependant que l'eau eft un fluide
incompreffible tandis que le calorique efl
doué d'une grande élafticité, ce qui fignifie en
d'autres termes que les molécules du calorique
ont une grande tendance à s'écarter les unes
des autres quand une force quelconque les a
obligées de fe rapprocher & l'on conçoit que
cette circonftance doit apporter des change-
mens très-notables dans les réfultats.
Les chofes amenées à ce point de clarté &
de fmplicïté, il me fera aifé de faire entendre
quelles font les idées qu'on doit attacher à
ces exprefGons calorique libre 3 & calorique
combiné quantité fpécifique de calorique con-
tenue dans les différais corps, capacité pour
contenir le calorique, chaleur latente chaleur
fenfible, toutes expreffions qui ne font point
fynonimes mais qui, d'après
ce que je viens
d'expo fer, ont un fens flrid & déterminé. C'eft
ce fens que je vais chercher encore à fixer par
quelques définitions.
Le calorique libre eft celui qui n'eil engagé
dans aucune combinaifon. Comme
nous vivons
au milieu d'un fyflême de corps avec lefquels
le calorique a de l'adhérence, il réfulte
en que
nous n'obtenons jamais ce principe dans l'état
de liberté abfolue.
Le calorique combiné eft celui qui efl enchaîné
dans les corps par la force d'affinité
ou d'at-
traction & qui conflkue
une partie de leur
fubflance même de leur folidité*
On entend par cette expreffion calorique
fpécifique des corps, la quantité de calorique
refpeâivementnéceffairepour élever d'un même
nombre de degrés la température de plufieurs
corps égaux en poids, Cette quantité de calorique
dépend de la difiance des molécules des
corps,
de leur adhérence plus ou moins grande; & c'eft
cette difîance ou plutôt fefpace qui en réfulte
qu'on a nommé, comme je Pai déjà obfervé
capacité pour contenir le calorique.
La chaleur, confidérée comme fenfation
ou en d'autres termes, la chaleur fenfihk.^
n'efl que l'effet produit fur nos organes par
le paffage du calorique qui fe dégage des corps
environnans. En général nous n'éprouvons de
fenfation que par un mouvement quelconque,
& l'on pourroit pofer comme un axiome point
de mouvement, point de fenfation. Ce principe
général s'applique naturellement au fentiment
du froid & du chaud lorfque nous touchons
un corps froid le calorique qui tend à fe
mettre en équilibre dans tous les corps, pâlie
de notre main dans le corps que nous tou-
chons, & nous éprouvons la fenfàtïon du froid.
L'effet contraire arrive lorfque nous touchons
un corps chaud le calorique paffe du corps à
notre main & nous avons la fenfation de la
chaleur. Si le corps & la main font du même
degré de température ou à peu près, nous
n'éprouvons aucune fenfation; ni de froid, ni
de chaud, parce qu'alors il n'y a point de
mouvement, point de tranfport de calorique, &
qu'encore une fois il n'y a pas de fenfation fans
un mouvement qui foccafionne.
Lorfque le thermomètre monte, c'efl une
preuve qu'il y a du calorique libre qui fe ré-
pand dans les corps envirounans le thermo-
mètre qui eft au nombre de ces corps en
reçoit fa part en raifon de fa mafre, & de
la capacité qu'il a lui-même pour contenir le
calorique. Le changement qui arrive dans le
thermomètre n'annonce donc qu'un déplace-
ment de calorique, qu'un changement arrivé à
un fyftême de corps dont il fait partie; il n'in-
dique tout au plus que la portion de calorique
qu'il a reçue, mais il ne mefure pas la quan-
tité totale qui a été dégagée, déplacée ou ab-
forbée. Le moyen le plus fimple & le plus
ex ad pour remplir ce dernier objet eft celui
imaginé par M. de la Place, & qui eft décr;
dans les Mémoires de l'Académie année 1780,
page 364.. On en trouve auffi une explication
fommaire à la fin de cet Ouvrage. Il conGfte
à placer le eorps ou la combinaifon d'où fe
dégage le calorique, au milieu d'une fphère
creufe de glace la quantité de glace fondue
eft une expreflion exafte de la quantité de ca-
lorique qui s'eft dégagée. On peut à l'aide
de l'appareil que nous avons fait conftruire
d'après cette idée, connoître. non pas com-
me on l'a prétendu, la capacité qu'ont les
corps pour contenir le calorique mais le
rapport des augmentations ou diminutions que
reçoivent ces capacités, par des nombres dé-
terminés de degrés du thermomètre. Il eH facile,
avec le même appareil & par diverfes coin-
binaifons d'expériences, de connoître la quan-
tité de calorique néceflaire pour convertir les
corps fblides en liquides & ceux-ci en fluides
aérifornies, & réciproquement,ce que les fluides
élaftiques abandonnent de calorique quand ils
redeviennent liquides & ceux-ci quand ils
redeviennent folides. On pourra donc parvenir
un jour lorfque les expériences auront été
affez multipliées, à déterminer le rapport de
calorique qui conflitue chaque efpèce de gaz.
Je rendrai compte, dans un Chapitre particu-
lier, des principaux réfultats que nous avons
obtenus en ce genre.
Il me reLle en finiffant cet article, à dire
un mot fur la caufe de l'élafticité des gaz & des
fluides en vapeurs. Il n'eft pas difficile d'apper-
cevoir que cette élafticité tient à celle du calo-
rique qui paraît être le corps éminemment
élaflique de la nature. Rien de plus fimple que
de concevoir qu'un corps devient élaflique en
fe combinant avec un autre qui eft lui-même
doué de cette propriété. Mais il faut convenir
que c'eft expliquer félaiticité par l'élafticité
qu'on ne fait par-là que reculer la difficulté,
& qu'il refte toujours à expliquer ce que c'eft
que l'élafticité & pourquoi le calorique eft
élaflique. En confidérant félaflicité dans un fens
abftrait, elle n'eft autre chofe que la propriété
qu'ont les molécules d'un corps de s'éloigner
les unes des autres, lorqu'on les a forcées de
s'approcher. Cette tendance qu'ont les molé-
cules du calorique à s'écarter, a lieu même à
de fort grandes distances. On en fera convaincu
fi l'on conf dère que l'air eft fufceptible d'un
grand degré de compreffion; ce qui fuppofe
que fes molécules font déjà très-éloignées les
unes des autres car la pénibilité de fe rap-.
procher, fuppofe une diftance au moins égale
à la quantité du rapprochement. Or ces molé-
cules de l'air qui font déjà très-éloignées en-
tr'elles tendent encore à s'éloigner davantage
en effet f on fait le vuide de Boyle dans un
très-vaile récipient, les dernières portions d'air
qui y reilent fe répandent uniformément dans
toute la capacité du vafe quelque grand qu'il
foit elles le remplirent en entier & preffent
contre fes parois or cet effet ne peut s'expli-
quer qu'en fuppofant que les molécules font
un effort en tout fens pour s'écarter, &l'on ne
connoît point la difiance à laquelle ce phéno-
mène s'arrête.
Il y a donc une véritable répnlfion entre les
molécules des fluides élafliques; ou du moins
les chofes fe paffent de la même manière que
f cette répulfîon avoit lieu, &. on auroit quel-
que droit d'en conclure que les molécules du
calorique fe repouiïent les unes les autres.
Cette force de répulfion une fois admire, les
explications relatives à la formation des fluide
aériformes ou gaz deviendroient fort (impies
mais il faut convenir en même temps qu'une
force répulfive, entre des molécules très-pe-
tites, qui agit à de grandes diftances eft diffi-
cile à concevoir.
Il paroîtroit peut-être plus naturel de fup-
pofer que les molécules du calorique s'attirent
plus entr'elles que ne le font les molécules des
corps, & qu'elles ne les écartent que pour
obéir à la force d'attraction qui les oblige de
fê réunir. Il fe paffe quelque chofe d'analogue
à ce phénomène quand on plonge une éponge
sèche dans de Peau elle fe gonfle fes mo-
lécules s'écartent les unes des autres, & l'eau
remplit tous les intervalles. Il etl clair que cette
éponge en fe gonflant a acquis plus de capa-
cité pour contenir de l'eau qu'elle n'en avoit
auparavant. Mais peut-on dire que l'introduc-
tion de l'eau entre fes molécules leur ait com-
muniqué une force répulfive qui tende à les
écarter les unes des autres ? Non, fans doute
il n'y a au contraire que des forces attraétives
qui agiffent dans, ce cas & ces forces font,
i°. la pefanteur de l'eau & l'aâion qu'elle
exerce en tout fens comme tous les fluides
2°. la force attractive des molécules de l'eau
les unes à l'égard des autres; 3°. la force
attraâive des molécules de l'éponge entr'elles;
enfin Pattradion réciproque des molécules de
l'eau & de celles de l'éponge. Il eit aifé de
concevoir que c'efi; de l'intenfité & du rapport
de toutes ces forces, que dépend l'explication
du phénomène. Il eft probable que l'écarte-
ment des molécules des corps par le calori-
que, tient de même à une combinaifon de
différentes forcés attraétives, & c'eft le réfultat
de ces forces que nous cherchons à exprimer
d'une manière plus concife & plus conforme à
l'état d'imperfection de nos connoiflances lorf-
que nous difons que le calorique communique
une force répulfive aux molécules des corps.
CHAPITRE II.
Vues générales fur la formation & la confli-
tution de Vatmofphère de la terre.
,LES confidérations que je viens de préfenrer
fur la formation des fluides élaftiques aériformes
ou gaz, jettent un grand jour fur la manière
dont fe font formées, dans l'origine des chofes,
les atmofphères des planètes & notamment
celle de la terre. On conçoit que cette der-
nière doit être le réfaltat & le mélange 1°. de
tomes les fubftances fufceptibles de fe vapo-
rifer ou plutôt de refier dans fétat aériforme,
au degré de température dans lequel nous vi-
vons, & à une preffion égale au poids d'une
colonne de mercure de 28 pouces de hauteur;
2°. de toutes les fubftances fluides ou concrètes
fufceptibles de fe diffbudre dans cet aflemblage
de différens gaz.
Pour mieux fixer nos idées relativement à cette
matière fur laquelle on n'a point encore allez
réfléchi, confidérons un moment ce qui arriveroit
aux différentes fubflances qui compofent le glo-
be, fi la température en étoit brufquement chan-
gée. Suppofons, par exemple, que la terre fe
trouvât transportée tout à coup dans une ré-
mon beaucoup plus chaude du Fyftême folaire;
dans la région de mercure, par exemple, où la
chaleur habituelle eft probablement fort fupé-
rieure à celle de feau bouillante bientôt l'eau
vaporifer à
tous les fluides fufceptibles de fe
des degrés voifins de l'eau bouillante, & le
mercure lui-même, entreroient en expanfion
ils fe transformeroient en fluides aériformes ou
ratmofphère.
gaz, qui deviendroientparties de
Ces nouvelles efpèces d'air fe mêleroient avec
celles déjà exiltantes, & il en réfulteroit des
décompofitions réciproques, des combinaifons
nouvelles jufqu'à ce que les différentes affi-
nités fe trouvant fatisfaites, les principes qui
compoferoient ces différens airs ou gaz, arri-
vaffent à un état de repos. Mais une confidé-
ration qui ne doit pas échapper, c'eft que cette
vaporifation même auroit des bornes en effet
à mefure que la quantité des fluides élafliques
augmenteroit la pefanteur de l'atmofphère
s'accroîtroit en proportion or puifqu'une
preffion quelconque eit un obftacle à la vapo-
rifation, puifque les fluides les plus éva-
porables peuvent réfifter fans fe vaporifer, à
oppofe une
une chaleur très-forte, quand on y
preffion proportionnellementplus forte encore;
enfin puifque l'eau elle-même & tous les li-
quides, peuvent éprouver dans la machine de
Papin, une chaleur capable de les faire rougir,
on conçoit que la nouvelle atmofphère arri-
veroit à un degré de pefanteur tel que l'eau
qui n'auroit pas été vaporifée jusqu'alors, cef-
feroit de bouillir, & refleroit dans l'état de
liquidité; en forte que même dans cette fup-
pofition, comme dans toute autre de même
genre la pefanteur de l'atmofphcre feroit li-
mitée & ne pourroit pas excéder un certain
terme. On pourroit porter ces réflexions beau-
coup plus loin, & examiner ce qui arriveroit
aux pierres, aux fels & à la plus grande partie
des fubftances fufibles qui compofent le globe
on conçoit qu'elles fe ramolliroient, qu'elles
entreroient en fufion & formeraient des fluides;
mais ces dernières confîdérations fortent de
mon objet, & je me hâté d'y rentrer.
Par un effet contraire, f la terre fe trouvoit
tout à coup placée dans des régions très-froi-
des, l'eau qui forme aujourd'hui nos fleuves
& nos mers, & probablement le plus grand
nombre des fluides que nous connoiflfonSj fe
transformeroit en montagnes folides, en rochers
très-durs, d'abord diaphanes, homogènes &
blancs comme le criflal de roche; mais qui,
avec le -temps, fe mêlait avec des fubftances
de différente nature, deviendroient des pierres
opaques diver!ement colorées.
L'air dans cette fuppofition, ou au moins
une partie des fubftances aériformes qui le com-
pofent, cefïèroient fans doute d'exiger dans
l'état de vapeurs élafliques, faute d'un degré de
chaleur fufhfant elles reviendroient donc à
l'état de liquidité, & il en réfulteroit de nouveaux
liquides dont nous n'avons aucune idée.
Ces deux fuppofitions extrêmes font voir
clairement 1°. quefolidité, liquidité, élaflicité,
font trois états différens de la même matière,
trois modifications particulières, par lefquelles
prefque toutes les fubflances peuvent fucceffi-
vement palier & qui dépendent uniquement
du degré de chaleur auquel elles font expo-
fées, c'efl-à-dire de la quantité de calorique
dont elles font pénétrées 2°. qu'il eft très-pro-
bable que l'air eft un fluide naturellement en
vapeurs ou pour mieux dire, que notre at-
mofphère eft un compofé de tous les fluides
fufceptibles d'exiger dans un état de vapeurs
& d'élallicité confiante, au degré habituel de
chaleur & de preflïon que nous éprouvons
30. qu'il ne feroit pas par confëquent impoffible
qu'il fe rencontrât dans notre atmofphère des
fubflances extrêmement compaéles, des métaux
même & qu'une fubftance métallique, par
exemple, qui feroit un peu plus volatile que
le mercure feroit dans ce cas.
On fait que parmi les fluides que nous con-
noiflbns les uns comme l'eau & l'alkool oti
efprit-de-vin, font fufceptibles de fe mêler les
uns avec les autres dans toutes proportions les
autres, au contraire, comme le mercure l'eau
èc l'huile, ne peuvent contra&er que des adhé-
les uns
rences momentanées, ils fe féparent
des autres lorfqu'ils ont été mêlangés & fe
rangent en raifon de leur gravité fpécifique. La
même chofe doit; ou au moins peut arriver
dans l'atmofphère il eft poffible, il eft même
probable qu'il s'eft formé dans forigine & qu'il
fe forme tous les jours des gaz qui ne font
mifcibles à fair de I'atmof-
que difficilement
phère & qui s'en féparent ;lï ces
gaz font plus
légers, ils doivent Fe raffèmbler dans les ré-
gions élevées, & y former des couches qui
nagent fur l'air atmofphérique. Les
phéno-
mènes qui accompagnent les météores ignés
qu'il exifle ainf dans le
me portent à croire
haut de I'atmofphère une couche d'un fluide
inflammable, & que c7eft au point de contad
de ces deux couches d'air que s'opèrent les
phénomènes de l'aurore boreale & des autres
météores ignés. Je me propofe de développer
Mémoire parti-
mes idées à cet égard dans un
calier.

CHAPITRE
CHAPITRE III.
.
Analyfe de l'air de l'acmojphère fa réfolution.
en deux fluides élajîiqiies l'un. refpirable,
Vautre non-rejpirable.

A El. le eft donc à priori la conflitution de


notre atmofphère elle doit être formée de la
réunion de toutes les fubftances fufcepdfales de
demeurer dans l'état aériforme au degré habi-
tuel de température & de preffion que nous
éprouvons. Ces fluides forment une maffe de
nature à peu près homogène, depuis la furface
de la terre jufqu'à la plus grande hauteur à
laquelle on foit encore parvenu, & dont la
denfîté décroît en raifon inverfe des poids dont
elle eft chargée mais comme je l'ai dit, il eft
poffible que cette première couche foit recou-
verte d'une ou de plufieurs autres de fluides
très-différens.
Il nous refle maintenantà déterminer quel eu:
le nombre & quelle eft la nature des fluides
élaftiques qui compbfent cette couche infé-
rieure que nous habitons & c'eft fur quoi
l'expérience va nous éclairer. La Chimie mo-
derne a fait à cet égard un grand pas & les
détails dans lefquels je vais entrer feront col-
noître que l'air de l'atmofphère eft peut-être
de toutes les fubilances. de cet ordre, celle dont
l'analyfe eil la plus exadement & la plus rigou*
feulement faite.
La Chimie préfente en général deux moyens
pour déterminer la nature des parties confii-
tuantes d'un corps la compoftion & la dé-
compofidon. Lors par exemple que l'on a
combiné enfemble de l'eau & de l'efprit-de-
vin ou alkool, & que par le réfultat de ce
mélange on a formé l'efpèce de liqueur qui
porte le nom d'eau-de-vie dans le commerce,
eft
on a droit d'en conclure que Peau-de-vie
un compofé d'alkool & d'eau mais on peut
arriver à la même concluf on par voie de dé-
compofition, & en général on ne doit être
pleinement fatisfait en Chimie qu'autant qu'on
a pu réunir ces deux genres de preuves.
On a cet avantage dans l'analyse de l'air de
l'atmofphère on peut le décompofer & le
recompofer; & je me bornerai à rapporter ici
les expériences les plus concluantes qui aient
été faites à cet égard. Il n'en eft prefque au-
cunes qui ne me [oient devenues propres foit
parce que je les ai faites le premier, foit parce
que je les ai répétées fous un point de vue
l'atmof-
nouveau, fous celui d'analyfer fair de
phère.
J'ai pris, planche Il, figure 14,
un matras
A de 36, pouces cubiques environ de capacité
dont le col B C DE étoit très-long, &
avoit
fix à fept lignes de groffeur intérieurement.
Je
l'ai courbé, comme on le voit repréfenté,
planche Ir, figure x, de manière qu'il pût étre
placé dans un fourneau MMNN, tandis
l'extrémité E de fon col iroit s'engager fousque
la
cloche F G, placée dans un bain de
mercure
RRSS. J'ai introduit dans ce
matras quatre
onces de mercure très-pur, puis en fuçant
tmfiphon que j'ai introduit fous la cloche Favec
G,
j'ai élevé le mercure jufqu'en LL j'ai
marqué
foigneufement cette hauteur
avec une bande de
papier collé & j'ai obfervé exactementle baro-
mètre & le thermomètre.
Les chofes ainfi préparées j'ai allumé du
feu dans le fourneau MMNN, & je l'ai
en-
tretenu presque continuellement pendant douze
jours, de manière que le mercure fut échauffë
prefqu'au degré néceffaire pour le faire bouillir.
II ne s'eft rien pafré de remarquable
dant tout le premier jour le mercure quoique pen-
non bouillant, étoit dans un état d'évapora-
tion continuelle; il tapiffoitl'intérieur des vaif-
feaux de goutelettes, d'abord très-fines, qui
alloient enfuite en augmentant, & qui,lorfqu'elles
avoient acquis un certain volume, retomboieur
d'elles-mêmes au fond du vafe, & fe réuliif-
foient au refle du mercure. Le fecond jour,
j'ai commencé à voir nager fur la furface du
mercure de petites parcelles rouges, qui pen-
dant quatre ou cinq jours ont augmenté en
nombre & en volume après quoi elles ont
celfë de groffir & font reliées abfolument dans
le même état. Au bout de douze jours voyant
que la calcination du mercure ne faifoit plus
aucun progrès, j'ai éteint le feu & rai laiffé
refroidir les vaiueaux. Le volume de l'air
contenu tant dans le matras que dans fon col
& fous la partie vuide de la cloche, réduit à
une preffion de 28 pouces & à io degrés du
thermomètre, étoit avant l'opération de j"O pou-
ces cubiques environ. Lorfque
l'opération a été
finie ce même volume à prefiion & à tempé-
rature égale, ne s'eft plus trouvé que de 42 à
43 pouces il y avoit eu par conféquent une
diminution de volume d'un fixième environ.
D'un autre côté ayant raflemblé foigneufement
les parcelles rouges qui s'étoient formées &
les ayant féparées autant qu'il étoit poüible du
mercure coulant dont elles étoient baignées,
leur poids s'eft trouvé de 4r grains.
J'ai été obligé de répéter plufieurs fois cette
calcination du mercure en vaiflèaux clos parce
qu'il eft difficile dans une feule & même expé-
rience de conferver l'air dans lequel on a
opéré, & les molécules rouges ou chaux de mer-
cure qui s'eft formé. Il m'arrivera fouvent de con-
fondre ainfi dans un même recit, le réfultat de
deux ou trois expériences de même genre.
L'air qui reiloit après cette opération & qui
avoit été réduit aux cinq fxièmes de fon vo-
lume, par la calcination du mercure n'étoit
plus propre à la refpiration ni à la combuftion;
car les animaux qu'on y introduif©it y périf-
foiert en peu d'inftans & les lumières s'/
éteignoient fur le champ comme fi on les eût
plongées dans de- l'eau.
D'un autre côté, j'ai pris les 4S grains de
matière rouge qui s'étoit formée pendant l'opé-
ration je les ai introduits dans une très-petite
cornue de verre à laquelle étoit adapté un ap-
pareil propre à recevoir les produits liquides
& aériformes qui pourroient fe féparer ayant
allumé du feu dans le fourneau j'ai obfervé
qu'à mefure que la matière rouge étoit échauffée
fa couleur augmentoit d'intenfité. Lorfqu'enfuite
la cornue a approché de l'incandëfcence la
matière rouge a commencé à perdre peu à peu
de fon volume, & en quelques minutes elle a
entièrement difparu en même temps il s'eft
condenfé dans le petit récipient 4.1 grainsde
mercure coulant, & il a paffé fous la cloche
7 à 8 pouces cubiquesd'un fluide élailique beau-
coup plus propre que l'air de l'atmofphère à
entretenir la combuftion & la refpiration des
animaux.
Ayant fait paffer une portion de cet air dans
un tube de verre d'un pouce de diamètre & y
ayant plongé une bougie, elle y répandoit un
éclat éblouilfant le charbon au lieu de s'y
confammer paifiblemerft comme dans l'air or-
dinaire y brûloit avec flamme & une forte de
décrépitatioll, à la manière du phofphore, &
avec une vivacité de lumière que les yeux
avoient peine à fupporter. Cet air que nous
avons découvert prefque en même temps, M.
Prieftley, M. Schéele &moi5 a été nommé par
le premier, air déphlogifliqué j par le fecond,
air empiréal. Je lui avois d'abord donné le
oaom d'air éminemment refpirable depuis on
y a fubilitué celui d'air vital. Nous verrons
bientôt ce qu'on doit penfer de ces dénomina-
tions.
En réfiéchiffant fur les circonHances de cette
expérience, on voit que le mercure en fe cal-
cinant abforbe la partie falubre & refpirable de
l'air, ou, pour parler d'une manière plus xi-.
goureufe, la bafe de cette partie refpirable
que la portion d'air qui reRe eft une efpèce
de mofète incapable d'entretenir la combuf
tion & la refpiration l'air de l'atmofphère eft
donc compofé de deux fluides élafliques de
nature différente & pour ainf dire oppofée.
Une preuve de cette importante vérité c'eft
qu'en recombinant les deux fluides élaftiques
qu'on a ainf obtenus féparément, c'eft-à-dire
les 42 pouces cubiques de mofète, ou air
non refpirable & les 8 pouces cubiques d'air
refpirable, on reforme de l'air, en tout fem-
blable à celui de l'atmofphère, & qui en propre
à peu près au même degré, à la combuliion,
à la calcination des métaux, & à la refpiration
des animaux.
Quoique cette expérience fourniffe un moyen
infinimentfimple d'obtenir féparément les deux
principaux fluides élaftiques qui entrent dans
la compofition de notre atmofphère, elle ne
nous donne pas des idées exades fur la pro-
portion de ces deux fluides. L'afhnité du mer-
cure pour la partie refpirable de Pair, ou
plutôt pour fa bafe n'efl: pas affez grande
pour qu'eUe puiffe vaincre entièrement les
obftacles qui s'oppofent à cette combinaifon.
Ces obftacîes font l'adhérence des deux fluides
conftimtifs de l'air de l'atmofphère & la force
d'afhnité qui unit la bafe de fair vital au calo-
rique en conféquence la calcination du mer-
cure finie, ou au moins portée auffi loin qu'elle
peut l'être dans une quantité d'air détermi-
née, il refle encore un peu d'air refpirable
combiné avec la mofète, & le mercure ne
peut en féparer cette dernière portion. Je ferai
voir dans la fuite que la proportion d'air ref-
pirable & d'air non refpirable qui entre dans
la compofition de l'air-atmofphérique eft dans
le rapport de 27 à 73, au moins dans les cli-
mats que nous habïtons je difcuterai en même
temps les caufes d'incertitude qui exigent en-
core fur l'exactitude de cette proportion.
Puifqu'il y a décompofition de l'air dans la
calcination du mercure, puifqu'il y a fixation
& combinaifon de la bafe de la partie refpi-
rable avec le mercure, il réfulte des principes
que j'ai précédemment expofés, qu'il doit y
avoir dégagement de calorique & de lumière
& l'on ne fauroit douter que ce dégagement
n'ait lieu en effet mais deux caufes empêchent
qu'il ne foit rendu fenfible dans l'expérience,
dont je viens de rendre compte. La première,
parce que la calcination durant pendant plu-
fieurs jours, le dégagement de chaleur & de
lumière, réparti fur un anflï long intervalle
de temps, eft infiniment foible pour chaque
inûant en particulier la féconde, parce que
l'opération fe faifant dans un fourneau & à l'aide
du feu, la chaleur occafionnée par la calcina-
tion fe confond avec celle du fourneau. Je
pourrois ajouter que la partie refpirable de
l'air, ou plutôt fa bafe, en fe combinant avec
le mercure n'abandonne pas la totalité du
calorique qui lui étoit uni, qu'une partie de-
meure engagée dans la nouvelle combinaifon
mais cette difcnfïion & les preuves que je ferois
obligé de rapporter ne feroient pas à leur
place ici.
Il eft au furplus aifé de rendre fenfble le
dégagement de la chaleur & de la lumière en
opérant d'une manière plus prompte la décom-
pofition de l'air. Le fer, qui a beaucoup plus
d'affinité que le mercure avec la bafe de la
partie refpirable de l'air, en fournit un moyen.
Tout le monde connoît aujourd'hui la belle
expérience dé M. Ingenhouz fur la combuftion
du fer. On prend un bout de fil de fer très-fin
B C planche JF, figure ij tourné en fpirale,
on fixe fune de fes extrémités B, dans un
bouchon de liége A, defliné aboucher la bou-
teille DE F G. On attache à l'autre extrémité
de ce fil de fer, un petit morceau d'amadoue
C. Les chofes ainfi difpofëes on emplit avec
de l'air dépouillé de fa partie non refpirable,
la bouteille DE F G. On allume l'amadoue C,
puis on l'introduit promptement, ainfi que le
fil de fer B C dans la bouteille, Se on la bou-
che comme on le voit dans la figure que je
viens de citer.
Aufïï-tôt que l'amadoue eft plongée dans
l'air vital elle commence à brûler avec un
éclat éblouiffant; elle communique l'inflamma-
tion au fer, qui brûle lui même en répandant
de brillantes étincelles, lefquelles tombent au
fond de la bouteille, en globules arrondis qui
deviennent noirs en fe refroidifi'ant & qui
confervent un refte de brillant métallique. Le
fer ainfi brûlé, eft plus caftant & plus fragile
que ne le feront le verre lui-même il Fe réduit
facilement en poudre & eft encore attirable à
l'aimant, moins cependant qu'il ne i'étoit avant
fa combuftion.
M. Ingenhouz n'a examiné ni ce qui arri-
voit au fer, ni ce qui arrivoit à l'air dans cette
opération en forte que je me fuis trouvé obligé
de la répéter avec des circonflances différentes
& dans un appareil plus propre à répondre à
mes vues.
J'ai rempli une cloche A, planche IV,fig. 3,
de fix pintes environ de capacité d'air pur, autre-
ment dit, de la partie éminemment refpirable de
l'air. J'ai tranfporté, à l'aide d'un vafe très-plat,
cette cloche fur un bain de mercure contenu
dans le baffin B C; après quoi j'ai féché foigneu-
fcmenc avec du papier gris la furface du mer-
cure tant dans l'intérieur qu'à l'extérieur de
la cloche. Je me fuis muni, d'un autre côté,
d'une petite capfule de porcelaine D, plate &
évafée dans laquelle j'ai placé de petits co-
peaux de fer tournés en fpirale & que j'ai
arrangés de la manière qui m'a paru la plus
favorable pour que la çombuftion fe commu-
niquât à toutes les parties. A l'extrémité d'un
de ces copeaux, j'ai attaché un petit morceau
d'amadoue, & j'y ai ajouté un fragment de
phofphore qui pefoit à peine un feizième de
grain. J'ai introduit la capfule fous la cloche
en foulevant un peu cette dernière. Je n'ignore
pas que par cette manière de procéder, il fe
mêle une petite portion d'air commun avec
l'air de la cloche; mais ce mélange qui eft peu
confidérable lorfqu'on opère avec adreffe, ne
nuit point au fuccès de l'expérience.
Lorfque la capfule D eft introduite fous la
cloche, on fucce une partie de l'air qu'elle
contient, afrn d'élever le mercure dans fon inté-
rieur jufqu'en EFj on fe fert à cet effet d'un
fiphon GHI, qu'on paffe, par-deflbus, & pour
qu'il ne fe rempliffe pas de mercure, on tortille
un petit morceau de papier à fon extrémité. Il y
a un art pour élever ainfî en fuçant le mercure
fous la cloche fi on fe contentoit d'afpirer
l'air avec le poumon on n'atteindroit qu'à une
très-médiocre élévation, par exemple d'un
pouce ou d'un pouce & demi tout au plus
tandis que par l'aâion des mufcles de la bou-
che on élève, fans fe fatiguer, ou au moins
fans rifquer de s'incommoder le mercure juf
qu'à 6 à 7 pouces.
Après que tout a été ainfi préparé, on fait
Iougit au feu un fer recourbé. M N, planche IF,
figure tq, defliné à
ces fortes d'expériences; on
le paffe par-deQbus la cloche & avant qu'il ait eu
le temps de fe refroidir, on l'approche du petit
morceau de phofphore contenu dans la capfule
de porcelaine D auffi-tôt le phofphore s'allu-
me, il communique fon inflammation à l'ama-
doue, & celle-ci la communique au fer. Quand
les copeaux ont été bien arrangés, tout le fer
brûle jufqu'au dernier atôme en répandant
une lumière blanche, brillante & femblable à
celle qu'on obferve dans les étoiles d'artifice
Chinois. La grande chaleur qui s'opère pendant
cette combuftion, liquéfie le fer, & il tombe
en globules ronds de groffeur différente, dont
le plus grand nombre refle dans la capfule, &
dont quelques-uns font lancés au dehors &
nagent fur la furface du mercure.
Dans le premier inflant de la combuftion il
y a une légère augmentation dans le volume
de l'air, en raifon de la dilatation occafionnée-
par la chaleur mais bientôt une diminution
rapide fuccède à la dilatation le mercure re-
monte dans la cloche, & lorfque la quantité
de fer eft fuffifante & que l'air avec lequel on
opère eft bien pur, on parvient à l'abforber
prefqu'en entier.
Je dois avertir ici qu7à moins qu'on ne veuille
faire des expériences de recherches, il vaut
mieux ne brûler que des quantités médiocres
de fer. Quand on veut pouffer trop loin l'ex-
périence & abforber prefque tout l'air, la cap-
fule D qui nage fur le mercure, fe rapproche
trop de la voûte de la cloche, & la grande
chaleur jointe au refroidiffernent fubit, occa-
fionné par le contai du mercure, fait éclater
le verre le poids de la colonne de mercure
qui vient à tomber rapidement, dès «¡n'il s'eil
fait une félure à la cloche, occafonne un flot
qui fait jaillir une grande partie de ce fluide hors
du bafïln. Pour éviter ces inconvéniens & être
sûr du fuccès de l'expérience on ne doit guère
brûler plus d'un gros & demi de fer fous une
cloche de huit pintes de capacité. Cette clo-
che doit être forte afin de renfler au poids
de mercure qu'elle efl: de1linée à contenir.
Il n'eH pas poffible de déterminer à la fois
dans cette expérience, le poids que le fer ac-
quiert, & les changemens arrivés à l'air. Si c'eft
l'augmentation de poids du fer & fon rapport
avec fabforption de Pair, dont on cherche à con-
noître la quantité, on doit avoir foin de marquer
très-exaétement fur la cloche, avec un trait de
diamant, la hauteur du mercure avant & après
l'expérience on paffe enfuite fous la cloche le
fiphon G H, planche IV, figure 3, garni d'un pa-
pier qui empêche qu'il ne s'emplüfe de mercure.
On met le pouce fur l'extrémité G, & on rend
l'air peu à peu en foulevant le pouce. Lorfque le
mercure eft defcendu à fan niveau, on enlève
doucement la cloche on détache de la capfule
les globules de fer qui y font contenus; on
raflemble foigneufement ceux qui pourroient
s'être éclaboufles & qui nagent fur le mercure,
& on pèfe le tout. Ce fer eft dans l'état de ce
que les anciens Chimiftes ont nommé éthiopt
martial; il a une forte de brillant métallique;il
en très caflant très-friable, & fe réduit en
poudre fous le marteau & fous le pilon. Lorfque
l'opération a bien réuffi, avec 100 grains de
fer on obtient rjj* à 136 grains d'éthiops. On
peut donc compter fur une augmentation de
poids au moins de 35" livres par quintal.
Si l'on a donné à cette expérience toute
l'attention qu'elle mérite, l'air fe trouve dimi-
nué d'une quantité en poids exaâement égale
à celle dont le fer eft augmenté. Si donc on a
brûlé 100 grains de fer & que l'augmentation
de poids que ce métal a acquife ait été de 3 j
grains la diminution du volume de l'air eft
affez exactement de 70 pouces cubiques à raifon
d'un demi-grain par pouce cube. On verra
dans la fuite de ces Mémoires, que le poids
de l'air vital eft en effet; aGèz exaflement,
d'un demi-grain par pouce cube.
Je rappellerai ici une dernière fois que dans
toutes les expériences de ce genre, on ne doit
point oublier de ramener par le calcul le volume
de l'air au commencement & à la fin de l'expé-
rience à celui qu'on auroit eu à 10 degrés du
thermomètre, & à une preîïïon de 28 pouces:
j'entrerai dans quelques détails fur la manière de
faire ces corrodions, à la fin de cet Ouvrage.
Si c'eft fur la qualité de l'air reflant dans la
cloche qu'on fe propofe de faire des expé-
riences, on opère d'une manière un peu diffé-
rente. On commence alors; après que la com-
buftion efl faite & que les vaiueaux font re-
froidis, par retirer le fer & la capfule qui le
contenoit en paifant la main fous la cloche à
travers le mercure cnfuite on introduit fous
cette même cloche, de la potafi'e ou alkali
cauflique diflbus dans l'eau du fulfure de
potaiïê ou telle autre fubftance qu'on juge à
propos, pour examiner faétion qu'elles exer-
cent fur l'air. Je reviendrai dans la fuite fur
ces moyens d'analyfe de l'air quand j'aurai
fait connoître la nature de ces différentes fub-
fiances, dont je ne parle qu'accidentellement
dans ce moment. On finit par introduire fous
cette même cloche, aurant d'eau qu'il eft né-
ceffaire pour déplacer tout le mercure après
quoi on paffe deffbus un yaifleau ou efpèce de
capfule ttès-platte avec laquelle on la tranf-
porte dans l'appareil pneumato-cliimïque ordi-
naire à l'eau, où fon opère plus en grand &
avec plus de facilité.
Lorfqu'on a employé du fer très doux &
très-pur & que la portion refpirable de l'air
dans lequel s'eft faite la combuftion, étoit
exempte de tout mêlange d'air non refpirable,
l'air qui refle après la combuftion, fe trouve
auffi pur qu'il l'étoit avant la corabuftion mais
il eli rare que le fer ne contienne pas une
petite quantité de matière charbonneufe l'a-
cier fur-tout en contient toujours. Il eft de
même extrêmement difficile d'obtenir la por-
tion refpirable de l'air parfaitement pure elle
efl prefque toujours mêlée d'une petite portion
de la partie non refpirable mais cette efpèce
de mofète ne trouble en rien le réfultat de
l'expérience, & elle fe retrouve à la fin en.
même quantité qu'au commencement.
J'ai
J'ai annoncé qu'on pouvoit déterminer de
deux manières la nature des parties confir-
tuantes de l'air de l'atmofphère par voie de
décompof tion & par voie de compofition. La
calcination du mercure nous a fourni l'exemple
de l'une & de l'autre puifqu'après avoir en-
levé à la partie refpirable fa bafe par le mer-
cure, nous la lui avons rendue pour reformer
de l'air en tout fembîable à celui de l'atmof-
phère. Mais on peut également opérer cette
compoftion de l'air en empruntant de différens
règnes les matériaux qui doivent le former. 011
verra dans la fuite que lorfqu'on difïbut des
matières animales dans de l'acide nitrique, il
fe dégage une grande quantité d'un air qui
éteint les lumières, qui eft iiuifible pour les
animaux, & qui eft en tout femblable à la
partie non refpirable de l'air de l'atmofphère.
Si à 73 parties de ce fluide élafiique on en
ajoute 27 d'air éminemment refpirable tiré du
mercure, réduit en chaux rouge par la calcina-
tion on forme un fluide élallique parfai-
tement femblable à celui de fatmofphère &
qui en a toutes les propriétés.
Il y a beaucoup d'autres moyens de fépa-
rer la partie refpirable de fair de la partie
non refpirable; mais je ne pourrais les expofer
ici fans emprunter des notions, qui dans
l'ordre des connoiflances appartiennent aux
Chapitres fuivans. Les expériences d'ailleurs
que j'ai rapportées fufiifent pour un
Traité
Elémentaire; & dans ces fortes de matières,
le choix des preuves eft plus important que
leur nombre.
Je terminerai cet article en indiquant une
propriété qu'a l'air de l'atmofphère & qu'ont
en général tous les fluides élaftiques ou gaz
diffoudre
que nous connoiffbns c'eft celle de
l'eau. La quantité d'eau qu'un pied cube d'air
de fatmofphère peut diffoudre eft fuivant les
expériences de M. de Sauffure de 12 grains
d'autres fluides élafliques, tels que l'acide car-
bonique, paroiffent en diffbudre davantage
mais on n'a point fait encore d'expériences
exactes -pour en déterminer la quantité. Cette
élafliques aéri-
eau que contiennent les fluides
formes, donne lieu dans quelques expériences
à des phénomènes particuliers qui méritent
beaucoup d'attention, & qui ont fouvent jetté
les Chimiftes dans de grandes erreurs.
CHAPITRE IV.
Nomenclature des différentes parties confl'uu~
tives de l'air de l'atmojphère.
Jusqu'ici j'ai été forcé de me fervir de
périphrafes pour défgner la nature des diffé-
rentes fubflances qui compofent notre atmos-
phère, & j'ai adopté provifoirement ces ex-
preffion, partie -efpirable partie nott refpirable-
de l'air. Les détails dans Iefquels je vais entrer,
exigent que je prenne une marche plus rapide,
& qu'après avoir cherché à donner des idées
fhnples des différentes fubflances qui entrent
dans la compoftion de fair de l'atmosphère
je les exprime également par des mots fimples.
La température de la planette que nous ha-
bitons fe trouvant très voifne du degré oit
Peau paffe de l'état liquide à l'état folide, &
réciproquement & ce phénomène s'opérant
fréquemment fous nos yeux, il n'eft pas éton-
nant que dans toutes les langues, au moins
dans les climats où fon éprouve une forte
d'hiver, on ait donné un nom à l'eau devenue
folide par l'abfence du calorique.
Mais il n'a pas dû en être de même de l'eau
réduite à l'état de vapeur par une plus grandes
addition de calorique. Ceux qui n'ont pas fait
une étude particulière de ces objets, ignorent
encore, qu'à un degré un peu fupérieur à celui
de feau bouillante, Peau fe transforme en un
fluide élartique aériforme, fufceptible comme
tous les gaz, d'être reçu & contenu dans des
vaiiïeaux, & qui conferve fa forme gazeufe
tant qu'il éprouve une température fupérieure
à 80 degrés, jointe à une preffion égale à celle
d'une colonne de 28 pouces de mercure. Ce
phénomène ayant échappé à la multitude
aucune langue n'a déGgné l'eau dans cet état
par un nom particulier & il en eft de même
de tous les fluides, & en général, de toutes
les fubilances qui ne font point fufceptibles de
fe vaporifer au degré habituel de température
& de preipon dans lequel nous vivons.
Par une faite delà même caufe on' n'a point
donné de nom à la plupart des fluides aérifor-
mes dans l'état liquide ou concret on
ignorait
que ces fluides fuffent le réfultat de combi-
la
naifon d'une bafe avec le calorique; & comme
liquide
on ne les avoit jamais vus dans l'état de
ni de folide leur exüience fous cette forme
étoit inconnue même des Bhyiîciens.
Nous n'avons pas jugé qu'il nous fût permis
de changer des noms reçus & confacrés dans
la fociété- par un antique ufage. Nous avons
donc attaché au mot d'eau & de glace, leur
lignification vulgaire nous avons de même
exprimé par le mot d'air la colleâion des flui-
des élafliques qui compofent notre atmosphère,
mais nous ne nous fommes pas cru obligés au
même refped pour des dénominations très-
modernes nouvellement propofées par les Phy-
fciens. Nous avons penfé que nous étions en
droit de les rejetter & de leur en fubftituer
d'autres moins propres à induire en erreur; &lor<t
même que nous nous femmes déterminés à les
adopter, nous n'avons fait aucune difficulté de
les modifier & d'y attacher des idées mieux
arrêtées & plus circonfcrites.
C'eft principalement du Grec que nous avons
tiré les mots nouveaux, & nous avons fait en
forte que leur étymologie rappelât l'idée des
chofes que nous nous propofions d'indiquer
nous nous femmes attachés fur-tout à n'ad-
mettre que des mots courts & autant qu'il
ét.oit poffible, qui fuffent fufceptibles de for-
mer des adjeâits & des verbes.
D'après ces principes, nous avons confervé
à l'exemple de M. Macquer, le nom de ga^
employé par Vanhelmont & nous avons rangé
fous cette dénomination, la clafFe nombreufe
des fluides élafliques aériformes, en faifant ce-
pendant une exception pour l'air de l'atmo-
fphère. Le mot ga^ eft donc pour nous un nom
générique, qui défigne le dernier degré de fatu-
ration d'une fubftance quelconque par le calo-
ïique c'eft l'expreffion d'une manière d'être
des corps. Il s'agilfoit enfuite de fpéeifier chaque
efpèce de gaz, & nous y Tommes parvenus en
etnprantarittîHfecond nom de celui de fa bare.
Nous appellerons donc gaz aqueux Peau com-
binée avec le calorique, & dans l'état de fluide
élailique aériforme la combinaifon de l'éther
celle de
avec le calorique, fera le gaz éthéré;
refprît-de-vin avec le calorique fera le gaz
alkoolique nous aurons de même le gaz acide
muriatique le gaz ammoniaque, & ainfi de
fur
tous les autres. Je m'étendrai davantage cer
article quand il fera queflion de nommer les
différentes bafes.
On a vu que l'air de ratmofphère étoit
principalement compofé de deux fluides aéri-
formes ou gaz, l'un refpirable fufceptibles
d'entretenir la vie des animaux dans lequel
les métaux fe calcinent & les corps combufli-
bles peuvent brûler; l'autre qui a dès proprié-
tés abfolument oppofées^ que les animaux ne
peuvent refpirer, qui ne peut entretenir la
combuftion &c. Nous avons donné à la bafe
de la portion refpirable de l'air le nom d'oxy-
gène, en le dérivant de deux mots Grecs
acide, & yilvo^i, j'engendre parce qu'en effet
une des propriétés les plus générales de cette
bafe eft de former des acides, en fe combinant
avec la plupart des fubftances. Nous appelle-
rons donc gaz oxygène la réunion de cette bafe
avec le calorique fa pefanteur dans cet état
cil affez exaftement d'un demi-grain poids de
xnarc, par pouce cube, ou d'une once & demie
par pied cube, le tout à 10 degrés de tempéra-
ture, & à 28 pouces du baromètre.
Les propriétés chimiques de la partie non
refpirable de l'air de Patmofphère n'étant pas
encore très-bien connues, nous nous fommes
contentés de déduire le nom de fa bafe de la
propriété qu'a ce gaz de priver de la vie les
animaux qui le refpirent nous l'avons donc
nommé azote de V* privatif des Grecs, & de
£ù>»s vie ainf la partie non refpirable de l'air
fera le gaz azotique. Sa pefanteur eft d'une
once, 2 gros 48 grains le pied cube, ou de
o,z"in 4444 le pouce cube.
Nous ne nous fommes pas difiimulé que ce
nom prélentoit quelque chofe d'extraordinaire;
mais c'eft le fort de tous les noms nouveaux
ce n'eft que par l'ufage qu'on fe familiarité
avec eux. Nous en avons d'ailleurs cherché
long-temps un meilleur, fans qu'il nous ait été
poffible de le xencontrer nous avions été
tentés d'abord de le nommer gaz alkaligène»
parce qu'il eft prouvé, par les expériences de
M. Berthollet comme on le verra dans la
fuite, que ce gaz entre dans la compofition
de falkalï volatil ou ammoniaque mais d'un
autre côté, nous Savons point encore la preuve
qu'il foit un des principes conftitutifs des au-
tres alkalis il eft d'ailleurs prouvé qu'il entre
également dans la combïnaifon de l'acide ni-
trique on auroit donc été tout auflr fondé à
le nommer principe nitrigène. Enfin nous avons
du rejetter un nom qui comportoit une idée
fyftématique & nous n'avons pas rifqué de
nous tromper en adoptant celui (Falote & de
gaz azotique, qui n'exprime qu'un fait ou plu-
tôt qu'une propriété celle de priver de la vie
les animaux qui refirent ce gaz.
J'anticiperais fur des notions réfervées pour
des articles fubféquens fi je m'étendais davan-
tage fur la nomenclature des différentes efpèce
de gaz. Il me füffit d'avoir donné ici non Ia
dénomination de tous, mais la méthode de les
nommer tous. Le mérite. de la nomenclature
que nous avons adoptée, confifte principale-
ment en ce que la fubftance fîmple étant nom-
mée, le nom de tous fes compofés découle
ncceuairement de ce premier mot.
CHAPITRE V.

De la décompofition du gaz oxygène par le


foufre le phofphore & le charbon de la
formation des acides en général.
UN des principes qu'on
ne doit jamais per-
dre de vue dans l'art de faire des expériences,
eft de les Cmplifier le plus qu'il eft poffible &
d'en écarter toutes les circonftances qui peu-
vent en compliquer les effets. Nous n'opére-
ïons donc pas dans les expériences qui vont
faire l'objet de ce Chapitre, fur de l'air de
l'atmosphère, qui n'eft point une fubftahce
fmpIe. Il eft bien vrai que le gaz azotique,
qui fait une partie du mélange qui le conftitue,
paroît être purement paffif dans les calcinations
& les combuflions mais comme il les ral-
lentit, Se comme il n'eft pas impoffible même
qu'il en altère les réfultats dans quelques cir-
confiances, il m'a paru néceffaire de bannir
cette caufe d'incertitude.
J'expoferai donc, dans les expériences dont
je vais rendre compte, le réfultat des com-
bullions tel qu'il a lieu dans l'air vital ou gaz
oxigènepur,& j'avertirai feulement des différen-
ces qu'elles.préfententquand le gaz oxygène eft
mêlé de différentes proportions de gaz azotique.
J'ai pris une cloche de criftal A, planche IV,
figure 3 de cinq à fîx pintes de capacité
je l'ai emplie de gaz. oxygène fur de l'eau
après quoi je l'ai tranfportée fur le bain de
mercure au moyen d'une capfule de verre que
j'ai paffée par deffous j'ai enfuite feché la
furface du mercure & j'y ai introduit 6"i grains
j de phofphore de Kunkel, que j'ai divifés dans
deux capfules de porcetaine, t femblable à celle
qu'on voit en D figure 3 fous la cloche A
& pour pouvoir allumer chacune de ces deux
portions féparément & que l'inflammation ne
fe communiquât pas de l'une à l'autre, j'ai re-
couvert l'une des deux avec un petit carreau de
verre. Lorfque tout a été ainfi préparé j'ai
élevé le mercure dans la cloche à la hauteur
E F, en fuÇant avec un fphon de verre G H I
même figure qu'on introduit par-deffous la
cloche pour qu'il ne fe rempliffe pas en paffant
à travers le mercure, on tortille à fon extrê-
mité I, un petit morceau de papier.. Puis avec
un fer recourbé rougi au feu, repréfenté figure
tS, j'ai allumé fucceffivement le phofphore des
deux capfules en commençant par celle qui
eétoit point recouverte avec un carreau de
verre.
La combutlion s'eft faite avec une grande
rapidité, avec une flamme brillante & un dé-
gagement confidérable de chaleur & de lumière.
Il y a eu dans le premier infiant une dilatation
confidérable du gaz oxygène, occafionnée par
la chaleur mais bientôt le mercure a remonté
au-deiïhs de fon niveau, & il y a eu une ab-
forption confidérable en même temps tout
l'intérieur de la cloche s'en tapiffé de flocons
blancs, légers, qui n'étoient autre chofe que
de l'acide phofphorique concret.
La quantité de gaz oxygène employée, étoit,
toutes corrections faites, au commencement de
l'expérience de i62 pouces cubiques elle
s'en trouvée à la fin feulement de 23 pouces
la quantité de gaz oxygène abforbée avoit
donc été de 138 pouces ou de 69,grains37r.
La totalité du phofphore n'étoit pas brûlée
il en reftoit dans les capfules quelques por-
tions, qui, lavées, pour en féparer l'acide, &
féchées fe font trouvées pefer environ i6
grains| ce qui réduit à peu près à «jy grains
la quantité de phofphore brûlée je dis à peu
près, parce qu'il ne feroit pas impoffible qu'il
n'y eût eu un ou deux grains d'erreur fur le
poids du phofphore reilant après la com-
bullion.
Ainf dans cette opération, tf grains de
phofphore fe font combinés avec 69,grains 37r
d'oxygène; & comme rien de pefant ne paffe
à travers le verre, on a droit d'en conclure
que le poids de la fubfîance quelconque qui
3 réfulté de cette combinaifon & qui s'était
raflemblée en flocons blancs, devoit s'élever
à la fomme du poids de l'oxygène & de celui
du phofphore, c'eft-à-dire à H4,sra!ns 377.
On. verra bientôt que ces flocons blancs ne
font autre chofe qu'un acide concret. En rédui-
fant ces quantités au quintal on trouve qu'il
faut employer ifâ liv. d'oxygène pour faturer
zoo liv. de phofphore & qu'il en réfulte
2/4 liv, de floco.ns blancs ou acide phofpho-
rique concret.
Cette expérience prouve dJuue manière évi-
dente, qu'à un certain degré de température,
l'oxygène a plus d'affrnité avec le phofphore
qu'avec le calorique qu'en conféquence le
phofphore décompofe le gaz oxygène, qu'il
s'empare de fa bafe & qu'alors le calorique,
qui devient libre, s'échappe & fe diffipe en
fe répartiffant dans les corps envkonnans*
Mais quelque concluante que fût cette expé-
rience, elle n'étoit pas encore fuflfifamment
rigoureufe en effet, dans fappareil que j'ai
employé & que je viens de décrire, il n'eu:
pas poffible de vérifier le poids des flocons
blancs ou de l'acide concret qui s'efl formé
on ne peut le conclure que par voie de calcul
& -en le fuppofant égal à la fomme du poids
de l'oxygène & du phofphore or quelqu'évi-
dente que fût cette conclufion il n'eft jamais
permis en Phyfique & en Chimie, de fuppofer
ce qu'on peut déterminer par des expériences
direâes. J'ai donc cru devoir refaire cette ex-
périence un peu plus en grand, & avec un
appareil différent.
J'ai pris un grand ballon de verre A, planche
IF, figure 4, dont l'ouverture E F avoit trois
pouces de diamètre. Cette ouverture fe recou-
vroit avec une plaque de criflal ufëe à l'émeril
laquelle étoit percée de deux trous pour le paffa-
ge des tuyaux yyy, xxx.
Avant de fermer le ballon avec fa plaque,
j'y ai introduit un fupport B C furmonté d'une
capfùle de porcelaine D qui contenoit ijo
grains de phofphore tout étant ainf difpofé
j'ai adapté la plaque de crifial fur l'ouverture
du matras & j'ai lutté avec du lut gras
que j'ai recouvert avec des bandes de linge
imbibées de chaux & de blanc d'oeuf lorfque
ce lut a été bien féché j'ai fufpendu tout cet
appareil au bras d'une balance, & j'en ai dé-
terminé le poids à un grain ou un grain &
demi près. J'ai enfuite adapté le tuyau xxx,
à une petite pompe pneumatique, & j'ai fait
le vuide après quoi ouvrant un robinet adapté
au tuyau yyy, j'ai introduit du gaz oxygène
dans le ballon. J'obferverai que ce genre d'ex-
périence fe fait avec alfez de facilité & fur-
tout avec beaucoup d'exaâitude, au moyen
de la machine hydro-pneumatique dont nous
avons donné la defcription, M. Meufilier & moi,
dans les Mémoiresde l'Académie, année 1782
page 466, & dont on trouvera une explication
dans la dernière Partie de cet Ouvrage; qu'on
peut à l'aide de cet inflrument auquel M.
Meufnier a fait depuis des additions & des
correFtions importantes, connoître d'une manière
rigoureufe,la quantitéde gaz oxygène introduite
dans le ballon, & celle qui s'eft confommée
pendant le cours de l'opération.
Lorfque tout a été ainfi difpofé, j'ai mis le
feu au phofphore avec un verre ardent. La
combuftion a été extrêmement rapide, accom-
pagnée d'une grande Hamme & de beaucoup
de chaleur à mefure qu'elle s'opérait, il fe
formoit une grande quantité de flacons blancs
qui s'attachoient fur les parois intérieures du
vafe, & qui bientôt l'ont obfcurci entièrement.
L'abondance des vapeurs étoit même telle,
que quoiqu'il rentrât continuellement de nou-
veau gaz oxygène qui auroit dû entretenir la
combuflion, le phofphore s'eft bientôt éteint.
Ayant laiffé refroidir parfaitement tout l'appa-
reil, j'ai commencé par m'augurer de la quan-
tité de gaz oxygène qui avoit été employée,
& par pefer le ballon avant de l'ouvrir. J'ai
enfuite lavé, féché & pefé la petite quantité
de phofphore qui étoit rellée dans la capfule,
& qui étoit de couleur jaune d'ocre afin de
la déduire de la quantité totale de phofphore
employée dans l'expérience. Il eft clair qu'à
l'aide de ces différentes précautions, il m'a été
facile de conflacer, 1°. le poids du phofphore
brûlé; 20. celui des flocons blancs obtenus par
la combuflion 30. le poids du gaz oxygène
qui s'étoit combiné avec le phofphore. Cette
expérience m'a donné peu près les mêmes
réfultats que la précédente il en a également
réfulté que le phofphore en brûlant, abforboit
un peu plus d'une fois & demie fon poids
d'oxygène & j'ai acquis de plus la certitude
que le poids de la nouvelle fubflance produite
étoit égal à la fomme du poids du phofphore
brûlé & de l'oxygène qu'il avoit abforbé
ce
qu'il étoit au furplus facile de prévoir à priori.
Si le gaz oxygène qu'on a employé dans
cette expérience étoit pur le réfidu qui refle
après la combuflion eft également pur; ce qui
prouve qu'il ne s'échappe rien du phofphore
qui puîffe altérer la pureté de l'air, & qu'il
n'agit qu'en enlevant au calorique fa bafe
c'eft-à-dire l'oxygène qui y étoit uni.
J'ai dit plus haut que fi on brûloit un corps
combufliblequelconque dans une fphère creufe
de glace ou dans tout autre appareil confiruit
fur le mêmes principe, la quantité de glace fon-
due pendant la conibuilion, étoit une mefure
exafte de la quantité de calorique dégagé. On
peut confulter à cet égard le Mémoire que
nous avons donné en commun à l'Académie,
M. de la Place & moi, année 1780, page 3 j'y.
Ayant fournis la combuftion du phofphore à
cette épreuve, nous avons reconnu qu'une livre
de phofphore. en brûlant, fondoit un peu plus
de ioc liv. de glace.
La combufiion du phofphore réuffît égale-
ment dans l'air de l'atmosphère, avec ces deux
différences feulement, i°. que la combuflion
eft beaucoup moins rapide, attendu qu'elle eft
rallentie par la grande proportion de gaz azo-
tique qui fe trouve mêlé avec le gaz oxygène
2°. que le cinquième de l'air, tout au plus, en
feulement abforbé, parce que cette abforption
fe faifant toute aux dépens du gaz oxygène,
la proportion du. gaz azotique devient telle
vers la fin de l'opération, que la combuftion
ne peut plus avoir lieu.
Le
Le phofphore par fa combuflion, foit dans
l'air ordinaire, foit dans le gaz oxygène, fe
transforme,. comme je l'ai déjà dit, en une
matière blanche floconneufe très-légère, & il
acquiert des propriétés toutes nouvelles. d'in-
foluble qu'il étoit dans l'eau, non-feulement il
devient foluble mais il attire l'humidité
con-
tenue dans Pair avec une étonnante rapidité
& il fe réfout en une liqueur beaucoup plus
denfe que l'eau, & d'une pefanteur fpécifique
beaucoup plus grande. Dans fétat de phof-
phore, & avant fa combuftion il n'avoit pref-
qu'aucun goût; par fa réunion avec l'oxygène,
il prend un goût extrêmement aigre & piquant
enfin, de la clatre des combuflibles, il paffe
dans celle des fubiîances incombuftibles & il
devient ce qu'on appelle un acide.
Cette converfibilité d'une fubflance combuf-
tible en un acide par faddition de l'oxygène,
eft, comme nous le verrons bientôt, une pro-
priété commune à un grand nombre de corps r
or en bonne logique, on ne peut fe difpenfec
de défrgner fous un nom commun toutes les
opérations qui préfentent des réfultats analo-
gues c'ell le feul moyen de fimplifier l'étude
des Sciences, & il feroit impoffible d'en
rete-
nir tous les détails fi on ne s'attaclioit à les
clafler, Nous nommerons donc oxygénation la
converfion du phofphore en un acide, & en
général la combinaifon d'un corps combultible
quelconque avec l'oxygène.,
Nous adopterons également l'expreffion
& oxygéner,& je dirai en conféquence qu'en oxy-

génant le phofphore on le convertit en un


acide.
Le foufre eft égalementun corps combuflible,
c'eft-à-dire, qui a la propriété de décompofer
rair, & d'enlever l'oxygène au calorique. On
peut s'en affurer aifément par des expériences
toutes femblables à celles que je viens de détail-
ler pour le phofphore mais je dois avertir qu'il
eft impoffible, en opérant de la même manière
fur le foufre, d'obtenir des réfültats auffi exaâs
que ceux qu'on obtient avec le phofphore; par
la raifon que l'acide qui fe forme par la com-
buftion du foufre elt difficile à condenfer que
le foufre lui-même brûle avec beaucoup de
difficulté, & qu'il eft fufceptible de fe di1foudre
dans les différens gaz. Mais ce que je puis
affurer, d'après mes expériences, c'eft que le
foufre en brûlant, abforbe de l'air que l'acide
qui fe forme eil beaucoup plus pefant que
n'étoit le foufre que fon poids eft égal à la
fomme du poids du fourre, & de l'oxygène
qu'il a abforbé; enfin, que cet acide eft pefant,
incombuilible, fufceptible de fe combiner avec
l'eau en toutes proportions il ne refle cfin-
certitude que fur la quantité de foufre &
d'oxygène qui confiituent cet acide.
Le charbon que tout.jufqu7à préfent porte
à faire regarder comme une fubflance com-
buRible fimple a également la propriété de
décompofer le gaz oxygène & d'enlever fa bafe
au calorique mais l'acide qui refaite de cette
combullion ne fe condenfe pas au degré de
preffîon & de température dans lequel nous
vivons il demeure dans l'état de gaz & il
faut une grande quantité d'eau pour l'absorber.
Cet acide, au furplus, a toutes les propriétés
communes aux acides mais dans un degré
plus foible & il s'unit comme eux à toutes les
bafes fufceptibles de former des fels neutres.
On peut opérer la combuflion du charbon,
comme celle du phofphore, fous une cloche
de verre A, planche IV, figure 3 remplie de
gaz oxygène, & renverfée dans du mercure
mais comme la chaleur d'un fer chaud & même
rouge, ne fuffiroit pas pour l'allumer, on ajoute
par-deffus le charbon, un petit fragment d'a-
madoue & un petit atome de phofphore. On
allume facilement le phofphore avec un fer
rouge finflarrrrnation fe communique enfuite
à l'amadoue puis au charbon.
On trouve le détail de cette expérience
Mémoires de l'Académie, année 1781, page
448. On y verra qu'il faut 72 parties d'oxygène
en poids, pour en faturer 28 de charbon, &
que l'acide aériforme qui eft produit, a une
pefanteur juftement égale à la fomme des poids
du charbon & de L'oxygène qui ont fervi à le
former. Cet acide aériforme a été nommé air
irxe, ou air fixé par les premiers Chimiftes qui
l'ont découvert; ils ignoroient alors fi c'étoit
de l'air femblable à celui de l'atmofphère ou
un autre fluide élaftique, vicié & gâté par la
combuftion mais puifqu'il eft confiant aujour-
d'hui que cette fubflance aériforme eft un
acide, qu'il fe forme comme tous les autres
acides, par l'oxygénation d'une bafe, il eft aifé
de voir que le nom d'air fixe ne lui convient
point.
Ayant euayé, M. de la Place & moi de
brûler du charbon dans l'appareil propre à
déterminer la quantité de calorique dégagée,
nous avons trouvé qu'une livre de charbon en
brûlant, fondoit<?6liv. 6 onces déglace 2 liv.
9 onces, i gros, 10 grains d'oxygène fe com-
binent avec le charbon dans cette opération
& il fe forme 3 liv. 9 onces, 1 gros, 10 grains
de gaz acide ce gaz pèfe o,8rain 69S le pouce
cube, ce qui donne 31212 pouces cubiques
pour le volume total de gaz acide qui fe
forme par la combuflion d'une livre de
charbon.
Je pourrois multiplier beaucoup plus les
exemples de ce genre, & faire voir par
une fuite
de faits nombreux, que la formation des acides
s'opère par l'oxygénation d'une fubftance quel-
conque mais la marche que je me fuis engagé à
fuivre & qui confine à ne procéder
que du connu
à l'inconnu & à ne préfenter
au Leéteur que
des exemples puifés dans des chofes qui lui
ont été précédemment expliquées, m'empêche
d'anticiper ici fur les faits. Les trois exemples
d'ailleurs que je viens de citer, fuffifent
pour
donner une idée claire & précife de la manière
dont fe forment les acides. On voit que foxi-
gène eft un principe commun à tous, &
que
c'efl lui qui conflitue leur acidité qu'ils font
enfuite différenciés les uns des autres
par la
nature de la fubflance acidifiée. Il faut donc
diftinguer dans tout acide, la bafe acidifiable à
laquelle M. de Morveau a donné le
nom de
radical, & le principe acidifiant, c'eft-à-dire,
l'oxigène.
CHAPITRE VI.
De nomenclature des Acides en général &
lca
particulièrementde ceux tirés du falpêtre & du.
fel marin.
RiEN n*eft plus aifé, d'après les principes
pofés dans le Chapitre précédent, que d'éta-
blir une nomenclature méthodique des acides
le mot acide fera le nom générique;chaque acide
fera enfuite différencié dans le langage commc
il l'eft dans la nature, par le nom de fa bafe
ou de fon radical. Nous nommerons donc acides
en général, le réfultat de la combuflion ou de
l'oxygénation du phofphore, du foufre & du
charbon. Nous nommerons le premier de ces
réfultats acide phofphorique, le fecond acide
fulfurique, le traifième acide carbonique. De
même, dans toutes les occaGons qui pourront
fe préfenter, nous emprunterons du nom de
la bafe la défignation fpécifique de chaque
acide.
Mais une circonftance remarquable que pré-
fente foxygénation des corps combuflibles, &
en général, d'une partie des corps qui fe tranf-
forment en acides, c'eft qu'ils font fufeepti-
bles de différens degrés de faturation; & les
acides qui en réfnltent quoique formés de la
combinaifon des deux mêmes fubitances, ont
des propriétés fort différentes, qui dépendent
de la différence de proportion. L'acide phof-
phorique, & fur-tout l'acide fulfurique, en
foumiffent des exemples. Si le foufre eft com-
biné avec peu d'oxygène il forme à ce pre-
mier degré d'oxigénation un acide volatil, d'une
odeur pénétrante & qui a des propriétés tou-
tes particulières. Une plus grande proportion
d'oxygène le convertit en un acide fixe, pefant,
fans odeur, & qui donne dans les combinaifons
des produits fort différens du premier. Ici le
principe de notre méthode de nomenclature
fembloit fe trouver en défaut, & il paroiffoit
difficile de tirer du nom de la bafe acidifiable
deux dénominations qui exprimaient, fans cir-
conlocution & fans périphrafe les deux degrés
de faturation. Mais la réflexion, & plus encore
peut-être la néceirté, nous ont ouvert de nou-
velles reffources & nous avons cru pouvoir
nous permettre d'exprimer les variétés des aci-
des par de fimples variations dans les termi-
naifons. L'acide volatil du foufre avoit été dé-
figné par Stahl fous le nom d'acide fulfureux
nous lui avons confervé ce nom & nous avons.
donné celui de fulfuriqtie à l'acide du foufre
complettement faturé d'oxygène. Nous dirons
donc en nous fervant de ce nouveau langage
que le foufre, en fe combinant avec l'oxygène,
eft fufceptible de deux degrés de faturation
le premier conftitue l'acide fulfureux qui eft
pénétrant & volatil le fécond conflitue l'acide
l'ulfurique, qui eft inodore & hxe. Nous adop-
tersons ce même changement de terminaifon
pour tous les acides qui préfenteront plufieurs
degrés de faturation nous aurons donc égale-
ment un acide phofphoreux & un acide phof-
phorique, un acide acéteux & un acide acéti-
que, & ainfi des autres.
Toute cette partie de la chimie auroït été
extrêmement fîmple & la nomenclature des
acides n'auroit rien préfenté d'embarrauant, fi,
lors de la découverte de chacun d'eux on
eut connll fon radical ou fa bafe acidifiable. L'a-
cide phofpharique, par exemple, n'a été dé-
couvert que poflérieurement à la découverte
du phofphore, & le nom qui lui a été donné
a été dérivé en conféquence de celui de la bafe
acidifiable dont il eft formé. Mais lorsqu'au con-
traire l'acide a été découvert avant la bafe, ou
plutôt Iorfqu'à l'époque où l'acide a été décou-
vert, on ignoroit quelle étoit la bafe acidifia..
ble à laquelle il appartenoit, alors on a donné
à l'acide & à la bafe des noms qui n'avoient
aucun rapport entr'eux & non- feulement on a
furchargé la mémoire de dénominationsinuti-
les, mais encore on a porté dans l'efprit des
commençans& même des Chimiftes confommés,
des idées fauffes que le tems feul & la réflexion
peuvent effacer.
Nous citerons pour exemple l'acide du fou.
fre. C'eil du vitriol de fer qu'on a retiré cet
acide dans le premier âge de la Chimie; 8c on
l'a nommé acide vitriolique en empruntant ion
nom de celui de la fubflance dont il étoit tiré.
On ignoroit alors que cet acide fût le même
que celui qu'on obtenoit du fouFre par la com-
buftion.
Il en efi de même de l'acide aériforme au-
qnel on a donné originairement le nom d'air
fixe on ignoroit que cet acide fût le réfultat
de la combinaifon du carbone avec l'oxygène.
De-là une infinité de dénominations qui lui ont
été données & dont aucune ne tranfmet des
idées juftes. Rien ne nous a été plus facile que
de corriger & de modifier l'ancien langage à
l'égard de ces acides nous avons converti le
nom d'acide vitriolique en celui d'acide fulfu-
ridue, & celui d'air fixe en celui'd'acide car-
bonique mais il ne nous a pas été poffible de
fuivre le même plan à l'égard des acides dont
la bafe nous étoit inconnue. Nous nous fom-
mes trouvés alors forcés de, prendre une mar-
che inverfe & au lieu de conclure le
nom
de l'acide de celui de la bafe
nous avons
nommé au contraire la bafe d'après la déno-
mination de l'acide. C'eft ce qui nous efl ar-
rivé pour l'acide qu'on retire du fel marin
ou
fel de cuifine. Il fuffit, pour dégager cet acide,
de verfer de l'acide fulfurique fur du fel ma-
rin auQitôt il fe fait
une vive effervefcence,
il s'élève des vapeurs blanches d'une odeur
très-pénétrante & en faifant légèrement chauf-
fer, on dégage tout l'acide. Comme il eft na-
turellement dans fétat de gaz au degré de
température & -de preffion dans lequel nous
vivons, il faut des précautionsparticulièrespour
le retenir. L'appareil le plus commode & le
plus fimple pour les expériences petit,
en con-
ffte en une petite cornue G, plancke F ~,fig. 5,
dans laquelle on introduit du fel marin bien
fec; on verfe deffiis de l'acide fulfurique con-
centré, & auffi-tôt on engage le bec de la cor-
nue fous de petites jarres ou cloches de verre
A même figure qu'on a préalablement rem-
plies de mercure. A mefure que le gaz acide
fe dégage il pane dans la jarre & gagne le
haut en déplaçant le mercure. Lorfque le dé-
gagement fe rallentit, on chauffe légèrement
& on augmente le feu jufqu'à ce qu'il ne pafle
plus rien. Cet acide a une grande affinité avec
l'eau, & cette dernière en abforbe une énorme
quantité. On peut s'en affurer en introduifant
une petite couche d'eau dans la jarre de verre
qui le contient; en un infant l'acide fe com-
bine avec elle & difparoît en entier. On pro-
fite de cette circonflance dans les laboratoires
& dans les arts, pour obtenir l'acide du fel
marin fous la forme de liqueur. On fe fert à
cet effet de l'appareil repréfenté planche IF,
figure première. Il confile i°. dans une cornue
A, où l'on introduit le fel marin, & dans la-
quelle on verfe de facide fulfurique par la
tubulure H$ 2°. dans un ballon e defliné à
recevoir la petite quantité de liqueur qui fe
dégage 53°. dans une fuite de bouteilles à deux
gouleaux L L' L" L'" qu'on remplit d'eau à
moitié. Cette eau etl deflinée à abforber le gaz
acide qui fe dégage pendant la diflillation. Cet
appareil eft plus amplement décrit dans la der-
nière partie de cet Ouvrage.
Quoiqu'on ne foit encore parvenu ni à com-
pofer, ni à décompofer l'acide qu'on retire du
fel marin on ne peut douter cependant qu'il
ne foit formé, comme tous les autres, de la réu-
non d'une bafe acidifiable avec l'oxygène. Nous
avons nommé cette bafe inconnue bafe muria-
tïqiie, radical muriatique, en empruntant ce
non, à l'exemple de M. Bergman & de M. de
Morveau, du mot latin muria, donné ancien-
nement au fel marin. Ainfi, fans pouvoir dé-
terminer quelle eft exactement la compofition
de l'acide muriatique nous défgnerons fous
cette dénomination un acide volatil, dont Tétât
naturel eft d'être fous forme gazeufe au degré
de chaleur & de preffion que nous éprouvons,
qui fe combine avec l'eau en très-grande quan-
tité & avec beaucoup de facilité enfin dans
lequel le radical acidifiable tient fi fortement à
l'oxygène qu'on ne connoît jufqu'à préfent
aucun moyen de les féparer.
Si un jour on vient à rapporter le radical
muriatique à quelque ftibffince connue, il fau-
dra bien alors changer fa dénomination & lui
donner un nom analogue à celui de la bafe
dont la nature aura été découverte.
L'acide muriatique préfente au furplus une
circonftance très-remarquable; il eft comme
l'acide du foufre & comme plufeurs autres,
fufceptible de différens degrés d'oxygénation
mais l'excès d'oxygène produit en lui un effet
tout contraire à celui qu'il produit dans Paciie
du foufre. Un premier degré d'oxygénation
transforme le foufre en un acide gazeux vola-
til, qui ne fe mêle qu'en petite quantité avec
feaW, c'eft celui que nous défgnons avec Stahl
fous le nom d'acide fulfureux. Une dofe plus
forte d'oxygène le convertit en acide fulfuri-
que, c'eft-à dire en un acide qui préfente des
qualités acides plus marquées, qui eft beaucoup
plus fixe, qui ne peut exiger dans l'état de gaz
qu'à une haute température, qui n'a point d'o-
deur & qui s'unit à l'eau en très-grande quan-
tité. C'eft le contraire dans l'acide muriatique;
l'addition d'oxygène le rend plus volatil, d'une
odeur plus pénétrante moins mifcible à l'eau,
& diminue fes qualités acides. Nous avions d'a-
bord été tentés d'exprimer ces deux degrés de
faturation comme nous l'avions fait pour l'a-
cide du foufre en faifant varier les terminai-
faiis. Nous aurions nommé l'acide le moins
faturé d'oxygène acide muriateux, & le plus
faturé acide muriatique; mais nous avons cru
que cet acide qui préfente des réfultats parti-
culiers, & dont on ne connoît aucun autre
exemple en Chimie, demandoit une exception,
& nous nous fommes contentés de le nommer
acide muriatique oxygéné.
Il eft un autre acide que nous nous conten-
terons de définir comme nous l'avons, fait
pour l'acide muriatique quoique fa bafe foit
mieux connue c'efl celui que les Chimiftes ont
défigné jufqu'ici fous le nom d'acide nitreux.
Cet acide fe tire du nitre ou falpêtre par des
procédés analogues à ceux qu'on emploie pour
obtenir l'acide muriatique. C'eft également par
l'intermède de l'acide fulfurique qu'on le chaffe
de la bafe à laquelle il eft uni, & Pou fe fert
de même à cet effet de l'appareil repréfenté
planche IY, fig. J. A mefure que l'acide pafle
il eft abforbé par l'eau des bouteilles L L' L" L"'
qui devient d'abord verte, puis bleue, & enfin
jaune, fuivant le degré de concentration de
l'acide. Il fe dégage pendant cette opération
une grande quantité de gaz oxygène mêlé d'un
peu de gaz azotique.
L'acide qu'on tire ainf du falpêtre, eft com-
pofé, comme tous les autres d'oxygène uni
à une bafe acidifiable & c'eft même le pre-
mier dans lequel l'exigence de l'oxygène ait
été bien démontrée. Les deux principes qui le
conftituent tiennent peu ensemble, & on les
fépare aifément en préfentant à l'oxygène une
fubfiance avec laquelle il ait plus d'amnité qu'il
n'en a avec la bafe acidifiable qui conftitue
l'acide du nitre. C'eft par des expériencesde ce
genre qu'on eft parvenu à reconnoître que
l'a-
zote ou bafe de la mofète entroit dans fa com-
pofition, qu'elle étoit fa bafe acidifiable. L'a-
zote
eft donc véritablement le radical nitrique,
ou l'acide du nitre eft un véritable acide azo-
tique. On voit donc que pour être d7accord
avec nous-mêmes & avec nos principes, nous
aurions dû adopter l'une ou l'autre de ces ma-
nières de nous énoncer. Nous en avons été
détournés cependant par différens motifs; d'a-
bord il nous a paru difficile de changer le nom
de nitre ou de falpêtre généralement adopté
dans les arts, dans la fociété & dans la Chi-
mie. Nous n'avons pas cru, d'un autre côté,
devoir donner à l'azote le nom de radical ni-
trique, parce que cette fubftance eft également
la 'bafe de falkali volatil ou ammoniaque
comme l'a découvert M. Berthollet. Nous con-
tinuerons donc de défigner fous le nom d'azote
la bafe de la partie non refpirable de l'air at-
mofphérique, qui eft en même tems le radical
nitrique & le radical ammoniaque. Nous con-
ferverons- également le nom de nitreux & de
nitrique à l'acide tiré du nitre ou falpêtre. Plu-
fleurs Chimiftes d'un grand poids ont défap-
prouvé notre condefcendance pour les ancien-
nés dénominations ils auroient préféré que
nous euffions dirigé uniquement nos efforts
vers la perfe&ion de la nomenclature, que
nous euffions reconffruit l'édifice du langage
chimique de fond en comble, fans nous em-
barraffer de le raccorder avec d'anciens ufàges
dont le tems effacera inCenfblement le fouve-
nir & c'eft ainfi que nous nous fomales
trouvés expofés à la fois à la critique & aux
plaintes des deux partis oppofés.
L'acide du nitre eft fufceptible de fe pré-
fenter dans un grand nombre d'états qui dépen-
dent du degré d'oxygénation qu'il a éprouvé,
c'eft-à-dire, de la proportion d'azote & d'oxy-
gène qui entre dans fa compofition. Un premier
degré d'oxygénation de l'azote conititue un
gaz particulier que nous continuerons de
défi-
gner fous le nom de gaz nitreux il eft com-
pofé d'environ 2 parties en poids d'oxygène &
d'une d'azote, & dans cet état il eft immifci-
ble à l'eau. Il s'en faut beaucoup que l'azote
dans ce gaz foit faturé d'oxygène il lui relie
principe,
au contraire une grande affinité pour ce
& il l'attire avec une telle aâivité qu'il l'enlève
même à l'air de Patmofphère fitôt qu'il eft en
contaâ avec lui. La combinaîlon du gaz ni-
même de-
treux avec l'air de l'atmofphère eft
dé-
venue un des moyens qu'on emploie pour
terminer la quantité d'oxigène contenu dans ce
dernier, & pour juger de fon degré de falu-
brité. Cette addition d'oxygène convertit le gaz
nitreux en un acide puiffant qui a une grande
affinité avec l'eau, & qui eft fufceptible lui-
même de différens degrés d'oxygénation. Si la
proportion de l'oxygène & de l'azote eft au-
deffous de trois parties contre une, l'acide eft
rouge
rouge & fumant dans cet état nous le nom-
mons acide nitreux; on peut en le faifant légè-
rement chauffer, en dégager du gaz nitreux.
Quatre parties d'oxygène contre une d'azote
donnent un acide blanc & fans couleur, plus
fixe au feu que le précédent, qui a moins d'o-
deur, & dont les deux principes conllhutifs
font plus folidement oombinés nous lui avons
donné, d'après les principes expofés ci-defTusa
le nom d'acide nitrique.
Ainfî l'acide nitrique eil l'acide du nitre
fiarchargé d'oxygène l'acide nitreux eft l'acide
du nitre furchargé d'azote ou, ce qui eft la
mêmes chofe de gaz nitreux enfin le gaz
nitreux eft l'azote qui n'eft point iffez faturée
d'oxygène pour avoir les propriétés des acides.
C'eft ce que nous nommerons plus bas un
oxide.
CHAPITRE VIL
De la décompofition du Gaz oxygène par les
rrtétaux, & de la formation des Oxides mé-
talliques.
Lorsque les fubftâhces métalliques font
échauffées à un certain degré de température,
l'oxygène a plus d'affinité avec elles qu'avec
le calorique en conféquence toutes les fubf-
tances métalliques, fi on en excepte for,
l'ar-
gent & le platine, ont la propriété de décom-
pofer le gaz oxygène de s'emparer de fa bafe
& d'en dégager le calorique. On a déjà vu plus
haut comment s'opéroit cette dëcompofition de
l'air par le mercure & par le fer on a obfervé
que la première ne pouvoit être regardée que
comme une combuflion lente que la dernière
accompagnée
au contraire étoit très-rapide &
d'une flamme brillante. S'il eit néceflaire d'em-
ployer un certain degré de chaleur dans ces
opérations c'eft pour écarter les unes des
autres les molécules du métal, & diminuer
leur affinité d'aggrégation ou ce qui eft la même
choie, l'attraélion qu'elles exercent les unes fur
les autres.
Les fubilances métalliques pendant leur calci-
nation augmentent de poids à proportion de
l'oxygènequ'ellesabforbent; en même-temselles
perdent leur éclat métallique & fe réduifent en
une poudre terreufe. Les métaux dans cet état
ne doivent point être confidérés comme entiè-
rement faturés d'oxygène par la raifon que
leur adion fur ce principe eft balancée par la
force d'attradion qu'exerce fur lui le calorique.
L'oxygène dans la calcinationdes métaux, obéit
donc réellement à deux forces, à celle exercée
par le calorique, à celle exercée par le métal
il ne tend à s'unir à ce dernier qu'en raifon de
la différence de ces deux forces, de l'excès de
l'une fur l'autre, & cet excès en général n'eft
pas fort confidérable. Auffi les fubllances mé-
talliques, en s'oxygénant dans l'air & dans le
gaz oxygéne ne fe convertifTent elles point
en acides, comme le foufre, le phofphore &
le charbon il fe forme des fubftances intermé-
diaires qui commencent à fe rapprocher de l'état
falin mais qui n'ont pas encore acquis toutes
les propriétés falines. Les anciens ont donné
le nom de Chaux, non-feulement aux métaux
amenés à cet état, mais encore à toute fubflance
qui avoit été expofée long-tems à l'acHon du
feu fans fe fondre. Ils ont fait en conféquence
du mot chaux un nom générique, & ils ont
confondu fous ce nom & la pierre calcairs,
qui d'un fel neutre qu'elle étoit avant la calci-
nation, fe convertit au feu en un alkali terreux»
en perdant moitié de fon poids, & les métaux
qui s'affocient par la même opération une nou-
velle fubfiance dont la quantité excède quel-
quefois moitié de leur poids & qui les rap-
proche de l'état d'acide. Il auroit été contraire
à nos ptincipes de claffer fous un même nom
des fubflances fi différentes, & fur tout de
conferver aux métaux une dénominationfi pro-
pre à faire naître des idées fauues. Nous avons
Yexprefiion de chaux
en conféquence profcrit
métalliques., & nous y avons fuMitué celui
d'oxides du grec o|u«.
On voit d'après cela combien le langage que
nous avons adopté eft fécond &
expreffif un
premier degré d'oxygénation conflime les oxi-
des un fécond degré constitue les acides ter-
minés en eux, comme l'acide nitreux, l'acide
fulfureux; un troifième degré conftitue les aci-
des en ique tels que l'acide nitrique l'acide
fulfurique enfin nous pouvons exprimer un
quatrième degré d'oxigénation des fubftances,
en ajoutant l¥pithète d'oxygéné, comme nous
l'avons admis pour l'acide muriatique oxygéné.
Nous ne nous fommes pas contentés de dé-
fgner fous le nom à'oxides la combinaifondes
métaux avec l'oxygène, nous n'avons fait au-
cune difficulté de nous en fervir pour exprimer
le premier degré d'oxygénation de toutes les
fubftances celui qui, fans les conflituer acides,
les rapproche de l'état falin. Nous appellerons
donc oxide de foufre le fortfre devenu
mou
par un commencement de combuilion; nous
appellerons oxide de phofphore la fubflance
jaune que laifle le phofphore quand il a brûlé.
Nous dirons de même que le gaz nitreux
qui eft le premier degré d'oxygénation de l'a-
zote, eft un oxide d'azote. Enfin le règne vc»
gétal & le règne animal auront leurs osides,
& je ferai voir dans la fuite combien
ce nou-
veau langage jettera de lumières fur toutes les
opérations de l'art & de la nature.
Les oxides métalliques ont comme
nous
l'avons déjà fait obferver prefque
tous des
couleurs qui leur font propres & ces couleurs
varient non-feulement pour les diflerens mé-
taux, mais encore fuivant le degré d'oxygéna-
tion du même métal. Nous nous femmes donc
trouvés obligés d'ajouter à chaque oxide deux
épithètes l'une qui indiquât le métal oxidé
1 autre fa couleur ainfï nous dirons oxide noir
de fer, oxide rouge de fer oxide jaune de
fer; & ces expreffions répondront à celles d'é-
thiops martial, de colcothar de rouille de fer ou
d'ocre.
Nous dirons de même oxide gris de plomb,
oxide jaune de plomb, oxide rouge de plomb;
& ces expreffions défigneront la cendre de
plomb, le mafficot & le minium.
Ces dénominationsferont quelquefois un peu
longues, fur-tout quand on voudra exprimer
fi le métal a étéoxidé à l'air, s'il fa été par la
détonation avec le nitre ou par Fadion des
acides mais au moins elles feront toujours
juftes & feront naître l'idée précife de l'objet
qui y correfpond.
Les tables jointes à cet Ouvrage, rendront
ceci plus fenfible.
CHAPITRE VIII.
Du yrincipe radical de VEau & de fa décom-
pofition par le Eharbon & par le fer.
Jusqu'à ces derniers tems on avoit regardé
l'eau comme une fubflance Cmple & les an-
ciens n'avoient fait aucune difficulté de la qur
lifer du nom d'élément c'étoit fans doute une
fubflance élémentaire pour eux, puifqu'ils n'é-
toient point parvenus à la décompofer ou
au moins puifque les décompofîtions de l'eau
qui s'opéroient journellement fous leurs yeux
avoient échappé à leurs obfervations mais on
va voir que feau n'eu plus un élément pour
nous. Je ne donnerai point ici l'hifloire de
cette découverte qui eft très-moderne & qui
même eft encore conteflée. On peut confulter
à cet égard les Mémoires de l'Académie des
Sciences, année 1781.
Je me contenterai de rapporter les principaler
preuves de la décompofition & de la recom-
poftion de l'eau; j'ofe dire que quand on vou-
dra bien les pefer fans partialité, on les trou-
vera démonflxatives.
EXPERIENCE PREMIÈRE,
Préparation.

On prend un tube de verre EF ^planche VIL,


fig. il de 8 à 12 lignes de diamètre, qu'on
fait palier à travers un fourneau, en lui don-
nant une légère inclinaifon de E en F. A l'ex-
trêmité fupérieure E de ce tube, on aj ulle une
cornue de verre A, qui contient une quantité
d'eau diftillée bien connue & à fon extrêmité
inférieure F un ferpentin S S' qui s'adapte en
S'au gouleau d'un flacon H à deux tubulures;
enfin l'une des deuxtubuluresdu flacon s'ada pte
un tube de verre recourbé KK, defliné à con-
duire les fluides aériformes ou gaz dans un ap-
pareil propre à en déterminer la qualité & la
quantité.
TI eft néceffaire, pour aîîurer le fuccés de
cette expérience que le tube E F foit de verre
Vert bien cuit & d'une fufion difficile on l'en-
duit en outre d'un lut d'argile mêlée avec du
ciment fait avec des poteries de grès réduites en
poudre & dans la crainte qu'il ne fléchiffe par
le ramollilfement, on le foutient dans fon milieu
avec une barre de fer qui traverfe le fourneau.
Des tuyaux de porcelaine font préférables à
ceux de verre mais il eft difficile de s'en pro-
curer qui ne foient pas poreux, & prefque
toujours on y découvre quelques trous qui
donnent paffage à l'air ou aux vapeurs.
Lorfque tout a été aïnfî difpofé, on allume
du feu dans le fourneau EFCD, & on l'en-
tretient de manière à faire rougir le tube de
verre EF, fans le fondre; en même tems on
allume affez de feu dans le fourneau V VXX,
pour entretenir toujours bouillante l'eau de la
cornue A.
Effet,

A mefure que feau de la cornue A fe va..


porife par l'ébullition elle remplit l'intérieur
du tube EF, & elle en chaffe fair commuu
qui s'évacue par le tube KK; le gaz aqueux
ell enfuite condenfé par le refroidiffement dans
le ferpentin S S' & il tombe de l'eau goutte à
goutte dans le flacon tubulé H.
En continuant cette opération jufqu'à ce que
toute l'eau de la cornue A foit évaporée, &
en iailTant bien égoutter les vaiflèaux on re-
trouve dans le flacon H une quantité d'eau
rigoureufement égale à celle qui étoit dans la
cornue A, fans qu'il y ait eut dégagement d'au-
cun gaz; en forte que cette opération fe ré-
duit à une fimple diflillation ordinaire, dont
le réfultat efl absolument le même que fi l'eau
n'eût point été portée à l'état incandescent, en.
traversant le tube intermédiaire EF.

EXPÉRIENCE SECONDE.
Préparation.

On difpofe tout comme dans l'expérience


précédente avec cette différence feulement
qu'on introduit dans le tube EF vingt huit
grains de charbon concaffé en morceaux de
médiocre groffeur & qui préalablement a été
long-tems expofé à une chaleur incandefcente
dans des vaiffeaux fermés. On fait, comme
dans l'expérience précédente, bouillir l'eau de
la cornue A jufqu'à évaporation totale.

L'eau de la cornue A fe diflille dans cette


expérience comme dans la précédente; elle fe
condenfe dans le ferpentin & coule goutte à
goutte dans le flacon H; mais en même tems
il fe dégage une quantité confidérable de gaz,
qui s'échappe par le tuyau KK, & qu'on re-
cueille dans un appareil convenable.
L'opération finie on ne retrouve plus dans
le tube EF que quelques atomes de cendre;
les vingt-huit grains de charbon ont totalement
difparu.
Les gaz qui fe font dégagés examinés avec
foin, fe trouventpefer enfemble 113 grains-~(a)5
ils font de deux efpèces favoir j,^ pou-
ces cubiques de gaz acide carbonique pe-
fant 100 grains, & 380 pouces cubiques d'un
gaz extrêmement léger, pefant 13 grains
& qui s'allume par rapproche d'un corps en-
flammé lorfqu'il a le contad de l'air. Si on vérifie
enfuite le poids de l'eau paffée dans le flacon
on la trouve diminuée de 8j* grains j-.
Ainfi dans cette expérience, a 85"grains x d'eau;
plus 28 grains de charbon ont formé 100 grains
d'acide carbonique plus 13 grains d'un
gaz particulier fufceptible de s'enflammer.
Mais j'ai fait voir plus haut, que pour for-
mer 100 grains de gaz acide carbonique, il
falloit unir 72 grains d'oxygène à 28 grains de
charbon; donc les 28 grains de charbon placés
dans le tube de verre ont enlevé à l'eau 72
grains d'oxygène donc 8j grains d'eau
font cotnpofés de 72 grains d'oxygène & de
13 grains d'un gaz fufceptibIe de s'en-
flammer. On verra bientôt qu'on ne peut pas
fuppofer que ce gaz ait été dégagé du charbon,

(a) On trouvera dans la dernière partie de cet Ouvra-


ge, le détail des procédés qu'on emploie pour féparer les
différentes efpèces de gaz & pour les pefer.
& qu'il eft confféqnemment un produit de l'eau.
J'ai fupprimé dans l'expofé de cette expé-
rience quelques détails qui n'auroient fervi qu'à
la compliquer & à jetter de Pobfcurité dans
les idées des leéteurs le gaz inflammable, par
exemple, diffbut un peu de charbon, & cette
circonflance en augmente le poids & diminue
au contraire celui de l'acide carbonique l'al-
tération qui en réfulte dans les quantités n'eft
pas très conGdérable mais j'ai cru devoir les
rétablir par calcul, & préfenter. l'expérience
dans toute fa {implicite & comme f cette
circonftance n'avoit pas lieu. Au surplus, s'il
reftoit quelques nuages fur la vérité des confé-
quences que je tire de cette expérience, ils
feroient bientôt diffipés par les autres expé-
riences que je vais rapporter à l'appui»

Troisième Expérience.
Préparation.

On difpofe tout l'appareil comme dans l'ex-


périence précédente avec cette différence feu-
lement, qu'au lieu des 28 grains de charbon
on met dans le tube EF, planche F^II, fig. rr,
274 grains de petites lames de fer très-doux
roulées en fpirales. On fait rougir le tube comme
dans les expériences précédentes on allume
du feu fous la cornue A, & on entretient l'eau
qu'elle contient toujours bouillante, jufqu'à ce
qu'elle foit entièrement évaporée qu'elle ait
paffé en totalité dans le tube EF & qu'elle
fe foit condenfée dans le flacon H.
Efit.
Il ne fe dégage point de gaz acide carbo-
nique dans cette expérience mais feulement
un gaz inflammable 13 fois plus léger que l'air
de l'atmofphère le poids total qu'on en ob-
tient eft de ij" grains & fon volume efl d'en-
viron 415 pouces cubiques. Si on compare la
quantité d'eau primitivement employée avec
celle reflante dans le flacon Il on trouve un
déficit de ioo grains. D'un autre côté, les 274
grains de fer renfermés dans le tube EF fe
trouvent pefer 8/ grains de plus que lorfqu'on
les y a introduits & leur volume fe trouve
confidérablementaugmenté ce fer n'eu: prefque
plus attirable à l'aimant, il fe diffotit fans efler-
vefcence dans les acides; en un mot, il eft dans
l'état d'oxide noir, précifément comme celui
qui a été brûlé dans le gaz oxygène.
Réflexions.
Le réfultat de cette expérience préfente une
véritable oxidation du fer par l'eau oxida-
tion toute femblable à celle qui s'opère dans
l'air à faide de la chaleur. Cent grains d'eau
ont été décompofés 8S d'oxygène fe font
unis au fer pour le conflituer dans fétat d'oxide
noir & il s'eil dégagé 15* grains d'un gaz inflam-
mable particulier donc l'eau eft compofée
d'oxygène & de la bafe d'un gaz inflammable,
dans la proportion de SS parties contre iS.
Ainfi l'eau indépendamment de l'oxygène
qui eft un de fes principes & qui lui eft
commun avec beaucoup d'autres fubilances, en
contient un autre qui lui eft propre, qui efl fon
radical conflitutif & auquel nous nous Commes
trouvés forcés de donner un nom. Aucun ne
nous a paru plus convenable que celui d'hy-
drogène, c'eft-à-dire, principe générateur de
l'eau, de u^oj* eau, & de yàvofim j'engendre*
Nous appellerons gaz hydrogène la combinai[on
de ce principe avec le calorique, & ,le mot
d'hydrogène feul exprimera la bafe de ce même
gaz le radical de l'eau.
Voilà donc un nouveau corps coirtbuflible,
c'efl-à-dire, un corps qui a aflez d'affinité avec
l'oxygène pour l'enlever au calorique & pour
décompofer l'air ou le gaz oxygène. Ce corps
combuftible a lui:même une telle affinité avec
le calorique, qu'à moins qu'il ne foit engagé
dans une combiriaifon il eft toujours dans
l'état aériforme ou de gaz au degré habituel
de preffion & de température dans lequel nous
vivons. Dans cet état de gaz il eu environ
13 fois plus léger que l'air de l'atmosphère, il
il'eft point abforbable par l'eau mais il eft
fufceptible d'en diflbudre une petite quantité;
enfin il ne peut fervir à la reîpiration des
animaux.
La propriété de brûler & de s'enflammer
n'étant pour ce gaz comme pour tous les au-
tres combustibles, que la propriété de décom-
pofer l'air & d'enlever l'oxygène au calorique,
on conçoit qu'il ne peut brûler qu'avec le
contaét de l'air ou du gaz oxygène. Auffi lorf-
qu'on emplit une bouteille de ce gaz & qu'on
l'allume il brûle paifblement au gouleau de
la bouteille & enfuite dans fon intérieur, à me-
fure que l'air extérieur y pénètre; mais la com-
buflion eft fucceffive & lente, elle n'a lieu qu'à
la furface où le contaâ des deux airs ou gaz
s'opère. Il n'en eft pas de même lorsqu'on mêle
enfemble les deux airs avant de les allumer
fi par exemple après avoir introduit dans une
bouteille à gouleau étroit une partie de gaz
oxygène, & enfuite deux de gaz hydrogène
on approche de fon orifice un corps enflammé,
tel qu'une bougie ou un morceau de papier
allumé la combuflion des deux gaz fe fait
d'une manière inflantanée & avec une forte
explofion. On ne doit faire cee^expérience
que dans une bouteille de verre vert très-forte
qui n'excède pas une pinte de capacité & qu'on
enveloppe même d'un linge autrement on
s'expoferoit à des accidens funeftes par la rup-
ture de la bouteille dont les fragmens pour-
roient être lancés à de grandes diflances.
Si tout ce que je viens d'expofer fur la dé-
compofition de l'eau eft exaét & vrai, fi réel-
lement cette fubfiance eft compofée comme
j'ai cherché à l'établir, d'un principe qui lui
eft propre, d'hydrogène combiné avec l'oxy-
gène il en réfulte qu'en réunifiant ces deux
principes on doit refaire de l'eau, & c'eft ce
qui arrive en effet, comme on va en-juger
par l'expérience fuivante.
QUATRIÈME Expérience.
Recompojîtiart de l'eau.

Préparation.

On prend un ballon A de criflal j planche IV}


fige 5, à large ouverture, & dont la capacité
foit de 30 pintes environ on y mafiique une
platine de cuivre B c percée de quatre trous
auxquels aboutiflent quatre tuyaux. Le premier
H h eft deifiné à s'adapter par fon extrémité h
à une pompe pneumatique par le moyen de
laquelle on peut faire le vuide dans le ballon.
Un féeond tuyau g g communique par fon
extrémité MM avec un réfervoir de gaz oxy-
gène, & ell defliné à l'amener dans le ballon.
Un troifième d D d! communique par fon ex-
trémité ^NN avec un réfervoir de gaz hy-
drogène l'extrémité Il de ce tuyau fe termine
par une ouverture très-petite & à travers la-
quelle une très-fine aiguille peut à peine palfer.
C'eft par cette petite ouverture que doit fouit
le gaz hydrogène contenu dans le ïéfervoir &
pour qu'il ait une vîteffe fuffifante, ori doit lui
faire éprouver une preffion de Un ou deux
pouces d'eau. Enfin la platine B C eft percée
d'un quatrième trou, lequel eft garni d'un tube
de verre -maliiqué à travers lequel paffe un
fil de métal GL, à l'extrémité L duquel eft
adaptée une petite boule, afin de pouvoir tirer
une étincelle éleârique de L en d' pour allumer,
comme on le verra bientôt, le gaz hydrogène*
Le fil de métal GL eft mobile dans le tube
de verre afin de pouvoir éloigner la bcsle L de
l'extrémité d' de Fajutoir D d'. Les trois tuyaux
d' D d'i gg3 H h font chacun garnis de leur
robinet.
Pour que le gaz hydrogène Se le gaz oxy-
gène arrivent bien fecs par les tuyaux refpec-
tifs qui doivent les amener au ballon A, &
qu'ils foient dépouillés d'eau autant qu'ils le
peuvent être, on les fait paffer à travers des
tubes MM, NN d'un pouce environ de dia-
mètre qu'on remplit d'un fel très-déIiquefcent,
ç'eft-à-dire, qui attire l'humidité de Pair avec
beaucoup d'avidité, tels que l'acétite de potaffe,
le muriate ou le nitrate de chaux. Voye^ quelle
eil la compofition de ces tels dans la féconde
partie de cet Ouvrage. Ces fels doivent être
puiffènt pas
en poudre groffière afin qu'ils ne
faire mafTe & que le gaz paffë facilement à tra-
vers les interilices que laifîent les morceaux*
On doit s'être prémuni d'avance d'une pro-
wifan fuffifante de gaz oxygène bien pur &
pour s'affilier qu'il ne contient point d'acide
carbonique, on doit le laiffer long-tems en con-
ta& avec de la potaffe diffouie dans de l'eau
& qu'on a dépouillée de fon acide carbonique
quelques
par de la chaux on donnera plus bas
détails fur les moyens d'obtenir cet alkali.
On prépare avec le même foin le double de
gaz hydrogène. Le procédé
le plus sûr pour
l'obtenir exempt de mélange conffle à le tirer
de la décompoftion de feau par du fer bien
duâile & bien pur.
Lorsque ces deux gaz font ainfi préparés, on
adapte la pompe pneumatique
au tuyau H h,
& on fait le vuide dans le grand ballon A:
on
y introduit enfuite l'un ou l'autre des deux
gaz, mais de préférence le gaz oxygène par Ie
tu>'au g g puis on oblige par un certain degré
de preffion le gaz hydrogène à entrer dans le
même ballon par le tuyau dD d' dont l'extré-
mité d' fe termine en pointe. Enfin
on allume
ce gaz à l'aide d'une étincelle éleârigue. En
fournifîànt ainf de chacun des deux airs,
on
parvient à continuer très-long-tems la combuf-
tion. J'ai donné ailleurs la defcription des
ap-
pareils que j'ai employés pour cette expérience,
& j'ai expliqué comment on parvient à mefurer
les quantités de gaz confommés
avec une rigou-
reufe exaâitude. Vqye^ la troifième partie de
cet Ouvrage.
Effet.

A mefure que la combuûion s'opère, il fe


dépofe de l'eau fur les parois intérieures du
ballon ou matras la quantité de cette
eau aug-
mente peu à -peu elle fe réunit en groffes
goutes qui coulent & fe raffemblent dans le
fond du vafe.
En pefantle matras avant & après l'opération,
il eft facile de çonnoître la quantité d'ean qui
s'etl ainfi raffemblée. On a done dans cette expé-
rience une double vérification d'une part te
poids des gaz employés de l'autre celui de
l'eau formée, & ces deux quantités doivent
être égales. C'eft par une expérience de ce
genre que nous avons reconnu,
M. Meufnier
& moi qu'il fallpit 8S parties en poids d'oxy-
-gène, & iy parties également en poids d'hy-
drogéno pour compofer ioo parties d'eau.
Cette expérience qui n'a point encore été pu-
bliée, a été faite en préfence d'une Commïf-
fion nombreufe de l'Académie nous y avons
apporté les attentions les plus fcrupuleufes, &
exaâe à un deux-
nous avons lieu de la croire
centième près tout au plus.
Àinfi:, foit qu'on opère par voie de décom-
portion ou de recompofition on peut regarder
prouvé qu'on puifie
comme confiant & aufS bien
le faire en Chimie & en Phyfique que l'eau
n'efi point une fubftance fimple qu'elle eft
compofée de deux principes, l'oxygène & l'hy-
drogène & que ces deux principes féparés l'un
de l'autre, ont tellement d'affinité avec le ca-
lorique qu'ils ne peuvent exiger que
fous forme
de gaz, au degré de température & de preffion
dans lequel nous vivons.
Ce phénomène de la décompoftion & de la
xecompofrtion de l'eau s'opère continuellement
fous nos yeux, à la température de
l'atniofphère
& par feffet des affinités compofées C'eft à
cette
décompof tion que font dus comme nous le
verrons bientôt, att moins jufqu'à un certain
point, les phénomènes de la fermentation fpi-
ritueufe, de la putréfaction & même de la
végétation. Il eft bien extraordinairequ'elle ait
échappé jufqu'ici à l'œil attentif des Physiciens
& des Chimifles & on doit en conclure que
dans les fciences comme dans la morale il -efl
difficile de vaincre les préjugés dont on été
a
originairement imbu & de fuivre une autre
route que celle dans laquelle on efl accoutumé
de marcher.
Je terminerai cet article par une expérience
beaucoup moins probante que celles que j'ai
précédemment rapportées mais qui m'a paru
cependant faire plus d'impreffion qu'aucune
autre fur un grand nombre de perfonnes. Si
on brûle une livre,ou feize onces d'efprit-de-
vin ou alkool dans un appareil propre à re-
cueillir toute feau qui fe dégage pendant la
combuflion on en obtient 17 à 18 onces ( i ).
Or une matière quelconque ne peut rien fournir
dans une expérience au-delà de la totalité de

( 1) Voyez la defcription de cet appareil dans la


troifîème partis de cet Ouvrage.
fon poids; il faut donc qu'il s'ajoute une autre
fubflance à fefprit-de-vin pendant fa combuf-
tion or j'ai fait voir que cette autre fubftance
étoit la bafe de l'air, l'oxygène. L'efprit-de-
vin contient donc un des principes de l'eau
Vhydrogèjie & c'eft l'air de l'atmofphère qui
fournit l'autre, l'oxygène: nouvelle preuve que
l'eau eft une fubilance compofée.
CHAPITRE IX.
De la quantité de Calorique qui fe dégage des
différentes efpèces de combuflion.

i-N o U-s avons vu qu'en opérant une combuf-


tion quelconque dans une fphère de glace
creufe, & en fourniffant pour l'entretenir de
l'air à zéro du thermomètre, la quantité de
glace fondue dans l'intérieur de la fphère
donnoit une mefure, finon abfolue, du moins
relative des quantités de calorique dégagé.
Nous avons donné, M. de la Place & moi, la
defcription de l'appareil que nous avons em-
ployé dans ce genre d'expériences. Vqye^ Mé-
moires de l'Acad. des Sciences, année 1780,
page 3Jj". Voyez auffi la' 3e partie de cet
Ouvrage. Ayant elfayé de déterminer les quan-
tités de glace qui fe fondoient par la combus-
tion de trois des quatre fubilances combufti-
bles (impies, favoir, le phofphore, le carbone
& l'hydrogène, nous avons obtenu les réfultats
qui fuivent.
Pour la cômbuIUon d'une livre de phof-
phore, 100 livres de glace.
Pour la combuflion d'une livre de carbo-
ne, 96 Hv •8 onces.
Giv
Pour la combuflion d'une livre de gaz hy-
drogène, 29S liyres 9 onces 3 gros & demi.
La fubflance qui fe forme par le réfultat de
la combuflion du phofphore, étant un acide
concret il eft probable qu'il refte très-peu de
calorique dans cet acide, & que par confé-
quent cette combuftion fournit un moyen de
r,onnoître, à très-peu de chofe près la quand-
tité de calorique contenue dans le gaz oxy-
gène. Mais quand on voudrait fuppofer que.
1:acide phofphorique retient encore une quan-
tité confrdétable de calorique, comme le phof-
phore en contenoit auffi une portion avant la,
combullion Ferreur ne pourrait jamais être
crue de la différence, & par conféqnent de peu
d'importance.
J'ai fait voir page 60, qu'une livre de phof-
phore en brûlant abforboit i livre 8 onces
èt'oxygène; & puifqu'il y a en même tems 100
livres de glace fondue, il en réfulte que la
quantité de calorique contenue dans une livre
de gaz oxygène, eft capable de faire fondre
66 livres 10 onces y gros 21 grains de glace.
Une livre de charbon en brûlant ne fait fon-
dre que 96 livres 8 onces de glace mais il
sÀabforbe en même tems 2 livres 9 onces r gros
10 grains de gaz oxygène. Or, en partant des
rrfultats obtenus dans la çombuflion du phof-
phore, 2 liv. 9 onc. i gros 10 grains de gaz
oxygène, devroient abandonner affez de calo-
rique pour fondre 171 livres 6 onces 5 gros de
glace. Il difparoît donc dans cette expérience
une quantité de calorique qui auroit été fuffi-
fante pour faire fondre 74. liv. t4 onc. $ gros
de glace mais comme l'acide carbonique n'eft
point comme le phofphorique dans l'état
concret après la combuflion qu'il eft au con-
traire dans l'état gazeux il a fallu néceflfaire-
ment une quantité de calorique pour le porter
à cet état, & c'eft cette quantité qui fe trouve
manquante dans la combuflion ci-de/fus. En la
divifant par le nombre de livres d'acide car-.
bonique qui fe forment par la combuflion d'une
livre de charbon on trouve que la quantité
de calorique nécefraire pour porter une livre
d'acide carbonique de l'état concret à l'état
gazeux feroit fondre 20 liv. 15 onces y gros
de glace.
On peut faire un femblable calcul fur la
combuflion de l'hydrogène & fur la formation
de l'eau une livre de ce fluide élaftique ab-
forbe en brûlant 5 liv. 10 onc. y gros :21 grains
d'oxygène, & fait fondre 2^5" livres 9 onces
3 gros & demi de glace.
Or y liv. 10 onces S gros 24 grains de gaz
oxygène en paffant de l'état aériforme à l'état
Iblide, perdroient, d'après les réfultats obtenus
danslacombuftionduphofphorçjaÍfez de calori-
que pour fairefondreune quantité de glace égale à

Or, comme il fe forme 6 liv. 10 onc. 5 gros


23. grains d'eau dans la combuflion d'une livre
de gaz hydrogène il en refaite qu'il refle dans
chaque livre d'eau à zéro du thermomètre,
une quantité de calorique égale à celle nécef
faire pour fondre 12 liv. j" onc. 2 gros 48 grains
de glace, fans parler même de celai contenu
dans le gaz hydrogène dont il eil impoffible
de tenir compte dans cette expérience parce
que nous n'en connoiubns pas la quantité. D'où
l'on voit que l'eau même dans Fétat de glace
contient encore beaucoup de calorique, & que
l'oxygène en conferve une quantité très-confî-
dérable en parlant dans cette combinaifon.
De ces diverfes tentatives on peut réfumer
les réfultats qui fuivent.
On fuppofe ici que l'acide phofphorique ne
conferve aucune portion de calorique ce qui
u'e1t pas rigoureufement vrai mais la quantité
(comme on l'a déjà obfervé plus haut) cn eft
probablement très-petite, & on ne la fuppofe
nttlle que faute de la pouvoir évaluer,
Combuflion du Charbon.
Combuflion. du Ga^ hydrogène.

De la Formation de ? Acide nitrique.

Lorfque l'on combine du gaz nitreux avec


du gaz oxigène pour former de l'acide nitrique
produite;
ou nitreux, il y a une légère chaleur
mais elle eft beaucoup moindre que celle qui
a lieu dans les autres combinaisons de l'oxy-
gène d'où il réfulte par une conféquence né-
ceffaire que le gaz oxygène, en fe fixant dans
l'acide nitrique retient une grande partie du
calorique qui lui étoit combiné dans l'état de
gaz. Il n'en: point impoffible fans. doute de
déterminer la quantité de calorique qui fe dé-
gage pendant la réunion des deux gaz, & on
en concluroit facilement enfuite celle qui de-
meure engagée dans la combinaifon. On par-
viendroit à obtenir la première de ces données
en opérant la combinaifon du gaz nitreux & du
gaz oxygène dans un appareil environné de
glace mais comme il fe dégage peu de calo-
rique dans cette combinaifon on ne pourroit
réunir à en déterminer la quantité qu'autant
qu'on opéreroit très en grand avec des appa-
reils embarraffans & compliqués & c'eft ce
qui nous a empêchés jusqu'ici, M. de la Place
& moi, de la tenter. En attendant on peut
déjà y fuppléer par des calculs qui ne peuvent
pas s'écarter beaucoup de la vérité.
Nous avons fait détonner, M. de la Place &
tnoi, dans un appareil à glace une proportion
convenable de falpêtre & de charbon, & nous
avons obfervé qu'une livre de falpêtre pouvait,
en détonant ainfr, fondre 12 livres de glace.
Mais une livre de falpêtre comme on
Des expériencesultérieures apprendrontfi ce
réfultat déduit par le calcul, s'accorde avec
des opérations plus direfles.
Cette énorme quantité de calorique que l'oxy-
gène porte avec lui dans l'acide nitrique, ex-
plique pourquoi dans toutes les détonations dit
nitre ou pour mieux dire dans toutes les
occafions où l'acide nitrique fe décompofe, il
y a un fi grand dégagement de calorique.
Combuftion. de la Bougie.
Après avoir examiné quelques. cas de ccm-
buLlions Simples, je vais donner des exemples
de combuilionsplus compofées; je commence
par là cire.
Une livre de cette fùbftance en brûlant pai-
fiblement dans l'appareil à glace deffiné à me-
furer les quantités de calorique, fond 133 lin
2 onces y gros de glace.
Or une livre de bougie, fuivant les expé-
riences
On voit par ces réfultats, que la quantité de
calorique qui Fe dégage de la bougie qui brûle,
eft affez exadement égale à celle qu'on obtien-
droit en brûlant féparément un poids de char-
bon & d'hydrogène égal à celui qui entre dans
fa combinai[on. Les expériences fur la com-
buftion de la bougie ayant été répétées pluGeurs
fois j'ai lieu de préfumer qu'elles font exaétes.

Combujlion. de l'Huile d'olives.

Nous avons enfermédans l'appareil ordinaire


une lampe qui contenoit une quantité d'huile
d'olives bien connue & l'expérience frnie
nous avons déterminé exactement le poids de
l'huile qui avoit été confommée, & celui de
la glace qui avoit été fondue; le réûiltat a été
qu'une livre d'huile d'olives en brûlant pou-
voit fondre 148 livr. 14 onc. 1 gros de glace.
Mais une livre d'huile d'olives, d'après les
expériences que j'ai rapportées Mémoires de
l'Acad. année 1784, & dont on trouvera un
extrait dans le chapitre fuivant, contient

Cette différence qui n eft pas au furplus très-


confidérable peut tenir ou à des erreurs inévi-
tables dans les expériences de ce genre, ou à
ce que la compoGtion de l'huile n'eft pas en-
Mais il en
core affez rigoureufement connue.
ïéfulte toujours qu'il y a déjà beaucoup d'en-
femble & d'accord dans la marche des expé-
riences relatives à la combinaifbn & au déga-
gement du calorique.
Ce qui refte à faire dans ce moment & dont
nous femmes occupés, eft de déterminer ce que
l'oxygène conferve de calorique dans fa com-
binaifon avec les métaux pour les convertir
en oxides ce que l'hydrogène en continent
dans les différens états dans lefquels il peut
exiiîer; enfin de connoître d'une manière plus
exaéle la quantité de calorique qui fe dé-
gage dans la formation de l'eau. Il nous refte
fur cette détermination une incertitude affez
grande qu'il eft néceflaire de lever par de nou-
velles expériences. Ces différens points bien
connus, & nous efpérons qu'ils le feront bien-
tôt, nous nous trouverons vraifemblablement
obligés de faire des correâions, peut-être même
affez considérables, à la plupart des réfultats
que je viens d'expofer mais je n'ai pas cru
que ce fût une raifon de différer d'en aidet
ceux qui pourront fe propofer de travailler fur
le même objet. Il eft difficile quand on cher-
che les élémens d'une fcience nouvelle de ne
pas commencer par des à-peu-près; & il eft
rare qu'il foit poffible de la porter dès le pre-
mier jet à fon état de perfedion.
CHAPITRE X.

De la combinaison des Subfiances cvmbuftibles


ies unes avec les autres.
Les fubftances combuffibles étant en géné-
ral celles qui ont une grande appétence pour
l'oxygène il en refaite qu'elles doivent avoir
de.
à fe
l'affinité entt'elles, qu'elles doivent tendre
combiner les unes avec les autres quœfunteadem
qu'on
uni tertio funt eadem inter fe & c'efl ce
obferve en effet. Prefque tous les métaux, par
exemple, font fufceptibles de fe combiner les
il refaire un ordre
uns avec les autres, & en
de compofés qu'on nomme alliage dans les
ufages de la fociété. Rien ne s'oppofe à ce que
adoptions cette expreffion ainfi nous dirons
nous
s'allient les uns avec
que la plupart des métaux
les autres; que les alliages comme toutes les
combinaifons, font fufceptibles d'un ou de
pluf enrs degrés de faturation que les fubilan-
font en général
ces métalliques dans cet état
plus catfantes que les métaux purs fur-tout
lorfque les métaux alliés diffèrent beaucoup par
leur degré de mubilité enfin nous ajouterons
des degrés de fu-
que c7eft à cette différence
fibilité des métaux que font dus une partie des
phénomènes particuliers que préfentent les al-
liages, tels, par exemple, que la propriété qu'ont
quelques efpèces de fer d'être caffans à chaud.
Ces fers doivent être confdérés comme un al-
liage de fer pur,. métal prefqu'infufible, avec
une petite quantité d'un autre métal, quel qu'il
foit, qui fe liquéfie à une chaleur beaucoup
plus douce. Tant qu'un alliage de cette efpèce
etl froid & que les deux métaux font dars
l'état folide, il peut être malléable mais fi on
le chaude à un degré fuffifant pour liquéfier
celui des deux métaux qui eft le plus fufble,
les parties liquides interpolées entre les folides
doivent rompre la folution de continuité, &
le fer doit devenir caffanî.
A l'égard des alliages du mercure avec les
métaux, on a coutume de les défgner fous le
nom d'amal-game, & nous n'avons vu aucun in-
convénient à leur conferver cette dénomination.
Le foufre le phofphore le charbon font
également fufceptibles de fe combiner avec les
tnétaux les combinaifons du foufre ont été
en général défignées fous le nom de pirites
les autres n'ont point été nommées, ou du
moins elles ont reçu des dénominations fi mo-
dernes que rien ne s'oppofe à ce qu'elles foient
changées.
Nous avons donné aux premières de ces
combinaifonsle nom de fulfures aux fécondes
celui de phofphures, enfin aux troifièmes celui
de carbures. Ainf le foufre, le phofphore, le
charbon oxygénés forment des oxides ou des
acides mais Lorsqu'ils entrent dans des com-
binaifons fans s'être auparavant oxygénés, ils
forment des fulfures. des phofphures & des
carbures. Nous étendrons même ces dénomina-
tions aux combinaifons alkalines ainfi nous
dcfgnerons fous le nom de fuîfure de potafle
la combinaifon du foufre avec la potaffe ou
alkali fixe végétal, & fous le nom de fulfure
d'ammoniaque la combinaifon du foufre avec
l'alkali volatil ou ammoniaque.
L'hydrogène, cette JEùbflance éminemment
combuilible eft aufli fufceptible de fe combiner
avec un grand nombre de fubftanees combuf-
tibles. Dans l'état de gaz il diffout le carbone,
le foufre le phofphore & plufieurs métaux.
Nous défgnerons ces combinaifonsfous le nom
de gaz hydrogène carbonifé, de gaz hydrogène
fulfurifé de gaz hydrogène phofphorifé. Le
fecond de ces gaz, le gaz hydrogène fulfurifé
eft celui que les chimifles ont défigné fous le
nom de ga^ hépatique & que M. Schéele a
nommé gar puant du foufre c'eft à lui que
quelques eaux minérales doivent leurs vertus;
d'eft auflx à fon émanation que les déjeâions
animales doivent principalement leur odeur in
feéte. A l'égard du gaz hydrogène phofphorifé,
il eft remarquable par la propriété qu'il a de
s'enflammer fpontanément lorfqu'il a le contad
de l'air ou mieux encore celui du gaz oxigène,
comme l'a découvert M. Gengembre. Ce gaz
a l'odeur du poiSon pourri, & il ell probable
qu'il s'exhale en effet un véritable gaz hydro-
gène phofphorifé de la chair des poiiïbns par
la putréfadion.
Lorfque l'hydrogène & le carbone s*uniffent
enfemble fans que l'hydrogène ait été porté à
Pétat de gaz par le calorique, il erl réfulte une
combinaifon particulière connue fous le nom
d'huile, & cette huile eft ou fixe ou volatile,
fuivant les proportions de l'hydrogène & du
carbone.
Il ne fera pas inutile d'obferver ici qu'un des
principaux caraâères qui diftingue les huiles
fixes retirées des végétaux par expreffion d'avec
les huiles volatiles ou elfentielles, c'eft que les
premières contiennent un excès de carbone qui
s'en fépare lorfqu'on les échauffe au-delà du
degré de l'eau bouillante les huiles volatiles
au contraire étant formées d'une plus jufte pro-
portionde carbone & d'hydrogène ne font point
fufceptibles d'être décompofées à un degré de
chaleur fupérieur à feau bouillante les deux
principes qui les conftituent demeurent unis;
ils fe combinent avec le calorique pour former
un gaz & c'eft dans cet état que ces huiles
paffent dans la diftiîlation^
J'ai donné la preuve que les huiles étaient
ainfi compofées d'hydrogène& de carbone dans
un mémoire fur la combinaifons de l'efprit de
vin & des huiles avec l'oxygène, imprimé dans
le recueil de l'Académie,année 1784, page;p5.
On y verra que les huiles fixes en brûlant dans
le gaz oxygène fe convertiffent en eau & en
acide carbonique, & qu'en appliquant le calcul
à l'expérience elles font compofées de 21
parties d'hydrogène & de 79 parties de carbone.
Peut-être les fubflances huîîeufes folides, telles
que la cire, contiennent-elles en outre un petz
d'oxigène auquel elles doivent leur état folide.
Je fuis au furplus occupé dans ce moment
d'expériences qui donneront un grand dévelop-
pement à toute cette théorie.
C'eft une queftion bien digne d'être exami-
née de favoir fi l'hydrogène eft fufceptible de
fe combiner avec le foufre, le phofphore &
même avec les métaux dans l'état concret. Rien
n'indique fans doute à priori que ces combi-
naifons foient împoffiblesî car puifque les corps
combuftibles font en général fufceptibles de fe
combiner les uns avec les antres, on ne voit.
pas pourquoi l'hydrogène feroit exception. Mais
en même-tems aucune expérience direde ne
prouve encore ni la poffibilité ni Pimpoffibilité
de cette union. Le fer & le zinc font de tous
les métaux ceux dans lefquels on feroit le plus
en droit de foupçonner une conzbinaifon d'hy-
drogène mais en même-tems ces métaux ont
la propriété de décompofer l'eau; & comme
dans les expériences chimiques il eft difficile
de fe débarraller des derniers veftiges d'humi-
dité, il n'eu: pas facile de s'affurer fi les petites
portions de gaz hydrogène qu'on obtient dans
quelques expériencesfur ces métaux leur étoient
combinées ou bien fî elles proviennent de la
décompofitionde quelques molécules d'eau. Ce
qu'il y a de certain, c'eft que plus on prend
foin d'écarter l'eau de ce genre d'expérience,
plus la quantité de gaz hydrogène diminue, &
qu'avec de très-grandes précautions on parvient
à n'en avoir que des quantités prefque infen-
fïbles.
Quoi qu'il en foit, que les corps combuflibles»
notamment le foufre, le phofphore & les mé-
taux, foient fufceptibles ou non d'abforber de
l'hydrogène, on peut afïhrer au moins qu'il ne
s'y combine qu'en très-petite quantité; & que
cette combinaifon loin d'être effentieUe à leur
conflittuïon ne peut être regardée que comme
une addition étrangère qui en altère la pureté.
C'eft au fur plus à ceux qui ont embraffé ce
iyfîême à prouver par des expériences décifrves
l'exiftence de cet hydrogène & jufqu'à pré-
fent ils n'ont donné que des conjedures ap-
puyées fur des fuppofitions.
CHAPITRE XI.
Confidéraûons fur les Oxïdes & les Acides à
plufeurs bafes & fur la compafztion des
niatières végétales & animales.

Nous avons examiné dans le chapitre cin-


quième & dans le chapitre huitième quel étoit
le réfultat de la combuftion & de l'oxygénation
des quatre fubftances combuftibles fzmples, le
phofphore, le îoufre, le carbone & l'hydro-
gène nous avons fait voir dans le chapitre
dixième que les fubftances combuftibles fimples
étoientfufceptibles de fe combiner les unes avec
les autres, pour former des corps corobulîibles
compofés, & nous avons obfervé que les huiles
en général, principalement les huiles fixes des
végétaux, appartenoient à cette clalfe, & qu'elles
étoient toutes compofées d'hydrogène & de
carbone. Il. me reile à traiter dans ce chapitre
de l'oxygénation des corps combuflibles com-
pofés, à faire voir qu'il exifle des acides & des
oxides à bafe double & triple, que la nature
nous en fournit à chaque pas des exemples, &
que c'eft principalement par ce genre de com-
binaifons qu'elle eft parvenue à former avec
un auflï petit nombre d'élémens ou de corps
fimpîes une auffi grande variété de réfultats.
On avoit très-anciennement remarqué qu'en
mêlant enfemble de l'acide muriatique & de
l'acide nitrique, il en réfultoit un acide mixte
qui avoit des propriétés fort différentes de celles
des deux acides dont il étoit compofé. Cet
acide a été célébre par la propriété qu'il a de
difïbudre For, le Roi des métaux dans le lan-
gage alchimique & c*èft de-là que lui a été
donnée la qualification brillante d'eau régale. Cet
acide mixte comme l'a très bien prouvé
M. Berthollet a des propriétés particulières
dépendantes de l'aâion combinée de fes deux
baies acidifiables, & nous avons cru par cette
raifon devoir lui conferver un nom particulier.
Celui d'acide nitro-muriatique nous a paru le
plus convenable, parce qu'il exprime la nature
des deux fubflances qui entrent dans fa coin-'
pofition.
Mais ce phénomène qui n'a été oblervé que
pour l'acide nitro-muriatique fe préfente con-
tinuellement dans le règne végétal il eu infi-
niment rare d'y trouver un acide fimple, c'eft-
à-dire qui ne foit compofé que d'une feule bafe
acidifiable. Tous les acides de ce règne ont
pour bafe l'hydrogène & le carbone, quelque-
fois l'hydrogène, le carbone & le phofphore,
le tout combiné avec une proportion plus
ou
moins confidérable d'oxygène. Le règne végé-
tal a également des oxides qui font formés des
mêmes bafes doubles & triples, mais moins
oxygénés.
Les acides & oxides du règne animal font
encore pliis compofés; il entre dans la com-
binai[on de la plupart quatre bafes acidifiables,
l'hydrogène,le carbone, le phofphore & l'azote.
Je ne m'étendrai pas beaucoup ici fur cette
matière fur laquelle il n'y a pas long-tems
que
je me fuis formé des idées claires & métho-
diques je la traiterai plus à fond dans des
Mémoires que je prépare
pour l'Académie. La
plus grande partie de mes expériences font
faites, mais il eft néceflàire que je les répète &
que je les multiplie davantage, afin de pouvoir
donner des réfultats exaâs pour les quantités.
Je me contenterai en conféquence de faire une
courte énumération des oxides & acides végé-
taux & animaux, & de terminer cet article par
quelques réflexions fur la conflitution végétale
& animale.
Les oxides végétaux à deux bafes font le
fucre, les différentes efpèces de gomme que
nous avons réunies fous le nom générique de
muqueux, & l'amidon. Ces trois fubflances ont
pour radical l'hydrogène & le carbone com-
binés ensemble, de manière à ne former qu'une
feule bafe, & portés à l'état d'oxide par une
portion d'oxygène ils ne diffèrent que par
la proportion des principes qui compofent la
bafe. On peut de l'état d'oxide les faire paffèr
à celui d'acide en leur combinant une nouvelle
quantité d'oxygène, & on forme ainfi fuivant
le degré d'oxygénation & la proportion de
l'hydrogène & du carbone les différens aci-
des végétaux.
Il ne s'agiroit plus pour appliquer à la no-
menclature des acides & des oxides végétaux
les principes que nous avons précédemment
établis pour les oxides & les acides minéraux,
que de leur donner des noms relatifs à la na-
ture des deux fubflances qui compofent leur
bafe. Les oxides & les acides végétaux feroient
alors des oxides & des acideshydro-carboneux:
bien plus on auroit encore dans cette méthode
l'avantage de pouvoir indiquer fans périphrafes
quel eft le principe qui eft en excès comme
M. Rouelle l'avoit imaginé pour les extraits
végétaitx il appeloit extraâo-réfîneux celui où
l'extrait dominoit & réfino-extraâif celui qui
participoit davantage de la réfine.
En partant des mêmes principes, & en va-
riant les terminaifons pour donner encore plus
d'étendue à ce langage, on auroit pour défigner
les acides & les oxides végétaux, les dénomi-
nations fuivantes
Oxide hydro-carboneux.
Oxide hydro-carbonique.
Oxide carbone-hydreux.
Oxyde carbone-hydrique.
Acide hydro-carboneux.
Acide hydro-carbonique.
Acide hydro-carbonique oxygéné.
Acide carbone-hydreux.
Acide carbone-hydrique.
Acide carbone-hydrique oxygéné.
Il eft probable que cette variété de langage
fera fuffifante pour indiquer toutes les variétés
que nous préfente la nature & qu'à mefure
que les acides végétaux feront bien connus
ils fe rangeront naturellement & pour aina
dire d'eux-mêmes dans le cadre que nous ve-
nons de préfenter. Mais il s'en faut bien que
nous foyons encore en état de pouvoir faire
une claffification méthodique de ces fubftances
nous favons quels font les principes qui les
compofent, & il ne me refte plus aucun doute
à cet égard mais les proportions font encore
inconnues. Ce font ces confidérations qui nous
ortt déterminés à conferver provifoirement les
noms anciens & maintenant encore que je
fuis
un peu plus avancé dans cette carrière que je
ne Pétois à l'époque où notre effai de nomen-
clature a paru je me reprocherois de tirer des
conféquences trop décidées d'expériences qui
précifes mais en con-
ne font pas encore affez
venant que cette partie de la Chimie refte en
fouffrance je puis y ajouter l'efpérance qu'elle
fera bientôt éclaircie.
Je me trouve encore plus impérieufement for-
cé de prendre le même parti à l'égard des oxides
& des acides à trois & quatre baies dont le
règne animal préCente un grand nombre d'exem-
ples, & qui fe rencontrent même quelquefois
dans le règne végétal. L'aeote, par exemple, en-
pruffique; il s'y
tre dans la compofitionde l'acide
trouve joint à l'hydrogène & au carbone, pour
former une bafe triple; il entre également, à ce
qu'on peut croire, dans l'acide gàllique. Enfin
prefque tous les acides animaux ont pour bafe
l'azote le phofphore l'hydrogène & le car-
bone. Une nomenclature qui entreprendroit
d'exprimer à la fois ces quatre bafes feroit
méthodique fans doute elle auroit l'avantage
d'exprimer des idées claires & déterminées mais
cette cumulation de fubftantifs& d'adjedifs grecs
& latins, dont les Chimiftes même n'ont
point
fembleroit
encore admis généralement l'ufage
préfenter
préfenter un langage barbare, également difficile
à retenir & à prononcer. La perfedion d'ailleurs
de la fcience doit précéder celle du langage &
il s'en faut bien que cette partie de la Chimie
foit encore parvenue au point auquel elle doit
arriver un jour. Il eft donc indifpenfable de
conferver, au moins pour un tems les noms
anciens pour les acides & oxides animaux. Nous
nous foinmes feulement permis d'y faire rlueI.
ques légères modifications par exemple, de ter-
miner en eux la dénomination de ceux dans îef-
quels nous foupçonnons que le principe acidifia-
ble eft en excès, & de terminer au contraire en
ique le nom de ceux dans lefquels nous avons
lieu de croire que l'oxygène eft prédominant.
Les acides végétaux qu'on connoît jufqu`à
préfent, font au nombre de treize favoir
L'acide acéteux.
L'acide acétique.
L'acide oxalique.
L'acide tartareux.
L'acide pyro tartareux.
L'acide citrique.
L'acide malique.
L'acide pyro-muqueux.
L'acide pyro ligneux.
L'acide gallique.
L'acide benzoïque.
L'acide camphorique.
L'acide faccmîque.
Quoique tous ces acides foient, comme je
l'ai dit principalement & prefqu'uniquement
compofés d'hydrogène de carbone & d'oxy
gène, ils ne contiennent cependant, à propre-
ment parler, ni eau, ni acide carbonique, ni
huile mais feulement les principes propres à
les former. La force d'attraâion qu'exercent
réciproquement l'hydrogène,le carbone & l'oxy-
gène, eft dans ces acides dans un état d'équi-
libre qui ne peut exifler qu'à la température
dans laquelle nous vivons pour peu qu'on les
échauffe au-delà du degré de l'eau bouillante,
l'équilibre eft rompu; l'oxygène & l'hydrogène
fe réunifient pour former de l'eau une portion
du carbone s'unit à l'hydrogène pour produire
de l'huile il fe forme auffi de l'acide carboni-
que par la combinaifondu carbone & de l'oxy-
gène enfin il fe trouve prefque toujours une
quantité excédente de charbon qui refte libre.
C'eft ce que je me propofe de développer un
peu davantage dans le Chapitre fuivant.
Les oxidesdu règne animal font encore moins
connus que ceux du règne végétal, &leur nom-
bre même eft encore indéterminé. La partie
rouge du fang la lymphe prefque toutes les
fécrétions font de véritables oxides; & c'eft
fous ce point de vue qu'il eft important de les
étudier.
Quant aux acides animaux le nombre de
ceux qui font connus fe borne actuellement à
frx; encore efi-il probable que plufeurs de ces
acides rentrent les uns dans les autres, ou au
moins ne diffèrent que d'une manière peu fen-
fîble. Ces acides font
L'acide ladique.
L'acide faccho-Iadique.
L'acide bombique.
L'acide fornzique.
L'acide fébacique.
L'acide pruflique.
Je ne place pas l'acide phofphorique au rang
des acides animaux, parce qu'il appartient éga-
lement aux trois règnes.
La connexion des principes qui conflituent
les acides & les oxides animaux n'eft pas plus
folide que celle des acides & des oxides végé-
taux un très-léger changement dans la tempé-
rature fuffit pour la troubler, & c'eft ce que
j'efpère rendre plus fenfible par les obferva-
tions que je vais rapporter dans le Chapitre
fuivant.
CHAPITRE XII.
De la, décompofiùon des Matières végétales
& animales par V action du feu.

POUR biea concevoir


ce qui fe pafïe dans
la décompofition des fubfiances végétales par
le feu, il faut non-feulement confidérer la na-
ture des principes qui entrent dans leur com-
portion mais encore les différentes forces
d'attradion que les molécules de ces principes
exercent les unes fur les autres, & en m'ême-
tems celle que le calorique exerce fur eux.
Les principes vraiment conftitutifs des végé-
taux fe réduïfent à trois comme je viens de
fexpofer dans le Chapitre précédent l'hydro-
gène, l'oxygène & le carbone. Je les appelle
conflitutifs parce qu'ils font communs à tous
les végétaux, qu'il ne peut exifler de végétaux
fans eux à la différence des autres (ubfiances
qui ne font eflèntielles qu'à la conftitution de
tel végétal en particulier mais non pas de
tous les végétaux en général.
De ces trois principes, deux, l'hydrogène &
l'oxygène ont une grande tendance à s'unir
au calorique & à fe convertir en gaz tandis
.que le carbone au-contraire eft un principe fixe
& qui a très-peu d'affinité avec le calorique.
D'un autre côté, l'oxygène qui tend
avec un
degré de force à
peu près égale à "s'unir, fcit
avec l'hydrogène foit avec le carbone à la
température habituelle dans laquelle
nous vi-
vons, a au contraire plus d'affinité avec le car-
bone à une chaleur rouge l'oxygène quitte
en conféquence à ce degré l'hydrogène &
s'unit au carbone pour former de l'acide
bonique.
car-
Je me fervirai quelquefoisde cette exprellîon
chaleur rouge quoiqu'elle n'exprime
pas un.
degré de chaleur bien déterminée, mais beau-
coup fupérieure cependant à celle de l'eau
bouillante,.
Quoique nous foyogs bien éloignés de
con-
aoître la valeur de toutes ces forces, & de
pou-
voir en exprimer l'énergie par des nombres
au moins fommes-nous certains par ce qui fe
pafre journellement fous
nos yeux, que quelque
variables qu'elles foient en raifon du degré de
température ou ce qui eft la même chofe,
en
raifon de la quantité de calorique
avec lequel
elles font combinées, elles font
toutes à peu près
en équilibre à la température dans laquelle nous
vivons ainfî les végétaux
ne contiennent ni
huile, ni eau, ni acide carbonique; mais ils
contiennent les élémens de toutes ces fubflances.
L'hydrogènen'efl pointcombiné, ni avec l'oxy-
gène, ni avec le carbone, & réciproquement;
mais les molécules de ces trois fubitances for-
ment une combinaifon triple d'où réfultent le
tepos & l'équilibre.
Un changement très-léger dans la tempéra-
ture fuffit pour renverfer tout cet échafaudage
de combinaifons s'il eft permis de fe fervir de
cette expreffion. Si la température à laquelle le
végétal eft expofé n'excède pas beaucoup celle
de l'eau bouillaute l'hydrogène & l'oxygène fe
réunifTent & forment de l'eaú qui paffe dans la
difallation; une pordon d'hydrogène & de car-
bone s'unifTent enfemble pour former de l'huile
volatile, une autre portion de carbone devient
libre, & comme le principe le plus fixe, il
refle dans la cornue. Mais fi au lieu d'une cha-
leur voifine de l'eau bouillante on applique à
une fubflance végétale une chaleur rouge, alors
ce n'eft plus de l'eau qui fe forme, ou plutôt
même celle qui pouvoit s'être formée par la
première impreffion de la chaleur fe décom-
pofe l'oxygène s'unit au carbone avec lequel
il a plus d'affinité à ce degré; il fe forme de
l'acide carbonique, & l'hydrogène devenu libre
s'échappe fous la forme de gaz, en s'unifïànt
il
au calorique. Non-feulement à ce degré ne
fe forme point d'huile, mais s'il s'en étoit formée
elle feroit décompofée.
On voit donc que la déeompofition des ma-
tières végétales fe fait à ce degré en vertu
d'un jeu d'affinités doubles & triples & que
tandis que le carbone attire l'oxygène pour for1
mer de L'acide carbonique, le calorique attire
Phydrogène pour former du gaz hydrogène.
Il n'eft point de fubftance végétale dont la
diftillation ne fournifïè la preuve de cette théo-
rie, fi toutefois on peut appeler de ce nom un
Emple énoncé des faits. Qu'on diftille du fucre;
tant qu'on ne lui fera éprouver qu*une chaleur
inférieure à celle de l'eau bouillante, il ne per-
dra qu'un peu d'eau de eriftallifation; il fera
toujours du fucre & il en confervera toutes les
propriétés mais fitôt qu'on l'expofe à une cha-
leur tant foit peu fupérieure à celle de l'eau
bouillante, il noircit; une portion de carbone
fe fépare de la, combinaifon en même tems
itt paffe de Peau légèrement acide, & un peu
d'huile Ie charbon qui refle dans la cornue
forme près d'un tiers du poids originaire.
Le jeu des affinités efî encore plus comprqué
dans les plantes qui contiennent de l'azote
comme les crucifères & dans celles qui con~
tiennent du phofphore; mais comme ces. fubf-
sauces n'entrent qu'en petite quantité dans leur
combinaifon elles n'apportent pas de grands
chan gemens au moins en apparence, dans les
phénomènes de la dillillation il paroît que le
phofphore demeure combiné avec le charlion,
qui lui communique de la fixité. Quant à l'azote
il s'unit à fhydrogène pour former de l'ammo-
niaque ou alkali volatil.
Les matières animales étant compofées à peu
près des mêmes principes que les plantes cru-
cifères, leur diflillation donne le même réful-
tat mais comme elles contiennent plus d'hy-
drogène & plus d'azote, elles fourniffènt plus
d'huile & plus d'ammopiaque. Pour faire con-
noître avec quelle ponâualité cette théorie rend
compte de tous les phénomènes qui ont lieu
dans la ditlillation des matières animales, je ne
citerai qu'un fait; '3 c'eft la rectification & la dé-
compofition totale des huiles volatilesanimales,
appelées vulgairement huiles de Dippel. Ces
huiles, lorfqu'on les obtient par une première
rlillillation à feu nud fontbrunes, parce qu'elles
contiennent un peu de charbon prefque libre;
mais elles deviennent blanches par la rectifica-
tion. Le carbone tient fi peu à ces combinai-
fans, qu'il s'en fépare par leur fitnple expofî-
tion à l'air. Si on place une huile volatile ani-
male bien reâifiée 8ç par conféquent blanche,
Krnpide & tranfparente, fous une cloche rern
plie de gaz oxygène, en peu de tems le vo-
lume du gaz diminue & il éfi abforbépar l'huile.
L'oxygène fe combine avec l'hydrogène de
l'huile pour former de l'eau qui tombe au
fond en même tems la portion de charbon
qui étoit combinée avec l'hydrogène, devient
libre & fe manifefte par fa couleur noire. C'eft
par cette raifon que ces huiles, ne fe confer-
vent blanches & claires, qu'autant qu'on les
enferme dans des flacons bien bouchés, &
qu'elles noirciflent dès qu7elles ont le contad
de l'air.
Les reflifications fucceflîves de ces mêmes
huiles préfentent un autre phénomène confir-
matif- de cette théorie. A chaque fois qu'on les
diftille il refle un peu de charbon au fond de
la cornue, en même tems il fe forme un peu
d'eau par Ja combinaifon de l'oxygène de l'aîr
des vaiffeaux avec l'hydrogène de l'huile. Com-
me ce même phénomène a lieu à chaque dif-
tillation de la même huile il en réfulte qu'au
bout d'un grand nombre de rectifications file-
cefîrves fur-tout f on opère à un degré de
feu un peu fort & dans des vaiffeaux d'une
capacité un peu grande, la totalité de l'huile
fe trouve décompofée & l'on parvient à la
convertir entièrement en eau & en charbon.
Cette décompoftion totale de l'huile par des
reâifreations répétées, efl beaucoup plus lon-
gue & beaucoup plus difficile, quand on opère
avec des vaifïèaux d'une petite capacité &
fur-tout à un degré de feu lent & peu fupérieur
à celui de Peau bouillante. Je rendrai compte
à l'Académie, dans un Mémoire particulier, du
détail de mes expériences fur cette décompofi-
tion des huiles; mais ce que j'ai dit me paroît
fuffire pour donner des idées précifes de la
conflitution des matières végétales & animales,
& de leur décompofîtion par le feu.
CHAPITRE XIII.
De la décompofitïon des Oxides végétaux par
la fermentation vineufe,
X oui le monde fait
comment fe fait le vin,
le cidre, l'hidromel & en général toutes les
boiffons fermentées fpiritueufes. On exprime le
jus des raifïns & des pomrnes; on étend d'eau
ce dernïer on met la liqueur dans de grandes
cuves, & on la tient dans un lieu dont la tem-
pérature foit au moins de 10 degrés du ther-
momètre de Réaumur. Bientôt il s'y excite un
mouvement rapide de fermentation, des bulles
d'air nombreufes viennent crêver à la furface,
& quand la fermentation eft à fon plus haut
période, la quantité de ces bulles eft fi grande,
la quantité de gaz qui fe dégage eft fi confidé-
rable, qu'on croiroit que la liqueur eft fur un
brâfier ardent qui y excite une violente ébuIli.
tion. Le gaz qui fe dégage eft de l'acide car-
honique, & quand on le recueille avec foin,
il eft parfaitement pur & exempt du mélange
de toute autre efpèce d'air ou de gaz.
Le fuc des raifins, de doux & de fucré qu'il
étoit,fe change dans cette opération en une li-
queur vineufe qui lorfque la fermentation en
complette, ne contient plus de fucre, & dont
on peut retirer par diftitlation une liqueur in-
flammable qui efl. connue dans le
commerce &
dans les arts tous le nom d'efprit de vin. On
leur que cette liqueur étant
un réfultat de la
fermentation d'une matière fucrée quelconque
fufBfàmment étendue d'eau, il auroit été
contre
les principes de notre nomenclature de la
nom-
mer plutôt efprit de vin qu'efprÍt de cidre, ou
efprit de fucre fermenté. Nous avons donc été
forcés d'adopter un non¡ plus général, & celui
iïalkool qui nous vient des arabes
nous. a paru
propre remplir notre objet.
à
Cette opération eft une des plus frappantes
& des plus extraordinaires de toutes celles
que
la Chjmie nous préfente & nous
avons à exa.-
miner d'où vient le gaz acide carbonique qui
fe dégage, d'où vient l'efprit inflammable qui
fe forme, & comment un corps doux, un oxide
végétal peut fe transformer ainfi en deux fabf-
tances fi différentes, dont l'une eft combuflibie,
l'autre éminemment incombuflible. On voit que
pour arriver à la folation de ces deux queflions»
il falloit d'abord bien connoître l'analyfe & la
nature du corps fufceptible de fermenter, &
les produits de la fermentation; car rien
ne fe
crée, ni dans les opérations de Fait, ni dans
celles de la nature, & l'on peut pofer en prin-i
cipes que dans toute opération il y a une
égale quantité de matière avant & après l'opé-
ration que la qualité & la quantité des prin-
cipes eft la même & qu'il n'y a que des
changemens des modifications.
C'eft fur ce principe qu'eft fondé tout l'art
de faire des expériences en Chimie on eft
obligé de fuppofer dans toutes une véritable
égalité ou équation entre les principes du
corps
qu'on examine, & ceux qu'on en retire pat
l'analyfe. Ainfi puifque du moût de raifn donne
du gaz acide carbonique & de l'alkool, je puis
dire que le moût de raifin = acide -carbonique
•+* alkool. Il réfulte de-là qu'on peut parvenir
de deux manières à éclaircir ce qui fe paffe
dans la fermentation vineufe; la première,
en
déterminant bien la nature & les principes du
corps fermentefcible la féconde, en obfervant
bien les produits qui en réfultent par la fer-
mentation, & il eft évident que les connoif-
fances que l'on peut acquérir fur l'un condui-
fent à des conféquences certaines fur la nature
des autres & réciproquement.
Il étoit important d'après cela que je m'at-
tachafle à bien connoître les principes conf--
tituans du corps fermentefcible. On conçoit que
pour y parvenir je n'ai pas été chercher les
fucs de fruits très-comparés, & dont une ana-
lyfe rigoureufe feroit peut-être impofrble. J'ai
choifi de tous les corps fufceptibles de fermen-
ter le plus fimple; le fucre dont fanalyfe eft
facile, & dont j'ai déjà précédemment faitcon-
noître la nature. On fe rappelle que cette fubf
tance eft un véritable oxide végétal, un oxide
à deux bafes qu'il eft compofé d'hydrogène
& de carbone porté à l'état d'oxide par une
certaine proportion d'oxygène, & que ces trois
principes font dans un état d'équilibre qu'une
force très-légère fuffit pour rompre une longue
fuite d'éxpériences faites par différentes voies
& que j'ai répétées bien des fois m'a appris
que les proportions des principes qui entrent
dans la compofition du fucre font à-peu-près
les fuivantes.

Pour faire fermenter le fucre il faut d'abord


l'étendre d'environ quatre parties d'eau. Mais
de l'eau & du fucre mêlés enfemble dans
quelque proportiom que ce foit, ne fermente-
roient jamais feuis & l'équilibre fubfifteroit
toujours entre les principes de cette combinai-
fon ne le rompoit par un moyen quel-
fi on
conque. Un peu de levure de bierre fuffit pour
produire cet effet & pour donner le premier
mouvement à la fermentation elle fe continue
enfuite d'elle-mêmejufqu'à la fin. Je rendrai
compte ailleurs des effets de la levure & de
ceux des fermens en général. J'ai communément
employé dix livres de levure en pâte pour un
quintal de fucre & une quantité d'eau égale à
quatre fois le poids du fucre ainf la liqueur
fermentefcible fe trouvoit compofée ainfi qu'il
fuit je donne ici les réfultats de mes expé-
riences tels que je les ai obtenus, & en con-
fervai1t même jufqu'aux fradions que m'a
données le calcul de réduction.
Matériaux de la fermentation pour un. quintal
de fucre.
Apres
Après avoir bien déterminé quelle efl la
nature & la quantité des principes qui conili-
tuent les matériaux de la fermentation, il refle
à examiner quels en font les produits. Pour
parvenir à les connaître, j'ai commencé
par
renfermer les yo livres de liqueur ci-deffus
dans un appareil par le moyen duquel
je
pouvois non-feulement déterminer la qualité
& la quantité des gaz à mefitre qu'ils fe déga-
geoient, mais encore pefer chacun des produits
féparément, à telle époque de la fermentation
que je le jugeois à propos. Il feroit trop long
de décrire ici cet appareil qui fe
trouve au
furplus décrit dans la troifième partie de
cet
Ouvrage. Je me bornerai donc à rendre
compte
des effets.
Une heure ou deux après que le mélange
en fait, fur-tout fi la température dans laquelle
on opère eft de ij: à 18 degrés, on commence
à appercevoir les premiers indices de la fer-
mentation la liqueur fe trouble & devient
écumeufe il s'en dégage des bulles qui vien-
nent crever à la furface bientôt la quantité de
ces bulles augmente, &c 'il fe fait un dégage-
ment abondant & rapide de gaz acide carbo-
nique très-pur accompagné d'écume qui n'eft
autre chofe que de la levure qui fe fépare. Au
bout de quelques jours, fuiyant le degré de
chaleur le mouvement & le dégagement de
il
gaz diminue, mais ne
cette pas entièrement;
& ce n'eft qu'après un intervalle de tems auez
long que la fermentation eft achevée.
Le poids de l'acide carbonique fec qui fe
dégage dans cette opération efl de 35 livres
y onces 4 gros io grains.
Ce gaz entraîne en outre avec lui une por-
tion affez confidérable d'eau qu'il tient en dif-
folution, & qui eu environ de 13 livres il on-
ces y gros.
Il reile dans le vafe dans lequel on opère
acide, d'abord
une liqueur vineufe légèrement
trouble, qui s'éclaircit enfuite d'elle-même, &
qui laide dépofer une portion de levure. Cette
liqueur pèfe en totalité 3.97 livres y onces
29 grains.
Enfin en analyfant féparément toutes ces fubf-
& en les réfolvant dans leurs parties
tances,
conflituantes on trouve après un travail très-
pénible les réfultats qui fuivent, qui feront dé-
taillés dans les mémoires de -l'Académie.
Tableau des réfultats obtenusparlafermentation.
Quoique dans ces rèfultats j'aye porté jus
qu'aux grains la précifion du calcul, il s'en faut
bien que ce genre d'expériences puiffe compor-
ter encore une auflî grande exaétitude mais
comme je n'ai opéré que fur quelques livres
de fucre, & que pour établir des cômparaifons
j'ai été obligé de les réduire au quintal, j'ai cru
devoir laifTer fubfifler les fractions telles que le
calcul me les a données.
En réfléchiflàntfur les réfultats que préfentent
les tableaux ci-deflus il eil aifé de voir claire-
ment ce qui fe paffe dans la fermentation vi-
neufe. On remarque d'abord que fur les cent
livres de fucre qu'on a employées il y en a
eu 4 livres r once 4 gros 3 grains qui font
reliées dans Pétat de fucre non-déeompofé
en forte qu'on n'a réellement opéré que fur pf
livres i4 onces 5 gros 60 grains de fucre c'eît-
à-dire, fur 61 livres 6 onces 4S grains d'oxy-
gène, fur 7 livres 10 onces 6 gros 6 grains
d'hydrogène, & fur 26 livres 13 onces y gros
ip grains de carbone. Or en comparant ces
quantités on verra qu'elles font fuffifantes pour
former tout l'efprit de vin ou alkool, tout l'a-
cide carbonique & tout l'acide acéteux qui a
été produit par feffet de la fermentation. Il
n'eu donc point néceffaire de fuppofer que l'eau
fe décompofe dans cette opération à moins
qu'on ne prétende que l'oxygène & l'hydrogène
font dans l'état d'eau dans le fucre; ce que je
ne crois pas, puifque j'ai établi au contraire
qu'en général les trois principes eonllitutifs des
végétaux, l'hydrogène, l'oxygène & le carbone
étoient entr'eux dans un état d'équilibre que
cet état d'équilibre fubfifloit tant qu'il n'était
point troublé, foit par un changement de tem-
pérature, foit par une double affinité, & que
principes fe combi-
ce n'étoir qu'alors que les
nant deux à deux formoient de
l'eau & de l'a-
cide carbonique.
Les effets de la fermentation vineufe fe ré-
duifent donc à féparer en deux portions le fucre
qui eft un oxide à oxygéner l'une aux dépens
de l'autre pour en former de l'acide carboni-
que à défoxygéuer
l'autre en faveur de la pre-
mière pour en former une fubltance combuf-
tible qui eft Palkool en forte que s'il étoit pof
fible de recombiner ces deux f ubftances l'al-
Rool & l'acide carbonique, on reformeroit du
fùcre. Il eu. à remarquer au furplus que l'hy-
drogèno & le carbone ne font pas dans l'état
d'huile dans l'alkool ils font combinés avec
mifcibles à
une portion d'oxygène qui les rend
}'.eau; les trois principes, l'oxygène,- l'hydrogène
& le carbone, font donc encore ici dans une ef-
pèce d'état d'équilibre; & en effet, en lés fai-
fant paflèr à travers un tube de verre ou de
porcelaine rougi au feu, on les recombine deux
à deux, & on retrouve de l'eau, de l'hydro-
gène, de l'acide carbonique & du carbone.
J'avois avancé d'une manière formelle dans
la formation de
mes premiers Mémoires fur
l'eau que cette fubllanee regardée comme un
élément,. fe- décompofoit dans un grand nom-
bre d'opérations chimiques notamment dans
la fermentation vineufe je fuppofois alors qu'il
exiftoit de Peau toute formée dans le lucre,
tandis que je fuis perfuadé aujourd'hui qu'il
contient feulement les matériaux propres à la
former. On conçoit qu'il a dû m'en coûter pour
abandonner mes premières idées; auffi n'efl-ce
qu'après plufîeurs années de réflexions, & d'a-
près une longue fuite d'expériences & d'obfer-
vations fur les végétaux, que je m'y fuis dé-
terminé.
Je terminerai ce que j'ai à dire fur la fermen-
tation vineufe, en obfervant qu'elle peut fournix
un moyen d'analyfe du fucre & en général des
fubftances végétales fufceptibles de fermenter.
En effet, comme je l'ai déjà indiqué au com-
mencement de cet article je puis confdérer
les matières mifes à fermenter & le réfultat ob-
tenu après la fermentation comme une équa-
tion algébrique & en fuppofant fucceflivement
chacun des élémens de cette équationinconnus,
j'en puis tirer une valeur & reétifier ainfi l'ex-
périence par le calcul & le calcul par l'expé-
rience. J'ai fouvent profité de cette méthode
pour corriger les premiers réfultats de mes
expériences, & pour me guider dans les pré-
cautions à prendre pour les recommencer
mais ce n'eft pas ici le moment d'entrer dans
ces détails fur lefquels je me fuis au furplus
étendu fort au long dans le Mémoire que j'ai
donné à l'Académie fur la Fermentation vi-
neufe & qui fera inceflàmment imprimé.
CHAPITRE XIV.
De la Fermentation putride.
JE viens de faire voir comment le corps
fucré fe décompofoit lorfqu'il étoit étendu
d'une certaine quantité d'eau & à l'aide d'une
douce chaleur comment les trois principesqui
le conftituent, l'oxygène l'hydrogène & le
carbone, qui étoient dans un état d'équilibre
& qui ne formoient dans J'état de fucre ni de
l'eau ni de l'huile, ni de l'acide carbonique,
fe féparoient pour fe combiner dans un autre
ordre comment une portion de carbone fe
réuniffoit à l'oxygène pour former de l'acide
carbonique comment une autre portion de
carbone fe combinoit avec de l'hydrogène &
avec de l'eau pour former de l'alkool.
Les phénomènes de la putréfaaion s'opèrent
de même en vertu d'affinités très compliquées.
Les trois principes conllitutifs du corps ceffent
également, dans cette opération d'être dans
un état d'équilibre au lieu d'une combinaifon
ternaire, il fe forme des combinaifonsbinaires;
mais le réfultat de ces combinaifons efl bien
différent de celui que donne la fermentation
vineufe. Dans cette dernière une partie des
principes de la fubflance végétale l'hydrogène
par exemple, refle uni à une portion d'eau &
de carbone pour former de l'alkool. Dans la
fermentation putride au contraire, la totalité de
l'hydrogène fe diffipe fous la forme de gaz
hydrogène en même tems l'oxygène & le car-
bone fe réunifiant au calorique, s'échappent
fous la forme de gaz acide carbonique. Enfin
quand l'opération eft entièrement achevée, fur-
tout fi la. quantité d'eau néceffàîre pour la pu-
îréfaâion n'a pas manqué, il ne relie plus que
la terre du végétal mêlée d'un peu de carbone
& de fer.
La putréfà&ion des végétaux n'eft donc au-
tre chofe qu'une analyfe complette des fubf-
tances végétales dans laquelle la totalité de leurs
principes confiitutifs fe dégage fous forme de
gaz à l'exception de la terre qui refle dans
l'état de ce qu'on nomme terreau.
Je donnerai dans la troifième partie de cet
Ouvrage, une idée des appareils qu'on peut
employer pour ce genre d'expériences.
Tel eft le réfultat de la putréfaâion quand
le corps qu'on y foumet ne contient que de
l'oxygène de l'hydrogène, du carbone & un
peu de terre mais ce cas eft rare, & il paroît
même que ces fubflances, lorfqu'elles font feu-
les, fermentent difficilement qu'elles fermen-
tent mal & qu'il faut un tems confidérable
pour que la putréfaction foit complette. Il n'en
eft pas de même quand la fubftance mife à fer-
menter contient de l'azote & c'eft ce qui a
lieu à l'égard de toutes les matières animales
& même d'un affez grand nombre de matières
végétales. Ce nouvel ingrédient favorife mer-
veilleufement la putréfadion c'eft pour cette
raifon qu'on mélange les matières animales avec
les végétales, lorfqu'on veut hâter la putréfac-
tion & c'ell dans ce mélange que confifte
prefque toute la fcience des amendemens &
des fumiers.
Mais î'introdudion de l'azote dans les maté-
riaux de la putréfadion ne produit pas feule-
ment l'effet d'en accélérer les phénomène
elle forme en fe combinant avec l'hydrogène,
une nouvelle fubftance connue fous le nom
d'alkaIi volatil ou ammoniaque. Les réfuttats
qu'on obtient en arîalyfant les matières animales
par différens procédés, ne laiffent aucun doute
fur la nature des principes qui conftituent l'am-
moniaque. Toutes les fois qu'on fépare préa-
lablement l'azote de ces matières elles ne
donnent plus d'ammoniaque & elles n'en don-
nent qu'autant qu'elles contiennent de l'azote.
Cette compofmon de l'ammoniaque eft d'ailleurs
confirmée par des expériences analytiques,
que
M. Berthollet a détaillées dans les Mémoires
de l'Acad. année i78jr page 316 il donné
a
différens moyens de décompofer
cette fubf-
tance & d'obtenir féparément les deux princi-
pes, l'azote & l'hydrogène qui entrent dans
fa combinaifon.
J'ai déjà annoncé plus haut (voye^ Chapitre
dixième ) que. les corps combuftibles étoient
prefque tous fufceptibles de fe combiner les
uns avec Ies autres. Le gaz hydrogène a émi-
nemment cetre propriété; il diffbïit le carbone,
le foufre & le phofphore, & il réfulte de
ces
combinaifons ce que j'ai appelé plus haut, ga^
hydrogène carbonifé, gaz hydrogène fulfurifê,
gaz hydrogène phofpharifé. Les deux derniers
de ces gaz ont une odeur particulière & très-
défagréable celle du gaz hydrogènefulfurifé
a
beaucoup de rapport avec celle des œufs gâtés
& corrompus; celle du gaz hydrogène, phof-
phorifé eft absolument la même que celle du
poiffbn pourri enfin l'ammoniaque a une odeur
qui n'eft ni moins pénétrante ni moins défa-
gréable que les précédentes. C'eR de la com-
binatfon de ces différentes odeurs que réfulte
celle qui s'exhale des matières animales en pui
tréfaâion, & qui efl fi fétide. Tantôt c'efl l'o-
deur de l'ammoniaque qui en prédominante
& on la reconnoît aifément à ce qu'elle pique
les yeux; tantôt c'eft celle du foufre,
comme
dans les matières fécales; tantôt enfin, c'etl celle
du phofphore, comme dans le hareng pourri.
J'ai fuppofé jufqu'ici que rien'ne dérangeoit
le cours de la fermentation & n'en troubloit
les effets. Mais M. de Fourcroy & M. Thouret
ont obfervé relativement à des cadavres
en-
terrés à une certaine profondeur & garantis
jufqua un certain point du contact, de l'air,
des phénomènes particuliers. Ils ont remarqué
que fouvent la partie mufculaire fe conver-
ti/Toit en une véritable graiffe animale. Ce
phénomène tient à ce que
par quelque eir-
conliance particulière, fazote
que contènoient
ces matières animales aura été dégagé, &àce
qu'il n'eff refté que de l'hydrogène & du
car-
bone, c'eft-à-dire, les matériaux
propres à faire
delà graiffe. Cette obfervation fur la pofiibilité
de convertir en graiffe les matières animales
peut conduire un jour à des découvertes im-
portantes lur le parti qu'on en peut tirer pour
les ufages de la fociété. Les déjouions anima-
les, telles que les matières fécales, font prin-
cipalement comporées de carbone & d'hydro-
gène elles fe rapprochent donc beaucoup de
l'état d'huile & en effet elles
en fourniffent
beaucoup par la diftillation à feu nud. Mais
l'odeur infoutenable qui accompagne tous les
produits qu'on en retire, ne permet pas d7er-
pérer de long-tems qu'on puüfe les employer
à autre -chofe qu'à faire des engrais.
Je n'ai donné dans ce Chapitre que des ap-
perçus, parce que la compofition des matières
animales n'eft pas encore très-exaftement con-
nue. On fait qu'elles font compofées d'hydro-
gène, de carbone, d'azote, de phosphore, de
foufre le tout porté à l'état d'oxide par une
quantité plus ou moins grande d'oxygène mais
on ignore abfolument quelle ett la proportion
de ces principes. Le tems complétera cette
partie de fanalyfe chimique comme il en a
complété déjà quelques autres.
CHAPITRE XV.
De la Fermentation acéteufe.
LA fermentation acéteufe n'eft autre chofe
que l'acidificationdu vin qui fe fait à l'air libre
par l'abforption de l'oxygène. L'acide qui en
refaite eil l'acide acéteux vulgairement appelé
vinaigre il eft compofé d'une proportion qui
n'a point encore été déterminée, d'hydrogène
& de carbone combinés enfëmble, & portés à
l'état d'acide par l'oxygène.
Le vinaigre étant un acide, l'analogie con-
duifoit feule à conclure qu'il contenoit de l'oxy-
gène mais cette vérité eft prouvée de plus par
des expériences directes. Premièrement le vin
ne peut fè convertir en vinaigrequ'autant qu'il
a le contad de l'air & qu'autant que cet air
contient du gaz oxygène. Secondement cette
opération eft accompagnée d'une diminution du
volume de l'air dans lequel elle fe fait, & cette
diminution de volume eft occafionnée par l'ab-
forption du gaz oxygène. Troifîèmement on
peut transformer le vin en vinaigre, en l'oxy-
génant par quelqu'autre moyen que ce foit.
Indépendamment de ces faits qui prouvent
que l'acide acéteux ell un réfultat de l'oxygé-
nation du vin une expérience de M. Chaptal,
profeffeur de Chimie à Montpellier, fait voir
clairement ce qui fe paffe dans cette opération.
Il prend du gaz acide carbonique dégagé de la
bière en fermentation; il en imprègne de l'eau
jufqu'à famrarion, c'eft-à-dire, jufqu'à ce qu'elle
en ait abforbé environ une quantité égale à fon
volume il met cette eau à la cave dans des
vaiffeaux qui ont communication avec l'air &
au bout de quelque tems le tout fe trouve
converti en acide acéteux. Le gaz acide car-
bonique des cuves de bière en fermentation
n'eft pas entièrement pur; il eft mêlé d'un peu
d'alkool qu'il tient en diffblution il y a donc
dans l'eau imprégnée d'acide carbonique dégagé
de la fermentation vineufe, tous les matériaux
néceffaires pour former de l'acide acéteux.
L'alkool fournit l'hydrogène & une portion de
carbone l'acide carbonique fournit du carbone
& de l'oxygène enfin l'air de l'atmofphère
doit fournir ce qui manque d'oxygène pour
porter le mélange à l'état d'acide acéteux.
On voit par-là qu'il ne faut qu'ajouter de
l'hydrogène à l'acide carbonique pour le conf-
tituer acide acéteux, ou pour parler plus géné.
ralement, pour le transformer en un acide vé-
gétal quelconque, fuivant le degré d'oxygéna-
tion,
tion; qu'il ne faut au contraire que retrancher
de l'hydrogène aux acides végétaux pour les
convertir en acide carbonique.
Je ne m'étendrai pas davantage fur la fer-
mentation acéteufe à l'égard de laquelle nous
n'avons pas encore d'expériences exades; les
faits principaux font connus, mais J'exaditude
numérique manque. On voit d'ailleurs que la
théorie de l'acétification eft étroitement liée à
celle de la conftitution de tous les acides &
oxides végétaux, & nous ne conhoiflbns point
encore la proportion des principes dont ils font
compofés. Il eflaiié de s'appercevoir cependant
que toute cette partie de la chimie marche rapi-
dement comme toutes les autres vers fa
per-
fedion, & qu'elle eft beaucoup plus finple
qu'on ne l'avait cru jufqu'ici,
CHAPITRE XVI.
De la formation, des Sels neutres, & des diffé-
rentes bafes qui entrent dans leur compofition.
INouss avons vu comment un petit nombre
de fubftanoes fîtnples, ou au moins qui n'ont
point été décompofées jufqu'ici, telles que l'a-
zote, le foufre, le phofphore, le carbone, le
radical muriatique & l'hydrogène, formoient en
fe combinant avec l'oxygène tous les oxides
& les acides du règne végétal & du règne
animal nous avons admiré avec quelle fimpli-
cité de moyens la nature multiplioit les pro-
priétés & les formes foit en combinant en-
femble jufqu'à trois & quatre bafes acidifiables
dans différentes proportions foit en changeant
la dofe d'oxygène deftiné à les acidifier. Nous
ne la trouverons ni moins variée, ni moins
fîmple ni fur-tout moins féconde dans l'ordre
de chofes que nous allons parcourir.
Les fubflances acidifiables en fe combinant
avec l'oxygène, & en fe convertiiïànt en acides,
acquièrent une grande tendance à la combinai-
fon elles deviennent fufceptibles de s'unir avec
des fubflances terreufes & métalliques, & c'eft
de cette réunion que réfultent les fels neutres.
Les acides peuvent donc être regardés comme
de véritables principes falifians & les fubllan-
ces auxquelles ils s'unifient pour former des fels
neutres, comme des bafes falifiables c9efl pré-
cifément de la.combinaifon des principes fali-
fians avec les bafes falifiables dont nous allons
nous occuper dans cet article.
Cette manière d'envifager les acides ne
me
permet pas de les regarder comme des fels
quoiqu'ils aient quelques-unesde leurs propriétés
principales, telles que la folubilité dans l'eau, &c.
Les acides, comme je l'ai déjà fait obferver
réfultent d'un premier ordre de combinaifons;
ils font formés de la réunion de deux principes
fimples, ou au moins qui fe comportent à la
manière des principes fmples, & ils font
par
conféquent pour me fervir de l'expreffion de
Stahl, dans l'ordre des mixtes. Les fels
neutres,
au contraire, font d'un autre ordre de combi-
naifons, ils font formés de la réunion de deux
mixtes, & ils rentrent dans la claffe des
com-
pofés. Je ne rangerai pas non plus,
par la même
caufe les alkalis (a) ni les fubftances terreufes,
telles que la chaux, la magnéfe, &c. dans la

(a) On regardera peut-être comme


un défaut de la
méthode que j'ai adoptée, de m'avoir contraint à rejetter
claffe des fels, & je ne défgnerai par ce nom
d'une
que des compotes formes de réunion
la
fubftance fimple oxygénée avec une bafe quel-
conque.
Je me fuis fufhfamment étendu dans les cha-
pitres précédens fur la formation des acides,-
& je n'ajouterai rien à cet égard; mais je n'ai
rien dit encore des bafes qui font fufceptibles
de fe combiner avec eux pour former des fels
falifiables
neutres, ces bafes que je nomme
font
La potaffe.
La foude.
L'ammoniaque.
La chaux.
La magnéfte.
La baryte.
L'alumine.
Et toutes les fubfiances métalliques.
Je vais dire un mot de l'origine & de la
nature de chacune de ces bafes en particulier.
De la Potaffe.
Nous avons déjà fait obferver que lorfqu'on

les alkalis de la claffe des fels & je conviens que c'eftun


reproche qu'on peut lui faire mais cet inconvénientfe
trouve compenfé par de f grands avantages, que
je n'ai
pas cru qu'il dût m'arrêter.
échaufFoit une fubftance végétale dans un ap-
pareil diftillatoire, les principes qui la compo-
fent, l'oxygène, Phydrogène & le carbone, &
qui formoient une combinaifon triple dans un
état d'équilibre fe rénniubient deux à deux
en obéiflant aux affinités qui doivent avoir lieu
fuivant le degré de température. Ainiî à la
première impreffiou du feu, & dès que la cha-
leur excède celle de l'eau bouillante, l'oxygène
& l'hydrogène fe réunifient pour former de
l'eau. Bientôt après une portion de carbone de
une d'hydrogène fe combinent pour former de
Phuile. Lorfqu'enfuite par le progrès de la dii-
tillation on eft parvenu à une chaleur rouge
l'huile & l'eau même qui s'étoient formées fe
décompofent; l'oxygène & le carbone forment
l'acide carbonique, une grande quantité de gaz
hydrogène devenu libre fe dégage & s'échappe;
enfin il ne refle plus que du charbon dans la
cornue.
La plus grande partie de ces phénomènes fe
retrouvent dans la combuftion des végétaux à
l'air libre mais alors la préfence de l'air
introduit dans l'opération trois ingrédizus nou-
veaux, dont deux au moins apportent des chan-
gemens confdérablesdans les réfultats de l'opé-
ration. Ces ingrédiens font l'oxygène de l'air,
l'azote & le calorique. A mefure que l'hydrogène
du végétal ou celui qui réfulte de la décompofî-
tion de l'eau eft chaifé par le progrès,du feu fous
la forme de gaz hydrogène il s'allume au
moment où il a le contad de l'air, il reforme
de l'eau, & le calorique des deux gaz qui de-
vient libre, au moins pour la plus grande partie,
produit la flamme,
Lorfqu'enfuite tout le gaz hydrogène a été
chaffé, brûlé & réduit en eau, le charbon qui
refle brûle à fon tour, mais fans flamme il
forme de l'acide carbonique qui s'échappe,
emportant avec lui une portion de calorique
qui le conftitue dans fétat de gaz le furplus du
calorique devient libre, s'échappe & produit la
chaleur & la lumière qu'on obferve dans la
combuflion du charbon. Tout le végétal fe
trouve ainfi réduit en eau & en acide carboni-
que il ne refte qu'une petite portion d'une
matière terreufe grife connue fous le nom de
cendre & qui contient les feuls principes
vraiment fixes qui entrent dans la conflitution
des végétaux.
Cette terre ou cendre dont le poids n'excède
pas communément le vingtième de celui du
végétal, contient unefubftance d'un genre parti-
culier, connue fous le nom d'alkali fixe végétal
ou de potaffe.
Pour l'obtenir on paffe de l'eau fur les ceii-
dres; l'eau fe charge de la potage qui eft dif-
foluble, & elle laiffe les cendres qui font in-
iolubles en évaporant enfuite l'eau, on obtient
la potaffe qui efl fixe, même à un très-grand
degré de chaleur & qui refte fous forme
blanche & concrète. Mon objet n'eft point de
décrire ici l'art de préparer la potaffè encore
moins les moyens de l'obtenir pure je n'entre
même ici dans ces détails que pour obéir à la
loi que je me fuis faite de n'admettre aucun.
mot qui n'ait été défini.
La potafle qu'on obtient par ce procédé eft
toujours plus ou moins faturée d'acide carbo-
nique, & la raifon en eft facile à faifir comme
la potaffe ne fe forme, ou au moins n'eft ren-
due libre qu'à mefure que le charbon du vé-
gétal eft converti en acide carbonique par
l'addition de l'oxygène, foit de l'air, foit de
l'eau il en réfulte que chaque molécule de
potaffe fe trouve au moment de fa formation
en contact avec une molécule d'acide carbo-
nique, & comme il y a beaucoup d'affinité
entre ces deux fnbftances, il doit y avoir com-
binaifon. Quoique l'acide carbonique foit celui
de tous les acides qui tient le moins à la po-
taffe il eft cependant difficile d'en féparer les
dernières portions. Le moyen le plus habituel-
lement employé confifte à diiïbudre la potafle
dans de l'eau, à y ajouter deux ou trois fois
fon poids de chaux vive, à filtrer & à évaporer
dans des vaïlfeaux fermés; la fubftance faline
qu'on obtient eft de la potaffe prefqu'entière-
ment dépouillée d'acide carbonique.
Dans cet état, elle eft non-feulement difïb-
luble dans l'eau, au moins à partie égale; mais
elle attire encore celle de l'air avec- une éton-
nante avidité elle fournit en conféquence un
moyen de fécher Pair ou les gaz auxquels elle eft
exporée. Elle eft également fbluble dans l'efprit-
de-vin ou alcool, à la différence de celle qui
eft faturée d'acide carbonique, qui n'eft pas fo-
lubie dans ce diffblvanî. Cette circonflance a
fourni à M. Berthollet un moyen d'avoir de la
potaffe parfaitement pure.
Il n'y a point de végétaux qui ne donnent
plus on moins de potaffe par incinération; mais
on ne l'obtient pas également pure de tous, elle
eft ordinairement mêlée avec différées- fels qu'il
eft aifé d'en féparer.
On ne peut guère douter que les cendres,
autrement dit la terre que laiffent les végétaux
lorfqu'on les brûle ne préexifiât dans ces végé-
taux antérieurementà la combuftion cette terre
forme, à ce qu'il paroît, la partie offeufe la
carcafie du végétal. Mais il n'en elt pas de même
de la potaffe; on n'en: encore parvenu à féparer
cette fubftance des végétaux, qu'en employant
des procédés ou des intermèdes qui peuvent
fournir de l'oxigène & de l'azote tels que la
combustion ou la combinaifon avec l'acide ni-
trique en forte qu'il n'eft point démontré que
cette fubftance. ne foit pas un produit de ces
opérations. J'ai commencé une fuite d'expé-
riences fur cet objet, dont je ferai bientôt en
état de rendre compte.
De la Soude.
La foude eft comme la potaffe un alkali
qui fe tire de la lixiviation des cendres des
plantes mais de celles feulement qui croiuent
aux bords de la mer & principalement du
kali d'où eft venu le nom tfalkali qui lui
a été donné par les arabes elle a quel-
ques propriétés communes avec la potafTe
mais elle en a d'autres qui l'en diftinguent. En
général ces deux fubftances portent chacune
dans toutes les combinaifons falines des carac-
tères qui leur font propres. La foude telle
qu'on l'obtient de la lixiviation des plantes
marines, eft le plus fouvent entièrement fatu-
rée d'acide carbonique; mais elle n'attire pas,
comme la potade l'humidité de l'air au con-
traire elle s'y deffeche 3 fes criftaux s'effleurif-
fent & fe convertifiènt en une pouflïère blanche
qui a toutes les propriétes de la foude & qui?
n'en diffère que parce qu'elle a perdu fon eau
de criflaififation.
On ne connoît pas mieux jufqu'ici les prin-
cipes conflituans de la foude que ceux de la
potaffe & on n'efl pas même certain fi cette
fiabftance eft toute formée dans les végétaux,
antérieurementà Ia cotnbuflion.L'analogie pour-
roit porter à croire que l'azote efè un des prin-
cipes conflituans des alkalis en général, & on
en a la preuve à l'égard de l'ammoniaque
comme je vais l'exporer: mais on n'a, relati-
vement à la potaffe & à la foude que de légères
préfomptions qu'aucune expérience décifive n'a
encore confirmées.
De ï Ammoniaque.
Comme nous n'avions aucune connoiflànce
précife à préfenter fur la compofition de la
foude & de la potaffe, nous avons été obligés
de nous borner dans les deux paragraphes pré-
cédens à indiquer les fubflances dont on les
retire, & les moyens qu'on emploie pour les
obtenir. Il n'en eft pas de même de l'ammo-
niaque, que les anciens ont nommée alkali vola-
til. M. Berthollet, dans un Mémoire imprimé
dans le recueil de l'Académie, année ï*jfy>
page 316, efl: parvenu à prouver par voie de
décompotition que zooo parties de cette fubf-
tance en poids étoient compofees d'environ
807 d'azote & de 193 d'hydrogène.
C'eft principalement par la diflillation des
matières animales qu'on obtient cette fubf-
tance l'azote qui eft un de leurs principes
conflituans s'unit à la proportion d'hydrogène
propre à cette combinaifon & il Ce forme de
l'amtnoniaque mais on ne l'obtient point pure
dans cette opération, elle eft mêlée avec de
l'eau de l'huile, & en grande partie faturée
d'acide carbonique. Pour la féparer de toutes
ces fubflances on la combine d'abord avec un
acide tel par exemple que l'acide muriatique;
on l'en dégage enfuite, foit par une addition
de chaux foit par une addition de potaffe.
Lorfque l'ammoniaque a été ainfi amenée iL
fon plus grand degré de pureté elle ne peur
plus exiîler que fous forme gazeufe à la tem-
pérature ordinaire dans laquelle nous vivons
elle a une odeur excefllveirrent pénétrante.
L'eau en abforbe une très-grande quantité, fur-
tout fi elle eft froide & fi on ajoute la preffioii
au refroiaiffement j ainir faturée d'ammonia-
que, elle a été appelée alhali volatil ffuor: nous
rappellerions fmplement ammoniaque ou am-
moniaque en liqueut, & nous défignerons la
même fubilance quand elle fera dans l'état
aériforme, par le nom de gaz ammoniaque.

De la Chaux, de la Magnéfe, de la Baiyte


& de l'Alumine.

La compofition de ces quatre terres en ab-


folument inconnue & comme on n'eft point
encore parvenu à déterminer quelles font leurs
parties conflituantes & élémentaires, nous fom-
mes autorifés en attendant de nouyelles dé-
couvertes, à les regarder comme des êtres
amples l'art n'a donc aucune part à la forma-
tion de ces terres, la nature nous les préfente
toutes formées. Mais comme elles ont la plu-
part, fur-tout les trois premières, une grande
tendance à la combinaifon, on ne les trouve
jamais feules. La chaux eft prefque toujours
faturée d'acide carbonique, & dans cet état
elle forme la craie, les fpaths calcaires, une
partie des marbres &c. Quelquefois elle eS
faturée d'acide fulfurique,comme dans le gypfe
& les pierres à plâtre; d'autres fois avec l'acide
fluorique, & elle forme le fpath fluor ou vitreux.
Enfin les eaux de la mer & des fontaines fa"
lées en contiennent- de combinée avec l'acide
muriatique. C'eft de toutes les bafes falifiables
celle qui eft la. plus abondamment répandue,
dans la nature.
On rencontre la magnéfie dans un grand
nombre d'eaux minérales elle y eft le plus
communément combinée avec l'acide fulfuri-
que on la trouve auflî très-abondamment dans
l'eau de la mer où elle eft combinée avec
l'acide muriatique.; enfn elle entre dans la com-
pofitîon d'un grand nombre de pierres.
La baryte eft beaucoup moins abondante
que les deux terres précédentes; on la trouve
dans le règne minéral combinée avec l'acide
fulfurique, & elle forme alors le fpath. pefant;
quelquefois mais plus rarement, elle eft com-
binée avec l'acide carbonique.
L'alumine ou bafe de l'alun a moins de ten-
dance à la combinaifon que les précédentes
auffi la trouve-t-on fouvent dans l'état d'alu-
mine, fans être combinée avec aucun acide.
C'eft principalement dans les argiles qu'on la
rencontre; elle en fait, à proprement parler,
la bafe.
Des Sabjlances métalliques.

Les métaux, à l'exception de l'or & quel-


quefois de l'argent, fe préfentent rarement dans
le règne minéral fous leur forme métallique
ils font communément ou plus ou moins faturés
d'oxygène ou combinés avec du foufre de
l'arfenic de l'acide fuîfurique de l'acide mu-
tiatique, de l'acide carbonique, de l'acide phof
phorique. La docimafie & la métallurgie en-
feignent à les féparer de toutes ces fubflances
étrangères, & nous renvoyons aux ouvrages
qui traitent de cette partie de la Chimie.
Il eft probableque nous ne connoiflbns qu'une
partie des fubflances métalliques qui exigent
dans la nature toutes celles, par exemple,
qui ont plus d'aflinité avec l'oxygène qu'avec le
carbone, ne font pas fufceptibles d'être réduit-
tes ou ramenées à l'état métallique & elles ne
doivent fe préfenter à nos yeux que fous la
forme d'oxides qui fe confondent pour nous
avec les terres. Il eft très-probableque la ba-
ryte que nous venons de ranger dans la clafle
des terres, eft dans ce cas; elle préfente dans
le détail des expériences des caractères qui la
rapprochent beaucoup des fubflances métalli-
ques. Il feroit poffible à la rigueur que toutes
les fubftances auxquelles nous donnons le nom
de terres ne fuflent que des oxides métalli-
ques, irréduétibles par les moyens que nous
employons.
Quoi qu'il en foit les fubflances métalliques
que nous connoiffons, celles-que nous pouvons
obtenir dans l'état métallique font au nombre
de dix-fept; favoir:
L'arfenic. Le fer.
Le molybdène. L'étain.
Le iunglléne. Le plomb.
Le manganèfe. Le cuivre.
Le nickel. Le mercure.
Le cobalt. L'argent.
Le bifinuth. Le platine.
L'antimoine. L'or.
Le zinc.
Je ne conlïdéreraiici ces métaux que comme
des bafes falifiables & je n'entrerai dans aucun
détail fur leurs propriétés relatives aux arts &
aux ufages de la fociété. Chaque métal fous
ces points de vue exigeroit un traité complet,
& je fortirois abfolument des bornes que je
-me fuis présentes.
CHAPITRE XVII.
Suite des réflexions fur les bafes fdlifiables &

fur la formation des Sels neutres.


J. ELLES
font les bafes faliftables, e'eft-à-dire,
fufceptibles de fe combiner avec les acides
& de former des fels neutres. Mais il faut ob-
ferver que les alkalis & les terres entrent pu-
rement & umplement dans la compofition des
fels neutres, fans aucun intermède qui ferve à
les unir; tandis qu'au contraire les métaux ne
peuvent fe combiner avec les acides, qu'autant
qu'ils ont été préalablement plus ou moins oxy-
génés. On peut donc rigoureufement dire que
les métaux ne font point diliolubles dans les
acides mais feulement les oxides métalliques.
Ainfi lorfqu'on met une fubflance métallique
dans un acide, la première condition pour qu'elle
puifle s'y diffoudre, eft qu'elle puifle s'y oxîder
& elle ne le peut qu'en enlevant de l'oxygène,
ou à l'acide, ou à l'eau dont cet acide eft
étendu c'eft-à dire, en d'autres termes qu'une
fubftance métallique ne peut fe diffoudee dans
un acide qu'autant que 'oxygène qui entre,
foit dans la compofiûon de Peau, foit dan
celle
celle de l'acide, a plus d'affinité avec le métal,
qu'il n'en a avec l'hydrogène ou la bafe aci-
difable; ou, ce qui revient encore au même,
qu'il n'y a de diffolution métallique, qu'autant
qu'il y a décompofition de l'eau ou de l'acide.
C'eft de cette obfervation fimple qui
a
échappé même à l'illuftre Bergman que dé-
pend l'explication des principaux phénomènes
des diffbîutions métalliques. Le premier de tous
& le plus frappant efi l'effervefcence, ou,
pour
parler d'une manière moins équivoque, le dé-
gagement de gaz qui a lieu pendant la difîbîu-
tion. Ce gaz dans les diffolutions par l'acide
nitrique eft du gaz nitreux; dans les diffolut;ons
par l'acide fulfurique il eft ou du gaz acide
fulfureux, ou du gaz hydrogène, fuivant que
c'eft aux dépens de l'acide fulfurique ou de
l'eau que le métal s'eft oxidé.
Il eft fenfble que l'acide nitrique & l'eau
étant compofés fun & l'autre de fubilances qui
féparément ne peuvent exiger que dans l'état de
gaz, du moins à la température dans laquelle
nous vivons, auffitôt qu'on leur enlèvel'oxygène.,
le principe qui lui étoit uni doit entrer fur le
champ en expanfîon il doit prendre la forme
gazeufe, & c'eft ce paffagerapide de l'état liquide
à l'état gazeux qui conflitue I'effervefcence. Il
en eft de même de l'acide fulfurique les mé-
taux, en général fur-tout par la voie humide
n'enlèvent point à cet acide la totalité de l'oxy-
gène; ils ne le ïédnifent point en foufre, mais
également exiftet
en acide fulfureux qui ne peut
que dans fétat de gaz au degré de température
& de preffion dans lequel nous vivons. Cet
acide doit donc fe dégager fous la forme de
gaz, & c'eft encore à ce dégagement qu'eft due
l'effervefcence.
Un fecond phénomène eft que toutes les
fubflances métalliques fe diffolvent fans effer-
vefcence dans les acides quand elles ont été
oxidées avant la diflorution il eft clair qu'alors
le métaln'ayantplus à s'oxider, il ne tend plus
à décompofer ni l'acide ni feau il ne doit
donc plus y avoir d'eServefcence puifquel'effet
qui le produifoit n'a plus lieu.
Un troifième phénomène eft que tous les
métaux fe diffolvent fans effervefcence dans l'a-
cide muriatique oxygéné ce qui fe paffe
dans cette opération mérite quelques réflexions
particulières. Le métal dans ce cas enlève à
l'acide muriatique oxygéné fon excès d'oxygène;
il fe forme d'une part un oxide métallique, &
de l'autre de l'acide muriatique ordinaire. S'il
n'y a pas d'effervefcence dans ces fortes de
diffolutions ce n'eu: pas qu'il ne foit de l'ef-
fence de l'acide muriatique d'exiRer fous la
forme de gaz au degré de température dans
lequel nous vivons, mais ce gaz trouve dans
lucide muriatique oxygéné plus d'eau qu'il n'en
faut pour être retenu & pour demeurer fous
forme liquide; il ne fe dégage donc pas
comme l'acide Sulfureux, & après s'être com-
biné avec l'eau dans le premier inftant, il fe
combine pairiblemeiit enfuite avec l'oxide mé-
tallique qu'il difïbut.
Un quatrième phénomène eft que les métaux
qui ont peu d'affinité pour l'oxygène & qui
n'exercent pas fur ce principe une action affez
forte pour décompofer, foit l'acide, foit l'eau,
font abfolument indiftblubles c'eft par cette
ra:fon que l'argent, le mercure, le plomb, ne
font pas diffblubles dans l'acide muriatique,
lorfqu7on les préfente à cet acide dans leur état
métallique mais fi on les oxide auparavant
de quelque manière que ce foit, ils deviennent
auffitôt très-diublubles, & la diflblution fe fait
fans effervefcence.
L'oxygène eft donc le moyen d'union entre
les métaux & les acides & cette circonflance
qui a lieu pour tous les métaux comme pour
tous les acides, pourroit porter à croire que
toutes les fubilances qui ont une grande affinité
avec les acides contiennent de l'oxygène. Il eft
donc afîcz probable que les quatre terres fa-
lifiables que nous avons aeugnees ci-ueuus wu-
tiennent de l'oxygène, & que c7eft par ce lattis
qu'elles s'uniffent aux acides. Cette confidéra-
tion fenlbleroit appuyer ce que j'ai précédem-
ment avancé à l'article des terres, que ces
fubflances pourraient bien n'être autre chofe que
des métaux oxidés avec lefquels l'oxygène a
plus d'affinité qu'il n'en a avec le charbon, &
qui par cette circonftauce font irréduaibles. Au
refte ce n'eIl ici qu'une conjecture que des
expériences ultérieures pourront feules ou con-
firmer ou détruire.
Les acides connus jusqu'ici font les fuivans;
le
nous allons en les défignant, indiquer nom
du radical ou bafe acidifiable dont ils font
compofés.
On voit que le nombre des acides eft de 48
en y comprenant les 17 acides métalliques qui
font encore peu connus mais fur lefquels
M. Berthollet va donner incefiamment un
travail important. Ôn ne peut pas encore
fe flatter fatas doute de les avoir tous dé-
couverts mais il eft probable, d'un autre côté,
qu'un examen plus approfondi fera connoître que
plufieurs des acides végétaux regardés comme
différens, rentrent les uns dans les autres. Au
ïefte on ne peut présenter ici le tableau de la
Chimie que dans l'état où elle eft, & tout ce
qu'on peut faire c'eft de donner des principes
pour nommer en conformité du même fyf-
tême, les corps qui pourront être découverts
dans la fuite.
Le nombre des bafes falifiables, ç'efl-à-dire,
fufceptibles d'être converties en fels neutres par
les acides, eft de vingt-quatre favoir
Trois alkalis.
Quatre terres.
Et dix-fept fubftances métalliques.
La totalité des fels neutres qu'on peut con-
cevoir dans 1'état aétuel de nos conuoiflances
eft donc de 115*2; mais c'eft en fuppofant que
les acides métalliques foient fufceptibles de dif-
foudre d'autres métaux & cette diublubilitç.
des métaux oxygénés les uns par les autres 9
eft une fcience neuve qui n'a point encore été
entamée c'efl de cette partie de la fcience
que dépendent toutes les combinaifons viheu-
fes métalliques. Il eft d'ailleurs probable que
toutes les combinaifons falines qu'on peut con-
cevoir, ne font pas pofîîbles ce qui doit ré-
duire confidérablement le nombre des fels que
la nature & l'art peuvent former. Mais quand.
on ne fuppoferoit que cinq à fix ceus efpèces
de fels polîibles il eft évident que fi on vou-.
loit donner à toutes des dénominations arbi-
traires à la manière des anciens f on les dé-
fignoit, ou par le nom des premiers auteurs
qui les ont découverts ou par le nom des
fubflances dont ils ont été tirés il en xéftilte-
roit une confufion que la mémoire la plus heu-
reufe ne pourroit pas débrouiller. Cette-méthode
pouvoit être tolérable dans le premier âge de
la Chimie elle pouvoit fêtre encore il y a
vingt ans, parce qu'alors on ne connoiïïbit pas
au-delà de trente efpèces de fe!s mais aujour*
d'hui que le nombre en augmente tous les
jours que chaque acide qu'on découvre enri-
chit fouvetxt la Chimie de 24 fels nouveaux,
quelquefois de 48 en raifon des deux degrés
d'oxygénation de l'acide; il faut nécefiâirement
une méthode, & cette méthode eft donnée par
l'analogie c'efl: celle que nous avons fui-
vie dans la nomenclature des acides &
comme la marche de la nature eft une, elle
s'appliquera naturellement à la nomenclature
des fels neutres.
Lorfque nous avons nommé les différentes
efpèces d'acides, nous avons diflingué dans ces
fubflances la bafe acidifiable particulière à cha-
cun d'eux, & le principe acidifiant, l'oxygène
qui eft commun à tous. Nous avons exprimé
la propriété commune à tous par le nom géné-
rique d'acide, & nous avons enfuhe différencié
les acides par le nom de la bafe acidifiable
particulière à chacun. C'eft ainf que nous avons
donné au foufre, au phofphoie, au carboné.
oxygénés le nom d'acide fulfitrique, d'acide
phofphorïque, d'acide carbonique enfin nous
avons cru devoir indiquer les différens degrés
de faturatton d'oxygène par une terminaifon
différente du même mot. Ainfi nous avons
diflingué l'acide fuMureux de l'acide fulfnrique,
l'acide phofphoreux de l'acide phofphoriqtie.
Ces principes appliqués à la nomenclature
des fels neutres nous ont obligés de donner
un nom commun à tous les fels dans la com-
binaifon defquels entre le même acide & de les
différencier enfuite par le nom dè la bafè falifia-
ble. Ainfi nous avons défrgné tous les fels qui
ont l'acide fulfurique pour acide, par le nom de
fulfcues tous ceux qui ont l'acide phofphori-
que pour acide par le nom de pfaofphates
& ainfi des autres, Nous diflinguerons donc
fulfate de potaffe fulfaie de foude fulfate
d'ammoniaque fulfate de chaux, fidfate de
fer, &c. & comme nous connoiffons vingt-
quatre bafes, tant alkalines que terreufes &
métalliques nous aurons vingt-quatre efpèces
de fulfates autant de phofphates & de même
pour tous les autres acides. Mais comme le
foufre eft fufceptible de deux degrés d'oxygé-
nation, qu'une première dofe d'oxygène conf-
titue facide fulfureux, & une féconde l'acide
fulfurique comme les fels neutres que forment
ces deux acides avec les différentes bafes ne
font pas les mêmes, & qu'ils ont des propriétés
fort diffécentes, il a fallu les diftinguer encore
par une terminaifon particulière nous avons
en conféquence défîgné par le nom de fulfites
de phofphhes, &c. les fels neutres formés par
l'acide le moins oxygéné. Àinfi le foufre oxy-
géné fera fuiceptibîe de former 48 fels neu-
tres, favoir vingt quatre fulfates & vingt-
quatre fulfites & ainû des autres fubflances
fufceptibles de deux degrés d'oxygénation.
Il [croit exceffivement ennuyeux pour les
lecteurs de fuivre ces dénominations dans tous
leurs détails il fufiit d'avoir expofé clairement
la méthode de nomirer quand on l'aura faifie,
on pourra l'appliquer fans effort à toutes les
combinaisons pofïibles & le nom de la fubf-
tance combuitible & acidifiable connu, on fe
rappellera toujours aifément le nom de l'acide
qu'elle eit fufceptible de former, & celui de
tous les fels neutres qui doivent en dériver.
Je m'en tiendrai donc à ces notions élémen-
taires mais, pour fatisfaire en même tems ceux
qui pourroient avoir befoin de plus grands dé-
tails, j'ajouterai dans une fécondepartie des Ta«
bleaux qui présenteront une récapitulation gé-
nérale, non-feulement de tous les fels neutres,
mais en général de toutes les combinaifons chi-
miques. J'y joindrai quelques courtes explica-
tions fur la manière la plus fimple & la plus
fûre de fe procurer les différentes efpèces d'a-
cides, & fur les propriétés générales des tels
neutres qui en réfultent.
Je ne me diflimule pas qu'il auroit été né-
ceflàire pour compléter cet Ouvrage d'y join-
dre des obfervations particulières fur chaque
efpèce de fel fur fa diffolubilité dans l'eau &
dans l'efprit-de-vin j fur la proportion d'acide
& de bafe qui entre dans fa compoGtion fur
fa quantité d'eau de criflallifation fur les dif-
férens degrés de faturation dont il eu: fufcep-
tible, enfin fur le degré de force avec laquelle
l'acide tient à fa bafe. Ce travail immenfe a
été commencé par M. Bergman, M. de Mor-
veau, M. Kirwan & quelques autres célèbres
Chimilles mais il n'eft encore que médiocre-
ment avancé, & les bafes fur lefquelles il re-
pofe ne font pas même encore d'une exaditude
rigoureufe. Des détails auffi nombreux n'au-
roient pas pu convenir à un Ouvrage élémen-
taire, & le tems de raifembler les matériaux
& de compléter les expériences auroit retardé
de pJufieurs années la publication de cet Ou-
vrage. C'eft un vafte champ ouvert au zèle &
à l'aétivité des jeunes Chi milles mais qu'il me
foit permis de recommander, en terminant ici
ma tâche à ceux qui auront le courage de
l'entreprendre, de s'attacher plutôt à faire bien
clu'à faire beaucoup à s'apurer d'abord par
des expériences précifes & multipliées de, la
compofition des acides, avant de s'occuper de
celle des fe!s neutres. Tout édifice defliné à
braver les outrages du tems doit être établi
fur des fondemens folides & dans l'état où ell
parvenue la Chimie, c'ell en retarder la mar-
che que d'établir fes progrès fur des expériences
qui ne font ni affez exactes, ni affez rigou-
reufes.
SECONDE PARTIE.
De la Combinaifon des Acides avec les
bafes falifiables & de la Formation
des Sels neutres.

AVERTISSEMENT.
O I j'avoïs voulu fi1ivre flriâementle plan
que
je m'étois formé dans la diflributïon des diffé-
rentes parties de cet Ouvrage je me ferois
borné dans les Tableaux qui compoferont cette
féconde Partie, & dans les explications qui les
accompagnent, à donner de courtes définitions
des difiërens acides que l'on connaît, une def-
cripiion abrégée des procédés par lefquels on
les obtient, & j'y aurois joint une fmple no-
menclature des fels neutres qui réfaltent de
leurs combinaifons avec différentes bafes. Mais
j'ai reconnu que fans ajouter beaucoup au
volume de cet Ouvrage je pourrais en aug-
menter beaucoup l'utilité en préfentant fous
la même forme le tableau des fubflances fim-
ples, de celles qui entrent dans la compofition
des acides & des oxides & leurs combinaifons.
Cette addition n'augmente que de dix le
nombre des Tableaux ftriâement néceflaîres
pour la nomenclature de tous les fels neutres.
3'y préfente i°. les fubilauces fmples, ou du
moins celles que fétat actuel de nos connoif-
fances nous oblige à regarder comme telles.
2.0. Les radicaux oxidables & acidifiables
doubles & triples qui fe combinent avec l'oxy-
gène, à la manière des fubflances fimples.
3°. Les combinaifons de l'oxygène avec les
fubftances fîmpies métalliques &non métalliques.
4°. Les combinaifons de l'oxygène avec les
radicaux compofés.
Les combinaifons de l'azote avec les
fubflances fimples.
6°. Les combinaifôns de l'hydrogène avec
les fubflances fîmples.
7°. Les combinaifonsdu foufre avec les fubf
tances fimples.
8°. Les combinaifons du phofphore avec les
fiibflances fimples.
p°. Les combinaifons du carbone avec les
fubflances fimples.
10°. Les combinaifons de quelques autres
radicaux avec les fubftances fmples..
Ces dix Tableaux & les Obfervations qui les
accompagnent, forment une efpèce de récapi-
tulation des quinze premiers Chapitres de cet
Ouvrage. Les Tableaux qui font à la fuite &
qui préfentent l'enfeimble de toutes les com-
binaifons falines, ont plus particulièrement rap-
port aux Chapitres XIV & XV.
On s'appercevra facilement que j'ai beaucoup
profité dans ce travail de ce que M. de Mor-
veau a publié dans le premier volume de l'En-
cyclopédie par ordre de matières & en effet
il m'auroit été difficile de puifer dans de meil-
leures fources fur-tout d'après la difficulté de
confulter les ouvragesétrangers dans leur langue
originale. Je ne le citerai qu'une feule fois au
commencement de cette féconde Partie, pour
ne pas être obligé de le citer à chaque article.
J'ai placé à la fuite de chaque Tableau &
vis-à-vis autant qu'il a été poifible les expli-
cations qui y font relatives.
TAbzeaxt DES Substances SIMPLES.
OBSERVATIONS
Sur le Tableau des Subjlances fimples
ou du
moins de celles que l'état aSuel de nos
con*
noiffances nous oblige à conjidérerconame telles.
L A Chimie
en foumettant à des expériences
les différens corps de la nature a pour objet
de les décompofer & de fe mettre en état
d'examirter féparèmmt les différentes fâbfiances
qui enrrena dans leur combinaifon. Cette fcience
a fait de nos jours des progrès très-rapides. Il
fera facile de s'en convaincre & l'on confulte les
différens auteurs qui ont écrit fur Penfemble
de la Chimie on verra que dans les premiers
tems on regardoit Phuile & le fel comme les
principes des corps que l'expérience & l'ob-
fervation ayant amené de nouvelles connoif-
fances on s'apperçut enfuite
que les fels n'é..
toient point des corps fîmples 3 qu'ils étoient
compofés d'un acide & d'une bafe, &
que
c'étoit de cette réunion que réfultoit leur état
de neutralité. Les découvertes modernes
ont
encore reculé de plufieurs degrés les bornes de
Panalyfe (a) elles nous ont éclairés fut la for-

(a) Voyez Mémoires de l'Académie, année


177$,
page 611, & 1778, page w.
mation.des acides, & nous ont fait voir qu'ils
étoient formés par la combinaifon d'un prin-
cipe acidifiant commun à tous, l'oxygène, &
d'un radical particulier pour chacun, qui les
différencie & qui les couilitue plutôt tel acide
plus loin dans cet
que tel autre. J'ai été encore
Haf-
ouvrage> puifque j'ai fait voir, comme M.
fenfratz, au furplus l'avoit déjà annoncé, que
les radicaux des acides eux-mêmes ne font pas
toujours des fubftances fmples, même dans le
fens que nous attachons à ce mot; qu'ils font
ainfi que le. principe huileux, un compofé
d'hydrogène & de carbone. Enfin M. Berthollet
bafes des fels n'étoient pas plus
a prouvé que les
fmples que les acides eux-tnêmes, & que l'am-
moniaque étoit un compofé d'azote & d'hy-
drogène.
La Chimie marche donc vers fon but &
en divifant, fubdivifant, &
Vers fa perfeétion,
refubdivifant encore, & nous ignorons quel fera
le termé de fes fuccès. Nous ne pouvons donc
regardons comme
pas affurer que ce que nous
fimple aujourd'hui le foit en effet tout ce que
telle fubftance
nous pouvons dire c'eft que
eft le terme aétuel auquel arrive l'analyfe chi-
mique, & qu'elle ne peut plus fe fubdivifer
au-delà dans l'état aduel de nos connoiffances.
Il eft à préfumer que les terres ceiTeront
bientôt d'être comptées au nombre des fubf-
tances amples eltes font les feules de toute
cette clalTe qui n'aient point de tendance à
s'unir à l'oxygène & je fuis bien porté à
croire que cette indifférence pour l'oxygène, s'il
m'eft permis de me fervir de cette expreffion,
tient à ce qu'elles en font déjà fàturées. Les
terres dans cette manière de voir, feroient
des fubffances fimples, peut-être des oxides
métalliques oxygénées jufqu'à un certain point.
Ce n'en: au furplus qu'une fimple conjecture
que je préfente ici. J'efpère que le leâeur vou-
dra bien ne pas confondre ce que je donne
pour des vérités de fait & d'expérience avec
ce qui n'efl: encore qu'hypothétique.
Je n'ai point fait entrer dans ce tableau les
alkalis fixes, tels que la potaffe & la foude,
parce que ces fubflances font évidemment com-
pofées, quoiqu'on ignore cependant encore la
nature des principes qui entrent dans leur com-
binaifoii.
T>A SZEAV des Radicaux ou bafes ox'idables & acidl*
fiablest compofés qui entrent dans les combinaifons
à la manière des fubjlances fimples.

Les radicaux du tègne végétal donnent par un premier degré


d'oxïgêtratiûtt des oxidés végétaux* tels que le Cucre, l'amidon,
la gottsme ou_ le inuijueux. Les radicaux animaux donnent des
oxides afliftiâïbc, tels que la limphe &c. &c.
OBSERVATIONS
Sur le Tableau des Radicaux ou bafes oxyâi-
bles & acidifiables, compofés de la réuniti
de plufteurs fubflances fimples.

,LES: radicaux du règne végétal & du règne


animal que préfente ce tableau, & qui tous font
fufceptibles d'être oxidés & acidifiés n'ayant
point encore été analyfés avec précifion, il eft
impoffible de les affùjétir encore à une nomen-
clature régulière. Des expériences dont quel-
unes me font propres & dont d'autres ont
été faites par M. Haflenfratz m'ont feulement
appris qu'en général, prefqtie tous les acides
végétaux, tels que l'acide tartareux, l'acide oxa-
lique, l'acide citrique, l'acide malique l'acide
acéteux, l'acide pyro-tartarique, l'acide pyro-
mucique5 ont pour radical l'hydrogène & le
carbone, mais réunis de manière à ne former
qu'une feule & même bafe; que tous ces aci-
des ne diffèrent entr'eux que par la différence
de proportion de ces deux fubflances, & par
le degré d'oxygénation. Nous favons de plus,
principalement par les expériences de M. Ber-
thollet, que les radicaux du règne animal, &
quelques-uns même du règne végétal font plus
çompofés & qu'indépendammentde l'hydro-
gène & du carbone, ils contiennent encore
fouvent de l'azote, & quelquefois du phofphore;
mais il n'exige point encore de calculs exaâs
fur les quantités. Nous nous femmes donc
trouvés forcés de donner, à la manière des an-
ciens, à ces différens radieaux des noms dé-
rivés de celui de la fubllance dont ils ont été
tirés. Sans doute, un jour & à mefure que nos
connoiffances acquerront plus de certitude &
d'étendue, tous ces noms difparoîtront, & ils
ne fubfifleront plus que comme un témoignage
de l'état dans lequel la fcience chimique nous
a été tranfmife ils feront place à ceux des ra-
dicaux hydro-carboneux & hydro-carbonique,
carbone-hydreux& carbone-hydrique,comme
je l'ai expliqué dans le chapitre XI & le
choix de ces noms fera déterminé par la pro-
portion des deux bafes dont ils font compofés.
On apperçoit aifément que les huiles étant
compofées d'hydrogène & de carbone elles
font de véritables radicaux carbone hydreux ou
hydfo-carboneux, & en effet, il fnffit d'oxy-
géner des huiles pour les convertir d'abord en
oxides, & enfuite en acides végétaux, fuivant
le degré d'oxygénation. On ne peut pas cepen-
dant afîurer d'une manière poftive que les huiles
entrent toutes entières dans la compofition des
oxides & des acides végétaux; il eft pofïïble
qu'elles perdent auparavantune portion de leur
hydrogène ou de leur carbone, & que ce qui
refle de l'une & de l'autre de ces fubflances ne
foit plus dans la proportion néceffaire pour
conflituer des huiles. Ceft fur quoi nous avons
encore befoin d'être éclairés par l'expérience.
Nous ne connoiffons, à proprement parler,
dans le règne minéral d'autre radical compor5
que le radical nitro-muriatique. Il eft formé p;x
la réunion de l'azote avec le radical muriatique.
Les autres acides compofés ont été beaucoup
moins étudiés & ne préfentent pas d'ailleurs
des phénomènes auflS frappant
OBSERVATIONS
Sztr les combinarfonsde la Lumière Calorique
& du

avec les différentes fubflances.

JE n'ai point formé de Tableau pour les com.


binaifons de la lumière & du calorique avec
les fubflances fîmples ou compofées parce que
nous n'avons point encore des idées fuffifam-
ment arrêtées fur ces fortes de combinaifons.
Nous [avons, en général, que tous les corps
de la nature font plongés dans le calorique
qu'ils en font environnés pénétrés de toutes
parts, & qa'il remplit tous les intervalles que
biffent entr'elles leurs molécules que dans cer-
tains cas le calorique fe fixe dans les corps,
de manière même à conftituer leurs parties fo-
lides; mais que le plus fouvent il en écarte les
molécules il exerce fur elles une force répul-
five5 & que c'eft de fon action ou de fon accu-
mulation plus ou moins grande que dépend le
paSàge des corps de fétat folide à fétat liquide,
de l'état liqnide à fétat aériforme. Enfin nous
avons appelé du nom générique de ga^ toutes
les fubflances portées à l'état aériformepar une
addition fuffifante de calorique en forte que fi
l'acide
nous voulons défgner l'acide muriatique,
carbonique, l'hydrogène l'eau Palkool dans
l'état aériforme nous leur donnons le nom de
ga^acide muriatique ga% acide carbonique,ga^
fydrogènt ga^ aqueux gaz alkool.
A l'égard de la lumière, fes combinaifons&
fa manière d'agir fur les corps font encore moins
connues. Il paroît feulement d'après les expé-
riences de M. Berthollet, qu'elle a une grande
affinité avec l'oxygène qu'elle eft fufceptible
de fe combiner avec lui, & qu'elle contribue
avec le calorique à le conflituer dans Tétât de
gaz. Les expériences qui ont été faites fur la
végétation, donnent aufïi lieu de croire que la
lumière fe combine avec quelques parties des
plantes & que c'efl à cette combinaifonqu'eft
due la couleur verte des feuilles & la diverfité
de couleurs des fleurs. Il eft au moins certain
que les plantes qui croifTent dans l'obfcurité
font étiolées qu'elles font abfolument blan-
ches, qu'elles font dans un état de langueur
& de foufîrance, & qu'elles ont befoin pour
reprendre leur vigueur naturelle & pour fe co-
lorer, de l'influence immédiate de la lumière.
On obferve quelque chofe de femblable fur
les animaux eux mêmes; les hommes, les fem-
mes, les enfans s'étiolent jufqu'à un certain
point dans les travaux fédentaires des manu-
faétures dans les logemens reflerres dans le
mes étroites des villes. Ils fe développent au
contraire, ils acquièrent plus de force & plus
de vie dans la plupart des occupations cham-
pêtres & dans les travaux qui fe font en plein
air.
L'organifation le fentiment le mouvement
fpontané la vie n'exiflent qu'à la furface de
la terre & dans les lieux expofes à la lumière
On diroit que la fable du flambeau de Pro-
méthée étoit l'expreffion d'une vérité philofo-
phique qui n'avoit point échappé aux anciens.
Sans la lumière la nature étoit fans vie. elle
étoit morte & inanimée un Dieu bienfaifant
en apportant la lumière, a répandu fur la fur-
face de la terre Forganifation le fentiment &
la penfée.
Mais ce n*eft point ici le lieu d'entrer dans
aucuns détails fur les corps organifés-j c'eft à
deffein que f ai évité de m'en occuper dans cet
Ouvrage & c'eft ce qui m'a empêché de parler
des phénomènes de la refpiration de la fan-
guification & de la chaleur animale. Je revien-
drai un jour fur ces objets.
OBSERVATIONS
Sur les combinaifons binaires de l'Oxygéne avec les
fubftancesfimplesmétalliques &non métalliques.
JLt'OxYGÈNE eft
une des fubftarices les plus
abondammentrépandues dans la nature puif-
qu'elle forme près du tiers en poids de notre
atmofphère, & par conféquent du fluide élaf-
tique que nous refpirons. C'eft dans ce réfervoîr
immenfe que vivent & croiflènt les animaux &
les végétaux» & c'eft également de lui que nous
tirons principalement tout l'oxygène que nous
employons dans nos expériences. L'attraâion
réciproque qui s'exerce entre ce principe & les
différentes fubflances eft telle qu'il eft impof-
fible de l'obtenir feul & dégagé de toute combi-
naifon. Dans notre atmosphère, il eft uni au ca-
lorique qui le tient en état de gaz & il eft mêlé
avec environ deux tiers en poids de gaz azote.
Il faut, pour qu'un corps s'oxygène, réunir
un certain nombre de conditions la première
eft que les molécules conflituantes de ce corps
n'exercent pas fur elles-mêmes une attraction
plus forte que celle qu'elles exercent fur l'oxy
gène car il eft évident qu'alors il ne peut plus
y avoir de combinaifon. L'art dans ce cas peut
venir au fecours de la nature & l'on peut
diminuer prefqu'à volonté l'attraction des mo-
lécules des corps en les échauffant c'eft-à-
dire, en y introdnifant du calorique.
Echauffer un corps, c'ell écarter les unes
des autres les molécules qui le conuituent; &
comme Pattradion de Ces molécules diminue
fuivant une certaine loi relative à la diflance,
il fe trouve néceuairement un infiant où les
molécules exercent une plus forte atnadion
fur l'oxygène, qu'elles n'en exercent fur elles-
mêmes c'eft alors que l'oxygénation a lieu.
On conçoit que le degré de chaleur auquel
commence ce phénomène, doit être différent
pour chaque fubftance. Ainfi, pour oxygéner
la plupart des corps & en général prefque tou-
tes les fubftances fimples il ne s'agit que de
les expofer à Fadion de l'air de Patmofphère,
& de les élever à une température convenable.
Cette températurepour le plomb le mercure,
l'étain, n'eft pas fort fupérieure à celle dans
laquelle nous vivons. Il faut au contraire un
degré de chaleur affez grand pour oxygéner le
fer, le cuivre &c. du moins par la voie sèche
& lorfque l'oxygénation n'eft point aidée par
1'aaion de l'humidité. Quelquefoisl'oxygénation.
fe fait avec une extrême rapidité, & alors elle
eu accompagnée de chaleur de lumière &
même de flamme; telle eft la combuflion du
phofphore dans l'air de l'atmofphère & celle
du fer dans le gaz oxygène. Celle du foufre eft
moins rapide enfin celle du plomb de l'étain
& de la plupart des métaux, fe fait beaucoup
plus lentement & fans que le dégagement du
calorique, & fur-tout de la lumière, foit fenfible.
Il eft des fubilancesqui ont une telle affinité
pour l'oxygène & qui ont la propriété de s'o-
xygéner à une température fi bee, que nous
ne les voyons que dans l'état d'oxygénation.
Tel eft l'acide muriatique que l'art, ni peut-
être la nature, n'ont encore pu décompofer,
& qui ne fe préfente à nous que dans l'état
d'acide. Il eft probable qu'il y a beaucoup d'au-
tres lubfiances du règne minéral qui, comme
l'acide muriatique font néceffairement oxy-
génées au degré de chaleur dans lequel nous
vivons & c'efl fans doute parce qu'elles font
déjà faturées d'oxygène, qu'elles n'exercent plus
aucune aétion fur ce principe.
L'expofition des fubflances fimples à l'air,
élevées à un certain degré de température,
n'efl pas le feul moyen de les oxygéner. Au
lieu de leur préfenter l'oxygène uni au calo-
tique, on peut leur préfenter cette fubflances
unie à un métal avec lequel elle ait peu d'affi-
nité. L'oxide rouge de mercure efl un des plus
propres à remplir cet objet fur-tout à l'égard
des corps qui ne font point attaqués par le mer-
cure. L'oxygène dans cet oxide tient très-peu
au métal, & même il n'y tient plus au degré
de chaleur qui commence à faire rougir le verre.
En conféquence on oxygène avec beaucoup de
facilité tous les corps qui en font fufceptïbles en
les mêlant avec de l'oxide rouge de mercure &
en les élevant à un degré de chaleur médiocre.
L'oxide noir de manganèfe l'oxide rouge de
plomb, les oxides d'argent, & en général pref
que tous les oxides métalliques peuvent, rem-
plir jufqu'a un certain point le même objet
en choififfànt de préférence ceux dans lefquels
l'oxygène a le moins d'adhérence. Toutes les
réduâxons ou revivifications métalliques ne font
même que des opérations de ce genre elles
ne font autre chofe que des oxygénations du
charbon par un oxide métallique quelconque.
Le charbon combiné avec l'oxygène & avec du
calorique s'échappe fous forme de gaz acide
carbonique, & le métal refte pur & revivifié.
On peut encore oxygéner. toutes les fubflan-
ces combuftibles en les combinant, foit avec
du nitrate de potaffeou de foude, foit avec
du muriate oxygéné de potaffe. A un certain
degré de chaleur l'oxygène quitte le nitrate &
le muriate pour fe- combiner avec le corps
combuflible mais ces fortes d'oxygénation ne
doivent être tentées qu'avec des précautions
extrêmes & fur de très-petites quantités. L'o-
xygène entre dans la combinaifon des nitrates
& fur-tout des niuriates oxygénés avec une
quantité de calorique prefqu'égale à celle qui-
eft néceffaire pour le conflituer gaz oxygène.
Cette immenfe quantité de calorique devient
fubitement libre au moment de fa combinaifon
avec les corps combuftibles & il en réfulte des
détonations terribles auxquelles rien ne réfifte.
Enfin on peut oxygéner par la voie humide
Une partie des corps combuflibles, & transfor-
mer en acides la plupart des oxides des trois
régnes. On fe fert principalement à cet effet de
l'acitie nitrique, auquel l'oxygène tient peu &
qui le cède facilement à un grand nombre de
corps, à l'aide d'une douce chaleur. On peut
également employer l'acide muriatique oxygéné
pour quelques-unes de ces opérations, mais non
pas pour toutes.
J'appelle binaires les combinaifons des fubf-
tances fimples avec l'oxygène, parce qu'elles
ne font formées que de la réunion de deux
fubftances. Je nommerai combinaifons ter-
naires celles compofées de trois fubflances
fimples & combinaifons quaternaires celles
compofées de quatre fubflances.
Taezeait des combinaifons de l'Oxygène avec les radicaux
compofés.

Ces radicauxpar un premier degté d'oxigénation, donnent le rucre, l'amidon,


le muqueux, & en général tous les oxides végétaux.
Ces radicaux, par un premier degré «l'oxigcnarion donnent la limphe ani-
male, dmcientes humeurs, & en gén6ral çous les oxides animaux.
OBSERVATIONS
Sur les combïnaifons de l'Oxigéne avec
les Radicaux compofés.
JL/epuis que j'ai publié dans les Mémoires
de l'Académ. année 1776, pag. 571, & 1778,
page 5*55" une nouvelle théorie fur la nature
& fur la formation des acides & que j'en ai
conclu que le nombre de ces fubilances de-
voit être beaucoup plus grand qu'on ne fa-
voit penfé jusqu'alors, une nouvelle carrière
s'eft ouverte en Chimie an lieu de cinq ou
fx acides qu'on connoiffoit, on en a décou-
vert fucceffivement jufqu'à trente, & le nom-
bre des fels neutres s'eft accru dans la même
proportion. Ce qui nous relie à étudier main-
tenant, eil la nature des bafes acidifiables &
le degré d'oxygénation dont elles font fuf-
ceptibles. J'ai déjà fait obferver que dans le
règne minéral, prefque tous les radicaux oxi-
dables & acidihables étoient fimples; que dans
le règne végétal au contraire & fur-tout dans
le règne animal il n'en exilloitprefque pas qui
ne fuflent comparés au moins de deux fubftan-
ces, d'hydrogène & de carbone que fouvent
l'azote & le phofphore s'y réuniiïbient & qu'il
en réfultoit des radicaux à quatre bafes.
Les oxides & acides animaux & végétaux
peuvent d'après ces obfervations différer en-
tr'eux 1°. par le nombre des principes acidi-
fians qui confütuent leur bafe 2°. par la diffé-
rente proportion de ces principes; 3°. par le
diiérent degré d'oxygénation ce qui fuffit &
au-delà pour expliquer le grand nombre de
variétés que nous préfente la nature. Il n'eft
puîné con-
pas étonnant, d'après cela, qu'on
vertir prefque tous les acides végétaux les uns
dans les autres; il ne s'agit, pour y parvenir,
que de changer la proportion du carbone &
de l'hydrogène ou de les oxygéner plus ou
moins. C'eft ce qu'a fait M. Crell dans des
expériences .très-ingénieufes, qui ont été con-
firmées & étendues depuis par M. Haffenfratz.
Il en réfulte que le carbone & l'hydrogène
donnent par un premier degré d'oxygénation
de l'acide tartareux, par un fécond de l'acide
oxalique, par un troifème de l'acide acéteux
ou acétique. Il paroîtroit feulement que le car-
bone entre dans une proportion un peu moin-
dre dans la combinaifons des acides acéteux &
acétique. L'acide citrique & l'acide malique dif-
fèrent très-peu des précédens.
Doit-on conclure de ces réflexions que les
huiles foient la bafe qu'elles foient le radical
des acides végétaux & animaux? J'ai déjà ex-
pofé mes doutes à cet égard. Premièrement,
quoique les huiles paroiffent n'être uniquement
compofées que d'hydrogène & de carbone
nous ne lavons pas f la proportion qu'elles en
contiennent eft précifémentcellé néceffaire pour
conftituer les radicaux des acides. Seconde-
ment, puifque les acides végétaux & animaux
ne font pas feulement compofés d'hydrogène,
& de carbone, mais que l'oxygène entre égale-
ment dans leur combinaifon il n'y a pas de
raifon de conclure qu'ils contiennent plutôt de
l'huile que de l'acide carbonique & de feau"
Ils contiennent bien, il eft vrai, les matériaux
propres à chacune de ces combinaifons; mais
ces combinaifons ne font point réalifées à la
température habituelle dont nous jouiflbns &
les trois principes font dans un état d'équilibre
qu'un degré de chaleur un peu fupérieur à celui
de l'eau bouillante fuffit pour troubler. On
peut confulter ce que j'ai dit à cet égard, page
a32 & fuivantes de cet Ouvrage.
Ta. SZEAir des combinaijbns binaires de l'Azote avec les
fubflances (impies.
OBSERVATIONS
Sur tA^ott & fur fes combinaifans avec les
Jubjlances fzmples.
jLj 'Azote efl un. des principes les plus abon-
damment répandus dans la nature. Combiné
avec le calorique il forme le gaz azote ou
la mofète, qui entre environ pour les deux tiers
dans le poids de l'air de Patmolphere. Il ('2-
meure conflaromentdans l'état de gaz au degré
de preffion & de température dans lequel nous
vivons; aucun degré de compreffion ni de froid
n'ont encore pu le réduire à fétat liquide oit
folide.
Ce principe eq aufri un des élémens qui
conftitue effentiellement les matières anima-
les il y etl combiné avec le carbone & l'hy-
drogéne, quelquefois avec le phofphore, &
le tout efl lié par une certaine portion d'oxy-
gène qui les met on à l'état d'oxide, ou à celui
d'acide fuivant le degré d'oxygénation. La
nature des matières animales peut donc varier
comme celles des matières animales de trois
manières, i'.par le nombre des fubflancesqui
entrent dans la combinaifon du radical, 2°. par
leur proportion, 3'. par le degré d'oxygénation.
L'azote combiné avec l'oxygène forme les
oxides & acides vitreux & nitrique; combiné
avec l'hydrogène, il forme l'ammoniaque fes
autres combinaifons avec les fubftances fimples
font peu connues. Nous leur donnerons le nom
d'azotures, pour conferver l'identité de terminai-
fon en ure que nous avons affeélée à toutes les
fubflances non-oxygénées. Il eft affez probable
que toutes les fubflances alkalines appartiennent
à ce genre. de combinaifons.
Il y a pluf eurs manières d'obtenir le gaz
azote la première 3 de le tirer de l'air com-
mun en abforbant par le fulfure de potafle ou
de chaux diftbus dans l'eau, le gaz oxygène
qu'il contient. Il faut douze ou quinze jours
pour que l'abforption foit complette en fup-
pofant même qu'on agite & qu'on renouvelle
les furfaces, & qu'on rompe la pellicule qui
s'y forme.
La feconde, de le tirer des matières animales
en les diflblvant dans de l'acide nitrique arFoiblï
& prefqu'à froid. L'azote, dans cette opération,
fe dégage fous forme de gaz, & on le reçoit
fous des cloches remplies d'eau dans l'appareil
pneumato chimique mêlé avec un tiers en
poids de gaz oxygène il reforme de fair
atmofphérique.
Une troifième manière d'obtenir le gaz azote,
eft de le retirer du nitre par la détonation foit
avec le charbon foit avec quelques autrescorps
combufiibles. Dans le premier cas, le gaz azote
fe dégage mêlé avec du gaz acide carbonique,
qu'on abforbe enfuite par de falkali cauflique
ou de l'eau de chaux, & le gaz azote relie
pur.
Enfin un quatrième moyen d'obtenir le gaz
azote eu: de le tirer de la combinai[on de
l'ammoniaque avec les oxides métalliques. L'hy-
drogèie de l'ammoniaque fe combine avec l'o-
xygène de foxide; il fe forme de l'eau comme
Fa obfervé M. de Fourcroy en même tems
l'azote devenu libre, fe dégage fous la forme
de gaz.
Il n'y a pas long-tems que les combinaifons
de l'azote font connues en Chimie. M. Caven-
dish eft le premier qui fait obfervé dans le
gaz & dans l'acide nitreux. M. Berthollet
l'a
enfuite découvert dans fammoniaque & dans
l'acide prufriqtie. Tout jufqu'ici porte à croire
que cette fubftances eft un être fimple & élé-
mentaire rien ne prouve au moins qu'elle
ait encore été décompofée & ce motif fuffit
pour jufiifïer la place que nous lui avons a&>
gnée.
Tableau des combinaïfons binaires de l'Hydrogéne
avec les Jubjîances fimples.

Ces combinaïfons ont lieu dans l'état de gaz ôt il en refulte du g« njr-


ârogène"fulfurîfé & phoffhorifé.
OBSERVATIONS
Sur tEydrogène & fur le tableau de fes com-

L'Hydrogène» comme l'exprime fa déno-


mination ell un des principes de l'eau il entre
pour quinze centièmes dans fa cornpofition l'o-
xygène en forme les quatre-vingt-cinq autres
centièmes. Cette fubflance dont fes propriétés &
même l'exigence ne font connues que depuis
très peu de tems, ell un des principes des plus
abondamment répandus dans la nature tc'eftun
de ceux qui jouent le principal rôle dans le rè-
gne végétal & dans le règne animal.
L'affinité de l'hydrogène pour le calorique
en telle qu'il refle conHamment dans l'état de
gaz au degré de chaleur & de preffion
dans
lequel nous vivons. Il nous eft donc impoffible
de connoître ce principe dans un état concret
& dépouillé de toute combinaifon.
Pour obtenir l'hydrogène ou plutôt le gaz
hydrogène, il ne faut que préfenter à feau une
fubltance pour laquelle l'oxygène ait plus d'af-
finité qu'il n'en a avec l'hydrogène. Auffitôt
l'hydrogène devient libre, il fe combine avec
le calorique & forme le gaz hydrogène. C'eft
le fer qu'on a coutume d'employer pour opérer
cette féparaiiûn & il faut pour cela qu'il foit
élevé à un degré de chaleur capable de le faire
rougir. Le fer s'oxide dans cette opération, &
devient femblable à la mine de fer de l'île
d'Elbe. Dans cet état il eft beaucoup moins
attirable à l'aimant, & il fe diiïbut fans eflfer-
vefcence dans les acides.
Le carbone, lorlqu'il eft rouge & embrâfé,
a également la propriété de décompofer l'eau
& d enlever l'oxygène à l'hydrogène mais alors
il fe forme de l'acide carbonique qui fe mêle
avec le gaz hydragène; on l'en fépare facile-
ment, parce que l'acide carbonique efi abfor-
bable par l'eau & parles alkalis, tandis quefhy-
drogène ne l'en: pas. On peut encore obtenir du
gaz hydrogène en faifant diffoudre du fer ou du
zinc dans de l'acide fulfuriqne étendu d'eau. Ces
deux métaux qui ne décompofent que très-diffî-
cilement & très-lentement l'eau lorfqu'ils font
feuls, la décompofent au contraire avec beau-
coup de facilité lorfqu'ils font aidés par la pré-
fence de l'acide fulfurique. L'hydrogène s'unit
au calorique dans cette opération auffitôt qu'il
eft dégagé, & on l'obtient dans l'état de gaz
hydrogène.
Quelques Chimiftes d'un ordre très-diftingué
fe perfuadent que l'hydrogène efi le phlogif-
tique de Stalh, & comme ce célèbre Chirnifle
admettoit du phlogiftique dans les métaux, dans
le foufre, dans le charbon, &c. ils font obligés
de fuppofer qu'il exifte également, de l'hydro-
gène fixé & combiné dans toutes ces fubftances
ils le fuppofent mais ils ne le prouvent pas, &
quand ils le prouveroient, ils ne feroient pas
beaucoup plus avancés, puifque ce dégagement
du gaz hydrogène n'explique en aucune manière
les phénomènes de la calcination & de la com-
buftion. Il faudroit toujours en revenir à l'exa-
men de cette queflionj le calorique & la lu-
mière qui fe dégagent pendant les différentes
efpèces de combuilion font-ils fournis par le
corps qui brûle ou par le gaz oxygène qui fe
fixe dans toutes les opérations? & certainement
la fuppoiïtion de l'hydrogène dans les dilTérens
corps combuflibles ne jette aucune lumière fur
cette quetlion. Ceft au furplus à ceux qui fup-
pofent à prouver & toute doctrine qui expli-
quera auffi bien & auffi naturellement que la
leur, fans fiappoftion, aura au moins l'avantage
de la fimplicité.
On peut voir ce que nous avons publié fur
cette grande queflion M. de Morveau Iff.
Bertholet, M. de Fourcroy & moi, dans la
traduâion de l'effai de M. Kirwan fur le phlo-
giftique»
TABLE AU des comb'maijons binaires du Soufro
non oxygéné avec les fubftatices fimples.
OBSERVATIONS
Sur le Soufre & fur le tableau de fes combinai-
fins avec les fubfiances Jtmplest
L E foufre eft
une des fubftances combuflibles
qui a le plus de tendance à la combinaifons. Il
eft naturellement dans fétat concret à la tem-
pérature habituelle dans laquelle nous vivons,
& ne fe liquéfie qu'à une chaleur fupérieure de
plufieurs^degrés à celle de l'eau bouillante.
La nature nous préfente le foufre tout forme,
& à-peu-prés porté au dernier degré de pureté

dont il eft fufceptible dans le produit des vol-


cans elle nous le préfente encore, & beaucoup
plus fouvent dans l'état d'acide fulfurique, c'eft-
à-dire combiné avec l'oxygène & c'eft dans
cet état qu'il fe trouve dans les argiles dans
les gypfes, &c. Pour ramener à l'état de foufre
l'acide fulfurique de ces fubftances, il faut lui
enlever l'oxygène, & on y parvient en le com-
binant à une chaleur rouge avec du carbone.
Il fe forme de l'acide carbonique qui fe dégage
dans l'état de gaz, & il refle un fulfure qu'on
décompofe par un acide: Pacide s'unit à la
bafe & le foufre fe précipite.
TABLE Air
des combinaifons binaires du Phofphore
non oxygéné avec les fubflances fimples.
OBSERVATIONS
Sur le Phofphare & fur le Tableau de fes cam-
binaifons avec les fuhjlances /impies.

LE phofphore etl une fubflance combuflible


{impie, dont l'exiftence avoit échappé aux re-
cherches des anciens Chimiftes. C'eft en 1667
que la découverte en fut faite par Brandt, qui
fit myftère de fon procédé bientôt après Kunc-
keI découvrit le fecret de Brandt; il le publia,
& le nom de phofphore de Kunckel qui lui
a été confervé jufqu'à nos jours, prouve que
la reconnoiflance publique fe porte fur celui
qui publie plutôt que fur celui qui décou-
vre, quand il fait myfière de fa découverte.
C'ell de l'urine feule qu'on tiroit alors le phof
phore quoique la méthode de le préparer eût
été décrite dans plufieurs ouvrages, & notam-
ment par M. Homberg, dans les mémoires de
l'Académie des Sciences, année 1692, l'Angle-
terre a été long-tems en poffeiïîon d'en four-
nir feule aux favans de toute fEurope. Ce fut
en 1737 qu'il fut fait pour la première fois en
France, au Jardin Royal des Plantes, en pré-
fence des commifTaires de l'Académie des Scien-
ces. Maintenant on le tire d'une manière plus
commode, & fur-tout plus économique, des os
des animaux, qui font un véritable phofphate
calcaire. Le procède le plus fimple confifte,
d'après MM. Gahn Schéele, Rouelle, &c. à
calciner des os d'animaux adultes, jufqu'à ce
qu'ils foient prefque blancs. On les pile & on
les paffe au tamis de foie on verfe ertfuitë
deffus de l'acide fulfurique étendu d'eau, mais
en quantité moindre qu'il n'en faut pour dif-
foudre la totalité des os. Cet acide s'unit à la
terre des os pour former du fulfate de chaux
en même tems facide phofphorique eft dégagé
& relie libre dans la liqueur. On décante alors,

on lave le rendu, & on réunit l'eau du lavage


à la liqueur décantée on fait évaporer 4 afin
de féparer du fulfate de chaux qui fe criflallife
en filets foyeux & on finit par obtenir l'acide
phofphorique fous forme d'un verre blanc &
tranfparent qui, réduit en poudre & mêlé avec
un tiers de fon poids de charbon, donne de
bon phofphore. L'acide phofphorique qu'on
obtient par ce procédé, n'eft jamais auffi pur
que celui retiré du phofphore, foit par la com
buflion, foit par l'acide nitrique il ne doit
donc point être employé pour des expériences
de recherches.
Le phofphore fe rencontre dans prefque
les fubiîances animales, & dans quel-
que
ques plantes qui ont, d'après I'analyfe chi-
mique, un caradère animal. Il y eft ordinaire-
ment combine avec le carbone, l'azote & fhy.
drogène, & il en réfulte des radicaux très-
compofés. Ces radicaux font communément.
portés à l'état d'oxide par une portion d'oxy-
gène. La découverte que M. Haflenfratz a faite
de cette fubftance dans le charbon de bois
feroit foupçonner qu'il etl plus commun qu'on
ne penfe dans le règne végétal: ce qu'il y a
de certain c'eft que des familles entières de
plantes en fournirent quand on les traite con-
venablement. Je range le phofphore au rang
des corps combuflibles fîmples parce qu'au-
cune expérience ne donne lieu de croire qu'on
pui&e le décompofer. Il s'allume à 32 degrés
du thermomètre.
Ta S le au des combinaifons binaires du Carbone
non oxygéné avec les fubjlances {impies.
OBSERVATIONS
Sur le Carbone & fur le Tableau de fes
combinaifons.
Comme
aucune expérience ne nous a indiqué
jufqu'icilapoffibilité de décompofer le carbone,
nous ne pouvons quant à préfent le conrdérer
que comme une fubtfance fmple. Il paroît
prouvé par les expériences modernes, qu'il eft
tout formé dans les végétaux, & j'ai déjà fait
obferver qu'il y étoit combiné avec l'hydro-
gène, quelquefois avec fazote & avec le phof-
phore, pour former des radicaux compofés;
enfin que ces radicaux étoient enfuite portés à
l'état d'oxides ou d'acides fuivant la
propor-
tion d'oxygène qui y étoit ajoutée.
Pour obtenir le carbone contenu dans les
matières végétales ou animales, il ne faut que
les faire chauffer à un degré de feu d'abord
médiocre & enfuite très-fort, afin de décom-
pofer les dernières portions d'eau que le char-
bon retient obffinément. Dans les opérations
chimiques on fe fert ordinairement de cornues
de grès ou de porcelaine dans lefqùelles on
introduit le bois ou autres matières combufli-
bles, & on pouffe à grand feu dans un bon.
fourneau de reverbère la chaleur volatilité, ou,
ce qui eft la même chofe convertit en gaz
toutes les fubftances. qui en font fufceptibles,
& le carbone, comme le plus fixe refte com-
biné avec un peu de terre & quelques fels
fixes.
Dans les arts la carbonifation du bois fe
fait par un procédé moins coûteux on dif-
pofe le bois en tas, on le recouvre de terre,
de manière qu'il n'y ait de communication
avec l'air que ce qu'il en faut pour faire brûler
le bois & pour en chaffer l'huile & l'eau, on
étouffe enfuite le feu, en bouchant les trous
qu'on avoit ménagés à la terre du fourneau.
Il y a deux manières d'analyfer le carbone,
fa combuftion par le moyen de l'air ou plutôt
du gaz oxygène, & fon oxygénationpar l'acide
nitrique. On le convertit dans les deux cas en
acide carbonique & il laite de la chaux, de
la potaffe & quelques fels neutres. Les Cht-
imites fe font peu occupés de ce genre d'ana-
lyfe, & il n'eft pas même rigoureufement dé-
montré que la potalfe exifie dans le charbon
avant la combuflion.
OBSERVATIONS
Sur les Radicaux muriatique fluorique &
boracique, & fur leurs combinaifons.
ON n'a point formé de Tableau pour pré-
fenter le réfoltat des combinaifons de ces fubt-
tances, foit entr'elles, foit avec les autres corps
combuflibles parce qu'elles font toutes abfo-
lument incornmes. On fait feulement que ces
radicaux s'oxygènent qu'ils forment les acides
muriatique, fluoriqete & boracique, & qu'alors
ils font fufceptîbles d'entrer dans un grand nom-
bre de combinaifons mais la Chimie n'a pas
encore pu parvenir à les défoxygéner s'il eft
permis de fe fervir de cette expreffion & à
les obtenir dans leur état de fimplicité. Il fau-
droit, pour y parvenir, trouver un corps pour
lequel l'oxygène eût plus d'affinité qu'il n'en a
avec les radicaux muriatique Humique & bo-
racique, ou bien fe fervir de doubles affinités.
On peut voir dans les Obfervations relatives
aux acides muriatique, fluorique & boracique,
ce que nous favons de l'origine de leurs ra-
dicaux.
OBSERVATIONS
Sur la combinaifon des Métaux les uns avec
les autres.
G E feroit ici le lien,
pour terminer ce qui
concerne les fubflances fimples de préfenter des
Tableauxde la combinaifon de tous les métaux
les uns avec les autres; niais comme ces Ta-
bleaux feroient très volumineux & ne pré-
fenteroient rien que d'incomplet, à moins de
recherches qui dont point encore été faites,
je les ai fupprimés. Il me fuffira de dire que
toutes ces combinaifons portent le nom d'aI-
liages, & qu'on doit nommer le premier le
métal qui entre en plus grande abondance dans
la compofition métallique. Ainfi, alliage d'or
& d'argent, ou or allié d'argent, annonce une
combinaifon où l'or eft le métal dominant.
Les alliages métalliques ont, comme toutes
les autres combinaifons, leur degré de fatura-
tion; il paroîtroit même, d'après les expérien-
ces de M. de la Briche qu'ils en ont deux
très-difiinéts.
TABLEAU des combinalfo'is de VA^pte ou Radical nitrique
porré à l'état d'acide nitreux par la combinaifon d'une
fujp fonte quantitéd'oxygène, avec les bafes falifiables dans' +
l'ordre de leurs affinités avec cet acide.

Il'y a grande apparence qu'il n'exige pas de nitrite d'argent, d'or&deplacine,


mais feulement des nitrates de ces uiciaux.
P \\r
1 AS LE Air des combinaifons. de VA^ate complettement faturèt
d'oxygène & portée à l'état d'acide nitrique avec les
bafes falifiablesdans l'ordre de leur affinité
avec cet acide.
OBSERVATIONS
Sur les Acides nitrtux & nitrique,,
& fur le Tableau de leurs cambinaifons*
l_i 'Acide nitreux & l'acide nitrique fe tirent
d'un fel connu dans les arts fous le nom de
falpêtre. On extrait ce fel par lixiviation des
décombres des vieux bâtimens & de la terre
des caves des écuries des granges & en
général des lieux habités. L'acide nitrique eU le
plus fouv ent uni dans ces terres à la chaux & à
la magnéfre, quelquefoisà la potafFe & plus rare-
ment à l'alumine. Comme tous ces fels à l'ex-
ception de celui à bafe de potaffe, attirent l'hu-
midité de l'air, & qu'ils feroient d'une conferva-
tion difficile dans les arts, on profite de la plus
grande affinité qu'a la potaffe avec l'acide ni-
trique, & de la propriété qu'elle a de précipi-
ter la chaux la magnéue & l'alumine, pour
ramener ainf dans le travail du falpêtrier &
dans le rafînage qui fe fait enfnite dans les
magafins du Roi, tous les fels nitriques à l'état
de nitrate de potaflfe ou de falpêtre. Pour ob-
tenir l'acide nitreux de ce fel on met dans
une cornue tubulée trois parties de falpêtre très-
pur, & une d'acide fulfurique concentré on
y adapte un ballon à deux pointes, auquel on
joint l'appareil de Woulfe c'eft-à-dire des fla-
cons à plufieurs gouleaux à moitié remplis d'eau
& réunis par des tubes de verre. On voit cet
appareil repréfenté pi. 117, fige '1. On lutte exac-
tement toutes les jointures, & on donne un feu
gradué il paffe de l'acide nitreux en vapeurs
rouges c'eft-à-dire, farchargé de gaz nitreux,
ou autrement dit, qui n'eft point oxygéné au-
tant qu'il le peut être. Une partie de cet acide
fe condenfe dans le ballon dans l'état d'une
liqueur d'un jaune rouge très-foncé; le furplus
fe combine avec l'eau des bouteilles. Il fedé:
gage en même-tems. une grande quantité de gaz
oxygène par la raifon qu'à une température uni
peu élevée l'oxygène a plus d'affinité avec le ca-
lorique qu'avec Toxide nitreux, tandis que le
contraire arrive à la température habituelle dans
laquelle nous vivons. C'eff parce qu'une partie
d'oxygène a quitté ainfi l'acide nitrique, qu'il fe
trouve converti en acide nitreux. On peut ra-
mener cet acide de l'état nitreux à l'état nitri-
que en le faifant chauffer à une chaleur douce
le gaz nitreux qui étoit en excès s'échappe, &
il refle de l'acide nitrique mais on n'obtient par
cette voie qu'un acide nitriquetrès-étendu d'eau,
& il y a d'ailleurs une perte confidérable.
On fe procure de l'acide nitrique beaucoup
plus concentré & avec infiniment moins de
perte en mêlant enfemble du falpêtre & de
l'argile bien feche, & en les pouffant au feu dans
une cornue de grès. L'argile fe combine avec la
potaffe pour laquelle elle a beaucoup d'affinité
en même-tems il paffe de l'acide nitrique très-
légèrement fumant, & qui ne contient qu'une
très-petite portion de gaz nitreux. On l'en dé-
barralïe aifément, en faifant chauffer foiblement
l'acide dans une cornue on obtient une petite
portion d'acide nitreux dans le récipient, & il
relie de l'acide nitrique dans la cornue.
On a vu dans le corps de cet Ouvrage,
que l'azote étoit le radical nitrique fi à vingt
parties & demie en poids d'azote, on ajoute
quarante-trois parties & demie d'oxygène, cette
proportion conllituera l'oxide ou le gaz nitreux
fi on ajoute à cette première combinaifon 36
autres parties d'oxygène on aura de l'acide
nitrique. L'intermédiaire entre la première & la
dernière de ces proportions, donne différentes
efpèces d'acides nitreux c'eft-à-dire de l'acide
nitrique plus ou moins imprégné de gaz nitreux.
J'ai déterminé ces proportions par voie de dé-
compoftion, & je ne puis pas affurer qu'elles
foient rigoureufement exaâes mais elles ne
peuvent pas s'écarter beaucoup de la vérité.
M. Cavendish, qui a prouvé le premier & par
voie de compofition que l'azote eft le radical
nitrique, a donné des proportions un peu dif-
férentes & dans lefquelles l'azote entre pour
une plus forte proportion mais il eft probable
en même tems que c'eft de l'acide nitreux qu'il
a formé, & non de l'acide nitrique & cette
circonftance fuffit pour expliquer jufqu'à un
certain point la différence des réfultats.
Pour obtenir l'acide nitrique très-pur, il faut
employer du nitre dépouillé de tout mélange
de corps étrangers. Si, après la diflillation on
foupçonne qu'il y relie quelques veitiges d'a-
cide ftlfurique on y verfe quelques gouttes
de dilution de nitrate barytique l'acide ful-.
furique s'unit avec la baryte, & forme un fel
neutre infoluble qui fe précipite. On en fépare
avec autant de facilité les dernières portions
d'acide muriatique qui pouvaient y être conte-
nues, en y verfant quelques gouttes de nitrate
d'argent; l'acide muriatique contenu dans l'a-
cide nitrique, s'unit a l'argent avec lequel il a
plus d'affinité, & fe précipite fous forme de
muriate d'argent qui eft prefqu'infoluble. Ces
deux précipitations faites, oadiflille jufqu'à ce
qu'il ait paûfé environ les fept huitièmes de
l'acide, & on eft sûr alors de l'a voir parfaite
ment pur.
L'acide nitrique ei un de ceux qui a le plus
de tendance à la combinaifon & dont en
même tems la décompofition eft le plus facile.
il n'eft prefque point de fubflance fimple, f
on en excepte for, l'argent & le platine, qui
ne lui enlève plus ou moins d'oxygène quel-
ques unes même le décompofent en entier. Il
a été fort anciennement connu des Chimitles &
fes combinaifons ont été plus étudiées que celles
d'aucun autre. MM. Macquer &Bauméontnom-
mé nitres tous les fels qui ont l'acidenitrique pur
acide. Nous avons dérivé leur nom de la même
origine; mais nous en avons changé la termi-
naifon & nous les avons appelés nitrates ou
nitrites, fuivant qu'ils ont l'acide nitrique ou
l'acide nitreux pour acide & d'après la loi géné-
rale dont nous avons expliqué les motifs, cha-
pitre XVI. C'eH également par une fuite des
principes généraux dont nous avons rendu
compte, que nous avons fpécifié chaque fel
par le nom de fa bafe.
TaSLE AIT des combinaifons de V Acide fulfurique
ou
affinité avec cet acide,
Soufre oxygéné avec les bafes falifiabks dans l'ordre de leur
par La voie humide.
OBSERVATIONS
Sur V Acide fulfurique & fur le Tableau
de fes combinaifons.
ON
a long-tems retiré l'acide fulfurique par
dillillation du fulfate de fer ou vitriol de mars,
dans lequel cet acide eft uni au fer. Cette dif-
tillation a été décrite par Bafie Valentin, qui
écrivoit dans le quinzième fècle. On préfère
aujourd'hui de le tirer du foufre parla combuf-
tion, parce qu'il eft beaucoup meilleur marché
que celui qu'on peut extraire des différais fels
fulfùriques. Pour faciliter la combuftion du fou-
fre & fon oxygénation on y mêle un peu de
falpêtre ou nitrate de potaffe en poudre. Ce
dernier eft décompofé & fournit au foufre
une portion de fou oxygène qui facilite fa
converfion en acide. Malgré l'addition de fal-
pêtre, on ne peut continuer la combuftion du
foufredansdes vaifleaux fermés, quelque grands
qu'ils foient que pendant un tems determiné.
La combuilion cefle par deux raifons i°. parce
que le gaz oxygène fe trouve épuifé & que
l'air dans lequel fe fait la combuflion fe trouve
prefque réduit à l'état de gaz azotique 2°. parce
que
que l'acide lui-même qui refte long-tems en
vapeurs, met obfiacle à la combuilion. Dans les
travaux en grand des arts, on brûle le mêlange
de foufre & de falpêtre dans de grandes cham-
bres dont les parois font recouvertes de feuilles
de plomb on laide un peu d'eau au fond pour
faciliter la condenfation des vapeurs. On fe
débarraffe enfuite de cette eau, en introduifant
l'acide .fulfurique qu'on a obtenu dans de gran-
des cornues on difUlle à un degré de chaleur
modéré il paffe une eau légèrement acide &
il refte dans la cornue de l'acide fulfurique con-
centré. Dans cet état il efl diaphane, fans
odeur, & il pèfe à peu près le double de Peau.
On prolongeroit la combufliondu foufre, & on
accéléreroit la fabrication de facide fulfurique,
f on introduifoit dans les grandes chambres
doublées de plomb où fe fait cette opération,
le vent de plufeurs foufflets qu'on dirigeroit fur
la fiamme. On feroit évacuer le gaz azotique
par de longs canaux ou efpèces de ferpentins
dans lefquels il feroit en contact: avec de l'eau,
afin de le dépouiller de tout le gaz acide ful-
fureux ou acide fulfuriquequ'il pourroit contenir.
Suivant une première expérience de M. Ber-
thollet, 69 parties de foufre en brûlant abfor-
bent 51 parties d'oxygène, pour former 100 par
ties d'acide fulfurique. Suivant une féconde
expérience faite parune autre méthode, 72 parties
de foufre en abforbent 28 d'oxygène pour
former la mêmequantité de 100 parties d'acide
Culfurique fec.
Get acide ne diflbut comme tous les
autres les métaux qu'autant qu'ils ont été
préalablement oxidés mais la plupart font fuf-
ceptibles de décompofer une portion de l'a-
cide, & de lui enlever affez d'oxygène pour
devenir diffolubles dans le furplus c'eft ce qui
arrive à l'argent, au mercure & même au fer
& au zinc, quand on les fait difroudre dans de
l'acide fulfurique concentré & bouillant. Ces
métaux s'oxident & fe diffolvent, mais ils n'en-
lèvent pas afrez d'oxygène à l'acide pour le ré-
duire en foufre ;ils le réduifent feulement à l'état
d'acide fulfureux & il fe dégage alors fous la
forme de gaz acide fulfureux. Lorfqu'on met de
l'argent;, du mercure ou quelque métal autre que
le fer & le zinc dans de l'acide fulfurique étendu
d'eau, comme ils n'ont pas affez d'affinité avec
l'oxygène pour l'enlever, ni au foufre, ni à l'a-
cide fulfureux, ni à l'hydrogène, ils font abfo-
lumentinfolubles dans cet acide. Il n'en eftpas
de même du zinc & du fer ces deux métaux,
aidés par la préfence de l'acide, décompofent
l'eau; ils s'oxi'dent à fes dépens, & deviennent
alors diffolubles dans l'acide quoiqu'il ne foit
ni concentré ni bouillant.
Tas LE A XI des combinaifons deV Acide fulfureux
avec les bafes falifiables dans l'ordre de leur
affinité avec cet acide.

Nota. Les anciens n'onc connu à ptopremenr parler de ces fels


que le fulfue de poralfe quijjulqu'Â ces derniers rems, a con-
fervé le nom de fel fulfureuxde Scalh. Avant la nouvelle nomen-
clature que nous avons propofée on défignoic les fels fulfureux
comme il fuit Sel fulfureux de Stalh à bafe ftxe végétal
fal fulfureux de Stalh à bafe d'alkalifixe minéral, fel fulfureux
de Stalh à bafe de terre calcaire.
On a fuivi dans ce tableau fordre des affinités indiqué par
M. Bergman pour l'acide fulfurique, parce qu'en effet à l'égard,
des alkalis & des terres l'ordre eft le même pour l'acide ful-
fureux mais il n'eft pas cettaia qu'il en toit de même pour les
oxides métallique.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide fulfureux &fur le Tableau de fes
combinaifons.
L'ACID E fulfureux eft formé,
comme l'acide
fulfurique de la combinai[on du foufre avec
l'oxygène, mais avec-une moindre proportion
de ce dernier. On peut l'obtenir de différentes
manières, 1°. en faifant brûler du foufre len-
tement, 2°. en diflillant de l'acide fulfurique
fur de l'argent, de l'antimoine, du plomb, du
mercure.ou du charbon une portion d'dxy-
gène s'unit au métal & l'acide paffe dans l'état
d'acide fulfureux. Cet acide exifle naturellement
dans l'état de gaz au degré de température &
de preffion dans lequel nous vivons mais il
paroît, d'après des expériences de M. Clouet,
qu'à un très-grand degré de refroidiflement, il
fe condenfe & devient liquide l'eau abforbe
beaucoup plus de ce gaz acide qu'elle n7abforbe
de gaz acide carbonique; mais elle en abforbe
beaucoup moins que de gaz acide muriatique.
C'eff une vérité bien établie, & que je n'ai
peut-être que trop répétée, que les métaux en
général ne peuvent fe diffoudre dans les acides,
qu'autant qu'ils peuvent s'y oxider or l'acide
fulfureux étant déjà dépouillé d'une grande
partie de l'oxygène nécefTaire-pour le conilituer
acide fulfurique il efl: plutôt difpofé à en re-
prendre qu'à en fournira la plupart des métaux
& c'eft pour cela qu'il ne peut les dhToudre,
à moins qu'ils n'aient été préalablement oxidés.
Par une fuite du même principe, les oxides
métalliques fe diffolvent dans l'acide fulfu-
reux fans enervefcence & même avec beau-
coup de facilité. Cet acide a même comme
l'acide muriatique, la propriété de diffoudre des
oxides métalliques qui font trop oxygénés, &
qui feroient par cela même indiffolubles dans
l'acide fulfurique il forme alors avec eux de
véritables fulfates. On pourroit donc foupçon-
ner qu'il n'exige que des fulfates métalliques &
non des fulfites fî les phénomènes qui ont
lieu dans la diffolution du fer, du mercure, &
de quelques autres métaux, ne nous appre-
noient que ces fubftances métalliques font fuf-
ceptibles de s'oxider plus ou moins en fe dif-
folvant dans les acides. D'après cette observation
le fel dans lequel le métal fera le moins oxidé
devra porter le nom de fulfite & celui dans
lequel le métal fera le plus oxidé devra porter
le nom de fulfate. On ignore encore ff cette
dîfiinâiôn, néceflàire pour le fer & pour le
mercure, eft applicable à tous les autres fulfates
métalliques.
Tabzsatt des combinai/bits du Phofphore qui a reçu
premier degré d'oxygénation & qui a été
un
porté à l'état d: Acide phofphoreux, avec les bajes
faîifiables dans l'ordre de leur affinité avec cet acide.

L'exigence des phofphites mécalliques n'eft pas encore abfolument


certaine, elle fuppofe que les riiécaux font fufcepcibtesde fe diûoiidre
dans facide phofphonque, à différens degrés d'oxygénation ce qui n eft
pas encore prouv.é.
Aucuns de ces fels ti'avoienc été nommés.
Tableau des combitzaifons du Phojphore faturê
d'oxygène, ou Acide phofphorique avec les fitb-
flances falîfiahles dans l'ordre de leur affinité
avec cet acide

La plupart de ces fels ne ront connus que depuis très-peu de tems


Ce n'avoienc point encore été nommés.
OBSERVATIONS
Sur les Acides phofphareux & phofvkonque
& fur les Tableaux de leurs combinaifons-

ON a vu, à l'article Phofphore, un précis


hiftorique de la découverte de cette fingulière
fubftances, & quelques obfervations fur la ma-
nière dont il exifte dans les végétaux & dans
les animaux.
Le moyen le plus sûr pour obtenir l'acide
phofphorique pur & exempt de tout mélange,
eft de prendre du phofphore en nature, & de le
faire brûler fous des cloches de verre dont on
a humecté l'intérieur en y promenant de l'eau
difullée, II abforbe dans cette opération 2 fois
| fon poids d'oxygène. On peut obtenir cet
acide concret en faifant cette même cornbuf-
tion fur du mercure au lieu de la faire fur de
l'eau il fe préfente alors dans l'état de floc-
cons blancs qui attirent l'humidité de l'air avec
une prodigieufe activité. Pour avoir ce même
acide dans fétat d'acide phofphoreux c'eft-à-
dire, moins oxygéné, il faut abandonner le
phofphore à une combuflionextrêmementlente,
& le laifter tomber en quelque façon en déli-
<p.àum à l'air dans un entonnoir placé fur un
flacon de criflal. Au bout de quelques jours
on trouve le phofphore oxygéné l'acide phof-
phoreux, à mefure qu'il s*efl formé a s'eft emparé
d'une portion d'humidité de l'air, & a coulé
dans le flacon. L'acide phofphoreuxfe convertit
au furplus aifément en acide phofphorique par
une fimple expofition à l'air long-tems conti-
nuée. Comme le phofphore a une affez grande
affinité avec l'oxygène pour l'enlever à l'acide
nitrique & à l'acide muriatique oxygéné, il en
réfulte encore un moyen fimple & peu difpen-
dieux d'obtenirl'acide phofphorique. Lorfqu*on
veut opérer par l'acide nitrique, on prend une
cornue tubulée bouchée avec un bouchon de
criflal; on femplit à moitié d'acide nitrique
concentré on fait chauffer légèrement, puis
on introduit par la tubulurede petits morceaux
de phofphore. Ils fe diffolvent avec effervef-
cence en même tems le gaz nitreux s'échappe
fous la forme de vapeurs rutilantes. On conti-
nue ainfi d'ajouter du phofphore jufqu'à ce qu'il
refufe de fe diffoudre. On pouffe alors le feu
un peu plus fort pour chaffer les dernières
portions d'acide nitrique, & on trouve facide
phofphorique dans la cornue, en partie fous
forme concrète & en partie fous forme li-
quide.
TABLEAir des combinaifons du Radical carbonique
oxygéné^ ou Acide carbonique avec les bafes falifiables}
dans l'ordre de leur affinité avec cet acide

Ces fels n'étant connus & définis que depuis quelques années, il n'exiftepas,
à proprement parler, pour eux de nomenclature ancienne. On a cru cependant devoir
les dèfigner ici fous les noms que M. de Morveau leur a donnés dans fon premier
volume de l'Encyclopédie. M. Bergman défignoit les bafes faturées de cet aide par
l'épithète aérée 5 ainfi la terre calcaire aérée exprimait la terre calcaire raturée
d'acide carbonique. M. de Fourcroy avoit donné le nom d'acide crayeux à acide
carbonique, & le nom de craie à tous les fels qui réfulrent de la combinaifon de
cet acide avec les bafes falifiables.
OBSERVATIONS
Sur {Acide carbonique & fur le Tableau
de fes combinaifons.
D E
tous les acides que nous connoiffbns
l'acide carbonique eft peut-être celui qui eft le
plus abondamment répandu dans la nature. Il
eft tout formé dans les craies, dans les marbres,
dans toutes les pierres calcaires, & il y eft neu-
tralifé principalement par une terre particulière
connue fous le nom de chaux. Pour le dégager
de ces fubftances, il ne faut que verfer deffus de
l'acide fulfurique ou tout autre acide qui ait plus
d'affinité avec la chaux que n'en a l'acide car-
bonique il fe fait une vive efîervefcence la-
quelle n'eft produite que par le dégagement de
cet acide, qui prend la forme de gaz dès qu'il
eil libre. Ce gaz n'eil fufceptible de fe con-
denfer par aucun des degrés de refroidiffement&
de preffion auxquels il a été expofé jufqu'ici il
ne s'unit avec l'eau qu'à peu près à volume égal,
& il en réfulte un acide extrêmement foible.
On peut encore obtenir l'acide carbonique
aflez pur, en le dégageant de la matière fucrée
petite
en fermentation mais alors il tient une
portion d'alkool en difrolution.
Le carbone eft le radical de l'acide carbo-
nique. On peut en confêquence former artificiel-
lement cet acide, en brûlant du charbon dans du
gaz oxygène, ou bien en combinant de la pou-
dre de charbon avec un oxide métallique dans
de juftes proportions. L'oxygène de l'oxide fe
combine avec le eharbon forme du gaz acide
carbonique & le métal devenu libre reparoît
fous fa forme métallique.
C'etl à M. Black que nous devons les pre-
mières connoiffances qu'on ait eues fur cet
acide. La propriété qu'il a de n'exifler que fous
forme de gaz au degré de température & de
preflloa dans lequel nous vivons, Fa voit fouf
trait aux recherches des anciens Chimiûes.
Si on pouvoit parvenir à décompofer cet
acide par des moyens peu difpendieux, on
auroit fait une découverte bien précieufe pour
l'humanité, puisqu'on pourroit obtenir libres
les maffes immenses de carbone que contien-
nent les terres calcaires les marbres, &c. On
ne le peut pas par des affinités fîmples puif-,
que le corps qu'il faudroit employer pour dé-
compoler l'acide carbonique, devroit être au
moins aufri combullible que le charbon même,
& qu'alors on ne feroit que changer un eom-
buflible contre un autre mais il n'eIl pas im-
poffible d'y parvenir par des affinités doubles; &
ce qui porte à le croire, c'eft que la nature réfout
complètemenrceproblême, & avec des matériaux
qui ne lui coûtent rien dansl'ade de la végétation.
Tableau des combinaifons du Radical muriatique oxygéné,
ou Acide muriatique avec les bafes falifiables dans ¿'ordre
de leur affinité avec cet acide.
TâJBLMAU des combinaifons de L'Acide muriatique oxigéné
avec les différentes bafes
falifiables avec lefquelles il ejl
fufceptible de s'unir.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide muriatique & fur le Tableau
de fes combinaifons.
JLj'Acide muriatique eft répandu très-abon-
damment dans le règne minéral il y eft uni
avec différentes bafes principalement avec la
foude la chaux & la magnéfie. C'eLt avec ces
trois bafes qu'on le rencontre dans l'eau de la
mer & dans celle de pluf eurs lacs il eft plus
communément uni avec la foude dans les mines
de fel gemme. Cet acide ne paroît pas avoir
été décompofé jufqu'à ce jour dans aucune
expérience chimique en forte que nous n'a-
vons nulle idée de la nature de fon radical:
ce n'eft même que par analogie que nous con-
cluons qu'il contient le principe acidifiant ou
oxygène. M. Berthollet avoit foupçonné que ce
radical pouvoit être de nature métallique; mais
comme ilparoît que l'acide muriatique fe forme
journellement dans les lieux habités, par la com-
binaifon de miafmes & de fluides aériformes
il faudroit fuppofer qu'il exille un gaz métal-
lique dans l'atmofphère; ce qui n'eft pas fans
doute impoffible mais ce qu'on ne peut ad-
mettre, au moins que d'après des preuves.
L'acide muriatique ne tient que médiocre-
ment aux bafes avec lefquelles il efl uni Fa-
cide fulfurique l'en chaffe & c'eft principale-
ment par l'intermède de cet acide que les Çhi-
miftes ont coutume de Te le procurer. On pour-
roit employer d'autres acides pour remplir ce
même objet, par exemple, l'acide nitrique,
mais cet acide étant volatil, il auroit l'incon-
vénient de fe mêler avec l'acide muriatique dans
la diftillation. Il faut dans cette opération em-
ployer environ une partie d'acide fulfurique con-
centré, & deux de fel marin. On fe fert d'une
cornue tubulée dans laquelle on introduit d'a-
bord le fel on y adapte un récipient également
tubulé à la fuite duquel on ajoute deux ou trois
bouteilles remplies d'eau, & qui font jointes par
des tubes à la manière de M. Woulfe. La
figure y planche IV, repréfente cet appareil.
x
On lutte bien toutes les jointures après quoi
on introduit l'acide fulfurique dans la cornue par
la tubulure & on la referme auffitôt avec fon
bouchon de criftal. C'eft une propriété de l'a-
cide muriatique de ne pouvoir exiller que dans
l'état de gaz à la température & au degré de
preffion dans lequel nous vivons il feroit donc
impoffible de le coercer fi on ne lui préfentoit
de l'eau avec laquelle il a une grande affinité.
Il s'unit dans une très-grande proportion à celle
contenue
contenue dans les bouteilles adaptées au ballon;
& lorfqu'elles en font faturées, il en réfulte ce
que les anciens appeloient efprit de fel fumant,
& ce que nous appelons aujourd'hui acide mu-
ïiatique.
Celui qu'on obtient par ce procéde, n'en: pas
faturé d'oxygène autant qu'il le peut être, il eft
fufceptible d'en prendre une nouvelle dofe, Ci
on le diiHlle fur des oxides métalliques, tels
que l'oxide de manganèfe, i'oxide de plonib
ou celui de mercure l'acide qui fe forme alors,
& que nous nommons acide muriatique oxy-
géné, ne peut exifter comme le précédent,
Jorfqu'il eft libre, que dans l'état gazeux; il
n'eit pins fufceptible d'être abforbé par l'eau
en anffi grande quantité. Si on en imprègne ce
Huide au-delà d'une certaine proportion, l'acide
fe précipite au fond du vafe fous forme concrète.
L'acide muriatique oxygéné eft fufceptible
comme l'a démontré M. Berthollet de fe
combiner avec un grand nombre de bafes fa-
iifiables; les fels qu'il forme font fiifceptibles de
détoner avec le carbone & avec plufieurs fubf-
tances métalliques ces détonations font d'au-
tant plus dangereufes, que l'oxygène entre dans
la compofitîon du muriate oxygéné avec une très-
grande quantité de calorique qui donne lieu par
fon expanf onà des explof ons très- dangereufes.
Ta SZJSAV des combinaifons de l'Acide nitro-
muriatique avec les bajes ftilifiables rangées
par ordre alphabétique, attendu que les affi-
nités de cet acide ne font point ajje% connues.

Vota. La plupart de cescombinaifon?,fur-tout celles de l'acide


nîtro-muriariqueavec les terres & lesalkalisonrécé peu examinées,
on ignore s'il Ce forme un fel mixte, ou files deux acides fe fê-
parent pour former deux fels diftinâs.
OBSERVATIONS
Sur L'Acide nitro-muriatique &fur le Tableau
de fes combïnaifons.
-Lrf'AciDE
nitro -muriatique, anciennement
appelé eau régale, eft formé
par un mélange
d'acide nitrique & d'acide muriatique. Les
dicaux de ces deux acides s'unifient enfembiera-
dans cette combinaifon, & il réfulte acide
en un
à deux bafes, qui a des propriétés particulières
qui n'appartiennent à aucun des deux féparé-
ment, notamment celle de difïbudre l'or & le
platine.
Dans les diflblutions nitro-muriatiques,
comme
dans toutes les autres, les métaux
commencent
par s'oxider avant de fe diffoudre ils s'emparent
d'une portion de l'oxygène de l'acide, il fe
dégage en même-tems
un gaz nitro-muriatique
d'une efpèce particulière qui n'a
encore été
bien décrit par perfonne. Son odeur eft très-
défagréable, & il "eft airfïî funetle qu'aucun
autre aux animaux qui le refpirent il attaque
les infirumens de fer & les rouille l'eau
abforbe une affez grande quantité, & prend en
quelques caractères d'acidité. J'ai
eu occafion
de faire ces obfervations lorfque j'ai traité le
platine & que je l'ai fait diflbudre très-en grand
dans l'acide nitro-muriatique.
J'av.ois d'abord fotipçonné que dans le mé-
lange de l'acide nitrique & de l'acide muria-
tique, ce dernier s'emparoit d'une partie de
l'oxygène de l'acide nitrique ,& qu'alors porté
à Pétat d'acide muriatiqueoxygéné il devenoit
fufcepnble de dilïbudre l'or mais piufieurs
faits fe refufent à cette explication. S'il en étoit
aînfî en faifant chauffer de l'acide nitro-muria-
tique, il s'en dégageroit du gaz nitreux &
cependant on n'en obtient pas fenfîbletnent. Je
reviens donc à confdérer l'acide nitro-muriâ-
tique comme un acide à deux bafes, & j'adopte
entièrement à cet égard les idées de M. Ber-
thollet.
TABX.EAU des combinaifons du Radical fluorique
oxigéné, ou Acide fluorique avec les bafes falifiables
duns l'ordre de leur affinité avec cet acide.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide fluorique & fur le Tableau
de fes comhinaifons*
.LA
nature nous offre l'acide fîuorique tout
formé dans le fpath fluor, fpath phofphorique
la
ou fluate de chaux il y ed combiné avec
terre calcaire & forme un fel infoluble.
Pour obtenir l'acide fîuorique feul & dégagé
de toute combinaifon, on met du fpath fluor
plomb;
ou fluate de chaux dans une cornue de
on verfe deffus de l'acide fulfurique & on
adapte à la cornue un récipient également de.
plomb, à moitié rempli d'eau. On donne une
chaleur douce & l'acide fluorique eft abforbé
par l'eau, du récipient à mefiire qu'il fe dé-
gage. Comme cet acide eft
naturellement fous
forme de gaz au degré de chaleur & de preffion
dans lequel nous vivons, on peut le recueillir
dans cet état dans l'appareil pneumato-chimique
acide
au mercure, comme on y reçoit le gaz
marin le gaz acide fulfureux le gaz acide
carbonique.
On eft obligé de fe fervir pour cette opé-
ration de vaiflèaux métalliques, parce que fa-
cide fîuorique diffout le verre & la terre fili-
ceufe il communique même de la volatilité à
ces deux fubflancesj & il les enlève avec lui
dans l'état de gaz.
C'eft iL M. Margraff que nous devons la pre-
mière connoiffance de cet acide; mais il ne l'a
jamais obtenu que combiné avec une quantité
confidérable de filice il ignoroit d'ailleurs que
ce fût un acide particulier & fui generis.
M. le duc de Liancourt, dans un Mémoire
imprimé fous le nom de M. Boulanger, a étendu
beaucoup plus loin nos connoiflances fur les
propriétés de l'acide fluorique enfin M. Schéele
femble avoir mis la dernière main à ce travail.
Il ne refte plus aujourd'hui qu'à déterminer
quelle eft la nature du radical fluorique mais
comme il ne paroît pas qu'on fait encore parvenu
à décompofer l'acide, on ne peut avoir aucun
apperçu de la nature du radical. S'il y avoit
quelques expériences à tenter à cet égard, ce
ne pourroit être que par la voie des doubles
affinités qu'on pourroit efperer quelque fuccès»
Ta sZ Ê A des combinaifons du Radical boraciaut
U
oxigéné, avec les différentes bafes Jalifiâbles aux-
quelles il efl frifceptible de s'unir dans l'ordre di
leur affinité avec cet acide.

Nota. La plupart de ces combinaifons n'ont été ni nommées, ni connues


par les anciens ils donnaient à l'acide boracujue le nom de Cet fédatif,
& ils donnoient le nom de borax à bafe d'alfcali fixe végétal, borax à
i
bdfe d'alkali fixe minéral borax bafe de terre calcaire, aux combinai-
rails du fel fédatif avec la potaffè la foude & la chaux.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide boracique & fur le Tableau,
de fes combinaifons.
ON donne le nom de boracique à un acide
concret qu'on retire du borax fel qui nous
vient de l'Inde par le commerce. Quoique le
borax ait été employé très-anciennement dans
les arts, on n'a que des notions très-incertaines
fur fon origine, fur la manière de l'extraire &
de le purifier. On a lieu de foupçonnec que
c'eit un fel natif, qui fe trouve naturellement
dans les terres de quelques contrées de l'Inde &
dans l'eau des lacs tout le commerce de ce
fel fe fait par les Hollandais; ils ont été long-
tems feuls en poiTeffion de le purifier; mais
MM. l'Eguillier, dans une fabrique qu'ils ont
élevée à Paris, font parvenus à rivalifer avec
eux le procédé de cette purification au fur-
plus, eft encore un myflère. L'analyfe chimique
nous a appris que le borax étoit un fel neutre avec
excès dé bafe; que cette bafe étoit la foude
& qu'elle étoit en partie neutralifée par un acide
particulier, qui a été long-tems appelé fel fë-
datif de Homberg, & que nous avons défigné
fous le nom d'acide boracique. On le rencontre
quelquefois libre dans l'eau des lacs celle du
lac Cherchiaio en Italie en contient 94 grains
& demi par pinte.
Pour féparer l'acide boraeique & l'obtenir
libre on commence par difïbudre le borax
dans l'eau bouillante on filtre la liqueur très-
chaude & on y verfe de l'acide fulfuriqne ou
un autre acide quelconque qui ait plus d*affi-
vité avec la foude que n'en a l'acide boracique.
Ce dernier fe répare auffitôt, & on l'obtient
fous forme criflalline par refroîdiflement.
On a cru long tems que l'acide boracique
étoit un produit de l'opération par laquelle on
l'obtenait: on fe perfuadoit en eonféqrtence
qu'il étoit différent fuivant l'acide qu'on avoit
employé pour le féparer d'avec la foude. Au-,
jourd'hui il eft bien reconnu que l'acide bora-
cique efE toujours identiquement le même, de
quelque manière qu'il ait été dégagé pourvu
toutefois qu'il ait été bien dépouillé de tout
acide étranger par le lavage, & qu'on l'ait pu-=
ïifîé par une ou deux criflallifations fucceffives.
L'acide boraeique eft foluble dans l'eau &
dans Talkool. Il a la propriété de communiquer
à la flamme de ce dernier dans lequel on Fa
di(fous, une couleur verte, & cette circonf-
tance avoit fait croire qu'il contenoit du cnivre;
mais aucune expérience déciiiYe n'a confirmé
ce réfultat il y a apparence que fi le borax
contient quelquefois du cuivre, il lui eft acci-
dentel.
Cet acide fe combine avec les fubftances
faliliables, par la voie humide & par la voie
sèche. Il ne diffbut pas directement les métaux
par la voie humide, mais on peut parvenir à
opérer la combinaifon par double affinité,
Le Tableau ci-defflis préfente les.différentes
fubflances avec lefquelles l'acide boracique
peut s'unir dans l'ordre des affinités qui s'ob-
fervent par la voie humide il exige un chan-
gement notable, loxfqu'on opère par la voie
sèche alors l'alumine qui efl; placée la der-
nière, doit être placée immédiatement après
la foude.
Le radical boracique efl entièrement incon-
nu l'oxygène y tient tellement, qu'il n'a pas
encore été poffible de l'en féparer par aucun
moyen. Ce n'ell même que par analogie qu'on
peut conclure que l'oxygène fait partie de fa
combinaifon, comme de celle de tous les acides.
Tableau- ou Acide
arfenique avec Les hafés Jalifiables dans l'ordre de leur
affinité avec cet acide.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide arfenique, & fur le Tableau
de' fes combinaifonsi.

DANS un Mémoire imprimé dans le recueil


de l'Académie, année 1746 M. Macquer a fait
voir qu'en pouffant au feu un mêlange d'oxide
blanc d'arfenic & de nitre, on obtenait un feî
neutre, qu'il a nommé fel neutre arfenical. On
ignoroit entièrement, à l'époque où M. Macquer
a publié ce Mémoire, la caufe de ce fîngulier
phénomène, & comment une fubftance métal-
lique pouvoit jouer le rôle d'un acide. Des
expériences plus modernes nous ont appris que
l'arfenic s'oxygénoit dans cette opération; qu'il
enlevoit l'oxygène à l'acide nitrique & qu'à
l'aide de ce principe il fe convertiffoit en un
véritable acide, qui fe combinoit enfiûte avec
la potaffe. On connoît aujourd'hui d'autres
moyens, non fetrlemenr d'oxygéner l'arfenic,
mais encore d'obtenir l'acide arfenique libre &
dégagé de toute combinaifon. Le plus fîmple
eft de diifoudre l'oxide blanc d'arfenic dans
trois fois fon poids d'acide muriatique on
ajoute dans cette diflblution pendant qu'elle
eil encore bouillante une quantité d'acide ni-
trique double du poids de l'arfenic & on éva-
pore jufqu'à ficcité. L'acide nitrique fe décom-
pofe dans cette opération fon oxygène s'unit
à foxide d'arfenic pour l'acidifier; le radical
nitrique fe diffipe fous forme de gaz nitreux.
A l'égard de l'acide muriatique il le convertit
en gaz muriatique & on peut le retenir par
voie de dillillation. On s'affure qu'il ne refte
plus d'acide étranger, en calcinantl'acide con-
cret jufqu'à ce qu'il commence à rougir: ce
qui relle aihir dans le creufet éft de facide
arfenique pur.
Il y a plufieurs autres manières d'oxygéner
l'arfenic & de le convertie en un acide. Le pro-
cédé que Schéelea employé & que M. de Mor-
veau a répété avec un grand fuccès dans le la-
boratoire de Dijon j conflle à diftiller de l'acide
Tnurîatîque oxygéné Cur de la rnanganèfe. Cet
acide s'oxygène, comme je l'ai dit ailleurs, &
paGe fous la forme d'acide muriatique fur-oxy-
géné. On le reçoit dans un récipient dans le-
quel on a mis de l'oxide blanc d'arfenic recou-
vert d'un peu d'eau diftillée. L'arfenic blanc
décompofe l'acide muriatique oxygéné, il lui
enlève l'oxygène furabondant d'une part, il fe
convertit en acide arfenique; & de l'autre fa-
cide muriatique oxygéné redevient acide mu-
xiatique ordinaire. On fépare ces deux acides
en dilüllant à une chaleur douce qu'on aug-
mente cependant fur la fin l'acide muriatique
pane & l'acide arfenique refle fous forme blan-
che & concrète. Dans cet état il efl beaucoup
moins volatil que foxide blanc d'arfenic.
Très-Couvent l'acide arfenique tient en diîîb-
lurion une portion d'oxide blanc d'arfenic qui
n'a pas été fuffifamment oxygéné. On n'eil point
expofé à cet inconvénient, quand on a opéré
par l'acide nitrique, & qu'on en ajoute de nou-
veau, jufqu'à ce qu'il ne pafsât plus de gaz
nitreux.
D'après ces différentes obfervations je
définirai l'acide arfenique un acide métal-
lique blânc concret fixe au degré de feu
qui le fait rougir formé par la combinaifon de
l'arfenic avec l'oxygène qui fe diffout dans
l'eau, & qui eft fufceptiblede fe combiner avec
un grand nombre de bafes fali6ables.
Ta S z m a U des combinaifons du. Molybdène
oxygéné, ou Acide molybdique avec les bafes
falifiables par ordre alphabétique

On a fuivi dans le tableau l'ordre alpbabétique, parce que l'on


ne connoîc pas bien les affinités de cet acide avec les différentes
bafes. C'eft à M. Schéele qu'on doit la découvertede cer acide,
comme de beaucoup d'autres.
Nota. Toute cette claflfe de fels a été nouvellementdécouverte
& n'avoir point encore été nommée.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide molybdique & fur le Tableau
de fer comhinaifons.
LE molybdène cil une fubtlance métallique
particulière qui eft fufceptible de s'oxygénee
au point de fe transformer en un véritable acide
concret. Pour y parvenir, on introduit dans une
cornue une partie de mine de molybdène, telle
que la nature nous la préfente & qui efi un
véritable fulfure de molybdène
on y ajoute
cinq ou fix parties d'un acide nitrique aflbibli
d'un quart d'eau environ, & on diflille. L'oxy-
gène de l'acide nitrique fe porte fur le molyb-
dène & fur le foufre; il transforme l'un
en un.
oxide métallique & l'autre en acide fulfurique.
On repafle de nouvel acide nitrique dans la
même proportion & jufqu'à quatre ou cinq fois;
& quand il n'y a plus de vapeurs rouges, le
molybdène eft oxygéné autant qu'il le peut être,
du moins par ce moyen, & on le trouve au
fond de la cornue fous forme blanche, pulvé-
rulente, comme de la craie. Cet acide efl peu
foluble & on peut, fans rifquer d'en perdre
beaucoup, le laver avec de l'eau chaude. Cette
précaution eft néceflaire pour le débarraffer des
dernières portions d'acide fulfurique, qui pour-
roient y adhérer, S
Tableau des combinai/uns du. Tungftéiœ
oxygéné, ou Acide, tungflïque avec les bafes
falifiables.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide tuligflique, & fur le Tableau
de fes combinaifons.
KJ N donne le
nom de tungflène à un métal
particulier dont la mine a été fouvent confon-
due avec celles d'étain; dont la criflallifation
a
du rapport avec celle des grenats dont la
pe-
fanteur fpécitïque excède 6000 celle de l'eau
étant fuppofée iooo enfin qui varie du blanc
perlé au rougeâtre & au jaune. On le trouve
en plufieurs endroits de la Saxe & en Bohême.
Le volfram eft auffi une véritable mine de
îungftène, qui fe rencontre fréquetnment dans
les mines de Cornouailles.
Le métal qui porte le nom de ttingflène,
eft dans fétat d'oxide dans
ces deux efpèces
de mines. Il paroîtroit même qu'il eft porté,
dans la mine de tungftène, au-delà de l'état
d'oxide qu'il y fait fonâion d'acide il
uni à la chaux.
y e
Pour obtenir cet acide libre on mêle
une
partie de mine de tungflène avec quatre
par-
ties de carbonate de potaffe, & on fait fondre
le mélange dans un creuset. Lorfque la matière
eft refroidie, on la met en poudre & on verfe
delius douze parties d'eau bouillante puis on
ajoute de l'acide nitrique qui s'unit à la potaffe
d'affinité, & en dégage
avec laquelle il a plus
l'acide tungftique cet acide fe précipite auffi-
tôt fous forme concrète. On peut y repaffer de
l'acide nitrique qu'on évapore à Gccité & con-
tinuer ainf juCqu'à ce qu'il ne fe dégage plus
de vapeurs rouges on eft aiïiiré pour lors qu'il
eft complètement oxygéné. Si on veut obtenir
l'acide tungflique pur, il faut opérer la fufion
de la mine avec le carbonate de potafle dans
un creufet de platine; autrement la terre du
creufet fe mêleroit avec les produits, & alté-
reroit la pureté de l'acide.
Les affinités de facide tungftique avec les
oxides métalliques ne font point déterminées,
& c'eft pour cette raifon qu'on les a rangées
par ordre alphabétique à l'égard des autres
fubftances falifiables on les a rangées dans
l'ordre de leur affinité avec l'acide tungtlique.
Toute cette claffe de fels n'avoit été ni connue
ni nommée par les anciens.
Tableau des combinaifons du Radicaltartareux
oxygéné, ou Acide tartareux avec les bafs
falifiables, dans* tordre de leur affinité avec
cet acide.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide tartareux & fur le Tableau
de fes combinaifons.
To UT le monde connoît le tartre qui s'atta-
che autour des tonneaux dans lefquels la fer-
mentation du vin s'eit achevée. Ce feleft com-
pofé d'un acide particulier fui generis combiné
manière que l'acide
avec la potaffe mais de
eft dans un excès confîdéïable.
Ceft encore M. Schéele qui a enfeigné aux
Chimiaes le moyen d'obtenir l'acide tartareux
acide avoit
pur. Il a obfervé d'abord que cet
plus d'affinité avec la chaux qu'avec la potaffe;
il prêtent en coriféquence de commencer par
diflbudre du tartre purifié dans de Peau bouil-
Jante, & d'y ajouter de la chaux jufqu'à ce que
chaux qui
tcut facide foit faturé. Le tartrite de
fe forme, eft un fel prefqu'infoluble qui tombe
quand elle eft
au fond de la liqueur, fur-tout
refroidie on l'en fépare par décantation, on
le lave avec de l'eau froide & on le sèche;
fulfurique
après quoi on verfe deffus de l'acide
étendu de 8 à 9 fois fon poids d'eau, on fait
chaleur
digérer pendant douze heures, à une
douce, en observant de remuer de tems en tems:
l'acide fulfurique s'empare de la chaux forme
du fulfate de chaux & l'acide tartareux fe
trouve libre. Il fe dégage pendant cette di-
geftion une petite quantité de gaz qui n'a pas
été examiné. Au bout de douze heures on dé-
cante la liqueur on lave le fulfate de chaux
avec de l'eau froide pour emporter les portions
d'acide tartareux dont il eft imprégné on réunit
tous les lavages à la première liqueur, on filtre
on évapore & on obtient l'acide tartareux con-
cret. Deux livres de tartre purifié, donnent
environ onze onces d'acide. La quantité d'acide
fulfurique néceiïaire pour cette quantité de
tartre, elt de 8 à 10 onces d'acide concentré
qu'on étend comme je viens de le dire, de 8
à 9 parties d'eau.
Comme le radical corobuflible eft en excès
dans cet acide, nous lui avons confervé la ter-
minaifon en eux, & nous avons nommé tanrites
le réfultat de fa combinaifon avec les fubflances
falifîables.
La bafe de l'acide tartareux eft le radical
carbone- hydreux ou hydro-carboneux, & il
paroît qu'il y eft moins oxygéné que dans l'a-
cide oxalique. Les expériences de M. Hauen-
fratz paroiffent prouver que l'azote entre aufïî
dans la -combinai[on de ce radical, même en
a fiez grande quantité. En oxygénant l'acide tar-
tareux, on le convertit en acide oxalique en
acide malique & en acide acéteux mais il efi
probable que la proportion de l'hydrogène &
du carbone change dans ces converGoiis, &que
la différence du degré d'oxygénation n'eft pas
la feule caufe qui conflitue la différence de
ces acides.
L'acide tartareux, en fe combinant avec les
alkalis fixes, efl fufceptible de deux degrés de
faturation le premier conflitue un fel avec
excès d'acide, nommé très-improprementcrème
de tartre, & que nous avons nommé tartrite
acidule de potajfe. La mêmecombinaifondonne
par un fécond degré de faturation un fel par-
faitement neutre, que nous nommons fmple-
ment tartrite de potajfe & qui eft connu en
pharmacie fous le nom de fel végétal. Le même
acide combiné avec la fo.ude iufqu'à faturation,
donne un tanrite de fonde connu fous le nom
de fel de feignette, ou de fel polycrefle de
la Rochelle.
Tableau des combinaifons du Radicalmalique
oxygéné., ou Acide malique avec les bafes
falifiables par ordre alphabétique.

Nota. Toutes ces combinaîfons étoient inconnues aux anciens


.OBSERVATIONS
Sur l'Acide malique & fur le Tableau
de fes combinaifons.
L'Acide malique fe trouve tout formé dans
le jus des pommes acides, mûres ou non mûres,
& d'un grand nombre d'autres fruits. Pour l'ob-
tenir, on commence par faturer le jus de
foude.
pommes avec de la pota(fe ou de la
On verfe enfuïte fur la liqueur faturée, de
l'acétite de plomb diffoute dans l'eau. Il fe
fait un échange de bafes l'acide malique fe
combine avec le plomb, & fe précipite. On
lave bien ce précipité, ou plutôt ce fel qui
eft à peu près infoluble après quoi on y
verfe de l'acide fulfurique affoibli qui chaff'e
l'acide malique s'empare du plomb forme
très-peu
avec lui un fulfate qui eft de même
fotuble & qu'on fépare par filtration il refte
l'acide malique libre & en liqueur. Cet acide.
fe trouve mêlé avec l'acide citrique & avec l'a-
cide tartareux dans un grand nombre de fruits
il tient à-peu-près le milieu entre l'acide oxa-
lique & l'acide açéteux; & c'eft ce qui a porté
M, Hermbftadt à lui donner le nom de vinaigre
imparfait. Il eft plus oxygène que l'acide oxa-
lique, mais il l'eft moins que l'acide acéteux.
Il differe auffi de ce dernier par la nature de
fon radical, qui contient un peu plus de car-
bone & un peu moins d'hydrogène. On peut le
former artificiellement, en traitant du fucre avec
de l'acide nitrique. Si on s'eft fervi d'un acide
étendu d'eau, il ne fe forme point de criftaux
d'acide oxalique mais la liqueur contient réel-
lement deux acides, favoir l'acide oxalique,
l'acide malique, & probablement même un peu
d'acide tartareux. Pour s'en affurer, il ne s'agit
que de verfer de l'eau de chaux fur la liqueur;
il fe forme dutartrite & de l'oxalate dechaux, qui
fe dépofent au fond comme înfolubles ilfe forme
en même tems du malate de chaux qui relle en
difïblutîon. Pour avoir l'acide pur & libre on
décompofe le malate de chaux par l'acétite de
plomb, & on enlève le plomb à l'acide mali-
que par l'acide fulfurique, de la même manière
que quand on opère direâement fur le jus des
pommes.
Tabi,Ejîit des combinaifons du Radical citrique oxygéné
ou Acide citrique avec les bafes falifiabl&s dans l'ordre
de leur. affinité avec èet acide*.

Les affinités de cet acide ont été déterminées par M. Bergman & par M. de
Breney, de l'Académie de Dijon,
OBSERVATIONS
Sur l'Acide citrique & fur le Tableau
de fes combïnalfons»
UN donne le nom de citrique à l'acide en
liqueur qu'on retire par exprefhondu citron on
le rencontre dans plufieurs autresfruits mêlé avec
l'acide malique. Pour l'obtenir pur & concentre',
on lui laide dépofer fa partie muqueufe par un
long repos dans un lieu frais tel que la cave,
enfuite on le concentre par un froid de ou )
degrés au-deffous de zéro du thermomètre de
Réaumur:l'eau fe gèle& l'acide refte en liqueur.
On peut ainf le réduire à un huitième de fbn
volume. Un trop grand degré de froid nuiroit
au fuccès de l'opération, parce que l'acide fe
trouveroit engagé dans la glace, & qu'on auroit
de la peine à l'en féparer. Cette préparation
de l'acide citrique eft de M. Georgius. On peut
l'obtenir d'une manière plus fimple encore, en
faturant du jus de citron avec de la chaux. II
fe forme un citrate calcaire qui eft indifloluble
dans feau on lave ce fel, & on verfe deffus
de l'acide fulfurique, qui s'empare de la chaux
& qai forme du fulfate de chaux, fel presque
infoluble. L'acide citrique refte libre dans la
liqueur.
TABLEAU des combinaifons du Radical pyro-ligneux
oxygéné, ou Acide pyro ligneux avec les balès
falifiables dans l'ordre de leur affinités avec cet acide.

Nota. Toutes ces combinaifonîétoient inconnues aux anciens Chimiftcs.


OBSERVATIONS
Sur l'Acide pyro-ligneux, & fur le Tableau,
de fes combinaifons.
LES anciens Chimiftes avoient obfervé que
la plupart des bois, & fur-tout ceux qui font
lourds & compares donnoient par la diflilla-
tion à feu nud un efprit acide d'une nature
particulière; mais perfonne, avant M. Goet-
tlina, ne s'étoit occupé d'en rechercher la
nature. Le travail qu'il a donné fur ce fujet
fe trouve dans le Journal de Crell année
177p. L'acide pyro-ligneux qu'on obtient par
la diftillation du bois à feu nud eft de cou-
leur brune; il eft très-chargé d'huile & de char-
bon pour l'obtenir plus pur, on le redifie par
une féconde diflillation. Il paroît qu'il eft à peu
près le même de quelque bois qu'il ait été tiré.
M. de Morveau & M. Eloi Bourfier de Clervaus
fe font attachés à déterminer les aflinités de cet
acide avec les différentes bafes falifables; &
c'eft dans l'ordre qu'ils leur ont afligné qu'on
les préfente ici. Le radical de cet acide eft
principalement formé d'hydrogène & de car-
bone.
Ta B i E Av des combinaifons du Radical pyro-
tartareux oxygéné ou. Acide pyro-tartareux avec
les différentes bafes falifiables dans l'ordre de leur
affinité avec cet acide

Nota. Toutes ces combinaifons êtoient inconnues aux anciens Chimiltes.


1 On ne connaît pas encore les affinités de cet
acide mais comme il
les a fuppolees les
a beaucoup deiapport avec l'acide pyro-muqueux, on
marnes.
OBSERVATIONS,
OBSERVATIONS
Sur l'Acide pyro-tartareux, & fur le Tableau
de fis combiaaifons.

ON donne le nom de pyro-tartareux à un


acide empyreumatique peu concentré qu'on
retire du tartre purifié par voie de diflillation.
Pour l'obtenir on remplit à moitié de tartrite
acidulé de potaffe ou tartre en poudre une
cornue de verre on y adapte un récipient
tubulé auquel on ajoute un tube qui s'engage
fous une cloche dans l'appareil pneumato-
chimique. En graduant le feu on obtient
une liqueur acide empyreumatique mêlée
avec de l'huile: on fépare ces deux produits
au moyen d'un entonnoir, & c'eft la liqueur
acide qu'on a nommée acide pyro-tartareux.
Il fe dégage dans cette diflillation une pro-
digieufe quantité de gaz acide carbonique.
L'acide pyro-tartareux qu'on obtient, n'eu* pas
parfaitement pur il contient toujours de l'huile
qu'il feroit à fouhaiter qu'on en pût féparer.
Quelques auteurs ont confeillé de le rédiger;
mais les Académiciens de Dijon ont constaté
qu'il y
que cette opération étoit dangereufe &
avoit explofion.
TABLEAU des combina forts du Radicalpyro-muqueux
oxygéné ou Acide pyro-muqueux avec les bafes
Jalifiables dans l'ordre de leur affinité avec cet acide.

Nota.To utes ces combinaifons étoientinconnues aux anciens Chimifles.


OBSERVATIONS
Sur l'Acide pyro-muqueux & fur le Tableau
de fes combintùjonst
ON retire facide
pyro-muqueux du fucre &
de tous les corps fucrés par la diftillation à feu
nud. Comme ces fubftances fe bourfouflent con-
hdérablement au feu, on doit laiffer vuides les
fept huitièmes de la cornue. Cet acide eft
d'un jaune qui tire fur le rouge on l'obtient
moins coloré en le reétifant par une féconde
diflillation. II eft principalement compofé d'eau
& d'une petite portion d'huile légèrement
oxygénée. Quand il en tombe fur les mains,
il les tache en jaune & ces taches
ne s'en
vont qu'avec l'épiderme. La manière la plus
fimple de le concentrer eft de l'expofer à
la gelée ou bien à un froid artifrciel fi on
l'oxygène par l'acide nitrique on le con-
vertit en partie en acide oxalique & en acide
malique.
C'eft mal à-propos qu'on a prétendu qu'il
fe dégage beaucoup de gaz pendant la diftilla-
tion de cet acide; il n'en pafle prefque point
quand la diflillation eft conduite lentement &
par un degré de feu modéré.
T AS XE A 17des eombinaifons du Radical
oxalique oxygéné ou Acide oxalique avec
les baf falifiables dans l'ordre de leur affi-
nité avec cet acide.

Nata. Toutes ces combinaifons étoiens inconnue» aux anciens


Ghimiftes.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide oxalique & fur le Tableau
de fés combinaifons.
L'ACIDE oxalique fe prépare principalement
en Suiffe & en Allemagne; il fe tire du fuc de
l'ofeille qu'onexprime,& dans lequel fes criflaux
le forment par un long repos. Dans cet état il eft
en partie faturé par de Palkali fixe végétal ou po-
talle; en forte que c'elt, à proprement parler,
un fel neutre avec un grand excès d'acide. Quand
on veut obtenir l'acide pur, il faut le former arti-
ficiellement, & on y parvient en oxygénant le
fucre qui paroît être le véritable radical oxa-
lique. On verfe en conféquence fur une partie
de fucre fx à huit parties d'acide nitrique, &
on fait chauffer à une chaleur douce; il fe pro-
duit une vive effervefcence, & il fe dégage une
grande abondance de gaz nitreux; après quoi
en laiffant repofer la liqueur, il s'y forme des
criftaux qui font de l'acide oxalique très-pur.
On les sèche fur un papier gris pour en féparer
les dernières portions d'acide nitrique dont il
pourroit être imbibé & pour être encore plus
stîr de la pureté de l'acide, on le diffout dans
de l'eau diflillée & on le fait criflallifer une fé-
conde fois.
L'acide oxalique n'elt pas le feul qu'on puîné
obtenir du fucre en l'oxygénant. La même li-
queur qui a donné des criltaux d'acide oxali-
que, par refroidiflement continent en outre l'acide
malique qui eft un peu plus oxigéné. Enfin, en
oxygénant encore davantage le fiicre, on le
convertit en acide acéteux ou vinaigre.
L'acide oxaliqueuni à une petite quantité de
fotade ou de potaffe, a, comme l'acide lartâ-
renx, la propriété d'entrer tout entier dans un
grand nombre de combinaifons fans fe dé-
compofer il en réfulte des fels à deux bafes,
qu'il a bien fallu nommer. Nous avons appelé
le fel d'ofeille oxalate acidule de potalfe &
ce même fel faturé de chaux oxalate acidule
de potaflè & de chaux.
Il y a plus d'un ficelé que l'acide oxalique
éft connu des Chimistes. M. Duclos en a. fait
mention dans les Mémoires de l'Académie des
Sciences, année 1688. Il a été décrit avecafTçz
de foin par Boerhaave. mais M. Schéele en le
premier qui ait reconnu qu'il contenoit de la
potaffe toute formée, & qui ait démontré fon
identité avec l'acide qu'on forme par l'oxygé-
nation du fucre.
OBSERVATIONS
Sur le Radical acéteux oxygéné par un premier
degré d'oxygénation, ou Acide acéteux, &
fur fes combinaifons avec les bafes jalifiabhs.
LE radical acéteux eft compofé de la réunion
du carbone & de l'hydrogène portés à l'état
d'acide par l'addition de l'oxygène. Cet acid
eft par conféquent compofé des mêmes prin-
cipes que l'acide tartareux, que l'acide oxali-
que, que l'acide citrique, que l'acide mali-
que, &c. mais la proportion des principes eft
différente pour chacun de ces acides & il
paroît que l'acide acéteux eft le plus oxygéné
de tous. J'ai quelques raifons de croire qu'il
contient auffi un peu d'azote, & que ce prin-
cipe qui n'exige pas dans. les autres acides
végétaux que je viens de nommer, fi ce n'eft
peut-être dans l'acide tartareux, eft une des
caufes qui le différencie. Pour produire facide
acéteux ou vinaigre, on expofe le vin à une
température douce, en y ajoutant un ferment,
qui confifte principalement dans la lie qui s'eft
précédemmentféparée d'autre vinaigre pendant
fa fabrication ou dans d'autres matières de
même nature. La partie fpiritueufe du vin (le
carbone & l'hydrogène) s'oxygènent dans cette
opération c'eft par cette raifon qu'elle ne
peut le faire qu'à l'air libre, & qu'elle e£t tou-
jours accompagnéed'une diminutiondu volume
de l'air. Il faut en confëquence, pour faire de
bon vinaigre, que le tonneau dans lequel on
opère ne foit qu'à moitie plein. L'acide qui fe
forme ainli eft très-volatil il eft étendu d'une
très-grande quantité d'eau & mêlé de beaucoup
de fubftances étrangères. Pour l'avoir pur on le
diflille à une chaleur douce, dans des vaiueaux
de grès ou de verre: mais ce qui paroît avoir
échappé aux Chimifles c'eft que l'acide acé-
teux change de nature dans cette opération
l'acide qui pafle dans la diftillation n'eft pas
exactement de même nature que celui qui reLIe
dans l'alambic ce dernier paroîtroit être plus
oxygéné.
La divination ne ftiffit pas pour débarraîTer
l'acide acéteux du phlegme étranger qui s'y
trouve mêlé le meilleur moyen de le concen-
trer fans en altérer la nature, s confifte à l'ex-
pofer à un froid de quatre ou fix degrés au-
deflbtis de la congellation la partie aqueufe
gèle & l'acide refte liquide. Il paroît que l'a-
cide acéteux libre de toute combinaifon eft
naturellement dans l'état de gaz, au degré de
température & de preflion dans lequel nous
vivons & que nous ne pouvons le retenir qu'en
le combinant avec une grande quantité d'eau.
Il eil d'autres procédés plus chimiques pour
obtenir l'acide acéteux: ils confinent à oxygéner
l'acide du tartre l'acide oxalique ou l'acide
malique par l'acide nitrique mais il y a lieu
de croire que la proportion des bafes qui com-
pofent le radical, change dans celte opération.
Au furplus M. HafTenfratz efl occupé dans ce
moment à répéter les expériences d'après lef-
quelles on a prétendu établir la poffibilité de
ces conversons.
La combinaifon de l'acide acéteux avec les
différentes baies falifiables, fe fait avec affez de
facilité mais la plupart des fels qui en réfultent
ne font pas criltallifables à la différence des
fels formés par l'acide tartareux & l'acide
oxalique, qui font en général peu folubles. Le
tartrite & l'oxalaie de chaux ne le font pas
même fenfiblement. Les malates tiennent un
efpcce de milieu entre les oxalates & les acé-
tates pour la folubilité comme l'acide qui les
forme en tient un pour le degré d'oxigénation.
Il faut, acides,
comme pour tous les autres
que les métaux foient oxygénés, pour pouvoir
être diSbus dans l'acide acéteux.
Tableau des combmaijbns du Radical acéteux oxygéné
par un fécond degré d oxygénation ou Acide acétique,
0vec les baJes jalijiables dans l'ordre de leur affinité
avec cet acide,.
OBSERVATION-S
Sur l'Acide acétique & fur le Tableau
de jes combinaifons.
JN o Us avons donné au vinaigre radical le
nom d'acide acétique parce que nous avons
fuppofé qu'il étoit plus chargé d'oxygène que
le vinaigre ou acide acéteux. Dans cette fup-
poftion le vinaigre radical ou acide acétique
feroit le dernier degré d'oxygénation que puiffe
prendre le radical hydro carboneux mais
quelqueprobable que foit cette conféquence, elle
demande à être confirmée par des expériences
plus décifives. Quoi qu'il en foit, pour préparer
le vinaigre radical on prend de l'acétite de
potaffe qui eU une combinaifon d'acide acé-
teux & de potalfe, ou de l'acétite de cuivre
qui eft une combinaifon du même acide avec
du cuivre on verfe defîùs un tiers de fou
poids d'acide fulfurique concentré, & par la
diililladon on obtient un vinaigre très-concen,
tré, qu'on nomme vinaigre radical ou acide acé-
tique.Mais, comme je viens de l'indiquer, il
n'en point encore rigoureufernent démontréque
cet acide foit plus oxygéné que l'acide acéteux
ordinaire ni même qu'il n'en differe pas par la
différence de proportion des principes duradical.
Tableau des combinaifons du Radical Jucci-
nique oxygéné, ou Acide fuccinique, avec les
bafes falifiables dans l'ordre de leur affinité
avec cet acide..

Nota. Toutes ces combinairons écoienc inconnues aux anciens


CbimifteJ.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide fticcinique, & fur le Tableau
de fes combinaifons.

J_j' Acide fuccinique fe retire du fuccin


harabé ou ambre jaune, par divination. Ilfuffit
de mettre cette fubftancedans une cornue, & de
donner une chaleur douce; l'acide fuccinique le
fublime fous forme concrète dans le col de la
cornue. Il faut éviter de pouffer trop loin la
divination pour ne pas faire paffer l'huile.
L'opération fnie on met le fel égoutter fur du
papier gris; après quoi on le purifie par des
diiïblutions & crifiallifations répétées.
Cet acide exige 21 parties d'eau froide pour
être tenu en difïblution, mais il eft beaucoup
plus difloluble dans l'eau chaude il n'altère
que foiblement les teintures bleues végétales,
& il n'a pas dans un degré très-éminent les
qualités d'acide. M. de Morveau eft le premier
des Culmines qui ait efïayé de déterminer fes
différentes affinités & c'eft d'après lui qu'elles
font indiquées dans le Tableau joint à ces ob-
fervationï.
Tableau des combinaifons du Radical ben-
zpïque oxygéné, ou Acide bençoïque, avec les
différentes bafes falifiables, rangées
alphabétique.
par ordre

Nota. Toures ces combinaifons étoient inconnues anciens


Chimiftes, & même encore aujourd'hui on n'a rien deaux fatisfaifane
encore fur les propriétés de l'acide Lenzoïque Si fur fes affinités.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide ben^oïque & fur le Tableau de
Jès combina fous avec les bafes falifiables.
CET acide a été connu des anciens Chi-
milles, fous le nom de fleurs de benjoin on
l'obtenoit par voie de fublimation. Depuis, M.
Geoffroy a découvert qu'on pouvoit, égaletnentr
l'extraire par la voie humide enfin M. Schéele
d'après un grand nombre d'expériences qu'il a
faites fur le benjoin, s'eft arrêté au procédé
qui fuit. On prend de bonne eau de chaux,
dans laquelle même il eft avantageux de iaif-
fer de la chaux en excès on la fait digé-
rer portion par portion fur du benjoin réduit
en poudre fine en remuant continuellement
le mêlange. Après une demi-heure de di-
geilion on décante & on remet de nouvelle
eau de chaux, & ainG plufieurs fois, juf-
qu'à ce qu'on s'apperçoive que feau de chaux
ne fe neutralife plus. On raflernble toutes les
liqueurs on les rapproche par évaporation
& quand elles font réduites autant qu'elles le
peuvent être fans criftallifer on laiffe refroidir:
on verfe de l'acide muriatique goutte à goutte,
jufqu'à ce qu'il ne fe fane plus de précipité. La
fubftance qu'on obtient par ce procédé eft
l'acide benzoïque concret.
Tableau des combinaîfons du Radical camphoriqrie
oxygéné, ou Acide camphorique, avec les bafes fa-
lifiables par ordre alphabétique.

Nota, Toutes ces combinaîfons iroicnç inconnues aux anciens Cbmiiftes.


OBSERVATIONS
OBSERVATIONS
Sur l'Acide camphorique & fur le Tableau
de fes combinaijbns.
L E camphre eft
une efpèce d'huile eflentielle
concrète, qu'on retire par fublimation d'un lau-
rier qui croît à la Chine & au Japon. M. Kofe-
garten a diflillé fufqu'à huit fois de l'acide ni-
trique fur du camphre, & il eu
parvenu ainfi
à l'oxygéner & à le convertir
en un acide très-
analogue à l'acide oxalique. Il en differe
ce-
pendant à quelques égards, & c'eft ce qui nous
a déterminé à lui conferver jufqu'à nouvel
ordre, un nom particulier.
Le camphre étant un radical carbone-hydreux
ou hydro-carboneux il n'eft pas étonnant qu'eu
l'oxygénant il forme de l'acide oxalique de
l'acide malique & plufieurs autres acides vé-
gétaux. Les expériences rapportées par M.
Kofegarten ne démentent pas cette conjecture,
8c la plus grande partie des phénomènes qu'il
a obfervés dans la combinaifon de cet acide
avec les bafes fahfiables s'obfervent de même
dans les combinaifons de l'acide oxaIique ou de
l'acide malique; jeferois donc affez porté à re-
garder l'acide camphoriquecomme un mélange
d'acide oxalique & d'acide malique.
Ta S X E JL u des combinaijhns du Radical
gallique oxygéné, ou Acide gallique; avec
les bafesfalifiables rangees par ordre alpha-
bétique.

Nota. Tomes cescombinaifons ont été inconnues aux anciens


Chîmifter.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide gallique, & fur le Tableau
de jès comMnaîfons*.
L'A G I D E
gallique ou principe aftringent fe
tire de la noix de galle, foit par la fimple in-
fuGon ou décodiou dans l'eau foit par une
distillation à un feu très-doux. Ce n'eft que de-
puis un très-petit nombre d'années qu'on a
donné une attention plus particulière à cette
fubftance. MM. les Commiflaires de l'Acadé-
mie de Dijon en ont fuivi toutes les combinai-
fons & ont donné le travaü le plus complet
qu'on eût fait jufqu'alors. Quoique les propriétés
acides de ce principe ne foient pas très-mar-
quées, il rougit la teinture de tournefol il
décompofe les fulfures, il s'unit à tous les
métaux, quand ils ont été préalablement dif-
fous par un autre acide, & il les précipite fous
différentes couleurs. Le fer, par cette combi-
naifon donne un précipité d'un bleu ou d'un
violet foncé. Cet acide, f toutefois il mérite
ce nom, fe trouve dans un grand nombre de
végétaux tels que le chêne, le faule, l'iris des
marais, le fraifer, le nimphea, le quinquina,
l'écorce & la fleur de grenade, & dans beau-
abfolu-
coup de bois & d'écorces. On ignore
ment quel efl fon radical.
TA B X EA tr des combinaijbns du Radical lacti-
que oxygéné, ou Acide laâique, avec les bafes
falifiables, par ordre alphabétique.

Nota. Toutes ces combinaifons ont été inconnues anx anciens


Chimiftes.
OBSERVATIONS
Sttr l'Acide laâique &fur le Tableau
de fes combinaifons.
jVx. Schéele eft celui auquel nous devons
les feules connoiffances exactes que nous ayons
fur l'acide lactique. Cet acide fe rencontre dans
le petit lait, & il y efl uni à un peu de terre.
Pour l'obtenir on fait réduire par évaporatio
du petit lait au huitième de fon volume on
filtre pour bien féparer toute la partie cafeufe;
on ajoute de la chaux qui s'empare de l'acide
dont il eft queftion & qu'on en dégage enfuite
par l'addition de l'acide oxalique on fait en elfet
que ce dernier acide forme avec la chaux un
fel infoluble. Après que l'oxalate de chaux a
été féparé pat décantation on évapore la li-
queur jufqu'à confiftance de miel on ajoute de
l'efprit-de-vin qui diffout l'acide & on filtre
pour en féparer le fucre de lait & les autres
fubftances étrangères. II ne refle plus enfüite
pour avoir l'acide laétique feul, que de chaifer
l'efprit-de-vinpar évaporation ou par diflillation.
Cet acide s'unit avec prefquc toutes les bafes
falifiables & forme avec elles des fels incriftal-
lifables. Il paraît fe rapprocher ? à beaucoup
d'égards de l'acide acéteux.
V iîi
TaSLEAV des combinaifûns du Radical fae~
cholaàique oxygéné, ou Acidefacçholaàique
falifiables, dans l'ordre de leur
avec les bzifes
affinité avec cet acide.

Nota Toutes ces combinaifons ont été inconnues des anciens


Clumifies.
OBSERVATIONS
Sur V

def
Acide faccholaâique & fur
combinaifons.
le Tableau

ON peut extraire du petit lait par évapora-


tion, une efpèce de fucre qui a beaucoup de
rapports avec celui des cannes à fucre 3 & qui
efL très-anciennement connu dans la pharmacie.
Ce lucre efl fufceptible, comme le fucre or-
dinaire, de s'oxygener par diïïërens moyens
& principalement par fa combinaifon avec l'a-
cide nitrique: on repaffe à cet effet pluGeurs
fois de nouvel acide; on concentre enfuite la
liqueur par évaporation on met à criftallifer
& on obtient de l'acide oxalique en même
tems il fe fépare une poudre blanche très-
fine, qui eu: fufceptible de fe combiner avec
les alkalis avec l'ammoniaque avec les
terres même avec quelques métaux. Cefl:
à cet acide concret découvert par Schéele3
qu'on a donné le nom d'acide faccho-lactique.
Son aâion fur les métaux eft peu connue; on
fait feulement qu'il forme avec eux des fels
très-peu folubles. L'ordre des affinités qu'on a
fuivi dans le Tableau eft celui indiqué par M.
Bergman.
Tableau des combinaifons du Radical formé-
que oxigené ou. Acide formique avec les
bafes falifiables dans l'or.dre de leur affinité
avec cet acide.

Nota. Toutes ces combinaifons ont été inconnues des anciens


ChimilIes
O B S E R VAT I O N S
Sur l'Acide forrnique & fur le Tableau
de Jes combinaijbns.
JLj'Acide formiquea été connu dès le fiècle
dernier. Samuel Fisher eft le premier qui l'ait
obtenu en diftillant des fourmis. M. Margraff
a iuivi ce même objet dans un Mémoire qu'il
a publié en 174.5; & MM. Ardwiffbn & Oclim
dans une differtation qu'ils ont publiée à Léipfic
en 1777.
L'acide formique fe tire d'une groffe efpèce
de fourmi rouffe, formica rufa qui habite les
bois & qui y forme de grandes fourmilières.
Si c'eft par diftilîation qu'on veut opérer, on
introduit les fourmis dans une cornue de
verre ou dans une cucurbite garnie de fon
chapiteau on dilUHe à une chaleur douce, &
on trouve l'acide formique dans le récipient:
on en tire environ moitié du poids des fourmis.
Lorsqu'on veut procéder par voie de Jixi-
viation, 011 lave les fourmis à l'eau froide, on
les étend fur un linge & on y paife de l'eau
bouillante, qui fe charge de la partie acide on
peut même exprimer légèrement ces infedes
dans le linge, & l'acide en eft plus fort. Pour
l'obtenir pur & concentré on le rectifie & on
en fépar e le phlegme par la gelée.
Tableau des combinaifons du- Radical boni-
bique oxygéné, ou Acide bombiq'ue avec les
fubflancesfallfiables par ordre alphabétique.

Nota Toutes ces combinaifons ont été inconnues aux anciens


Chimiftes.
OBSERVATIONS
Srtr l'Acide bombique & fur le Tableau
de fes combinaifons.

-Ljoksque le ver à foie fe change en crifa-


lîde fes humeurs paroiffent prendre un carac-
tère d'aeidité. Il laifTe même échapper au mo-
ment où il fe transforme en papillon une li-
queur roùflfe très-acide, qui rougit le papier
bleu & qui a fixé l'attention de M. Chauffier,
membre de l'Académie de Dijon. Après plu-
feurs tentatives pour obtenir cet acide pur,
voici le procédé auquel il a cru devoir s'arrêter.
On fait infufer des crifalides de vers à foie dans
de l'alcohol ce diiïblvant fe charge de l'acide,
fans attaquer les parties muqueufies ou goin-
meufes & en faifant évaporer l'efprit de-vin,
on a l'acide bombique affez pur. On n'a pas
encore déterminé avec précifon les propriétés
& les affinités de cet acide. Il y a apparence
que la famille des infeâes en fourniroit beau-
coup d'analogues. Son radical ainf que celui
de tous les acides du règne animal paroît être
compofé de carbone, d'hydrogène d'azate &
peut-être de phofphore.
Tableau des combinaifons du Radical féba-
cique oxygéné, ou Acide Jébacique. avec les
bafes falifiables, dans l'ordre de leur affinité
avec cet acide.

Nota. Toutes ces combinaifons ont été inconnues aux ancieas


Chimifies.
OBSERVATIONS
Sur l'Acide flbacique, & fltr le Tableau
de fes combinaifons,

Jlour obtenir l'acide fébacique, on prend du


fuif qu'on fait fondre dans un poëlon de fer;
on y jette de la chaux vive pulvérifée & on
remue continuellement. La vapeur qui s'élève
du mélange eft très-piquante, & on doit tenir
les vaifïeaux élevés afin d'éviter de la refpirer
Sur la fin on hauffe le feu. L'acide fébacique
dans cette opération fe porte fur la chaux &
forme du fébate calcaire, efpèce de fel peu fo-
iuble pour le féparer des parties graffes dont
il eft empâté, on fait bouillir à grande eau la
mafle; le fébate calcaire fe diffout le fuif
fe fond & fumage. On fépare enfuite le fel en
faifant évaporer l'eau, on le calcine à une
chaleur modérée; on rediffbut, on fait criffal-
lifer de nouveau & on parvient à l'avoir pur.
Pour obtenir l'acide libre on verfe de l'a-
cide fûlfurique fur le fébate de chaux ainfi pu-
rifié, & on diflille; l'acide fébacique paîlè clair
dans le récipient.
Tas le au des combinaifons du Radical litlzique
oxygéné, ou Acide lithique, avec les bafes
falifiables rangées par ordre alphabétique.

Nota, Toutes ces combinzifons opt été inconnues aux âncienSj


OBSERVATIONS
Sur V Acide lithique & fur le Tableau
de fes combinaifons,

LE calcul de la veffîe d'après les dernières


expériences de Bergman & de Schéele 5 paroîtroït
être une efpèce de fel concret à bafe terreule
légèrement acide, qui demande une grande
quantité d'eau pour être diflbus. Mille crains
d'eau bouillante en diflblvent à peine trois grains,
& la majeure partie recriftallife par le refroi-
diiïement. C'eil cet acide concret auquel M. de
Morveau a donné le nom d'acide lithiafique
& que nous nommons acide lithîque. La na-
ture & les propriétés de cet acide font encore
peu connues, Il y a quelqu'apparence quec'eft
un fel acidule déjà combiné à une bafe &
plufieurs raifons me portent à croire que c'eh
un phofphate acidule de chaux. Si cette pré-
fomption fe confirme, il faudra le rayer de la
clalfe des acides particuliers.
Tableau des combinaifons du Radical pruffî-
que oxygéné, ou Acide prufftque avec les bafes
falifzaùles dans tordre de leur affinité aveé
cet acide.

Nota. Toutes ces combinaifonsont écé inconnues aux anciens.


OBSERVATIONS
OBSERVATIONS
Sur l'Acide prujjique & fur le Tableau
de fes combinaifons.
«/E
ne m'étendrai point ici fur les propriétés
de l'acide pruffique ni fur les procédés qu'on
emploie pour l'obtenir pur & dégagé de toute
combinaifon. Les expériences qui ont été faites
à cet égard, me paroiflent laiffer encore quel-
ques nuages fur la vraie nature de cet acide. Il
me fuffira de dire qu'il fe combine avec le fer, &
qu'il lui donne la couleur bleue qu'il eft éga-
lement fufceptible de s'unir avec prefque tous
les métaux, mais que les alkalis, l'ammonia-
que & la chaux le leur enlèver.t en vertu de
leur plus grande force d'affinité. On ne connoît
point le radical de l'acide prufïîque; mais les
expériences de M. Schéele & fur tout celles de
M. Berthollet, donnent lieu de croire qu'il eft
compofé de carbone & d'azote; c'eft donc un
acide à bafe double quant à. l'acide phofpho-
rique qui s'y rencontre, il paraît, d'après les
expériences de M. Haffenfratz, qu'il y eft acci-
dentel.
Quoique l'acide pruffique s'unii'e avec les
métaux, avec les alkalis & avec les terres, à
]a manière des acides, il n'a cependant qu'une
partie des propriétés qu'on a coutume d'attri-
Tbuer aux acides. Il feroit donc poffible que ce
fût improprementqu'on l'eût rangé dans cette
dalle. Mais, comme je l'ai déjà fait observer}
il me paroît difficile de prendre une opinion
déterminée fur la nature de cette fubftance,
jufqu'à ce que la modère ait été éclaircie par
de nouvelles expériences.

Fin du Tome premier.

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