Beruflich Dokumente
Kultur Dokumente
environnemental
7Il ne fait pas de doute que l’on gagnerait une meilleure compréhension de
l’univers littéraire à le considérer sous l’angle d’une préoccupation
commune des écrivains que l’on n’a pas l’habitude de rapprocher. Bien que
je m’efforce d’établir les rapprochements les plus significatifs, mon propos
sera ici plus limité puisque je m’arrêterai pour l’essentiel à un seul
roman : Dormance (2000).
8L’ouvrage, dont le titre fait allusion au pouvoir de germination de la
graine, fait éclore sur des lieux familiers à l’auteur – un coin de la
Mayenne – des images de l’univers du néolithique. Trassard construit un
roman préhistorique autour du personnage de Gaur, dont l’existence – faite
de chasse, de travaux de la terre, d’amour et de violence – prend forme par
touches successives. Sur les traces d’un passé lointain surgit un monde,
tant à travers l’évocation des saisons, des paysages et des animaux que par
le rappel des expériences personnelles et des lectures de l’écrivain.
9L’œuvre de Jean-Loup Trassard est reconnue pour son importance
littéraire ; néanmoins, et malgré une attention critique ancienne, elle ne
touche qu’un cercle de lecteurs relativement restreint. Souvent caractérisé
comme écrivain du Bocage et de l’agriculture, cet auteur a retenu
l’attention de la critique universitaire qui l’a volontiers lu dans une
perspective thématique, à travers Bachelard, ou dans une perspective
mythocritique. Plutôt que de prolonger les voies habituellement suivies, ou
d’aborder l’importante question du regain d’intérêt pour le roman
préhistorique, je me propose de lire ici le roman dans la perspective
imaginée par le premier théoricien de la critique environnementale,
Lawrence Buell.
10Dans ce qu’il présente lui-même comme un triptyque, The
Environmental Imagination (1995), Writing for an Endangered
World (2001) et finalement The Future of Environmental Criticism (2005),
cet universitaire américain a posé les bases d’une critique qui, en une
dizaine d’années, s’est imposée comme un des axes de recherche majeurs.
Partant dans son premier ouvrage d’une lecture attentive de H. D. Thoreau,
Buell n’a cessé depuis lors d’élargir le champ d’investigation pour mieux
en préciser les enjeux, au-delà de la spécificité nord-américaine aussi.
11A l’ouverture de The Environmental Imagination, il retient quatre
critères pour définir le texte environnemental. Je les traduis ici en les
regroupant de manière succincte :