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Journées Nationales de Géotechnique et de Géologie de l’Ingénieur JNGG2012–Bordeaux 4-6 juillet 2012
1. Introduction
De nombreuses observations de par le monde ont montré que la géologie locale
influence grandement les mouvements sismiques observés et ce quel que soit
l’éloignement du séisme. Ainsi, les dépôts sédimentaires récents (argiles, sables et
autres dépôts peu consolidés) peuvent augmenter l’amplitude et la durée des ondes
sismiques à certaines fréquences et conduire à des dommages beaucoup plus
importants que pour des sites rocheux à la même distance. Le microzonage sismique
vise à cartographier à l’échelle d’une ville ces effets de site lithologiques, en
délimitant des zones dont la réponse sismique est homogène (Roullé et al., 2012).
Cet outil de cartographie connait à juste titre un grand succès, car il fournit des
orientations pertinentes pour les schémas de développement urbain et pour des
éventuelles stratégies de confortement du bâti existant. Cependant l’exercice
présente également ses limites et ses incertitudes liées, aux techniques de
caractérisation des effets de site, aux modèles de simulation, à la représentativité
des données disponibles, à la complexité du milieu géologique rencontré.
En pratique, ces études de microzonages sismiques se basent en grande partie sur
la méthode dite H/V (Nakamura, 1989), basée sur les mesures de bruit de fond et qui
permet de caractériser la fréquence de résonance des couches superficielles du
sous-sol. Le bruit de fond est constitué de vibrations ambiantes de très faible
amplitude, d’origine anthropique ou naturelle. En fonction des essais géotechniques
ou des mesures géophysiques disponibles par ailleurs, la connaissance de cette
fréquence de résonance permet d’accéder, soit à l’épaisseur des formations
superficielles, soit à la vitesse des ondes de cisaillement (VS). Ces résultats sont une
aide pour caractériser la réponse des sols sous sollicitation sismique. La méthode
H/V est donc utile pour juger de l’homogénéité du comportement sismique de
formations superficielles et de ce fait, constitue une aide appréciable pour la
réalisation de microzonages sismiques.
Une analyse systématisée d’un grand nombre de mesures expérimentales de bruit
ambiant dans le bassin de Santiago du Chili (Bonnefoy-Claudet et al., 2007) a
montré la difficulté d’interpréter des courbes H/V dans le cas de structures
sédimentaires complexes 2D/3D. A travers trois cas d’études concrets, nous
présentons ici les problèmes rencontrés pour caractériser les effets de site par le
biais des corrélations habituelles, et la difficulté dans l'exploitation conjointe de
résultats issus de différentes méthodes de reconnaissances géotechniques ou
géophysiques.
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(asphalte, ciment, pavés, dalles, etc.). Aux Antilles (ex. Roullé et al., 2010), ces
inversions de vitesse sont rencontrées au droit d’anciens dépôts de mangrove qui
sont surmontés d’une couche beaucoup plus raide en surface (vitesses variant de
380 m/s en surface à moins de 100 m/s en profondeur).
Castellaro et Mulargia (2009) ont démontré que les inversions de vitesse, qu’elles
soient artificielles ou naturelles, peuvent induire des effets importants sur les
mesures H/V, allant jusqu'à masquer les pics de résonance (au-delà de 1 Hz). Un
autre effet est la chute brutale de la courbe H/V jusqu'à des valeurs inférieures à 1 et
sur une large gamme de fréquences.
La Figure 1 illustre la manifestation d’effets de site plus ou moins masqués par une
inversion de vitesse : figure de gauche en présence de marais à mangrove, un effet
de site marqué par un pic H/V net avec une décroissance très rapide ; figures du
milieu et de droite une comparaison de rapports H/V obtenus avec ou sans
revêtement artificiel.
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Par ailleurs, la réponse sismique des sols a été simulée pour plusieurs colonnes de
sols constituées à partir de mesures de bruit de fond en réseau ; ces simulations 1D
nous donnent également des niveaux d’amplification élevés.
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Il semble que l’on soit ici en présence de plusieurs configurations peu favorables à
l’observation d’un pic sur les courbes H/V : faible contraste de vitesse entre
sédiments et substratum rocheux, stratigraphie mal connue et sûrement complexe.
De la même façon, les profils mesurés de vitesses d’ondes de cisaillement sont très
hétérogènes et ne permettent pas de définir un profil type dans ce secteur, ni une
répartition géographique. D’une part, ils indiquent la présence d’inversions de vitesse
liées à des stratigraphies en « millefeuille » avec alternance de couches molles et
raides ; ce type de configuration complique considérablement le traitement des profils
sismiques et altère la fiabilité des résultats obtenus (voir en 3.1 le cas des marais à
mangroves). D’autre part, certains résultats de profils de vitesse indiquent de fortes
variations latérales de vitesse (au sein d’un linéaire de 50 mètres), ce qui signifie que
l’on est en présence de structures sédimentaires complexes 2D/3D (variations
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latérales des faciès géologiques, substratum rocheux pentu …), en désaccord avec
l’hypothèse de géométrie monodimensionnelle. Cette dernière remarque est
importante, car le non-respect de l’hypothèse 1D ne nous autorise pas à suivre la
méthode habituelle d’estimation des effets de site, où la propagation des ondes est
approximée en milieu plan.
Un autre secteur de la ville de Santiago est fondé des argiles de l’unité de Licey,
c’est-à-dire des argiles denses et fortement plastiques produites par l’altération des
roches calcaires, et d’épaisseur décamétrique.
Les mesures H/V sont relativement homogènes entre elles, mais avec un effet de
site étonnamment peu marqué autour de 1 Hz. En revanche, les mesures
géophysiques et géotechniques indiquent, quant à elles, des vitesses d’ondes S
faibles en surface (autour de 150 m/s) qui augmentent graduellement avec la
profondeur (environ 400 m/s à -30 mètres). Et la fonction de transfert simulée à partir
d’un profil VS de ce type (Figure 4) présente un pic d’amplification notable autour de
3 Hz.
-10
profondeur (m)
-20
-30
-40
0 200 400 600 800
Vs (m/s)
La présence d’un gradient de vitesse très progressif dans ces argiles quaternaires,
peut expliquer l’apparente contradiction entre les mauvaises propriétés mécaniques
mesurées en surface et l’échec de la méthode H/V à déceler des effets de site
notoires dans cette zone caractérisée par une VS,30 de 240 m/s. De plus, le faible
contraste de vitesse existant probablement entre cette formation argileuse et le
substratum rocheux profond (une centaine de mètres), peut expliquer l’absence de
pic H/V (ou la manifestation d’un pic de très faible amplitude).
4. Conclusion
Economique en temps et en moyens, la méthode H/V basée sur le bruit ambiant
apporte une information caractéristique sur le comportement des couches
sédimentaires vis-à-vis des mouvements sismiques. Pour cette raison, elle est
abondamment utilisée dans les études de microzonage sismique. Sa pleine efficacité
est assurée en présence de structures géologiques horizontalement stratifiées et
d’un contraste d’impédance significatif entre les séries sédimentaires et le socle.
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Références bibliographiques
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