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David Gilles
Le rôle du juge face aux droits fondamentaux garantis par des normes fondamentales :
France-Canada, une vision croisée
Indexation
Droits et libertés ; Charte canadienne des droits et libertés ; interprétation ; Droit comparé
2. Le juge Breyer ajoutait alors « J'ai écouté avec un certain intérêt les débats sur la constitution européenne. Pourquoi ?
Parce que cette constitution c'est un effort pour résoudre les grands problèmes d'un gouvernement démocratique à
grande échelle. Nous, aux États-Unis, nous prenons un grand intérêt à ce qui arrive en Europe - non pas par politesse
- mais parce que les solutions qu'on trouvera ici seront peut-être pertinentes chez nous, et en tous les cas très
instructives » ; ibid .
3. J.-J. ROUSSEAU, Du contrat social ou principes du droit politique , Amsterdam, M.M. Rey, 1762, Livre II,
Chap. IV, p. 61.
5. C'est une « catégorie hors normes », « catégorie très ouverte en ce sens que celle-ci s'avère susceptible d'accueillir en
son sein toutes sortes de droits, quels que soient leurs objets, leurs titulaires, leurs sources formelles... » ; E. PICARD,
« L'émergence des droits fondamentaux en France », Actualité juridique. Droit administratif , 20 juillet-20 août 1998,
p. 6-42, p. 8. Sur les différents sens et concept que revêt la notion, voir O. PFERSMANN, « Esquisse d'une théorie des
droits fondamentaux », L. FAVOREU, Droit des libertés fondamentales , Dalloz, 2000, p. 89 et s. ainsi que P.
FRAISSEIX, « Les droits fondamentaux, prolongement ou dénaturation des droits de l'Homme ? », Revue de droit
public , 2001, p. 531.
7. Ibid. , p. 212.
8. Sur cette question et les débats au sein des théoriciens du droit public français autour de la notion de droits de
l'homme, voir Ph. RAYNAUD, « Des droits de l'homme à l'État de droit. Les droits de l'homme et leurs garanties chez
les théoriciens français classiques du droit public », Droits , 1985, 2, p. 61-73.
9. E. PICARD, « L'émergence des droits fondamentaux en France », L'Actualité Juridique. Droit administratif ,
20 juillet-20 août 1998, p. 6-42.
o
10. Sur les implications de cette notion, voir M. TROPER, « Le concept d'État de droit », Droits , 1992, n 15,
p. 51-63, ainsi que les ouvrages plus généraux Pour une théorie juridique de l'Etat , PUF, coll. Léviathan, 1994 et La
théorie du droit, le droit, l'Etat , PUF, coll. Léviathan, 2002.
12. G. DRAGO,o « Les droits fondamentaux entre juge administratif et juges constitutionnel et européens », Droit
administratif , n 6, juin 2004.
13. Pour une comparaison générale des systèmes nationaux et européens, V.J. RIDEAU, « Les garanties
juridictionnelles des droits fondamentaux dans l'Union européenne », S. LECLERC, J.-F. AKANDJI-KOMBÉ, M.-J.
REDOR, L'Union européenne et les droits fondamentaux , Bruxelles, Bruylant, 1999, p. 75 et s.
14. Pour une synthèse de cette idée, voir R. BACHAND, « L'indétermination et l'interprétation chez les positivistes
analytiques : un échange avec Austin, Kelsen, Hart et... Dworkin », Revue de droit d'Ottawa , vol. 37, n. 1, 2005-2006,
Faculté de droit, Section de common law, p. 37-70, p. 50-51.
15. R. DWORKIN, « La théorie du droit comme interprétation », Droit et société , I, 1985, p. 99-114.
16. M. TROPPER, « Les juges pris au sérieux ou la théorie du droit selon Dworkin », Droit et société , 2, 1986,
p. 53-70.
17. Sur cette logique et son opposition à la démocratie délibérative, qui peut se cristalliser dans une opposition, quelque
peu outrée, entre Rawls et Habermas, voir S. COURTOIS, « Droit et démocratie chez John Rawls et Jürgen Habermas :
fondationnalisme des droits ou démocratie délibérative ? », Politique et sociétés , vol. 22, n. 2, 2003, p. 103-124 ainsi
que, pour une vision différente, B. MELKEVIK, Horizons de la philosophie du droit , Paris, L'Harmattan et Ste-Foy,
Les presses de l'Université Laval, p. 91-150.
19. A. Garapon et I. Papadopoulos soulignent cette caractéristique des États-Unis qui fait que ce ne sont pas des élus
démocratiques, mais des juges qui ont tranché des questions fondamentales pour la société ; cf. A. GARAPON, I.
PAPADOPOULOS, Juger en Amérique et en France , Paris, Odile Jacob, 2003.
20. Il en est ainsi en ce qui concerne le droit en matière d'union de personnes de mêmeresexe. Par suite de l'affaire du
mariage homosexuel de eBègles, annulé en première instance par le TGI de Bordeaux (1 civ., 27 juillet 2004) puis en
appel (CA Bordeaux, 6 ch. Civ., 19 avril 2005), la Cour de Cassation vient de statuer en faisant une analyse classique
de la question, rejetant le mariage de personnes de même sexe. Dans son arrêt, la plus haute juridiction française estime
« que, selon la loi française, le mariage est l'union d'un homme et d'une femme » et « que ce principe n'est contredit par
aucune des dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme et de la Charte des droits fondamentaux de
l'Union européenne qui n'a pas en France de force obligatoire ». Le 20 février, la Cour de Cassation a estimé illégale
l'adoption au sein de couples homosexuels. Ces deux décisions en moins de trois semaines montrent re
que la Cour de
Cassation se garde de précéder les avancées - les attentes - de la société. cf. Cour de Cassation, 1 civ., MM. Chapin et
Charpentier, mardi 13 mars 2007.
21. Ce phénomène n'est toutefois pas général. Le juge en « complémentarité de régulation » jouit ainsi de plus en plus
de pouvoir, notamment en matière économique, qui place les acteurs sur un terrain autre que le droit et appelle à un
« dialogue à entretenir et à développer entre l'économie et le droit » ; cf. J.-J.o ISRAEL, « La complémentarité face à la
diversité des régulateurs et des juges », Les Petites Affiches , 23 janv. 2003, n 17, p. 24.
23. Cf. J.-P. JACQUÉ, « La protection juridictionnelle des droits fondamentaux dans l'Union européenne. Dialogue
entre le juge et le « constituant » » , Actualité juridique. Droit administratif , 2002, p. 476-480.
A. Textes et sémantique
La plus grande différence, lorsqu'on cherche à comparer les deux systèmes juridiques de protection
des droits fondamentaux réside dans l'homogénéité et la modernité de la Charte canadienne face à la
multitude de textes qui fondent les droits fondamentaux dans le régime juridique français. Si la
constitution de 1958 ne comporte pas de Charte à proprement parler 25 , elle renvoie par son
Préambule aux droits de l'homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu'ils ont été
22. Cette affaire a mis au jour d'une part la question du handicap et du droit à la vie et d'autre part, plus prosaïquement,
le rôle du juge sur les questions bioéthiques. Le différend oppose madame Perruche et les médecins qui l'ont suivie
pendant sa grossesse. Pendant cette période, elle contracte la rubéole. Face aux risques d'atteinte in utero de l'enfant,
elle émet le souhait, devant son médecin, de recourir à une interruption volontaire de grossesse si les résultats des
analyses médicales montrent qu'elle développe cette affection ou qu'elle n'est pas immunisée contre celle-ci. Le
médecin fait procéder à une recherche d'anticorps de la maladie : le laboratoire d'analyses biologiques commet une
erreur et le médecin annonce, à tort, à sa patiente qu'elle est immunisée contre la maladie. Madame Perruche poursuit sa
grossesse et donne naissance à un enfant lourdement handicapé (handicaps mentaux et physiques). Le couple saisit la
justice, recherche la responsabilité du médecin et du laboratoire d'analyse pour faute et demande à titre personnel
réparation de leur préjudice et de celui de leur enfant, en tant que représentants légaux. Dans cette affaire qui a défrayé
la chronique, la Cour de Cassation a décidé de consacrer une action exercée au nom d'un enfant atteint d'une
malformation congénitale contre le médecin qui ne l'avait pas décelée. À la suite de cette décision et du tollé qu'elle a
provoqué, le législateur est intervenu. Dans toutes les affaires délibérées en Assemblée plénière sur cette même
question, l'avocat général s'est efforcé de limiter l'interprétation faite de ces arrêts. Dans ses conclusions, l'avocat
général indique que les actions en justice des familles sont motivées par l'insuffisance d'aides financières de l'État
offertes aux parents et victimes de handicaps sévères. Ceux-ci doivent faire face à d'importants investissements liés à
l'état de santé d'une personne handicapée. Or la Cour constate la rupture de l'égalité entre ceux qui agissent en justice et
obtiennent indemnisation, et ceux qui s'abstiennent. Si la Cour de Cassation pallie les inerties du législateur, elle invite
cependant ce dernier à légiférer, regrettant qu'il n'ait pas saisi l'opportunité de l'examen de la loi sur les droits des
malades pour traiter du problème des personnes handicapées. Cour de Cassation, Ass. plén., 17 novembre 2000. La loi
du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé a mis fin à cette jurisprudence en
édictant le principe selon lequel « Nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du fait de sa naissance ». Désormais le droit à
réparation des parents se limite au seul préjudice moral. Il leur est impossible de réclamer une indemnisation totale
destinée à couvrir les frais relatifs au handicap. La compensation des coûts matériels du handicap, même causé par une
faute médicale, relève - en principe - de la solidarité nationale. L'apport essentiel du texte est clairement affiché dans
l'alinéa 1 : « Nul ne peut se prévaloir d'un préjudice du seul fait de sa naissance » et a pour effet d'empêcher l'enfant de
se plaindre de sa naissance, de présenter toute demande de réparation en raison de sa naissance. L'alinéa 2 nuance
toutefois cette affirmation en prévoyant la possibilité pour une personne dont le handicap surgit à la naissance par faute
médicale (faute provoquant directement le handicap, l'aggravant ou empêchant de prendre les mesures susceptibles de
l'atténuer) de rechercher la responsabilité du médecin fautif. Sur ces questions, voir notamment, pour les questions
éthiques, le n. 35 de la revue Droits avec J. SAINTE-ROSE, « À propos de l'affaire Perruche », Droits , 35,
2002, p. 142-146, A. SÉRIAUX, « Morales sur Perruche », ibid ., p. 134-141, B. EDELMAN, « L'arrêt Perruche : une
liberté pour la mort ? », ibid ., p. 151-161 et M. FABRE-MAGNAN, « L'affaire Perruche : pour une troisième voie »,
ibid ., p. 119-133.
24. « For one thing, it puts Canada in the mainstream of the post World War II movement towards conscious
recognition of, and protection for, fundamental human rights. For another thing, the Charter is the logical culmination of
Canadian developments in the field of human rights - it builds on provincial and federal human rights codes and the
Canadian Bill of Rights. At bottom, the Charter protects those basic values which most Canadians share and cherish » ;
B. DICKSON, Remarks by the right honourable Brian Dickson to the Canadian Club , Ottawa, Ontario, March 12,
1987, p. 10.
25. Dans certains de ses articles, elle énonce néanmoins des principes qui touchent aux droits et libertés des individus
comme le principe d'égalité devant la loi (art. 2), de l'égalité de suffrage (art. 3), de la libre formation des partis
politiques (art. 4), de l'indépendance de l'autorité judiciaire (art. 64), de la liberté individuelle (art. 66) ou de la libre
administration des collectivités territoriales (art. 72) ; cf. « Normes de valeur constitutionnelle et degré de protection des
droits fondamentaux », Revue Française de Droit Administratif , 6(3), mai-juin 1990, p. 317-335, p. 319.
27. On trouve parmi ces principes, selon la jurisprudence du Conseil constitutionnel, la liberté d'association, le principe
des droits de la défense, la liberté de l'enseignement, l'indépendance de la juridiction administrative, la compétence du
Conseil d'État dans le contrôle de légalité des actes administratifs, l'indépendance des enseignants du supérieur,
l'importance des attributions de l'autorité judiciaire en matière de protection de la propriété immobilière ; Cf. « Normes
de valeur constitutionnelle et degré de protection des droits fondamentaux », Revue Française de Droit Administratif ,
6(3), mai-juin 1990, p. 317-335, p. 320.
o
28. N. 83-164 DC du 29 déc. 1983, R.C.C., p. 67, cons. n 28.
er
29. Il en est ainsi avec les lois du 22 avril 1905 et la loi du 1 décembre 1905 concernant la séparation des Églises et
de l'État conjuguée à la jurisprudence du Conseil d'État (cf. C.E. Ass. 28 mai 1954, Barel, Recueil du Conseil d'État ,
p. 308 et C.E. Ass. 29 juillet 1950, Comité de défense des libertés professionnelles des experts comptables, Recueil du
Conseil d'État , p. 492.
30. Sur ces questions, voir la thèse de O. DE SCHUTTER, Fonction de juger et Droits fondamentaux. Transformation
du contrôle juridictionnel dans les ordres juridiques américains et européens , Bruxelles, Bruylant, coll. Bibliothèque
de la Faculté de droit de l'Université catholique de Louvain, vol. XXIX, 1999, p. 167 et s.
o
31. N. 84-181 D.C. des 10 et 11 oct. 1984, R.C.C., p. 78, cons. n 37.
o
32. N. 85-198 D.C. du 13 décembre 1985, R.C.C., p. 78, cons. n 11.
34. G. GLENARD, « Les critères d'identification d'une liberté fondamentale au sens de l'article L.521-12 du code de
justice administrative », AJDA , 2003, p. 2009.
35. Ibid .
38. Celle-ci fait une interprétation autonome de l'article 68 de la Constitution, différente de celle odu Conseil
constitutionnel. Sur cette question, voir Cass., Ass. plén., 10 octobre 2001, Breisacher : Bull. civ. 2001, n 11, p. 25 ;
Revue de droit public , 2001, p. 1613. Sur cet arrêt et la question de la responsabilité pénale du o
président de la
République, voir le dossier et la bibliographie de la Revue française de droit constitutionnel , 2002, n 49, p. 5 et s.
39. Ainsi la décision du 24 février 2001 par laquelle le Conseil d'État érige en liberté fondamentale le principe du
caractère pluraliste de l'expression des courants de pensée et d'opinion, se différenciant ainsi de la position adoptée par
le Conseil constitutionnel, ce dernier n'envisageant
o
ce principe que comme un objectif de valeur o
constitutionnelle. Cf.
CE (ord.), 24 février 2001, M. Tiberi , req., n 230611 ; Conseil constitutionnel, décision n 84-181 DC, des 10 et
11 octobre 1984, Entreprise de presse , RJC- I, p. 199.
42. J. RIVERO, « Rapport sur les notions d'égalité et de discrimination en droit public français », Travaux de
l'association Henri Capitant , t. XIV, p. 351.
43. N.73-51 D.C. du 27 dec. 1973, R.C.C. p. 25, N. 75-56 D.C. du 23 juil. 1975, R.C.C. p. 22 et N.86-213 D.C. du 3
sept. 1986, R.C.C. p. 122, cons. 24
44. N.88-248 D.C. du 27 janv. 1989, R.C.C. p. 18 cons. 9 et N.89-262 D.C. du 7 nov. 1989 R.C.C. p. 90.
45. N.88-244 DC du 20 juil. 1988, R.C.C. p. 119 cons. 6 et N. 89-271 D.C. du 10 janv. 1990, cons. n. 23.
46. Par exemple N. 89-268 D.C. du 29 dec. 1989, R.C.C. p. 110 ou dans le domaine économique N. 89-254 D.C. du 4
juil. 1989, R.C.C. p. 41.
47. Cf. A. TREMBLAY, « Le principe d'égalité et les clauses antidiscriminatoires », Charte canadienne des droits et
libertés : concepts et impacts , Montréal, Thémis, 1985, p. 333 et s.
48. Sur cette notion, voir, dans le même recueil, l'article de D. PROULX, « L'égalité : 22 ans de tâtonnements et
d'hésitations », Les 25 ans de la Charte canadienne des droits et libertés , Éditions Yvon Blais, 2007.
49. 15 . (1) La loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et
au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la
race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques.
50. « 9. Considérant que le principe d'égalité ainsi invoqué ne s'oppose pas à ce que le législateur déroge à l'égalité pour
des raisons d'intérêt général dès lorso que les différences de traitement qui en résultent sont en rapport direct avec l'objet
de la loi qui l'établit ; » Décision n 96-380 DC du 23 juillet 1996, Loi relative à l'entreprise nationale France Télécom
.
51. Law c. Canada (Ministère de l'Emploi et de l'Immigration) , [1999] 1 R.C.S. 497, REJB 1999-11412 .
52. Ainsi, l'arrêt de la Cour d'appel d'Orléans du 21 mars 1996 disposant que la disposition du règlement intérieur d'un
magasin exigeant que les salariés conservent, en vue d'un éventuel contrôle, le ticket de caisse des achats oeffectués dans
le magasin, était contraire à la dignité de la personne du salarié ; CA Orléans, 21 mars 1996, Juris-Data n 045426.
53. Juge M. ROBERT, « Justice sociale et égalité : la jurisprudence de Claire l'Heureux-Dubé, un héritage hors du
commun », allocution prononcée lors du banquet sous la présidence de l'honorable Claire L'Heureux-Dubé, Château
Frontenac, Québec, 22 mars 2003.
54. Voir sur cette question, L. FAVOREU, « Les juges constitutionnels et la vie », Droits , 1991, 13, p. 75-85.
o
55. C.C. 15 janvier 1975 - Décision n 74-54 D.C.
56. En l'espèce les articles 37 et 38 du décret du 6 septembre 1995 portant code de déontologie médicale reposaient sur
une économie toute différente : l' article 37 établissait que en toutes circonstances, le médecin doit s'efforcer de soulager
les souffrances de son malade, l'assister moralement et éviter toute obstination déraisonnable dans les investigations et
la thérapeutique ; que l' article 38 dispose : « Le médecin doit accompagner le mourant jusqu'à ses derniers moments,
assurer par des soins et mesures appropriés, la qualité d'une vie qui prend fin, sauvegarder la dignité du malade et
réconforter son entourage. Il n'a pas le droit de provoquer délibérément la mort. » Appliquant ces textes, le Conseil de
l'ordre avait sanctionné le médecin pratiquant un acte d'euthanasie active. Le Conseil d'État va recevoir cette solution,
sans chercher à fonder par l'interprétation une nouvelle me
solution juridique : « Considérant qu'après avoir mentionné
l'ensemble des graves pathologies dont était atteinte M J... et les traitements qui lui avaient été prodigués, y compris
les soins palliatifs à base de morphine pour une personne en « fin de vie programmée », la section disciplinaire du
Conseil national de l'Ordre des médecins a retenu à l'encontre de M. Duffau le fait, d'ailleurs non contesté, d'avoir
pratiqué sur la malade l'injection d'une dose de chlorure de potassium destinée à provoquer immédiatement la mort par
arrêt cardiaque ; qu'elle a estimé que cet acte n'entrait pas au nombre de ceux prescrits aux médecins par les articles 37
et 38 précités du code de déontologie médicale mais constituait un acte d'euthanasie active, destiné à provoquer
délibérément la mort de sa patiente ; qu'elle a enfin relevé que cet acte était interdit par l' article 38 du code de
déontologie, quelles que soient les circonstances, et notamment celles, invoquées par M. me Duffau, tirées des souffrances
de la patiente et des inconvénients pour l'entourage et l'environnement immédiat de M J... de la progression de la
gangrène dont elle était atteinte ; qu'elle a ainsi suffisamment motivé sa décision d'infliger au requérant la sanction de
l'interdiction temporaire d'exercer la médecine en répondant à ses moyens tirés de ce qu'il n'y avait pas lieu de
distinguer euthanasie active et euthanasie passive et de ce que l'état dans lequel se trouvait la patiente était de nature à
justifier son comportement » ; C.E. 29 décembre 2000, n. 212813.
58. Cf. G. GLENARD, « Les critères d'identification d'une liberté fondamentale au sens de l'article L. 521-2 du Code de
justice administrative », A.J.D.A , 2003, p. 2008.
60. « Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires
à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit
privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice de l'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et
manifestement illégale. Le juge des référés se prononce dans un délai de quarante-huit heures ». Code de justice
administrative, art. L. 521-2.
61. Suivant la jurisprudence du haut Conseil, il semble qu'une liberté soit « fondamentale » au sens de l'article L. 521-2
du Code de justice administrative, lorsque, d'une part, elle est prévue par une règle de valeur supraréglementaire
invocable et que son objet est suffisamment important ; cf. V. MORALES, op. cit. , p. 4. pour justifier l'application de
la protection juridictionnelle prévue par l'article L. 521-2
62. CE, ord. réf., 2 avr. 2001, Min. Intérieur c/ Cts Marcel, Droit administratif , 2001, comm. 155.
63. CE, sect., 28 févr. 2001, Casanovas, Revue française de droit administratif , 2001, p. 399, concl. P. Fombeur.
me
64. CE, ord. réf., 12 janv. 2001, M Hyacinthe, Droit administratif , 2001, comm. 102.
65. CE, ord. réf., 24 févr. 2001, Tibéri, Revue française de droit administratif , 2001, p. 629, note B. Maligner.
me
66. CE, sect., 30 oct. 2001, Min. Intérieur c/ M Tliba, Revue Française de droit administratif , 2002, concl. I. de
Silva.
67. 18 CE, ord. réf., 12 novembre 2001, Cne de Montreuil-Bellay, Droit administratif , 2002, comm. 41, note M.
Lombard.
68. J. RIDEAU, « La coexistence des systèmes de protection des droits fondamentaux dans la Communauté européenne
et ses États membres », AIJC , 1991, p. 12.
69. Sur cette question, voir D. DE BÉCHILLON, « De quelques incidences du contrôle de la conventionnalité
internationale des lois par le juge ordinaire ( Malaise dans la Constitution ) », Revue française de droit administratif ,
14 (2) mars-avril 1998, p. 225.
70. Devant certaines juridictions, les voies de recours sont incomplètes, on pourrait même dire « atrophiées », tant la
nécessité se fait ou se fera sentir dans l'avenir d'ouvrir de nouvelles voies de recours en vue d'assurer une meilleure
protection de ces droits ; R. DRAGO, op. cit. , p. 14.
72. C. GUARNIERI, P. PEDERZOLI, La puissance de juger. Pouvoir judiciaire et démocratie , préface d'A. Garapon,
Paris, éd. Michalon, 1996, p. 16.
73. N. 83-164 DC du 29 déc. 1983, R.C.C. p. 67. On peut citer également l'interprétation de l' article 11 de la
Déclaration des droits de 1789 qui proclame la libre communication des pensées et des opinions. Il a été interprété par
le Conseil, en se fondant également sur les principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, comme
donnant un fondement constitutionnel au principe de l'indépendance des enseignants du supérieur ; cf. n. 83-165 DC du
20 janv. 1984.
76. Comme l'affirme Luc Tremblay, il s'ensuit que « la justification, le fondement ou la raison d'être d'un droit
constitutionnel garanti et, corrélativement, d'un devoir juridique imposé à l'État dans le but de protéger tel intérêt est le
droit moral qui affirme que cet intérêt particulier est digne d'une protection constitutionnelle et qu'il constitue une raison
suffisante pour conférer un droit juridique et, corrélativement, imposer un devoir à l'État » ; L.B. TREMBLAY,
« L'interprétation téléologique des droits constitutionnels », (1995) 29 R.J.T. 470.
77. B. DICKSON, Remarks by the right honourable Brian Dickson to the Canadian Club , Ottawa, Ontario. March 12,
1987, p. 11.
78. Y. CHARTIER, Rapport 2004 de la Cour de Cassation , Cour de Cassation, Paris, Deuxième partie, Études et
documents, avant-propos.
79. « La prétention qu'il existe un consensus moral ne repose pas sur un sondage. Elle se fonde sur la façon dont le
législateur perçoit la réaction de la société face à certaines pratiques désapprouvées. Toutefois, le législateur doit aussi
être conscient des motifs sur lesquels cette réaction se fonde généralement. S'il y a eu un débat public qui a donné lieu à
des éditoriaux dans les journaux, à des discours de ses collègues, à des témoignages des groupes intéressés et des lettres,
il sera d'autant plus conscient des arguments et des positions en présence. Il doit passer en revue ces arguments et
positions et tenter d'établir lesquels constituent des partis pris ou des rationalisations, ce qui présuppose le recours à des
théories ou à des principes généraux que de grands segments de la population pourraient bien ne pas accepter, et ainsi
de suite » ; R. DWORKIN, Taking Rights Seriously , 1977, p. 255 cité par le juge Gonthier, R. c. Butler , [1992] 1
R.C.S. 523, EYB 1992-67139 .
e
81. J. AUSTIN, Lectures on Jurisprudence , vol. 2, 4 éd. Londres, J. Murray, reprint Bristol, Thoemmes Press, 2002,
p. 650.
84. H.L.A. HART, « Positivism and the Separation of Law and Morals », (1957) 71 Harvard Law Review 629.
85. Pour une perspective plus vaste de l'évocation des théoriciens du droit et des philosophes dans la jurisprudence, voir
C. BRUNELLE,
o
« L'interprétation des droits constitutionnels par le recours aux philosophes », Revue du Barreau ,
vol. 50, n 2, mars-avril 1990, p. 355-390.
86. Ainsi, selon la Cour suprême, « Lorsque le tribunal fait face à un litige privé entre des parties et qu'il est appelé à
décider en appliquant un ensemble reconnu de règles d'une manière conforme à l'équité et à l'impartialité, il agit alors
normalement en qualité d'« organisme judiciaire ». Pour emprunter les termes du professeur Ronald Dworkin, la
fonction judiciaire soulève des questions de « principe », c'est-à dire l'examen des droits opposés de personnes ou de
groupes de personnes. On peut les mettre en opposition avec les questions de « politique » qui soulèvent des opinions
divergentes quant au bien-être de l'ensemble de la collectivité, (voir l'ouvrage de Dworkin, Taking Rights Seriously
(Duckworth, 1977), p. 82 à 90) ; Renvoi relatif à la Loi de 1979 sur la location résidentielle , [1981] 1 R.C.S. 714, 1981
IIJCan 24 (C.S.C.), p. 735.
87. M. MANDEL, La charte des droits et libertés et la judiciarisation du politique au Canada , Montréal, Boréal, 1996,
p. 96-97.
88. Voir S. RIALS, « Sur Rawls : Les lumières tardives », Droits , 6, 1987, p. 143-152 et R. SÈVE, « Sur Rawls :
propos en défense », Droits , 7, 1988, p. 141-143.
89. « [...] On pourrait tout aussi bien dire que le sens littéral des mots équivaut à leur sens non contextuel. Comme le
fait remarquer le professeur Dworkin, le sens littéral ou non contextuel des mots est [TRADUCTION] « le sens que
nous leur attribuerions si nous ne disposions pas de renseignements particuliers relatifs au contexte dans lequel ils sont
employés ou à l'intention de leur auteur » : voir R. DWORKIN, Law's Empire (1986), p. 17. Le terme « concomitant »
pourrait donc avoir un certain sens s'il était dissocié du Code criminel et un sens tout à fait différent dans le contexte du
régime établi par le texte législatif en question et du but visé par celui-ci. C'est ce dernier sens qu'il nous faut déterminer
en l'espèce » ; R. c. Paré , [1987] 2 R.C.S. 618, EYB 1987-95658 , par. 16.
90. 101 « Il n'y a pas de liberté sans règles de droit et il n'y a pas de règles de droit sans une certaine restriction de la
liberté : voir R. DWORKIN, Taking Rights Seriously (1977), p. 267 » ; Operation Dismantle c. La Reine , [1985] 1
R.C.S. 441.
91. « Même si les rédacteurs de la Charte avaient entretenu certaines réserves quant au sens que cette Cour a donné,
dans l'arrêt Chromiak , au mot « détenue » employé à l'alinéa 2 c ) de la Déclaration canadienne des droits , à supposer
qu'ils en aient tenu compte, il serait tout à fait contre-indiqué, voire impossible, dans un document constitutionnel de ce
genre, de formuler des restrictions détaillées en prévision de questions comme celle soulevée dans le présent pourvoi.
Voir la distinction qui est faite entre les mots concepts et conceptions dans Dworkin, Taking Rights Seriously (1977),
p. 132 à 137. Ce processus de réexamen relève nécessairement des tribunaux » ; R. c. Therens , [1985] 1 R.C.S. 613,
par. 48.
93. Cf. F. MICHAUT, « Vers une conception postmoderne. La notion de Droit chez Ronald Dworkin », Droits , 11,
1990, p. 107-117.
94. Cf. P.W. HOGG et A.A. BUSHELL, « The Charter Dialogue Between Courts and Legislatures », (1997) 35
Osgoode Hall L.J. 75.
95. Vriend c. Alberta , [1998] 1 R.C.S. 493, REJB 1998-05585 , par. 138-139.
96. R. c. Mills , [1999] 3 R.C.S. 668, REJB 1999-15270 , par. 20, 57 et 125.
97. En l'espèce, la mise en oeuvre de la procédure établie par la loi C-46 mettait en opposition le droit à une défense
pleine et entière et le droit à la vie privée. Selon la Cour, « Aucun de ces droits ne saurait être défini de manière à
annuler l'autre, et les deux reposent sur le droit à l'égalité qui est en jeu dans le présent contexte. Aucun de ces principes
n'est absolu et n'est susceptible de l'emporter sur les autres ; ils doivent tous être définis à la lumière de revendications
opposées. Il y a lieu de donner à ces droits une interprétation fondée sur le contexte parce qu'ils sous-tendent ou
s'inspirent souvent d'autres droits en cause dans les circonstances. Il importe, cependant, d'établir une distinction entre
l'évaluation des principes de justice fondamentale au sens de l'article 7 et l'évaluation d'intérêts fondée sur l'article
premier de la Charte. La question qui se pose en vertu de l'article 7 est celle de la délimitation des droits en question
tandis que la question qui se pose en vertu de l'article premier est de savoir si le non-respect de ces limites peut être
justifié. Les droits à une défense pleine et entière, à la vie privée et à l'égalité doivent être définis dans ce contexte »,
ibid .
98. « Au paragraphe 278.5(1) du Code criminel, le législateur a complété la norme de la « pertinence probable » en
matière de communication au juge, qui avait été proposée dans l'arrêt O'Connor , par l'exigence supplémentaire que la
communication « ser[ve] les intérêts de la justice ». Cette nouvelle norme résulte d'un long processus de consultation et
est un exemple remarquable du dialogue entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif. En vertu de la nouvelle
disposition, le juge du procès doit prendre en considération les effets bénéfiques et préjudiciables de la communication
au tribunal sur le droit de l'accusé à une défense pleine et entière et sur les droits à la vie privée et à l'égalité du
plaignant ou du témoin », ibid .
99. Vriend c. Alberta , [1998] 1 R.C.S. 493, REJB 1998-05585 , par. 134.
101. « Normes de valeur constitutionnelle et degré de protection des droits fondamentaux », Revue française de droit
administratif , 6(3), mai-juin 1990, p. 317-335, p. 318.
103. P.W. HOGG et A.A. BUSHELL, « The Charter Dialogue Between Courts and Legislatures (Or Perhaps the
Charter of Rights isn't such a bad thing after all) » (1997), 35 Osgoode Hall L.J. 75, p. 105.
104. Y. CHARTIER, Rapport 2004 de la Cour de Cassation , Cour de Cassation, Paris, Deuxième partie, Études et
documents, avant-propos.
105. Sur cette question, voir B. MATHIEU, « La sécurité juridique : un produit d'importation dorénavant o
« made in
France », à propos des décisions 99-421 D.C. et 99-422 D.C. du Conseil constitutionnel », D. 2000, o
n 4, « Point de
vue », p. VII ; « La sécurité juridique, un principe qui nous manque ?o », AJDA , 20 juin 1995, n spécial, p. 151 ; M.
FROMONT, « Le principe de sécurité juridique », AJDA 1996, n spécial, p. 183 ; B. MATHIEU, « La sécurité
juridique : un principe constitutionnel clandestin mais efficient », Mélanges P. Gélard , Montchrestien, 2000, p. 302.
106. Ces heures permettent de rémunérer partiellement les heures de présence lorsqu'elles ne correspondent pas, dans
les faits, à du travail effectif. Les heures en chambre de veille correspondent bien à cette situation puisque le personnel
concerné peut dormir tout ou partie de la nuit.
108. Selon le gouvernement, en l'espèce, « l'intervention du législateur n'a eu pour objet que de prévoir des mesures
transitoires préalables à la mise en place d'un nouveau régime de calcul de la durée du travail, en limitant la portée d'une
interprétation jurisprudentielle isolée, dans un but de sécurité juridique et d'intérêt général, et non de trancher un litige
dans lequel l'État aurait été partie.
109. Selon les termes de R. PERROT, (2000) Revue trimestrielle de droit civil 630.
o
110. Cour de Cassation - Chambre sociale, Arrêt n 1937 du 24 avril 2001, Association « Etre enfant au Chesnay » c.
M. Moustapha Terki .
111. L. FAVOREU et L. PHILIP, Les grandes décisions du Conseil constitutionnel , Dalloz 1999, p. 424 et s. ; X.
PRETOT « Les validations législatives. De la Constitution à la Convention européenne des droits de l'homme », Revue
de droit public , 1998, p. 11 et s. ; J.-P. CAMBY, « Coup d'arrêt aux validations législatives : limites constitutionnelles
ou limites jurisprudentielles ? », Revue de droit public , 1996, p. 323 et s. ; J.P. CAMBY, « Validations législatives : des
strates jurisprudentielles de plus en plus nombreuses », Revue de droit public , n. 3, mai-juin 2000, p. 611-616 ;
GIRARDOT et RAYNAUD, AJDA , 1998, p.97.
o
112. La Cour de Cassation (ch. sociale, Bozkurt , 14 janvier 1999, Bull. V, n 24, p. 27) a cassé une décision en se
référant expressément à l'interprétation, par la Cour européenne, des dispositions de la Convention ; cf. J.P.
MARGUENAUD, o« L'effectivité des arrêts de la Cour européenne des droits de l'homme en France », Annonces de la
Seine , suppl. au n 14 du 19 février 2001.
113. Cour européenne des droits de l'homme, Borgers c. Belgique , 30 octobre 1991, § 24.
114. S. BOLLE, « L'inconventionnalité d'une validation législative conforme à la Constitution : l'arrêt de la Cour
européenne des droits de l'homme du 28 octobre 1999, Zielinski et Pradal et Gonzalez et autres contre France », RFD
2000 p. 1254 et s. ; A. BOUJEKA, « Les lois de validation
o
sous les fourches caudines de la Convention européenne des
droits de l'homme », Petites affiches , 8 juin 2000, n 114 ; B. MATHIEU, « Les validations législatives devant le juge
de Strasbourg », Revue française de droit administratif , 2000, p. 289.
115. Cour européenne des droits de l'homme, Borgers c. Belgique , 30 octobre 1991, § 57.
116. En l'espèce la lettre de la loi ne comporte aucune indication à cet égard. Les travaux préparatoires font apparaître
que l'intention du législateur a été de priver de base juridique toute action tendant à voir tirer les conséquences
financières de votre arrêt, précité, du 29 juin 1999. M. Chérioux, sénateur, coauteur de l'amendement ayant abouti à l'
article 29 après avoir évoqué « les craintes du milieu associatif ». Il avait, notamment exposé que « si des actions étaient
intentées par tous ceux dont les rémunérations pourraient être remises en cause » par application de cette décision,
« cela représenterait des sommes considérables, évaluées par le Syndicat national des associations de parents et amis de
personnes handicapées mentales à quatre milliards de francs ». Il avait poursuivi en soulignant le risque que
représenterait toute généralisation des contentieux pour les associations qui, connaissant de graves déséquilibres
budgétaires, seraient amenées à déposer leur bilan et aussi pour la collectivité nationale par le biais des collectivités
locales ». Alors que la ministre de l'Emploi et de la Solidarité avait donné son adhésion à cet amendement en relevant
« qu'une telle validation semble nécessaire et conforme aux critères posés par le juge constitutionnel car elle repose sur
un but d'intérêt général et ne porte pas atteinte aux décisions de justice devenues définitives » (J.O. 20 janvier 2000,
p. 992). Comme le souligne l'avocat général Kehrig, « Il résulte de ces travaux préparatoires que la situation qu'a voulu
régler le législateur présente beaucoup de points communs avec l'affaire Zielinski , l'objectif poursuivi étant la
protection des intérêts financiers d'autorités publiques et il ressort des propos mêmes du ministre que l'intérêt général
pris en considération n'a été évalué qu'à l'aune de la jurisprudence du Conseil constitutionnel dont nous venons de voir
qu'elle ne concorde pas avec celle des juges de Strasbourg à laquelle il vous appartient, pourtant,
o
de vous référer, dans
le cadre d'un contrôle de conventionnalité », Cour de cassation, Chambre sociale, Arrêt n 1937 du 24 avril 2001,
Association « Être enfant au Chesnay » c. M. Moustapha Terki .
117. Selon S. Hennion-Moreau, l' article 29 de la loi Aubry II « paralyse toute procédure en cours et interdit des
revendications à venir » et « l'on peut douter d'un tel procédé parlementaire qui a pour objet de « casser » une
jurisprudence dangereuse pour les deniers des collectivités publiques finançant les établissements privés » (S.
HENNION-MOREAU, Revue du droit sanitaire et social , 2000, p. 149). De son côté, le commentateur de la Semaine
sociale Lamy évoquait
o
le « mauvais tour joué aux salariés par l'intervention législative », A. DORANT, Semaine sociale
Lamy , 2000, n 981, p. 7.
119. R. c. Advance Cutting & Coring Ltd ., [2001] 3 R.C.S. 209, 2001 CSC 70, REJB 2001-26223 .
120. L. FAVOREU, « Les juges constitutionnels et la vie », Droits , 1991, 13, p. 75-85.
121. S. PHILIPS-NOOTENS, « La Cour suprême face à la vie, face à la mort : de valeurs et de droits », Revue du
Barreau canadien , 2000, n. 79, p. 145-173.
122. Ainsi la cause de Léonie Crevel , vieille dame et mère d'une enfant handicapée qui a été condamnée le 24 octobre
2006 par la Cour d'assise de Seine-Maritime à une peine de deux ans de prison avec sursis pour avoir tué, pour mettre
fin à ses souffrances, sa fille Florence, lourdement handicapée de 41 ans. Celle-ci était aveugle, hémiplégique,
grabataire, incontinente, épileptique et ne parlait plus depuis l'âge de 8 ans.
124. En l'espèce, Marie Humbert et le médecin Frédéric Duchaussoy avaient aidé son fils Vincent Humbert,
tétraplégique, à mourir et ont bénéficié d'un non-lieu le 28 février 2006, ce qui a évité à la justice de poser effectivement
le problème de la fin de vie devant l'opinion publique lors d'un procès.
125. Il s'agit en l'espèce de deux soignantes accusées d'euthanasie active devant les assises de la Dordogne. En l'espèce,
Paulette Druais était atteinte d'un cancer du pancréas en phase terminale. Les membres de la famille ne s'étaient pas
portés partie civile en l'affaire ; cf. Cour d'assise, Dordogne, 15 mars 2007.
128. « [120] Le débat sur les questions pertinentes existe donc toujours au Canada et personne ne peut encore prétendre
posséder la vérité ou même avoir une opinion qui retient un consensus sérieux. »
129. « [139] Force est donc de constater que même si la loi canadienne était plus avant-gardiste (si on peut dire) et
ressemblait à celles de l'Oregon, des Pays-Bas ou de la Belgique, les gestes posés par madame Houle resteraient très
répréhensibles et interdits. Du même coup, on peut dire que, même si les opinions des juges minoritaires dans
Rodriguez avaient reçu l'assentiment de la majorité, de la même façon, les gestes de madame Houle ne seraient pas
jugés conformes à la loi. »
130. S. HUFSTEDLER, « New Blocks for hold Pyramids : Reshaping the judicial system », (1971) 44 Southern
California Law Review 900-919.
131. « Il est clair qu'on ne peut pas déterminer le sens du mot « abusives » au moyen d'un dictionnaire ou des règles
d'interprétation des lois. L'interprétation d'une constitution est tout à fait différente de l'interprétation d'une loi. Une loi
définit des droits et des obligations actuels. Elle peut être facilement adoptée et aussi facilement abrogée. Par contre,
une constitution est rédigée en prévision de l'avenir. Elle vise à fournir un cadre permanent à l'exercice légitime de
l'autorité gouvernementale et, lorsqu'on y joint une Déclaration ou une Charte des droits, à la protection constante des
droits et libertés individuels. Une fois adoptées, ses dispositions ne peuvent pas être facilement abrogées ou modifiées.
Elle doit par conséquent être susceptible d'évoluer avec le temps de manière à répondre à de nouvelles réalités sociales,
politiques et historiques que souvent ses auteurs n'ont pas envisagées. Les tribunaux sont les gardiens de la constitution
et ils doivent tenir compte de ces facteurs lorsqu'ils interprètent ses dispositions. Le professeur Paul Freund a bien
exprimé cette idée lorsqu'il a averti les tribunaux américains [TRADUCTION] « de ne pas interpréter les dispositions
de la Constitution comme un testament de peur qu'elle ne le devienne » » ; Hunter c. Southam Inc ., [1984] 2 R.C.S.
145, par. 16.
132. P. TRUCHE, « L'éthique du juge : les dépendances du juge », S. GABORIAU et H. PAULIAT (textes réunis par),
Justice et démocratie, Entretiens d'Aguesseau , Pulim, 2002, p. 141-144.
134. Ainsi, pour Guy Durand, les juges ne sont pas toujours les mieux placés pour déterminer les « limites
raisonnables » des droits. Ils interprètent pour une part selon leur personnalité, leurs croyances, leurs valeurs et leur
classe sociale. Ils sont plus sensibles à la dimension individuelle des droits qu'à leur dimension collective, plus attentifs
à une interprétation théorique qu'aux compromis administratifs et politiques. Ils ont parfois tendance à outrepasser leur
rôle et à se prendre pour les nouveaux législateurs. Aussi est-il légitime pour le gouvernement, dans certains cas, voire
pour les choix de projet sociétal, d'imposer sa propre interprétation des droits et de leur extension » ; G. DURAND,
« Le pouvoir de déroger aux chartes ou De la sauvegarde de la suprématie du parlement », Six études d'éthique et de
philosophie du droit , 2006, Liber, p. 107-124, p. 124.
135. F. MORIN, Pourquoi juge-t-on comme un juge ? Bref essai sur le jugement , Montréal, Liber, 2005, p. 42-50.
136. Rapporté par G. DURAND, « De l'interprétation des lois ou De la prétendue objectivité des juges », Six études
d'éthique et de philosophie du droit , 2006, Liber, p. 55-67, p. 67.