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Faculté de Médecine Necker-Enfants malades

ENDOCRINOLOGIE – DIABETOLOGIE

2002-2003 D.C.E.M.3

1
ENDOCRINOLOGIE - DIABETOLOGIE
LA THYROIDE : Glossaire et abréviations
LA THYROIDE : OUVRAGES
PRÉ-REQUIS EN THYROIDE
HYPERTHYROIDIES (n° 337)
HYPOTHYROIDIE DE L'ADULTE (n° 338)
HYPERTHYROIDIES DE L'ENFANT (n°337)
HYPOTHYROIDIES DE L'ENFANT (n° 338)
THYROIDITES
GOITRE (n° 58)
CANCERS DE LA THYROIDE (n° 339)
HYPERCORTISOLISME (n° 341)
HYPERTENSION ARTERIELLE D’ORIGINE ENDOCRINIENNE DE L'ADULTE (n° 123)
CLASSIFICATION PHYSIOPATHOLOGIQUE DES DIABETES (n°330-331)
COMPLICATIONS CHRONIQUES DU DIABETE (N° 330 - 331)
RETINOPATHIE DIABETIQUE (n° 219 - 330 - 331)
NEUROPATHIES DIABÉTIQUES (n° 221 - 330 - 331)
NEPHROPATHIE DIABETIQUE(n° 330 - 331)
DIABETE INSULINO-DEPENDANT DE L'ENFANT (n° 330)
TRAITEMENT DU DIABETE SUCRÉ (n° 330 - 331 - 332)
LE BILAN ANNUEL DE SURVEILLANCE DU DIABETIQUE (n° 330 - 331)
URGENCES METABOLIQUES CHEZ LE DIABETIQUE TROUBLES DE LA CONSCIENCE
CHEZ LE DIABETIQUE(n° 332)
DIABETE et GROSSESSE (n° 165)
OBESITE DE L’ADULTE (n° 250 - 333)
OBESITE DE L'ENFANT (n° 250 - 333)
ANOREXIE MENTALE (n° 250 - 334)
SYNDROME POLYURO-POLYDIPSIQUE
ADENOMES HYPOPHYSAIRES (n° 344)
LES HYPERPROLACTINEMIES
LES AMENORRHEES (n° 18)
MENOPAUSE (n° 154)
CONTRACEPTION (n° 155)
DYSLIPIDEMIES

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LA THYROIDE : Glossaire et abréviations

ACATT: anticorps anti thyroïdiens


ACTPO: anticorps anti thyropéroxydase
ACTG: anticorps anti thyroglobuline
Cordarone: médicament anti arythmique fortement iodé
CM ou CMT: cancer médullaire
DIT: diiodothyronine
endémique: présent à haute fréquence
GGL: ganglion; ADN: adénopathie
GMT: goitre multinodulaire toxique
goitre: augmentation de volume de la thyroïde
Gray: unité d'irradiation (1 Gy = 1 joule /kg)
HCG: hormone chorionique gonadotrope
HTG: hétérogène
Hyper.: hyperthyroïdie, Hypo.: hypothyroïdie, EU: euthyroïdie (normal)
131I: isotope 31 de l'iode, 123I: isotope 123 de l'iode
IGF: insulin growth factor
Incidentalome: pathologie découverte de façon fortuite à l'occasion d'un examen
prescrit pour une autre pahologie
kappa: indice décisionnel mesurant la reproductibilité (-1 à +1)
Lipiodol: produit de contraste iodé huileux, injectable ou administré sous forme de
capsules
MBq (mégabecquerel) = (radio)activité - un traitement standard de cancer = 4
GBq
MIT: monoiodothyronine
NC: nodule hypercontrasté ou chaud
NF: nodule hypocontrasté ou froid
NSF: non significatif
NTA: nodule thyroïdien autonome (fonctionne indépendamment de la TSH)
Organification: liaison chimique de l'iodure sur les résidus tyrosyls de la TG
oxyphile: aspect particulier des celleuls thyroïdiennes correspondant à une
métaplasie ou un cancer
papillaire (cancer): variété de cancer thyroïdien folliculaire caractérisé par des
anomalies nucléaire
R-TSH: récepteur de la TSH
Sce: surveillance
Se: sensibilité; Sp: spécificité; VPP (N): valeur prédicitive positive (N)
Sti: scintigraphie

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Strumite: thyroïdite subaiguë sur goitre
T4: thyroxine, T3: triiodothyronine (parfois lT4 ou lT3 pour levo...)
TCT: thyrocalcitonine
TDM: scanner
TPO: thyropéroxydase
TRAK: méthode de dosage des anticorps dirigés contre le R-TSH
TG: thyroglobuline; protéine spécifique de tissu support de la synthèse de
hormones thyroïdiennes
TSH: thyroid stimulating hormone

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LA THYROIDE : OUVRAGES
On pourra consulter:
1. "La Thyroide". Sous la direction de J. Leclère, J. Orgiazzi, B. Rousset, JL
Schlienger, JL Wemeau. Expansion Scientifique Française, 1992.
2. "Pathologie Thyroïdienne - Diagnostic et Traitement". Aubène Léger. Médecine-
Sciences, Flammarion, 2ème édition, 1998.
3. "Tumeurs de la Thyroïde". Schlumberger M, Pacini, F. Nucléon, 1997.
4. "La prise en charge diagnostique du nodule thyroïdien". ANDEM, éditions Norbert
Attali, déc. 1995.

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PRÉ-REQUIS EN THYROIDE
Jérôme Clerc
Service de Médecine Nucléaire - Hôpital Necker

Seuls les "Points importants" et l'examen clinique thyroïdien, sont à connaitre.


Ce texte constitue une aide à la compréhension de la physiopathologie thyroïdienne
et apporte les données fondamentales à l'interprétation des examens
complémentaires.

1.Points importants
1. La thyroïde assure la synthèse, le stockage et la libération des deux
hormones thyroïdiennes qui sont des molécules iodées: T4 ou thyroxine et T3 ou
triiodothyronine.
2. La biosynthèse des hormones thyroïdiennes comporte deux étapes
fondamentales: la captation de l'iodure au niveau de la membrane basale, par une
pompe spécifique: le "SIT" et "l'accrochage" de l'iode sur la thyroglobuline stockée
dans la colloïde, correspondant au mécanisme d'organification-couplage.
3. L'hormone thyréotrope hypophysaire ou TSH, stimule l'hormonogénèse
thyroïdienne en activant un récepteur membranaire du thyréocyte.
4. L'hormonosynthèse thyroïdienne est régulée selon un rétrocontrôle négatif
définissant l'axe hypothalamus (TRH) - hypophyse (TSH) - thyroïde (T4 & T3).
5. En cas d'hyperthyroïdie et chaque fois que la T4 est élevée, la commande
cérébrale est coupée: la TSH devienne basse à nulle. Ce phénomène permet le
diagnostic biologique des hyperthyroïdies (0 ≤ TSH ≤ min).
6. En cas d'hypothyroïdie due à une atteinte de la glande, la commande
cérébrale est augmentée de sorte que la valeur de la TSH s'élève. Ce phénomène
permet le diagnostic biologique des hypothyroïdies (TSH ≥ Max).
NB: min [MAX]: valeur minimale [Maximale] de l'intervalle de normalité du dosage

2.Physiologie
La glande thyroïde est une glande endocrine assurant la synthèse des
hormones thyroïdiennes, Thyroxine (T4) & Triiodothyronine (T3). Les hormones
thyroïdiennes sont des molécules iodées (4 I pour T4 et 3 I pour T3).
La physiologie thyroïdienne est marquée par deux particularités : 1) la
glande assure un stockage hormonal de plusieurs semaines permettant de pallier
aux variations de l'apport iodé alimentaire 2) il existe un mécanisme spécifique
assurant d'une part, la captation de l'iodure plasmatique (l'iode est un élément
rare), et d'autre part son incorporation à une protéine spécifique de tissu, la
thyroglobuline (TG).
La sécrétion thyroïdienne obéit à un mécanisme classique de rétrocontrôle
négatif hypothalamo-hypophysaire.

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2.1Cellule et Follicule thyroïdiens.
L'unité fonctionnelle élémentaire thyroïdienne est le follicule thyroïdien, qui est une
structure grossièrement sphérique de 200-400 µm, centrée par une substance
colloïde composée essentiellement de TG en suspension. Ce follicule est limité en
périphérie par une monocouche de cellules thyroïdiennes, ou thyréocytes. Ces
cellules sont cubiques et mesurent environ 8 µm de hauteur.

La physiologie simplifiée est représentée Figure 1.


En A, on voit le transporteur (TpI-) assurant la captation active de l'iodure
(x 200). La rentrée de I- est couplée à celle du Na+ (symporteur) dont la
concentration extracellulaire est maintenue par une pompe Na/K à activité ATPase.
L'iodure intracellulaire est transporté électriquement vers la membrane apicale et
passe sur le versant colloïdal grâce à un canal apical spécifique (CA).
En B, sont figurées les molécules impliquées dans la synthèse des hormones
thyroïdiennes. L'iodure (I-), est transformé en une forme réactive (I°) par une
peroxydase thyroïdienne (TPO), en présence d'H2O2, dont la synthèse est assurée
par un générateur (G-H2O2) localisé au voisinage de la membrane apicale.

L'I° est "accroché" sur des résidus tyrosine de la TG, pour former des
composés mono ou diiodotyrosyls (MIT, DIT). Cette étape porte le nom
"d'organification". Enfin, les MIT et les DIT sont couplés au sein de la TG pour
former la T4 ou la T3 (Figure 2).
En C, il est indiqué que la TG est résorbée par micropinocytose, dans la
cellule où elle subit une protéolyse libérant alors les hormones actives, T4 et T3
passant dans le capillaire sanguin basal, et les résidus MIT et DIT qui sont désiodés
in situ, permettant un recyclage de l'iode.

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Figure 1. Schéma fonctionnel simplifié du follicule thyroïdien.

Légende : En D, est figuré le récepteur thyroïdien à l'hormone thyréotrope


(TSH). L'activation du récepteur entraîne une augmentation de l'AMP cyclique
responsable de la plupart des effets métaboliques. La TSH stimule la captation de
l'iodure, la synthèse des protéines thyroïdiennes (TG, TPO, TpI-, CA, G-H2O2),
l'organification de la TG, la résorption colloïdale enfin. L'activation du récepteur est
également couplée à la voie de la phospholipase C, responsable de la synthèse du
G-H2O2 et participant à la stimulation de la prolifération cellulaire.
En situation normale, la thyroïde produit 75 à 100 µg de T4 par jour.
Chez l'homme, la majeure partie de la T3, qui est l'hormone biologiquement
la plus active (T4 x 3 à 8), provient de la désiodation hépatique (80%) et rénale
(20%) de la T4. Cette transformation est le fruit de l'action d'une désiodase active
en 5' (Figure 3).
La circulation des hormones thyroïdiennes dans le plasma se fait
essentiellement sous forme liée à trois protéines: l'albumine, la transthyrétine (ou
"thyroid binding prealbumin" : TBPA) et la "thyroid binding globulin" (TBG), qui
bien que présente en faible concentration dans le plasma assure les 2/3 du
transport de la T4.

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Figure 2: les hormones thyroïdiennes au sein de la Thyroglobuline (TG)

Figure 3: désiodation de la T4 (hépatique ou rénale)

On considère que la fraction libre des hormones thyroïdiennes rend compte


de leur effet biologique.
Cette fraction est seulement de 0,01% (T4) et 0,1% (T3), ce qui explique la
grande difficulté du dosage hormonal des fractions libres.

1.2. Axe thyréotrope.


La sécrétion thyroïdienne est soumise en permanence à un mécanisme de
rétrocontrôle négatif d'origine hypothalamo-hypophysaire.
La sécrétion thyroïdienne de T4 dépend de l'activation du thyréocyte par une
hormone hypophysaire, l'hormone thyréotrope ou TSH, acronyme anglais de
"thyroid stimulating hormone". Il s'agit d'une hormone glycoprotéique formée de
deux sous unités (alpha et ß), la sous unité alpha étant commune à LH et FSH. La
glycosylation et l'excrétion de la TSH sont stimulées par l'action d'un peptide
hypothalamique, la TRH ("thyroid releasing hormone").
La T4 sécrétée est transformée en T3 et produit ses effets tissulaires après
interaction avec un récepteur nucléaire spécifique, le récepteur de T3.

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Figure 4. Axe Thyréotrope.

Légende: Le rétrocontrôle négatif provient d'une inhibition de la transcription de la


TSH par la T3 hypophysaire produite localement à partir de la T4. Certains facteurs
modulent la sécrétion de TSH: estradiol (E2, +), glucocorticoïdes (GLC,-),
Dopamine (DA, -)

Au niveau hypophysaire, la T4 est désiodée localement en T3 (par une


désiodase spécifique) et la T3 locale interagit avec l'ADN de la cellule hypophysaire
en inhibant la transcription de la TSH. Ainsi, plus le taux de T4 est haut, moins il y
a aura de TSH sécrétée, et inversement. La diminution de la TSH précède
l'élévation du taux de l'hormonémie plasmatique, en cas d'hyperthyroïdie.
En pathologie, l'hyperthyroïdie se caractérise biologiquement par une
hyperproduction de T4 (de T3), responsable d'une diminution appropriée de la
sécrétion de TSH.
Le diagnostic biologique de l'hyperthyroïdie repose sur le dosage du taux de
TSH plasmatique, plus sensible que celui de la T4. A l'inverse, l'hypothyroïdie est
biologiquement caractérisée par une élévation de la TSH plasmatique.

Les grandes causes d'hyperthyroïdies se déduisent aisément de la physiologie:


a) Activation anormale du récepteur de la TSH par un auto-anticorps
(maladie auto-immune) : maladie de Basedow

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b) Autoactivation permanente du récepteur de la TSH secondaire à une
mutation sporadique (rarement germinale) : hyperthyroïdies autonomes (adénome
toxique, goitres multinodulaires toxiques).
Dans certains cas, l'élévation de la T4 (T3) n'est pas secondaire à une
hyperproduction d'origine thyroïdienne; on parle de thyrotoxicose (effets d'une
surimprégnation de T4), sans hyperthyroïdie:
c) Intoxication iatrogène par les hormones thyroïdiennes (T4, T3, dérivés)
d) Destruction partielle du tissu endocrine lors des thyroïdites (infectieuses,
auto-immunes etc...) avec libération excessive d'hormones.
e) toxicité de l'iode stable sur le follicule (hyperthyroïdie induite par une
surcharge iodée)

Les grandes causes d'hypothyroïdie résultent


a) d'une destruction iatrogène (I131, chirurgie)
b) d'une diminution pathologique de la masse fonctionnelle:
* hypoplasie, agénésie, ectopie (enfant)
* thyroïdite auto-immune à la phase d'état
c) d'un défaut de l'une quelconque de étapes de la synthèse hormonale
(enfant, adulte)
d) d'une inhibition réversible de l'organification causée par une surcharge
iodée

Les grandes causes de troubles de la croissance thyroïdienne sont:


- l'élévation tonique de la TSH souvent secondaire à une carence iodée
alimentaire, responsable d'hyperplasies et de goitres (goitres endémiques ou
sporadiques)
- des causes génétiques (goitres multinodulaires)
- des activations d'oncogènes souvent retrouvées dans les nodules et les
cancers (ras, ret, gsp...). Leur genèse reste néanmoins multifactorielle et
imparfaitement comprise.

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1.3. Médicaments thyroïdiens - sites d'action cellulaire
La figure 5 représente les principaux sites d'action des médicaments thyroïdiens.

Fig. 5 - Légende: SIT: transporteur de l'iodure, R-TSH: récepteur de la TSH, CI:


canal apical iodure, TPO: thyropéroxydase; GH202: générateur d'H2O2, TG:
thyroglobuline, MIT & DIT: mono & di-iodothyronines, Rh-TSH: TSH recombinante
humaine (imagerie des cancers opérés).
La captation (I) est inhibée par certains anions; le perchlorate est utilisé lors de
tests et parfois comme traitement adjuvant des hyperthyroïdies avec surcharges
iodées. Les étapes majeures sous le contrôle de la stimulation de la TSH sont
figurées par .

Le récepteur de la TSH peut être stimulé par des anticorps (anti R-TSH) en
pathologie (maladie de Basedow). Enfin, certains médicaments inhibent la
conversion de la T4 en T3.
Les antithyroïdiens de synthèse (carbimazole, propylthiouracile) agissent comme
faux substrats, et inhibent l'organification de l'iodure sur la TG (étapes II & III).
L'iode stable inhibe sa propre organification et diminue les étapes finales de la

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sécrétion des hormones thyroïdiennes. Les corticoïdes inhibent la sortie des
hormones thyroïdiennes.

2. Examens complémentaires

2.1. Biologie

2.1.1. Que dose-t-on ?


La biologie thyroïdienne est une aide précieuse au diagnostic de la
plupart des maladies thyroïdiennes.
L'étude de la fonction thyroïdienne repose sur l'étude du rétrocontrôle, c'est
à dire sur la valeur de la TSH. On peut y associer le dosage des hormones
thyroïdiennes libres, en première intention la T4 libre, afin de quantifier
l'hyperthyroïdie (l'hypothyroïdie). Il n'est pas utile de doser les deux fractions libres
hormonales (RMO), sauf circonstances exceptionnelles.
L'étude de l'auto-immunité thyroïdienne ne se justifie pas à titre
systématique. On peut doser en cas de signes d'appel (cf. cours), les anticorps
antithyroïdiens qui sont fréquemment positifs en cas de maladie thyroïdienne auto-
immune: thyroïdite de Hashimoto, maladie de Basedow, thyroïdite du post-partum.
Il n'est pas utile en général de redoser ces anticorps lors du suivi biologique des
patients.
Le diagnostic des formes atypiques ou incomplètes de la maladie de
Basedow peut bénéficier du dosage des anticorps anti-récepteurs TSH.
On peut enfin doser l'iodémie totale, l'iodurie des 24 heures ou l'iodurie sur
échantillon (exploration des surcharges iodées). Les autres dosages relèvent d'une
pratique hyperspécialisée.

2.1.2. Notions sur les méthodes de dosage des hormones.


La plupart des dosages hormonaux reposent sur l'utilisation de la
réaction antigène-anticorps où l'antigène est le produit à doser. On distingue les
méthodes immunométriques et les méthodes par compétition.

Méthode immunométrique (Fig. 6a)


Elle utilise deux anticorps reconnaissant deux épitopes de l'antigène à doser.
L'anticorps 1 (AC1) accroché (coaté) sur la phase solide (tube) lie l'hormone. Un
second AC (AC2) possédant un marqueur détectable (radioactif, lumineux etc...) se
fixe dans un second temps, sur les seuls Ag liés à AC1 (les Ag non liés à AC1 sont
éliminés par lavage avant la seconde incubation). Le signal final est proportionnel à
la concentration de l'antigène.
Pour obtenir une mesure absolue, on se réfère à des sérums tests (Sti) ,
fournis par le fabricant et dont la concentration en Ag est connue. Ces sérums
permettent de construire une courbe étalon. Le sérum inconnu (Sx) est mesuré et
la concentration inconnue (Cx) déduite par interpolation avec la courbe étalon.

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Figure 6a: méthode immunométrique de dosage

Méthode par compétition (Figure 6b).


Ce système met en compétition avec un anticorps unique deux antigènes:
l'antigène à doser et un antigène analogue (traceur analogue) ajouté en excès et
détectable (I125, lumière etc...). Ici, le signal mesuré est inversement
proportionnel à la concentration de l'antigène à doser.
Comme pour la méthode immunométrique, le fabricant fournit des sérums
standard sur une gamme de concentration, permettant de définir une courbe
étalon.

Figure 6b: dosage par compétition

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Quel que soit le système utilisé, on peut faire deux remarques: 1) le dosage
est immunologique et non pondéral vrai. Il dépend donc des anticorps et du traceur
analogue fourni par chaque firme pharmaceutique. 2) le chiffre absolu
correspondant au dosage est susceptible de varier selon la méthode (on dit la
trousse de dosage) utilisée. Ces variations font l'objet de contrôles de qualité intra
et inter laboratoires.

2.1.3. Dosages - indications sur les valeurs normales.


Les valeurs normales sont les valeurs usuelles d'un dosage réalisé dans une
population homogène caractérisée, le plus souvent exempte de maladie.
Le terme normal réfère à une distribution statistique selon une loi
gaussienne.
Si la loi statistique est gaussienne, on peut définir la valeur normale comme
moy ± 2 DS, de sorte que l'on ait seulement 2,5% de chances d'être normal avec
un résultat inférieur à moy - 2 DS (ou > à moy + 2 DS).
La plupart du temps, la distribution n'est pas symétrique et l'on a recours à
des intervalles empiriques incluant 95% de la population. On définit ainsi l'intervalle
de normalité comme l'écart empirique [ 2,5% - 97,5%], ou l'intervalle [5 -95].
Les normes peuvent être définies enfin dans une perspective diagnostique
donnée. Pour ce faire on trace la courbe Sensibilité = f(1 - Spécificité), pour une
série de seuils de normes. Ces courbes sont dénommées courbes ROC (receiving
operative caracteristics curves).

Tab. I - Valeurs usuelles (indicatif - correspond à un kit particulier / chaque


dosage

produit dosé valeurs usuelles remarques


TSH (µU/ml) 0,3 -3,5 [0,1 - 6]* hyperT.≤ 0,3 [0,1]; hypoT. ≥ 3,5 [6]

T4 libre (pM/l) 10 - 20
T3 libre (pM/l) 5 -10
Ac anti TG < 100 UI/l normalement absent
Ac anti TPO < 80 UI/l normalement absent
Ac anti R-TSH < 10 UI/l normalement absent
iodurie < 150 µg/j
Thyroglobuline < 35 µg/l sujet non opéré
Thyroglobuline < 0,5 µg/l cancer thyroïdien traité et guéri

* valeurs "normales" extrêmes pouvant être rencontrées en fonction des trousses


utilisées.

Prenons comme exemple la définition biologique de l'hyperthyroïdie,


caractérisée par une diminution du taux de TSH. L'écart 5-95 est : [0,35 - 3,45]
(méthode IRMA, 1996). Si l'on choisit un seuil de définition biologique à 0,05
µU/ml, on ne retiendra que les sujets hyperthyroïdiens (Spe: 0,96) mais on
manquera le diagnostic des hyperthyroïdies frustes (Se: 0,6). Si l'on choisit un seuil

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haut à 0,50 µU/ml, on diagnostiquera presque tous les sujets en hyperthyroïdie
(Se: 0,98), mais on identifiera à tort de nombreux sujets normaux (Spe= 0,4).
Ainsi, on peut jouer sur la valeur seuil d'une norme pour rendre un test plus
sensible ou plus spécifique, selon un choix décisionnel défini à priori.

2.2. Imagerie
L'imagerie thyroïdienne repose sur l'échographie et la scintigraphie. On
distingue en imagerie deux ordres d'information: les renseignements anatomiques
et morphométriques et les renseignements fonctionnels ou de caractérisation
tissulaire. Enfin, les méthodes d'imagerie sont plus ou moins reproductibles. Pour
mesurer ce paramètre on utilise un test d'agrément ou test kappa qui varie de 1
(accord parfait) à -1 (discordance totale) en passant par 0 (concordance au
hasard).

2.2.1. Echographie
Echographie couplée à l'étude Doppler de la vascularisation
glandulaire et nodulaire réalise une image anatomo-fonctionnelle.
Image anatomique, résolue à 1 mm avec l'emploi de sondes de haute
fréquence, elle permet de caractériser la volumétrie des lobes et des nodules,
expliquant les rôle clé de l'échographie dans la surveillance des nodules et des
goitres.
L'image est également en partie fonctionnelle, car le signal échographique
reflète essentiellement la densité colloïdale, donnant ainsi indirectement accès à
une caractérisation tissulaire, car les cancers et les thyroïdites sont des lésions
pauvres en colloïde donc hypoéchogènes.
L'échographie nécessite néanmoins un matériel spécifique et une grande
expérience technique et médicale.
Elle dépend de l'opérateur à l'acquisition et à la lecture, de sorte que
l'agrément inter-observateur reste de l'ordre de 0.5-0.6 (k). Enfin, elle ne fournit
pas d'image globale de la glande si bien que la qualité des coupes présentées et du
compte rendu sont déterminantes.
Les tissus liquidiens (vaisseaux, muscles, glande) ont une bonne
transmission de l'écho tandis que les tissus osseux et surtout aériens (trachée,
oesophage) conduisent à une réflexion presque totale du signal
Le Doppler mesure la vélocité du sang (environ 0,2 m/s en artériel) et est
couplé à l'échographie. Un codage en pseudo-couleur du sang veineux (bleu) et
artériel (rouge) est superposé à l'image de la coupe.

Le parenchyme normal est homogène, finement échogène. Avec les sondes


hautes fréquences il est habituel de voir les lobulations normales de la glande,
regroupant plusieurs vésicules cerclées de travées conjonctives. En Doppler, les
vitesses circulatoires sont inférieures à 40 cm/s pour le pic systolique.
L'échographie doit être complétée d'une exploration des ganglions latéro
cervicaux. Normaux, ils sont petits, ovalaires, non vascularisés et à hile central
échogène. L'échographie gagne à être schématisée sur un dessin global où figurent
les différents nodules associés à leurs caractéristiques ultrasonores.
L'échographie permet une mesure des volumes lobaires et nodulaires, selon
l'approximation ellipsoïdale: V = 0,52 x L x l x e, où L, l, et e sont les diamètres
principaux mesurés.
Le coût est d'environ 350 FF (sans doppler).

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2.2.2. Scintigraphie.
La scintigraphie thyroïdienne réalise une image anatomo-fonctionnelle
et quantifiable de la thyroïde.
Anatomique, car la scintigraphie n'est autre que la représentation de la
distribution volumique de radiotraceurs spécifiquement captés par les vésicules
thyroïdiennes constituant la glande.
Avec l'utilisation de l'I123, cette image est de plus fonctionnelle car la
captation vésiculaire de l'iode reflète à chaque instant le nombre et la fonction des
vésicules (pompes à iode, organification et sécrétion), toutes fonctions étant
stimulées par la TSH.
Enfin, l'image scintigraphique est globale, indépendante de l'opérateur à
l'acquisition, facilement stockable (fichiers < 100 ko) et exportable par les réseaux
d'images (télédiagnostic). Sa reproductibilité est d'environ 0,8 (k).

Appareillage et traceurs.
La scintigraphie thyroïdienne est réalisée avec une caméra à scintillation
équipée d'un collimateur dédié à trou unique (pinhole), garantissant une résolution
de 7 mm en situation réelle, au prix d'une minime déformation des contours.
La fixation thyroïdienne de l'iode est déterminée soit à l'aide d'une sonde
comptant l'activité cervicale, soit à partir de l'image scintigraphique numérique.
Les traceurs sont présentés dans le tableau II.
La dose absorbée (irradiation) par la thyroïde lors d'une scintigraphie (I123)
est d'environ 0,02 mGy (0,07 mGy pour un cliché de thorax) et la dose efficace
(radioprotection) d'environ 0,9 mSv.

Tab. II -Traceurs utilisés en médecine nucléaire thyroïdienne

traceur fixation remarque coût† usage


captation (pompe I) et traceur de référence IMG
organification
123I en imagerie 80 (60' à 24 h)

captation (pompe I) imagerie IMG


99mTc 10 - 30 (15' à 60')

captation (pompe I) et traceur de réference 500 TT-HYP


organification
131I en thérapie 400 IMG-CAN
2200 TT-CAN
*MBq, † : coût approximatif en consommable par dose en FF (1997), IMG: image à
(délai habituel), TT-HYP: traitement des hyperthyroïdies, IMG-Can:scintigraphie du
cancer thyroïdien opéré, TT-Can: traitement des cancers.

Résultats chez le sujet normal (Figure 7 : scintigraphie thyroïdienne


normale).
La scintigraphie 2D est une image intégrée, la valeur de chaque pixel étant
proportionnelle au produit: épaisseur de la glande x concentration radioactive locale
x temps d'acquisition de l'image. Le contraste normal doit monter rapidement et

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régulièrement de la périphérie de l'image vers le coeur des lobes (valeur max). Les
contours sont réguliers. On projette les données de la palpation sur l'image qui doit
être calibrée en taille pour donner accès au volume. La masse des lobes se déduit
de la surface de projection comme: m = 0,47 (S) 1,5.

Fig. 7 : Scintigraphie thyroïdienne normale (I123)

2.3. Cytologie.
La cytoponction est en fait une cytoaspiration à l'aiguille fine des zones
pathologiques, le plus souvent nodulaires, vues en imagerie (écho ou scinti). On
utilise une aiguille fine (23 à 27 Gauge), montée ou non, en réalisant 2 à 4
passages par nodules, suivis d'un étalement sur lame. On exige pour que
l'interprétation soit significative au moins 5 groupes de cellules contenant au moins
10 cellules. Elle dépend fortement de l'opérateur (médecin préleveur et cytologiste
lecteur). Un opérateur réalisant moins de 50 CP/an a un % de prélèvements non
significatifs supérieur à 50%. On décrit quatre types de résultats, pour les équipes
entraînées: prélèvements non significatifs (5 à 20%), prélèvements bénins (60%),
prélèvements suspects (20%) et prélèvements cancéreux (5-10%). Le nodule
cancéreux étant rare, la VPP de la cytologie est seulement de 20% (prévalence
5%), voire 5% (prévalence 1%).
C'est un examen très utile pour le diagnostic de malignité des nodules,
essentiellement des cancers papillaires. Le coût est de 615 FF. La cytoponction ne
fait pas le diagnostic des nodules autonomes, qui ne sont pas cancéreux et

18
nécessitent un traitement spécifique.

3. Rappels sur les paramètres décisionnels


Un test T peut être négatif (T-) ou positif (T+) chez un patient malade (M+)
ou sain (M-). On définit alors le tableau d'occurrence suivant:

test / maladie M+ M-
T+ vrai + (VP) faux + (FP)
T- faux - (FN) vrai - (VN)

On définit:
la sensibilité: Se = VP / (VP + FN)
la spécificité: Spe = VN / (VN + FP)
Sont déterminantes pour la stratégie les valeurs prédictives, qui dépendent de la
prévalence (p) de la maladie dans la population où est faite le test.
On définit : la valeur prédictive positive, VPP = p Se / [(p Se + (1 -p) (1 - Sp)]
la valeur prédictive négative, VPN = Sp (1 - p) / [(Sp (1 -p) + p (1 - Se)]

4. Examen Clinique Thyroïdien : La Palpation


Technique de la palpation:. La thyroïde normale n'est pas visible mais est
palpable chez l'adulte. La palpation thyroïdienne se pratique en se positionnant
derrière le patient assis, en plaçant les deux ou les trois premiers doigts de chaque
main antérieurement sur le cou. On descend latéralement en partant des bords du
cartilage thyroïde vers le cricoïde et les premiers anneaux trachéaux, ces derniers
étant seuls normalement recouverts par le parenchyme thyroïdien. Après ce
repérage préliminaire on identifie les deux pôles thyroïdiens, ce qui permet une
appréciation volumique.
Lorsque le cou est court ou le corps thyroïde bas situé, on gagne à palper le
patient allongé en décubitus dorsal, le cou en légère hyperextension. Une seconde
palpation réalisée en faisant déglutir le patient permet d'apprécier les variations
locales de consistance, évocatrices de nodules.
La thyroïde normale a une consistance élastique et régulière. En pathologie,
elle peut être molle, ferme, dure, bosselée, irrégulière ou nodulaire. La thyroïde est
mobile à la déglutition et ne souffle pas. La palpation thyroïdienne est
systématiquement associée à l'exploration des aires ganglionnaires cervicales et
sus-claviculaires.
L'ensemble des données cliniques est représenté sur un schéma qui sera
confronté aux éventuels résultats de l'imagerie.

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HYPERTHYROIDIES (n° 337)

Jean-Claude Valcke
Endocrinologie - Diabétologie - Médecine Interne, Hôpital Boucicaut
HYPERTHYROIDIES (n° 337)
Points importants
1. Définition
2. Etiologie
3. Physiopathologie
3.1. De la thyrotoxicose (TT)
3.2. Des différentes étiologies
4. Diagnostic
4.1. Diagnostic clinique et biologique de la thyrotoxicose
4.2. Complications évolutives de la thyrotoxicose*
4.3. Diagnostic des diverses variétés étiologiques de TT
5. Traitement
5.1. La Maladie de Basedow
5.2. Traitement de l'adénome toxique
5.3. G.M.N.T
5.4. Hyperthyroïdie induite par l'Iode
5.5. Traitement des complications des TT communes aux diverses etiologies
Références Bibliographiques
Questions à choix multiples

Points importants
L’hyperthyroïdie est l’expression clinique et biologique d’un excès en hormones
thyroïdiennes (HT).
Les H.T. exercent leurs effets physiologiques sur les récepteurs cellulaires de
nombreux tissus et métabolismes. De ce fait, leur présence en excès s’exprime
de façon polymorphe, peu spécifique dans ses stades initiaux.
Cependant, la fiabilité et la simplicité des explorations fonctionnelles
thyroïdiennes permettent un diagnostic précoce dans les formes douteuses ; et
en premier lieu le dosage de TSH plasmatique dont le taux est abaissé ou
effondré (sauf dans la forme étiologique exceptionnelle qu’est l’adénome
thyréotrope secréteur de TSH).
L’hyperthyroïdie est un syndrome clinique et biologique qui relève de causes
diverses dont chacune a des caractères cliniques et biologiques particuliers. Les
deux étiologies les plus fréquentes sont la maladie de Basedow, maladie
autoimmune spécifique d’organe, et les goîtres uni- ou multi-nodulaires

20
toxiques.
Les complications sont soit le fait de l’hyperthyroïdie elle-même, méconnue ou
évoluée et insuffisamment traitée (exemple : les cardiothyréoses et la crise
toxique) ; soit le fait d’une étiologie particulière (exemple : l’ophtalmopathie
basedowienne).
Les principes du traitement, relativement complexe, doivent être bien connus.
S’il existe un traitement commun aux diverses variétés étiologiques de
l’hyperthyroïdie, il convient de l’adapter en fonction de chaque étiologie.
Parmi les complications du traitement, les plus graves sont : les accidents
granulopéniques provoqués par les antithyroïdiens de synthèse ; les
complications de la chirurgie justifiant des équipes spécialisées ; la survenue
fréquente, souvent tardive et méconnue d’une hypothyroïdie après
administration d’iode radio-actif.

1. Définition
L'hyperthyroïdie ou thyrotoxicose se définit comme l'ensemble des signes cliniques
et biologiques provoqués par des taux élevés d'hormones thyroïdiennes (H.T.)
libres, dont la régulation physiologique est abolie.

2. Etiologie
Le tableau ci-dessous indique les causes des thyrotoxicoses.

les causes des thyrotoxicoses

1. Entités les plus fréquentes :


1) Maladie de Basedow (60 %)
2) Goître multinodulaire toxique (20 %)
3) Adénome toxique (10 %)
2. Entités moins fréquentes
1) Thyroïdites (9 %)
2) Hyperthyroïdie induite par l'iode
3. Entités rares voire exceptionnelles
1) Adénome hypophysaire à TSH
2) Thyrotoxicose factice
3) Paranéoplasique (1 %)
4) Métastase secrétante de cancer thyroïdien différencié (Les pourcentages sont
seulement indicatifs.)

3. Physiopathologie

3.1. De la thyrotoxicose (TT)


La thyroxine (T4) libre et surtout la triodothyronine (T3) libre en excès agissent
à de nombreux niveaux :

21
métabolique : augmentation de la consommation de O2 et de la production de
chaleur ; catabolisme protidique et lipidique avec lipolyse expliquant
l'amaigrissement ; augmentation de la glycogénolyse hépatique et de la
néoglycogénèse aboutissant à une augmentation de la production sus-hépatique
de glucose.
cardio-vasculaire : effets chronotrope et inotrope positifs avec augmentation du
débit cardiaque et diminution des résistances artérielles périphériques (effet
direct des hormones thyroïdiennes et indirect via les beta récepteurs du
système nerveux autonome).
digestif : augmentation de la motilité intestinale
osseux : augmentation de la résorption et de la formation osseuse au profit de
la première avec à la longue ostéopénie
système nerveux central : augmentation de l'excitabilité
musculaire : diminution de la masse musculaire avec amyotrophie

3.2. Des différentes étiologies


Elle sera envisagée pour chacune d'entre elles.

4. Diagnostic
Trois types de faits doivent être envisagés :
Le syndrôme clinique et biologique de thyrotoxicose (TT), qui est COMMUN aux
différentes étiologies
Les COMPLICATIONS évolutives de la TT, parfois graves, cardiothyréose et crise
aiguë thyrotoxique.
Les éléments cliniques et biologiques PARTICULIERS A CHAQUE ETIOLOGIE.

4.1. Diagnostic clinique et biologique de la thyrotoxicose

4.1.1. Les signes de DEBUT


Ils peuvent être longtemps négligés. En pratique, bien les connaître. Les plus
fréquents sont :
palpitations,
nervosité,
amaigrissement,
asthénie.

4.1.2. Le syndrôme complet


Il comprend 6 GROUPES DE SIGNES et quelques signes accessoires :
Les signes cardio-vasculaires :
C'est le COEUR HYPERKINETIQUE qui associe :
TACHYCARDIE, élément capital, constante, rapide (100 à 120/mn), perma-
nente, ne cédant pas au repos et au sommeil, exagérée par les émotions et
les efforts, sinusale à l'ECG, s'accompagnant enfin de PALPITATIONS.
ERETHISME CARDIO-VASCULAIRE. A savoir hyperpulsatilité artérielle, hyper-

22
tension artérielle systolique avec baisse de la diastolique (différentielle
élargie), choc de pointe augmenté, bruits du coeur intenses, parfois souffle
systolique d'éjection de haut débit.
DYSPNEE D'EFFORT
Signes généraux :
AMAIGRISSEMENT presque constant, contrastant avec la conservation de
l'appétit voire une POLYPHAGIE.
ASTHENIE physique, liée à l'atteinte musculaire
POLYURO-POLYDYPSIE MODEREE.
Troubles neuro-psychiques (surtout nets chez la jeune femme atteinte de
maladie de Basedow)
TREMBLEMENT, fin, rapide, permanent, exagéré par les émotions, net au
niveau des mains.
NERVOSITE accrue, irritabilité, hyperactivité stérile, pleurs faciles, insomnie
fréquente. Et parfois des signes plus graves : angoisse, état dépressif,
troubles du comportement.
SIGNES DIGESTIFS inconstants : outre la polyphagie, DIARRHEE ou plus
souvent fréquence accrue des selles
Troubles de la thermorégulation, rarement signalés :
THERMOPHOBIE, hypersudation, parfois élévation thermique modérée, vaso-
dilatation cutanée, avec notamment MAINS CHAUDES et MOITES.
Signes musculaires :
MYOPATHIE PROXIMALE : excéllent signe d'une hyperthyroïdie déjà évoluée
mise en évidence par la difficulté de passer de la position accroupie à la
position debout et le signe du tabouret. Amyotrophie rhizomélique plus
tardive.
Accessoirement :
Chez l'homme, GYNECOMASTIE, dans 20 à 40 % des cas ; baisse de la libido
Chez la femme, SPANIOMENORRHEE.
Dans les deux sexes, OSTEOPOROSE douloureuse dans les formes évoluées
Signes cutanés : onycolysis, pigmentation cutanée
Tous ces signes, lorsqu'ils sont associés, permettent aisément de reconnaître la
thyrotoxicose ; mais il est des cas de diagnostic plus difficile lorsque la combinaison
ou l'intensité des symptômes varie ou en fonction de "terrains particuliers". Ce sont
les formes cliniques.

4.1.3. Formes cliniques


Forme monosymptomatique : Amaigrissement, signes cardio-vasculaires
Manifestation paradoxale :
l'anorexie peut remplacer la polyphagie surtout chez le sujet âgé.
l'embonpoint peut remplacer l'amaigrissement et s'explique par l'aug-
mentation de la polyphagie ou des accès boulimiques.
Chez l'enfant :
Rareté de l'hyperthyroïdie (essentiellement maladie de Basedow) qui se manifeste

23
par des troubles du caractère, des difficultés scolaires, une accélération de
croissance (cf le chapitre hyperthyroïdie de l'enfant).
Chez le sujet âgé :
TT insidieuse et souvent LONGTEMPS MECONNUE :
adynamie et apathie plutôt que nervosité et agitation
anorexie plutôt que polyphagie conduisant à la cachexie
signes musculaires majeurs
signes cardiaques prédominants, souvent révélateurs telle une
cardiothyréose
Chez la femme enceinte :
L'hyperthyroïdie est rare car la fécondité est diminuée. Mais la maladie de
Basedow est possible avant ou pendant la grossesse.
Le diagnostic peut être initialement méconnu car thermophobie, peau
chaude, palpitations, nervosité et petit goître peuvent s'observer chez la
femme enceinte non hyperthyroïdienne.
La T4 totale est élevée à cause de l'augmentation de la TBG mais la T4 libre
est normale chez la femme non hyperthyroïdienne.
Les problèmes thérapeutiques sont délicats (cf infra).

4.1.4. Diagnostic différentiel :


Peuvent être discutés :
dystonie neuro-végétative (ou asthénie neuro-circulatoire)
phéochromocytome
drogues à effet sympathicomimétique
diabète sucré en voie de décompensation
maladie cardiaque : mitralite et affections à débit cardiaque élevé
Dans le doute, on s'aidera des données hormonales.

4.1.5. Diagnostic biologique de thyrotoxicose :


Dosages hormonaux : Ils confirment le diagnostic clinique :
dans la majorité des cas : élévation simultanée de T4 libre et T3 libre et
abaissement de TSH plasmatiques
dans quelques cas, T4 L ou T3 L est isolément élevée, associée à la
diminution de la TSH (T4 ou T3 toxicose)
Dosages non hormonaux :
On peut mettre en évidence :
leuconeutropénie ++ à chiffrer avant de commencer les antithyroïdiens de
synthèse
glycémie modérément élevée ou intolérance aux hydrates de carbone ou
aggravation d'un diabète sucré antérieur
baisse du cholestérol total et des triglycérides, sans grand intérêt
augmentation modérée des ALAT, ASAT, phosphatases alcalines, gGT (15 %
des cas)

24
hypercalcémie (dans environ 10 % des cas)
Bien qu'inutiles au diagnostic, ces modifications humorales méritent d'être
connues et interprétées dans le contexte de thyrotoxicose
LA THYROTOXICOSE, UN DIAGNOSTIC HORMONAL SIMPLE
Elévation de T4 libre et/ou de T3 libre*
ABAISSEMENT ou EFFONDREMENT DE LA TSH PLASMATIQUE (signe le plus
sensible)
* En première intention, demander T4 libre et TSH. Si T4 libre est normale et
TSH basse, demander en deuxième intention T3 libre.

4.2. Complications évolutives de la thyrotoxicose*

4.2.1. Complications cardio-vasculaires ou cardiothyréoses :


Présentes en moyenne dans 20 % des cas, parfois révélatrices, surtout rencontrées
chez le sujet de plus de 50 ans, et s'il existe une cardiopathie sous-jacente. Elles
comportent (en plus de la tachycardie et de l'éréthisme cardio-vasculaire qui sont
les symptomes CV de l'hyperthyroïdie non compliquée) les manifestations suivantes
:
Les troubles du rythme représentent 70 % des cardiothyréoses ; d'abord
paroxystiques, ils deviennent ensuite permanents et sont de type divers :
ESA ou ESV rares
accès de tachycardie sinusale à début brusque
TSV : type Bouveret rare, ou flutter 2/1 plus fréquent
* Les complications propres à certaines étiologies seront traitées avec celles-ci.
La tachy-arythmie complète (TAC) par fibrillation auriculaire (FA) est
l'anomalie la plus fréquente : crises intermittentes au début puis permanente
mais réversible par traitement de l'hyperthyroïdie, à condition que celui-ci ne
soit pas trop tardif. Si elle persiste, elle a ses complications propres : elle
favorise la maladie thrombo-embolique et précipite l'insuffisance cardiaque.
La FA permanente est le symptôme fondamental des cardiothyréoses ; elle évoque
le diagnostic d'hyperthyroïdie aussi bien chez la femme jeune que chez le sujet âgé.
L'insuffisance cardiaque.
Il s'agit de la manifestation la plus grave des cardiothyréoses. Habituellement
révélée après passage en TAC, elle est plus souvent observée chez le sujet porteur
d'une cardiopathie antérieure.
Cliniquement, il s'agit d'une insuffisance cardiaque globale congestive à
prédominance droite (rarement précédée d'une IVG isolée) avec comme
particularités:
l'importance du syndrôme oedémateux (oedème des membres inférieurs,
hépatomégalie avec turgescence des jugulaires) ;
la présence du syndrôme hyperkinétique, téguments chauds, et s'ils étaient
recherchés, vitesse circulatoire et débit cardiaque normaux ou même élevés
;
évolutivité rapide avec résistance partielle aux digitaliques mais régression
par le traitement de la thyrotoxicose.

25
L'insuffisance coronarienne
Beaucoup plus rare. C'est en général l'aggravation ou la révélation d'une
insuffisance coronarienne pré-existante s'exprimant sous forme d'angor spontané
ou d'effort, rapidement amélioré par le retour à l'euthyroïdie.
Maladie thrombo-embolique
Bien qu'il ne s'agisse pas à proprement parler d'une cardiothyréose, cette entité
mérite d'être individualisée ici, du fait de sa gravité et de ses relations avec les
complications cardiaques. Il s'agit d'embolies artérielles, cérébrale dans la moitié
des cas, responsable d'un certain nombre de décès. Elles ne surviennent que dans
les TT en FA et surtout s'il existe une insuffisance cardiaque. Bien que faible avant
le traitement de la TT, le risque embolique existe avant, pendant et après le retour
à l'euthyroïdie. Ceci indique la nécessité d'une traitement anticoagulant commencé
dès le diagnostic de la FA. Le risque emboligène est surtout réel chez le sujet âgé.
EN PRATIQUE, en présence de TAC, risque d'embolie artérielle chez le sujet de plus
de 60 ans.

4.2.2. Complications neuropsychologiques et musculaires


Observées surtout dans les TT négligées et évoluées :
atteinte musculaire majeure avec impotence des 4 membres, chute du
maxillaire, ptosis, syndrôme pseudomyasthénique du carrefour pharyngo-
laryngé, provoquant dysphonie, dysphagie, fausses routes.
état psychique aigu, maniaque, ou mélancolique, délire aigu, bouffées
confusionnelles

4.2.3. Crise aiguë thyrotoxique ("storm" ou orage thyroïdien)


Devenue rare car mieux prévenue, redoutable, véritable urgence, à traiter en
réanimation. 10 à 20 % de mortalité.
Clinique : caractérisée par l'aggravation des signes de TT, d'apparition brutale
ou progressive :
tachycardie extrême puis TSV ou FA, voire troubles du rythme ventriculaire.
Insuffisance cardiaque digitalino-résistante, mort subite par fibrillation
ventriculaire ou collapsus ;
agitation psychomotrice avec tremblements intenses, délire, ou bien
prostration avec atteinte pseudo-myopathique majeure, quadriplégie,
troubles respiratoires et de la déglutition pouvant aboutir à un coma vigil.
fièvre élevée à 41° et sueurs profuses
vomissements, diarrhée, douleurs abdominales, amaigrissement rapide et
déshydratation majeure
Les taux de T3 et T4 ne sont pas plus élevés que dans une TT non compliquée.
Les signes biologiques témoignent surtout de la déshydratation.
La connaissance des facteurs déclenchants permet la prévention de la majorité
des crises :
traitement chirurgical ou par IRA d'une maladie de Basedow ou plus
rarement d'un goître multinodulaire toxique, SANS préparation médicale et
retour pré-opératoire à l'euthyroïdie.
stress traumatique, opératoire ou médical (infection, AVC, acidocétose...)
accouchement, toxémie.

26
il peut s'agir d'une simple insuffisance ou arrêt des doses d'antithyroïdiens.

4.3. Diagnostic des diverses variétés étiologiques de TT


Il repose sur l'examen du corps thyroïde (CT), les signes associés et les examens
complémentaires.

4.3.1. La maladie de Basedow


La plus fréquente des hyperthyroïdies (50 à 60 %). Prédominance chez la femme
(6 à 8 pour un homme) de 20 à 40ans . C'est une maladie plurisystémique
associant de façon variable 4 ordres de signes : thyrotoxicose, goître diffus, signes
oculaires, signes dermatologiques beaucoup plus rarement.

4.3.1.1.Physiopathologie :
Maladie autoimmune spécifique d'organe dont les mécanismes sont incomplètement
compris.
Prédisposition génétique, attestée d'une part par la plus grande fréquence que
dans la population normale de certains antigènes d'histocompatibilité HLA : en
occident, l'haplotype HLA B8 DR3 ; d'autre part, par le caractère familial de
l'affection : 15 % des parents proches d'un sujet atteint de maladie de Basedow
ont une affection thyroïdienne.
Anomalie de l'immunorégulation tissulaire et humorale attestée par :
l'association possible du Basedow à d'autres maladies auto-immunes
(Biermer, myasthénie, vitiligo, diabète, insuffisance surrénale)
l'infiltration lymphocytaire du corps thyroïde
la présence d'anticorps anti-thyroïdiens (antithyroperoxydase et antithyro-
globuline)
la dysfonction des lymphocytes T auxiliaires
la présence d'immunoglobulines G (IgG) : auto-anticorps circulants, se fixant
sur le récepteur membranaire des cellules thyroïdiennes (anticorps
antirécepteur de la TSH ou R-TSH) dont on retiendra schématiquement deux
types :
anticorps mimant les effets de la TSH par stimulation de l'adényl-cyclase,
de la production de cAMP et de la synthèse hormonale et protéique. Ce
sont les TSI (thyroïd stimulating immunoglobulin) ou TSAb (Thyroïd
stimulating antibodies)
anticorps inhibant la fixation de TSH. Ce sont les TBII (Thyroïd binding
inhibiting immunoglobulin)
D'autres immunoglobulines dirigées contre un antigène des muscles
orbitaires incomplètement déterminé, expliqueraient les manifestations
oculaires et dermatologiques.
Le rôle de virus, bactéries, stress, dans le déclenchement de l'anomalie
immunitaire est possible mais non prouvé. La maladie de Basedow a souvent un
début brusque à l'occasion d'un stress.
Quelle que soit la séquence exacte des événements immunologiques, les
immunoglobulines circulantes stimulent la totalité du corps thyroïde. Il en
résulte un excès de secrétion hormonale qui bloque la secrétion hypophysaire de
TSH. L'activité thyroïdienne est autonome (et non plus TSH-dépendante).
Retenir : présence d'immunoglobulines stimulantes, mimant l'effet de TSH et

27
entrainant l'hyperthyroïdie : TSI ou TSAb.

4.3.1.2.Clinique
Les signes de thyrotoxicose déjà décrits sont sans particularité si ce n'est
l'importance des signes neuropsychiques.
Le GOITRE est diffus, parfois asymétrique, homogène, vasculaire (siège d'un
thrill ou d'un souffle systolique ou continu), ferme, élastique, indolore, sans
adénopathie ni signes inflammatoires. Présent dans 80 à 90 % des cas (il
manque souvent chez le sujet âgé et l'homme). De taille variable : double ou
triple le volume thyroïdien parfois plus, donc visible ou à rechercher
soigneusement avec une technique parfaite.
L'OPHTALMOPATHIE, inconstante : présente cliniquement dans la moitié
des cas mais fréquente (85 % des cas) si recherchée par TDM orbitaire. Elle
associe de façon variable :
rétraction de la paupière supérieure, asynergie oculopalpébrale (signe de
Von Graefe), élargissement de la fente palpébrale, fixité du regard,
constituent le syndrôme oculaire adrénalo-thyroxinique et à ce titre, peuvent
s'observer dans toutes les TT (ils ne sont donc pas spécifiques du Basedow
mais décrits ici pour des raisons pratiques)
l'exophtalmie ou protrusion des globes oculaires, mesurée à
l'exophtalmomètre de Hertel est acquise, axiale, réductible, bilatérale et
symétrique. Elle peut être unilatérale.
les signes inflammatoires mineurs : oedème palpébral, sensation de sable,
picotements, larmoiement. Plus importants : hypertrophie des glandes
lacrymales, chémosis débutant.
l'atteinte musculaire, révélée par une diplopie verticale (droit inférieur) puis
horizontale, confirmée par la TDM (qui élimine les diagnostics différentiels :
tumeurs orbitaires, métastases des muscles extra-oculaires, fistule carotido-
caverneuse et myosite aiguë orbitaire)
on recherchera une atteinte cornéenne ou nerveuse témoin d'une
exophtalmie maligne, véritable complication (cf. infra).
Tous ces signes, à l'exclusion du syndrôme adrénalino-thyroxinique, sont liés à des
phénomènes inflammatoires d'origine autoimmune (mais de mécanisme
indéterminé), interessant les tissus rétro-orbitaires et les muscles extrinsèques
La DERMOPATHIE basedowienne (encore appelée myxoedème prétibial) est
beaucoup plus rare (1 à 2 %) : induration de la peau en placards surélevés
souvent confluents, de couleur violacée, ou brune, situés au tiers inférieur des
faces latérales et antérieure des deux jambes, au-dessus du coup de pied,
parfois associée à un hippocratisme digital (acropachie).
AU TOTAL :
Soit il s'agit de l'association éloquente de tous les signes ou plus souvent : TT +
GOITRE + SIGNES OCULAIRES et le diagnostic est évident dès la première
consultation.
Soit il s'agit de formes dissociées de diagnostic plus délicat :
TT en apparence isolée
ophtalmopathie inflammatoire isolée, précédant les signes de TT et le goître : le
diagnostic sera assuré par la TDM orbitaire.

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Autres formes cliniques :
Basedow néonatal chez les nourrissons nés de mère basedowienne. Lié au
passage transplacentaire des immunostimulines, il disparaît spontanément
en quelques semaines
Goître basedowifié : Basedow survenant chez un sujet qui avait
antérieurement un goître.
Principaux signes cliniques de la maladie de Basedow

goitre diffus
exophtalmie inflammatoire
thyrotoxicose : tachycardie, amaigrissement, tremblement etc.

4.3.1.3.Les examens complémentaires


Ceux mettant en évidence la thyrotoxicose
T4 libre et T3 libre augmentées, TSH plasmatique abaissée et bloquée, très souvent
isolément, du fait de la précocité du diagnostic.
Ceux qui authentifient la maladie de Basedow :
la scintigraphie montre une distribution symétrique, diffuse, homogène, et intense
de l'isotope ; la fixation de l'IRA est précoce, élevée et s'abaisse rapidement. Elle
est indispensable au calcul de la dose thérapeutique d'IRA.
La présence d'anticorps antithyroïdiens (antithyroperoxydase et anti-
thyroglobuline) à des taux modérés, témoigne du processus immunologique (elle
n'est pas spécifique de la maladie de Basedow).
Les anticorps anti-récepteurs de la TSH sont élevés. Noter que seuls les anticorps
inhibant la fixation de la TSH sont dosés actuellement en routine et non point les
TSI proprement dits ; ceci explique les discordances observées entre l'évolution de
la thyrotoxicose et le taux des anticorps anti-récepteurs.

4.3.1.4. Evolution.
Les rémissions spontanées par "extinction" de la maladie immunologique sont
tardives et peuvent être difficilement attendues. L'évolution habituelle se fait
par poussées, à l'occasion de fatigue, stress, épisodes de la vie génitale, et peut
se compliquer :
en plus des complications de la TT déjà vues et pouvant mettre en cause le
pronostic vital : cardiothyréose, crise aiguë thyrotoxique
une complication spécifique de la maladie de Basedow : l'exophtalmie
maligne :
aggravation des signes déjà vus
protrusion majeure avec subluxation douloureuse des globes oculaires et
occlusion palpébrale impossible
phénomènes inflammatoires intenses avec oedème cornéen, chémosis,
paralysie des muscles oculaires,
kératite et ulcération de la cornée
atteinte du nerf optique de nature compressive pouvant conduire à la
cécité, heureusement devenue exceptionnelle.

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4.3.2. L'adénome toxique

4.3.2.1.Généralités
Il s'agit d'un nodule thyroïdien autonome et hyperfonctionnel. Deuxième cause
d'hyperthyroïdie : apparaît plus tardivement (45-50 ans). 4 à 5 femmes pour 1
homme.

4.3.2.2.Physiopathologie
L'adénome toxique provient de la replication accélérée d'un clone cellulaire
hyperactif au sein d'une thyroïde par ailleurs normale. La cause en est inconnue
mais n'est pas de nature auto-immune. D'abord autonome (c'est-à-dire échappant
à la régulation physiologique de TSH et non freinable) mais non toxique (c'est-à-
dire sans élévation des HT), son augmentation de volume aboutit à une production
hormonale accrue, un blocage de TSH et la mise au repos fonctionnelle du tissu
thyroïdien péri-nodulaire et contro-latéral. Cette néoplasie thyroïdienne est toujours
bénigne : adénome folliculaire bénin.

4.3.2.3.Clinique
Dans la forme complète, c'est l'association nodule thyroïdien solitaire-thyrotoxicose,
l'un ou l'autre des deux éléments étant révélateur et faisant rechercher le second.
le nodule est ferme, indolore, mobile, non vasculaire et isolé : sans
adénopathie, ni signe inflammatoire. Son diamètre est presque toujours
supérieur à 3 cm. Le reste du parenchyme thyroïdien est difficilement ou non
palpé.
la thyrotoxicose est moins nette que dans la maladie de Basedow, progressive
ou intermittente, à prédominance cardio-vasculaire : TAC et insuffisance
cardiaque peuvent être révélatrices, associées à des signes musculaires et un
amaigrissement. Il n'y a pas de signe oculaire (au maximum une rétraction de la
paupière supérieure), ni signe cutané.

4.3.2.4.Examens complémentaires
T4 et T3 libres sont augmentées et TSH abaissée.
Parfois, il y a sécrétion prédominante ou exclusive de T3. Il n'y a aucune anomalie
de l'auto-immunité.
La scintigraphie est l'examen essentiel.
Elle montre (cf. polycopié d'iconographie) une fixation exclusive de l'isotope au
niveau du nodule palpé avec "extinction" du parenchyme avoisinant et
controlatéral.
L'échographie doppler
Montre un nodule plein, hyper vascularisé, et permet de vérifier la présence du lobe
controlatéral atrophié.

4.3.2.5.Evolution
Aggravation progressive avec le volume du nodule, accélérée en cas de
surcharge iodée.
Possibilité d'une nécrose hémorragique spontanée du nodule aboutissant à un
nodule hypofonctionnel.

4.3.3. Goitre multinodulaire toxique (GMNT)

30
4.3.3.1.Généralités
Fréquence moins grande en Europe que l'adénome solitaire. 4 femmes pour 1
homme. Sujets plus âgés : 50 à 70 ans.

4.3.3.2.Physiopathologie :
Survenue, presque toujours au sein d'un goitre ancien, de plusieurs aires
autonomes et hyperactives. Ces aires hyperactives correspondent habituellement
aux nodules macroscopiques palpés. A côté d'elles, le tissu thyroïdien normal est
mis au repos. Il existe enfin des zones inactives, nodulaires : "nodule froid" et des
zones fibreuses. Lorsque les zones autonomes croissent suffisamment, la TT
apparaît et la sécrétion de TSH est bloquée.
Noter le rôle aggravant possible d'une surcharge iodée sur une thyrotoxicose
jusque là inapparente.

4.3.3.3.Clinique
Association d'un goitre multinodulaire souvent asymétrique et volumineux, parfois
compressif, et d'une TT. Le GMNT est découvert : soit au cours de la surveillance
systématique d'un goitre multinodulaire connu (intérêt du dosage régulier de TSH),
soit à l'occasion d'une TT (qui fait rechercher un goitre). Celle-ci est habituellement
modérée, de début insidieux, à prédominance cardio-vasculaire (sujet âgé), sans
signe oculaire.

4.3.3.4.Signes biologiques
Outre l'élévation des HT et l'abaissement de TSH, la scintigraphie montre des zones
"chaudes" correspondant à des nodules palpés et des "zones éteintes", froides. Il
n'y a pas d'anomalie de l'auto-immunité.

4.3.4. Thyrotoxicose induite par l'iode


De nombreux médicaments contiennent de l'iode, dont certains sont largement
utilisés : AMIODARONE par exemple.

4.3.4.1.Physiopathologie
Deux situations doivent être distinguées :
Existence d'une pathologie thyroïdienne autonome antérieure (goître
multinodulaire, maladie de Basedow, adénome toxique), révélée par la
surcharge iodée qui l'aggrave.
Véritable hyperthyroïdie induite par l'iode survenant sur corps thyroïde
antérieurement sain, de mécanisme incomplètement élucidé. C'est cet aspect
seulement qui est décrit ci-dessous aux plans clinique et biologique.

4.3.4.2.Clinique
La TT survient au début, pendant ou après (quelques mois à plusieurs années) la
surcharge iodée. Présence inconstante d'un goître modéré, ferme, indolore,
avasculaire. Pas de signe oculaire.
TT d'intensité variable : amaigrissement et signes musculaires dominent ainsi que
l'aggravation de la maladie cardiaque (ayant justifié l'AMIODARONE)

4.3.4.3.Biologie
Elévation des hormones thyroïdiennes, principalement de T4. Effondrement de TSH,
iodémie et iodurie des 24 heures très élevées.
La scintigraphie est "blanche" avec captation nulle. Absence d'anticorps anti-

31
récepteurs de la TSH.

4.3.5. Thyroïdites : (voir le chapitre correspondant).


C'est essentiellement la thyroïdite subaiguë de DE QUERVAIN qui peut entraîner
une TT.
Plus rarement, il peut s'agir :
de la phase initiale d'une thyroïdite chronique autoimmune
surtout d'une thyroïdite indolore ou silencieuse, apparaissant souvent dans le
post-partum.

4.3.6. Thyrotoxicose factice


Elle est due à la prise d'hormones thyroïdiennes exogènes (thyroxine, TRIAC).
L'intoxication est le plus souvent volontaire dans un contexte psychopathologique
et dans ce cas, le plus souvent cachée.

4.3.6.1.Cliniquement
Thyrotoxicose pure, sans signe oculaire, pas de goître et même atrophie du corps
thyroïde.

4.3.6.2.Biologiquement
Elévation des hormones thyroïdiennes et abaissement de TSH. L'effondrement de la
thyroglobuline plasmatique est une marque caractéristique de cette étiologie.
La fixation d'IRA est nulle et la scintigraphie est "blanche" posant le diagnostic
différentiel des autres scintigraphies blanches (hyperthyroïdie induite par l'iode,
thyroïdite sub-aiguë, thyroïdite silencieuse et thyroïdite du post-partum).

4.3.7. Adénome thyréotrope


Etiologie extrêmement rare. La secrétion endogène de TSH donne une
thyrotoxicose ; avec goître diffus sans signe oculaire.
Un micro- ou macro-adénome hypophysaire est présent dans la majorité des cas.
La marque biologique particulière de cette étiologie est l'association à l'élévation de
T4 et de T3, de taux élevés, souvent modérément, de TSH et de la sous-unité alpha
de la TSH.

4.3.8. Tumeur trophoblastique


La môle hydatiforme, le choriocarcinome testiculaire peuvent entrainer une
thyrotoxicose. Celle-ci est due à l'activité TSH de la molécule d'hormone
chorionique (HCG) secrétée en grande quantité par ces tumeurs. Elle disparaît
lorsque l'ablation de celle-ci est possible.

4.3.9. Cancer thyroïdien


Bien que la biosynthèse hormonale soit diminuée dans les cancers thyroïdiens, les
cancers différenciés avec une masse métastatique importante peuvent entrainer
une hypersecrétion hormonale.

5. Traitement
Bien que les méthodes thérapeutiques puissent être appliquées aux principales

32
formes étiologiques, il paraît préférable de ne pas les décrire séparément mais
plutôt à propos de chaque étiologie.

5.1. La Maladie de Basedow


Il n'y a pas encore de traitement étiologique, d'ordre immunologique.

5.1.1. Moyens thérapeutiques


Trois types de traitement sont utilisables. Chacun est efficace mais a des avantages
et des inconvénients.

5.1.1.1.Les anti-thyroïdiens de synthèse (ATS)


Type et mode d'action
Parmi les nombreuses substances anti-thyroïdiennes, seuls les dérivés de la
thionamide sont utilisés. Ils se divisent en deux groupes :
les dérivés du thio-imadazol : le seul représentant en France est le carbimazole
(NEOMERCAZOLE) comprimés à 5 et 20 mg (à prendre en 1 à 3 fois).
les dérivés du thio-uracile: BASDENE, comprimés à 25 mg et propylthio-uracile
(PTU) non commercialisé et disponible à la pharmacie centrale des hôpitaux,
comprimés à 50 mg (ces deux produits sont à prendre en 3 fois).
Les ATS inhibent la synthèse des hormones thyroïdiennes par une action anti-
peroxydasique : ils bloquent l'oxydation des iodures, l'iodation de la thyroglobuline
et le couplage des iodotyrosines.
En outre, le NEOMERCAZOLE inhibe la désiodase intra-thyroïdienne, enzyme
permettant de récupérer l'iode organifié, non secreté. Il en résulte une déplétion
progressive en iode de la thyroïde.
Le PTU inhibe la conversion périphérique de T4 en T3.
Les ATS à fortes doses ont une action immuno-dépressive qui pourrait être utile
dans la maladie de Basedow.
Incidents - accidents
Mineurs (dans 10 % des cas) : allergie cutanée : urticaire, prurit, nausé
Plus sérieux (dans 2 à 5 % des cas) : hépatite toxique, ictère cholestatique,
arthralgies et arthrite, myalgies, fièvre, thrombopénie, leucopénie transitoire
inférieure à 4000/mm3
MAJEURS : L'AGRANULOCYTOSE : 0,2 à 0,8 %. Mécanisme immuno-allergique et
toxique.
soit diminution rapide des granulocytes,
soit BRUTALE dans les premières semaines ou mois
Surtout le fait de fortes doses (+ 30 mg de NEOMERCAZOLE et chez les plus
de 40 ans)
EN PRATIQUE :
Difficulté de prévoir (les NFS systématiques tous les 8 jours ne la détectent
pas toujours)
Prévenir le patient que la survenue de signes évocateurs de l'agranulocytose
doivent le conduire à consulter (pyrexie aiguë, angine). Qu'il s'agisse d'une baisse
progressive (au-dessous de 1500 PN/mm3 ) ou d'un début brutal, l'arrêt IMMEDIAT
DES ATS est impératif.

33
La réversibilité de l'agranulocytose intervient en quelques jours ou 2 à 3
semaines, éventuellement accélérée par l'utilisation des facteurs de croissance de la
leucopoïèse.

Enfin, pas d'effet tératogène, mais ils passent la barrière placentaire et peuvent
altérer la fonction thyroïdienne du foetus. Avant leur prescription, il faut rechercher
une grossesse et/ou assurer une contraception.
Posologie et mode d'utilisation
Traitement d'attaque :
dans les formes modérées d'hyperthyroïdie, la tendance actuelle est aux doses
modérées : 6 comprimés par jour de NEOMERCAZOLE ou de PTU.
Une dose élevée initiale (8 à 12 comprimés) est encore utilisée par certains ou
réservée au formes graves d'emblée.
Traitement d'entretien :
A partir de la 6ème ou 8ème semaine, les doses peuvent être diminuées en
fonction des résultats. Deux attitudes sont proposées :
Faible posologie pour éviter toute hypothyroïdie et/ou augmentation de
volume du goître
posologie plus élevée (par exemple 30 à 40 mg de NEOMERCAZOL)
compensée par une hormonothérapie substitutive par l'hormone
thyroïdienne.
Quel que soit le traitement, la surveillance est régulière cliniquement et
biologiquement pour éviter la persistance d'une thyrotoxicose ou une
hypothyroïdie.
La durée du traitement est de 18 à 24 mois.
Résultat :
Initialement, l'efficacité est quasi constante (sauf en cas de saturation iodée
où l'effet des ATS devient faible ou de gros goîtres)
A distance et après arrêt des ATS, le pourcentage de guérison est d'environ
50 %.

5.1.1.2.Iode radio-actif (IRA)


La délivrance au niveau thyroïdien de 50 à 150 grays aboutit à une destruction des
cellules thyroïdiennes. Ce traitement simple, économique, a un effet retardé (6 à 8
semaines), maximum de 3 à 6 mois.
Il est contre-indiqué chez la femme enceinte.
Le calcul de la dose optimale est difficile, d'où il résulte quelquefois la persistance
de la TT, surtout la survenue d'une hypothyroïdie, immédiate réversible, tardive et
d'installation lente, imposant une surveillance lointaine de la TSH (50 à 70 % à 10
ans).
Une thyroïdite d'irradiation peut entrainer 1 à 3 semaines après la dose d'IRA une
exacerbation de la TT.
Contre-indication liée à l'âge : si les risques leucogène, mutagène, carcinogène
thyroïdien ou de diminution de la fertilité par IRA paraissent pouvoir être
complètement écartés, il reste habituel en France de ne jamais l'administrer chez
l'enfant et la femme jeune.

34
5.1.1.3.Chirurgie
Il s'agit d'une thyroïdectomie sub-totale, laissant 3 à 5 gr de tissu thyroïdien de
chaque côté. Ce traitement radical et efficace doit être pratiqué :
chez un patient euthyroïdien (c'est-à-dire préparé par les ATS pour éviter la crise
aiguë ou par les bétabloquants et l'iodothérapie en cas de contre-indication des
ATS).
Les inconvénients sont :
dans l'immédiat l'exceptionnel hématome suffocant, l'hypocalcémie par
hypoparathyroïdie, la lésion des nerfs récurrents, toutes ces complications
pouvant être évitées par un chirurgien entrainé.
au long terme, récidive et plus souvent hypothyroïdie lontaine, définitive.

5.1.1.4.Autres traitements
Repos (arrêt de travail) et sédatifs (Tranxène) sont indispensables
L'iode minéral stable inhibe l'organification et diminue la protéolyse de la
thyroglobuline, donc la libération hormonale. Il a un effet rapide mais :
il passe la barrière placentaire et ne doit pas être utilisé chez la femme
enceinte.
il diminue l'action des ATS
son effet est transitoire par échappement
A ce titre, il n'est jamais utilisé seul mais à titre d'appoint pour la préparation à la
chirurgie ou en situation d'urgence.
Il est le plus souvent utilisé sous forme de solution de Lugol fort. Une goutte de la
solution correspond à 6 mg d'iode et la posologie habituelle est de 30 à 60 gouttes
par jour.
Les bétabloqueurs (BB)
Il s'agit d'une thérapeutique utile, réduisant la tachycardie, le tremblement, les
sueurs et prévenant probablement la survenue des troubles du rythme mais ils ne
diminuent pas la secrétion d'HT.
Le PROPANOLOL ou AVLOCARDYL® est souvent utilisé : 20 à 40 mg 4 fois par jour
à doses progressives en tenant compte des contre-indications cardio-pulmonaires.
Le lithium
Est un autre inhibiteur de la protéolyse complémentaire de l'iode mais son
maniement est difficile du fait de sa toxicité cardiaque et rénale
Une contraception efficace
Elle sera prescrite en cas d'utilisation des ATS

5.1.2. Les indications


Elles sont difficiles à codifier et doivent tenir compte de multiples facteurs : âge,
sévérité de la thyrotoxicose, importance du goître et des signes oculaires, désir de
grossesse etc.
On ne peut envisager que quelques cas schématiques :
Basedow du sujet jeune
Avec hyperthyroïdie et goître modérés : traitement médical par ATS, BB, repos,
sédatif. En cas d'échec, chirurgie ou IRA

35
Basedow du sujet de plus de 40 ans
A goître petit ou modéré, à thyrotoxicose moyenne ou forte : indication de l'IRA
(avec parfois au début des ATS dans l'attente de l'effet retardé de l'IRA).
Goître volumineux, hyperthyroïdie sévère ou modérée.
C'est l'indication de la chirurgie précédée d'une phase médicale de préparation (ATS
+ BB + IODE) pendant 6 à 8 semaines, amenant le malade à une euthyroïdie
parfaite.

5.1.3. Cas particuliers


Enfant :
ATS le plus longtemps possible ; en cas d'échec chirurgie.
Femme enceinte :
Le traitement du Basedow est nécessaire pour éviter des complications maternelles
(aggravation de la TT) et foetales (petit poids, prématurité, mortalité augmentée).
La maladie de Basedow survient au cours de la grossesse dans environ 1 cas sur
2000.
Se souvenir :
que les immunoglobulines (TSI), les ATS et l'iode passent la barrière placentaire
qu'en revanche, T4 et T3 la traversent pas ou peu
que le foetus fonctionne avec sa thyroïdie dès la 10ème semaine de gestation.

L'IRA étant formellement contre-indiqué, deux attitudes sont proposées :


ATS en préparation pendant le 1er trimestre puis chirurgie au 2ème trimestre ;
ATS pendant toute la grossesse : étant donné que la chirurgie n'est pas
totalement dénuée de risque, les ATS restent la thérapeutique la plus logique et
la plus sûre, sans risque pour le fœtus, sous réserve :
de préférer le PTU ou NEOMERCAZOLE car il passe moins la barrière
placentaire,
d'utiliser des doses modérées (100 à 300 mg/j de PTU) en laissant une
discrète hyperthyroïdie chez la mère,
de les diminuer voire de les arrêter lorsque la thyrotoxicose s'atténue au
cours de la grossesse (la maladie de basedow a tendance à s'amender
spontanément pendant la grossesse),
de ne pas associer de thyroxine aux ATS qui conduirait à une posologie de
ceux-ci inutilement trop élevée,
de ne pas conseiller l'allaitement sous ATS, bien que cette pratique soit
possible sous contrôle de la TSH chez le nourrisson.
Ophtalmopathie :
Dans la forme moyenne habituelle, une protection cornéenne par larmes
artificielles, collyre à la méthylcellulose à 1 %, port de lunettes sombres sont
suffisants.
Dans les formes sévères, nécessité d'une occlusion palpébrale nocturne par adhésif
et d'une corticothérapie (1 mg/Kg/jour) ou injection rétrobulbaire de corticoïdes
sous surveillance spécialisée.
L'exophtalmie maligne nécessite parfois, outre la corticothérapie, des gestes

36
majeurs : tarsorraphie, radiothérapie externe orbitaire, décompression orbitaire
chirurgicale, plasmaphérèses...
Les séquelles inesthétiques importantes : rétraction palpébrale, strabisme,
protrusion, pourront être améliorées par la chirurgie.

5.2. Traitement de l'adénome toxique


La guérison spontanée de l'adénome toxique par nécrose involutive est rare.
Deux types de traitement peuvent être utilisés :
Chirurgical :
C'est le traitement essentiel : adénomectomie ou lobectomie après préparation
médicale (surtout en cas de TT grave ou chez le sujet âgé).
IRA :
En cas de contre-indication de la chirurgie

5.3. G.M.N.T
La réduction chirurgicale du parenchyme thyroïdien est le traitement de choix.
Eventuellement après préparation par les ATS. Elle est impérative s'il existe des
signes de compression.
L'IRA thérapie sera réservée aux contrindications de la chirurgie.

5.4. Hyperthyroïdie induite par l'Iode


Son traitement est difficile. L'hyperthyroïdie disparaît en même temps que la
saturation iodée mais celle-ci peut persister longtemps. Selon la tolérance de la TT,
diverses mesures seront mises en oeuvre :
au minimum : bêtabloquants ;
à un degré de plus : ATS type PTU qui inhibe la conversion périphérique de la T4
en T3 et/ou prednisone ;
au maximum : échanges plasmatiques voire chirurgie ont pu être proposés dans
une TT résistante et compliquée de cardiothyréose grave.

5.5. Traitement des complications des TT communes aux diverses


etiologies

5.5.1. Cardiothyréose
Elle nécessite une hospitalisation.
La correction rapide de l'hyperthyroïdie est la base du traitement : ATS à fortes
doses.
La TAC est ralentie par les bêtabloquants sous couvert d'un traitement anti-
coagulant. En l'absence de réversion spontanée de la TAC après retour à
l'euthyroïdie, on attendra quelques semaines avant de tenter une cardioversion
chimique ou électrique.
L'insuffisance cardiaque nécessite diurétiques, fortes doses de Digitaline, dérivés
nitrés. Les BB sont en principe contre-indiqués.

5.5.2. Crise aiguë

37
Le traitement d'urgence en unité de soins intensifs associe :
Réanimation
réhydratation, sédatifs, refroidissement (par paracétamol et non pas aspirine),
oxygénothérapie, digitaline, diurétiques, dérivés nitrés, anticoagulants
Traitement de l'hyperthyroïdie :
- Fortes doses d'ATS (PTU de préférence) par sonde gastrique, 18 à 24
comprimés de PTU pendant 1 à 2 jours, diminués ensuite à 9 comprimés par
jour.
- Iode minéral : Lugol fort par la sonde ou 1gr IV lente d'iodure de sodium
toutes les 12 heures (le traitement iodé devra être commencé quelques heures
après les ATS)
- Corticothérapie IV à fortes doses
- BB sauf en cas d'insuffisance cardiaque.
- Dans certains cas, les plasmaphérèses sont indiqués.

Références Bibliographiques
- A. Léger : La Pathologie Thyroïdienne. Médecine-Sciences Flammarion, Paris.
- J. Leclere : La Thyroïde. Expansion Scientifique Française.

Questions à choix multiples


1. Les hormones thyroïdiennes en excès entrainent :
A. Une diminution de la consommation tissulaire en oxygène
B. Une augmentation de la néoglycogénèse
C. Un effet chronotrope positif et inotrope négatif
D. Une hyperprolactinémie
E. Un hyperpéristaltisme gastrique et colique
2. Les taux plasmatiques de TSH sont élevés :
A. Dans la maladie de Basedow
B. Dans l’hypothyroïdie périphérique
C. Dans l’adénome toxique
D. Dans l’adénome thyréotrope
E. Dans l’hypothyroïdie induite par l’iode
3. Les signes inflammatoires ophtalmologiques peuvent être présents :
A. Dans le goître multinodulaire toxique
B. Dans la maladie de Basedow
C. Dans la thyroïdite d’Hashimoto
D. Dans l’adénome thyréotrope
E. Dans la thyroïdite de de Quervain
4. Le traitement par l’IRA d’une maladie de Basedow peut être suivi :

38
A. D’une aggravation de l’ophtalmopathie
B. D’une hyperthyroïdie
C. D’une insuffisance parathyroïdienne
D. D’une granulopénie
E. D’une hypothyroïdie
5. Le thyroïdectomie sub-totale peut être utilisée :
A. Dans l’hyperthyroïdie induite par l’iode
B. Dans la thyroïdite de de Quervain
C. Dans la maladie de Basedow
D. Dans l’adénome toxique
E. Dans l’adénome thyréotrope.

39
HYPOTHYROIDIE DE L'ADULTE (n° 338)
Jean-Claude Valcke
Endocrinologie - Diabétologie - Médecine Interne
Hôpital Boucicaut

HYPOTHYROIDIE DE L'ADULTE (n° 338)


Points importants
1. Définition
2. Etiologie
2.1. Causes thyroïdiennes :
2.2. Causes hypothalamo-hypophysaires
3. Physiopathologie
3.1. De l'hypothyroïdie
3.2. Des diverses étiologies
4. Diagnostic
4.1. Signes cliniques de l'hypothyroidie
4.2. Diagnostic différentiel
4.3. Diagnostic biologique
4.4. Diagnostic étiologique
5. Traitement
5.1. Il fait appel aux hormones synthétiques
5.2. Posologie
5.3. Modalités d'administration
5.4. Surveillance sous traitement
5.5. Cas particuliers
5.6. Le coma
EN CONCLUSION :
Références bibliographiques :
Questions à choix multiples

Points importants
L'hypothyroïdie est l'expression clinique et biologique de la carence en
hormones thyroïdiennes (HT).
Les HT exercent leurs effets physiologiques sur de nombreux tissus et
métabolismes ; de ce fait, leur carence s'exprime de façon polymorphe, peu
spécifique dans ses stades initiaux.
Cependant, la qualité de l'exploration fonctionnelle thyroïdienne actuelle permet

40
un diagnostic précoce et ainsi d'éviter les formes évoluées et compliquées, en
particulier le coma hypothyroïdien.
L'hypothyroïdie résulte soit d'une altération fonctionnelle et/ou organique du
corps thyroïde (C.T.) lui-même : ce sont les hypothyroïdies primaires ou
périphériques (95 % des étiologies), soit d’un déficit de la commande
hypothalamo-hypophysaire : ce sont les hypothyroïdies secondaires ou centrales
(5 % des étiologies)
Dans tous les cas, il faut préciser la cause de l'hypothyroïdie, quelque fois
directement curable
le traitement, le plus souvent substitutif à vie, est simple mais doit toujours
prendre en compte une observance médiocre, le risque d'une décompensation
coronarienne chez le sujet âgé, plus rarement le risque d'une insuffisance
surrénale aiguë. Il permet d'éviter une complication rare mais redoutable : le
coma hypothyroïdien.

1. Définition
C'est l'expression clinique et biologique de la carence en hormones thyroïdiennes
(H.T.).

2. Etiologie
Le tableau ci-dessous indique les causes principales de l'hypothyroïdie de l'adulte :

2.1. Causes thyroïdiennes :


C'est l'hypothyroïdie PRIMAIRE (95 % des cas) par :
insuffisance de tissu fonctionnel (destruction du CT)
atrophie idiopathique ou thyréose involutive
thyroïdites autoimmune, en particulier maladie d'Hashimoto
causes iatrogènes : post-IRA ou post-chirurgicales
processus infiltratifs
par défaut de synthèse hormonale :
substance anti-thyroïdienne (ATS, lithium)
excès d'iode
déficit en iode
interféron

2.2. Causes hypothalamo-hypophysaires


C'est l'hypothyroïdie SECONDAIRE (5 % des cas).
liées à des causes hypophysaires
adénome
maladie de Sheehan
- liées à des causes hypothalamiques :
tumeurs hypothalamiques (craniopharyngiome)

41
irradiations

3. Physiopathologie

3.1. De l'hypothyroïdie
La carence en H.T. a de multiples conséquences métaboliques et tissulaires :

3.1.1. Métaboliques
Diminution de la consommation d'O2 et de la production de chaleur centrale
(diminution du métabolisme de base) ;
Lipides : diminution de la dégradation du cholestérol et des LDL apoprotéines ;
diminution du catabolisme des VLDL ;
Protides : diminution de la synthèse et de la dégradation protéiques ;
Glucides : diminution de l'absorption intestinale et de la néoglucogénèse.

3.1.2.Tissulaires
Le tissu sous-cutané (tous les tissus en fait) est infiltré par le dépot de
glycosaminoglycans (GAG) substance composée de mucopolysaccharides,
d'acide hyaluronique et de condroïtine (défaut de dégradation).
Système cardiovasculaire : diminution des effets chronotrope et inotrope positifs
des HT conduisant à une diminution du débit cardiaque par abaissement de la
fréquence cardiaque et ralentissement de la contraction myocardique. L'HTA
n'est probablement qu'une association ; l'accélération probable de
l'athérogénèse par les modifications lipidiques favorise l'insuffisance coronaire.
Poumon : effet musculaire périphérique et nerveux central, aboutissant à une
hypoventilation avec hypoxie-hypercapnie
Système nerveux central : ralentissement de l'activité
Diminution de l'érythropoïèse
Muscle : ralentissement de la contraction et de la relaxation musculaires.
Système digestif : hypopéristaltisme oesophagien, gastrique, intestinal et
colique
Retentissement hormonal : diminution du catabolisme du cortisol ; diminution
de l'hormone de croissance et de sa réponse à divers stimuli ; diminution de la
clearance de l'eau libre en partie liée à une hypersecrétion d'hormone
antidiurétique (ADH) ; diminution de l'action de la PTH ; augmentation de la
prolactine dans 75 % des cas par divers mécanismes.

3.2. Des diverses étiologies

3.2.1. Atrophie "idiopathique"


De mécanisme longtemps mystérieux, il s'agit probablement du stade ultime d'une
thyroïdite auto-immune atrophiante jusque là asymptomatique.
En attestent :
la présence d'anticorps antithyroïdiens dans 80 % cas
l'aspect histologique : infiltrat lymphocytaire au sein de la fibrose

42
l'association possible à d'autres maladies auto-immunes
la fréquence du groupe HLA B8-DR3 chez ces patientes.

3.2.2. Thyroïdites auto-immunes


Le mécanisme auto-immun est incomplètement élucidé (de façon comparable à ce
qui est observé dans la maladie de Basedow).
Il est attesté par de nombreux arguments :
prédisposition génétique
anomalie de l'immunorégulation tissulaire et humorale avec auto-anticorps
antithyroïdiens (antithyroperoxydase, antithyroglobuline) à taux élevés,
infiltration lymphocytaire du corps thyroïde. L'hypothyroïdie s'explique d'une
part par l'importance de processus inflammatoire destructeur du CT, d'autre
part probablement par l'existence d'anticorps circulants, fixés sur le récepteur
de la TSH et bloquant son action (TBII bloquants). Il n'y a bien entendu pas
d'anticorps stimulants (TSI) comme dans la maladie de Basedow.

3.2.3. Les hypothyroïdies iatrogènes


Elles sont liées soit à la destruction volontaire du parenchyme thyroïdien (chirurgie,
IRA) pour cancer thyroïdien ou hyperthyroïdie, soit à des médicaments : riches en
iode, lithium, ATS etc... L'iode en particulier inhibe la synthèse des H.T. et la
protéolyse donc la libération des H.T. mais chez le sujet normal, il y a un
phénomène d'échappement.

3.2.4. Dans certains pays, le déficit marqué en iode entraine une


insuffisance de production hormonale.

4. Diagnostic

4.1. Signes cliniques de l'hypothyroidie


La sévérité de l'hypothyroïdie varie lar gement : du stade asymptomatique ou
infraclinique (ou seuls existent des modifications hormonales), à l'atteinte majeure
vitale du coma hypothyroïdien en passant par les diverses formes d'hypothyroïdie
clinique.

4.1.1. Les signes habituels de début sont :


apathie et diminution de l'activité
asthénie globale avec lenteur intellectuelle
frilosité
crampes
bouffissure des paupières et du visage
gain de poids
constipation
syndrôme dépressif
Ces signes sont peu spécifiques et d'installation lente et insidieuse chez un patient
de surcroît indifférent.

43
En présence de cette symptomatologie frustre, l'utilisation large des dosages
hormonaux permet de la rattacher à l'hypothyroïdie et d'entreprendre un
traitement précoce.

4.1.2. La forme typique, complète, évoluée :


Associe l'atteinte de nombreux organes et métabolismes dont le fonctionnement
normal requiert la présence d'HT.
Comporte les signes suivants dont le caractère commun est qu'ils sont ACQUIS.

4.1.2.1.Signes cutanéo-muqueux :
L'infiltration des espaces interstitiels par une substance mucoïde (GAG) qui
s'hydrate modérément :
rend compte de la prise de poids, modérée, sans véritable obésité ;
donne un aspect évocateur dès l'inspection. Cette infiltration diffuse intéresse :
• la peau donnant le myxoedème ou faux oedème, élastique, ne prenant pas
le godet . épaississant les paupières, le dos des mains et des pieds, les
doigts et orteils boudinésla face bouffie "en pleine lune"
• les muqueuses avec :
macroglossie, par épaississement de la langue
hypoacousie (par infiltration de la trompe d'Eustache)
ronflement nocturne
voix rauque, grave (par infiltration des cordes vocales), évocatrice, car
monocorde et lente
en outre la peau est :
sèche par tarrissement sudoral et sébacé
froide
pâle : pâleur cireuse, ou jaunâtre, nette au visage où les pommettes et
oreilles sont cyanosées ; paumes et plantes colorées, jaunâtres.
les phanères sont atteints :
cheveux raréfiés, secs, cassants
ongles striés et cassants
dépilation axilo-pubienne (le signe de la queue du sourcil classique est
plus rare).

4.1.2.2.Signes neuromusculaires :
Le maître mot est RALENTISSEMENT.
Ralentissement psychique avec :
indifférence à son état, somnolence, apathie, aspect inexpressif
diminution de l'attention, mémoire, idéation
Ralentissement moteur : asthénie d'effort ; geste rare et lent
Outre ce ralentissement psycho-moteur, on peut observer :
des paresthésies dans le territoire du nerf médian témoin d'un syndrome du
canal carpien

44
des troubles du comportement intermittent : bouffées de colère ou de
dépression

4.1.2.3.Signes musculaires :
Outre l'asthénie musculaire, il s'agit de : l'enraidissement, les CRAMPES, la lenteur
de décontraction et l'hypertrophie musculaire

4.1.2.4.Signes cardio-vasculaires :
Dyspnée d'effort, précordialgies, peuvent dominer le tableau clinique
Les bruits du coeur sont assourdis.
La bradycardie est inconstante
Les signes sont surtout paracliniques :
cardiomégalie, peu battante à la radio, témoin de l'infiltration myocardique et de
l'épanchement péricardique
ECG : bas voltage, T plat ou inversé
L'échocardiographie précise ces données myocardiques et péricardiques.

4.1.2.5.Signes digestifs :
Anorexie, nausée, dysphagie
Constipation, symptome le plus net,
à un stade très évolué, mégacolon et iléus paralytique peuvent s'observer
une ascite, riche en protéine, est présente dans 4 % des cas

4.1.2.6.Le syndrome d'hypométabolisme comporte :


frilosité
hypothermie modérée.
SIGNES CLINIQUES PRINCIPAUX DE L’HYPOTHYROIDIE DE L’ADULTE
Myxoedème (infiltration cutanéo-muqueuse)
Ralentissement psychomoteur
Frilosité, hypothermie
Constipation
Crampes

AU TOTAL :
L'hypothyroïdie entraîne une grave dysfonction neuromusculaire, cardiorespiratoire
et gastro-intestinale.

4.1.3. Formes cliniques atypiques


Elles sont fréquentes et multiples :
LES FORMES CLINIQUES DE L'HYPOTHYROIDIE DE L'ADULTE
LA FORME COMPLETE, CARICATURALE
Diagnostic facile mais trop tardif

45
LES FORMES MONO OU PAUCISYMPTOMATIQUES
Formes de début, fréquentes, diagnostic précoce grâce au dosage de TSH
LES FORMES ATYPIQUES
Savoir penser à l'hypothyroïdie
LE COMA MYXOEDEMATEUX
Terme évolutif d'une hypothyroïdie non traitée
Ce polymorphisme clinique pose de nombreux problèmes diagnostics. Qu'il s'agisse
:
de formes mono ou paucisymptomatiques de début
de formes trompeuses (avec un syndrome au premier plan)
musculaires, pseudomyotonique, hypertrophie pseudomyopathique
neuropsychique : démence, délire, syndrome cérébelleux
avec troubles génitaux révélateurs : ménorrhagies, surtout
syndrôme d'aménorrhée-galactorrhée par hyperprolactinémie ; insuffisance
lutéale et infertilité, avortements précoces répétés.
formes œdémateuses avec épanchement pleural, épanchement péricardique
(tamponnade ....), ascite, tous riches en protéines et cholestérol
à révélation biologique (on les reverra) : hypercholestérolémie, anémie,
élévation de TSH isolée (forme infra clinique)

4.1.4. Formes évoluées et compliquées


En l'absence de traitement, l'évolution spontanée conduit progressivement aux
complications : coeur myxoedémateux et surtout coma potentiellement mortel
Le coeur myxoedémateux :
3 complications cardiaques sont possibles :
L'insuffisance cardiaque :
Rare, de réalité discutée en l'absence de maladie cardiaque sous-jacente, causée
par une cardiomyopathie hypothyroïdienne (ralentissement de la fréquence et de la
contractilité myocardiaque provoquant une diminution du débit cardiaque), ou
causée par un épanchement péricardique abondant.
L'insuffisance coronarienne :
plus fréquente chez l'hypothyroïdien que chez le sujet euthyroïdien de
mêmes âge et sexe
conséquence d'une accélération (probable mais non prouvée) de
l'athérosclérose coronarienne au cours de l'hypothyroïdie prolongée)
MASQUEE par l'hypométabolisme et la diminution des besoins en O2 : les
manifestations angineuses sont rares en état d'hypothyroïdie
DEMASQUEE, notion essentielle, sous l'effet du traitement et du retour à
l'euthyroïdie
à rechercher donc avec soin avant le début du traitement
Bloc auriculo-ventriculaire et bloc de branche.
Le coma myxoedémateux :
Expression ultime d'une hypothyroïdie négligée, c'est une complication majeure,

46
mortelle dans 50 à 80 % des cas, malgré le traitement. Parfois révélateur de
l'hypothyroïdie et de diagnostic difficile.
Cliniquement : C'est l'installation progressive :
d'un COMA plus ou moins profond, sans signe de localisation, areflexique
avec souvent hyperprotéinorachie jusqu'à 3 g/l, associé dans 1/4 des cas
à des crises convulsives généralisées.
et aux signes classiques accentués : bradycardie, bradypnée,
hypotension, infiltration cutanée plus ou moins nette et surtout
hypothermie, excellent signe, parfois inférieur à 35°, présente dans 80 %
des cas
Biologiquement :
Hyponatrémie, hypokaliémie, hypoglycémie, anémie, hypoxie, et acidose
respiratoire (par hypoventilation alvéolaire d'origines centrale et
musculaire, encombrement, macroglossie).
Les facteurs déclenchants sont à connaître :
froid (95 % des comas surviennent en hiver)
infection
stress chirurgical ou traumatique
hémorragie
AVC (parfois au premier plan, peut faire méconnaître le coma
hypothyroïdien)
médicament (sédatifs, barbituriques, opiacés).
LE COMA MYXOEDEMATEUX
- Sans signe de localisation, aréflexique
- Crises convulsives généralisées (dans 1/4 des cas)
- Bradypnée
- Bradycardie (+ microvoltage et anomalie
de la repolarisation à l'ECG)
- Hypotension artérielle
- Hyponatrémie
- Hypoglycémie
- Anémie
- Hypoxie (hypoventilation alvéolaire)

4.2. Diagnostic différentiel


Compte-tenu du polymorphisme de l'hypothyroïdie de l'adulte, on conçoit les
multiples discussions diagnostiques en présence :
d'un coma
d'une prise de poids
de signes de vieillissement : hypoactivité, frilosité, dépilation, peau sèche, très
proches de l'aspect hypothyroïdien.
En fait, le diagnostic d'hypothyroïdie est plus souvent MECONNU que CONFONDU.

47
4.3. Diagnostic biologique
Etant donné les difficultés du diagnostic des formes précoces, les examens de
laboratoire doivent être largement utilisés.

4.3.1. Dosages hormonaux


Le diagnostic de l'hypothyroïdie PRIMAIRE est extrêmement simple :

4.3.1.1.Situation typique :
L'abaissement de la T4 libre caractérise l'hypothyroïdie (T4 est le principal
produit de secrétion du CT)
Le taux de T3 a moins d'intérêt car :
il peut être encore normal alors que la T4 est abaissée
il est fréquemment abaissé chez des sujets euthyroïdiens mais atteints
d'une maladie non thyroïdienne aiguë ou chronique (infection aiguë,
cirrhose, insuffisance rénale, diabète, dénutrition etc..). C'est le
syndrôme de basse T3 isolée.
L'élévation du taux de TSH plasmatique est le test le plus sensible du diagnostic
d'hypothyroïdie primaire.

4.3.1.2.Autres possibilités :
Au début des hyposecrétions thyroïdiennes, les taux plasmatiques de T4 et de
T3 peuvent être encore dans la fourchette de la zone normale, compensées par
une hypersecrétion de TSH dont le taux est isolément élevé.
Le test à la TRH n'a plus de véritable intérêt dans l'hypothyroïdie primaire,
compte-tenu de l'extrême sensibilité du dosage de TSH.

4.3.2. Retentissement hormonal

4.3.2.1.Au niveau hypophysaire :


Hyperprolactinémie modérée dans 75 % des cas, pouvant entraîner un
syndrome aménorrhée-galactorrhée qui peut être révélateur de l'hypothyroïdie.

4.3.2.2.Au niveau corticosurrénalien :


Excrétion des 17OH stéroïdes diminuée mais cortisolémie FLU normaux. Tests
dynamiques normaux. Cependant, le taux de sécrétion du F peut être diminué dans
50 % des cas dans les hypothyroïdies profondes et prolongées, réversible sous
traitement.

4.3.3. Autres anomalies biologiques


Elles témoignent du retentissement périphérique de la carence en H.T. Quelques fois
révélatrices, elles sont cependant de valeur diagnostique médiocre.
Hypercholestérolémie et moins souvent hypertriglycéridémie :
Anémie présente dans 30 à 60 % des cas :
soit normocytaire normochrome, arégénérative par hypoplasie médullaire
soit macrocytaire par diminution de la vitamine B12 et des folates et
exceptionnellement association à une anémie de Biermer
soit microcytaire hypochrome par diminution de l'absorption du fer et

48
ménométrorrhagie.
Enzymes musculaires élevées : CPK MM
Hyponatrémie de dilution dans les formes sévères

4.3.4. Explorations à visée étiologique


Dosages d'anticorps antithyroïdiens
Scintigraphie et captation d'I 123
Iodémie et iodurie des 24 heures
Recherche d'autres déficits hormonaux, notamment hypophysaire
Echographie thyroïdienne
MODIFICATIONS BIOLOGIQUES DE L'HYPOTHYROIDIE
- Hypo T4 et hypo T3 libres
- Hyper TSH (dans l'hypothyroïdie primaire)
- Hyperprolactinémie (3/4 des cas)
- Hypercholestérolémie (hypertriglycéridémie à un moindre degré)
- Anémie (normochrome normocytaire le plus souvent)
- CPK élevées
- Hyponatrémie de dilution (dans les formes évoluées)

4.4. Diagnostic étiologique


Une cause doit toujours être recherchée en vue de son traitement spécifique.
On s'aidera :
des antécédents personnels et familiaux : prise de médicaments, IRA dans les
antécédents...
de l'examen du CT. La présence ou non d'un goître, les caractéristiques de celui-
ci quidant le diagnostic
d'explorations complémentaires.
Deux groupes étiologiques d'importance inégale :
l'hypothyroïdie primaire : 95 % des cas
l'hypothyroïdie secondaire : 5 % des cas

4.4.1. Hypothyroïdie primaire

4.4.1.1. SANS GOITRE


Atrophie "idiopathique" ou myxoedème primaire. C'est une cause fréquente (40
%), survenant préférentiellement chez la femme post-ménopausée de 50 à 55
ans, mais parfois plus jeune. Le diagnostic est assuré par :
la scintigraphie montre une thyroïde de petit volume, hétérogène en
imagerie, à fixation basse,
parfois la présence d'anticorps antithyroglobuline et antithyroperoxydase
(anti TPO) à faibles taux.
Hypothyroïdie post-thérapeutique : à forte incidence actuelle, par destruction

49
anatomique de la thyroïde : thyroïdectomie totale pour cancer ou sub-totale
pour Basedow ou GMNT ; iode radio-actif ; radiothérapie pour cancer du larynx,
de l'oesophage ou maladie de Hodgkin.
L'hypothyroïdie peut survenir de façon retardée, loin du geste thérapeutique.

4.4.1.2.AVEC GOITRE
Thyroïdite chronique d'Hashimoto (cf le chapitre thyroïdite)
C'est l'étiologie avec goître la plus fréquente, chez la femme entre 40 et 60
ans.
L'hypothyroïdie y est inconstante et apparaît en cours d'évolution. Elle peut
être déclenchée par une saturation iodée à laquelle ce type de thyroïdite est
très sensible.
Le diagnostic est facile :
sur les caractères du goître,
la présence d'anticorps anti-thyroïdiens à titre élevé (anti thyroglobuline
et anti TPO)
Elle peut être associée à une MALADIE D'ADDISON d'origine auto-
immune : elle constitue le syndrôme de Schmidt.
N.B.:d'autres thyroïdites (cf Chapitre "Thyroïdite") :
subaiguë de de Quervain à rechute
thyroïdite "indolore" ou silencieuse
thyroïdite du post-partum
peuvent, plus rarement, évoluer vers une hypothyroïdie.
Hypothyroïdie médicamenteuse
Il s'agit d'une altération fonctionnelle, acquise et réversible de la thyroïde.
L'origine peut être évidente :
prise d'ATS
prise de lithium
méconnue à rechercher
prise excessive d'iode. La saturation iodée est compliquée d'hypothyroïdie dans
environ 5 % des cas.
De nombreux produits sont en cause, mais surtout l'AMIODARONE et les produits
de contraste.
Il s'agit d'une hypothyroïdie modérée avec goître ferme. Iodémie et iodurie élevées.
Fixation précoce du radio-iode (une image scintigraphique correcte peut être
obtenue de 30 à 60 mn) : la fixation n'est pas effondrée du fait de la stimulation
par la TSH de la captation de l'iode. Test au perchlorate positif : il démontre
l'augmentation du pool intrathyroïdien d'iodure et le bloc de l'organification et
suggère que l'hypothyroïdie est secondaire à la surcharge iodée.
L'hypothyroïdie rétrocède après l'arrêt du médicament, souvent lentement.
Cependant, elle peut être définitive quand il existe des anomalies sous-jacentes de
la fonction thyroïdienne (thyroïdite antérieure latente ; traitement antérieur par
radio-iode).
Le goître endémique par carence iodée

50
Bien que devenue rare en Europe, la carence iodée persiste en France. Elle
provoque fréquemment des goîtres chez l'enfant. Associée à d'autres facteurs :
goitrigènes alimentaires, facteurs génétiques, elle explique une part des goîtres
sporadiques de l'adulte. Mais l'hypothyroïdie y est rare.
Causes plus rares d'hypothyroïdie primaire
Les déficits congénitaux de l'hormonosynthèse représentent 10 à 20% des
hypothyroïdies de l'enfant. La révélation chez l'adulte est rare :
hypothyroïdie avec goître à captation habituellement élevée.
Les dysgénésie thyroïdiennes, notamment les ectopies du corps thyroïde,
cause majeure chez l'enfant, se révèlent quelques fois chez l'adulte jeune. A
la scintigraphie, pas de CT en position normale mais en position haute (base
de la langue par exemple).
Destruction exceptionnelle du CT par un processus infiltratif : sarcoïdose,
amylose, néoplasme ou lymphome diffus, thyroïdite de Riedel etc..

4.4.2. Hypothyroïdie secondaire


De nombreuses causes hypothalamohypophysaires (décrites ailleurs) peuvent
entrainer un déficit thyréotrope (en TSH). Mais il est très rarement isolé et
s'inscrit dans un tableau de panhypopitutarisme.
Déficit hypothalamique acquis par tumeur, irradiation. Il est habituellement
associé à d'autres déficits : GnRH...
Déficit hypophysaire : déficits multiples et acquis dans le cadre de la
pathologie hypophysaire à savoir maladie de Sheehan, adénome,
craniopharyngiome, granulome etc
Fréquence : 5 % des hypothyroïdies.
Cliniquement :
C'est un tableau plus discrêt avec peu ou pas d'infiltration cutanéo-muqueuse. En
revanche, il y a présence des signes de déficit des autres hormones hypophysaires.
Biologiquement :
T4 et T3 basses.
TSH basse ou normale (la présence d'un taux de TSH dans la zone de
normalité et non point élevée alors que les HT sont basses, signe
l'insufisance thyréotrope).
Le test de stimulation par TRH distingue en théorie le niveau de l'atteinte :
réponse de TSH plate si déficit hypophysaire
réponse de TSH positive mais retardée si déficit hypothalamique
D'autres déficits hypophysaires diversement associés sont à rechercher
systématiquement, notamment, le déficit corticotrope qui peut être masqué par
une hypothyroïdie prédominante. S'il est présent, son traitement doit précéder ou
accompagner celui du déficit thyréotrope. Sinon à l'instauration du traitement par
les HT, l'augmentation des besoins métaboliques peut révéler une insuffisance
corticosurrénale latente, dans un tableau d'insuffisance surrénale aiguë.

5. Traitement
Son but est de restaurer les concentrationsy tissulaires adéquates d'HT pour
supprimer les anomalies cliniques et biologiques.

51
Il est rarement étiologique :
suppression d'un médicament
d'une surcharge iodée
ablation d'une tumeur hypophysaire
traitement d'une sarcoïdose.
Il s'agit le plus souvent d'un TRAITEMENT SUBSTITUTIF A VIE, qu'il faudra faire
accepter par le patient.

5.1. Il fait appel aux hormones synthétiques


La LEVOTHYROXINE se présente sous forme :
de gouttes pédiatriques de L-THYROXINE® (1 goutte = 5 µg) (à conserver à
4°C)
de comprimés à 100 µg de L-THYROXINE®
de comprimés de LEVOTHYROX® à 25, 50, 75, 100 et 150 µg
d'ampoule injectable de 1 ml = 200 µg
La L-TRIIODOTHYRONINE ou LYO-THYRONINE se présente sous forme de
CYNOMEL® comprimés à 25 µg
Association de LT4 et de LT3 : EUTHYRAL®. Chaque comprimé contenant 20 µg
de LT3 et 100 µg de LT4.
De façon générale, la T3, hormone immédiatement active, est peu utilisée à cause
de sa demi-vie brève nécessitant des prises répétées et de petits signes
d'intolérance cardio-vasculaire gênants chez le sujet âgé. Elle est par contre
indiquée dans des situations particulières : sevrage ou traitement rapide.
La T4 est préférable car elle se fixe plus sur les protéines vectrices ; son relargage est
lent et sa demi-vie longue.
Elle se comporte comme une pro-hormone de T3 produite à partir du réservoir de
T4.

5.2. Posologie
Chez l'adulte jeune : 2 à 2,5 µg/Kg/j, c'est-à-dire 150 à 200 µg/jour (quelques
patients ont besoin de doses supérieures à 200 µg par jour car l'absorption varie
d'un sujet à l'autre).
Chez le sujet âgé : diminution de 15 à 20 % par décade : 1,6 à 1,9 µg/Kg/j soit
60 à 80 µg à 80 ans.

5.3. Modalités d'administration


Les produits sont à prendre en une fois, à la même heure, avant les repas
(absorption de 50 à 80 %).
La posologie initiale sera déterminée en fonction de l'âge, de l'ancienneté et de la
sévérité de l'hypothyroïdie, de l'existence d'une atteinte cardio-vasculaire. Quelques
exemples :
Chez le jeune adulte à affection récente : 100 µg par jour d'emblée à ajuster
ensuite tous les mois jusqu'à la dose optimale.
Chez le sujet de plus de 40 ans, sans problème cardiaque, 50 µg par jour, à
augmenter toutes les 4 semaines.

52
Chez le sujet de plus de 40 ans, avec hypothyroïdie ancienne et soupçonné
d'insuffisance coronarienne, le traitement sera extrêmement prudent et
progressif pour éviter l'aggravation de l'insuffisance coronarienne.
Par exemple : après un bilan cardiovasculaire soigneux, 10 à 20 µg de THYROXINE
par jour, à augmenter de la même dose toutes les 2 à 3 semaines, sous couvert de
suivi électrocardiographique et de médications anti-angineuses :
BB dès l'accélération du pouls
dérivés nitrés après correction de l'hypovolémie
inhibiteurs calciques

5.4. Surveillance sous traitement


Les meilleurs éléments de surveillance sont :
Clinique :
initalement perte de poids et polyurie
disparition spectaculaire de tous les signes
on vérifiera l'absence de surdosage (palpitations, nervosité et à la longue
risque d'ostéopénie)
on vérifiera aussi régulièrement la tolérance cardiaque, clinique et électrique.
Biologique :
taux de TSH dans l'hypothyroïdie primaire qui doit être dans la zone de
normalité. C'est l'élément essentiel, à doser 4 à 6 semaines après la dernière
modification de posologie.
T3 et T4 normales (la T4 libre est souvent un peu élevée). Chez le sujet âgé,
la normalisation de T4 et T3 suffit ; celle de TSH n'est pas nécessaire.
Les dosages sont pratiqués tous les mois ou les deux mois pendant la phase
d'adaptation, puis tous les ans ou les deux ans (modifications possibles des
posologies au cours du vieillissement).
Dans l'hypothyroïdie secondaire, seuls les dosages de T4 et T3 sont utilisables.

5.5. Cas particuliers


Insuffisance coronarienne
L'existence reconnue d'une insuffisance coronarienne impose que la mise en route
du traitement soit faite en milieu hospitalier : correction d'une éventuelle anémie
puis traitement substitutif très progressif associé à des mesures cardiologiques
spécifiques.
Insuffisance thyroïdienne secondaire
Rechercher l'existence d'une insuffisance corticotrope associée et la traiter avant
l'hypothyroïdie. Dans le doute, adjoindre 30 à 50 mg d'HYDROCORTISONE par jour
à la THYROXINE.
Syndrome de SCHMIDT
Le traitement de l'insuffisance corticosurrénale doit ici également précéder ou
accompagner celui de l'hypothyroïdie. Il comporte hydrocortisone et minéralo-
corticoïde.
Hypothyroïdie infraclinique
Son traitement est contreversé mais il paraît préférable de normaliser le taux de TSH.

53
5.6. Le coma
C'est une urgence à traiter en milieu hospitalier. On n'attendra pas les résultats des
dosages hormonaux. Dès les prélèvements sanguins faits, on utilisera les mesues
suivantes :
LT4 : 200 à 500 µg IV lente ou IM le premier jour (pour saturer le pool des
protéines vectrices). Puis 50 à 100 µg IV chaque jour.
HYDROCORTISONE : 200 à 300 mg IV toutes les 3 à 4 heures puis 100 mg par
jour.
Oxygénation et assistance respiratoire
Pas de charge hydrique ou sodée importante. L'hyponatrémie de dilution est
corrigée par la CORTISONE, la THYROXINE, et parfois une restriction hydrique.
En cas de choc : solutés de remplissage ou sang
Compensation de l'hypoglycémie
Pas de correction active de l'hypothermie ; pas de sédatif.
Traitement de la cause déclenchante

EN CONCLUSION :
3 risques thérapeutiques principaux :
Mauvaise compliance :
Décompensation d'une insuffisance coronarienne
Plus rarement, méconnaissance d'une insuffisance surrénalienne se révélant par
une crise aiguë.
LES POINTS ESSENTIELS DU TRAITEMENT
1) Utiliser préférentiellement la L-THYROXINE
2) Juger sur le taux de TSH le caractère adapté de la posologie
3) Dépister et traiter une insuffisance coronarienne avant de traiter par THYROXINE
4) Dépister et traiter une insuffisance surrénale avant le traitement par THYROXINE
5) Posologies très lentement progressives chez le sujet âgé, et particulièrement en cas
d'insuffisance coronarienne.

Références bibliographiques :
- A. Léger : La Pathologie Thyroïdienne. Médecine-Sciences Flammarion, Paris.
- J. Leclere : La Thyroïde. Expansion Scientifique Française.

Questions à choix multiples


1. La carence en HT a pour conséquences :
A. Une diminution du métabolisme de base
B. Une diminution du catabolisme des LDL apoprotéines
C. Une augmentation du catabolisme des VLDL
D. Une augmentation de la présence des glycoaminoglycans

54
E. Une diminution de la relaxation musculaire
2. Les AC antithyroïdiens peuvent être observés dans :
A. La maladie de Basedow
B. Le goître multinodulaire toxique
C. La thyroïdite de de Quervain
D. La thyroïdite du post partum
E. L'hypothyroïdie provoquée par l'amiodarone
3. Dans l'hypothyroïdie, les dosages hormonaux peuvent montrer les résultats
suivants :
A. Abaissement de T4 L et de T3 L
B. Abaissement de T4 L et élévation de TSH
C. Abaissement de T4L et TSH normale ou basse
D. Abaissement isolé de T3
E. Elévation isolée de T3
4. Dans l'hypothyroïdie, les anomalies biologiques suivantes peuvent être
observées :
A. Anémie macrocytaire
B. Elévation des ALAT-ASAT
C. Elévation des CPK
D. Hypocholestérolémie
E. Hyperprolactinémie
5. Dans quelle(s) étiologie(s) de l'hypothyroïdie, un goître peut-il être présent:
A. Carence iodée
B. Après traitement par l'IRA d'une maladie de Basedow
C. Maladie de Sheehan
D. Thyroïdite d'Hashimoto
E. Hypothyroïdie au cours de la lithothérapie.

55
HYPERTHYROIDIES DE L'ENFANT (n°337)
Raja Brauner
Service d'Endocrinologie et Croissance
Faculté et Hôpital Necker-Enfants Malades.

HYPERTHYROIDIES DE L'ENFANT (n°337)


Abréviations
Les points les plus importants
1. Etiologies et physiopathologie
1.1. Thyroïdite auto-immune
1.2. Nodule thyroïdien
2. Diagnostic
3. Evolution, pronostic, traitement
3.1. Antithyroïdiens
3.2. Autres traitements
Référence

Abréviations
TRAb : thyroïd receptor antibodies
TRAc : thyroïde récepteur anticorps = Ac antirécepteur de la TSH
TSI : thyroïd stimulating immunoglobulins
TSH: thyroïd stimulating hormone
T4: thyroxine

Les points les plus importants


Chez l'enfant, l'hyperthyroïdie est dans la quasi-totalité des cas due à une
thyroïdite auto-immune .
L'accélération de la vitesse de croissance en taille fait évoquer le diagnostic
d'hyperthyroïdie, surtout si elle est associée à des troubles du comportement et
à une diminution des performances scolaires.
La tachycardie est le signe le plus constant de l'hyperthyroïdie de l'enfant.
Le traitement de l'hyperthyroïdie de l'enfant est un antithyroïdien.
L'hyperthyroïdie est plus rare chez l'enfant que chez l'adulte.

56
1. Etiologies et physiopathologie

1.1. Thyroïdite auto-immune


Elle est aussi appelée goitre diffus toxique ou "Graves'disease". Chez l'enfant, elle
s'apparente par un certain nombre de caractéristiques à la maladie de Basedow de
l'adulte. Elle pose chez l'enfant un problème thérapeutique en raison des problèmes
posés par l'utilisation de l'iode radioactif. Elle est 7 à 8 fois plus fréquente chez les
filles que chez les garçons et elle débute rarement avant l'âge de 10 ans.
Les anticorps sont des immunoglobulines ayant la capacité de stimuler la thyroïde
(TSI). Ceci est dû au fait que ces anticorps ont la capacité de se lier au récepteur
de la TSH situé sur la membrane des cellules thyroïdiennes. Cette liaison stimule
l'adénylate cyclase, de la même manière que la TSH, d'où l'hyperthyroïdie. Ces
anticorps sont appelés TRAb ou TRAc.
Elle atteint une population ayant une fréquence familiale de pathologie thyroïdienne
supérieure à celle de la population générale. De même, elle peut être associée à
d'autres pathologies auto-immunes telles que le diabète insulinodépendant, la
maladie d'Addison ou la thyroïdite de Hashimoto. Dans cette dernière situation, le
taux plasmatique d'anticorps antithyroglobuline et antimicrosomaux est élevé.

1.2. Nodule thyroïdien


Cette situation est très rare chez l'enfant et chez l'adolescent. Il peut s'agir d'un
nodule unique ou d'un goitre multi-nodulaire. La plupart de ces nodules sont des
adénomes folliculaires et sont bénins. Le diagnostic de nodule est fait sur la
scintigraphie thyroïdienne. Celle-ci montre un nodule fixant l'iode radioactif alors
qu'au niveau du reste de la glande, la fixation est faible voire nulle. Le traitement
est l'exérèse chirurgicale du nodule.

2. Diagnostic
Tableau I : Signes de l'hyperthyroïdie de l'enfant

Signes cliniques (Les plus fréquents)


fonctionnels :
modification du comportement
diminution des performances scolaires
troubles du sommeil
physiques :
tachycardie
hypertension artérielle
goitre
Autres
perte de poids
diarrhée
accélération de la vitesse de croissance staturale
exophtalmie
Signes biologiques
T4 augmentée
TSH nulle
taux élevé d'anticorps (TRAc) dans le sang
Echographie
diagnostic différentiel avec nodule

57
L'échographie thyroïdienne confirme le goitre. La scintigraphie n'est nécessaire que
dans les cas où il y a un doute diagnostique sur un nodule.

3. Evolution, pronostic, traitement


Nous n'envisagerons que l'hyperthyroïdie par thyroïdite. L'objectif du traitement est
de réduire la production et les effets périphériques des hormones thyroïdiennes. Les
possibilités thérapeutiques sont :

3.1. Antithyroïdiens
Ils sont le traitement le plus utilisé et prescrit en premier chez l'enfant. Il s'agit
essentiellement de carbimazole (Néomercazole®, 1 cp = 5mg), plus rarement du
benzylthiouracile (Basdène®, 1 cp= 25 mg). Ils peuvent entraîner une neutropénie,
surtout au début du traitement. Il convient donc de vérifier la numération formule
sanguine. La dose initiale de Néomercazole® est de 20 mg/m2. Elle peut ensuite
être rapidement diminuée jusqu'à une dose d'entretien, obtenue au bout d'environ
un an, se situant entre la moitié et le tiers de la dose initiale. Le problème est la
durée du traitement. En effet, les tentatives d'arrêt sont souvent suivies de
rechute.

3.2. Autres traitements


Un changement de traitement est discuté dans les circonstances suivantes :
survenue d'un effet indésirable majeur des antithyroïdiens (neutropénie), ou goitre
volumineux remanié. Une thyroïdectomie subtotale ou totale est alors indiquée. Elle
entraîne une hypothyroïdie dans la majorité des cas. De plus, elle expose au risque
d'hypoparathyroidie permanente. L'iode radioactif n'est pas utilisé en France pour
traiter l'hyperthyroïdie de l'enfant.

Référence
Brauner R, Fontoura M. , Pathologie de la glande thyroïde chez l'enfant. Editions
techniques. Encycl

58
HYPOTHYROIDIES DE L'ENFANT (n° 338)

Raja BRAUNER
Service d'Endocrinologie et Croissance
Faculté et Hôpital Necker-Enfants Malades.

HYPOTHYROIDIES DE L'ENFANT (n° 338)


Abréviations
Les points les plus importants
1. Etiologies et physiopathologie
1.1. Hypothyroïdie congénitale
1.2. Hypothyroïdie acquise
2. Diagnostic
2.1. Nouveau-né et nourrisson
2.2. Enfant
3. Evolution, pronostic, traitement
Référence bibliographique
Cas clinique - HYPOTHYROIDIE DE L'ENFANT
Questions à choix multiples

Abréviations
TRH ou TRF : thyrotropin releasing factor
TSH : thyroid stimulating hormone
T4 : thyroxine
T3 : triiodothyronine
T3 :reverse T3

Les points les plus importants


Les hormones thyroïdiennes sont nécessaires au développement du système
nerveux durant les 2 premières années de vie. Pour cette raison, le diagnostic et
le traitement de l'hypothyroïdie congénitale sont une urgence.
L'étiologie la plus fréquente de l'hypothyroïdie acquise d'origine périphérique est
la thyroïdite.
L'étiologie la plus fréquente de l'hypothyroïdie acquise d'origine centrale est la
lésion hypothalamo-hypophysaire, en particulier le craniopharyngiome.
L'association ralentissement de la vitesse de croissance en taille et prise de

59
poids évoque une hypothyroïdie.

La spécificité de l'hypothyroïdie de l'enfant par rapport à celle de l'adulte est due à


la nécessité des hormones thyroïdiennes pour la croissance staturale et le
développement du système nerveux.
Tableau I. Contrôle des hormones thyroïdiennes

Organe Hormone
Hypothalamus TRH ou TRF
Anté-hypophyse TSH
Thyroïde T4, T3, rT3

1. Etiologies et physiopathologie
Le taux plasmatique de TSH est augmenté dans les formes périphériques et normal
ou bas dans les formes centrales. Dans les formes centrales, un test à la TRH est
nécessaire au diagnostic : il montre une augmentation insuffisante de la TSH
lorsque l'atteinte est hypophysaire et une réponse ample et prolongée de la TSH
lorsque l'atteinte est hypothalamique.
Tableau II : Principales étiologies de l'hypothyroïdie de l'enfant

Congénitale
Périphérique (TSH augmentée )
ectopie
athyréose
glande en place (troubles de l'hormonosynthèse, autres)
transitoire du nouveau né
Centrale (TSH normale ou diminuée )
insuffisance hypothalamo-hypophysaire
Acquise
Périphérique
anomalies congénitales à expression tardive
thyroïdite auto-immune
irradiation cervicale
goitre endémique (carence en iode)
surcharge (thalassémie, cystinose...)
Centrale
insuffisance hypothalamo-hypophysaire
idiopathique, tumorale ou après irradiation crânienne

1.1. Hypothyroïdie congénitale

1.1.1. Périphérique (le dépistage néonatal est détaillé dans le polycopié de


Pédiatrie, question n° 167)

60
Le diagnostic étiologique de l'hypothyroïdie congénitale périphérique repose sur le
résultat de la cartographie thyroïdienne obtenue par scintigraphie (à l'iode 123 ou
au Technétium). De 1977 à 1988 et dans le cadre de l'association française pour le
dépistage et la prévention des handicaps de l'enfant, 1895 cas ont été dépistés en
France. La distribution des étiologies est la suivantes : ectopie 50%, athyréose
26%, glande en place 16% ; 8% des enfants n'ont pas eu de scintigraphie. La
cause de la dysgénésie thyroïdienne (ectopie, athyréose) n'est pas connue. Parmi
les hypothyroïdies avec glande en place, la moitié environ est due à un trouble de
l'hormonosynthèse thyroïdienne. L'autre moitié reste de mécanisme inconnu en
dehors de quelques cas d'hypothyroïdie due à une anomalie du gène du récepteur
de la TSH. Les troubles de l'hormonosynthèse se transmettent sur le mode
autosomique récessif ; un goitre est fréquent.

1.1.2. Centrale
Elle est beaucoup plus rare que l'hypothyroïdie périphérique. L'insuffisance en TSH
fait partie d'une insuffisance anté-hypophysaire incluant l'hormone de croissance
dans tous les cas. Son mécanisme est varié : secondaire à une anomalie génétique
ou du développement, ou à un traumatisme pré- ou per-natal.

1.2. Hypothyroïdie acquise


Elle est définie comme le développement d'une hypothyroïdie chez un enfant
antérieurement euthyroidien. Elle peut être secondaire à une anomalie congénitale
à expression tardive, ou beaucoup plus souvent à une anomalie acquise de la
thyroïde.

1.2.1. Périphérique
L'hypothyroïdie a le plus souvent une expression clinique et biologique. A l'inverse,
dans certains cas, elle peut être compensée : le maintien d'un taux plasmatique de
T4 normal ou à la limite inférieure de la normale est obtenu au prix d'une
hypersécrétion de TSH. Cette situation peut se maintenir longtemps ou évoluer vers
l'hypothyroïdie décompensée.
Parmi les étiologies des hypothyroïdies acquises de l'enfant (Tableau II), la plus
fréquente est la thyroïdite de Hashimoto (avec présence d'anticorps antithyroïdiens
circulants de type antithyroglobuline et antimicrosomaux).

1.2.2. Centrale
L'insuffisance acquise en TSH fait partie, comme dans les formes congénitales,
d'une insuffisance anté-hypophysaire incluant l'hormone de croissance dans tous
les cas. Parmi les causes d'hypothyroïdie centrale acquise, citons les tumeurs de
cette région, en particulier le craniopharyngiome et l'irradiation crânienne.

2. Diagnostic
Le diagnostic est confirmé par le taux plasmatique de T4 abaissé. Le taux
plasmatique de TSH dépend de l'étiologie (voir plus haut).

2.1. Nouveau-né et nourrisson


Tableau III : Principaux signes cliniques de l'hypothyroïdie congénitale

Période néonatale : signes discrets voire absents

61
prolongation de l'ictère néonatal
hypotonie axiale
fontanelle postérieure large

Premières semaines de vie : signes non spécifiques mais associés


hypotonie axiale
difficultés à boire
macroglossie
constipation
ballonnement abdominal avec hernie
raucité du cri
enfant trop sage

En l'absence de traitement
insuffisance de croissance staturale
retard d'âge osseux
retard psychomoteur

Même si l'hypothyroïdie est le plus souvent diagnostiquée par le dépistage néonatal


systématique, les signes cliniques restent importants à connaître pour les raisons
suivantes : le dépistage ne permet pas le diagnostic de l'hypothyroïdie centrale; il
ne couvre pas tous les nouveau-nés du monde ; certains cas échappent au
dépistage (erreur technique ou expression tardive).
Les principaux signes cliniques sont rapportés sur le Tableau III. La radiographie
d'un genou de face permet d'avancer dès la première consultation vers le
diagnostic, en attendant le résultat des dosages biologiques. En effet, les points
d'ossification fémoral inférieur et tibial supérieur (appelés points de Beclard) sont
visibles chez le nouveau-né à terme. Leur non visibilité dans ce contexte est très en
faveur du diagnostic d'hypothyroïdie.

2.2. Enfant
Le tableau clinique dépend de l'importance de l'hypothyroïdie. Le signe le plus
évocateur est le ralentissement de la vitesse de croissance en taille, surtout s'il est
associé à une prise de poids. L'âge au ralentissement est un indicateur du début de
l'hypothyroïdie. Les autres signes sont: asthénie, constipation, frilosité, diminution
des performances scolaires. A l'examen clinique, il y a souvent une bradycardie. La
présence d'un goitre dépend de l'étiologie de l'hypothyroïdie.
L'âge osseux, évalué sur la radiographie de la main et du poignet gauches de face
par comparaison avec l'atlas de Greulich et Pyle, est inférieur à l'âge chronologique
(écart souvent supérieur à 2 ans).

3. Evolution, pronostic, traitement


Le traitement consiste en l'administration de thyroxine. Celle-ci existe sous forme
de gouttes (L-thyroxine ®, 1 goutte = 5 µg ou gamma) et de comprimés

62
(Lévothyrox®, 1 comprimé = 25, 50 75, 100 et 150 µg). Les gouttes sont utilisées
durant la première année de vie, puis elles sont remplacées par des comprimés. Le
traitement est administré en une prise quotidienne.
La posologie est de 8 µg/kg/jour durant le premier trimestre de vie, puis les
besoins diminuent pour atteindre 5 µg/kg/j vers l'âge de 2 ans. La surveillance se
fait sur les données cliniques (évolution de la croissance staturo-pondérale,
fréquence cardiaque) et sur les taux plasmatiques de T4 et TSH. La dose est
ajustée pour maintenir la T4 dans la zone limite supérieure de la normale et la TSH
détectable et <5 mU/l. Il est essentiel que le contrôle soit parfait, surtout durant la
première année de vie et ce en raison du rôle des hormones thyroïdiennes dans le
développement des structures nerveuses. Durant cette période, des ajustements
fréquents de la dose sont nécessaires du fait des modifications rapides du poids.
Une hyposidérémie est à rechercher et à corriger. Dans les hypothyroïdies d'origine
centrale, le traitement par T4 est associé au traitement des autres insuffisances
hypophysaires. Le traitement substitutif est nécessaire à vie, sauf dans certaines
thyroïdites avec récupération d'une fonction thyroïdienne normale. Le traitement
permet un rattrapage staturo-pondéral et une régression des troubles. Dans les
formes congénitales, le pronostic est bon si le traitement est débuté tôt (avant l'âge
de 1mois, voir question n° 167)

Référence bibliographique
Brauner R, Fontoura M., Pathologie de la glande thyroïde chez l'enfant. Editions
techniques. Encycl Med Chir (Paris, France) Pédiatrie, 4-105-A-10, 1995, 7p

Cas clinique - HYPOTHYROIDIE DE L'ENFANT


R... est le premier enfant de parents bien portants non consanguins. Il est né à
terme après une grossesse et un accouchement normaux, pesant 3500g et
mesurant 50cm. Le dosage de la thyrostimuline hypophysaire (TSH) fait de manière
systématique sur une goutte de sang prélevée au talon montre un taux de TSH
élevé à 100 mU/l. Ce résultat arrive après la sortie du nouveau-né de la maternité.
Le nouveau né est convoqué en urgence et le dosage sanguin fait au 10e jour de
vie confirme que la TSH est très élevée et la thyroxine basse. Cet enfant a donc
une hypothyroïdie congénitale.

Questions à choix multiples


1. Quelle est la première cause d'hypothyroïdie congénitale permanente ?
A. Trouble de l'hormonosynthèse thyroidienne
B. Insuffisance en TSH
C. Insuffisance en TRH
D. Ectopie thyroïdienne
E. Surcharge iodée
2. En ce qui concerne le traitement de cette hypothyroïdie congénitale, quelle
proposition est fausse?
A. Il consiste en l'administration de thyroxine à vie

63
B. Il est régulièrement adapté au poids
C. Il est administré en une prise quotidienne
D. La croissance staturale est médiocre
E. Il doit être commencé le plut tôt possible
3. Le dépistage néonatal systématique de l'hypothyroïdie congénitale a été mis en
place pour les raisons suivantes:
A. Fréquence élevée de 1/4000 de l'hypothyroïdie congénitale
B. Le pronostic mental dépend de la précocité du traitement
C. Le rattrapage statural est médiocre si le traitement est débuté après l'âge de
6 mois
D. Le diagnostic clinique d'hypothyroïdie est difficile chez le nouveau né
E. Fréquence de 1/1000 de l'hypothyroïdie congénitale
4. Les critères habituellement utilisés pour dire que la dose de thyroxine
administrée est correcte sont :
A. Croissance staturale normale
B. Taux sanguin de TSH normal
C. Taux sanguin de thyroxine normal
D. Réflexogramme achilléen normal
E. Taux sanguin de cholestérol normal

64
THYROIDITES
Jean-Claude VALCKE
Service d'Endocrinologie - Diabètologie - Médecine Interne
Hôpital Boucicaut

THYROIDITES
1. Définition
2. Thyroïdites aiguës
2.1. Thyroïdite aiguë suppurée
2.2. Thyroïdites liées a l'iode radio-actif
3. Thyroidite sub-aigüe
3.1. Etiologie
3.2. Physiopathologie
3.3. Diagnostic
3.4. Evolution - Pronostic
3.5. Traitement
4. Thyroïdites chroniques
4.1. Etiologie-Physiopathologie
4.2. Thyroïdite d'Hashimoto
4.3. Thyroïdite indolore et thyroïdite du post-partum
5. Thyroidite de Riedel
Questions à choix multiples

1. Définition
Il s'agit d'états inflammatoires survenant sur un CT antérieurement sain :
d'étiologies diverses,
d'intensité variable : aiguë, subaiguë ou chronique,
s'accompagnant d'euthyroïdie ou de dysthyroïdie souvent transitoires.

LES DIFFERENTES THYROIDITES

Thyroïdites aiguës (très rares)

Thyroïdites subaiguës (fréquence méconnue)

Thyroïdites auto-immunes (très fréquentes)

65
maladie d'Hashimoto (forme goitreuse)
thyroïdites atrophiques
thyroïdites silencieuses, indolores
thyroïdites du post-partum

Thyroïdites de Riedel (exceptionnelles)

2. Thyroïdites aiguës

2.1. Thyroïdite aiguë suppurée

2.1.1. Etiologie
Devenue très rare, il s'agit d'une invasion bactérienne localisée de la thyroïde par
voie hématogène ou lymphatique au cours d'une septicémie ou d'une affection de
voisinage.
Les germes abituellement en cause sont la streptocoque hémolytique, le
staphylocoque doré, le pneumocoque ou un germe anaérobie.

2.1.2. Diagnostic
Il est facile sur :
Début brusque par une douleur cervicale antérieure vive et une dysphagie.
Une tuméfaction localisée avec signes inflammatoires, ayant parfois atteint le
stade d'abcès.
Un contexte évident septicémique.
Les hormones thyroïdiennes sont normales et le diagnostic est assuré par les
hémocultures et parfois la ponction d'un abcès.

2.1.3. Evolution
Elle est habituellement favorable grâce à une antibiothérapie adaptée et parfois un
drainage chirurgical.

2.2. Thyroïdites liées a l'iode radio-actif

2.2.1. Physiopathologie
L'administration d'une dose thérapeutique d'I 131 entraine une nécrose cellulaire
au niveau des follicules associée à un processus inflammatoire.

2.2.2. Diagnostic
Il est facile par la surveillance systématique post-IRA thérapie : une à trois
semaines après le traitement, survenue d'une exacerbation de la thyrotoxicose
(relargage d'HT) et/ou de douleurs au niveau du CT.

66
2.2.3. Evolution
La thyroïdite régresse spontanément en quelques semaines. Le risque évolutif est,
chez le sujet âgé ou porteur de cardiopathie, la survenue ou l'aggravation d'une
cardiothyréose ou d'une crise aiguë.

2.1.4. Traitement
Il n'y a pas de traitement spécifique. Le risque de l'aggravation de la TT chez les
sujets fragiles sera prévenu par l'administration d'ATS et/ou de BB juste après l'IRA
thérapie.

3. Thyroidite sub-aigüe
C'est une thyroïdite souvent méconnue, donc probablement plus fréquente qu'on ne
le dit, appelée aussi : de DE QUERVAIN, granulomateuse ou à cellules géantes.

3.1. Etiologie
Elle est très certainement d'origine virale, mais sans virus spécifique. Elle survient
volontiers au cours des épidémies de rougeole, grippe, oreillons, ainsi qu'avec les
virus ECHO, coxsackie, adénovirus.

3.2. Physiopathologie
Le terrain est particulier : 10 femmes pour 1 homme surtout de 20 à 60 ans, mais
en fait à tout âge ; présence fréquente de l'antigène d'histocompatibilité HLA B35
ou HLA B25.
L'atteinte inflammatoire est diffuse, marquée par une infiltration granulomateuse
des follicules ; elle aboutit à une destruction des cellules folliculaires et la libération
massive d'hormones thyroïdiennes. Elle sera suivie d'une régénération du tissu
thyroïdien et d'une restitution ad integrum.

3.3. Diagnostic

3.3.1. Clinique :
Il repose sur trois syndrômes :
Une maladie infectieuse
générale plus ou moins brutale avec fièvre élevée, asthénie intense, céphalées,
arthralgies, myalgies, parfois précédée quelques jours plus tôt par une affection des
voies aériennes supérieures.
Un syndrôme local :
douleurs cervicales antérieures faisant découvrir :
un goître peu volumineux, diffus, homogène, ferme, surtout DOULOUREUX
avec IRRADIATIONS aux oreilles et à la nuque parfois révélatrices
(diagnostics souvent érronés des maladies de la sphère ORL)
Un syndrôme de thyrotoxicose,
1 à 2 semaines après le début, avec palpitations, sueurs, tachycardie,
tremblement, amaigrissement, SANS signe oculaire.

3.3.2. Les signes para cliniques

67
Ils confirment le diagnostic :
VS toujours élevée au-dessus de 50 mm ; hyperalpha2globulinémie et
hyperleucocytose modérée
Elévation de T4, T3 et de la thyroglobuline et TSH abaissée
Anticorps antithyroïdiens négatifs
Scintigraphie "blanche" (par freination de TSH et lésion des cellules
thyroïdiennes)
Captation nulle ou faible

3.4. Evolution - Pronostic


L'inflammation est réversible en quelques semaines : après la thyrotoxicose qui
peut durer 4 à 8 semaines, surviennent une brève phase d'euthyroïdie puis une
phase d'hypothyroïdie suivie enfin par un retour à l'euthyroïdie par réparation
progressive de la fonction thyroïdienne en 1 à 4 mois.
Un aspect évolutif particulier : les rechutes dans 20 % des cas pouvant conduire à
une hypothyroïdie permanente dans de rares cas. La guérison ad integrum est la
règle.

3.5. Traitement
On utilisera uniquement dans les formes très douloureuses :
les SALICYLATES : 2 à 3 gr par jour

ou les AINS par exemple le diclofénac ou voltarène® (25 à 50 mg 3 fois par


jour)

ou en cas d'échec, la Prednisone, Cortancyl® (30 à 40 mg par jour pendant 2 à


3 semaines) d'effet "magique" mais à diminuer très lentement pour éviter les
rechutes.
En phase de TT, les BB peuvent être utiles mais en aucune façon les ATS.

4. Thyroïdites chroniques
Il s'agit de thyroïdites auto-immunes dont la maladie d'Hashimoto est l'aspect le
plus fréquent et le plus typique.
Au plan nosologique, les thyroïdites auto-immune comprennent :
outre la thyroïdite d'Hashimoto (avec goitre),
l'atrophie "idiopathique" du CT (cf chapitre hypothyroïdie),
une grande part des thyroïdites du post-partum,
probablement la majorité des thyroïdites indolores

4.1. Etiologie-Physiopathologie

4.1.1. Les thyroïdites chroniques


Ce sont des maladies auto-immunes spécifiques d'organe, parentes proches de la
maladie de Basedow. Les arguments en faveur de la nature autoimmune sont
rappelés dans les chapitres hyper- et hypothyroïdie.
En résumé, ils sont de trois ordres :

68
Terrain prédisposé :
prédominance chez la femme de 40 à 60 ans, mais l'affection peut se voir
aussi chez l'enfant et l'adolescent ;
corrélation entre la fréquence de la thyroïdite d'Hashimoto et la présence de
l'antigène d'histocompatibilité HLA-DR5 (et HLA-DR3 dans les formes
atrophiques),
cas familiaux ;
Anomalie de l'immunosurveillance :
altération des immunités à médiation cellulaire et humorale :
production d'anticorps cytotoxiques et d'immunoglobulines de type divers,
notamment auto-anticorps se fixant sur le récepteur de la TSH et bloquant
l'activité de celle-ci.
Association à d'autres maladie auto-immunes

4.1.2. L'utilisation des INTERFERONS


Est à l'heure actuelle une cause nouvelle des thyroïdites auto-immunes. Très
souvent, ils n'ont qu'un rôle aggravant.

4.1.3. Anatomiquement
La thyroïdite d'Hashimoto est caractérisée par une hyperplasie folliculaire, de vastes
plages d'infiltrats lymphoplasmocytaires, des follicules lymphoïdes avec centre
germinatif, et une sclérose interstitielle débutante. Il en résulte une destruction
progressive des vésicules thyroïdiennes et des modifications hyper-eosinophiles de
quelques cellules parenchymateuses, hypertrophiées, appelées cellules de Hürtle.

4.1.4. Au niveau fonctionnel


la thyroïde peut être hypofonctionnelle par lésions cellulaires et altération de la
biosynthèse hormonale : défaut d'organi-fication révélé par la positivité du test au
perchlorate et expliquant l'extrême sensibilité des thyroïdites chroniques à la
surcharge iodée.

4.2. Thyroïdite d'Hashimoto


Elle représente le prototype de la thyroïdite chronique autoimmune.

4.2.1. Diagnostic clinique


L'élément essentiel est le GOITRE, diffus, régulier ou finement bosselé, ferme ou
dur (consistance du caoutchouc) indolore.
Initialement, iln'y a pas de signe clinique de dysthyroïdie, les hypothyroïdies
d'emblée étant rares.
Dans 5 % des cas, il existe une exophtalmie de type Basedowien.

4.2.2. Les examens complémentaires confirment le diagnostic


biologie:
d'anticorps à titre élevé
antithyroglobuline > 1/25000ème

69
anti TPO > 1/1000ème
VS et taux des gammaglobulines sont modérément élevées
T3 et T4 sont normales au moins initialement ainsi que la TSH
La scintigraphie
sans grand intérêt, montre une fixation hétérogène et faible

4.2.3. Formes cliniques de diagnostic plus difficile


Formes unilatérales :
Formes nodulaires : présence d'un nodule froid, isolé, posant le problème
diagnostic différentiel du cancer thyroïdien. D'où la nécessité d'explorations
supplémentaires, dont la cytoponction
Formes à début aigu transitoire (pseudo de Quervain) ; rares

4.2.4. Evolution et pronostic


Plusieurs possibilités :
Persistance du goître et de l'euthyroïdie
Persistance du goître et apparition d'hypothyroïdie (dans 50 % des cas)
Involution fibreuse : hypothyroïdie avec atrophie du corps thyroïde
Guérison surtout chez le sujet jeune, avec régression du goître mais persistance
fréquente de la positivité des auto-anticorps et risque évolutif à long terme vers
l'hypothyroïdie.
Très rare lymphome du CT qui justifie toujours la surveillance des thyroïdites
auto-immunes.

4.2.5. Traitement
Il est palliatif :
thyroxine en cas d'hypothyroïdie,chirurgie en cas de suspicion de cancer (forme
nodulaire).
La corticothérapie est sans efficacité sur l'évolution à long terme

4.3. Thyroïdite indolore et thyroïdite du post-partum


Appelée aussi thyroïdite silencieuse. Elle est souvent méconnue. Elle atteint 2
femmes pour 1 homme et tous les âges mais survient surtout entre 20 et 40 ans.

4.3.1. Etiologie et physiopathologie


La thyroïdite indolore est considérée désormais comme une maladie auto-immune,
de mécanisme semblable à celui de la thyroïdite d'Hashimoto. Une infiltration
lymphocytaire est présente dans les 2 affections. Cependant, l'absence de fibrose
et de centres germinatifs distinguent la thyroïdite indolore de la thyroïdite
d'Hashimoto.
Le tableau clinique initial s'explique par une destruction folliculaire rapide et le
relargage des HT (mécanisme proche de celui des thyroïdites subaiguës et
semblable à celui des rares formes à début aigu des thyroïdites auto-immunes).

4.3.2. Diagnostic

70
4.3.2.1.Les signes cliniques associent :
un goître modéré, indolore
une thyrotoxicose initiale souvent révélatrice de l'affection, mais transitoire
durant 1 à 2 mois. Il n'y a pas de signes oculaires.

4.3.2.2.Examens complémentaires :
VS normale ou peu élevée
HT élevées ; TSH abaissée
Autoanticorps faiblement positifs
Fixation basse ou nulle
Scintigraphie "blanche"

4.3.2.3.Formes cliniques :
Une forme particulière de thyroïdite silencieuse est LA THYROIDITE DU POST-
PARTUM.
Elle a tous les caractères d'une thyroïdite silencieuse :
- phase de thyrotoxicose avec petit goître indolore, un mois après
l'accouchement. Autoanticorps présents à positivité modérée.
- puis, hypothyroïdie transitoire et retour à l'euthyroïdie.
D'autres évolutions sont possibles :
hypothyroïdie d'emblée mais transitoire
évolution vers une thyroïdite d'Hashimoto typique
hypo- ou hyperthyroïdie permanente nécessitant un traitement

4.3.2.4.Evolution
La thyroïdite silencieuse, après la phase de thyrotoxicose qui dure quelques
semaines ou mois, évolue vers la guérison (CT et fixation normaux). Des rechutes
sont possibles.

4.3.2.5.Traitement
L'évolution spontanée vers la guérison recommande de n'utiliser aucune
thérapeutique agressive.
Les ATS d'ailleurs, s'ils sont utilisés, entraînent rapidement une hypothyroïdie (ou
sont inefficaces au stade de re largage des HT). Les BB peuvent être justifiés
pendant la phase transitoire de thyrotoxicose.

5. Thyroidite de Riedel
C'est une forme exceptionnelle de thyroïdite d'évolution très lente. Elle s'observe
surtout chez la femme de 30 à 70 ans. Elle est de cause inconnue.
Histologiquement
C'est une fibrose invasive, destructrice.
Cliniquement
Le goitre Il est dur, compressif, souvent adhérent. Les hormones thyroïdiennes sont
normales ou basses.

71
Le traitement
Il est chirurgical en cas de compression et surtout pour pratiquer un examen
anatomopathologique et éliminer un cancer.

Questions à choix multiples


1. Quel(s) élément(s) parmi les suivants est (ou sont) en faveur d'une thyroïdite
sub-aiguë de de Quervain :
A - Hypergammaglobulinémie
B - Taux élevé des anticorps anti-thyroglobuline
C - VS accélérée
D - Corps thyroïde indolore
E - Scintigraphie " blanche "
2. Quels aspects cliniques parmi les suivants peuvent être observés au cours de la
thyroïdite du post-partum :
A - Hyperthyroïdie transitoire
B - Hypothyroïdie transitoire
C - Hyperthyroïdie permanente
D - Hypothyroïdie permanente
E - Hyper puis hypothyroïdie
3. Quel(s) est (sont) le(s) facteur(s) caractéristique(s) de la thyroïdite d'Hashimoto
:
A - Présence fréquente de l'antigène d'histocompatibilité HLA-DR3
B - Goitre diffus, ferme, indolore
C - Anticorps antithyroperoxydase à titre élevé
D - Possibilité d'une hyperthyroïdie
E - Evolution constante vers l'hypothyroïdie

72
GOITRE (n° 58)
Jérôme Clerc
Service de Médecine Nucléaire - Hôpital Necker

GOITRE (n° 58)


Points importants
1. Définition
2. Diagnostic
2.1.Le diagnostic du goitre est clinique et repose sur la palpation systématique.
2.2.Anatomie Pathologique
3. Etiologies
3.1. Goitre endémique - Carence iodée
3.2. Goitre sporadique
4. Clinique
4.1.Découverte
4.2. Anamnèse, Signes et Symptômes - Que chercher lors de la consultation ?.
4.3. Évolution et Complications à Rechercher devant un Goitre
5. Examens complémentaires.
5.1. Biologie.
5.2. Imagerie.
6. Diagnostic Etiologique des GOITRES
6.1. Orientation initiale
6.2. Goitre Nodulaire Euthyroïdien.
6.3. Goitre avec hyperthyroïdie ou hypothyroïdie (± nodule).
Questions à choix multiples

Points importants
1.Le goitre est une augmentation du volume thyroïdien dont le diagnostic repose
sur la palpation. On parle de goitre si, au minimum, un lobe est supérieur à la
2ème phalange du pouce du sujet.
2.Le goitre est une maladie très fréquente dont la cause principale sur la planète
est la carence iodée alimentaire aggravée par certaines habitudes alimentaires:
consommation de manioc, cruciféracés. On parle de goitre endémique lorsque plus
de 10% de la population est porteuse d'un goitre.
3.Le goitre sporadique domine dans les pays assurant des apports iodés
alimentaires quotidiens > 100 µg/j. Ses causes sont alors génétiques, toxiques ou
secondaires (puberté, grossesse, médicaments etc..)
4. Les complications des goitres sont:

73
l'apparition de nodules, soulevant le problème du cancer
l'apparition d'une hyperthyroïdie: maladie de Basedow, goitre multinodulaire
toxique, goitre secondairement toxique ou autonomisé, thyroïdite subaiguës sur
goitres
l'apparition d'une hypothyroïdie: maladie de Hashimoto, causes iatrogènes, suites
des thyroïdites subaiguës, hypothyroïdie induite par une surcharge iodée...
l'apparition de signes compressifs, notamment en cas de goitres plongeants ou
monstrueux: dyspnée (trachée), dysphagie (oesophage), dysphonie (N.récurrent,
N. laryngé sup.) rarement, mais suspectes d'une évolution néoplasique.
5.La surveillance et le traitement des goitres relèvent de leur étiologie.
Les trois traitements majeurs des goitres sont: l'hormone thyroïdienne (goitres
récents et hypothyroïdies), la chirurgie (goitres nodulaires), l'iode 131 (goitres
nodulaires toxiques et contre-indications de la chirurgie).

1. Définition
Le goitre se définit comme une augmentation de volume de la thyroïde secondaire
à une augmentation du capital folliculaire.
Cette définition exclut les augmentations strictement focales (nodules) et pour
certains les thyroïdites, où l'infiltrat inflammatoire est alors responsable de
l'augmentation volumique.

2. Diagnostic

2.1.Le diagnostic du goitre est clinique et repose sur la palpation


systématique.
En Europe, la plupart des goitres sont de volume modéré ( < 40 à 60 g) et
dépassent exceptionnellement 300 g. Les variétés historiques et endémiques
peuvent dépasser un kilogramme (goitre monstrueux).
La masse thyroïdienne normale adulte reste inférieure à 18 g chez la femme et
à 25 g chez l'homme, correspondant à des dimensions lobaires d'environ 45 (L)
x 20 (l) x 18 (e) mm.

Tableau I : Définition clinique du goitre d'après Stanbury

normale (grade 0A): chaque lobe est < à la 2ème phalange du pouce du patient
grades 0B: un lobe est > à la 2ème phalange du pouce, mais la thyroïde n'est pas
visible même si le cou est en hyperextension
grade 1: la thyroïde est visible avec attention, en position normale ou en
hyperextension
grade 2 & 3: la thyroïde est facilement visible à l'inspection (2) voire à distance (3)
grade 4: goitre monstrueux

2.2.Anatomie Pathologique
Au début, le goitre est diffus et répond à une hypertrophie des cellules folliculaires.
Puis, les vésicules se chargent en colloïde tandis que l'épithélium s'amincit.

74
Enfin, le goitre devient hétérogène avec formation de nodules qui vont grossir, se
nécroser, saigner, fusionner, donnant tous les aspects des goitres multinodulaires
vieillis. La croissance folliculaire se fait le plus souvent de façon multiclonale.

Tableau II : Anatomie Pathologique des Goitres

Goitre diffus parenchymateux petites vésicules - souvent ferme - enfant


colloïde vésicules dilatées - souvent mou - adulte
Goitre hyperplasique nombreux micronodules - aspect hétérogène clinique
nodulaire
parenchymateux et nodules de toute taille, plus ou moins encapsulés
colloïde goitre multinodulaire et bosselé clinique de l'adulte

3. Etiologies
Toutes les situations où existent un défaut d'apport en iode et/ou trouble de
l'hormonogénèse, acquis ou congénital, peuvent entraîner par mise en jeu du
rétrocontrôle, une élévation de la TSH responsable au moins de l'initiation du
goitre.

3.1. Goitre endémique - Carence iodée


La fréquence du goitre reste très élevée sur la planète, notamment sous sa
forme endémique, du fait d'apports insuffisants en iode, oligo-élément présent à
l'état de trace dans l'organisme et indispensable à la synthèse des hormones
thyroïdiennes.
On parle de goitre endémique lorsque 20% au moins des enfants de 6 à 12 ans,
ou 10% de la population totale, sont atteints dans une même région.
Il existe grossièrement une corrélation inverse entre le taux de TSH, l'apport
iodé (<100 µg/j) et la prévalence du goitre. L'apport iodé recommandé est de
35 µg/j chez le nouveau-né, de 60 à 100 µg chez l'enfant, de 100 à 120 µg chez
l'adulte. L'excrétion urinaire, à l'équilibre, permet d'évaluer cet apport. Dès que
l'apport iodé est inférieur à 100 µg/j (adulte), des processus adaptatifs entrent
en jeu:
(i) l'augmentation de l'activité de la pompe à iodures, TSH-dépendante,
permet initialement le maintien des stocks intra-thyroïdiens (10 à 20 mg),
(ii) l'iodation de la Thyroglobuline se fait préférentiellement au profit de
formes moins iodées (MIT, T3) au détriment des formes plus iodées (DIT,
T4). En dessous de 50 µg/j d'apport, ces stocks diminuent inexorablement.
Certains facteurs alimentaires goîtrigènes aggravants sont connus: manioc,
cassava (Afrique), source de cyanoglucosides transformés en thiocyanates qui
inhibent la pompe à iodure, les cruciféracés (choux, colza) - en Europe et en
Australie.
La déficience iodée est à l'origine d'environ 200 millions de goîtres, d'une
prévalence du crétinisme supérieure à 3 millions d'individus et d'innombrables
retards de développement physiques et mentaux.
On parle de crétinisme quand 3 éléments sont réunis:
présence dans une zone d'endémie goitreuse par carence iodée
trois signes cliniques: retard mental, syndrome neurologique associant des
désordres moteurs, une surdité de perception, un langage déficitaire et une

75
hypothyroïdie avec retard de croissance,
constatation de la réversion du crétinisme après correction de la déficience
iodée.
La prévention du goitre carentiel passe par la supplémentation iodée de
l'alimentation ou par une prophylaxie médicamenteuse directe (Lipiodol
injectable et bientôt per os, 2 à 3 gélules par an).
En France la prophylaxie est théoriquement assurée par l'iodation du sel
alimentaire.

3.2. Goitre sporadique


Le goitre est sporadique quand moins de 10 % des adultes sont atteints. Le goitre
sporadique domine en Occident et dans les pays capables d'assurer une prophylaxie
efficace par l'iodation alimentaire (sel, eau, pain..). La prévalence du goitre en
France est estimée à 10-15%, avec d'importantes variations entre les régions.

3.2.1.Les facteurs favorisant


Les facteurs favorisant la survenue du goitre sporadique sont:
le sexe (6F/1H)
l'âge grandissant
le terrain familial (facteurs génétiques: gène gmn1)
la puberté
l'acromégalie (IGF1)
la grossesse (ßHCG)
les médicaments (Lithium, antithyroïdiens).
Certaines maladies génétiques peuvent entraîner un goitre révélé à l'âge adulte;
troubles partiels de l'organification, thyroglobuline déficiente ou anormale, défaut
de désiodase etc...L'association d'une surdité de perception, d'un goitre et d'une
hypothyroïdie évoque un syndrome de Pendred.

4. Clinique

4.1.Découverte
La découverte du goitre relève actuellement de l'examen clinique systématique ou
d'une consultation de la médecine du travail, d'une découverte incidente lors d'un
examen d'imagerie cervicale (Doppler), d'une gêne cervicale, plus rarement d'un
dysfonctionnement sécrétoire, hyper ou hypothyroïdie. La gêne cervicale
correspond au minimum à une sensation de pression cervicale, souvent
permanente. Elle peut résulter d'un goitre volumineux ou de consistance ferme à
dure.

4.2. Anamnèse, Signes et Symptômes - Que chercher lors de la


consultation ?.
Chercher les circonstances favorisantes:
Antécédents familiaux ou personnels de goitre (période pubertaire), grossesse,
noter l'origine géographique (zone d'endémie goitreuse) et évaluer le statut
alimentaire (carence iodée).

76
Chercher l'existence de nodules associés:
Nombre, siège, taille, à consigner sur un schéma.
Chercher des signes évoquant une pathologie auto-immune:
Anamnèse, autres pathologies auto-immunes, signes extra-thyroïdiens de la
maladie de Basedow et de Hashimoto.
Noter les médicaments interférant
avec la thyroïde: hormones thyroïdiennes, iode et médicaments iodés
(cordarone, produits de contraste), antithyroïdiens, 131I, lithium.
avec l'axe thyréotrope (inhibiteurs TSH): corticoïdes, somatostatine,
dopamine, hormones thyroïdiennes et dérivées.
Noter les pathologies générales interférant avec l'axe thyréotrope:
Maladies graves évolutives, dépression, insuffisance rénale - hémodialyse, tumeurs
hypothalamo-hypophysaires parfois responsables de déficits thyréotropes;
l'acromégalie s'accompagne fréquemment d'un goitre.

4.3. Évolution et Complications à Rechercher devant un Goitre


L'augmentation de volume du corps thyroïde est initialement homogène, puis
devient hétérogène avec apparition quasi constante de nodules, qui ont une
croissance et une fonction plus ou moins autonome vis à vis de la TSH. Les
complications des goitres en découlent:
Les goitres sont parfois révélés par, ou associés à une hyperthyroïdie :
La maladie de Basedow est la plus fréquente des hyperthyroïdies avec goitre
non nodulaire.
Les goitres nodulaires peuvent évoluer vers l'hyperthyroïdie s'ils contiennent
des nodules autonomes, chauds en scintigraphie (goitre multi-hétéro-
nodulaire). Chez le sujet âgé, les goitres acquièrent fréquemment une
fonction autonome responsable d'une hyperthyroïdie plus ou moins parlante
(goitre secondairement toxique).

Tableau III : Orientations étiologiques à l'examen clinique

examen clinique contexte clinique orientation


diagnostique
goitre diffus familial, puberté, EU goitre simple
grossesse
goitre diffus carence iodée EU ou Hypo. goitre carentiel
endémique
puis nodulaire
goitre diffus auto-immunité, Hyper./EU maladie de Basedow
exophtalmie
ferme, vasculaire
goitre diffus auto-immunité Hypo./EU maladie de Hashimoto
ferme, bosselé

77
goitre (multi)- familial, évolution EU goitre multinodulaire
nodulaire lente,
simple
complications
(/): Hyper (/): autonomisé, toxique
goitre nodulaire compressions EU évoquer un cancer
dur ou évolutif
adénopathies
goitre ferme et infectieux, Hyper./EU thyroïdite subaiguë
sensible
transitoire, récent (strumite)
goitre diffus congénital Hypo. trouble de
l'hormonogénèse

Les nodules sur goitre posent le problème du cancer, de l'hyperthyroïdie. Les


nodules peuvent augmenter de taille ou de nombre, saigner ou se nécroser,
entraînant des modifications rapides et souvent douloureuses de leur volume.
L'augmentation de volume explique les signes compressifs, surtout en cas de
goitre plongeant, c'est à dire dont le bord inférieur se projette à plus de 2 cm
sous la fourchette sternale.
Les goitres volumineux sont parfois responsables d'une déviation et/ou
compression de la trachée (dyspnée inspiratoire), d'une compression du nerf
récurrent révélée par une dysphonie ou une voix bitonale (goitres et nodules à
développement inférieur). Enfin, ils peuvent entraîner une dysphagie
(développement postérieur), un syndrome cave supérieur, exceptionnellement
un syndrome de Claude-Bernard-Horner. Tous ces signes sont classiquement
suspects de cancer.
Certains goitres sont douloureux, avec une irradiation cervicale ascendante aux
oreilles, évoquant alors une thyroïdite subaiguë sur goitre (strumite), parfois
une hématocèle (nécrose hémorragique).
Les goitres fermes évoquent des thyroïdites auto-immunes. Une hypothyroïdie
est fréquente à terme. Une consistance quasi pierreuse se rencontre dans les
cancers anaplasiques et les thyroïdites fibreuses de Riedel (très rares).

5. Examens complémentaires.
Trois examens dominent l'exploration des goitres: la biologie, l'imagerie -
échographie et scintigraphie -, la cytologie thyroïdienne en cas de nodules
palpables (ou > 10 mm, en échographie).

5.1. Biologie.
Devant un goitre, on dosera la TSH pour s'assurer de la normalité de la fonction
thyroïdienne.
S'il existe des signes cliniques d'hyperthyroïdie, on ajoutera un dosage de T4
libre. En cas d'hyperthyroïdie, on peut également prescrire un dosage des
anticorps anti R-TSH ("TRAK"), si la maladie de Basedow n'est pas typique
cliniquement.
S'il existe des signes cliniques d'hypothyroïdie, ou des arguments pour une
maladie auto-immune (goitre ferme, contexte familial ou personnel,
imagerie...), on demandera en plus de la TSH, la T4 libre et les anticorps
antithyroïdiens (ACATT: anti TG & anti TPO).

78
5.2. Imagerie.

5.2.1. Echographie.
L'échographie est prescrite de première intention, si la palpation est anormale.
Elle permet de mesurer le volume lobaire qui se calcule comme: V = π A B C / 6
(diamètres principaux). Elle montre des nodules infracliniques très fréquents,
mais de signification pathologique incertaine, et des nodules > 10 mm, qui
nécessitent une prise en charge (cf. nodule).
Au début le goitre est homogène puis devient hétérogène, secondairement à
l'apparition de nodules (goitre nodulaire) ou à des modifications de l'échostructure
globale. Les zones hypoéchogènes focales et globales évoquent les thyroïdites (cf.
infra). Un parenchyme globalement hétérogène avec zones pseudo-nodulaires
hypoéchogènes plaide pour une maladie de Hashimoto (MH) en phase de début.
Le caractère multinodulaire des goitres est très fréquent ( > 80%) et doit faire
discuter des exérèses plus larges afin de limiter le taux de réintervention.
L'échographie est utile à l'étude du suivi morphométrique des nodules et permet
d'apprécier leur augmentation de volume qui est un critère majeur pour indiquer
une cytologie ou une sanction chirurgicale.
L'existence d'un goitre hypoéchogène hypervasculaire et de vitesses
circulatoires élevées (0.5 à 1 m/s) évoque une maladie de Basedow.
L'échographie montre une hypoéchogénicité globale et profonde avec
augmentation modérée des vitesses circulatoires, dans les strumites (thyroïdites
subaiguës De Quervain sur goitre).
Dans la thyroïdite chronique de Hashimoto (MH) l'échogénicité est très variable,
classiquement diminuée, plus ou moins corrélée à l'hypothyroïdie biologique
dans les formes débutantes, majoritairement vues actuellement. Les vitesses
circulatoires sont ici normales ou discrètement élevées.
Limites de l'échographie: reproductibilité médiocre - sensibilité & spécificité
médiocres dans le diagnostic étiologique des hyperthyroïdies - performance
limitée pour les thyroïdes plongeantes - pas de diagnostic des nodules
thyroïdiens autonomes, des pathologies de l'iode.

5.2.2. Scintigraphie
La scintigraphie est prescrite de seconde intention
si l'échographie est anormale (nodule ≥ 10 mm)
si la fonction est anormale (hyperthyroïdie).
C'est un examen utile à la phase diagnostique; ce n'est pas un examen de
surveillance. Elle permet de mesurer le volume lobaire qui se calcule comme:
0,47 (π A B / 4)1,5 , où A, B la hauteur et la largeur du lobe.
Elle montre, avec une très bonne reproductibilité, les seuls nodules nécessitant
une prise en charge (> 10 mm). C'est le seul examen permettant d'identifier les
nodules chauds.
La thyroïde est initialement homogène en scintigraphie, puis devient
hétérogène, secondairement à l'apparition de nodules (goitre nodulaire), dont la
capacité de fixation est différente de celle du tissu sain.
Le caractère multinodulaire des goitres est très fréquent et doit faire discuter
des exérèses plus larges en cas d'atteinte bilatérale, afin de limiter le taux de
réintervention. Le caractère plongeant n'est pas un obstacle à l'imagerie
scintigraphique.

79
Des nodules froids et chauds peuvent être identifiés au sein des goitres. Les
nodules chauds évoluent dans 70% des cas vers l'hyperthyroïdie à 10 ans.
L'existence d'un goitre homogène hyperfixant (> 30% à 120') est
pathognomonique d'une maladie de Basedow. La scintigraphie fait le diagnostic
des formes intriquées avec une maladie de Hashimoto ("Hashitoxicoses")
Dans la thyroïdite chronique de Hashimoto (MH), la scintigraphie montre des
zones encore fonctionnelles, contrastées, et des plages non nodulaires mal
contrastées. La fixation est élevée au début de la maladie (> 15%), puis
s'effondre à la phase d'état (< 7% à 120').
Dans les strumites (et les thyroïdites subaiguës De Quervain), la scintigraphie
montre une image très mal contrastée, en rapport avec une fixation effondrée.
La scintigraphie identifie les pathologies liées à un défaut d'apport (goitre avide
d'iode) ou un excès d'apport iodé (hyper et hypothyroïdie).

6. Diagnostic Etiologique des GOITRES


Les différentes situations sont présentées sous forme de schémas décisionnels.

6.1. Orientation initiale


Rechercher les circonstances favorisantes et les complications éventuelles des
goitres
Prescrire: TSH, ± échographie
Si la palpation est ferme, qu'il existe un contexte auto-immun, rajouter un
dosage des anticorps antithyroïdiens ("ACATT": anti TPO et anti-TG).

80
Figure 1 Goitre: orientation initiale

NB: ACATT= anticorps anti-thyroïdiens

6.1.1.Resultats:
Tout est normal : GOITRE SIMPLE
Les AC anti-TPO sont > 0.
Il peut s'agir d'une maladie de HASHIMOTO en phase de début, d'une
maladie de BASEDOW Euthyroïdienne.
Conforter le diagnostic par l'imagerie (échographie, puis scintigraphie en
l'absence de confirmation diagnostique). Il faut rapprocher la surveillance
biologique et /ou traiter, selon les circonstances.
Si l'iodurie est basse :
Il s'agit d'un GOITRE CARENTIEL. Il faut traiter par la thyroxine et

81
supplémenter l'alimentation en iode (mesures diététiques ou
médicamenteuses)].
L'échographie est hétérogène ou montre des micro-nodules (< 10 mm).
Il s'agit d'un GOITRE HETEROGENE SIMPLE ou d'un GOITRE
(MULTI)MICRONODULAIRE SIMPLE.

6.1.2.Conduite à tenir:
Si le goitre est bien toléré, instituer une simple surveillance clinique espacée (/
1 à 2 ans)
Si le goitre est récent, mou, gênant, proposer un traitement par la LT4 (75 à
100 µg/j), de sorte que la TSH soit normale basse. Il faut alors évaluer l'effet du
traitement à 1 an, par une échographie (variation du volume).
En présence d'un goitre micronodulaire, on discutera plus volontiers un
traitement par la LT4 (75 à 100 µg/j), d'autant que la TSH est normale-haute.
Le traitement n'est maintenu que s'il existe une diminution à 1 an du volume du
goitre et/ou une régression des nodules (échographie de surveillance).
En cas de goître monstrueux (stade 4), il faut rechercher les complications
éventuelles: hyperthyroïdie, compression et cancer et Prescrire: TSH, T4 libre,
AC anti TPO & anti TG, scintigraphie thyroïdienne, radiographie de thorax (en
cas de compression: tomographies de trachée ou TDM). Le traitement est
chirurgical ou relève de l'iode 131 à visée réductrice, en cas de contre-indication
opératoire.

6.2. Goitre Nodulaire Euthyroïdien.


Le terme goitre nodulaire n'est pas un diagnostic mais une association morbide
(nodule + goitre) fréquente renvoyant à des étiologies variées. On utilisera le terme
de nodule pour des formations ≥ 10 mm.

6.2.1.Conduite a tenir
Rechercher les circonstances favorisantes et les complications éventuelles des
goitres: cancer, autonomisation, compression...
Prescrire: TSH, échographie, "ACATT": anti TPO et anti-TG, scintigraphie,
cytologie thyroïdienne (nodule hypofonctionnel).
Si le patient vient ou habite une zone d'endémie goitreuse, s'il existe une
carence alimentaire ou s'il s'agit d'une femme enceinte, doser l'iodurie des 24
h].
L'arbre décisionnel est présenté Figure 2.

82
Figure 2 : Exploration des "goitres nodulaires"

6.2.2. Surveillance médicale:


doser la TSH une fois par an, si des nodules ou des zones scintigraphiques sont

83
chaudes. Les nodules chauds sont exceptionnellement cancéreux et le risque à
terme est une hyperthyroïdie d'évolution très lentement progressive,
dangereuse sur le plan cardiaque.
Il faut envisager un traitement dès que la TSH diminue ou d'emblée si elle est <
0.1 µU/ml. Il est inutile à dangereux de prescrire de la T4 en cas de nodule
autonome.
surveiller le goitre et les nodules, par échographie et cytologie.
On peut discuter un traitement freinateur (LT4) , si la TSH est > 2 µU/m
Certains recommandent de doser une fois la Thyrocalcitonine (TCT, cf. cancer)

6.3. Goitre avec hyperthyroïdie ou hypothyroïdie (± nodule).


Se conformer au chapitre hyper et hypothyroïdie. Les principaux diagnostics
sont rapportés dans les tableaux ci-dessous.
Prescrire outre la TSH: T4 libre, AC anti TPO & anti TG, échographie
en seconde intention: scintigraphie, cytologie thyroïdienne.

Tableau IV : Goitre en hyperthyroïdie ± nodule (La TSH est ≤ min (µU/ml))

Diagnostic Biologie Scintigraphie échographie


Basedow (goitre) ACATT + diffuse du contraste hypoéchogène
hyperfixant (≥ 25%)
AC anti R-TSH + vitesses circulatoires

Basedow avec nodule ACATT + diffuse du contraste hypoéchogène


hyperfixant (≥ 25%)
ou goitre nodulaire AC anti R-TSH + vitesses circulatoires
"basedowifié" nodules (froids >
chauds)
Goitre multi- ACATT < 0 focale du contraste nodules tous types
hétéronodulaire
± zones froides
toxique
Goitre autonomisé ou ACATT < 0 diffuse et focale hétérogène +
secondairement du contraste ± zones nodules tous types
toxique froides
Hyperthyroïdie induite ACATT < 0 mal contrastée diffuse Nle à hypoéchogène
par l'iode
iodurie fixation ≤ 2% vitesses circulatoires

Basedow avec ACATT + bien contrastée diffuse hypoéchogène


surcharge iodée
AC anti R-TSH + fixation ≥ 5% vitesses circulatoires

GMT avec surcharge ACATT < 0 focale du contraste nodules tous types
iodée
à fixation basse
Hyperthyroïdie ACATT < 0 Fixation nulle normale
iatrogène et factice
TG Nle ou basse

84
Tableau V : Goitre en hypothyroïdie ± nodule (La TSH est ≥ MAX (µU/ml))s

Diagnostic Biologie Scintigraphie échographie


Hashimoto (goitre) ACATT + hétérogène hypoéchogène
zones chaudes vitesses circulatoires

myxoedeme ACATT + hétérogène hypoéchogène


atrophique
fixation basse vitesses circulatoires
(pas de goitre)
formes évolutives des autres thyroïdites: fixation basse hypoéchogène
post-partum, De Quervain, post-radique,
interféron
hypothyroïdie induite Auto-immunité < 0 contraste préservé normale
par l'iode
Iodurie fixation N ou
divers: cancers infiltrants, lymphomes, plages non fixantes hypoéchogénicité
amylose, infections, thyroïdite de Riedel non nodulaires focale

85
Fig. 1 - Schéma simplifié des rapports anatomiques palpatoires de la thyroïde, face
antérieure.
Les différentes structures sont superposées. A droite (A), on a représenté un lobe
thyroïdien normal et son isthme se projetant sur les premiers anneaux trachéaux. A
gauche (B), image d'un goitre multinodulaire volumineux dont le pôle inférieur,
rétroclaviculaire est impalpable.

86
Fig. 2 - Scintigraphie : Goitre multinodulaire Toxique

Goitre multinodulaire chez une patiente en hyperthyroïdie clinique et biologique


modérée. TSH: 0,05 µU/ml, T4 libre: 14 pM/l (N<20).
La présence d'un contraste au niveau des nodules chauds signe l'existence de
zones "autonomes", fonctionnant indépendamment de la TSH. Les nodules toxiques
(hypersecrétants) sont situés sur les deux lobes, dont les pôles inférieurs affleurent
la fourchette sternale.
La fixation globale est normale est normale haute (N : 12 ± 5% à 120'); la fixation
locale serait élevée au niveau des nodules toxiques (> 1%/g, N: 0,6 %/g).

87
Fig. 3 - Scintigraphie: Goitre Multinodulaire (Nodules froids multiples)

Goitre multinodulaire chez une patiente en euthyroïdie clinique et biologique. TSH:


1,12 µU/ml, T4 libre: 14 pM/l (N<20).
Les nodules (flèches) sont visibles car ils fixent moins bien que le parenchyme
avoisinant. On parle de nodules hypocontrastés ou de nodules froids. Notez que le
goitre est plongeant (le pôle inférieur descend nettement sous la fourchette) et
dévie la trachée à droite.
La fixation globale est normale à 12% (N : 12 ± 5%); elle est localement diminuée
au niveau des nodules hypocontrastés ( ≤ 0,4 %/g, N: 0,6 %/g).

88
Fig. 4 - Scintigraphie: Maladie de Basedow typique

- Goitre non nodulaire (homogène) chez une patiente en hyperthyroïdie clinique et


biologique marquées. TSH: 0,01 µU/ml, T4 libre: 34 pM/l (N< 20).
La fixation globale est très élevée à 58% (N : 12 ± 5%) ce qui signe le diagnostic
étiologique; elle est également élevée au niveau de chaque lobe (> 2%/g, N: 0,6
%/g).

89
Fig. 5 - Scintigraphie: Goitre Hétéronodulaire

(nodule froid droit déviant la trachée - nodule gauche chaud et hypersecrétant)

- Goitre multinodulaire chez une patiente en euthyroïdie clinique mais en


hyperthyroïdie biologique modérée. TSH: 0,09 µU/ml, T4 libre: 12 pM/l (N< 20).
Très gros nodule hypocontrasté droit déviant la fourchette (FD) vers la
gauche et petit nodule chaud gauche (NC) responsable de l'hyperthyroïdie.
La fixation globale est normale à 14% (N : 12 ± 5%); elle est localement
diminuée au niveau du nodule hypocontrasté (NF) et localement augmentée au
niveau du nodule chaud (NC).

90
Fig. 6 - Scintigraphie : Thyroïdite de Hashimoto

- Petit goitre ferme non nodulaire chez une patiente en euthyroïdie clinique et en
hypothyroïdie biologique modérée. TSH: 3,25 µU/ml, T4 libre: 11 pM/l (N<20).
Le lobe droit pèse 11 g et lobe gauche 9 g. La répartition du contraste est très
anormale avec à droite une zone hyper contrastée apicale et une zone centrale et
inférieure mal contrastée. A gauche, on observe un trou de fixation centro lobaire.
Ces défauts de captation de l'iodure correspondent à des zones détruites ou
infiltrées de lymphocytes dans le cadre d'une thyroïdite chronique auto-immune.
Anticorps anti-thyroïdiens: ATPO: 2569 UI/L
La fixation globale est normale basse à 8% (N : 12 ± 5%).

91
Questions à choix multiples
1. Citez les facteurs impliqués dans la genèse des goîtres parmi:
A. Une carence iodée
B. Une acromégalie
C. Un traitement par le Lithium
D. Un traitement par la LT4 (Thyroxine)
E Un taux élevé de prolactine
2. Parmi les propositions suivantes concernant le goître, une seule est exacte.
Laquelle ?
A. La définition du goître repose sur les données de l'échographie
B. La première cause de goître sur la planète est un trouble génétique de la
synthèse des hormones thyroïdiennes
C. Le manioc est un aliment naturel anti-goîtrigène
D. En cas de carence iodée, la thyroïde synthétise davantage de triiodothyronine
que de thyroxine
E. La prévalence du goître est évaluée à 2%, en France
3. Citez parmi les manifestations suivantes, celles qui peuvent compliquer
l'évolution d'un goître
A. Une dyspnée à prédominance expiratoire
B. Une dysphonie
C. Un syndrome cave supérieur
D. Un cancer nodulaire
E. Une tachyarythmie par fibrillation auriculaire
4. En présence d'un goitre et d'une hyperthyroïdie on évoquera une strumite
devant:
A. Un goitre mou et indolent
B. Une mesure de fixation effondrée de l'iode 123
C. La présence d'anticorps dirigés contre le récepteur de la TSH
D. Un taux de thyroglobuline effondré
E. Un taux de thyrocalcitonine élevé

92
CANCERS DE LA THYROIDE (n° 339)
Jérôme Clerc
Service de Médecine Nucléaire - Hôpital Necker

CANCERS DE LA THYROIDE (n° 339)


Points importants
1. Introduction
2. Epidémiologie
3. Anatomie pathologique
3.1. Classification des tumeurs thyroïdiennes.
3.2. Définitions OMS des épithéliomas différenciés de la Glande Thyroïde
4. Diagnostic
4.1. Les circonstances cliniques de découverte les plus fréquentes sont:
4.2. Clinique
4.3. Stratégie
5. Evolution
6. Traitement
6.1. Phase précoce (cf. Tab. III)
6.2. Surveillance.
7.Facteurs pronostiques et survie
7.1.Facteurs de mauvais pronostic:
8. Autres cancers thyroidiens
8.1. Cancer thyroidien anaplasique
8.2. Lymphomes thyroïdiens
8.3. Cancer medullaire de la thyroide
8.4. Néoplasies Endocriniennes Multiples
Questions à choix multiples

Points importants
Le cancer thyroïdien nodulaire est une affection rare dont la mortalité spécifique
est basse (<1% de tous les cancers), lorsque le traitement est bien conduit.
On distingue les cancers thyroïdiens différenciés (CTD) de souche folliculaire
(80%), des cancers médullaires (CMT) dérivés des cellules à thyrocalcitonine
(5%), Les cancers de souche folliculaire correspondent à 2 variétés: les cancers
papillaires (70%), caractérisés par des anomalies nucléaires détectables par la
cytologie, et les cancers vésiculaires, caractérisés par des anomalies
architecturales et des signes d'invasion. Les cancers papillo-vésiculaires sont

93
rattachés au groupe des cancers papillaires.
Le principal facteur de risque du CTD est l'exposition à une irradiation cervicale,
notamment dans l'enfance.
Le traitement du CTD repose sur la chirurgie, l'iode 131 et l'administration de
thyroxine.Pour les nodules ≥ 10 mm, la chirurgie est une thyroïdectomie totale
avec curage ganglionnaire homolatéral (jugulo-carotidien & récurrentiel) et du
compartiment central.L'iode 131 (4 GBq), administré en chambre protégée,
permet de détruire les reliquats thyroïdiens de la chirurgie, les foyers
microscopiques de cancers et fait le bilan d'extension par la scintigraphie du
corps entier. La contre-indication majeure est la grossesse.La thyroxine (T4) est
donnée à visée de freination de la TSH, car le cancer thyroïdien est hormono-
dépendant. La freination est définie par une valeur de TSH ≤ 0,1 µU/ml,
obtenue par la prescription de thyroxine (en moyenne: 2,5 µg/kg.j).
La surveillance du cancer traité repose sur la clinique et le dosage de la
thyroglobuline (TG), associé à la scintigraphie à l'iode 131. La clinique, aidée de
l'échographie cervicale, recherche les récidives locales et ganglionnaires.Le
dosage de la thyroglobuline doit montrer une valeur effondrée (TG < 1 µg/l) lors
du bilan pratiqué en défreination (TSH ≥ 30 µU/ml). Son élévation signe la
persistance de tissu thyroïdien sain ou métastatique.La scintigraphie à l'iode 131
ne doit plus normalement montrer de foyers fixants, après traitement.
Les principaux facteurs de mauvais pronostic du CTD sont: l'âge > 45 ans, la
taille de la tumeur, l'existence d'un franchissement capsulaire ou d'emboles
vasculaires, l'existence de métastases.
Le cancer médullaire de la thyroïde, de pronostic plus sombre, possède un
marqueur biologique: la thyrocalcitonine (TCT) et un marqueur génétique
permettant le diagnostic précoce des formes familiales, la mutation du gène ret. La
forme sporadique (80%) se présente comme un nodule associé à une élévation de
la TCT. La forme familiale, autosomique dominante peut s'intégrer dans le cadre
d'une néoplasie endocrinienne multiple (NEM).

1. Introduction
La glande thyroïde renferme quatre structures histologiques distinctes, pouvant
chacune donner naissance à des tumeurs: les vésicules thyroïdiennes ( cancers
papillaires et vésiculaires), les cellules C ou para folliculaires sécrétant la
Thyrocalcitonine (TCT) ( cancers médullaires), une trame conjonctivo-vasculaire
( sarcomes, angioendothéliomes) et des infiltrats de cellules lymphocytaires (
lymphomes).
Les épithéliomas thyroïdiens différenciés représentent 80 % de l'ensemble des
cancers thyroïdiens et ont un pronostic relativement favorable (S5ans > 85%).

Ils sont caractérisés par deux particularités originales: (i) leur capacité de capter
l'iode, qui administré sous forme d'un isotope radioactif (131I) permet la
localisation et l'irradiation spécifique des cellules cancéreuses et (ii) la sécrétion de
Thyroglobuline (TG), qui facilite la surveillance de l'évolution et le diagnostic
précoce d'éventuelles métastases.

2. Epidémiologie
Le cancer thyroïdien garde une incidence stable et basse voisine pour les formes
symptomatiques de 1 à 3 / 100 000 chez l'homme et 2 à 5 / 100 000 chez la

94
femme.
La mortalité globale est très faible, de l'ordre de 0,5 pour 100 mille, soit moins de
1% de l'ensemble des décès par cancer.
Facteurs de risques : Le principal facteur de risque est l'exposition à une irradiation
cervicale externe (teigne du cuir chevelu, angiomes de la face et du tronc,
hypertrophie thymique, autres radiothérapies) qui augmente le risque de
développement des nodules thyroïdiens et des cancers papillaires (90%). Des doses
délivrées aussi basses que 7 cGy sont incriminées et il existe une relation dose-
effet pour les valeurs de dose plus élevées. Ces cancers se développent avec une
latence d'environ 10 années avec un pic de fréquence à 20-30 années post-
irradiation.
Les autres facteurs sont : le sexe (4 femmes / 1 homme), l'âge qui est de 50 ans
en moyenne au moment du diagnostic. Ce cancer est rare chez l'enfant de moins
de 17 ans, sauf en cas d'irradiation.
La prévalence du type de cancer varie avec l'apport iodé des populations. Dans les
pays à apports élevés (300 à 600 µg/j), comme les USA, la fréquence des cancers
vésiculaires et anaplasiques - formes de plus mauvais pronostic - diminue au profit
des variétés papillaires.
Il existe une prédisposition familiale au cancer thyroïdien augmentant les risque
relatif pour les apparentés au premier degré.
Des anomalies caryotypiques (chromosomes 10 & 17) et des activations
d'oncogènes: ras, gsp, trk et ret sont également décrites.
Enfin, les sujets atteints de polypose colique ou d'un syndrome de Gardner ont un
risque très accru (> x 100) de développer un cancer papillaire.

3. Anatomie pathologique

3.1. Classification des tumeurs thyroïdiennes.


La majorité des tumeurs thyroïdiennes se présentent sous forme de nodules;
certains cancers sont infiltrants ou se présentent comme des microfoyers
multifocaux.
Plus de 95% des nodules thyroïdiens sont bénins, et réalisent sur le plan anatomo-
pathologique des adénomes. Les 5% restants se décomposent comme indiqué dans
le tableau suivant:

Tableau I : Classification Histologique des Tumeurs Malignes de la Glande


Thyroïde

Tumeurs primitives épithéliales de adénocarcinome différencié


souche vésiculaire
vésiculaire
C. Papillaire 60%,
papillaire & papillo-vésiculaire
Vésiculaire 20%
variantes : cellules oxyphiles
Indifférenciés 14 %
cancer insulaire
adénocarcinome indifférencié ou
anaplasique

95
Tumeurs primitives épithéliales dérivant cancer médullaire de la thyroïde
des cellules C (CMT: 5%)
(sporadique ou familial, association aux NEM)
Tumeurs primitives sarcome, lymphomes, tératomes...
non épithéliales
Tumeurs secondaires (<1%) métastases

3.2. Définitions OMS des épithéliomas différenciés de la Glande Thyroïde


Le cancer thyroïdien différencié comporte 2 grandes variétés histologiques: le
cancer papillaire et le cancer vésiculaire.
Le cancer papillaire est le plus fréquent et a un meilleur pronostic. Sa définition
repose essentiellement sur des critères de morphologie cellulaire, les anomalies
nucléaires. Ceci explique qu'il soit bien détecté par la cytologie.
Le cancer vésiculaire, est diagnostiqué sur des critères architecturaux et d'invasion
vasculaire. Ceci explique qu'il soit moins bien détecté par la cytologie.
Cancer papillaire:
Cancer épithélial à l'évidence de souche vésiculaire, typiquement constitué de
formations papillaires et vésiculaires et comportant des modifications nucléaires
caractéristiques".
Ces tumeurs sont plus rarement encapsulées. Surtout, les noyaux ont des aspects
caractéristiques, décrits en "grain de café", présentent des chevauchements "en
tuiles de toit", ont un aspect vitreux "en verre dépoli". Les cancers "papillo-
vésiculaires" sont par définition rattachés au groupe des cancers papillaires.
Une variété très fréquente est le micro cancer papillaire, définit par une taille
maximale ≤ 10 mm. Traité, son pronostic est excellent, voisin d'une population
indemne.
A l'opposé, le cancer sclérosant diffus, étendu à tout un lobe et fréquemment
métastasé d'emblée.
Cancer vésiculaire:
Cancer épithélial à l'évidence de souche vésiculaire mais ne possédant pas les
caractéristiques diagnostiques des cancers papillaires".
Dans ce type, il n'existe aucun critère cellulaire ou architectural qui à lui seul
permette d'affirmer la malignité, qui repose exclusivement sur la mise en évidence
d'une invasion par la tumeur. Ces tumeurs sont fréquemment encapsulées.
On distingue classiquement deux formes d'invasion, de pronostic séparé:
les cancers à invasion minime :caractérisés par l'existence d'embolies
vasculaires et d'un envahissement de la capsule
les cancers vésiculaires largement invasifs, de malignité évidente.
Variantes de cancers vésiculaires:
le cancer insulaire est un cancer vésiculaire moyennement différencié, de
moins bon pronostic
les cancers à cellules oxyphiles, qui sont éosinophiles (aussi appelées cellules
oncocytaires) et
les cancers à cellules claires.

96
4. Diagnostic

4.1. Les circonstances cliniques de découverte les plus fréquentes sont:


La découverte d'un nodule thyroïdien, ou la modification d'un nodule ou d'un
goitre déjà connu. Il faut réunir les arguments anamnestiques, cliniques et para
cliniques qui vont conduire à une décision opératoire.
La découverte d'une extension loco-régionale (clinique ou radiologique) ou à
distance (bilan de métastase).Il faut réunir les arguments permettant de
rattacher cette extension à une origine thyroïdienne éventuelle:
Sont évocateurs d'une origine thyroïdienne:
la mise en évidence d'un nodule thyroïdien ou la modification d'un goitre. Un
examen ORL et stomatologique s'imposent en l'absence d'éléments d'orientation
vers la thyroïde, et selon les signes d'appel. Les métastase osseuses
thyroïdiennes sont radiologiquement lytiques et peuvent fixer en scintigraphie
osseuse.
Le cancer est affirmé d'emblée sur un examen histologique: cellules
thyroïdiennes dans une adénopathie, présence de thyrogobuline révélée par
examen immuno-histochimique au sein d'une métastase, foyer carcinomateux
découvert sur une pièce thyroïdienne (traitement chirurgical d'une
hyperthyroïdie etc...).Il faut entreprendre le traitement du cancer.

4.2. Clinique
Palper le corps thyroïde à la recherche d'un nodule et en noter les
caractéristiques : siège, consistance, évolutivité, adhérence aux structures de
voisinage.
Palper les chaînes ganglionnaires cervicales et sus-claviculaires à la recherche
d'adénopathies. Le drainage lymphatique de la thyroïde se fait par les chaînes
spinales, cervicales transverses, jugulo-carotidiennes et récurrentielles.
Rechercher des signes d'extension: dyspnée, dysphagie, dysphonie, douleur, à
explorer par un examen ORL et stomatologique, une radiographie de thorax et
de trachée.

97
Tableau II : Anamnèse, signes et symptômes évoquant une lésion thyroïdienne
maligne

Interrogatoire et anamnèse Signes et symptômes


1.antécédent familial de cancer thyroïdien 1. nodule très ferme, non liquidien
2. antécédent personnel de nodule 2. croissance rapide
thyroïdien non fonctionnel
(en dehors des hématocèles)
3. radiothérapie cervicale et de
3. adénopathies cervicales
voisinage(ORL, sein, mantelet..)
4. paralysie récurrentielle
4. métastase connue
5. augmentation rapide de volume
(ostéolytique et poumon)
6. signes de compression
5. antécédents d'autre cancer traité
(dysphonie, dyspnée, dysphagie)
6. sexe masculin, âge < 16 ans
7. nodule fixé (adhérence aux structures de
7. Syndrome de Gardner
voisinage)
8. Antécédent de cancer médullaire familial
8. Diarrhées, flushes (Médullaire)
ou de NEM

4.3. Stratégie
Elle est exposée au chapitre: "nodule thyroïdien" et repose sur la clinique,
l'échographie, la cytologie, la scintigraphie. Brièvement:
Le cancer est probable d'emblée ou l'indication opératoire inévitable:
gros nodules (> 35 mm), nodules gênants
il existe à l'anamnèse ou à l'examen clinique des signes et symptômes
évoquant une lésion maligne
l'échographie montre des signes suspects: lésion hypoéchogène mal limitée,
contenant des calcifications et/ou une vascularisation centrale au doppler.
La décision d'opérer étant prise, il faut faciliter le traitement et réaliser à ce
stade:
un dosage de Thyrocalcitonine, car la découverte d'un cancer médullaire
imposerait une thyroïdectomie totale avec évidemment ganglionnaire
une cytoponction (à titre "thérapeutique"), qui permettra de prévenir le
patient, le chirurgien et l'anatomo-pathologiste (10 - 15 % de FN lors de la
lecture des lames à l'examen extemporané)
une scintigraphie, en cas de TSH ≤ 0,5 µU/ml, de nodule sur goitre, de
goitre plongeant, d'âge > 45 ans, d'échographie non contributive et chaque
fois que l'état du parenchyme extra-nodulaire n'est pas normal, afin
d'indiquer des exérèses élargies (limiter le % de réintervention).
Le cancer n'est pas évident d'emblée (cf. Stratégie d'exploration des nodules).
En cas de clinique et d'échographie non suspectes d'emblée (> 95% des cas), la
prévalence du cancer est très basse, négligeable devant celle des NTA. On
applique la stratégie d'exploration des nodules. Le diagnostic repose la plupart
du temps sur la cytologie dirigée sur les zones pathologiques, inventoriées par
la clinique (kappa: 0,2), l'échographie (kappa: 0 à 0,6), la scintigraphie ( kappa

98
> 0.7).
L'indication opératoire est posée devant une cytologie cancéreuse, une cytologie
suspecte notamment en cas de gros volume ou de l'existence de critères de
suspicion, cliniques ou échographiques, une augmentation régulière de la taille
du nodule lors de la surveillance échographique. En cas de cytologie non
contributive, on réitère une fois le prélèvement et on finit par opérer s'il est à
nouveau non significatif.

La scintigraphie au 201Thallium (201Tl) connaît un certain développement. Un


nodule est suspect d'être un cancer thyroïdien, si étant froid en 123I il est
chaud en 201Tl. Les indices décisionnels pour le thallium sont: Se:0.8, Sp:0.95.
L'analyse économique de la stratégie diagnostique du cancer montre que : (i) ne
rien faire coûte très cher de façon différée (cancers manqués), (ii) opérer tout le
monde coûte très cher et entraîne plus de complications chirurgicales; de plus la
compliance est mauvaise, (iii) le recours à un seul test (imagerie ou
cytoponction) " laisse passer " 4 à 6 fois plus de cancers que le recours à 2 tests
(imagerie et cytoponction), qui s'impose finalement.

5. Evolution
Le cancer papillaire a une croissance spontanée lente. Il donne souvent des
métastases ganglionnaires cervicales. Les métastases à distance sont pulmonaires,
rarement osseuses. Les métastases pulmonaires sont miliaires et micro-nodulaires
(9/10), plus rarement macro-nodulaires.
Le cancer vésiculaire est de moins bon pronostic. Ses métastases à distances
souvent osseuses sont révélatrices dans la moitié des cas. Elles sont
radiologiquement lytiques pures (sauf en cas de tassement vertébral) et sont
principalement localisées au bassin et au rachis. Les métastases pulmonaires sont
plus souvent macro-nodulaires. Tous patients confondus, les métastases
intéressent le poumon (50-70%), l'os (25-30%), plus rarement le cerveau.

6. Traitement
Effectué en milieu spécialisé il repose sur l'association séquentielle: chirurgie, iode
131 et freination hormonale par la LThyroxine. Le traitement est conditionné par les
facteurs pronostiques.

6.1. Phase précoce (cf. Tab. III)

6.1.1. Chirurgie
La plupart des équipes préconisent la thyroïdectomie totale extra capsulaire, ou
sub-totale (lobo-isthmectomie extra-capsulaire du coté du nodule et sous-
capsulaire sur le lobe opposé), si les parathyroïdes ne sont pas bien repérées, avec
curage jugulo-carotidien, sus-claviculaire et récurrentiel homolatéral.
Cette attitude est la seule qui permette (i) d'enlever les éventuels foyers
controlatéraux d'un cancer multifocal (ii) de faire une destruction complémentaire
du parenchyme restant en post-opératoire par l'iode 131* (iii) d'optimiser la
surveillance scintigraphique et biologique (TG), (iv) de supprimer la surveillance du
lobe controlatéral qui sera fréquemment réopéré.
D'autres préfèrent se limiter à une lobo-isthmectomie uniquement dans les cas à
pronostic favorable: lésion de petite taille (<10 mm) et absence d'envahissement
de l'isthme, histologie bien différenciée, extension négative, âge jeune. Cette

99
attitude permet de limiter les complications de la chirurgie et ne modifierait pas le
pronostic évolutif des petites lésions opérées, mais impose une surveillance du tissu
thyroïdien laissé en place.

Tableau III : Le cancer est probable d'emblée ou l'indication opératoire inévitable:


phase péri-chirurgicale

Tableau IV : Principales complications de la chirurgie

hématome compressif (précoce)


atteinte du nerf récurrent imposant un examen de la mobilité des cordes vocales
autres paralysies: nerf laryngé supérieur, spinales, XII
hypoparathyroïdie (doser la calcémie)
autres: cicatrices disgracieuses (chéloïdes, pigmentation) ou gênantes

6.1.2. Iode 131

100
L'iode 131 est un isotope radioactif de l'iode 127 (stable) se désintégrant par
émission d'un rayonnement ß (90%, émission électronique) et d'un
rayonnement gamma (10%, émission électromagnétique). L'émission ß cause la
majeure partie de l'irradiation tandis que le rayonnement gamma permet la
détection externe par scintigraphie.

Le délai d'action de l'I131 est long (des mois).


Buts du traitement

Le traitement par l'I131 (environ 4 GBq) a trois intérêts:


détruire les reliquats cervicaux (fonds de lobes); cette phase est souvent
dénommée "ablation",
détruire d'éventuelles métastases (maladie microscopique)
fournir une image d'excellente qualité qui fera l'inventaire des lésions
traitées.
Conditions d'administration
Pour être fixé au maximum, l'iode 131 doit être administré à des patients :
En hypothyroïdie thérapeutique (l'élévation TSH, secondaire à l'hypothyroïdie
thérapeutique de la thyroïdectomie stimule la pénétration de l'iode)
En carence iodée relative. On évitera toutes les causes de surcharge iodée
intercurrente qui pénaliseraient la pénétration de l'iode RA (à proscrire:
produits de contraste radiologique, bétadine, alcool iodé, cordarone, aliments
riches en iode - fruits de mer, agents épaississants E407...).
On administre l'Iode131 à des patientes ayant une contraception efficace.
Un délai d'un an après la dose d'iode 131 et un bilan négatif est requis pour
autoriser une grossesse.
Le traitement se donne per os, en chambre protégée (radioprotection des
personnels) dont les toilettes sont reliées à des cuves de décroissance
radioactive (protection de l'environnement). Les visites sont interdites. Le
traitement est bien supporté dans > 95% des cas; les patients restent
hospitalisés 72 à 96 heures.

6.1.3. La Thyroxine (LT4).


Le traitement par la LT4 est systématique:
pour inhiber la sécrétion de TSH, ce qui améliore le pronostic et diminue
l'incidence des rechutes,
pour substituer le patient (il n'a plus de tissu thyroïdien)
La posologie varie de 100 à 300 µg/j (2.5 µg/kg en moyenne) à adapter à la
tolérance clinique et au dosage de la TSH. Le délai d'ajustement du
traitement est long (>6 semaines) de sorte qu'il est inutile de doser les
hormones tôt après modification de posologie.

101
102
Tableau V : Contre-indications et complications du traitement par I131

Contre-indications du traitement par Complications du traitement par I131


I131
1. en jours:
1. Grossesse
Nausées ou vomissements
2. Espérance de vie < 2 ans
Douleur ou gonflement des parotides
3. Maladie psychiatrique grave
2.en mois:
4. Thrombopénie sévère
Thrombopénie transitoire
Précautions d'administration:
Xérostomie
incontinence, hémodialyse
Larmoiement
Inefficacité de l'administration
Dysgueusie
1. Surcharge iodée majeure
Troubles des cycles
2. TSH < 25 µU/ml
3. en années:
leucémies (doses > 20 GBq)
fibrose pulmonaire (si méta pulmonaires)
insuffisance médullaire (doses > 20 GBq)

La LT4 existe sous forme de LEVOTHYROX (25, 50, 75, 100 et 150 µg) et de
THYROXINE (cps à 100 µg, gouttes à 5 µg/goutte). La mise en oeuvre du
traitement hormonal, après la dose thérapeutique d'iode 131, doit se faire d'emblée
à posologie maximale chez l'adulte jeune, indemne de pathologie cardiaque. Dans
le cas contraire, il faut instaurer progressivement l'hormonothérapie.

6.2. Surveillance.
La surveillance doit être maintenue à vie, car il existe des rechutes très tardives,
d'autant mieux accessibles au traitement qu'elles sont dépistées tôt.
La surveillance repose sur la clinique, le dosage de la Thyroglobuline, et l'imagerie
scintigraphie à l'iode 131 ± échographie. Ces trois modalités sont complémentaires
et ne sauraient se substituer l'une à l'autre.

6.2.1.La surveillance clinique (/6mois):


Palper de la loge thyroïdienne et des aires ganglionnaires cervicales en s'aidant au
besoin d'une échographie.
Cliniquement, vérifier :
L'absence de signes d'intolérance au traitement freinateur: tachycardie,
amaigrissement et signes évoquant un surdosage (nervosité, thermophobie). En
cas de pathologie coronarienne, de troubles du rythme cardiaque, d'ostéoporose
avérée, les avantages et le niveau de la freination par l'hormone thyroïdienne
doivent être pesés.

6.2.2.La surveillance biologique (1/an):


évaluer le traitement par la thyroxine :.
Le bilan thyroïdien "normal" chez le patient thyroïdectomisé et traité par l'iode 131
est :

103
TSH ≤ 0,10 µU/ml
T4 libre normale haute (on peut accepter 120% de la norme sup., en
l'absence de signes cliniques)
T3 libre normale
Thyroglobuline < 0,1 µg/l.
dépister des rechutes ou une maladie persistante par le dosage de la
thyroglobuline (TG)
Ce dosage peut se faire alors que le patient reçoit l'hormonothérapie. Il est
alors moins sensible, car la synthèse de la TG dépend de la stimulation par la
TSH.
Pour sensibiliser le test, on peut faire le dosage lors d'une épreuve d'arrêt de
3 semaines, garantissant une TSH > 25 µU/ml, ou bientôt après
administration de rTSH, sous traitement par la lT4. Cette épreuve est
d'indication spécialisée.
Le résultat du dosage de la TG dépend de l'avancée de la maladie:
En présence de métastases viscérales, la TG est élevée en freination (TSH ≤
0,1 µU/ml) chez 90% des patients, et pratiquement chez 100% des patients
si la TG est dosée en stimulation (TSH > 25 µU/ml).
En présence de métastases ganglionnaires, la TG est élevée en freination
(TSH ≤ 0,1 µU/ml) chez 80% des patients et chez 90% des patients si la TG
est dosée en stimulation (TSH > 25 µU/ml).
En rémission complète ou en guérison, la TG est < 1 µg/l en freination (TSH
≤ 0,1 µU/ml). Elle peut être modérément élevée chez 10% des patients, si la
TG est dosée en stimulation (TSH > 25 µU/ml), notamment en présence de
reliquats cervicaux persistants.
La scintigraphie du corps entier à l'iode 131
C’est l'examen d'imagerie de référence. Elle doit être faite en stimulation par
la TSH (> 25 µU/ml), endogène, après arrêt du traitement par la thyroxine
(4 semaines), ou exogène, sous traitement par thyroxine (2 IM à 48 h de
rTSH).
Elle permet le diagnostic des récidives et des métastases fixantes (2/3), et le
contrôle de leur disparition après traitement par l'iode 131.
Les cancers thyroïdiens évolutifs, ne fixant plus l'iode 131, sont susceptibles
d'être visualisés par d'autres scintigraphies (111In-octréoscan, 18F-FDG).
L'imagerie non spécifique:
systématique:
radiographie de thorax (3 à 5 ans) à la recherche d'une miliaire, de
nodules
échographie cervicale: état de la loge thyroïdienne et adénopathies
sur signes d'appels:
Radiographies orientées du squelette
TDM ou IRM localisées,
Autres :scintigraphies (osseuse etc..).
La stratégie de surveillance intégrée est présentée figure2. Brièvement, les
récidives et les rechutes sont évoquées devant une élévation du taux
plasmatique de Thyroglobuline ou une imagerie positive.

104
Les récidives loco-régionales sont visualisées par la scintigraphie et doivent être
opérées, si possible, puis traitées par l'iode 131. La dose thérapeutique permet
également de sensibiliser la scintigraphie qui sera refaite 5 à 7 jours plus tard et
peut permettre de détecter des lésions inconnues.
Les métastases pulmonaires sont traitées par l'iode 131, jusqu'à disparition. Les
formes miliaires guérissent habituellement (95%) et le pronostic chute avec la
taille des nodules.
Les métastases osseuses doivent être opérées de première intention, puis
traitées par l'iode 131.
Les patients ayant une élévation de la TG à imagerie négative sont traités au
moins une fois par l'iode 131 (foyers microscopiques infra-scintigraphiques). La
scintigraphie au fluorodéoxy-glucose peut être utile si la scintigraphie ne fixe
plus l'iode 131.
Traitement des rechutes non opérables & non fixantes : Radiothérapie et
chimiothérapie sont les seuls recours quand l'exérèse du cancer thyroïdien
(primaire, récidive ou métastase) est impossible ou incomplète et qu'il ne fixe
pas l'iode. On propose 50 Gy en 5 semaines avec surdosage local de 5 Gy au
niveau du cou, et 30 Gy en 10 séances au niveau des os. La chimiothérapie est
décevante.

7.Facteurs pronostiques et survie

7.1.Facteurs de mauvais pronostic:


l'âge supérieur à 45 ans au moment du diagnostic
le caractère peu différencié du cancer (VES peu différencié < VES différencié ≤
PAP)
la grande taille de la tumeur initiale
une extension extra-capsulaire (papillaire)
une invasion vasculaire (vésiculaire)
un traitement chirurgical incomplet
l'absence de traitement complémentaire par 131I (si taille > 15 mm)
l'existence de métastases à distance
Dans ce cas, 4 facteurs atténuent le mauvais pronostic: l'âge jeune, la fixation de
l'iode 131, la taille petite des métastases et l'histologie mieux différenciée. Les
métastases osseuses seraient de plus mauvais pronostic (covariant avec la masse
tumorale).
Tableau VI : Classification pTNM

stade pTNM âge < 45ans âge > 45 ans récidive / décès*
stade I M<O T1 ≤ 10 mm 15% / < 2%
stade II M >0 T2 (10 < taille < 40 mm), ou 22% / 15 %
T3 (taille ≥ 40 mm)
stade III - T4 (extra capsulaire), ou 45% / 30%
N >0

105
stade IV - M>0 65% / > 60%
* d'après Loh KC, J Clin Endocrinol Metab, 1997:82(11):3553-3562
En l'absence de métastase à distance lors du diagnostic initial, et après traitement
radical, la survie globale est de 80 % à 10 ans, 60 % à 20 ans, 50 % à 30 ans. En
présence de métastase initiale, le pronostic est plus sombre: 50 % à 5 ans, 40 % à
10 ans. La présence d'adénopathies cervicales métastatiques ne semble pas
affecter pas le pronostic du cancer papillaire à 20 ans, mais favorise les rechutes
cervicales et les métastases pulmonaires.
La classification pTNM reste la plus employée et résume bien l'importance de l'âge
et de la taille tumorale. Avant 45 ans, il n'est pas possible d'avoir un stade > 2.
Fig. 2 : Surveillance au long cours d'un Patient Traité Par Iode 131

106
Légende : Principes de la surveillance d'un patient opéré et traité par l'iode 131.
Si le bilan est < 0 à 6 mois (clinique et échographie cervicale normales +
scintigraphie 131I normale + TG < 1 ng/ml), il suffit de surveiller la qualité du
traitement par lT4 (TSH ≤ 0.1 µU/ml) 2 fois/an, le dosage de TG (< 1 ng/ml), 1
fois/an. En fonction des facteurs pronostiques, tous les 3 à 5 ans, on proposera un
dosage de TG après administration de TSH recombinante (ou après sevrage en
LT4).
En présence de métastases, le traitement dépend de leur nature: chirurgie
première pour l'os , le poumon, les ganglions gros ou multiples puis 131I. Dans les
autres cas on traite d'emblée par 131I.
Si la TG est élevée de base ou sous stimulation par la TSH, on traite par 131I avec
scintigraphie sur dose thérapeutique.

107
Fig.3 : Séquence isotopique habituelle

Image sur dose à J7: reliquats lobaires


contrôle scintigraphique à 6 mois : disparition des images cervicales, TG< 0,5 µg/l

108
Fig. 4 : métastases pulmonaires (131I) et osseuse (flèche)

TG: 125 µg/l

8. Autres cancers thyroidiens

8.1. Cancer thyroidien anaplasique

8.1.1. Anatomie pathologique.


C'est un cancer survenant après 50 ans réalisant une tumeur hautement maligne
de souche vésiculaire, composée pour partie ou en totalité de cellules
indifférenciées. On distingue en histologie des formes à cellules fusiformes,
polygonales et à cellules géantes. Il existe souvent des zones mieux différenciées,
vésiculaires ou papillaires, associées. Sa fréquence est basse, inférieure à 5%.

109
La présence d'un contingent anaplasique dans un cancer différencié doit faire
considérer la tumeur comme anaplasique. Les cellules anaplasiques ne fixent pas
l'iode 131. Le marquage immuno-histochimique est parfois positif pour la TG (0 à
50 % de marquage), ou pour la kératine (40%).
La recherche d'oncogènes retrouve l'activation de ras, comme dans l'adénome et le
cancer différencié, mais surtout des mutations du gène de la p53.

8.1.2. Diagnostic.
Il s'agit d'une tumeur thyroïdienne rapidement progressive ou de la modification
d'un goitre connu. Les signes de compression ou d'extension loco-régionale sont
fréquents de même que les adénopathies. Les métastases sont fréquentes d'emblée
(20%), surtout pulmonaires. Le goitre peut être douloureux.
La scintigraphie montre une zone froide ± limitée, une déviation trachéale.
L'échographie montre un ou des nodules hypoéchogènes mal limités, avec possible
effraction de capsule. La cytoponction fait le diagnostic.

8.1.3. Traitement.
Il associe chirurgie, de réduction ou d'exérèse, radiothérapie externe et
chimiothérapie.
Dans les cas favorables la chirurgie est réalisable d'emblée puis est associée à une
radiothérapie externe hyper fractionnée (30 à 60 Gy en 40 jours), et une
chimiothérapie reposant sur la doxorubicine ou l'association bléomycine,
cyclophosphamide, 5FU. Parfois l'association première [radiothérapie +
chimiothérapie], permet une chirurgie seconde plus efficace. Le traitement du
cancer cervical prime pour éviter l'extension locale, source de décès par
suffocation. Le traitement des métastases est décevant.
La médiane de survie est de 1 an mais des réponses complètes et durables (2 ans)
peuvent s'observer chez des patients opérés et à faible masse tumorale résiduelle.

8.2. Lymphomes thyroïdiens

8.2.1. Généralités
La thyroïde peut être le siège de lymphomes primitifs essentiellement non
hodgkiniens (LNH) de type B. Ces LNH représentent moins de 5% des lymphomes
malins et environ 2% des cancers thyroïdiens. Les LNH thyroïdiens sont localisés au
corps thyroïde et à la région cervicale et sont à distinguer des localisations
thyroïdiennes de LNH systémiques.
Les LNH thyroïdiens sont associés à des lésions de thyroïdite auto-immune dans
25% des cas; cependant, les thyroïdites chroniques auto-immunes n'évoluent que
rarement vers un LNH thyroïdien (<1% ?).

8.2.2. Anatomie pathologique


La prolifération est monomorphe et infiltre de façon diffuse ou pseudo-nodulaire la
thyroïde; les effractions capsulaires sont fréquentes. Tous les types histologiques
de LNH sont possibles avec une prédilection pour les LNH diffus à grandes cellules
de type B. Une différentiation plasmocytaire voire immunoblastique est plus
fréquente (LNH de haut grade) et pourrait faire partie du groupe des lymphomes
MALT (mucosa associated lymphoid tissue), qui sont des proliférations du tissu
lymphoïde des muqueuses digestives et ORL.

110
Tableau VII : Classification schématique des lymphomes thyroïdiens

Lymphome thyroïdien
LNH thyroïdien de faible malignité lymphomes folliculaires à petites cellules,
mixtes et à grandes cellules
LNH thyroïdien de malignité intermédiaire lymphome diffus à grandes cellules
LNH thyroïdien de haute malignité lymphome diffus à grandes cellules,
immunoblastique
lymphome du MALT

8.2.3. Diagnostic
Les LNH thyroïdiens surviennent en général après 60 ans ou chez l'adulte jeune,
avec une prédominance féminine (3 à 7/1). Ils se manifestent par une
augmentation importante et parfois douloureuse du volume thyroïdien, en quelques
mois, diffuse ou pseudo-nodulaire, responsable de signes compressifs. Les
adénopathies cervicales sont présentes dans 20% des cas.
La scintigraphie montre des plages très hétérogènes voire afixantes, souvent de
grande taille et alors responsables d'une hypothyroïdie par infiltration-destruction,
ou plus précocement un ou des nodules froids. L'échographie montre des plages
très hypoéchogènes, mal limitées. Les anticorps antithyroïdiens sont positifs une
fois sur deux. La cytoponction fait le diagnostic dans 75% des cas. L'immuno-
histochimie anti-antigène commun leucocytaire (LCA) est souvent positive.

8.2.4. Traitement
Les formes intra-thyroïdiennes sont de bon pronostic (80% à 5 ans), quel que soit
le type histologique. En cas d'extension (extra-capsulaire, ganglionnaire ou à
distance), la survie est d'autant meilleure que le grade est bas (la malignité est
faible): Survie à 5 ans: Haut Grade (15%), Grade Intermédiaire (75%), Bas Grade
(>90%).

8.2.4.1.Formes localisées:
thyroïdectomie totale ± radiothérapie complémentaire (40 Gy).

8.2.4.2.Formes diffusées:
LNH de haut grade: thyroïdectomie, puis polychimiothérapie, 3 cures de CHEP
(cyclophosphamide, eldisine, prednisolone ± adriamycine), puis radiothérapie.
LNH de bas grade: thyroïdectomie, puis radiothérapie, puis chimiothérapie
LNH de type MALT: thyroïdectomie, chimiothérapie.

8.3. Cancer medullaire de la thyroide


Le cancer médullaire (CMT) est une tumeur maligne présentant à l'évidence la
différentiation des cellules C. Son pronostic est plus sévère que celui du cancer
différencié de souche vésiculaire et dépend largement de la qualité de l'exérèse
chirurgicale. Il est souhaitable qu'un diagnostic pré-opératoire soit fait, reposant
essentiellement sur le dosage de la Thyrocalcitonine (TCT) qui permet également le
dépistage des récidives et la sélection des cas familiaux. Il existe une forme
sporadique (80%) et une forme familiale (20%) transmise sur un mode
autosomique dominant. Il peut rester isolé ou s'intégrer à une polyendocrinopathie

111
(NEM pour néoplasies endocriniennes multiples). Sa fréquence, bien que sous-
estimée, reste basse: 5 à 10% des cancers thyroïdiens.

8.3.1. Anatomie pathologique


Les cellules sont polygonales, rondes ou fusiformes, souvent éosinophiles ou pâles
et forment des tumeurs d'architecture variée. L'immuno-histochimie montre une
positivité du marquage anti TCT. Parfois d'autres substances sont identifiées
(CGRP, produit d'un épissage alternatif du gène de la TCT, ACTH, responsable de
syndrome de Cushing). Le stroma des CMT contient généralement une substance
amyloïde. Il peut exister des tumeurs mixtes, médullaires et de souche vésiculaire.
Dans les formes familiales, les tumeurs sont souvent bilatérales classiquement à
l'union 1/3 supérieur 1/3 moyen des lobes, et succèdent à une phase d'hyperplasie
des cellules C.

8.3.2. Diagnostic

8.3.2.1.Clinique.
La forme sporadique
Atteint plus souvent la femme, vers la cinquantaine. Elle ne sera affirmée que si
l'enquête familiale reste négative et que si l'histologie ne montre qu'une tumeur
unilatérale, sans hyperplasie des cellules C.
Les formes familiales (il existe un autre cas index familial)
Doivent être dépistées avant 15 ans. L'identification de mutations germinales du
gène ret, présentes dans les NEM et le CMT familial, a transformé la recherche des
cas familiaux. Les mutations sont présentes dans près de 90% des CMT familiaux
et >95% des NEM2A. Elles sont autosomiques dominantes à forte pénétrance.

8.3.2.2.Les Circonstances de Découverte sont :


un goitre souvent micro nodulaire ou un nodule thyroïdien :
Parfois sensible, froid en scintigraphie. Les adénopathies cervicales sont parfois
révélatrices. Il faut rechercher un goitre dans les antécédents familiaux.La
cytologie peut être évocatrice d'emblée ou après immunomarquage anti-TCT. Pour
certains, un dosage de la TCT est systématique devant tout nodule froid thyroïdien.
D'autres le réserve aux nodules du 1/3 moyen 1/3 supérieur ou en cas de signes
d'accompagnement:
L'existence d'une diarrhée ou de flushes (30%) :
La diarrhée résulterait de la sécrétion de TCT ou d'autres peptides: ACTH, MSH,
VIP, SMS, NGF, ß-END etc...
un bilan de cancer :
Révélé par des métastases (poumon, adénopathies, foie, os), un taux d'ACE élevé,
un syndrome de Cushing paranéoplasique. L'immuno-histochimie anti TCT fait le
diagnostic.
Des antécédents familiaux de cancer thyroïdien :
A fortiori médullaire, de phéochromocytome, d'hyperparathyroïdie.
Une atteinte évoquant une NEM de type 2. [cf Phéochromocytome et HTA
secondaires] :
Schématiquement: Phéochromocytome: hypertension artérielle, triade céphalées
sueurs palpitations, diabète, syncope et troubles du rythme. Hyperparathyroïdie:

112
coliques néphrétiques, asthénie, myalgies etc...
On distingue les NEM 2a (90%) réalisant le syndrome de Sipple (CMT +
phéochromocytome + hyperparathyroïdie) et les NEM 2b (CMT +
phéochromocytome + ganglioneuromatose et habitus évoquant le syndrome de
Marfan).
Dans les NEM2a, le phéochromocytome est souvent bilatéral, parfois ectopique,
rarement malin; il peut être totalement asymptomatique et succède souvent à la
découverte du CMT.

Tableau VIII : Grandes caractéristiques des cancers médullaires :

caractéristiques CMT CMT NEM2a NEM2b


sporadique familial
age habituel (ans) > 50 < 20 < 20 <10
phéochromocytome 0 20 - 50 20 - 50 0
hyperparathyroïdie 0 0 25 <1
CMT bilatéral non oui oui oui
mutation de ret 45%, 85%, >95%, >95%,
somatique germinale germinale germinale

Dans les formes 2b rares, il existe une hyperplasie non fonctionnelle des plexus
nerveux, pouvant occasionner un syndrome occlusif chez l'enfant (pseudo-
Hirschprung). Chez l'adulte, il participe au syndrome de Gorlin, qui associe le
phéochromocytome à un syndrome dysmorphique: grosses lèvres, éversement des
paupières, morphologie rappelant le syndrome de Marfan - aspect allongé des
membres, amyotrophie - des neuromes multiples bien visibles sur les lèvres, la
langue et les paupières et une neuromatose oculaire se manifestant par un
épaississement des fibres cornéennes, visible à la lampe à fente.

8.3.2.3.Diagnostic biologique
TCT :
Le dosage de la TCT est toujours élevé en cas de CMT clinique. Le taux basal
normal est toujours <10 pg/ml. Les FN de l'élévation de la TCT sont l'insuffisance
rénale, la thyroïdite chronique et d'autres cancers TCT sécrétants.
Test à la pentagastrine.
La réponse à la pentagastrine montre un pic < 30 ng/ml, à l'état normal. Un pic >
100 est très évocateur de CMT.
Dans le cadre d'une enquête familiale, un pic > 50 est évocateur. Chaque fois que
les test est > 30 pg/ml, il faut opérer si une mutation ret est mise en évidence.
Le dosage de l'antigène carcino embryonnaire :
A une valeur essentiellement pronostique et est utilisé dans la surveillance.

8.3.2.4.Bilan d'extension
du CMT :
Radio de thorax,

113
Echographie cervicale (adénopathies)
TDM pré chirurgical.
D'une Néoplasie Endocrinienne Multiple (NEM) :
Phéochromocytome (la recherche du phéochromocytome est obligatoire
avant la chirurgie du CMT, car il existe un risque anesthésique) : HTA,
échographie surrénalienne, dosage des métanéphrines urinaires. Le bilan des
formes familiales et associées aux NEM bénéficie d'une scintigraphie à la
mIBG-123I (métaiodo-benzylguanidine).
hyperparathyroïdie: calcémie, phosphorémie, PTH, calciurie des 24 h.
Enquête familiale et conséquence thérapeutique Elle s'impose à chaque nouveau
diagnostic affirmé (anatomopathologie). Elle comporte :
une fiche où figure l'état civil du patient, qui sera gardée de façon anonyme
après attribution d'un N° de cas et de famille par le GETC (inscrire le patient
au fichier national des CMT, ou contacter le Groupe d'Études des Tumeurs à
Calcitonine)
une enquête proprement dite, incluant:
la recherche de signes compatibles avec une NEM dans la famille
un arbre généalogique
pour tous les apparentés du 1 degré: un examen clinique, un dosage des
métanéphrines si le sujet appartient à une famille NEM identifiée, un
examen à la lampe à fente.
Surtout, il convient de rechercher une mutation de ret dans l'ADN
lymphocytaire.
Si une mutation germinale (ret + dans les lymphocytes) est retrouvée, il
faut procéder à une thyroïdectomie totale avec curage ganglionnaire qui
guérira d'emblée la maladie. En cas de refus chirurgical, on peut accepter
un suivi initial tant que le test PG demeure < 0 ( pic < 30 pg/ml). Au delà
il est impératif d'opérer.
Si la mutation n'est pas retrouvée, la chance de développer un CMT est
celle des cas sporadiques.

8.3.3. Traitement

8.3.3.1.Phase précoce :.
Le traitement du CMT repose sur la thyroïdectomie totale, par un chirurgien très
entraîné, avec curage extensif cervical (cellulolymphadénectomie) du compartiment
central et prétrachéal, des ganglions jugulo-carotidiens moyens bilatéraux, des
ganglions cervicaux latéraux bilatéralement (sauf si cas sporadique et tumeur < 20
mm et autres GGL <0 en extemporané). Le curage médiastinal peut être indiqué
d'emblée ou secondairement si la TCT reste élevée..
Si le diagnostic est suspecté en per-opératoire (extemporané d'un nodule, d'un
ganglion), il faut prélever TCT et ACE, qui se normalisent respectivement en 24
heures et 2 mois après exérèse.
Si la chirurgie est impossible d'emblée, on peut tenter une radiothérapie première
de réduction.

8.3.3.2.Surveillance - Dépistage et traitement des rechutes.


L'exérèse est carcinologiquement satisfaisante

114
Confirmée par un test à la pentagastrine négatif à 2 mois (on ne fait pas le test si
la TCT est élevée de base).
Faire à un an puis tous les deux ans: examen clinique, thorax, TCT de base ou test
Pg et dosage de l'ACE (± recherche des associations dans le cadre des NEM).
L'exérèse est insuffisante
Soit il persiste des adénopathies, du tissu néoplasique accessible à la chirurgie: il
faut réopérer et réévaluer la situation en dosant la TCT. L'exérèse peut être
impossible localement: il faut alors irradier, 50 à 60 Gy maximum en surdosage
local.L'élévation de la TCT signe une reprise évolutive qu'il faut localiser et traiter.
La localisation peut être aidée par des scintigraphies à la mIBG-123I, à la
somatostatine-111In (octréoscan) ou par immunoscintigraphie anti-ACE. Le
traitement des métastases fait appel à la chirurgie, la radiothérapie et parfois la
chimiothérapie.

8.3.3.3.Pronostic.
Il est globalement de 60% à 10 ans et de 40% à 20 ans. En présence de plusieurs
facteurs de mauvais PC, la survie est de 10 à 25%, à 10 ans.
Les facteurs de mauvais pronostic sont:
âge > 45 ans
tumeur > 40 mm
sexe masculin
adénopathies palpables et métastases
invasion vasculaire
chirurgie incomplète attestée par un taux de TCT élevé après l'intervention
(ou d'ACE).

8.4. Néoplasies Endocriniennes Multiples


Les néoplasies endocriniennes multiples (NEM) sont des syndromes caractérisés par
l'association de tumeurs endocriniennes multiples. Ces maladies sont
habituellement autosomiques dominantes à pénétrance variable, et correspondent
à des mutations de gènes (oncogène ret). Ces syndromes relèvent d'une
exploration et d'une prise ne charge hyper spécialisées.
Il y a trois syndromes cliniques bien individualisés: les NEM type I, parfois
dénommées syndrome de Werner, les NEM type II séparées en type IIa ou
syndrome de Sipple et en type IIb. Seules les NEM de type II intéressent la
pathologie thyroïdienne, car elles comportent toujours une hyperplasie des cellules
C et/ou un cancer médullaire de la thyroïde. Les associations tumorales permettant
de définir les NEM sont rapportées dans le Tableau XI :

8.4.1.NEM IIa.
Dans la NEM IIa, qui a une transmission autosomique dominante, le CMT est le
signe le plus souvent révélateur, suivi des signes du phéochromocytome;
l'hyperparathyroïdie est tardive. La NEM2a est liée à une mutation du gène ret
permettant une identification des sujets à risque par analyse de l'ADN
lymphocytaire. Le cancer ne se manifeste qu' exceptionnellement dans la petite
enfance.
Le phéochromocytome est d'installation progressive, succédant à une hyperplasie

115
et habituellement bénin. La recherche d'un phéochromocytome [ dosage des
catécholamines et de dérivés urinaires méthoxylés], doit être systématique avant la
chirurgie de tout CMT, en raison du risque anesthésique. En cas de
phéochromocytome sécrétant, il faut réaliser une scintigraphie à la mIBG, une IRM
des surrénales.
L'hyperparathyroïdie survient en général tardivement et correspond souvent à une
hyperplasie. Son diagnostic repose sur le dosage couplé calcium ionisé + dosage de
la parathormone (PTH 1-84).
Les sujets porteurs de la mutation ret doivent bénéficier d'une thyroïdectomie
prophylactique. Celle ci s'impose chaque fois que le test à la pentagastrine montre
une stimulation > 30 pg/ml.

8.4.2.NEMIIb.
Caractérisé en pratique par l'absence d'hyperparathyroïdie, elle est de pronostic
plus réservé car le CMT est d'apparition précoce. Le phéochromocytome est
souvent bilatéral. Cliniquement il existe un syndrome dysmorphique avec
notamment des neuromes au niveau des lèvres et de la langue et une atteinte des
plexus nerveux réalisant un syndrome analogue à la maladie de Hirshprung (sub-
occlusion).
Le traitement est la thyroïdectomie totale prophylactique dès le diagnostic, quel que
soit l'âge. Le phéochromocytome doit être recherché avant la chirurgie puis tous les
ans, car il a une survenue habituelle plus tardive.

Tableau IX : Association tumorales permettant de caractériser les variétés de


NEM

type tumeurs fréquence


approximative
NEM type I Hyperparathyroïdie 80%
Tumeur pancréatique 75%
(syndrome de Werner) - gastrinome (20%B, 30%M) et
syndrome de Zollinger-Ellison
- Insulinome (20%B, 5%M)
- Vipome
- Non sécrétante
Adénome hypophysaire
65%
- chromophobe ou non sécrétant (40%)
- GH, ACTH, PRL...
Autres tumeurs
- tumeurs carcinoïdes
10%
- lipomes
- adénomes cortico-surrénaliens

116
NEM type IIa Cancer médullaire de la thyroïde 100%
Hyperparathyroïdie 50%
(syndrome de Sipple) Phéochromocytome 50%
NEM type IIb Cancer médullaire de la thyroïde 90%
Neuromes muqueux multiples 100%
Phéochromocytome 45%
Syndrome dysmorphique : hyper- trophie >65%
des nerfs cornéens, pseudo Marfan...

Questions à choix multiples


1. Quelles propositions vous semblent correctes pour un cancer thyroïdien ?
A. Un cancer vésiculaire est caractérisé par l'existence de modifications
nucléaires caractéristiques.
B. Un cancer papillaire est caractérisé par l'existence d'une invasion
vasculaire
C. Les cancers thyroïdiens vésiculaires donnent plus fréquemment des
métastases osseuses que les cancers papillaires
D. Les cancers vésiculaires ont un immunomarquage positif pour la
Thyroglobulin
E. Le cancer papillaire contient une substance amyloïde dans son stroma
2. Quelles propositions concernant le traitement par l'iode 131 du cancer thyroïdien
différencié opéré, sont correctes ?
A. Le traitement est d'autant plus efficace que la TSH (hormone thyréotrope)
est élevée et l'iodémie basse
B. Le traitement est d'autant plus efficace que la TSH (hormone thyréotrope)
est basse et la Thyroglobuline élevée
C. L'iode 131 peut entraîner une dysgueusie transitoire
D. L'administration d'une dose thérapeutique d'iode 131 (4 GBq) augmente
le risque de leucémie secondaire
E. Le traitement par l'iode 131 est contre-indiqué chez l'enfant
3. Quelles circonstances contre-indiquent un traitement par l'iode 131 d'un patient
atteint d'un cancer thyroïdien opéré ?
A. L'allaitement
B. La grossesse
C. Un taux de plaquettes à 10 000
D. Une bouffée délirante
E. Une allergie à l'iode
4. Parmi les bilans biologiques suivants, réalisés chez des patients opérés d'un
cancer thyroïdien et traités par l'iode 131, citez ceux qui évoquent une rechute ou
une absence de guérison. Les valeurs normales fournies par le laboratoire sont:
Hormone thyréotrope (TSH) : [0.3 - 3.5 µU/ml], T4 libre (FT4) : [ 10 à 21
picomoles/l], T3 libre (FT3) : [ 5.5 à 10 picomoles/l], Thyroglobuline sérique (TG) :

117
[ 5 à 25 ng/l].
A. TSH : 0.01 µU/ml, FT4 : 25 pM/l, TG : 0,1 ng/l
B. TSH : 0.5 µU/ml, FT3 : 8 picomoles/l, TG: 6 ng/l
C. TSH : 0.05 µU/ml, FT4 : 20 picomoles/l, TG: 22 ng/l
D. TSH : 10 µU/ml, FT4 : 8 picomoles/l, FT3 : 4 picomoles/l, TG : 46 ng/l
E. TSH : 0,5 µU/ml, FT4 : 17 picomoles/l, TG : 0,1 ng/l
5. Dans le bilan de surveillance d'un patient opéré d'un épithélioma thyroïdien
différencié de souche vésiculaire et traité par l'iode 131, quels éléments sont
évocateurs d'une rechute ou d'une récidive ?
A. L'apparition d'une adénopathie jugulo-carotidienne
B. Une lésion ostéocondensante de la voûte crânienne
C. Une élévation régulière de la Thyroglobuline
D. L'apparition d'une hypoparathyroïdie
E. Une fixation pulmonaire diffuse constatée à l'occasion d'une scintigraphie
à l'iode 131
6. Parmi les éléments suivants, lesquels doivent faire rechercher un cancer
médullaire de la thyroïde?
A. Un taux élevé de Thyrocalcitonine
B. Une histoire de diarrhée motrice chez un patient ayant un nodule
thyroïdien
C. Un antécédent personnel de phéochromocytome
D. Un taux élevé de Thyroglobuline
E. Un antécédent familial de cancer médullaire de la thyroïde

118
HYPERCORTISOLISME (n° 341)
Anne-Claire Bouthillier-Voisin
Service d'Endocrinologie - Diabétologie - Médecine Interne
Hôpital Boucicaut

HYPERCORTISOLISME (n° 341)


Abréviations
Points importants
1. Physiopathologie
1.2. Sur les protides :
1.3. Sur les lipides :
1.4. Autres actions métaboliques :
2. Etiologie
2.1. Syndrome de Cushing ACTH dépendant (85% des cas)
2.3. Pseudo-syndrome de Cushing
3. Diagnostic clinique
3.1. Troubles de la répartition des graisses :
3.2. Signes cutanés présents dans 50 à 60% des cas :
3.3. Hypertension artérielle dans 70% des cas
3.4. Signes musculaires et osseux :
3.5. Troubles psychiques :
3.6. Insuffisance gonadique :
3.7. Plus rarement :
3.8. Rechercher :
3.9. Signes biologiques non spécifiques :
4. Diagnostic de certitude
4.1. Confirmer l'hypercortisolémie par :
4.2. Déterminer l'étiologie de l'hypercortisolisme :
4.3. Localiser la tumeur :
5. Principes du Traitement
5.1. Maladie de Cushing (adénome hypophysaire).
5.2. Tumeur surrénalienne.
5.3. Sécrétion ectopique d'ACTH ou de CRH.
6.Conclusion
Références bibliographiques
Questions à choix multiples

119
Abréviations
Composé F:cortisol
ACTH:hormone adrénocorticotrope
CRH:corticoliberine (corticotropin releasing hormone)
HTA:hypertension artérielle
FLU: cortisol libre urinaire
DXM:dexaméthasone
IRMA:"immunoradiometric assay"
Composé S:II désoxycortisol
CS:corticostérone
LVP:lysine vasopressine

Points importants
C’est une hypersécrétion non freinable de cortisol, ACTH dépendante ou
indépendante.
La cause la plus fréquente : maladie de Cushing (adénome à ACTH).
La hantise : le corticosurrénalome.
Affirmer le diagnostic de syndrome de Cushing nécessite la perte du cycle
nycthéméral du cortisol, le dosage du cortisol libre urinaire (augmenté), un test
de freinage faible à la DXM négatif.
Le dosage de l’ACTH, les tests dynamiques (freinage fort à la DXM et test à la
métopirone) et l’imagerie permettent de diagnostiquer les trois grandes
étiologies : adénome à ACTH, tumeur surrénalienne et sécrétion ectopique
d’ACTH.
La localisation de la sécrétion ectopique est souvent difficile.
Le traitement dépend de l’étiologie : adénomectomie transphénoïdale pour la
maladie de Cushing, surrénalectomie unilatérale en cas de tumeur et éxérèse de
la tumeur sécrétant l’ACTH en cas de sécrétion ectopique.
La surveillance doit être à vie.

L'hypercortisolisme résulte d'une hypersécrétion chronique et inappropriée (non


freinable) du cortisol ou composé F, par la zone fasciculée du cortex surrénalien.
Les syndromes de Cushing peuvent être soit d'origine surrénalienne (ACTH
indépendant,) soit d'origine hypophysaire (adénome à ACTH), soit due à une
sécrétion ectopique d'ACTH.

1. Physiopathologie
Les symptômes s'expliquent par les activités métaboliques multiples du cortisol
1.1. Sur les glucides :
l’action anabolique glucidique du cortisol est dominante expliquant le nom de
glucocorticoïdes.
Néoglucogénèse accrue :
Le cortisol augmente la production hépatique de glucose à partir des acides aminés

120
périphériques (provenant des muscles essentiellement.
Glycogénogénèse augmentée :
Le cortisol augmente les réserves hépatiques en glycogène.
Insulino-résistance induite :
Le cortisol diminue la captation musculaire et adipeuse du glucose et induit un état
d’insulino-résistance probablement par des mécanismes post-récepteurs. Le cortisol
a donc par tous ces effets une action hyperglycémiante.

1.2. Sur les protides :


l'effet catabolisant rend compte de la grande majorité des symptômes. Le cortisol
accélère la protéolyse dans la plupart des tissus et inhibe la synthèse protidique.

1.3. Sur les lipides :


le cortisol augmente la lipolyse dans le tissu adipeux ( et la concentration d’acides
gras libres). Il provoque une modification de la répartition des graisses : les
adipocytes des extrémités sont beaucoup plus sensibles à l’action lipolytique des
glucocorticoïdes que les adipocytes du tronc.

1.4. Autres actions métaboliques :

1.4.1. Métabolisme osseux :


Le cortisol diminue l’absorption intestinale de calcium et la réabsorption tubulaire
rénale d’où bilan calcique négatif et hypercalciurie pouvant favoriser la formation de
calculs. La PTH est augmentée du fait de l’hypocalcémie, réversible par
administration de vitamine D et de calcium.

1.4.2. Maturation osseuse :


Le cortisol inhibe directement l’activité des ostéoblastes osseux expliquant chez
l’enfant l’arrêt de la croissance et la cassure de la courbe staturale.

1.4.3. Tissu conjonctif :


Le cortisol diminue la prolifération des fibroblastes et la synthèse du collagène dans
le tissu conjonctif sous cutané expliquant la fragilité cutanée.

1.4.4. Anti-inflammatoire et immuno-suppresseur :


Le cortisol a un effet vasoconstricteur, il diminue la perméabilité capillaire
entraînant donc une réduction de l’extravasation liquidienne vers les cellules. Il
inhibe la synthèse des prostaglandines et diminue l’activité des cellules
phogocytaires. Il diminue le nombre des lymphocytes par redistribution du
compartiment vasculaire à la rate, aux ganglions et à la moëlle. Il inhibe également
l’accumulation des polynucléaires neutrophiles au foyer de l’inflammation.

1.4.5. Action minéralocorticoïde à dose supraphysiologique


La Fig. 1 page suivante, explique le fonctionnement de l’axe hypothalamo-
hypophyso-surrénalien dont les médiateurs sont le CRH (ou CRF), l’ACTH et le
cortisol exerçant un rétrocontrôle négatif sur l’axe hypothalamo-hypophysaire.
La Fig. 2 reprend les étapes de la stéroïdogénèse.

121
2. Etiologie

2.1. Syndrome de Cushing ACTH dépendant (85% des cas)

2.1.1. Maladie de Cushing :


Représente environ 70% des syndromes de Cushing.
Ce sont habituellement des petites tumeurs ou « microadénomes » secrétant de
l’ACTH (4 - 5mm) ; les macroadénomes et hyperplasies des cellules corticotropes
sont beaucoup plus rares.
Figure 1
Figure 2
Il existe une hyperplasie bilatérale des surrénales en réponse à l’hypersécrétion
d’ACTH et à son action trophique. Dans 20 - 40% des cas, cette hyperplasie
deviendrait nodulaire.

2.1.2. Sécrétion ectopique d'ACTH (15% des cas) :


Il s'agit essentiellement de tumeurs bronchiques, anaplasiques (10%) ou
carcinoïdes. Les autres tumeurs sont les thymomes, les tumeurs pancréatiques et
plus rarement phéochromocytomes, cancers médullaires de la thyroïde, et autres
tumeurs neuro-endocrines (60% des cas).
Le tableau est en général brutal, avec une hypertension artérielle sévère, et
hypokaliémie. Le syndrome carcinoïde est rare car la sérotonine est inactivée dans
le foie (5 - HIAA) ou détruite dans les poumons (mono-amine oxydase).

2.1.3. Sécrétion ectopique de CRH (moins d’1% des cas) :


En général, la tumeur responsable est un carcinoïde bronchique d'évolution lente. Il
existe une hyperplasie des cellules corticotropes hypophysaires.

2.2. Syndrome de Cushing, ACTH indépendant (environ 15% des cas)

2.2.1. L'adénome bénin :


Est responsable d'un hypercortisolisme le plus souvent isolé.

2.2.2. Le cortico-surrénalome malin :


Est responsable d'une synthèse de plusieurs hormones, en particulier d'androgènes
et de précurseurs minéralo et glucocorticoïdes.

2.2.3. L'hyperplasie micronodulaire bilatérale (1% des cas) (syndrome de


Carney)
Est une forme rarissime de syndrome de Cushing. Dans la moitié des cas, c'est une
maladie autosomique, dominante, l'hyperplasie s'associant à d'autres anomalies
(myxome cutané, mammaire ou de l'oreillette, adénome hypophysaire, naevi). Le
syndrome de Cushing serait dû à des immunoglobulines stimulant les surrénales.
2.2.4. L'hyperplasie macronodulaire bilatérale (moins d’ 1% des cas) : Il
existe ainsi des cas de transition de Cushing ACTH dépendant vers un syndrome de
Cushing ACTH indépendant.

122
2.3. Pseudo-syndrome de Cushing
Pose un problème de diagnostic différentiel. Ce sont :
les dépressions sévères (80% ont une anomalie de la sécrétion du cortisol)
l'alcoolisme chronique.
Le mécanisme impliqué n'est pas clair mais l'ensemble régresse avec le sevrage. Un
test discriminatif futur pourrait être le freinage faible associé à une injection de CRH
(1µg/Kg) avec une fiabilité proche de 100% (Cushing vrai F > 38nmol/l 15' post
CRH).
Le tableau I récapitule les étiologies des élévations du cortisol non dues à un
syndrome de Cushing.

3. Diagnostic clinique
L’hypercortisolisme chronique est une maladie catabolique touchant pratiquement
tous les organes, mortelle sans traitement en quelques années. Le début est
généralement insidieux sauf dans les formes malignes.
A la phase d’état, le tableau clinique associe :

3.1. Troubles de la répartition des graisses :


Obésité facio-tronculaire avec face en lune, cou épais et raccourci (Buffalo Neck).
En revanche, les membres sont grêles et amyotrophiques.
La prise de poids est en général modérée.
Chez l'enfant, l'obésité diffuse est la règle avec ralentissement de la croissance.

3.2. Signes cutanés présents dans 50 à 60% des cas :


érythrose faciale
ecchymoses aux points de ponction par fragilité capillaire
atrophie cutanée, peau fragile et amincie
très lente cicatrisation des plaies
vergetures pourpres.
En cas d'hypersécrétion d'androgènes : hirsutisme et acné, séborrhée.
La virilisation évoque d'emblée un corticosurrénalome.

3.3. Hypertension artérielle dans 70% des cas


Tableau I

3.4. Signes musculaires et osseux :


L'atrophie musculaire proximale est parfois majeure avec signe du Tabouret,
impossibilité de se tenir debout.
L'ostéoporose peut entraîner des tassements vertébraux et des fractures
spontanées.

123
3.5. Troubles psychiques :
Présents dans la moitié des cas avec insomnie précoce, dépression ou au contraire
accès maniaque et délirant.

3.6. Insuffisance gonadique :


Chez l'homme, diminution de la libido, impuissance, gynécomastie.
Chez la femme, spanioménorrhée, stérilité et hirsutisme.

3.7. Plus rarement :


Lithiase urinaire, insuffisance cardiaque, exophtalmie par dépôt de graisse rétro-
orbitaire.

3.8. Rechercher :
une mélanodermie témoin d'une forte élévation de l'ACTH, en faveur d'une
sécrétion ectopique
des signes tumoraux hypophysaires
des symptômes d'hyperaldostéronisme avec HTA, oedèmes, hypokaliémie,
peuvent s'observer en cas d'hypersécrétion de minéralocorticoïdes (cortico-
surrénalome) ou dans les sécrétions majeures de cortisol avec un effet
minéralo-corticoïde.
une prédominance d'hyperandrogénie évoque un corticosurrénalome

3.9. Signes biologiques non spécifiques :


Intolérance aux hydrates de carbone
Polyglobulie, hyperleucocytose
Hypokaliémie
Hypercalciurie normocalcémique

Hypertriglycéridémie

4. Diagnostic de certitude
Schématiquement on doit confirmer l’hypercortisolisme non freinable puis en
rechercher l’étiologie. L’imagerie performante actuelle a dans ce domaine beaucoup
modifié la stratégie diagnostique et la place des différents dosages dynamiques
(freinage fort, métopirone, CRH). En effet, la découverte d’une tumeur
surrénalienne ou hypophysaire dans un contexte d’hypercortisolisme confirmé
évoque très fortement l’origine du syndrome.

4.1. Confirmer l'hypercortisolémie par :


le dosage du cortisol libre urinaire des 24H.
C'est l'index le plus fiable à condition que le recueil d'urines soit complet. Le FLU
normal est compris entre 25 et 90 µg/j (les chiffres varient en fonction des
laboratoires).
cortisol plasmatique et cycle nycthéméral.
Une mesure à 8H00 et 16H00 ou 20H00 suffit pour mettre en évidence la perte du

124
cycle nycthéméral. Celui-ci peut être réalisé en mesurant la cortisolémie à 8H00,
12H00, 16H00, 20H00, 24H00. Valeurs normales à 8H00 = 100 à 200ng/ml,
grande valeur diagnostique du cortisol à 16H00 supérieur à 100ng/ml.
On peut mesurer également le cortisol salivaire dont le taux est inférieur à 30% du
cortisol plasmatique (valeur dans les hypercorticismes intermittents).
freinage minute à la dexaméthasone (DXM).
Administrer à minuit 1mg de dexaméthasone et doser le cortisol à 8H00.
Normalement, il est inférieur à 50ng/ml. Un freinage minute négatif doit être
confirmé par un freinage standard.
Freinage standard.
0,5mg de dexaméthasone toutes les 6H00 pendant deux jours : le freinage est
positif quand le FLU est inférieur à 10µg/jour. Négatif, il affirme le syndrome de
Cushing.
Attention aux dépressions sévères qui peuvent s'accompagner d'un freinage faible
négatif.

4.2. Déterminer l'étiologie de l'hypercortisolisme :

4.2.1. Dosage de l'ACTH plasmatique (IRMA) :


Physiologiquement, la concentration est la plus basse vers minuit, 2H00 du matin :
Un dosage réalisé vers 16H00 et inférieur à 5pg/ml affirme un syndrome de
Cushing ACTH indépendant.
Si l'ACTH est supérieur à 15 pg/ml, il s'agit d'un syndrome de Cushing ACTH
dépendant.

4.2.2. Pour différencier les trois étiologies :


Freinage fort :
2mg de DXM toutes les 6H00 pendant deux jours. Le FLU doit diminuer d'au moins
50%.Dans les maladies de Cushing, le freinage est classiquement partiel alors qu'il
est négatif dans les sécrétions ectopiques. (en fait 30 à 40% seraient positifs). Il
est également négatif dans les syndromes de Cushing d’origine surrénalienne.
Test à la métopirone : (Cf Fig. 3 page suivante)
Test court : 30mg/kg à minuit et dosage du composé S et F à 8H00.
Test long : 750mg toutes les 4H00 pendant 24H00 et dosage du composé S et F
avant et après la fin du test.
Normalement le composé S s'élève au dessus de 100ng/ml et les 17 hydroxy-
stéroïdes augmentent de plus de 50% dans la maladie de Cushing.
Dans la maladie de Cushing, le test à la métopirone est classiquement « explosif »
tandis qu'il est négatif en cas de sécrétion ectopique car l'ACTH hypophysaire est
totalement supprimé. Le test est également négatif, classiquement « impavide »,
en cas de tumeur surrénalienne puisque l'ACTH est freiné.
Test au CRH ou CRH LVP :
il consiste à administrer 1µg/kg de CRH humain en IV avec mesure de l'ACTH et du
cortisol à 0, 15, 30, 60 et 120 minutes.
Normalement, l'ACTH est multiplié par deux et le cortisol dépasse 200ng/ml. La
réponse est classiquement positive en cas de maladie de Cushing et négative

125
dans les sécrétions ectopiques. Malheureusement, il existe beaucoup de
chevauchement dans les valeurs d'ACTH entre ces deux groupes.
Prélèvements veineux dans les sinus pétreux inférieurs :
Réservée à des cas difficiles de localisation de la sécrétion d'ACTH. Ce test se
discute quand l'imagerie hypophysaire est normale et/ou que la biologie ne permet
pas de différencie la maladie
Figure3

de Cushing et sécrétion ectopique. On compare les concentrations d'ACTH avant et


après CRH dans les deux sinus pétreux et en périphérie à la recherche d'un
gradient (ACTH sinus pétreux / ACTH périphérique > 3). Le test permet donc de
confirmer la maladie de Cushing mais également de localiser le côté hypophysaire
sécrétant et peut être une aide précieuse pour le chirurgien en cas d'imagerie
négative.
Le Tableau II reprend les test dynamiques et leur résultat dans les trois étiologies
du syndrome de Cushing.

4.3. Localiser la tumeur :

4.3.1. Syndrome de Cushing ACTH- indépendant :


Valeur du scanner ou de l'IRM surrénalienne en coupe fine.
Intérêt de la scintigraphie à l'iodo-cholestérol marqué dans les hyperplasies
bilatérales.
Attention aux incidentalomes surrénaliens associés à une maladie de Cushing, voire
aux hyperplasies nodulaires secondaires à une stimulation prolongée par l'ACTH.

4.3.2. Syndrome de Cushing ACTH-dépendant :


L'IRM hypophysaire est l'examen le plus sensible (75% des cas localisés) dans la
détection des micro adénomes.
Il existe cependant, encore, nombre de faux négatifs.
Si le freinage fort est négatif, rechercher une tumeur responsable d'une sécrétion
ectopique par scanner ou IRM thoracique.
On peut s'aider de la scintigraphie en particulier à la somatostatine marquée à
l'Indium III dans le diagnostic des carcinoïdes qu'elle détecterait dans
pratiquement 90% des cas.
Attention aux incidentalomes hypophysaires (10% par IRM).

5. Principes du Traitement

5.1. Maladie de Cushing (adénome hypophysaire).

5.1.1.Traitement chirurgical par adénomectomie hypophy-saire sélective


par voie transphénoïdale.
Indication optimale : adénome visible en imagerie.
Buts : restaurer un axe corticotrope normal, préserver les autres lignées
hypophysaires.

126
La préparation médicale par OP’DDD est souvent nécessaire.
Le taux de guérison est d'environ 80% si le microadénome a été visualisé, mais
seulement 58% dans la chirurgie à l'aveugle. Des rechutes à moyen terme sont
possibles.
Une hormonothérapie substitutive est nécessaire jusqu'à reprise du fonctionnement
normal de l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (6 à 12 mois).
Pour les macroadénomes, le taux de succès ne serait que de 50 à 70%.

5.1.2. Les anti-cortisoliques de synthèse


Ils permettent de contrôler les symptômes liés à l’hypercortisolisme.
OP'DDD ou mitotane : doses 3 à 12g/jour par palliers d'une quinzaine de jours.
Nombreux effets secondaires : digestifs, hypercholestérolémie, élévation des
enzymes hépatiques, troubles neurologiques, gynécomastie.
Orimétène ou aminoglutéthimide : nombreux effets secondaires, somnolence,
troubles digestifs, rash cutané, hypotension, hyponatrémie, augmentation des
enzymes hépatiques, neutropénie, thrombopénie, voire alvéolite allergique.
Ketoconazole ou nizoral : avantage d'agir rapidement. Ses effets secondaires
sont essentiellement hépatiques. Il aurait aussi une action sur l'ACTH.
Ces traitements sont utilisés en préparation à la chirurgie, en cas d’éxérèse
incomplète avec persistance d’un hypercortisolisme, ou lorsque l’adénome n’est
pas visible en imagerie et que l’on décide un traitement médical.
Ils nécessitent un traitement hormonal substitutif par hydrocortisone et
fludrocortisone.

5.1.3. La radiothérapie hypophysaire complémentaire.


Elle est réservée aux exérèses incomplètes ou impossibles.
La rémission est obtenue dans 60% des cas dans les 6 mois à 2 ans, mais on
observe 60% d'hypopituitarisme.
La radiothérapie est également indiquée dans la prévention du syndrome de Nelson
après surrénalectomie bilatérale.

5.1.4. La surrénalectomie bilatérale avec hormono- thérapie substitutive


Rarement réalisée et réservée aux échecs des traitements chirurgicaux ou quand
l’adénome hypophysaire n’est pas visible, le risque étant celui d'un syndrome de
Nelson (adénome expansif hypophysaire par défreination).
Récemment a été développée une technique de surrénalectomie par voie
coelioscopique qui permet de diminuer la morbidité du geste.

5.2. Tumeur surrénalienne.


Le traitement est chirurgical associé ou non à une préparation médicale par
OP’DDD.

5.2.1. Adénome :
Traitement par surrénalectomie unilatérale, parfois précédée d'un traitement par les
anticortisoliques de synthèse.
En postopératoire, traitement substitutif nécessaire avec évaluation de la fonction

127
hypophyso-surrénalienne avant l'arrêt du traitement.

5.2.2. Corticosurrénalome :
L'exérèse sera la plus large possible.
L'OP'DDD est indiqué en cas d'exérèse incomplète ou de métastases : il agit par
son action anticortisolique et anti tumorale (certains le prescrivent
systématiquement pendant 12 à 24 mois en cas de tumeur volumineuse ou à
sécrétion mixte).
Des polychimiothérapies sont à l'étude, les dérivés du cisplatine semblent
prometteurs en association au VP16.
Seules 35% des tumeurs répondent et il n’est pas certain que le pronostic soit
amélioré par l'OP'DDD.

5.2.3. L'hyperplasie bilatérale micro ou macronodulaire :


Doit être traitée par une surrénalectomie bilatérale avec hormonothérapie
substitutive à vie.

5.3. Sécrétion ectopique d'ACTH ou de CRH.


Le traitement consiste en l'exérèse de la tumeur quand cela est possible.
Si la tumeur est inextirpable, une surrénalectomie bilatérale peut être envisagée,
ou un traitement médical par OP’DDD.

6.Conclusion
Surveillance à vie de ces patients, régulièrement, à cause des risques de récidive
surtout en cas de maladie de Cushing (25% 10 ans après la guérison).
Les facteurs prédictifs de rechute seraient : âge initial < 25 ans, sevérité initiale
clinique et ACTH > 20 pg/ml 1-2 mois après l'intervention.
Mais surveillance également à cause des risques d'insuffisance surrénalienne aiguë
à l'occasion d'un stress.
La Figure 4 page suivante, récapitule l’arbre décisionnel devant une suspicion de
syndrome de Cushing.

Références bibliographiques
Treatment, and retreatment, of Cushing’s disease R.D. Utiger. NEJM. 1997, 336,
215-217
La maladie de Cushing - Un défi de taille. A. Lacroix. La Presse Médicale. 1997, 26,
4-6.
Le Livre de l’interne en Endocrinologie. J. Lubetzki. Flammarion, Paris
IRM dans la maladie de Cushing - prédiction des résultats opératoires. Z.Barrou et
al. La Presse Médicale, 1997, 26, 7-11.
The long term out-come of pituitary irradiation after unsuccessful transsphénoïdal
surgery in Cushing’s disease. J. Estrada et al. NEJM. 1997, 336, 172-177

Figure 4

128
Questions à choix multiples
1 - Les syndromes de Cushing avec hyperplasie bilatérale des surrénales sont :
A - Les cancers surrénaliens.
B - Les Cushing paranéoplasiques.
C - Les adénomes à ACTH.
D - Les adénomes surrénaliens.
E - Les syndromes de Cushing secondaires à un traitement prolongé par les
corticoïdes.
2 - Dans le syndrome de Cushing par adénome surrénalien on note :
A - Cortisol bas et ACTH élevée.
B - Cortisol bas et ACTH basse.
C - cortisol libre urinaire élevé.
D - Un test de freination à la DXM négatif.
E - Un cortisol élevé avec ACTH basse.
3 - Dans la maladie de Cushing :
A - Une HTA modérée est habituelle.
B - Une note d’hypertrichose est fréquente.
C - Le cortisol élevé à 8 H suffit à affirmer le diagnostic.
D - La métopirone est en général impavide.
E - Le traitement est toujours médical.

129
HYPERTENSION ARTERIELLE D’ORIGINE
ENDOCRINIENNE DE L'ADULTE (n° 123)
Anne-Claire Bouthillier-Voisin
Service d'Endocrinologie - Diabétologie - Médecine Interne
Hôpital Boucicaut

HYPERTENSION ARTERIELLE D’ORIGINE ENDOCRINIENNE DE L'ADULTE (n° 123)


Abréviations
Points importants
1.LES HYPERALDOSTERONISMES PRIMAIRES
1.1. Rappels physiopathologiques
1.2. Diagnostic clinique
1.3.Diagnostic de certitude
1.4. Diagnostic étiologique
1.5. Diagnostic différentiel
1.6. Traitement
2.LE PHEOCHROMOCYTOME (PHEOK)
2.1. Physiopathologie
2.2. Manifestations cliniques
2.3. Diagnostic biologique
2.4. Diagnostic de localisation
2.5. Cas particuliers des formes familiales
2.6. Traitement
Références bibliographiques
Questions à choix multiples

Abréviations
HTA : hypertension artérielle
ACTH : adrénocorticotropic hormone
CS : corticostérone (composé B)
DOC : desoxycorticosterone
IEC : inhibiteur de l’enzyme de conversion
IRM : imagerie par résonance magnétique nucléaire
DXM : dexaméthasone
KT : cathétérisme

130
HPLC : chromatographie liquide haute performance
IMAO : inhibiteurs de la mono-amine-oxydase

Points importants
HTA et hypokaliémie doit évoquer un hyperaldostéronisme primaire ou
syndrome de Conn.
Le dosage de l'aldostérone (haute) et de la rénine (basse) confirme le diagnostic.
Principale étiologie : adénome de Conn dont le diagnostic différentiel
avecl'hyperplasie est difficile si l'imagerie est normale.
En Première intention : scanner surrénalien.
Traitement : médical de l'hyperplasie bilatérale des surrénales (anti-aldostérone) et
chirurgical de l'adénome de Conn.
Le diagnostic clinique de Phéochromocytome est difficile et doit être évoqué
devant certaines manifestations (triade) associées à une HTA sévère et
parOxystique.
Le diagnostic biologique repose sur le dosage des métanéphrines urinaires.
au carcinome médullaire de la thyroïde (NEM II).
Traitement chirurgical, après préparation Localisation par le scanner surrénalien
et/ou la scintigraphie à la MIBG.
Connaître l'association médicale, par une équipe anesthésique et chirurgicale
entraînée.

1.LES HYPERALDOSTERONISMES PRIMAIRES

1.1. Rappels physiopathologiques


L'aldostérone est sécrétée par la zone glomérulée du cortex surrénalien. Sa
sécrétion dépend très partiellement de l'ACTH, en partie de la kaliémie (stimulée
par l'hyperkaliémie), essentiellement du système rénine-angiotensine lui-même
stimulé par l'hypovolémie, la déplétion sodée et la diminution du débit sanguin
rénal.
L'aldostérone provoque au niveau du tube contourné distal du rein, une
réabsorption active de sodium avec sécrétion de potassium et d'ion H+.
Un phénomène d'échappement survient en quelques jours, équilibrant le bilan sodé,
empêchant donc la formation d'oedèmes.
On décrit des hyperaldostéronismes secondaires avec taux de rénine élevé et des
hyperaldostéronismes primaires à rénine basse.
Les hyperaldostéronismes primaires constituent une cause rare d'HTA (1% des
cas).
C'est une hypersécrétion autonome d'aldostérone dont les causes sont soit un
adénome bénin de la surrénale ou “ adénome de Conn ”, soit une hyperplasie
bilatérale idiopathique de mécanisme inconnu.
Beaucoup plus rarement, un carcinome surrénalien, un hyperaldostéronisme
freinable par les glucocorticoïdes (syndrome de Sutherland), ou un hyper-
aldostéronisme congénital par hyperplasie bilatérale micronodulaire.
Fig. 1 : le système rénine angiotensine, et la Fig. 2 rappelle la stéroïdogénèse.

131
1.2. Diagnostic clinique
Il se pose devant toute hypertension artérielle associée à une hypokaliémie (avec
kaliurèse inadaptée c’est à dire conservée ; 88 % des cas d'hyper-aldostéronisme
primaire s'accompagnent d'hypokaliémie) :.
L'HTA est constante, en générale modérée.
La kaliémie est inférieure à 3,6 mmol/l avec une kaliurèse supérieure à 25 mmol/24
h.
Il existe une hypomagnésémie.
Une hypokaliémie profonde et symptomatique se rencontre souvent en cas de
traitement par un diurétique (faiblesse musculaire, crampes, accès
tétaniformes, polyuro-polydipsie, nycturie, voire troubles du rythme cardiaque).
Fig. 1
Fig. 2
Le dosage de la kaliémie doit être correctement effectué, en arrêtant les
médicaments pouvant la modifier (diurétiques, IEC, qui seront arrêtés au moins 15
jours avant, ainsi que la spironolactone qui devra être arrêtée 6 semaines avant le
dosage). Les seuls antihypertenseurs autorisés sont les inhibiteurs calciques.
Enfin, le régime doit être normosodé avec une natriurèse supérieure à 100
mmol/jour (dans 20 % des cas l'hypokaliémie est révélée par un apport sodé).
Dans ces conditions, l'association HTA, hypokaliémie et kaliurèse supérieure à 30
mmol/jour est fortement suspecte.

1.3.Diagnostic de certitude
Les dosages d'aldostérone et de rénine doivent être effectués à distance de la prise
de tout traitement anti-hypertenseur (1 mois d'arrêt pour les diurétiques, 2
semaines pour les IEC, 6 semaines pour les spironolactones).
Le régime devra être normosodé et l'hypokaliémie aura été compensée (celle-ci
freine l'aldostérone).
Il existe alors une hyperaldostéronémie, le matin à jeûn, en position couchée
(normale : 30 - 140 pg/ml), associée à une rénine active plasmatique abaissée
(dosage radio-immunologique direct, normale : 10 - 25 pg/ml couché ; 50 pg/ml
debout).
L'aldostérone > 150 pg/ml et la rénine < 10 pg/ml affirment le diagnostic.
L'orthostatisme ne stimule pas ou peu la rénine active.
On peut également doser la tétra-hydroaldostérone urinaire et l'aldostéronurie libre
(hydrolysable à pH1) qui sont retrouvées également augmentées.

1.4. Diagnostic étiologique


Il faut différencier l'adénome de Conn (70 % des cas) de l'hyperplasie bilatérale
idiopathique (30 % des cas).
En effet, les traitements sont différents
Imagerie.
Valeur du scanner surrénalien en coupes fines :
Demandé en première intention. Il peut retrouver une petite tumeur dans
l'adénome de Conn, hypodense, de 1 à 3 cm, unique et unilatérale (sensibilité et
spécificité 85-90 %). Dans l'hyperplasie bilatérale, la tomodensitométrie est en

132
générale normale.
L'IRM :
N'est pas supérieure au scanner dans cette indication et dans 80 % des cas, la
tomodensitométrie localise l'adénome de Conn.
Attention : coïncidence hyperaldostéronisme primaire et incidentalome surrénalien.
Les tests dynamiques sont proposés en seconde intention.
L'épreuve de charge en sel :
(2l de sérum physiologique en 4H00) est contre-indiquée chez l'insuffisant
cardiaque et en cas d'HTA sévère.
En cas d'hyperplasie, on observe une diminution de la sécrétion d'aldostérone, mais
dans les adénomes de Conn, il n'y a pas de freinage de l'aldostérone.
Le test au Captopril :
Un inhibiteur de l’enzyme de conversion, au cours duquel en théorie, l'hyper-
aldostéronisme persiste dans l'adénome de Conn, à la différence de l'hyperplasie.
Le dosage de la 18-hydroxycorticostérone :
Ce précurseur secrété seulement par la zone glomérulée, serait très élevée chez un
patient porteur d'un adénome et moins (inférieur à 100 µg/dl) en cas d'hyperplasie.
Le dosage de l'aldostérone en orthostatisme prolongé :
Pendant 4H00 avec déambulation, au cours duquel en théorie, l'aldostérone
diminue dans l'adénome de Conn du fait du rythme circadien parallèle à celui de
l’AC
TH et augmente ou reste stable dans l'hyperplasie.
L'ensemble de ces tests (récapitulé dans le Tableau 1) montre bien la difficulté
diagnostique souvent rencontrée dans les hyperaldostéronismes.

ADENOME HYPERPLASIE
Charge en sel pas de freinage aldo ¬
Test au captopril pas de freinage aldo ¬
18 OH CS > 100 µg/dl < 100 µg/dl
Adlostérone debout prolongé aldo ¬ aldo  ou stable

Sur le plan morphologique, on peut également discuter :


a scintigraphie surrénaliennes à l'iodométhyl 19 norcholestérol marqué
Réalisé sous freinage par la dexaméthasone et qui objective dans l'adénome de
Conn une fixation unilatérale avec extinction de la surrénale controlatérale, alors
que la fixation est bilatérale et symétrique dans l'hyperplasie. Elle trancherait dans
90 % des cas entre adénome et hyperplasie.
le cathétérisme des veines surrénaliennes :
Reste un examen difficile et dans 25% des cas au moins, la veine surrénalienne
droite ne peut être cathétérisée.
Ces prélèvements veineux étagés consistent à mesurer le rapport
aldostérone/cortisol des deux côtés. Lorsque la synthèse d’aldostérone concerne

133
une seule surrénale (adénome de Conn), il existe un gradient de concentrations et
le rapport aldostérone/cortisol est >5 du côté de l’adénome.
Cet examen est le seul qui permette le diagnostic lorsque l'imagerie est normale et
les tests biologiques discordants (fiabilité diagnostique 95 %).

1.5. Diagnostic différentiel


Il s'agit de discuter l'ensemble des hypertensions artérielles associé à une
hypokaliémie.

1.5.1. Hyperaldostéronisme secondaire


Il s'accompagne d'une rénine élevée.
Un état oedémateux fait rechercher une diminution de la volémie efficace avec un
syndrome néphrotique ou une ascite dans le cadre d'une cirrhose ou encore une
insuffisance cardiaque congestive.
En l'absence d'oedème, rechercher une HTA rénovasculaire, par exemple par
sténose d'une ou des artères rénales ou encore une HTA essentielle traitée par des
diurétiques.
Beaucoup plus exceptionnellement seront diagnostiquées une tumeur de Wilms ou
tumeur des cellules juxtaglomérulaires.
A part, les hyperaldostéronismes secondaires sans HTA et sans oedème représentés
par les néphropathies avec perte de sel, les acidoses tubulaires rénales et le
syndrome de Bartter (hypotension, alcalose, hypokaliémie, hyperplasie de l'appareil
juxta-glomérulaire).

1.5.2. Les pseudo-hyperaldostéronismes primaires


(aldostérone normale, rénine basse)
Rechercher une intoxication par l'acide glycyrrhizinique simulant l'effet de
l'aldostérone sur le tubule (réglisse, antesite, pastis sans alcool).
A part, les hypersécrétions de désoxycorticostérone (DOC) :
Soit par des tumeurs cortico-surrénaliennes (corticosurrénalome ++).
Soit lors d'un Cushing paranéoplasique à DOC élevée,
Soit au cours d'un bloc enzymatique en 11 bêta-hydroxylase ou en 17 alpha-
hydroxylase (ces hyperplasies congénitales des surrénales sont
essentiellement révélées chez l'enfant).
Enfin, ont été décrits des syndromes familiaux avec HTA, hypokaliémie, aldostérone
et rénine basses (syndrome de Ulick sensible à la DXM et aux spironolactones,
syndrome de Liddle par tubulopathie sensible au triamterene-amiloride).
La Fig. 3 récapitule l’arbre décisionnel devant une HTA avec hypokaliémie.

1.5.3. Autres hypertensions artérielles secondaires d'origine endocrinienne


L'acromégalie
Les syndromes carcinoïdes
L'hyperthyroïdie
L'hyperparathyroïdie
Les pseudo-hypoparathyroïdies

134
1.6. Traitement

1.6.1. L'adénome de Conn


Il relève de la surrénalectomie unilatérale après préparation médicale soigneuse
(spironolactone, recharge potassique pendant plusieurs semaines) ; 75 % de
succès à un an.
®
La réponse au traitement par l'ALDACTONE (1) est un argument pour penser que
la surrénalectomie guérira le patient.
®
En cas d'échec (25% des cas), le traitement est médical par l'ALDACTONE .
En cas d'effet secondaire gênant (gynécomastie, impuissance, troubles des règles),
®
on peut essayer l’AMILORIDE ou MODAMIDE .

1.6.2. L'hyperplasie bilatérale des surrénales


®
Est traitéemédicalement par les anti-aldostérones (ALDACTONE ) ou
®
l’AMILORIDE (MODAMIDE ).
Il faut savoir que l'adjonction d'un second anti-hypertenseur est fréquemment
nécessaire.
®
(1) L’ALDACTONE : spironolactone ; propriétés anti-aldostérone mais aussi anti-
androgène et progestative.
Fig. 3

2.LE PHEOCHROMOCYTOME (PHEOK)

2.1. Physiopathologie
Les phéochromocytomes sont des tumeurs rares, dérivées du neuro-ectoderme,
ayant une grande affinité pour les sels de chrome qui colorent ses cellules en noir.
Ces tumeurs sécrètent des catécholamines, adrénaline et noradrénaline (leur
synthèse est rappelée sur la Fig. 4 page suivante). Elles se développent dans 85 à
90% des cas au niveau de la médullo-surrénale, de façon parfois bilatérale (10 à
15% des cas), mais dans environ 10% des cas ils sont ectopiques et peuvent se
trouver entre le trou occipital et le canal inguinal.
Ils siègent alors surtout au niveau de l'abdomen (bifurcation aortique, organe de
Zuckerkandl, parois de la vessie) ou au niveau du cordon spermatique, beaucoup
plus rarement au niveau thoracique (médiastin) ou cervical (carotide, glomus).
Ils représentent 0,2-0,4 % des HTA.
La gravité de ces tumeurs tient au risque de mort subite par troubles du rythme
liés à un paroxysme sécrétoire, ou à celui de crises hypertensives majeures, plus
rarement du fait de leur malignité (10% des cas).
C'est dire l'importance de leur diagnostic précoce, d'autant qu'elles peuvent
bénéficier d'un traitement chirurgical curatif. Se pose également le problème de
leur diagnostic devant tout incidentalome, avant biopsie ou geste chirurgical.
Enfin, le phéochromocytome peut être isolé ou s'intégrer dans une
polyadénomatose de type néoplasie endocrinienne multiple (NEM de type II).

135
2.2. Manifestations cliniques

2.2.1. La crise hypertensive paroxystique


Est la plus évocatrice, mais elle ne se rencontre que dans 25 à 50% des cas : début
brutal, en général par une douleur ascendante avec impression de constriction
abdominale puis thoracique, malaise général, refroidissement des extrémités et la
triade typique : céphalées pulsatiles bilatérales, palpitations et sueurs présentes
dans environ 90% (avec une valeur prédictive négative de 99 %).
Se rencontrent également, anxiété, agitation, sensation de mort imminente,
nausées, vomissement. La pression artérielle est alors très élevée (systolique entre
20 et 30) puis se normalise en quelques minutes. Le malaise est suivi d'une grande
asthénie avec une crise polyurique inconstante.
Fig. 4

Cette crise paroxystique peut être provoquée par une émotion, une mobilisation
diaphragmatique, une prise médicamenteuse, une induction anesthésique.
Lors d'une telle poussée tensionnelle peut survenir un accident tel infarctus du
myocarde, troubles du rythme cardiaque, accident vasculaire cérébral, insuffisance
cardiaque, mort subite.

2.2.2 L'hypertension permanente


Est la forme la plus fréquente (environ 60% des cas).
Seront alors des éléments d'orientation : l'existence de paroxysmes évocateurs,
une certaine instabilité dans cette hypertension artérielle, des signes associés tels
amaigrissement ou la triade évocatrice, l'existence d'une hypotension orthostatique
par hypovolémie ou la rapidité et la sévérité du retentissement de cette
hypertension.

2.2.3. Des aspects atypiques


Peuvent également se rencontrer.
Manifestations cardiovasculaires : troubles du rythme cardiaque, angor,infarctus,
insuffisance cardiaque sévère, voire choc cardiogénique.
Diabète
Manifestations gastro-intestinales douloureuses avec iléus lors des paroxysmes
sécrétoires
Accès de tremblements ou encore manifestations psychiques à type
d'anxiété,d'agitation.
Manifestations générales : fièvre, amaigrissement.
Certains phéochromocytomes se révèlent par un collapsus lors d'un accouchement
ou d'une anesthésie.

2.3. Diagnostic biologique

2.3.1. Biologie non spécifique


Peuvent se rencontrer une hyperleucocytose, une polyglobulie et une intolérance au
glucose voire un diabète.

136
2.3.2. Dosage des catécholamines urinaires
Il faut savoir que les PHEOK extra-surrénaliens ne sécrètent que de la
noradrénaline plus ou moins dopamine alors que les PHEOK surrénaliens peuvent
également sécréter de l'adrénaline.
Le dosage du VMA ou acide vanyl mandélique est peu satisfaisant en raison du
nombre important de faux négatifs et faux positifs (25 % de FN et de 5 à 30 % de
FP).
Les dosages urinaires des dérivés méthoxylés des catécholamines sont les examens
les plus contributifs.
Il faut exiger le dosage des métanéphrines urinaires (somme de la métadrénaline et
normétadrénaline) par HPLC.
Des métanéphrines urinaires > 1,6 mg/j affirment le diagnostic.
Il est d'excellente sensibilité et spécificité (95 à 100 %) et permet d'éliminer
pratiquement toutes les interférences médicamenteuses (sauf les catécholamines
exogènes).
Le dosage doit se faire sur les urines de 24H00 et il est impératif d'interrompre les
médicaments anti-hypertenseurs (bêta bloqueurs, alpha bloqueurs,centraux et
IMAO) au moins 8 jours avant les dosages.
Enfin, il faut savoir répéter les dosages en cas de négativité et les répéter les jours
de crises.
Le dosage des catécholamines libres urinaires par HPLC présente les mêmes
avantages.

2.3.3. Le dosage des catécholamines libres plasmatiques


A une nettement moins bonne valeur diagnostique en raison de leur demi-vie
extrêmement courte, du caractère intermittent de la sécrétion tumorale, des faux
positifs par hypertonie sympathique.
C'est pourquoi on peut actuellement doser les dérivés méthoxylés plasmatiques (
par HPLC) qui sembleraient avoir une excellente valeur diagnostique sauf en cas
d'insuffisance rénale (sensibilité, spécificité de 95 à 100 %).

2.3.4. Peuvent être également intéressants


Au décours d'une crise hypertensive, les dosages urinaires de catécholamines libres
(urines de 3 H).
Le dosage de dopamine plasmatique.
Le dosage de la NSE ou neuron specific enolase.
Quant aux tests dynamiques, ils ne sont plus guère utilisés en raison de leur
caractère extrêmement dangereux, sauf peut-être le test de freinage par la
clonidine.

2.4. Diagnostic de localisation


Il n'est justifié qu'après la mise en évidence d'une hypersécrétion de
catécholamines.
Rappelons que seulement 10% des phéochromocytomes sont ectopiques, souvent
multiples, situés au niveau des ganglions sympathiques le long de l'aorte.
Le scanner :

137
Il est utilisé de première intention. Il permet de localiser le PHEOK dans environ
90% des cas.
L'IRM :
Il donne les mêmes renseignements anatomiques que le scanner, tout en offrant
une bonne spéficité tissulaire. On observe en particulier en T2 un hypersignal très
évocateur, ce qui permet en cas de tumeur surrénalienne, de distinguer les PHEOK
des autres tumeurs.
L'IRM peut être par ailleurs effectuée chez la femme enceinte.
La scintigraphie à la MIBG (méta-iodo-benzyl-guanidyl) :
Elle est pratiquée en deuxième intention. Elle permet de localiser une tumeur de
toute petite taille et a surtout une excellente valeur dans les PHEOK ectopiques
(sensibilité 90 %, spécificité proche de 100 %).
Elle est systématique dans les formes familiales, dans les formes malignes à la
recherche de métastases, et pour certains, en cas d'incidentalome.
Exceptionnellement, on sera amené à effectuer un dosage étagé des
catécholamines au niveau de la veine cave inférieure à la recherche d'un gradient
de concentration.

2.5. Cas particuliers des formes familiales


Dans moins de 10% des cas, le PHEOK est familial, suspecté par le caractère
bilatéral ou multiple et la survenue chez l'enfant.
La transmission est autosomique dominante. On recherchera une néoplasie
endocrinienne multiple soit de type IIA (syndrome de Sipple) associant PHEOK,
cancer médullaire de la thyroïde et hyperparathyroïdie, soit de type IIB (syndrome
de Gorlin), associant PHEOK, cancer médullaire de la thyroïde et neurofibromes
muqueux.
Dans ce cas, l’hyperplasie médullo-surrénalienne précède la tumeur, justifiant pour
certains une surrenalectomie bilatérale d’emblée dans les NEM IIA.
Le cancer médullaire de la thyroïde domine le pronostic et doit être recherché
systématiquement par le dosage de la calcitonine avant et après pentagastrine.
Mais le PHEOK sera opéré avant la thyroïde.
Beaucoup plus rarement, on rencontrera une neurofibromatose de Von
Recklinghausen (5% de PHEOK) ou encore une maladie de Von Hippel Lindau.

2.6. Traitement
Il n'est que chirurgical, après préparation médicale utilisant alpha bloqueurs suivis
de bêta bloqueurs (lorsqu'une tachycardie apparaît) ou pour d'autres, les alpha
bêtabloqueurs (labetalol) voire les inhibiteurs calciques.
Il faudra également corriger l'hypovolémie (régime riche en sel, voire remplissage).
L'intervention bénéficiera d'une équipe chirurgicale et anesthésique appropriée du
fait des risques de poussées tensionnelles, de collapsus et de troubles du rythme
pendant l'intervention. Les acoups tensionnels peropératoires peuvent être
contrôlés par le nitroprussiate de soude, les alpha bloqueurs ou alpha
bêtabloqueurs.
La TA se normalise en 8 jours.
En cas de récidive (20%) des cas, qui sont le fait des PHEOK multiples ou malins, le
traitement peu bénéfier de doses thérapeutiques de MIBG.

138
Enfin, dans les formes malignes définies par une extension tumorale au tissu
adjacent ou par des métastases (cellules chromaffines dans un tissu où elles sont
normalement absentes), le traitement chirurgical (résection la plus large possible)
131
sera associé à une polychimiothérapie ou à la MIBG-I thérapeutique. L'alpha-
méthylparatyrosine peut être utilisée (inhibiteur de synthèse) mais a de nombreux
effets indésirables. Le PHEOK malin est dominé par sa lente évolution et l’existence
131
de rémissions significatives sous I -MIBG.
Une surveillance clinique et biologique attentive est nécessaire dans les années qui
suivent l'intervention.

Références bibliographiques
Traitement du phéochromocytome. R. MORNEX. Rev-Franç-Endocrinol-clin-1991,
32, 4-5. p 537-541.
Endocrine hypertension-J.C-MELBY-JCEM 1989-Vol 69-n°4- p 697-703.
Interêt de la scintigraphie dans les HTA d’origine surrénalienne- H. KOLESNIKOV-
GAUTHIER et COLL - Act-med-int-HTA - déc 96 - n°10 - p231-240
Phéochromocytoma : diagnosis, localization and management - E. BRAVO,
GIFFORD RW. NEJM-1984-311-p 1298-1303.
Le phéochromocytome : stratégie diagnostique. PF-PLOUIN et COLL - Rev-Franç-
Endocrinol-Clin - 1990 - 31 - p 367-369.
Difficultés diagnostiques dans l’hyper-aldostéronisme primaire. Interêt de l’imagerie
et de la biologie surrénalienne. A.TABARIN et COLL. Médecine Nucléaire. 1993. 17 :
224-233.

Questions à choix multiples


1. Dans le PHEOK :
A. L’HTA est constante, permanente.
B. Il peut y avoir des douleurs thoraciques.
C. Le risque est lié à la malignité.
D. Le diagnostic repose sur le dosage des catécholamines plasmatiques.
E. L’hypervolémie est constante.
2. L’adénome de Conn s’accompagne :
A. D’une HTA avec hyperkaliémie.
B. D’une kaliurèse effondrée.
C. D’oedèmes des membres inférieurs.
D. D’une rénine basse
E. D’un hyper-aldostéronisme freinable par surcharge en sel.
3. Entrainent un hyper-aldostéronisme secondaire :
A.Les diurétiques.
B. La réglisse.
C. Une cirrhose décompensée.
D. Une insuffisance cardiaque.
E. Une sténose de l’artère rénale

139
4. Le phéochromocytome :
A. Est une tumeur de la corticosurrénale.
B. Doit être évoqué devant la triade céphalées, hypertension, sueurs.
C. Se diagnostique par le dosage des catécholamines urinaires.
D. Peut être localisé par un scanner abdominal.
E. Le traitement est rarement chirurgical.

140
CLASSIFICATION PHYSIOPATHOLOGIQUE DES
DIABETES (n°330-331)
J. Timsit
Service d'Immunologie Clinique - Diabétologie - Médecine Interne, Hôpital Necker

DIABETES : DEFINITION ET CLASSIFICATION PHYSIOPATHOLOGIQUE (n°330-331)


1. Les critères diagnostiques du diabète
1.1. Le diagnostic de diabète repose uniquement sur la constatation d'une
hyperglycémie.
1.2. Les recommandations classiques de l'OMS
1.3. Ces notions appellent quelques commentaires:
1.5. Les nouveaux critères diagnostiques
1.6. Cas particulier de la grossesse.
2. Classification physiopathologique des diabètes
2.1. Diabète de type 1
2.2. Diabètes "spécifiques"
2.2.5. Diabètes des cytopathies mitochondriales
2.2.7. Autres syndromes génétiques pouvant comporter un diabète
2.3. Diabète de type 2
2.4. Diabète "Insulino-dépendant", "insulino-requérant", "insulino-nécessitant"
Références Bibliographiques

1. Les critères diagnostiques du diabète

1.1. Le diagnostic de diabète repose uniquement sur la constatation d'une


hyperglycémie.
Seule la mesure de la glycémie au laboratoire, par une méthode de référence
(glucose oxydase) doit être utilisée (ce qui exclut, pour le moment, l'utilisation d'un
lecteur de glycémie capillaire). Aucun autre examen n'a de valeur diagnostique
reconnue (glycosurie, hémoglobine glyquée, dosages d'insuline ou de peptide C).

1.2. Les recommandations classiques de l'OMS


Schématiquement le diagnostic de diabète peut être porté dans deux circonstances:
chez un sujet qui a des symptômes évocateurs d'hyperglycémie (syndrome
polyuro-polydipsique, amaigrissement spontané...): une seule valeur de
glycémie supérieure à 2 g/L (11 mM) suffit, quelles que soient l'heure et les
circonstances du prélèvement.
Chez un sujet asymptomatique (examen systématique, dépistage...etc): il est
nécessaire d'observer deux fois l'une des anomalies suivantes:

141
glycémie à jeun ≥ 1,40 g/L (7,8 mM)
glycémie 2 h après ingestion de 75 g de glucose (HGPO) ≥ 2 g/L (11 mM)

1.3. Ces notions appellent quelques commentaires:


On peut parfaitement observer des glycémies (largement) > 2 g/L en l'absence
de tout symptôme: le diagnostic de diabète n'en est pas moins établi.
Il est important de confirmer le diagnostic avant de "coller une étiquette" dont
les conséquences sont lourdes en terme de suivi médical et de retentissement
psychologique voire social (cf certaines exclusions professionnelles). Les sujets
chez qui une seule des deux mesures atteint le seuil diagnostique ne sont pas
"diabétiques" mais doivent être surveillés.
Les conditions de réalisation de l'HGPO doivent être standardisées: test réalisé
le matin chez un sujet à jeun depuis 10 à 16 heures, au repos, ne fumant pas.
L'alimentation doit apporter au moins 150 de glucides dans les 3 jours
précédant le test (le jeûne glucidique, en freinant la sécrétion d'insuline et en
stimulant celle de glucagon, favorise l'hyperglycémie après charge en glucose).
Après un prélèvement à jeun le sujet doit ingérer en 5 minutes 75 g de glucose
dilués dans 250 à 300 ml d'eau. Un second prélèvement est réalisé 2 h après
(les temps intermédiaires ne font pas partie des critères de l'OMS). Chez
l'enfant, le test est fait avec 1,75 g de glucose par Kg de poids sans dépasser 75
g.
Le test d'HGPO est inutile chez un sujet dont la glycémie à jeun est ≥ 1,40 g/L.
Les dosages d'insuline ou de peptide C n'ont d'intérêt que dans le cadre d'une
recherche clinique.
1.4. Le test d'HGPO :
Il conduisait jusqu'ici à distinguer 3 catégories de sujets:glycémie au temps 2 h
Normal G < 1,40 g/L
intolérance au glucose 1,40 ≤ G < 2 g/L
diabète G ≥ 2 g/L

Ces critères peuvent paraître arbitraires: ils étaient fondés sur des notions
épidémiologiques (distribution bimodale de la glycémie dans certaines populations à
forte prévalence de diabète) et pronostiques: augmentation du risque de
macroangiopathie chez les "intolérants au glucose", de macro- et de
microangiopathie chez les "diabétiques", risque d'évolution de l'intolérance au
glucose vers le diabète.

1.5. Les nouveaux critères diagnostiques


Récemment de nouveaux critères ont été proposés par l'American Diabetes
Association. Ils seront probablement adoptés par l'OMS. Ces critères sont les
suivants:

G à jeun G au temps 2 h
G < 1,1 g/L (6,1 mM) G < 1,4 g/L (7,8mM)
normal
anomalie de la tolérance Hyperglycémie modérée à "intolérance au glucose

142
au glucose jeun 1,4 ≤ G < 2 g/L
1,1 ≤ G < 1,26 g/L
diabète G ≥ 1,26 g/L (7 mM) G ≥ 2 g/L (11mm)

Pourquoi ces nouveaux critères ?


il s'est avéré que la glycémie 2 h ≥ 2 g/L était un critère plus sensible que la
glycémie à jeun ≥ 1,4 g/L (75% des sujets étiquetés "diabétiques" par
l'HGPO ont une glycémie à jeun < au seuil diagnostic de 1,4 g/L alors que la
quasi-totalité des sujets dont la glycémie à jeun est > 1,4 g/l ont une
glycémie 2 h après charge en glucose > 2 g/L). Le seuil de 1,26 g/L à jeun
est mieux corrélé à celui de 2 g/L à 2 h.
surtout plusieurs études ont montré que le seuil de survenue des
complications de micro- et de macroangiopathie (rétinopathie et mortalité
cardiovasculaire) se situe vers 1,25 g/L à jeun.
Il était donc logique d'abaisser le seuil de la glycémie à jeun diagnostique de
diabète. Ces nouveaux critères définissent également une nouvelle "catégorie" de
sujets ayant une "hyperglycémie modérée à jeun", assez voisine dans l'esprit de
l'intolérance au glucose mais ne nécessitant pas la réalisation de l'HGPO.
Il est clair que cette "réforme" vise à supprimer l'HGPO dont la lourdeur et la
reproductibilité imparfaite sont très critiquées et à simplifier le dépistage des sujets
diabétiques méconnus (à qui on disait "vous avez un peu de sucre"...et dont 20%
ont déjà des complications lorsque le diagnostic de diabète est porté...).

1.6. Cas particulier de la grossesse.


Le dépistage et le diagnostic de "diabète gestationnel" (dont ni le caractère
systématique ni les modalités ne sont actuellement consensuels) repose, pour des
raisons essentiellement historiques, sur des tests et des critères spécifiques (cf le
chapitre diabète et grossesse).

2. Classification physiopathologique des diabètes


Les progrès de l'épidémiologie et de la physiopathologie ont peu à peu modifié
notre vision "du" diabète: si "le" diabète reste bien défini par l'existence d'une
hyperglycémie chronique, il est clair que cette situation pathologique recouvre en
fait de nombreuses affections dont le démembrement a juste commencé. Dès lors,
il n'est plus possible de se référer à une classification archaïque en diabète
"insulino-dépendant" et non insulino-dépendant". Au contraire il faut, à chaque fois
que cela est possible, chercher l'étiologie du diabète (comme on cherche celle d'une
fièvre...). Cette attitude a des implications cliniques concernant le pronostic, la
prise en charge et le traitement des patients, la prévention de la maladie et le
dépistage familial.

2.1. Diabète de type 1


Le diabète de type 1 est défini par une carence spécifique de l'insulino-sécrétion. La
sensibilité à l'insuline des tissus cibles est normale. Dans la très grande majorité
des cas le diabète de type 1 est la conséquence d'une maladie autoimmune
spécifique des cellules ß. Il est caractérisé par la présence de marqueurs
d'autoimmunité sensibles et spécifiques comme les anticorps anti-cellules d'îlot, les
autoanticorps anti-GAD (décarboxylase de l'acide glutamique), anti-IA-2 (tyrosine

143
phosphatase) et anti-insuline. La physiopathologie du diabète autoimmun et ses
conséquences en terme de dépistage familial et de prévention de la maladie sont
détaillées dans le chapitre "Diabète insulino-dépendant de l'enfant" écrit par Jean-
Jacques Robert. Dans de rares cas (5 à 10%) la recherche des marqueurs
d'autoimmunité est négative et il a été proposé d'individualiser cette forme de
diabète sous le terme de "diabète de type 1 non autoimmun"... La physiopathologie
de cette forme de diabète n'est pas connue.
Contrairement à une idée reçue le diabète de type 1 n'est pas une affection
exclusivement pédiatrique: dans 50% des cas, le diagnostic est porté chez un sujet
de plus de 20 ans et le début clinique peut s'observer à tout âge (de quelques mois
à plus de 80 ans). Contrairement à une autre idée reçue, le diabète de type 1 n'a
pas toujours une présentation clinique brutale, par le classique "syndrome
cardinal": schématiquement, plus le début est tardif, plus l'évolution vers
l'insulinodépendance stricte est lente. Il est banal de retrouver une glycémie élevée
ou la notion d'une glycosurie un an auparavant chez un jeune adulte chez qui on
vient de porter le diagnostic de type 1 à l'occasion d'une décompensation
métabolique aigüe. De même 5 à 10% des patients initialement étiquetés "non
insulino-dépendants" ont en fait un diabète de type 1 lent ("slow type 1" des anglo-
saxons) authentifié par la présence d'anticorps anti-cellules d'îlots et évoluant en
un délai moyen de 5 ans vers l'insulinodépendance. Cela justifie à mon sens la
recherche systématique de marqueurs d'autoimmunité (test simple et peu coûteux)
chez tout nouveau diabétique. Cela évite des errances thérapeutiques chez un
patient dont l'insulinosécrétion s'épuise peu à peu et chez qui les "anti-diabétiques
oraux" sont de moins en moins efficaces...

2.2. Diabètes "spécifiques"


Sont regroupés dans cette catégorie les diabètes pour lesquelles une cause
précise est identifiée.

2.2.1. Diabètes secondaires à une affection pancréatique


Pancréatite chronique calcifiante (alcool, rares PCC familiales).
Pancréatite fibro-calcifiante (anciennement dite tropicale ou associée à la
malnutrition protéique); elle peut être calcifiante ou fibreuse (on n'observe donc
pas toujours des calcifications pancréatiques sur l'ASP ou le scanner) et a été
décrite chez des patients originaires d'Afrique, d'Asie, du Brésil, de Jamaïque. Sa
physiopathologie reste méconnue.
Cancer du pancréas exocrine, quelquefois révélé par un diabète ou par le
déséquilibre d'un diabète connu.
Bien sûr pancréatectomie
Mucoviscidose
Dans ces affections:
la carence en insuline s'installe progressivement: le traitement est donc
susceptible d'évoluer avec le temps,
le diabète n'est pas isolé: il faut rechercher et substituer le déficit exocrine
(maldigestion) pour assurer un état nutritionnel correct,
le déficit de la sécrétion de glucagon augmente le risque d'hypoglycémie sévère
lorsque le diabète est traité; en revanche il assure une protection relative vis à
vis du risque d'acido-cétose (cf physiopathologie de l'acidocétose diabétique).
C'est aussi dans ce cadre que la classification actuelle place le diabète
associé à l'hémochromatose génétique (mutation du gène HFE); ce choix me

144
semble discutable. La physiopathologie de ce diabète fait intervenir peut-être une
diminution de l'insulinosécrétion liée à la surcharge ferrique des îlots, mais surtout
l'insulinorésistance hépatique, particulièrement marquée lorsque l'hémochromatose
est compliquée d'une cirrhose. De façon plus générale, les hépatites aigües et la
cirrhose sont des situations dans lesquelles il existe une insulinorésistance qui
explique la fréquence du diabète (cf infra).

2.2.2. Diabètes secondaires à une endocrinopathie


Un diabète peut s'observer au cours d'une acromégalie, d'un hypercortisolisme,
d'un phéochromocytome, d'un glucagonome (tumeur rare du pancréas endocrine)
du fait de la sécrétion excessive de l'une des hormones dites "de contre-régulation"
(elles sont sécrétées, physiologiquement, au cours d'une hypoglycémie) que sont la
GH, le cortisol, les catécholamines, le glucagon. L'hyperthyroïdie peut déséquilibrer
un diabète (insulinorésistance liée aux hormones thyroïdiennes en excès),
l'hyperaldostéronisme primaire aussi (via l'hypokaliémie).
En fait, dans ce cadre le diabète est rarement au premier plan et il s'agit plus
probablement d'un diabète révélé par la maladie endocrinienne, potentiellement
réversible avec le traitement de celle-ci.

2.2.3. Diabète induit par des médicaments ou des toxiques


La liste des médicaments incriminés dans la survenue d'un diabète est très longue.
Certains médicaments sont diabétogènes: on peut citer par exemple les
glucocorticoïdes, les diurétiques thiazidiques, les ß-bloqueurs, certains contraceptifs
oraux, le FK 506, la cyclosporine et, d'utilisation plus récente, certains anti-
rétroviraux (analogues nucléosidiques et anti-protéases) utilisés contre le VIH.
Même pour ces médicaments il existe clairement une sensibilité individuelle (tous
les individus traités ne deviennent pas diabétiques) qui n'est peut être que le reflet
de l'existence d'un diabète "latent" jusque-là. Pour beaucoup d'autres médicaments
l'imputabilité n'est pas établie.
La physiopathologie des diabètes induits par les médicaments n'est pas univoque et
peut faire intervenir, comme dans celle du diabète de type 2, une insulinorésistance
et/ou une diminution de l'insulinosécrétion.
Certaines substances sont directement toxiques pour les cellules ß: c'est le cas par
exemple de la streptozotocine, de la pentamidine (lorsqu'elle est utilisée par voie IV
dans le traitement des pneumocystoses), du Vacor (un raticide).

2.2.4. Diabète par anomalie génétique de la cellule ß (MODY)


Le diabète de type MODY ("Maturity Onset Diabetes of the Young) est un bel
exemple des progrès récents de la physiopathologie. Sa définition était initialement
purement phénotypique: il s'agit d'un diabète survenant (ou diagnostiqué) chez un
sujet jeune (classiquement avant l'âge de 25 ans), à transmission autosomique
dominante. C'est un diabète rare, environ 5% des cas de diabète du sujet jeune. Le
degré d'hyperglycémie est très variable, à peine supérieur à la normale dans
certaines familles, franchement élevé et imposant un traitement par l'insuline dans
d'autres. Ce mode de transmission évoquait une affection monogénique et des
études de famille ont permis d'une part de démontrer le caractère hétérogène des
MODY (différents gènes peuvent être en cause), d'autre part de caractériser les
mutations responsables dans au moins 5 gènes:
gène de la glucokinase, enzyme impliquée dans la phosphorylation du glucose
en G6P, première étape qui permet à la cellule ß d'intégrer les variations de la
glycémie et de déclencher l'insulinosécrétion (cf votre cours sur la physiologie
de l'insulinosécrétion). Les mutations de la glucokinase sont responsables d'une

145
élévation du seuil glycémique à partir duquel la cellule ß sécrète de l'insuline,
donc d'une hyperglycémie chronique.
gène HNF 1 α, facteur de trancription dont les mutations sont associées, par des
mécanismes encore inconnus, à un défaut de production de l'insuline.
gène HNF 4 α, facteur impliqué dans la transcription du précédent...
gène HNF 1 ß, formant un complexe avec HNF 1 α...
gène IPF 1, facteur de transcription impliqué dans la différenciation des cellules
ß.
Il reste encore des MODY (environ 20%) dont le gène responsable n'est pas
identifié...

2.2.5. Diabètes des cytopathies mitochondriales d'origine génétique


Les cytopathies mitochondriales sont des affections très polymorphes dans leur
expression, touchant, dans leurs formes pédiatriques, de nombreux organes. Elles
peuvent être dues à des délétions ou à des mutations du génome mitochondrial
proprement dit ou à des mutations de gènes nucléaires qui codent des protéines de
la chaîne respiratoire mitochondriale ou qui assurent l'intégrité de l'ADN
mitochondrial (ADNmt). Ces affections peuvent également avoir un expression
beaucoup plus discrète, se révélant, chez l'adulte par un diabète d'apparence
"banale" mais dont la transmission matrilinéale et l'association à une surdité de
perception, éventuellement modérée, évoquent l'origine. C'est, par exemple, le cas
du diabète associé à la mutation G3243A de l'ADNmt (d'autres mutations peuvent
être en cause). Le diabète serait la conséquence d'une réduction de la masse des
cellules ß. Dans le syndrome de Wolfram c'est l'anomalie d'un gène nucléaire qui
est responsable d'un tableau complexe associant diabète sucré, diabète insipide
central, surdité de perception, atrophie optique, vessie neurogène, atteintes
neurologiques centrales, troubles psychiatriques.

2.2.6. Anomalies génétiques de l'action de l'insuline


Il s'agit là de diabètes très rares, liés en particulier à des mutations du récepteur de
l'insuline. L'insulinorésistance est souvent "extrême", des doses d'insuline 1000 fois
supérieures aux doses habituelles pouvant être nécessaires pour contrôler
l'hyperglycémie.

2.2.7. Autres syndromes génétiques pouvant comporter un diabète


On peut citer, "en vrac" et sans dénominateur commun physiopathologique, la
trisomie 21, le syndrome de Klinefelter, le syndrome de Turner, le syndrome de
Prader Willi, l'ataxie de Friedreich...etc.

2.3. Diabète de type 2

2.3.1.Epidemiologie
Le diabète de type 2 (anciennement "diabète non insulino-dépendant") est de très
loin le plus fréquent des diabètes (environ 85% des cas). Sa prévalence est très
élevée, environ 2 à 10% selon la population étudiée, augmente régulièrement et
atteint dans certaines populations des chiffres énormes (50% de la population
adulte chez les Indiens PIMA).
Il peut sembler paradoxal de n'envisager ce diabète qu'après tous les autres. En
fait nous ne disposons pas actuellement de marqueur sensible et spécifique pour
porter ce diagnostic: c'est donc un diagnostic par défaut (même si c'est un

146
diagnostic très fréquent), qui est évoqué sur des caractéristiques phénotypiques et
sur l'absence d'autre cause identifiable.
L'existence d'une susceptibilité génétique au diabète de type 2 est par exemple
attestée par un taux de concordance plus élevé entre jumeaux monozygotes
qu'entre jumeaux dizygotes. De même le risque dans la fratrie d'un sujet
diabétique de type 2 est 10 fois supérieur à celui de la population générale (donc de
l'ordre de 20% en France). En dehors des cas rares de diabète monogénique il est
probable que cette susceptibilité repose sur la conjonction, chez un même individu,
de mutations ou de polymorphismes de plusieurs gènes dont l'expression dépend
également de facteurs d'environnement
Le diabète de type 2 survient le plus souvent chez un adulte d'âge moyen. Son
caractère peu symptomatique explique que la moitié des cas sont méconnus
(résultats d'enquêtes de dépistage systématique), un retard diagnostique et
thérapeutique de plusieurs années et la fréquence des complications lors du
diagnostic. La majorité des diabétiques de type 2 ont un excès pondéral, de
répartition androïde et souvent d'autres anomalies regroupées sous le terme de
"syndrome X" ou syndrome pluri-métabolique: hypertension artérielle,
augmentation du LDL cholestérol ou baisse du HDL-cholestérol,
hypertriglycéridémie, tous facteurs de risque vasculaire expliquant la fréquence des
accidents cardio-vasculaires chez ces sujets.
Peuvent donc être considérés comme facteurs de risque du diabète de type 2:
l'ethnie
l'existence d'antécédents familiaux
la mise au monde d'un enfant de poids de naissance supérieur à 4 kg
Un antécédent personnel de diabète gestationnel
l'âge
l'existence d'une surcharge pondérale, surtout androïde
la sédentarité
Et toutes les situations favorisant une insulinorésistance.
C'est dans ces situations en priorité qu'il faut s'attaquer au problème de la
prévention et du diagnostic précoce du diabète de type 2.

2.3.2.La physiopathologie du diabète de type 2


Fait intervenir à la fois une insulino-résistance et des anomalies de la sécrétion
d'insuline.
L'insulino-résistance
Elle est probablement en partie génétique :
Les enfants de patients diabétiques de type 2 ont une insulino-résistance alors
même que leur tolérance au glucose est encore normale; elle peut également être
acquise, par exemple à l'occasion d'un surpoids. Cette insulinorésistance est
"relative" c'est à dire qu'elle peut être compensée par une production d'insuline
accrue (soit spontanément, soit sous l'effet d'un sulfamide hypoglycémiant) ou par
un traitement par l'insuline. Les mécanismes de l'insulinorésistance restent mal
connus: le nombre et l'affinité des récepteurs de l'insuline sur ses tissus cibles
(foie, muscle, tissu adipeux) sont (en gros) normaux; c'est après la liaison de
l'insuline à son récepteur (étape dite "post-récepteur") que la transduction du
message est altérée, en partie à cause de signaux venant en particulier de la cellule
adipeuse (TNFa et leptine). Les conséquences de l'insulinorésistance sont, elles,
mieux définies: augmentation de la production de glucose par le foie

147
(essentiellement par augmentation de la néoglucogénèse), diminution du captage,
du stockage et de l'utilisation du glucose dans le muscle; de plus la libération
d'acides gras par le tissu adipeux (où la lipolyse est moins bien freinée par
l'insuline) contribuerait à une moins bonne utilisation du glucose dans le muscle.
Mais l'insulinorésistance ne suffit pas à expliquer la survenue d'un diabète: à un
stade tout initial les futurs diabétiques de type 2 ont un hyperinsulinisme qui leur
suffit à maintenir une tolérance au glucose normale.
Les anomalies de la production d’insuline
Des anomalies de la production d'insuline sont donc nécessaires pour que survienne
le diabète: abolition du pic précoce d'insulinosécrétion en réponse au glucose (qui
correspond normalement à l'exocytose des granules de sécrétion pré-formés),
anomalies de la pulsatilité de la sécrétion d'insuline, augmentation du pourcentage
de sécrétion de la pro-insuline, moins bio-active que l'insuline (suggérant une
anomalie de la maturation finale de l'insuline). A ces anomalies qualitatives
s'ajoutent des anomalies quantitatives. Lorsque l'hyperglycémie est modérée les
quantités d'insuline produites sont augmentées (c'est ce qui a fait dire que les
diabétiques de type 2 ont un hyperinsulinisme): en fait elles ne le sont pas assez
(puisque le sujet est en hyperglycémie), il y a donc une carence relative de
l'insulinosécrétion. Quand l'hyperglycémie est franche on observe une carence
"absolue" de l'insulinosécrétion qui devient inférieure à celle mesurée chez le sujet
"normal". Les causes de ces anomalies de production de l'insuline ne sont pas
connues, sauf dans le cas particulier des diabètes de type MODY (cf 2.4): il peut
s'agir d'un phénomène "organique" (vieillissement prématuré de la cellule ß par
exemple) ou d'une anomalie fonctionnelle, potentiellement réversible de
glucotoxicité ou de lipotoxicité.
En effet, viennent s'ajouter à ces anomalies qu'on pourrait dire "constitutives" des
anomalies fonctionnelles, conséquences directes du déséquilibre du diabète et
responsables d'un véritable cercle vicieux: de façon schématique l'hyperglycémie
tend à aggraver le défaut de production d'insuline c'est ce qu'on appelle la
"glucotoxicité", l'augmentation des acides gras et des triglycérides aussi
("lipotoxicité"). L'insulinorésistance est également majorée. Les mécanismes
hypothétiques de ces phénomènes ne seront pas envisagés ici mais ces notions ont
deux conséquences pratiques majeures:
L'hyperglycémie du diabétique de type 2 ne tend pas à s'améliorer
spontanément (au contraire)
tout moyen thérapeutique (régime strict, activité physique, traitement par des
comprimés ou insulinothérapie transitoire) qui permet d'abaisser la glycémie est
susceptible d'améliorer, au moins en partie, l'insulinosécrétion endogène et la
sensibilité à l'insuline.

2.4. Diabète "Insulino-dépendant", "insulino-requérant", "insulino-


nécessitant"

2.4.1.La notion d'insulino-dépendance


Elle est ancienne: elle date de la découverte de l'insuline et de la démonstration
que certains patients qui, autrefois, mouraient d'acido-cétose diabétique survivent
grâce à un traitement par l'insuline (Leonard Thompson fut le premier en 1922). Au
sens strict, l'insulino-dépendance est donc définie par la nécessité absolue d'un
traitement par l'insuline pour éviter l'évolution vers l'acido-cétose (et la mort). A
l'inverse certains patients diabétiques, malgré des niveaux glycémiques très élevés
(3 g/L, soit 16,5 mM) de façon chronique ne font pas d'acido-cétose (ils feront
cependant toutes les complications chroniques du diabète). La différence essentielle
entre ces deux patients réside dans la sévérité de la carence en insuline absolue

148
chez le premier, relative chez le second.
Est donc "insulino-dépendant" :
Chez le diabétique de type 1
Un patient dont le pancréas ne produit plus du tout d'insuline, en pratique
essentiellement les diabétiques de type 1 lorsque la maladie auto-immune a détruit
la quasi-totalité des cellules ß. Mais comme cette destruction est progressive,
même dans le diabète de type 1 il peut exister une phase de plusieurs mois, voire
années ("type 1 lent"), pendant laquelle le patient n'est que modérément
hyperglycémique et ne requiert pas, du moins pour sa survie, une insulinothérapie.
L'histoire naturelle du diabète de type 1, bien étudiée dans le cadre des études de
dépistage familial (cf le cours de JJ Robert), dessine une séquence au cours de
laquelle l'insulinosécrétion est normale, pour autant qu'on puisse en juger, pendant
plusieurs années alors que les marqueurs d'auto-immunité sont présents, puis
s'altère de façon discrète (perte du pic précoce d'insulinosécrétion), puis plus
sévèrement avec pour conséquence une hyperglycémie modeste, puis de façon
profonde au stade de diabète clinique. Ce n'est cependant en moyenne que 5 ans
après le diagnostic de diabète que l'insulinosécrétion devient réellement nulle. Le
même type de situation peut s'observer dans d'autres diabètes avec perte
progressive de la masse des cellules ß, comme par exemple au cours des diabètes
"pancréatiques".
Chez le diabétique de type 2
A l'inverse, dans de nombreuses situations, les diabétiques de type 2 peuvent avoir
besoin d'un traitement par l'insuline.
Ce besoin peut être transitoire, par exemple :
au cours de la grossesse chez une patiente dont le diabète n'est pas
parfaitement contrôlé par le seul régime,
dans la période encadrant une intervention chirurgicale: on n'aime pas
utiliser les "anti-diabétiques" oraux dans une situation potentielle
d'instabilité hémodynamique, ou métabolique, ou à risque d'insuffisance
rénale,
en situation de stress (infarctus du myocarde, sepsis ...etc.) pour les
raisons citées plus haut et parce que, du fait de l'insulinorésitance accrue,
le traitement habituel ne suffit plus à contrôler l'hyperglycémie,
au cours d'un traitement hyperglycémiant, en premier lieu une
corticothérapie,
lorsqu'une complication du diabète justifie l'obtention d'un excellent
contrôle glycémique: mal perforant plantaire infecté, neuropathie aiguë
douloureuse.
Dans ces situations l'insuline sera administrée pour une période de quelques jours à
quelques mois, puis sera relayée par le traitement oral. Il est important de bien
expliquer cette possibilité de "retour en arrière" aux patients qui sont souvent
convaincus que lorsqu'on commence une insulinothérapie on ne peut plus
l'interrompre.
Dans d'autres cas le traitement par l'insuline sera a priori définitif:
dans toutes les situations où les "anti-diabétiques oraux" sont (ou
deviennent) contre-indiqués: insuffisance rénale, insuffisance hépatique, âge
physiologique avancé, et, pour les biguanides, sujet à risque d'hypoxie
tissulaire (risque accru d'acidose lactique).
mais surtout, chez de très nombreux patients, tout simplement parce qu'un
traitement oral bien conduit ne suffit pas, ou ne suffit plus, à contrôler

149
l'hyperglycémie. On prescrit donc de l'insuline parce qu'on n'a pas d'autre
recours thérapeutique: c'est ce que certains appellent "insulino-requérance"
ou (pire) "insulino-nécessitance". Cette notion est évidemment subjective:
elle dépend autant de la décision du médecin (de commencer
l'insulinothérapie) que des caractéristiques du patient. Elle est aussi fonction
de l'objectif glycémique fixé pour chaque patient. Elle est potentiellement
évolutive: l'insuline peut par exemple être interrompue chez un patient
ayant un diabète de type 2 à l'occasion d'une perte de poids, de l'arrêt ou de
la diminution d'une corticothérapie ...etc. Elle le sera encore plus avec
l'arrivée des nouveaux traitements du diabète de type 2. N'est donc pas
"insulino-dépendant" tout patient traité par l'insuline...
Deux conséquences pratiques résument ces notions:
on peut très bien "mettre à l'insuline" un patient qui en a transitoirement
besoin, et l'interrompre ultérieurement sans dommage.
il est à l'inverse dangereux d'interrompre, même brièvement,
l'insulinothérapie d'un diabétique authentiquement insulino-dépendant: une
acidocétose peut survenir en quelques heures, particulièrement au cours de
la grossesse ou en situation de stress. Un diabétique de type 1 a besoin
d'insuline en permanence, même à jeun (et même après une
hypoglycémie)...

Références Bibliographiques
Les Diabètes. Comprendre pour traiter. A Grimaldi, C Sachon, F Bosquet.
Editions Médicales Internationales. Techniques et documentation Lavoisier.
1993.
Diabète de type 2: numéro hors série n° 2 d'Octobre 1997, de la revue
Médecine Thérapeutique et en particulier l'article de Jean Girard, pages 33-47.

150
COMPLICATIONS CHRONIQUES DU DIABETE
(N° 330 - 331)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation
Hôpital Laennec

Introduction
Le diabète épargne beaucoup d'organes qui n'ont pas de lésions secondaires à la
maladie (cerveau, foie, poumons... cheveux, oreilles !). Mais la diffusion du
système vasculaire fait que beaucoup d'organes sont néanmoins menacées et
atteints.
La chronologie de survenue, l'évolution, la sémiologie des atteintes sont parfois un
peu différentes dans le DID et le DNID mais en pratique on peut dire que les deux
diabètes ont les mêmes complications.
Les lésions des petits vaisseaux et des capillaires conduisent à l'atteinte micro-
angiopathique : rétinopathie et néphropathie diabétiques auxquelles est rattachée
le plus souvent la neuropathie diabétique, périphérique et autonome. Ces atteintes
sont détaillées dans les chapitres suivants : elles ont des caractéristiques très
spécifiques. Elles sont très dépendantes du degré de l'hyperglycémie.
L'atteinte des grosses artères (membres inférieurs, vaisseaux du cou, coronaires)
par l'artériosclérose et les plaques d'athérome est responsable de la macro-
angiopathie ; elle représente la principale cause de mortalité des diabétiques.
Celle-ci n'a pratiquement pas de caractéristique spécifique liée au diabète, elle ne
sera donc pas traitée dans le polycopié.Le diabète est cependant un facteur de
risque majeur et indépendant pour sa survenue, bien que son évolution ne semble
pas ou peu liée à l'équilibre glycémique. Sa physiopathologie au cours du diabète
n'est pas claire, une des hypothèses en vogue accuse l'hyperinsulinisme, présent au
niveau périphérique (hyperinsulinisme endogène dans le DNID, exogène dans le
DID), de favoriser la croissance des plaques d'athérome.
Quoi qu'il en soit, la lutte acharnée contre les autres facteurs de risque vasculaires,
le dépistage régulier des atteintes artèrielles par l'interrogatoire et l'examen
clinique font partie intégrante de la prise en charge du diabète (la place des
explorations paracliniques dans le dépistage systématique reste à préciser). Le
traitement des atteintes artèrielles, quel qu'en soit le territoire, est identique chez
le diabétique et le non-diabétique. En aucun cas il ne faut refuser, sous prétexte du
diabète, le bénéfice d'explorations ou de thérapeutiques proposées à des sujets
non-diabétiques du même âge.
Les complications spécifiques du diabète (microangiopathiques) ne se développent
pas sans diabète et leur intensité est corrélée au degré de l'hyperglycémie. Cela va
sans dire mais n'a été prouvé que très récemment en raison :
de bizarreries apparentes
de difficultés méthodologiques.
Au niveau des bizarreries, certains patients semblent être en partie épargnés,
quelles que soient leurs "fautes", l'importance de leur déséquilibre, alors que le
destin d'autres semble être l'évolution quasi inéluctable vers les complications,

151
quelle que soit la qualité de leur équilibre glycémique. Ceci est actuellement
expliqué, jusqu'à preuve du contraire, par une susceptibilité génétique associée au
diabète, exposant ou protégeant (en partie) des complications. L'emploi
systématique des outils de la biologie moléculaire permettra d'identifier certains
gènes ou association de gènes exposant ou prévenant (en partie) les complications.
Notons que :
les publications formelles sont souvent rapidement contredites par une autre
publication,
les gènes incriminés peuvent être de simples marqueurs (ce qui permettrait
déjà d'identifier les patients à risque), mais parfois permettent de mieux
comprendre la pathogénie, ouvrant la voie à un (lointain) traitement,
le niveau et la durée de l'hyperglycémie sont des facteurs indispensables à
l'évolution des lésions et quels que soient les gènes, la prévalence et la
gravité des complications microangiopathiques est essentiellement liée à
l'ancienneté du diabète. Seule l'incidence de l'atteinte rénale diminue
considérablement après 30 ans de diabète.
D'autres facteurs de risque, notamment l'hypertension artérielle, influencent
considérablement les complications et leur évolution.
Alors que le rôle de l'hyperglycémie dans la survenue des complications était
fortement soupçonné depuis 30 ans, l'étude prouvant l'utilité d'un bon contrôle
glycémique n'a été réalisée que très récemment en Amérique du Nord. Cette étude
multicentrique (le D.C.C.T.) a inclus près de 1500 patients répartis en 2 sous-
groupes : pour moitié moins de 5 ans de diabète et pas d'atteinte rétinienne, pour
moitié un diabète de 5 à 10 années avec rétinopathie débutante. Ces 1500 patients
ont été randomisés en deux groupes thérapeutiques :
Traitement dit "conventionnel" avec 2 injections/jour, autosurveillance légère
et suivi diabétique espacé.
Traitement "intensif", recherche des glycémies normales à l'aide de 3 à 4
injections par jour, une autosurveillance et un suivi diabétologique intensif.
Dans le groupe "traitement conventionnel", après 7 ans 1/2 de suivi, la glycémie
moyenne est de 2,31 g/l et l'HbA1C à 8,5 % (N < 6,5 %) et dans le groupe
"intensif", les résultats bien meilleurs respectivement à 1,55 g/l et 7,2 % (avec
quelques hypoglycémies supplémentaires).
L'impact du bon équilibre sur les complications est spectaculaire : Dans le groupe
"traitement intensif" : près de la moitié de rétinopathies sévères en moins, et les
nouveaux cas de rétinopathie ont diminué d'un tiers. Pour le rein, 1/3 de
microalbuminurie et 1/2 de macroalbuminurie en moins. Près de 2/3 de
neuropathies cliniques en moins. (Pas de différence statistiques pour la macro-
angiopathie, mais une tendance à la diminution dans le groupe intensif).
Il est exceptionnel qu'une étude de ce type donne des résultats si nets et quelles
que soient les interprétations, retouches, contestations possibles, la conclusion est
formelle : un contrôle strict de la glycémie permet de ralentir ou d'éviter la
survenue des complications du diabète.
A défaut d'avoir installé et réalisé l'étude, la diabétologie européenne avait depuis
longtemps institué une stratégie de prise en charge thérapeutique globale,
recherchant le meilleur équilibre glycémique possible quand cela était réalisable,
associée au traitement efficace de l'HTA, la prise en charge de l'hyperlipémie et
l'éviction du tabac (voir chapitre traitement). Cette thérapeutique inclut de façon
explicite la surveillance régulière du patient (fond d'oeil, ECG, créatinine...).
Les progrès et la qualité des enquêtes épidémiologiques et thérapeutiques, les
percées scientifiques notamment pathogéniques ont abouti à la vérification de cette

152
évidence : mieux les malades sont soignés par eux mêmes et l'équipe médicale,
mieux ils se portent!

153
RETINOPATHIE DIABETIQUE (n° 219 - 330 -
331)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation
Hôpital Laennec

RETINOPATHIE DIABETIQUE (n° 219 - 330 - 331)


Points importants
1. Epidémiologie
1.1. Facteurs de risque :
1.2. Facteurs protecteurs
2. Histoire naturelle de la rétinopathie
2.1. Stade initial : Rétinopathie débutante
2.2. Rétinopathie diabétique ischémique
2.3. Rétinopathie proliférante
2.4. Rétinopathie oedémateuse
3. Traitement
3.1. La photocoagulation laser
3.2. La chirurgie
4.Conclusion : surveillance et dépistage précoce des lésions.
Référence bibliographique :
Questions à choix multiples

Points importants
Cette complication redoutée a bénéficié des immenses progrès de la
diabétologie et de l’ophtalmologie.
L’ancienneté et l’importance de l’hyperglycémie sont les 2 principaux facteurs de
risques de rétinopathie diabétique.
La rétinopathie débutante (microanévrisme) finit pas atteindre l’immense
majorité des diabétiques mais elle est sans aucune gravité à ce stade.
La rétinopathie ischémique qui fait le lit de la prolifération est elle plus
redoutable.
La rétinopathie oedémateuse est la principale cause de cécité chez les
diabétiques.
Il y a une corrélation absolue entre l’atteinte rétinienne, son évolution et le taux
d’HbA1c.
Laser et vitrectomie ont révolutionné la prise en charge de la rétinopathie

154
diabétique.
L’examen ophtalmologique complet « fond d’oeil » est indispensable tous les ans.
L’angiographie est pratiquée tous les 5 ans ou plus souvent en cas de lésion et/ou
de traitement. Il faut la demander d’emblée dans le type 2 dont la date de début
est rarement connue avec précision.

La cécité est, à juste titre, une des complications les plus redoutée par les
diabétiques et les diabétologues. Pourtant son incidence est actuellement minime.
La diminution importante du nombre de cécités liées au diabète est principalement
le résultat d'une lutte acharnée de la part des médecins et des patients et tout
relâchement pourrait remettre en cause ce résultat.

1. Epidémiologie

1.1. Facteurs de risque :


L'ancienneté et l'importance de l'hyperglycémie sont les deux principaux facteurs
de risque de rétinopathie diabétique.
Ainsi il est exceptionnel de constater une rétinopathie avant 5 ans d'évolution du
diabète. (Ceci se constate facilement dans le DID. Dans le cas du DNID, il est
généralement impossible de dater le début de la maladie et l'atteinte peut paraître
plus précoce, voire révélatrice). Globalement, les deux types de diabète ont les
mêmes complications rétiniennes. Après 30 ans d'évolution, 90% des diabétiques
sont atteints d'une rétinopathie (minime ou sévère) .
La rétinopathie apparaît et évolue d'autant plus vite que la glycémie est élevée.
L'hypertension artérielle accélère l'évolution de la rétinopathie diabétique.
Il est donc nécessaire de contrôler très strictement la TA des diabétiques. Ainsi, le
seuil auquel est défini l'hypertension est abaissé à 140 / 85 mmHg chez les
diabétiques, chiffres au delà desquels doit débuter le traitement, chiffres qui
demeurent l'objectif thérapeutique tout au long de l'évolution.
La grossesse est une situation susceptible de faire flamber une rétinopathie
préexistante. Une surveillance ophtalmologique rapprochée et une stabilisation
préalable des lésions sont donc nécessaires (voir chapitre grossesse diabétique).
Facteurs génétiques : ils sont probables, mais non certains. Ils pourraient
expliquer pourquoi, alors que presque 100% des diabétiques développent une
rétinopathie, seuls 30% feront une forme proliférante (une des formes les plus
graves).

1.2. Facteurs protecteurs


Ils sont rares et ne protègent pas à 100% de la rétinopathie : myopie forte (> 7
dioptries), glaucome, cicatrice de chorio-rétinite, sténose carotidienne. Ils
expliquent certains paradoxes.

2. Histoire naturelle de la rétinopathie


La rétinopathie diabétique fait partie de la micro-angiopathie diabétique. C'est en
effet une maladie des capillaires rétiniens. L'atteinte est généralement symétrique.

155
2.1. Stade initial : Rétinopathie débutante
La première lésion est le microanévrisme capillaire. Il est très spécifique de la
rétinopathie diabétique. Il se présente sous la forme d'un petit point, à la limite de
la visibilité, rouge au fond d'oeil, fluorescent en angiographie.
A un stade déjà un peu plus évolué, il peut s'associer des phénomènes liés à
l'augmentation de la perméabilité capillaire :
Micro-hémorragies, rondes ou en flammèche.
Exsudats de lipides et glycoprotéines (exsudats jaunes, durs).
A ce stade l'acuité visuelle est toujours normale. Seul l'examen ophtalmologique
permet de dépister ces lésions.

2.2. Rétinopathie diabétique ischémique


Il s'agit du stade suivant, qui peut très bien ne jamais apparaître.
Aux lésions liées à l'hyperperméabilité s'associent des lésions secondaires à
l'occlusion capillaire : apparition de territoires ischémiques, non perfusés, mieux
visibles sur l'angiographie qu'au fond d'oeil.
Lorsque apparaissent en plus des zones ischémiques, des AMIR (anomalies
microvasculaires intrarétiniennes) et des exsudats cotonneux ou nodules
dysoriques (taches blanc ouatées en relief, correspondant à l'oedème des fibres
rétiniennes ischémiques) on parle alors de rétinopathie préproliférante.
Comme l'acuité visuelle dépend essentiellement de la macula, qui est une zone
avasculaire, celle ci n'est toujours pas perturbée à ce stade ; le patient ne ressent
aucune gêne.
Ces deux premiers stades : rétinopathie débutante et rétinopathie ischémique, sont
parfois regroupées sous le nom de rétinopathie non proliférante, ou
"background retinopathy", car les lésions restent dans le plan de la rétine.

2.3. Rétinopathie proliférante


Moins d'un tiers des patients développe au cours de l'évolution de son diabète une
rétinopathie proliférante, et il s'écoule en général entre 5 et 15 ans entre
l'apparition des premiers microanévrismes et celle des premiers néovaisseaux.
La sécrétion exagérée de facteurs de croissance (RGF : Rétinal Growth Factor) par
les cellules hypoxiques favorise l'apparition de néovaisseaux.
Malheureusement, ceux-ci ne se développent pas dans le plan de la rétine, mais
"bourgeonnent" dans le vitré, ce qui les rend particulièrement fragiles. Ils peuvent
même à l'extrême, atteindre l'angle irido-cornéen, bloquer la résorption de
l'humeur aqueuse et provoquer un "glaucome néovasculaire". S'ils atteignent l'iris
ils sont visibles à l'oeil nu : c'est la "rubéose irienne".
Les néovaisseaux ne modifient pas l'acuité visuelle et restent asymptomatiques
jusqu'au jour ou l'un "éclate" et est à l'origine d'une hémorragie intra-vitréenne. En
quelques minutes un voile rouge apparaît devant l'oeil atteint dont l'acuité visuelle
chute à 0. Pourtant ce premier drame se termine généralement bien : en quelques
semaines, l'hémorragie se résorbe spontanément, le corps vitré est "nettoyé" et
retrouve sa transparence. Mais la multiplication des hémorragies va à la longue
entraîner une opacification définitive du vitré, responsable de la cécité. De plus, la
constitution de "cicatrices" (réaction fibro-gliale), sous formes de brides de traction,
peut être à l'origine d'un redoutable décollement rétinien.

156
2.4. Rétinopathie oedémateuse
Il s'agit de l'oedème maculaire, cause principale de cécité chez le diabétique. Cet
oedème maculaire peut apparaître à tous les stades décrits précédemment (sauf
microanévrismes isolés), car il est la conséquence de l'hyperperméabilité capillaire
lorsqu'elle est proche de la macula. Très sensible à l'équilibre glycémique, il est
peut-être plus fréquent dans le DNID. Il se manifeste par une baisse de l'acuité
visuelle progressive, mais qui peut être majeure. Il est mieux visualisé à
l'angiographie qu'au fond d'oeil. Lorsqu'il persiste plusieurs mois, il s'organise en
logettes (oedème maculaire cystoïde) et devient alors irréversible.

3. Traitement
Il n'y a pas de traitement curatif de la rétinopathie diabétique, mais un traitement
physiologique préventif. En l'absence de traitement préventif, la photocoagulation
laser ne peut qu'arrêter transitoirement l'évolution des lésions, mais ne peut pas
faire régresser la rétinopathie. Il est capital que les patients soient informés de
cela. C'est néanmoins un remarquable traitement symptomatique.
Le maintien d'un bon équilibre glycémique et tensionnel est donc primordial. Mais
quand un patient est en phase d'abandon de sa thérapeutique, la dernière chose à
laquelle il doit renoncer est probablement la surveillance et le traitement
ophtalmologique.

3.1. La photocoagulation laser


La destruction localisée de la rétine grâce à l'énergie thermique délivrée par le laser
crée une cicatrice inerte. Le but est de préserver la macula, siège de la vision
centrale, en bloquant l'évolution des lésions menaçantes. Si un traitement par laser
semble indiqué, l'angiographie est indispensable pour préciser l'étendue exacte des
lésions. Selon l'importance de celles-ci, le laser sera soit ponctuel, soit sectoriel,
soit concernera l'ensemble de la rétine à l'exception de la macula (photocoagulation
pan-rétinienne). Ce n'est qu'exceptionnellement que le laser est effectué sur la
macula.
Au stade de rétinopathie préproliférante :
La destruction des zones ischémiques menaçantes permet d'éviter l'apparition des
néovaisseaux. Alors qu'en France le laser est souvent débuté à ce stade, aux États-
Unis le laser n'est effectué qu'après l'apparition des néovaisseaux.
Au stade de rétinopathie proliférante :
Le laser permet de détruire les néo-vaisseaux, évitant ainsi leur rupture.
Dans la rétinopathie oedémateuse :
Le laser est réalisé de façon préventive, pour détruire les lésions du pôle postérieur
qui pourraient provoquer un oedème maculaire. Si la macula est très menacée, un
barrage péri-maculaire est réalisé en encerclant la macula par les impacts de laser.
Si un oedème maculaire est déjà installé, le traitement le plus efficace pour obtenir
sa régression est la normalisation glycémique et tensionnelle. En cas d'oedème
maculaire cystoïde, est parfois proposée une photocoagulation en grille (ou grid)
maculaire : quelques impacts dispersés sur la macula permettent de limiter la
diffusion de l'oedème.
La réalisation d'une photocoagulation étendue nécessite plusieurs séances
(plusieurs milliers d'impacts) et une bonne coopération du patient. Il sera informé
que le laser n'améliorera pas son acuité visuelle. Au contraire, il peut être
responsable d'un oedème transitoire, et en cas de photocoagulation pan-rétinienne
son champ visuel et surtout sa vision nocturne seront définitivement altérés (la

157
vision nocturne est assurée par la périphérie rétinienne).

3.2. La chirurgie
La vitrectomie permet de rétablir la transparence des milieux intra-oculaires après
hémorragie du vitré, si celle-ci ne se résorbe pas spontanément. Elle est parfois
indispensable pour pouvoir réaliser le traitement par laser. Elle risque
malheureusement d'aggraver l'oedème maculaire.
La cryo-application est une technique en cours d'évaluation, qui pourrait être une
alternative à la photocoagulation dans les rétinopathies proliférantes. Elle est utile
pour le traitement du glaucome néo-vasculaire.
L'énucléation est parfois nécessaire lorsque l'oeil est perdu mais qu'il existe une
hypertonie oculaire non contrôlable médicalement, qui peut parfois être à l'origine
de douleurs atroces.

4.Conclusion : surveillance et dépistage précoce des


lésions.
Quels que soient le type et la sévérité apparente du diabète, il est absolument
indispensable que tous les diabétiques aient un examen ophtalmologique complet
au moins une fois par an. Seuls les diabétiques de type I (DID) peuvent se passer
de cette surveillance pendant les 5 premières années d'évolution de la maladie.
Cet examen doit comprendre une mesure de l'acuité visuelle, du tonus oculaire
(son augmentation est fréquente dans le diabète, et assez facilement contrôlable
par les collyres ß-bloquants), un examen à la lampe à fente, et un examen du fond
d'oeil, les 2 yeux étant dilatés. Le verre à 3 miroirs est utilisé pour observer la
périphérie rétinienne.
Généralement, après 5 à 10 ans d'évolution du diabète une angiographie à la
fluorescéine systématique est proposée. Refaite au même rythme en l'absence de
lésions préoccupantes, sa fréquence peut-être annuelle en cas de soucis.
La rétinopathie diabétique est presque vaincue dans les pays médicalisés : les
formes sévère et les cécités sont en voie de disparition. Leurs survenues ne
peuvent guère être que la conséquence de fautes grossières de surveillance dont la
responsabilité incombe soit au patient, soit au médecin, soit aux deux.
La cataracte (non traitée dans ce chapitre) est une autre complication
ophtalmologique du diabète. Sa fréquence serait plus élevée que chez les non-
diabétiques et son traitement est délicat (risque d'oedème maculaire postopératoire
; nécessité de maintenir la rétine accessible au laser qui limite le choix des implants
cristallinien). Cette complication "bénigne" est quand même en passe de devenir un
des problèmes prédominant dans le suivi ophtalmologique des diabétiques.

Référence bibliographique :
Glycaemic control and development of retinopathy in type 2 Diabetes Mellitus :
A longitudinal Study P.-J Guillausseau, Diabetic Medecine, 1998; 15 : 151-155

Questions à choix multiples


1 La rétinopathie diabétique
A. Peut-être révélatrice d’un diabète de type 2

158
B. Dépend de l’ancienneté du diabète
C. Dépend de l’hyperglycémie
D. Atteint la majorité des diabétiques
2. L’examen ophtalmologique
A. N’est indispensable qu’en cas de symptôme
B. Peut-être limité à l’examen du fond d’oeil
C. S’accompagne d’une angiographie systématique
D. Etudie surtout la périphérie de la rétine.
3. En cas de rétinopathie ischémique sévère
A. L’acuité visuelle est le plus souvent normale
B. L’acuité visuelle est le plus souvent anormale
C. Il y a un risque de prolifération
D. Le traitement laser n’est pas indiqué.

159
NEUROPATHIES DIABÉTIQUES (n° 221 - 330 -
331)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation,
Hôpital Laennec

NEUROPATHIES DIABÉTIQUES (n° 221 - 330 - 331)


Les points importants
1. Physiopathologie
2. Polynévrites
2.1. Description clinique
2.2. Traitement
3. Mononévrites
4. Neuropathie autonome
4.1. Neuropathie cardio-vasculaire
4.2. Neuropathie digestive
4.3. Vésicoparésie
4.4. Troubles sexuels
4.5. Troubles de la sudation
4.6. Troubles de la motilité pupillaire
5. Conclusion
Référence Bibliographique
QUESTIONS A CHOIX MULTIPLES

Les points importants


Classée parmi les complications micro-angiopathiques, la physiopathologie de la
neuropathie diabétique reste largement inconnue.
La polynévrite dyesthésiante des membres inférieurs est la forme la plus
fréquente.
Les examens neurophysiologiques (EMG, VCN) ne servent qu’au diagnostic
différentiel et ne doivent pas être prescrits pour le dépistage ou le diagnostic
positif.
Dans la forme mononévritique toutes les atteintes ont été décrites (III, VI,
crural...)
La neuropathie autonome (cardio-vasculaire, digestive, urogénitale) peut être
extrêmment invalidante.
Il n’existe aucun traitement efficace d’aucune forme de neuropathie diabétique en
particulier des formes hyperalgiques heureusement rares. Seules les glycémies

160
« normales » peuvent prévenir la complication.

La neuropathie diabétique est une des complications les plus fréquentes du diabète,
mais elle est souvent négligée par les médecins. En effet, elle ne donne que
rarement des conséquences graves (maux perforants, douleurs), et aucun
traitement n'est réellement efficace.

1. Physiopathologie
L'ancienneté et l'importance de l'hyperglycémie sont les principaux facteurs de
risque d'apparition d'une neuropathie diabétique. Le mécanisme exact par lequel
l'hyperglycémie entraîne une neuropathie est encore discuté. Deux hypothèses sont
principalement proposées :
L'activation de la voie des polyols : l'excès de glucose intracellulaire est réduit
en sorbitol sous l'effet de l'aldose réductase. Le sorbitol est ensuite transformé
en fructose. Ces sucres exercent un pouvoir osmotique responsable de la
souffrance cellulaire. Ce phénomène pourrait être à l'origine de la
démyélinisation des fibres nerveuses atteintes par le diabète.
L'hypothèse vasculaire : la démyélinisation et la dégénérescence axonale ne
seraient que la conséquence de l'atteinte des capillaires (microangiopathie
diabétique), comme au niveau rénal et rétinien. Dans le cas des atteintes
neurologiques focales (mononévrites) de solides arguments, notamment
histologiques, plaident en faveur d'un mécanisme vasculaire. Cette hypothèse
attache plus formellement la neuropathie diabétique aux complications micro-
angiopahtiques.
L'approfondissement des mécanismes physiopathologiques est fondamental, car
il guidera la mise au point de thérapeutiques quasiment absentes actuellement.

2. Polynévrites
C'est la forme la plus fréquente de neuropathie diabétique. Sa fréquence atteint
presque 100 % dans les séries utilisant un critère "raffiné" (électrophysiologie,
histologie). mais seulement 10 % si on recherche une plainte fonctionnelle patente.

2.1. Description clinique


L'atteinte est symétrique, prédominante aux membres inférieurs, ascendante au
cours de l'évolution, essentiellement sensitive. On peut distinguer les formes
cliniques suivantes (en fait souvent intriquées) :
Atteinte des petites fibres :
Diminution de la sensibilité thermique et douloureuse. Douleurs, troubles
trophiques et végétatifs (vasomoteurs). Risque de brûlures indolores.
Atteinte des grosses fibres :
Diminution de la sensibilité proprioceptive (surtout perception du diapason) et
épicritique. Abolition des réflexes ostéo-tendineux. Dans les formes évoluées :
atteinte motrice, généralement modérée (amyotrophie). Douleurs, dysesthésies,
paresthésies, maux perforants plantaires, points de départ potentiels d'une
gangrène infectieuse. Au maximum ostéoarthropathie diabétique : fractures
spontanées des os du pied et du tarse, aboutissant à une déformation majeure du
pied (pied cuboïde de Charcot).
Neuropathie hyperalgique :

161
Elle survient parfois précocement dans l'évolution du diabète, et évolue
spontanément vers la disparition des douleurs et l'anesthésie en quelques mois… ou
années. Cette forme est rare mais désespérante.
Le diagnostic est essentiellement clinique. L'EMG n'a d'intérêt qu'en cas de doute
(en particulier si une compression est suspectée) : il n'y pas de parallélisme entre
l'atteinte clinique et électrique. L'anomalie principale à l'EMG est le ralentissement
de la vitesse de conduction nerveuse (signe de démyélinisation) alors que l'atteinte
est plus souvent axonale au début. Aucun examen complémentaire n'est nécessaire
dans les formes typiques, sauf pour un éventuel diagnostic différentiel (polynévrites
toxiques, carentielles, para-néoplasiques…).

2.2. Traitement
Peu de traitement sont efficaces. Ils ne sont actuellement entrepris qu'en cas de
symptômes fonctionnels gênants (dysesthésie et surtout hyperesthésie), car on ne
possède rien d'efficace en cas d'hypoesthésie. On propose la normalisation
glycémique (qui limiterait au moins l'extension des lésions), les antalgiques
classiques, les tricycliques, le Rivotril, le Tegretol. Les traitements les plus
prometteurs, physiopathologiques, n'ont pour l'instant pas prouvé leur efficacité
(inhibiteur de l'aldose réductase).

3. Mononévrites
C'est l'atteinte brutale, d'un tronc nerveux (exceptionnellement plusieurs en même
temps). Il est indispensable d'éliminer une autre cause (vasculaire, tumorale),
avant d'attribuer l'atteinte au diabète.
Tous les troncs nerveux peuvent être touchés, mais les manifestations les plus
fréquentes sont les cruralgies et les paralysies oculomotrices (III extrinsèque, IV).
Aucun traitement n'est nécessaire, l'évolution se fait spontanément vers la
régression, le plus souvent complète, en quelques semaines, quand l'artériole
occluse se réperméabilise.

4. Neuropathie autonome
L'atteinte du système nerveux autonome est plus rare et survient en général chez
des patients ayant un long passé de diabète multicompliqué, et souffrant le plus
souvent de polynévrite évoluée.

4.1. Neuropathie cardio-vasculaire


Hypotension orthostatique
Lorsqu'elle est secondaire à une neuropathie autonome, l'hypotension orthostatique
ne s'accompagne pas d'accélération de la fréquence cardiaque en orthostatisme.
Le traitement ne se justifie que si elle est invalidante. Il faut avant tout lutter
contre les autres causes d'hypotension orthostatique : hypovolémie, médicaments.
Le traitement le plus efficace est le port d'une contention veineuse (même en
l'absence d'insuffisance veineuse).
Tachycardie permanente de repos et disparition de l'arythmie respiratoire,
abolition du rythme nycthéméral de la tension artérielle.
Ils sont généralement asymptomatiques, mais seraient liés à un risque accru de
mort subite, notamment lors d'anesthésie.

162
4.2. Neuropathie digestive
Gastroparésie
C'est un retard à la vidange gastrique, qui se fait de façon irrégulière et
imprévisible. Elle peut être totalement asymptomatique. Elle contribue parfois à
l'instabilité de l'équilibre glycémique. Elle peut se manifester par des sensations
dyspepsiques peu spécifiques, mais aussi par des éructations fétides (fermentation
des aliments), un clapotement gastrique à jeun, le vomissement d'aliments anciens
non digérés. Des poussées aiguës avec intolérance digestive complète sont
possibles, favorisées par les poussées hyperglycémiques.
Le diagnostic peut être fait à la fibroscopie gastrique qui montre une stase
gastrique, voire un bézoard. L'examen de référence est le transit gastrique
isotopique qui est beaucoup plus sensible.
Le traitement repose sur le fractionnement de l'alimentation, et sur les stimulants
de la motricité gastrique : Motilium, Prepulsid, Erythromycine, neuroleptiques type
Haloperidol.
Diarrhée motrice
Rare, difficile à traiter et très invalidante pour le patient (selles nocturnes). Essayer
les ralentisseurs du transit, le Catapressan. Toujours suspecter une pullulation
microbienne (les antibiotiques intestinaux améliorent les symptômes dans un grand
nombre de cas).

4.3. Vésicoparésie
Rare, et souvent peu symptomatique. Se manifeste par une dysurie, parfois
intermittente, des épisodes de rétention urinaire, la sensation de mal vider sa
vessie, la disparition de la sensibilité douloureuse signalant que la vessie est
remplie.
Elle est source de résidu post-mictionnel, stase, infections, voire reflux.
Le diagnostic nécessite une débimétrie, la recherche d'un résidu post-mictionnel par
échographie, une cystomanométrie et éventuellement une urétrocystographie.
Le traitement repose sur la résection endoscopique du col vésical, la rééducation
vésicale, parfois l'auto-sondage, les médicaments agissant pharmacologiquement
sur le système nerveux autonome, sont ici comme dans les autres atteintes
neurovégétatives du diabète peu efficaces car il existe une véritable dénervation
locale.

4.4. Troubles sexuels


Les troubles de l'érection peuvent être liés à la neuropathie, mais aussi à une
atteinte artérielle, une anomalie hormonale, des médicaments, des troubles
psychiques Lorsque la neuropathie est en cause, le traitement repose sur les
injections intracaverneuses.
L'éjaculation rétrograde est une manifestation de la neuropathie autonome.

4.5. Troubles de la sudation


Accès de sueurs profuses (en dehors des hypoglycémies). Aucun traitement, mis à
part l'équilibration du diabète n'est proposé pour ce symptome pénible.

4.6. Troubles de la motilité pupillaire


Signe d'Argyll-Robertson.

163
5. Conclusion
La neuropathie diabétique reste une atteinte dont s'occupe plus le neurologue que
le diabétologue. Au deuxième plan des revendications des patients ou des
urgences, son caractère peu symptomatique et non vital ne doit pas cacher que les
formes hyperalgiques (insupportables) et autonomes extrêmes (confinant le malade
au lit) sont rares mais épouvantables et sans aucune thérapeutique réelle
actuellement. Les malades qui sont atteints errent de spécialiste en spécialiste, si
bien qu'on finit par ne plus les voir ce qui ne signifie nullement qu'ils sont guéris.

Référence Bibliographique
Occurrence, predictors, and clinical significance of autonomic neuropathy in NIDDM
Ten-year follow-up frome the diagnosis. Jari P., Diabetes, Vol 45, March 1996, 308-
315

QUESTIONS A CHOIX MULTIPLES


1. La neuropathie diabétique périphérique
A. Se diagnostique sur les anomalies de l’EMG et de la VCN
B. Est le plus souvent hyperalgique
C. A tendance à régresser spontanément
D. Est une des plus fréquentes neuropathies
2. La neuropathie autonome diabétique
A. Est une cause d’hypotension orthostatique
B. Est une cause de diarrhée motrice
C. Est une cause de gastroparésie
D. Est la principale cause d’impuissance chez le diabétique

164
NEPHROPATHIE DIABETIQUE(n° 330 - 331)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation, Hôpital Laennec

NEPHROPATHIE DIABETIQUE(n° 330 - 331)


Les points importants
1. Histoire naturelle
2. Épidémiologie
3. Causes de la néphropathie diabétique
4. Diagnostic différentiel
5. Evolutivité
6. Pourquoi ?
7. Questions subsidiaires
8. Conclusion : Questions importantes
Référence bibliographique
QUESTIONS A CHOIX MULTIPLES

Les points importants


La microalbuminurie (30-300 mg/24 h), est le simple signe d’une atteinte
glomérulaire débutante.
Seulement 30 % des diabétiques de type 1 auront une micro ou
macroalbuminurie (la complication épargne les 2/3).
Moins de 500 diabétique de type 1 (sur près de 200 000) sont en dialyse.
L’atteinte rénale est probablement due à l’interaction de facteurs métaboliques
(hyperglycémie) hémodynamiques (HTA) et peut-être génétiques. Seuls les 2
premiers ont actuellement des conséquences thérapeutiques.
Quelle que soit la gravité de l’atteinte, il est toujours possible de ralentir une
insuffisance rénale même très avancée ; «normo»tension et «normo»glycémie.
Les IEC sont de très bons anti-hypertenseurs dont les vertus spécifiques dans la
néphropathie diabétique ne sont pas formellement démontrées.
La médiocre prise en charge du diabète de type 2 risque d’aboutir dans ce groupe
dont l’espérance de vie augmente à une majoration des néphropathies
préoccupante.

1. Histoire naturelle
Le dosage radioimmunologique de l'albumine a permis de détecter des valeurs de
quelques milligrammes dans les urines des 24h. La valeur maximale de la micro-
albuminurie, 300 mg/24h, a été définie tout à fait arbitrairement par la limite de
détection d'une bandelette urinaire disponible commercialement, l'Albustix qui

165
devient positive au delà de 300 mg. La limite inférieure, 30 mg, a été définie
statistiquement en fonction de la fréquence des chiffres observés chez des gens
normaux. On dit qu'il y a une micro-albuminurie pour des chiffres compris entre 30
et 300 mg/24h. La popularité de ce dosage vient du fait qu'on a voulu lui attribuer
une valeur magique de prédiction de la néphropathie diabétique. L'immense
majorité des patients ayant un dosage dans cette "fourchette" deviendraient
fatalement insuffisants rénaux. Cette vue pessimiste a largement été contredite par
les études ultérieures. La micro-albuminurie ne fait rien d'autre que de traduire un
début d'atteinte rénale (au même titre que les micro-anévrismes traduisent un
début d'atteinte rétinienne). De très nombreux facteurs peuvent influencer
favorablement ou défavorablement l'évolution "prédite".
Au delà de 300 mg il y a une albuminurie détectable par des dosages plus
classiques, les taux pouvant atteindre plusieurs grammes/24h. Le syndrome
néphrotique vrai, avec hypo-albuminémie, est rare mais possible dans la
néphropathie diabétique.
Parallèlement à la fuite grandissante de l'albumine, il existe des anomalies de la
filtration glomérulaire. Les premières anomalies décrites sont fonctionnelles, donc
réversibles, dominées par une hyperfiltration glomérulaire (clairance de créatinine à
150 ml/min). Cette hyperfiltration s'accompagne d'une néphromégalie. En
histologie, les glomérules sont de grande taille. Le mécanisme précis de cette
hyperfiltration n'est pas connu ; il est néanmoins spécifique de l'hyperglycémie, qui
est donc directement ou indirectement responsable. Dans l'évolution défavorable de
l'atteinte rénale, il y a ensuite un déclin de la filtration glomérulaire pouvant
conduire à l'insuffisance rénale dite terminale nécessitant des procédés de
substitution (dialyse ou greffe).
Décrire l'histoire naturelle de la néphropathie diabétique de cette façon : micro-
albuminurie faisant le lit d'une macro-albuminurie, puis d'un syndrome
néphrotique, hyperfiltration faisant place à un déclin de la filtration glomérulaire et
conduisant à l'insuffisance rénale terminale, peut laisser penser qu'il s'agit d'une
évolution stéréotypée et fatale. En fait, l'immense majorité des diabétiques n'aura
aucune de ces anomalies, comme l'illustre de façon convaincante quelques données
épidémiologiques.

2. Épidémiologie
Environ 20 à 30 % seulement des diabétiques de type I ont une micro ou une
macro-albuminurie. Les 2/3 ne présenteront donc jamais aucune atteinte rénale. Il
n'y a jamais d'albuminurie présente à un taux pathologique chez les diabétiques
avant environ une dizaine d'années d'évolution. Après 2 à 3 décennies, le risque
d'avoir une atteinte rénale s'effondre. Si les données épidémiologiques sont justes,
il s'agit de la seule complication du diabète dont la fréquence n'augmente pas avec
la durée de celui-ci. La situation est donc très favorable au niveau individuel. Elle
l'est également au niveau de toute la population. Décade après décade (1940 à
1990) dans le type I, il y a de moins en moins de patients atteints. Ces données
optimistes et bien réelles sont confirmées par les données de la dialyse. Pour les
diabétiques de type I, environ 500 patients sur les 150.000 diabétiques
insulinodépendants, sont dialysés en France, soit 3 ‰. La politique de santé
française fait que la totalité des patients atteints sont pris en charge et on ne peut
pas penser que ce chiffre soit sous-estimé et qu'il meurt des patients faute de prise
en charge. Ce pourcentage est même en diminution.
En ce qui concerne les 1 500 000 diabétiques de type II, 500 aussi sont en dialyse.
Il y a quelques années, il n'y en avait aucun. La fréquence est en augmentation.
Rappelons qu'il existe environ 20 000 dialysés en France, dont 5 % de diabétiques
tous types confondus.

166
3. Causes de la néphropathie diabétique
La théorie métabolique rend l'hyperglycémie responsable. Cette hyperglycémie peut
être responsable directement en glyquant certains résidus protéiques. Elle peut être
responsable indirectement en transformant enzymatiquement le glucose en
substances potentiellement toxiques (cycle du sorbitol où le glucose se transforme
sous l'action itérative de différentes aldoses réductases). Une théorie biochimique,
dépendante elle aussi de l'hyperglycémie, rend responsable des anomalies
morphologiques de la membrane basale, non seulement les ramifications glucosées
locales, mais aussi la disparition de certains radicaux soufrés.
Dans la théorie hémodynamique, c'est l'hyperfiltration glomérulaire qui est
responsable de l'auto-entretien des lésions. Initialement, cette hyperfiltration a été
décrite dans un modèle expérimental animal, le rat Wistar modérément
hyperglycémique. Chez cet animal, les mesures directes sur le néphron permettent
de voir dans l'intimité du glomérule ce qui se passe. Tout ceci n'est possible que
très indirectement chez l'homme. Dans d'autres situations d'hyperfiltration comme
la grossesse ou le rein unique, on ne voit jamais de lésion de type diabétique :
l'hyperglycémie associée est donc nécessaire.
La dernière théorie est génétique. La néphropathie diabétique serait (en partie)
héréditaire (il faut expliquer pourquoi 20 à 30 % seulement des diabétiques de
type I ont une atteinte rénale). Certains gènes seraient favorisants, d'autres
protecteurs de l'atteinte. On trouverait plus d'hypertendus dans les ascendants des
diabétiques développant une néphropathie.
Privilégier une des théories, voire en retenir une de façon exclusive a des
conséquences nombreuses. Les stratégies thérapeutiques sont très différentes
selon que l'on pense que le métabolisme ou l'hémodynamique est responsable.
Accorder la prépondérance aux gênes peut rendre très philosophe sur la
"responsabilité personnelle" du patient dans les atteintes rénales. Est-ce sa "faute"
ou est-ce son "destin" : dans ce dernier cas, bien se traiter ne servirait pas ou peu.
En tout cas, les données récentes d'une vaste enquête prospective (DCCT, Diabetes
Control Complication Trial) visant à comparer les complications en cas d'excellent
contrôle glycémique ou de moins bon contrôle sont claires. Dans toutes les
circonstances, le très bon contrôle prévient ou ralentit les atteintes micro-
angiopathiques rénales (et aussi oculaires et neuropathiques) de plusieurs dizaines
de %. Il n'y a donc aucun doute : il est nécessaire d'avoir un très bon contrôle
glycémique pour prévenir et freiner l'évolution de l'atteinte rénale.

4. Diagnostic différentiel
Diverses études prospectives ont montré que 10 % des atteintes rénales chez les
diabétiques de type I et près de 50 % chez les diabétiques de type II étaient liées à
une atteinte indépendante du diabète (parfois des lésions diabétiques sont en plus
associées). Toutes les causes habituelles de glomérulopathie peuvent être
rencontrées et surtout les néphropathies vasculaires à type de néphro-
angiosclérose. La nécessité d'un diagnostic précis est théoriquement indispensable,
car le pronostic des atteintes rénales est différent selon la cause et il peut exister
des thérapeutiques spécifiques. Alors qu'il ne viendrait à personne l'idée de suivre
un diabétique sans étude régulière de son fond d'oeil, la plus part des spécialistes
renoncent, même en cas de doute, à faire une ponction biopsie rénale, jugée trop
invasive. Ce qui est vrai. Il n'empêche que l'on se prive d'un élément important
d'évaluation de la maladie. La mise au point de la ponction biopsie rénale par voie
transveineuse, moins dangereuse mais moins répandue que la voie transcutanée
n'a pas permis de résoudre définitivement le problème. Rappelons que les lésions
histologiques très évocatrices de diabète sont un épaississement de la membrane
basale conduisant à une glomérulo-sclérose généralisée. Quand cette glomérulo-

167
sclérose est nodulaire, il s'agit du syndrome de Kimmelstiel-Wilson du nom des
auteurs qui ont décrit cette anomalie.

5. Evolutivité
En 1980, en cas d'insuffisance rénale avancée (clairance < 30 ml/min) la perte de
filtration glomérulaire était de l'ordre de 1 ml/min/mois soit 12 ml en 1 an,
conduisant donc à l'insuffisance rénale terminale en moins de 2 ans. En 1995, la
perte est dix fois moins importante, de 0,1 ml/min/mois sans point de non retour :
il n'est jamais trop tard pour bien faire pour tenter de ralentir une insuffisance
rénale, même très avancée.

6. Pourquoi ?
Ceci a été obtenu grâce à la mise en route de programmes thérapeutiques évalués,
visant à obtenir un contrôle glycémique et tensionnel parfait. Les moyens d'obtenir
un bon contrôle glycémique sont exposés dans le chapitre concernant le traitement
du diabète. Le très bon contrôle de l'hyperglycémie, dans le cadre de l'étude DCCT,
a permis la réduction du développement ou de l'apparition d'une micro-albuminurie
dans 35 % des cas et d'une albuminurie dans 50 % des cas.
Il y a plusieurs décennies, une étude anatomo-pathologique a objectivé le rôle
protecteur d'une tension basse au niveau du rein. Chez une patiente décédée, il
existait une sténose unilatérale de l'artère rénale. Cette patiente était diabétique et
hypertendue. Le rein "protégé" de l'hypertension par la sténose était indemne de
néphropathie diabétique. Ce travail, vérifié expérimentalement chez l'animal, puis
longtemps après sur une série plus longue de patients, a été à la base de la
stratégie cherchant à obtenir les tensions les plus basses possibles chez le
diabétique.
Pour des soucis de classement épidémiologique, l'OMS considère comme
hypertendu un patient ayant une tension supérieure ou égale à 160/95 Hg. La
totalité des études entreprises chez les diabétiques, et à ce jour sans aucune
exception, a montré qu'une tension diastolique supérieure à 90 Hg laisse évoluer
très rapidement l'atteinte rénale. C'est donc un chiffre inférieur qu'il faut obtenir.
Dès qu'un tel chiffre est atteint, il faut donc traiter et même avant, pour certains
dès que la tension diastolique augmente d'au moins 5 mm de Hg en 1 an.
Ce traitement doit être "énergique" et 50 % des patients nécessitent une tri-
thérapie à "doses plafonds".
Le maniement des médicaments hypotenseurs chez le sujet non diabétique, et plus
encore chez le diabétique, est délicat. Les patients se préoccupent surtout des
effets secondaires fonctionnels (hypotension orthostatique, oedème des membres
inférieurs) et les médecins des effets secondaires organiques ou métaboliques
(hyperkaliémie sous épargneur potassique ou inhibiteur de l'enzyme de
conversion). Il faut donc choisir le "moins mauvais" médicament et les associations
logiques.

7. Questions subsidiaires
Une intervention "non glycémique" peut-elle prévenir la néphropathie diabétique ?
Dans l'hyperfiltration, la pression oncotique des protéines est un des facteurs
pouvant augmenter l'hyperpression dans le glomérule. Un régime pauvre en
protides pourrait réduire cette pression. Mais il s'agit d'une prévention, il faudrait
faire ce régime dès le début du diabète, alors qu'il faut déjà faire face à une somme

168
impressionnante de contraintes diététiques et thérapeutiques. Il est illusoire de
penser qu'un patient puisse suivre à vie un régime hypoprotidique. Si un rôle
protecteur existe, il est probablement très faible et très inférieur à l'effet néfaste de
quelques mmoles de trop de glycémie ou quelques millimètres de trop de tension
artérielle. Quand l'atteinte rénale est patente, l'immense majorité des patients a
une appétence faible pour les protides qui sont automatiquement diminués. Il est
raisonnable de suggérer un régime normo-protidique (1g/kg/jour) et sûrement pas
un régime hyperprotidique à tous les stades de la maladie diabétique.
Dans le même cadre, les inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC) revendiquent
une action spécifique sur la pression intra glomérulaire en levant la vaso-
constriction de l'artériole efférente du glomérule. Les IEC pourraient prévenir la
néphropathie diabétique indépendamment de leur rôle hypotenseur. Il y a environ
autant de protocoles cliniques pour démontrer cela que l'inverse. Si l'on croit à
cette théorie, cela revient à prescrire des IEC dès le début du diabète chez un sujet
normo-tendu. Actuellement, la plupart des diabétologues et des diabétiques s'y
refusent. Les IEC sont certainement un très bon médicament anti-hypertenseur,
avec une très bonne tolérance fonctionnelle. Ce ne sont nullement les hypotenseurs
électifs chez le diabétique, mais ils peuvent rivaliser avec les grandes classes
validées (diurétiques, ß-bloqueurs, inhibiteurs calciques). C'est un médicament à
risque en cas d'atteinte rénale, car ils se comportent comme un épargneur
potassique avec un risque d'hyperkaliémie aiguë.

8. Conclusion : Questions importantes


Malgré quelques contradictions, il est certain que l'atteinte rénale épargne un
nombre important de patients diabétiques. Dans le type I, le nombre de patients
atteints diminue. Néanmoins, ceux qui sont atteints ont une espérance de vie
réduite et une qualité de vie très altérée. Repérer longtemps avant les patients
diabétiques qui développeront une néphropathie préoccupante est un objectif
important pour les scientifiques (marqueur biologique, génétique, histologique ...?).
Au plan pragmatique, il est important de se préoccuper aussi des atteintes rénales
des diabétiques de type II. Si comme dans le type I, 3 ‰ des patients risquent la
dialyse, il y a un potentiel de 5 000 patients, soit 25 % de tous les dialysés, qui
risquent d'envahir les centres de dialyse dans les années à venir. De plus, il s'agit
de patients âgés, de plus de 70 ans, quand ce n'est pas 80 ans. Le problème est de
détecter précocement, ou mieux encore de prévenir l'apparition des diabètes de
type II, et à défaut de les prendre en charge très tôt. Ce sont les progrès de la
médecine (maladies cardio-vasculaires en nette regression chez ces patients qui
auparavant n'avaient pas le temps de voir se développer une atteinte rénale) qui
sont les responsables de cette aggravation. Il n'y a ici aucune découverte à faire,
mais uniquement un effort d'organisation et de prise en charge.

Référence bibliographique
Risk of End-stage renal disease in Diabetes Mellitus.
Fréderick L., JAMA, 1997 Vol 278, n° 23, 17 Décembre, p 2069-2074

QUESTIONS A CHOIX MULTIPLES


(Cocher les propositions vraies)
1. La microalbuminurie
A. Est présente chez la majorité des diabétiques

169
B. Est le marqueur d’une évolution inéluctable vers l’insuffisance rénale
terminale
C. Est le meilleur paramètre de surveillance de la filtration glomérulaire.
D. Est le reflet d’une atteinte vasculaire globale.
2. Pour freiner l’évolution d’une insuffisance rénale sévère chez un diabétique
A. Améliorer la glycémie n’est plus utile à ce stade
B. Il faut surtout normaliser la tension systolique
C. L’objectif tensionnel diastolique est vers 90 mm de Hg.

170
DIABETE INSULINO-DEPENDANT DE L'ENFANT
(n° 330)
Jean-Jacques ROBERT
Service d'Endocrinologie-Diabétologie, Hôpital Necker

DIABETE INSULINO-DEPENDANT DE L'ENFANT (n° 330)


Abréviations
Les points importants
1. Introduction
2. Physiopathologie - Etiopathogénie
2.1. Génétique
2.2. Les facteurs d'environnement.
2.3. Auto-immunité
2.4. Physiopathologie de l’hyperglycémie
3. Diagnostic
3.1. Diagnostic positif
3.2. Formes cliniques
3.3. Diagnostic différentiel
4. Evolution
4.1. Début de traitement
4.2. Evolution immédiate
4.3. Complications à long terme
4.4. Devenir de l'enfant diabétique
5. Principes du traitement
5.1. Insulinothérapie
5.2. Alimentation
5.3. Exercice
5.4. Prise en charge de l'enfant diabétique
6. Dépistage et prévention
Références Bibliographiques
QUESTIONS A CHOIX MULTIPLES

Abréviations
DID : Diabète insulino-dépendant
IDDM: Insulin-dependant diabetes mellitus

171
ICA: Islet cell antibodies (Anticorps anti-ilôts de Langerhans)

HGPO: Hyperglycémie provoquée orale

Les points importants


Le diabète sucré chez l'enfant est presque toujours insulino-dépendant ou de
type I.
Le diabète de type I est dû à une destruction auto-immune des cellules ß des
ilôts de Langerhans, déclenchée par des facteurs d'environnement chez des
sujets généti-quement prédisposés.
Le dépistage des sujets à risque, particulièrement chez les frères et soeurs, a
pour but d'ouvrir la voie à la prévention du diabète.
Le diagnostic de diabète sucré est le plus souvent facile chez l'enfant, devant un
syndrome plyuro-polydipsique, avec ou sans cétonurie.
Le traitement doit être institué rapidement et repose sur l'insulinothérapie,
l'autosurveillance glycémique et l'adaptation des doses d'insuline par l'enfant
et/ou ses parents.
L'alimentation doit être régulière en horaires et en quantité, et équilibrée.
L'hypoglycémie est une complication aiguë particulièrement redoutée chez le
petit enfant.
Un mauvais équilibre glycémique peut ralentir la croissance et expose aux
microangiopathies à l'âge adulte.
L'éducation et la prise en charge du comportement de l'enfant diabétique sont
essentielles au succès du traitement

1. Introduction
Les particularités cliniques du diabète de l'enfant ont depuis longtemps fait
apparaitre, plus clairement que chez l'adulte, que le diabète sucré est un syndrome
aux étiologies et mécanismes pathogéniques variés. La classification internationale
des diabètes, qui date de 1979, fait perdre au diabète infantile une partie de sa
spécificité, le terme "diabète insulino-dépendant" (DID) remplaçant celui de
"diabète juvénile", l'âge de début n'ayant pas de signification physiopathologique
précise. Cependant, le DID pose, chez l'enfant, des problèmes particuliers de
diagnostic, de traitement et de surveillance.
Le diabète de l’enfant est une maladie fréquente, posant un problème de santé
publique. En France, selon une enquête récente (1988-90), l'incidence annuelle est
d'environ 7 pour 100.000 sujets de moins de 20 ans. La fréquence varie d'un pays
à l'autre, avec un accroissement du Sud au Nord de l'Europe. Il existe par ailleurs
une augmentation du nombre de cas, en particulier ceux qui sont diagnostiqués au
cours des premières années de vie, au cours des dernières décennies.

2. Physiopathologie - Etiopathogénie
Pour que le DID se développe, il faut une prédisposition génétique, liée
principalement à des antigènes HLA, et un facteur déclenchant, d’environnement,
qui engendre des processus auto-immuns détruisant sélectivement les cellules ß

172
des îlots de Langerhans.

2.1. Génétique
Les études de jumeaux identiques montrent que les facteurs génétiques ne
représentent pas plus de 50 % de déterminisme du DID. Ce n'est pas la maladie
qui est transmise, mais une susceptibilité à la maladie.
Ce terrain est en grande partie déterminé par des gênes du complexe HLA
(chromosome 6). La plus grande susceptibilité est liée aux antigènes HLA DR3 et
DR4, qui sont présents chez plus de 90 % des DID contre 50 % des sujets témoins.
Inversement, les antigènes DR2 et DR5 sont protecteurs. Le risque est
particulièrement élevé pour les hétérozygotes DR3/DR4, ce qui suggère que la
susceptibilité dépend d'une complémentarité entre les deux gênes. L'antigène DR
n'est pas directement impliqué, mais un locus voisin, DQ, l'association avec DR
résultant d'un déséquilibre de liaison entre les loci DQ et DR. Par exemple,
l'haplotype DR4 peut être associé à deux haplotypes, DQ7 et DQ8, mais 90% des
DR4 DID sont DQ8. Les gènes de susceptibilité ont, dans la plupart des cas, deux
séquences nucléotidiques particulières, DQ béta 57 aspartate négatif et DQ alpha
52 arginine positif, leur combinaison conférant la susceptibilité au DID. Le rôle des
molécules HLA semble lié à leur fonction de site de liaison des antigènes qu'elles
présentent ensuite aux lymphocytes T pour déclencher la réponse immune. La
présence de certains acides aminés peut déterminer la spécificité de la molécule DQ
à présenter un auto-antigène pancréatique.
La prédisposition génétique au DID dépend aussi d'autres gènes, encore mal
connus chez l'homme. Des associations ont été décrites avec le gène de l'insuline
(chromosome 11p) et avec des marqueurs polymorphes sur les chromosomes 15q
(IDDM3), 11q (IDDM4), 6q (IDDM5) et 2q (IDDM6). L'effet de ces gènes est
modéré et on ignore comment ils interagissent avec les gènes HLA pour déterminer
la susceptibilité au DID.

2.2. Les facteurs d'environnement.


L'exposition à des facteurs d'environnement déclenche la maladie auto-immune
chez les sujets génétiquement prédisposés. Ces facteurs ne sont pas connus ; il
pourrait s'agir de virus, de toxines, de facteurs nutritionnels ou de plusieurs
facteurs agissant en synergie.
Les virus.
De nombreux arguments plaident en faveur d'un rôle des virus : l'existence d'un
tropisme de nombreux virus pour le pancréas ; l'isolement de virus Coxsackies à
pouvoir diabétogène à partir du pancréas de DID décédés ; le rôle de certains virus
dans des modèles animaux de DID ; la plus grande fréquence de DID chez les
sujets atteints de rubéole congénitale ; l'inclusion du gènome du certains virus dans
l'ADN des lymphocytes de nouveaux DID. Le processus déclenchant précède de
plusieurs années les signes cliniques du DID. Les infections virales qui les précèdent
fréquemment ne font que révéler un processus latent (au même titre que les stress
de toutes sortes). Un virus pourrait induire l'auto-immunité en déclenchant les
réponses immunes contre des protéines exprimées par les cellules ß et présentant
des séquences homologues avec les antigènes viraux.
Les facteurs nutritionnels.
Le rôle des protéines du lait de vache est évoqué depuis plusieurs années : leur
suppression de l'alimentation dans les modèles animaux de DID auto-immun
prévient l'apparition du diabète ; la répartition géographique du diabète serait
corrélée à la consommation de lait de vache ; l'alimentation maternelle prolongée
diminuerait le risque de DID ; les patients DID auraient des taux élevés d'anticorps

173
dirigés contre la sérumalbumine ou la ß-lactoglobuline bovines. L'immunisation
contre ces protéines pourrait déclencher des réactions auto-immunes avec des
peptides de surface des cellules ß ayant des homologies de structure.

2.3. Auto-immunité
La nature auto-immune de la destruction des cellules ß est établie sur une série
d'arguments: l'infiltration lymphocytaire des ilôts de Langerhans (insulite) ; la
possibilité de transmettre le DID par les lymphocytes d'animaux malades ;
l'association fréquente du DID à des maladies auto-immunes ; l'existence
d'anticorps anti-cellules d'ilôts au moment du diagnostic de DID et leur forte valeur
prédictive du DID chez les apparentés de patients DID ; l'efficacité des
thérapeutiques immunosuppressives dans les diabètes expérimentaux et humains.
On ne connait pas le ou les antigène(s) cible(s) de l'agression immunitaire. Les
anticorps anti-cellules d'îlots (ICA), très souvent détectés au moment du diagnostic,
sont secondaires à l'agression immunitaire des îlots. D’autres anticorps, anti-
insuline, anti-GAD (acide glutamique décarboxylase), anti-IA2, sont décelés avant
tout traitement par l'insuline, surtout les jeunes enfants. Leur rôle dans la
destruction de la cellule ß reste à préciser. Le rôle des macrophages et des
lymphocytes T a été démontré, mais les mécanismes de rupture de tolérance vis-à-
vis d'un autoantigène restent en grande partie méconnus.

2.4. Physiopathologie de l’hyperglycémie


La carence en insuline est directement responsable de l'hyperglycémie et de la
cétose. L'hyperglycémie est due principalement à l'augmentation de la libération de
glucose par le foie. Elle est aggravée par la non utilisation du glucose alimentaire
par les tissus périphériques. La fuite urinaire de glucose, conséquence de
l'hyperglycémie, provoque une diurèse osmotique responsable de la déshydratation.
La cétose est dûe à une libération accrue d'acides gras par le tissu adipeux et à leur
orientation préférentielle vers la cétogénèse au niveau du foie. A ce niveau, la
carence en insuline intervient indirectement par l'augmentation du glucagon.
L'augmentation considérable des corps cétoniques circulants est la cause de
l'acidocétose. Déshydratation et acidose sont à l'origine d'importants désordres
hydro-électrolytiques.

3. Diagnostic

3.1. Diagnostic positif


Le diagnostic du diabète est le plus souvent aisé, devant :
le syndrome polyuro-polydipsique, avec levers nocturnes et parfois énurésie,
l'asthénie et l'amaigrissement qui aboutissent en quelques semaines à l'acido-
cétose révélatrice dans 10 à 20 % des cas ;
l'existence d'une hyperglycémie et d'une glycosurie avec ou sans cétonurie.
Le DID peut être découvert avant tout symptome, par un examen systématique ou
chez des apparentés de patients DID chez qui a été effectué un dépistage
systématique. En cas de doute, le diagnostic repose sur l'hyperglycémie provoquée
orale (HGPO).

3.2. Formes cliniques


Le nourrisson :
Le DID est rare chez le nourrisson, mais le problème diagnostique peut être urgent,

174
le tableau clinique étant essentiellement une deshydratation aigüe, particulière par
l'absence de symptomes gastro-intestinaux et la conservation habituelle de la
diurèse.
Le nouveau-né :
L'hyperglycémie des premiers jours de vie a la particularité d'être dans certains cas
transitoire. Aucun critère -à part un contexte familial de DID- ne permet , au
départ, de prévoir si l'insulinothérapie va être arrêtée dans les semaines ou
quelques mois qui suivent, ou si elle est définitive.

3.3. Diagnostic différentiel


Dans la forme diagnostique habituelle, il n'y a pas d'erreur possible.
Devant une déshydratation aiguë avec hyperglycémie, il faut d'autant plus se
méfier que la cétonurie peut être absente dans le diabète du très jeune. Si la
glycémie ne se normalise pas en quelques heures, il vaut mieux administrer
provisoirement un peu d'insuline que de laisser le diabète entretenir ou aggraver la
déshydratation.
Dans les formes subcliniques :
il n'est pas difficile de faire la distinction avec une autre méliturie, avec un
diabète rénal
il faut se méfier des hyperglycémies transitoires au cours de syndromes aigüs,
médicaux ou chirurgicaux, qui peuvent être le signe précurseur d'un diabète ;
la distinction peut être difficile entre un pré diabète auto-immun et une
hyperglycémie non insulino-dépendante de type MODY, qui se distingue par :
le caractère familial autosomique dominant ;
l'absence habituelle de critères génétiques et immunologiques de DID ;
la très faible évolutivité de l'altération métabolique.

4. Evolution

4.1. Début de traitement


Chez l'enfant, l'indication de l'insulinothérapie est rarement discutable. Dans les
DID frustes, il faut souligner le danger des régimes restrictifs (sauf excès pondéral)
ou des hypoglycémiants oraux qui, sous prétexte d'épargner au patient quelques
semaines d'insulinothérapie, risquent de retentir gravement sur la croissance. On a
au contraire interêt à traiter par l'insuline le plus tôt possible.
Après la mise sous insuline survient très fréquemment une rémission ou lune de
miel, qui correspond à une légère reprise de la fonction insulino-sécrétrice. Chez
l'enfant, la rémission est souvent moins totale et moins durable que chez l'adulte et
peu influencée par la pratique initiale d'une insulinothérapie intensive. Il vaut mieux
éviter un arrêt des injections, toujours bref et psychologiquement défavorable.
Des essais d’immunothérapie au début du diabète ont été et sont encore faits pour
augmenter la fréquence et la durée des rémissions.

4.2. Evolution immédiate


Le traitement du DID peut être émaillé d'incidents aigüs, principalement liés à des
erreurs thérapeutiques.
Les hypoglycémies

175
font partie du quotidien du patient DID. Elles sont volontiers sans manifestations
cliniques, dépistées par la surveillance quotidienne. Elle sont le plus souvent légères
(paleurs, sueurs, tremblements, faim, vision trouble ou double, troubles du
caractère ou du comportement …) mais peuvent aller jusqu'au coma. Les
convulsions nocturnes des jeunes enfants sont particulièrement angoissantes pour
les parents et doivent absolument être évitées.
L'acido-cétose
Souvent présente au moment du diagnostic, est un évènement rare en cours
d'évolution en dehors de grosses erreurs, souvent volontaires, de traitement.

4.3. Complications à long terme


La croissance
Le nanisme diabétique (syndrome de Mauriac) est devenu exceptionnel. Le
ralentissement de la croissance n'est pas fréquent puisque l'étude des populations
DID ne montre pas de différence avec les populations de référence. Cependant, il
existe encore chez des enfants dont le traitement est très mal adapté. La courbe de
croissance reste un élément primordial de la surveillance.
La microangiopathie
Menace particulièrement le DID à début infantile à cause de la plus grande
instabilité glycémique et de la très longue durée potentielle d'évolution. Il faut dès
le plus jeune âge obtenir le meilleur équilibre glycémique possible, la qualité du
traitement influençant le développement des complications. Le pédiatre voit
rarement des microangiopathies sévères, mais il en recherche très tôt les premières
manifestations :
la rétinopathie par les examens du fond d'oeil et l'angiopathie rétinienne ;
la néphropathie par la recherche d'une hypertension artérielle et de la
microalbuminurie
la neuropathie par l'examen des réflexes ostéo-tendineux et de la sensibilité,
et par la mesure de la vitesse de conduction nerveuse.

4.4. Devenir de l'enfant diabétique


Les complications dégénératives s'observent dans environ 15 % des cas pour la
néphropathie, 80 % des cas pour la rétinopathie, dont 20 % de formes
prolifératives, après 25 ans d'évolution. L'évolution des méthodes de traitement
depuis 15 ans permet d'en diminuer la fréquence.
Les difficultés psychologiques, particulièrement marquées au moment de
l'adolescence, sont souvent responsables de grands désordres métaboliques -
souvent de longue durée- susceptibles de provoquer le développement de ces
complications dès la fin de la deuxième décennie. Elles justifient la mise en oeuvre
de prises en charges psychologiques spécifiques du DID.
L'efficacité se juge aussi sur l'insertion sociale des jeunes diabétiques à l'âge
adulte. A de rares exceptions près, l'intégration dans la société se déroule aussi
bien, sinon mieux, que pour l'ensemble de la population. Un encouragement pour
les pédiatres à poursuivre les efforts entrepris depuis des décennies pour la
formation des jeunes patients.

5. Principes du traitement
Le traitement du diabète sucré consiste à remplacer l'insuline que le pancréas ne
produit plus.

176
L'insuline est administrée selon un rythme précis correspondant aux variations des
besoins sur le nycthémère. Les dose d'insuline sont décidées par le patient d'après
les résultats de l'auto-surveillance.
La diététique complète le traitement hormonal substitutif. Son objectif est
d'assurer un bon équilibre nutritionnel et un apport alimentaire régulier, en horaires
et en quantité, pour limiter les variations glycémiques.
Enfin, le traitement prend en compte l'activité physique, qui a des effets bénéfiques
sur l'action de l'insuline mais fait varier les besoins en insuline.

5.1. Insulinothérapie
Insulines et schémas thérapeutiques :
L'insuline est extraite du pancréas de porc ou produite par génie génétique.
Solubilisée, cette insuline a -par voie sous-cutanée-une action intense de 6 heures
(rapide). Par adjonction de Protamine ou de zinc, on obtient des insulines d'action
plus faible mais prolongée : insulines intermédiaire (plus de 12 heures) ou retard
(environ 24 heures).
L'insuline doit être administrée en quantité faible la nuit, en quantité plus
importante à chaque repas. L'injection d'insuline rapide 30 minutes avant chaque
repas (avec des stylos injecteurs) et d'une insuline d'action prolongée (ou la pompe
d'insuline) pour la nuit couvrent au mieux ces besoins. Cependant, beaucoup
d'enfants font une injection d'un mélange rapide-intermédiaire le matin et le soir.
La dose d'insuline habituellement nécessaire chez l'enfant est d'environ 1 Unité/kg.
L'insuline est injectée en sous-cutané profond, dans le ventre ou les bras le jour,
dans les cuisses ou les fesses le soir, en variant le point d'injection dans une même
zone, en dehors des lipodystrophies et en dehors d'une zone activité physique.
Surveillance et carnet de traitement
La surveillance doit couvrir les 4 périodes de la journée, chacune dépendant de
l'action d'une insuline. Elle comprend :
les signes physiques : ceux d'hyperglycémie doivent rester exceptionnels,
alors que les petites hypoglycémies sont inévitables et un repère
fondamental pour l'adaptation des doses ;
la glycémie, de plus en plus simple, rapide et acceptable ; précise mais
ponctuelle.;
la glycosurie, évaluation indirecte de la glycémie, mais non invasive et
permet de surveiller une longue période et de rechercher simultanément la
cétonurie.
Le carnet de traitement, essentiel pour l'adaptation des doses d'insuline, est
souvent mal utilisé : les enfants ne savent pas le lire et les il est souvent faux. Les
mémoires des analyseurs glycémiques devraient aider à résoudre une partie de ces
problèmes.
Adaptation des doses l'insuline
Les doses d'insuline sont adaptées par le patient avant chaque injection, en
fonction des observations consignées dans le carnet de traitement. Selon les
résultats obtenus la veille ou les jours précédents, la dose est répétée ou corrigée
(adaptation rétrospective). On tient aussi compte de la glycémie mesurée avant
l'injection (adaptation compensatoire) et de l'activité physique prévue (adaptation
anticipatoire). Pour être aisément applicables par les enfants, les règles
d'adaptation doivent être d'une grande simplicité.

177
On fait Si les résultats sont
La même dose Bons
Un peu élevés
Trop élevés un seul jour
Plus Trops élevés plusieurs jours de suite
Moins Trops bas (Hypoglycémie)

5.2. Alimentation
La diététique complète le traitement hormonal substitutif. Son objectif est d'assurer
un bon équilibre nutritionnel et un apport alimentaire régulier, en quantité et en
horaires, pour limiter les variations glycémiques.
L'alimentation équilibrée est celle que l'on souhaiterait pour tous les enfants, en
particulier sans excès de graisses et sans insuffisances en glucides et calcium. Les
repas doivent donc être variés. Le premier rôle de la diététicienne est de corriger
les plus importantes erreurs nutritionnelles.
Le rythme de l'alimentation est adapté au schéma thérapeutique. En plus des trois
repas principaux, les collations de la matinée et du coucher ont surtout comme rôle
de prévenir les hypoglycémies au moment où la digestion des glucides se termine
alors que l'activité de l'insuline, essentiellement la rapide, est encore très forte. Par
contre, l'action de l'insuline en fin d'après-midi, toujours faible, s'accommode mal
du goûter.
Le rythme des repas doit être régulier : à heures aussi fixes que possible; 30
minutes après les injections d'insuline. Un repas ne doit jamais être sauté. Entre les
repas, il ne faut pas grignoter.
L'importance des repas doit être régulière d'un jour à l'autre. Chaque repas doit
contenir un aliment glucidique.
Les produits sucrés doivent être consommés avec une extrême modération, très
occasionnellement, et uniquement pendant les repas. Les boissons sucrées sont à
proscrire. Il est préférable d'habituer l'enfant à des saveurs non sucrées que lui
recommander l'emploi des édulcorants.
En cas d'exercice physique, il est toujours préférable de diminuer la dose d'insuline.
La prise d'aliments énergétiques supplémentaires n'est justifiée que lorsqu'on n'a
pas pu anticiper l'exercice, ou lorsque l'on effectue un exercice intense de longue
durée.

5.3. Exercice
L'exercice physique est un élément essentiel du bien-être des patients DID. Les
changements de rythme qu'ils provoquent sont cependant souvent source de
difficultés d'adaptation des doses. En pratique, il faut diminuer la dose d'insuline si
l'on vient de faire un exercice ou si l'on peut prévoir d'en faire un. Un supplément
alimentaire doit être pris si un exercice n'a pas été prévu ou s'il est suffisamment
prolongé et intense.

5.4. Prise en charge de l'enfant diabétique


Education :
Le patient et ses parents doivent apprendre à gérer le diabète au quotidien.
L'apprentissage se fait lors de l'hospitalisation motivée par la mise en route du
traitement, par le pédiatre, les infirmières et les diététiciennes. La connaissance et

178
la pratique du traitement s'acquièrent progressivement lors des consultations, de
séminaires de formation ou de séjours de vacances pour enfants diabétiques.
L'intervention d'infirmières spécialisées à domicile s'avère souvent utile. Pour avoir
un rôle actif dans cette prise en charge, le médecin-traitant peut participer à des
stages de formation pratique. L'adhésion des familles à une Association (Aide aux
Jeunes Diabétiques) est essentielle pour l'entretien des connaissances pratiques et
l'accès à une information de qualité.
Suivi médical :
La surveillance médicale du DID doit être assurée tous les 2-3 mois, plus si
nécessaire. La consultation a pour but de surveiller la croissance et l'état clinique,
d'évaluer l'équilibre glycémique par l'examen du carnet de traitement et le dosage
de l'hémoglobine glycosylée, et de faire progresser l'enfant et ses parents dans la
pratique du traitement.
L'hémoglobine glyquée (HbA1C) est un critère objectif de l'équilibre glycémique.
Dosable en micro-prélèvement, elle reflète l'équilibre glycémique moyen des deux
derniers mois. On peut aussi doser la fructosamine, qui reflète l'équilibre
glycémique d'environ deux semaines.
Un bilan de santé plus complet est à faire chaque année. Il est l'occasion de
renouveler les entretiens diététique et psychologique et de rechercher des
altérations lipidiques et des lésions rénales (microalbuminurie) oculaires (fond
d'oeil, angiographie) ou nerveuses (conduction nerveuse) débutantes.
Suivi psychologique :
La prise en charge du diabète est souvent compliquée par une mauvaise
compliance au traitement (analyses, carnet de traitement et adaptation des doses
d'insuline), due au caractère très contraignant du traitement. Les troubles du
comportement alimentaire sont également fréquents. L'enfant diabétique a un
risque élevé de développer des complications psychologiques. La recherche des
enfants à risque et d'approches psychologiques adaptées sont aussi importantes
que l'insulinothérapie et la diététique.

6. Dépistage et prévention
L'origine auto-immune du DID ayant été établie, des essais de traitements
immuno-suppresseurs ont été conduits, pour tenter de freiner la destruction des
cellules ß restant encore au moment du diagnostic. Chez l'homme, les résultats les
plus intéressants ont été obtenus avec la Ciclosporine A : un plus grand nombre de
patients a présenté une rémission qu'avec un placebo, mais le pourcentage et la
durée des rémissions sont restées limitées. Divers essais sont en cours ou en
préparation, mais aucune étude contrôlée n'a actuellement permis d'obtenir des
résultats équivalents à ceux de la ciclosporine. Les thérapeutiques
immunosuppressives sont efficaces, chez l'animal, lorsqu'elles sont mises en œuvre
suffisamment tôt. Elles doivent donc être appliquées chez l’homme avant
l’apparition des signes cliniques. C'est l'objectif du dépistage.
Le dépistage peut être pratiqué dans les fratries de patients DID. Leur risque global
est de l'ordre de 5 %, mais les sujets HLA DR3,4 et/ou qui ont deux haplotypes en
commun avec le sujet diabétique ont un risque de 10-20 %. Le risque est presque
nul chez les frères et soeurs HLA-différents du sujet DID. L'absence d’anticorps n'a
pas la même valeur d'exclusion puisqu’ils peuvent être absents chez des nouveaux
DID. Le DID survient chez environ 1 % des sujets ICA négatifs, 3-5 % des sujets
ayant des taux plus faibles d'ICA et plus de 50 % des sujets ayant plusieurs
anticorps à taux élevés. En pratique, le risque dans les fratries est évalué par les
marqueurs génétiques et immunologiques, et par la mesure de la tolérance au
glucose (hyperglycémie provoquée orale) et de la sécrétion d'insuline

179
(hyperglycémie provoquée intra-veineuse).
La valeur prédictive des facteurs de risque génétiques et immunologiques est peu
connue chez les parents et les enfants de sujets DID, ainsi que dans les populations
non apparentées à des patients DID. Le dépistage y est donc peu pratiqué.

Références Bibliographiques
Czernichow P, Dorchy H, Diabétologie pédiatrique. Doin Editeur, Paris 1989.
Kinmonth AL, Magrath G, Reckless JPD and the Nutrition Subcommittee of the
Professional Adivsory Committee of the British Diabetic Association. Dietary
recommendations for children and adolescents with diabetes. Diabetic medicine
1989, 6 : 537-547.
National Diabetes Data Group, Classification and diagnosis of DIabetes Mellitus
and other categories of glucose intolerance. Diabetes, 1979, 28 : 1039-1057.
Skyler JS, Skyler DL, Seigler DE, O'Sullivan MJ. Algorithms for adjustment of insulin
dosage by patients who monitor blood glucose. Diabetes Care 1981, 4 : 311-318.

QUESTIONS A CHOIX MULTIPLES


1. La prédisposition génétique du diabète insulinodépendant chez l'enfant est
attestée par :
A. Une plus grande prévalence des antigènes HLA DR3 et DR4
B. Une concordance élevée de diabète de type 1 chez les jumeaux
homozygotes
C. L'absence d'effet de l'environnement en cas d'absence des antigènes de
prédisposition
D. Les anticorps anti-ilôts de Langherans souvent détectés au moment du
diagnostic
2. Le diabète sucré chez l'enfant
A. Est presque toujours insulinodépendant
B. Est facile à prévoir dans la population générale par le dépistage génétique
et immunologique
C. Est peu exposé au risque d'hypoglycémie
D. Est plus souvent familial que sporadique.

180
TRAITEMENT DU DIABETE SUCRÉ (n° 330 -
331 - 332)

Marc Legrelle - Jean-Jacques Altman


Diabétologie - Nutrition - Transplantation
Hôpital Laennec

TRAITEMENT DU DIABETE SUCRÉ (n° 330 - 331 - 332)


Les points importants
1. Objectifs du traitement
1.1. Objectif glycémique
1.2. Autres objectifs :
2. Moyens thérapeutiques hypoglycémiants
2.1. Diététique
2.2. Exercice physique
2.3. Hypoglycémiants oraux
3. Stratégies thérapeutiques
3.1. Traitement du diabète non-insulinodépendant
3.2. Indications de l'insulinothérapie
3.3. Choix du schéma insulinique
3.4. Cas particuliers
4. Education
5. Complications métaboliques aiguës nécessitant un ajustement immédiat du
traitement. (Documents à remettre au patient).
5.1. L'hypoglycémie.
5.2. Que faire en cas d'acétone ou si le diabète "va mal" ?
5.3. Que faire en cas d'acétone dans les urines ?
6.Surveillance du traitement
6.2. Au long terme
7. Annexes
Référence bibliographique :
Questions à choix multiples

Les points importants


Les objectifs thérapeutiques dépendent de la situation médicale tout autant que

181
psycho-socio-culturelle. Des glycémies « normales » (grossesses, complication
microangiopathique) sont finalement moins souvent nécessaires que des
« bonnes » glycémies (long passé de diabète de type 1 sans complication).
Le fractionnement de l’insuline techniquement et psychologiquement lourd,
chercher à mimer au mieux la sécrétion physiologique d’insuline.
Toutes les insulines se valent, seul le maniement compte.
La découverte de l’impact de l’éducation a été aussi importante sur la mortalité du
diabétique de type 1 que la découverte de l’insuline.
Les complications de l’hypoglycémie sont essentiellement d’ordre psychologique.
Les modifications comportementales (planification alimentaire, exercice physique
significatif) sont plus importantes et prioritaires dans la prise en charge du
diabète de type 2, bien avant les médicaments.
La très rare acidose lactique est la seule complication préoccupante des
biguanides. Les hypoglycémies sous sulfamides sont rarement graves mais
fréquentes.

1. Objectifs du traitement

1.1. Objectif glycémique


Celui-ci est fonction de l'espérance de vie du patient et de la présence de
complications micro-angiopathiques (Tableau I). En effet l'apparition ou l'évolution
des complications microangiopathiques (néphropathie, rétinopathie) et de la
neuropathie dépend de l'ancienneté et de l'intensité de l'hyperglycémie.
Cet objectif à long terme est susceptible d'être réévalué périodiquement. Il est
toujours un compromis entre ce que le diabétologue souhaite et ce que le patient
veut ou peut faire.
Tableau I : Objectifs glycémiques

Normoglycémie absolue : 0,7 à 1 g/l avantrepas; ≤ 1,2 g/l après repas.


Femme enceinte ou désirant l'être à court terme
Rétinopathie gravissime si la vision est menacée à court terme Normoglycémie :
0,8 à 1 g/1 avant repas ; ≤ 5 1,4 g/1 après repas
Tous les diabétiques dont l'espérance de vie est supérieure à 25 ans
Complication micro-angiopathique grave (menaçante à moyen terme):rétinopathie
sévère et/ou évolutive, protéinurie > 0,3 g/24 h, insuffisance rénale évolutive ;
Neuropathie en période hyperalgique
Pied aigu (infection)Glycémies "correctes" : 1 à 1,4 g/1 avant repas ; 1 à 1,8 g/1
après repas
Diabétiques sans complication micro-angiopathique avec espérance de vie < 20 ans
Sécurité (pas de complication métabolique aiguë) : 1,3 g à 2,5 g/1
Tous les autres patients (espérance de vie courte), ceux chez qui une hypoglycémie
serait dangereuse (patient âgé vivant seul) et ceux qui ne peuvent ou ne
veulentpas faire mieux

182
1.2. Autres objectifs :
Le traitement du diabète ne peut se limiter à la seule lutte contre l'hyperglycémie :
le risque de complication macro-vasculaire dépend peu de l'équilibre glycémique.

1.2.1. Objectif tensionnel:


La tension artérielle de tous les diabétiques, quel qu'en soit l'âge doit être au
maximum égale à 140 / 80 mmHg. Ceci pour retarder micro et macro-angiopathie.

1.2.2. Lutte contre les autres facteurs de risque vasculaire


Tabagisme.
Hypercholestérolémie et hypertriglycéridémie. Surpoids.
Sédentarité.
Estro-progestatifs.

2. Moyens thérapeutiques hypoglycémiants

2.1. Diététique
La diététique du diabète a trois objectifs
limiter l'hyperglycémie, mais aussi éviter les hypoglycémies,
permettre une réduction pondérale si nécessaire,
diminuer le risque d'athérome
Le "régime diabétique" correspond en fait à l'alimentation équilibrée que tout sujet
devrait suivre : Apports caloriques assurés essentiellement par les glucides
complexes (50 % des calories totales, ce qui revient le plus souvent à augmenter la
proportion de féculents dans l'alimentation). Apports lipidiques limités à 35% des
calories totales, répartis par tiers en acides gras saturés, poly-insaturés et mono-
insaturés. Alimentation riche en fibres.
Aucun aliment n'est interdit. L'opposition entre sucres rapides" et sucres lents" est
en partie obsolète : fibres et lipides ralentissent l'absorption des glucides,
permettant ainsi la consommation d'un dessert sucré en fin de repas. En revanche
un glucide complexe (pain blanc par exemple) pris isolément est aussi
hyperglycémiant que le saccharose.
La répartition des glucides est particulièrement importante chez les patients traités
par sulfamides et surtout par insuline : les trois repas doivent apporter une
quantité minimale de glucides, équivalente d'un jour à l'autre. Afin de pouvoir
varier leur alimentation les patients doivent connaître et utiliser les notions
d'équivalence glucidiques (Tableau II). Les collations ne sont pas systématiques.
Elles sont parfois utiles chez le diabétique noninsulinotraité pour aider au suivi d'un
régime hypocalorique. Chez le diabétique insulinotraité leur introduction se discute
au cas par cas : elles sont utiles s'il existe une tendance hypoglycérnique en fin de
matinée, d'après midi, ou en début de nuit.

Tableau II : Teneur en glucides des différents aliments et équivalences


glucidiques

0 % : Viandes, poissons, crustacés, oeufs, fromages.

183
5 % : Lait, yaourts, légumes verts, tomates.
10 % : Artichauts, betteraves, carotte, celeri, navets, petits-pois, salsifis.
15 % : Fruits (sauf banane et raisin)
20 % : Pommes de terre, pâtes et riz cuits, légumes secs cuits, banane, raisin.
55 % : Pain.
75 % : Biscottes.
100 g de pain (1/2 baguette) = 6 biscottes
40 g de pain = 100 g de pommes de terre (2 pommes de terre de la taille d'un
oeuf)
1 biscotte = 15 g de pain
100 g de lait = 2 petits suisses = 1 yaourt
100 g de pommes de terre cultes = 100 g de riz cuit = 100 g de semoule cuite =
100 g de légumes secs cuits = 100 g de pâtes cuites.
100 g de légumes à 5 % = 50 g de légumes à 10 %
100 g de fruits à 15 % = 1/2 banane = 80 g de raisin

2.2. Exercice physique


La pratique régulière d'une activité physique effectuée en aérobie à un effet
bénéfique sur la sensibilité à l'insuline, mais aussi sur la tension artérielle et le profil
lipidique. Elle est donc recommandée à tous les diabétiques, bien que son effet à
long terme sur l'équilibre glycémique des diabétiques insulinodépendants soit
négligeable.
La reprise d'une activité sportive chez un diabétique de plus de 40 ans nécessite la
réalisation d'un bilan cardiologique préalable. Les rétinopathies proli-férantes non-
photocoagulées contre-indiquent provisoirement les efforts physiques (risque
d'hémorragie). A l'exception des sports aériens et de la plongée sous-marine, tous
les sports sont accessibles aux diabétiques, même insulinotraités.

2.3. Hypoglycémiants oraux

2.3.1.Biguanides
Il n'existe plus en France que la Metformine
Glucophage Retard (663 mg de Metformine base)
Glucophage (390 mg de Metformine base)
Stagid (280 mg de Metformine base)
Glucinan (205 mg de Metformine base)
Elle n'est pas métabolisée, ne se lie pas aux protéines plasmatiques et est
rapidement excrétée par le rein. Sa demi-vie est de 1,5 à 4,5 heures chez un sujet
normal.
Mode d'action :
La Metformine diminue peut-être modestement l'absorption intestinale du glucose.
Fait fondamental, elle ne modifie pas l'insulinosécrétion. La molécule agit
essentiellement en diminuant la néo-glucogénèse hépatique. Elle augmenterait la
sensibilité à l'insuline.

184
Effets indésirables
Troubles digestifs (5 à 20 %) douleurs abdominales, diarrhées, vomissements, goût
métallique. Le plus souvent ces troubles surviennent au début du traitement et
disparaissent après les premières semaines. Ils peuvent apparaître en cours de
traitement ; dans cette circonstance, il faut suspecter de principe une pathologie
digestive associée. Ils sont réduits par une posologie progressive et une prise en fin
de repas. Toutefois malgré de telles précautions, certains patients demeurent
intolérants.
L'acidose lactique : cette complication gravissime est exceptionnelle avec la
metformine : 1 cas pour 4000 années-patients en France. Dans tous les cas
recensés, un non-respect des contre-indications est retrouvé.
Les biguanides ne donnent jamais d'hypoglycémies sauf associés à l'alcool.
Contre-indications absolues
Insuffisance rénale, même modérée car elle entraîne l'accumulation du produit
actif.
Age avancé (70 ans ou plus d'âge physiologique), car il s'accompagne toujours
d'une réduction de la filtration glomérulaire.
Insuffisance hépatocellulaire, qui est par elle même une cause d'augmentation des
lactates (diminution de la consommation par atteinte de la néoglucogenèse).
Insuffisance respiratoire, insuffisance cardiaque décompensée, insuffisance
coronaire instable, ischémie aiguë ou subaiguë d'un membre, à l'origine d'une
hyperproduction de lactates par augmentation du métabolisme anaérobie.Grossesse
et lactation.
Contre-indications relatives, à apprécier au cas par cas :
Cirrhose sans insuffisance hépatocellulaire.
Alcoolisme chronique.
Patients à risque d'insuffisance respiratoire aigu (asthme sévère ... ).
Insuffisance cardiaque bien compensée.
Angor stable.
Artériopathie des membres inférieurs, sans ischémie aiguë.
Associations à utiliser avec prudence :
Diurétiques, inhibiteurs de l'enzyme de conversion, AINS, aminosides, susceptibles
de provoquer une insuffisance rénale aiguë.
Précautions d'emploi :
Arrêt systématique 48 heures avant injection d'iode (UIV, scanner, artériographie)
ou intervention chirurgicale. Attendre 2 jours pour reprendre le traitement.
Arrêt systématique dans toute situation pouvant se compliquer de choc,
déshydratation ou insuffisance rénale : sepsis, pathologie digestive aiguë, angor
instable...
Ces précautions d'emploi doivent être connues des patients, que l'on informera
aussi des signes prémonitoires de l'acidose lactique : crampes musculaires,
douleurs abdominales et troubles digestifs, asthénie intense.

2.3.2. Sulfamides hypoglycémiants


Entièrement absorbés au niveau digestif et fortement liés aux protéines
plasmatiques (de 50 à 99 %), ils sont éliminés par voie rénale et/ou hépatique.

185
Leur demi-vie est très variable en fonction des molécules, de 6 à 40 heures
(tableau III). Cette demi-vie est inférieure à la durée de l'effet hypoglycémiant. La
cinétique est fortement influencée par l'insuffisance rénale et/ou hépatique.
Mode d'action
Ils agissent par stimulation de la sécrétion d'insuline.
Effets indésirables
L'effet indésirable principal est le risque d'hypoglycémies.
Les hypoglycémies peu sévères sont fréquentes et sont un obstacle à
l'amaigrissement (fringales, resucrage). Les hypoglycémies sévères sont plus
rares, menaçant les patients âgés et/ou polymédiqués, mal informé, en cas de
jeûne glucidique, de prise d'alcool, ou d'insuffisance rénale. Une hypoglycémie
sévère prolongée peut s'accompagner de séquelles neurologiques graves, voire de
décès...
D'autres effets indésirables sont décrits et sont rares ou exceptionnels : Rashs en
début de traitement, taxidermie, flush après ingestion d'alcool (chlorpropamide),
leucopénie, thrombopénie, cytolyse, ictère, hyponatrémie de dilution par
potentialisation de l'ADH (chlorpropamide).

Tableau III : Sulfamides hypoglycémiants

Médicaments Fixation Demi-vie Élimination Fraction


protéique% (h) éliminée
inchangée
Carbutamide (Glucidoral) 50-75 44 R 40-70 % ?
Chlorpropamide(Diabinèse) 90-95 25-40 R 60
Glibenclamide(Daonil,Hémi- 99 7-15 B 60 % 0
Daonil,Daoni1faible,Euglucan,
Miglucan)

95 8 R 70 % <5
Glibornuride (Glutril)

93 12 R70% <1
Gliclazide (Diamicron)

Glipizide(Glibénèse,
Miinicliab) 92-96 3- 7 R90% <2

Tolbutamide (Dolipol) 95 4- 8 R90% <5

Voie d'élimination : R rénale, B biliaire le chiffre indique la fraction du


médicament éliminée par ces voies.

Contre-indications
Insuffisance rénale, insuffisance hépatique, grossesse, lactation.
Interactions médicamenteuses:

186
L'effet hypoglycémiant des sulfamides hypoglycémiants peut être majoré :
Essentiellement par le miconazole.
Par la prise d'autres médicaments ayant une forte affinité pour les protéines
de transport (sulfamides diurétiques et antibactériens).
Par une réduction de l'élimination rénale ou hépatique induite par les
salicylés, la phénylbutazone, le probénécide, l'allopurinol et le clofibrate.
Par l'ingestion aiguë d'alcool, de cimétidine, cyclophosphamide.
A l'inverse, il peut être entravé par :
Les diurétiques thiazidiques, les glucocorticoïdes, les bétamimétiques, les
inducteurs enzymatiques.
Les sulfamides hypoglycémiants augmentent l'activité anticoagulante des
coumariniques.
Précautions d'emploi :
Avertir les patients du risque hypoglycémique en cas de repas insuffisant (la prise
d'un sulfamide doit toujours être suivie de l'absorption de glucides), d'exercice
physique inhabituel, d'absorption d'alcool à jeun, d'automédication par salicylés.

2.3.3. Insuline
L'insuline est une hormone polypeptidique, obtenue soit par extraction à partir de
pancréas de porc ou de boeuf, soit par génie génétique (insulines "humaines").
Outre son effet hypoglycémiant, l'insuline à une action anabolisante (antilipolytique
et antiprotéolytique).
L'insuline n'est active que par voie parentérale. La voie souscutanée est la plus
utilisée, mais les voies intraveineuses et intramusculaires sont aussi utilisables,
exclusivement pour les insulines "ordinaires".
L'insuline est commercialisée aux concentrations de 40 U/mI pour l'injection à l'aide
de seringues, ou 100 U/ml pour l'injection au stylo injecteur ou à la pompe à
insuline. Outre de l'insuline, ces préparations contiennent des antiseptiques et
stabilisateurs, et éventuellement du zinc et/ou de la prolamine pour prolonger son
action en ralentissant sa résorption sous-cutanée.
Trois firmes fabriquent des insulines comparables, que l'on classe selon leur durée
d'action (tableau IV).

187
Tableau IV : Principales insulines

Insulines rapides ou ordinaires (durée d'action : 4 à 6 h)


Aussi utilisables par voie IM ou IV, avec des délais et durées d'action plus courts (7
à 10 minutes pour la voie IV)
Endopancrine (animale)
Orgasuline ordinaire = Umuline rapide = Actrapid (humaines)

Insulines intermédiaires ou serni-lerites (durée d'action ≈ 12 h)


Insuline NPH (animale)
Orgasuline NPH = Umuline NPH = Insulatard (humaines)
Umuline Zinc Composé = Monotard (humaines)

Insulines lentes (durée d'action m 24h)


Tardum = Lente MC (animales)
Umuline Zinc = Ultratard (humaines)

Mélanges d'insuline intermédiaire et rapide


Rapitard (25% de rapide) (animale)
Umuline profil 10, 20, 30, 40, 50 = Mixtard 10, 20, 30, 40, 50 (humaines)
(le chiffre correspond au pourcentage d'insuline rapide)
Ces préparations ont l'avantage de la simplicité, mais l'inconvénient d'imposer une
proportion fixe d'insuline rapide: le patient ne peut d'un jour à l'autre modifier la
proportion du mélange.

Effets secondaires
Ils sont pratiquement absents, l'insuline étant une hormone naturelle, dont seule la
voie d'administration est nonphysiologique :
Lipodystrophies : il s'agit de modifications de la graisse sous cutanée
(hypertrophies ou atrophies) apparaissant au niveau des sites d'injection. Elles
modifient la résorption de l'insuline. Elles sont plus fréquentes avec les insulines
animales.
Allergies : exceptionnelles, il s'agit en fait d'allergies aux constituants des
solutions d'insuline (prolamine, produits stabilisants, antiseptiques ...). Avec les
insulines animales peuvent apparaître des anticorps anti-insuline, sans
conséquence clinique.
Prise de poids : conséquence de l'effet anabolisant de l'insuline. Cette prise de
poids n'est pas inéluctable. Cependant, en l'absence de mesure diététique, la
tendance spontanée des patients insulinotraités est de revenir à leur poids
maximal antérieur.
Hypoglycémies : ce n'est pas un effet indésirable de l'insuline (c'est même le
but recherché !), mais la conséquence inévitable d'un bon équilibre glycémique.
Conservation

188
L'insuline est conservée à 4°C, mais les flacons entamés doivent être conservés à
température ambiante (pour une durée d'un mois maximum). Elle ne doit jamais
être congelée, ni exposée aux grosses chaleurs (voiture en plein soleil).
Administration
L'injection sous cutanée est simple (document 1). L'emploi d'alcool pour désinfecter
la peau est déconseillé car elle favorise l'apparition de lipodystrophies. Le point
d'injection doit être différent tout les jours (l'injection répétée au même point
provoque l'apparition de lipodystrophies), mais la zone d'injection ne doit pas être
changée trop fréquemment, car la cinétique de résorption de l'insuline varie d'un
site d'injection à l'autre.
L'injection doit habituellement être faite 10 à 20 minutes avant un repas. Le
respect des horaires d'injection et de repas contribue à l'obtention d'un bon
équilibre glycémique.
L'INJECTION D'INSULINE
Conservation :
Les réserves d'insuline se conservent au réfrigérateur.
Les flacons entamés sont gardés à température ambiante.
Seul le gel et les fortes chaleurs (40°C ou plus) détruisent l'insuline.
Horaire :
L'injection se fait habituellement 1/4 d'heure avant le repas.
Préparez le matériel nécessaire.Vérifiez la date de péremption sur le
flacon.
Lavez-vous les mains
Pour les insulines"retard" (troubles) Roulez le flacon entre les deux
mains.
Désinfectez le bouchon du flacon
Piquez droit à travers le bouchon du flacon
Retournez le flacon et aspirez un peu plus que la quantité d'insuline
désirée
Tapotez sur la seringue pour faire monter les bulles d'air
En poussant sur le piston, chassez les bulles puis ajustez la dose
d'insuline.
Pour éviter que le piston ne remonte tout seul quandvous aspirez
l'insuline: Injectez de temps en temps une seringue d'air dans le flacon.
Tendez la peau entre le pouce faites un gros pli entre le pouceet
l'index).Piquez droit.
Vous pouvez injecter l'insuline dans ces zones:et l'index (dans les zones
maigres,
Poussez à fond le piston pour injecter l'insuline.
Les seringues neservent qu'une fois: jetez-la après usage.
N'oubliez pas denoter la dose d'insuline sur votre carnet.
Utilisez les toutes, mais sans en changer trop souvent, par exemple :
Pendant un mois faites l'injection le matin dans le ventre, le soir dans les
cuisses.Le mois suivant : dans les bras lematin, dans les fesses le soir.

189
Par contre, à l'intérieur d'une zone, il ne faut jamais piquer deux jours de
suite au même point, mais utiliser toute la zone, en décalant chaque jour
le point d'injection de 2 cm environ.
Si vous sentez que sous la peau lagraisse fait des bosses (ou des creux),
(lipodystrophies), changez de zone bd'injection et parlez-en à votre
diabétologue
Posologie
Il n'y a pas de dose standard pour l'insuline, la posologie est déterminée de
manière pragmatique, en fonction de l'efficacité des injections précédentes. En
moyenne les besoins d'un diabétique insulinodépendant sont de 0,5 U/kg/jr. Dans
certains cas il existe une insulino-résistance (surpoids, infection, prise de
corticoïdes ...) qui explique une augmentation des besoins jusqu'à 1 U/kg/jr, voire
plus. L'utilisation de doses supérieures est nécessaire dans les situations d'urgence
métabolique. Il n'y a pas de dose maximum toxique : les doses d'insulines peuvent
être augmentées tant qu'il n'y a pas d'hypoglycémie.
Principaux schémas insuliniques
Une multitude de schémas sont possibles pour l'administration d'insuline, les plus
fréquemment utilisés sont représentés sur la Figure 1.
Quel que soit le schéma employé il est nécessaire d'assurer un débit de base
(assuré par une injection d'insuline lente ou deux injections d'insuline semi-lente),
auquel sera éventuellement ajouté des bolus d'insuline rapide pour éviter les
hyperglycémies post-prandiales. En effet chez le sujet normal, l'insulinémie n'est
jamais nulle, même après plusieurs heures de jeûne. Chez le diabétique
insulinodépendant la sécrétion d'insuline endogène est quasi-nulle et ne suffit
même pas à assurer ce débit de base sans lequel une hyperglycémie survient à
jeun.
Les schémas les plus complexes sont généralement ceux permettant d'obtenir le
meilleur équilibre glycérnique tout en permettant une plus grande souplesse
d'horaires, d'alimentation et d'activité physique. Les schémas les plus simples ne
permettent pas d'obtenir d'aussi bons résultats et obligent à une vie plus régulière.
L'utilisation de pompe portable délivrant de l'insuline par voie sous-cutanée à débit
variable permet de s'approcher d'une sécrétion d'insuline physiologique.
Cependant elles sont beaucoup plus contraignantes que les injections multiples
pour des résultats peu supérieurs et sont donc plus rarement utilisées.
Adaptation des doses
Chez un même sujet les besoins en insuline varient fréquemment de quelques
unités sans raison apparente. Ils sont parfois brutalement divisés par 2 en cas
d'activité physique intense, ou multipliés par 2 ou plus en cas de maladie
intercurrente, de prise de corticoïde, de stress aigu.
Pour obtenir un équilibre glycémique correct il est donc nécessaire d'adapter les
doses d'insuline.

Figure 1 : Principaux schémas d'insuline

Cette adaptation est basée essentiellement sur les résultats glycémiques obtenus
dans les jours précédents, mais doit aussi tenir compte des événements prévisibles
dans la période à venir.
A titre d'exemple la Figure 2 indique la méthode à suivre pour adapter l'insuline
dans un schéma à deux injections d'insuline semi-lente. Pour les schémas plus
complexes, le raisonnement reste identique, mais nécessite de connaître la durée

190
d'action de chaque insuline utilisée.

Figure 2 : Principe d'adaptation d'un schéma à 2 injections.

I. GLYCEMIES ELEVEES, AU-DESSUS DE L'OBJECTIF :


Si la glycémie est élevée de temps en temps, mais pas tout le temps : Ne modifiez
pas les doses d'insuline.
Si vous avez fait des excès alimentaires, n'augmentez pas l'insuline, mais corrigez
votre alimentation.
Si la glycémie est élevée la matinée et l'après-midi, plusieurs jours de suite : il faut
augmenter de 2 unités l'insuline du matin.
Si la glycémie est élevée après le dîner, (dans la nuit), et au réveil,plusieurs jours
de suite : il faut augmenter de 2 unités l'insuline du soir.
Si la glycémie est très élevée, n'oubliez pas de rechercher de l'acétone dans les
urines.
II. MALAISE OU GLYCEMIE INFERIEURE A 0,60 g : HYPOGLYCEMIE,
Il y a 3 causes principales aux hypoglycémies :
Repas insuffisant en glucides ou "sauté".
Effort physique important et imprévu.
Si ce n'est pas l'une des deux causes précédentes, il faut diminuer de 2 ou de
unités l'insuline:
Du matin si l'hypoglycémie a eu lieu dans la matinée, l'après-midi, ou juste avant le
dîner.
Du soir si elle a eu lieu après le dîner, dans la nuit, ou juste avant le petit-déjeuner.
Dans tous les cas il faut se resucrer à chaque hypoglycémie.
Bien que la règle soit de commencer par la plus faible dose du médicament le moins
puissant, l'escalade thérapeutique devant la présence de glycémies élevées souvent
due au non-respect des règles diététiques fait qu'un grand nombre de patients se
voit prescrire en association sulfamides et biguanides à leur "dose plafond".

3. Stratégies thérapeutiques

3.1. Traitement du diabète non-insulinodépendant

3.1.1. Diététique
Il s'agit de l'intervention principale dans la prise en charge du diabétique non
insulinodépendant. Il est indispensable de réduire le surpoids pour réduire
l'insulinorésistance, améliorer l'insulinosécrétion et baisser les glycémies. Dans un
premier temps, les apports caloriques seront réduits d'environ 30% par rapport aux
données recueillies par l'interrogatoire alimentaire.

3.1.2. Indication des antidiabétiques oraux


Il n'existe pas de délai ou de niveau d'hyperglycémie indiquant formellement le
début du traitement médicamenteux. C'est une erreur de prescrire d'emblée un

191
antidiabétique oral à un diabétique qu'on verrait pour la première fois sans avoir
tenté le plus sincèrement possible de mettre en place une planification alimentaire
efficace.
Biguanides
En France il s'agit fréquemment du traitement institué en première intention en cas
de surpoids et d'efficacité insuffisante des mesures hygiéno-diététiques.
La forme retard est souvent préférée à la forme simple. La posologie maximale est
2 cp de Glucophage retard.
Sulfamides hypoglycémiants
Ils sont prescrits quand les objectifs glycémiques ne sont pas atteints avec la
planification alimentaire et les biguanides, ces derniers étant maintenus ou non. Ils
sont parfois utilisés en première intention, chez le diabétique non-
insulinodépendant sans surpoids, ou en cas de contre-indication aux sulfamides.
La posologie maximale est de 3 comprimés par jour (avant chaque repas). Il est
possible de prescrire 4 comprimés par jour, mais cela augmente peu l'effet
hypoglycémiant.

3.2. Indications de l'insulinothérapie

3.2.1. Carence en insuline


C'est la seule indication vitale de l'insulinothérapie. Cette carence en insuline peut
être définitive, c'est le cas du diabète insulinodépendant, ou transitoire à l'occasion
d'un événement intercurrent chez un diabétique non-insulinodépendant. Il est
aussi possible qu'après des années de diabète non-insulinodépendant la sécrétion
d'insuline endogène se tarisse, le diabète devient alors "insulino-nécessitant".
La carence en insuline se manifeste par les signes suivants :
Hyperglycémie avec ses symptômes.
Asthénie musculaire, de plus en plus intense, amyotrophie progressive.
Amaigrissement spontané (mais l'apétit est conservé, voire augmenté).
Puis apparition d'une cétonurie.
En l'absence de traitement, l'évolution se fait plus ou moins rapidement (de
quelques heures en quelques mois, suivant l'intensité de la carence) vers
l'acidocétose.

3.2.2.Contre-indications au traitement oral


C'est le cas de l'insuffisance rénale ou hépatique sévère, et dans une moindre
mesure du sujet àgé. La contre-indication peut aussi être transitoire : grossesse,
intervention chirurgicale...
Avant de débuter une insulinothérapie dans ces situations, il faut toujours s'assurer
que l'objectif glycémique souhaité ne peut être atteint par le seul régime.

3.2.3. Complications dégénératives évoluées


Les complications micro-angiopathiques sévères (rétinopathie, néphropathie), la
neuropathie hyperalgique, les plaies des pieds nécessitent la normoglycémie pour
arrêter leur évolution. Pour atteindre cet objectif une insulinothérapie est souvent
nécessaire. En revanche, l'évolution de la macro-angiopathie dépend peu de
l'équilibre glycémique, elle n'est donc pas en elle même une indication à

192
l'insulinothérapie.

3.2.4. Non-efficacité du traitement oral


Si les glycémies restent très élevées sous doses maximales d'antidiabétiques oraux
(3 Daonil 5rng et 2 Glucophage retard), même sans signe de carence en insuline et
sans complication, on peut tenter un traitement par l'insuline.
Cette tentative n'a de sens que si l'on obtient réellement des glycémies meilleures.
L'échec caricatural est l'association d'un engraissement rapide sous insuline sans
amélioration voire détérioration glycémique. Il faut alors arrêter l'insuline et
reprendre les comprimés. A l'inverse, il s'agit d'un succès si le poids reste stable
voire diminue et si les glycémies sont normalisées.

3.3. Choix du schéma insulinique


Généralement, plus l'objectif glycémique est sévère, plus le schéma insulinique doit
être complexe. Mais en diabétologie les moyens ne comptent pas, seuls les
résultats sont importants : si l'équilibre glycémique est satisfaisant avec un schéma
très simple ou inhabituel, il faut se garder de le modifier.
Le Tableau V donne les schémas habituellement utilisés chez le diabétique
insulinodépendant en fonction de l'objectif glycémique, ainsi que les principales
contraintes à accepter pour atteindre ces objectifs.

Tableau 5 : schémas insuliniques en fonction de l'objectif glycémique

Normoglycémie absolue : 0,7 à 1 g/l avant repas ; ≤ 1,2 g/l après repas
3 ou 4 injections/jr (rapide et retard) ; diététique très rigoureuse
HGT : 6 à 7 tous les jours ; adaptation : 1 à 2 jours ;
3 à 5 hypo/semaine
Consultation au minimum 1/mois
Objectif transitoire (≤1 an) pour passer un "cap" critique
Normoglycémie : 0,8 à 1 g/1 avant repas ; ≤ 1,4 g/1 après repas
2, 3 ou 4 injections/jr (rapide et retard) ; diététique rigoureuse
HGT = 3 à 4/jr ; adaptation : 2 à 4 jours
2 à 4 hypo/semaine, 1 coma/an
Consultation : de 1/mois à 1/trimestre
Objectif à maintenir pendant de longues années : compromissions et périodes de
laisser-aller inévitables
Glycémies "correctes" : 1 à 1,4 g/1 avant repas ; 1 à 1,8 g/1 après repas
2 injections/jr (retard ± rapide) ; conseils diététiques
HGT = 2 à 3/jr ; adaptation : 1 semaine ;
≈ 1 hypo/semaine, 0 coma hypo
Consultation : de 1/trimestre à 1/6 mois
Sécurité (pas de complication métabolique aiguë) :1,3 g à 2,5 g/l

193
1 à 2 injections/jr (retard) ; pas de "régime" ;
HGT ≈ 1/jr ; doses "fixes" ; aucune hypoglycémie
Consultation de 1/mois à 1/trimestre

3.4. Cas particuliers

3.4.1. La personne âgée


Les biguanides sont contre-indiqués en raison d'une insuffisance rénale latente
fréquente à cet âge. Les sulfamides hypoglycémiants doivent être maniés avec
précaution en employant les posologies minimales des molécules à demi-vie courte,
en raison du risque d'hypoglycémies, particulièrement graves à cet âge. Le
traitement le plus sûr est donc l'insulinothérapie. Une seule injection d'insuline est
fréquemment suffisante à cet âge, car l'objectif glycémique est le plus souvent
large. Elle est souvent faite par une infirmière à domicile ce qui permet de rompre
l'isolement de la personne âgée, et de prolonger son maintien à domicile.
La diététique doit être limitée à quelques conseils simples : pas de boissons
sucrées, féculents ou pain à chaque repas, pas de repas sauté, apports suffisants
en protide. Il est illusoire et même dangereux d'entreprendre un régime
hypocalorique à cet âge.
L'éducation doit être centrée sur la reconnaissance et la prévention des
hypoglycémies et des hyperglycémies importantes (risque de coma
hyperosmolaire), le soin et la prévention des lésions des pieds.

3.4.2. L'insuffisant rénal


Les biguanides sont formellement contre-indiqués en raison du risque d'acidose
lactique mortelle. La demi-vie des sulfamides est augmentée, ce qui rend leur
maniement difficile (risque d'accumulation et d'hypoglycémie). Là encore la
thérapeutique hypoglycémiante la plus sûre est l'insuline. La durée d'action de
l'insuline peut parfois être légèrement augmentée en cas d'insuffisance rénale
importante.
L'hypertension au cours des néphropathies diabétiques est souvent très sévère,
nécessitant le plus souvent l'association de plusieurs classes thérapeutiques, dont
un diurétique de l'anse.

4. Education
L'éducation fait partie intégrante du traitement du diabète. Elle à un triple but :
éviter les complications aiguës, améliorer l'équilibre glycémique, et favoriser
l'adhésion au traitement.
En raison de la grande diversité des diabétiques et du diabète, les objectifs de
l'éducation ne peuvent être les mêmes pour tous. L'identification des ces buts
nécessite de prendre en compte la dimension sociale, culturelle et psychologique
des patients.
Cependant un objectif minimum peut être défini : prévenir les complications aiguës.
Tous les diabétiques devraient connaître les signes cliniques de l'hyperglycémie.
Les DID devraient savoir reconnaître une cétose et connaître son caractère
inquiétant. Les diabétiques traités par sulfamides ou insuline devraient savoir
reconnaître et traiter une hypoglycémie (toujours avoir du sucre sur soi), ceux
traités par biguanides devraient connaître leurs précautions d'emploi et les signes
prémonitoires de l'acidose lactique. Tous les diabétiques devraient apprendre à ne

194
pas négliger les plaies, même minimes, des pieds.
L'éducation des DNID doit surtout porter sur la diététique et la réduction des autres
facteurs de risque vasculaire. Les interactions avec les sulfamides hypo-
glycémiants, les situations susceptibles de déséquilibrer le diabète devraient être
connues.
Les diabétiques insulinotraités doivent apprendre la technique d'injection, et les
principes d'adaptation des doses (dans la vie normale et dans des circonstances
particulières comme le sport, les voyages ...). Ils doivent connaître les
circonstances à l'origine d'hypoglycémies (document 3). Leur entourage doit
apprendre à reconnaître et à traiter (glucagon) les hypoglycémies. lis doivent
connaître la conduite à tenir en cas de cétose (document 4) ou de vomissements.
L'éducation diététique doit leur permettre de diversifier leur alimentation sans
préjudice pour leur équilibre glycémique.
DID et DNID devraient savoir pratiquer une autosurveillance glycémique et urinaire.
Celle-ci est indispensable (plusieurs fois par jour) aux diabétiques insulinotraités,
pour leur permettre d'adapter les doses d'insuline. Elle est souhaitable (quelques
fois par semaine) chez les diabétiques non-insulinotraités comme lisécurité's pour
éviter les complications métaboliques aiguës, mais aussi pour augmenter leur
motivation et pour apprécier l'équilibre glycémique.
Concernant l'autosurveillance glycémique, aucun horaire n'est plus important que
les autres : il est donc important qu'une variation judicieuse des horaires de
contrôles permette de documenter aussi bien les glycémies pré- que post-
prandiales.
Les femmes diabétiques devraient recevoir une information sur la contraception et
la grossesse.
Une information simple, objective, mais non angoissante, doit être donnée sur la
physiologie du diabète et les complications.

5. Complications métaboliques aiguës nécessitant un


ajustement immédiat du traitement. (Documents à
remettre au patient).

5.1. L'hypoglycémie.
QU'EST-CE QU'UNE HYPOGLYCÉMIE ?
Une hypoglycémie est une baisse excessive (=hypo) du taux de sucre dans le sang
(=glycémie), en dessous de 0,60 g/l.
COMMENT RECONNAITRE L'HYPOGLYCEMIE ?
Vous pouvez savoir que vous êtes en hypoglycémie parce que vous avez 1, 2 ou 3
des signes suivants (rarement plus, généralement toujours les mêmes), classés du
plus fréquent au moins fréquent:
Sueurs
Tremblements
Faim
Troubles de la vue
Fatigue soudaine
Nervosité

195
Vertiges
Sentiment de fonctionner au ralenti
Sentiment de bien-être ou de mal-être
Imprécision des gestes
Froid
Sentiment de perdre connaissance
Coeur qui s'accélère ou qui bat fort
Votre entourage peut reconnaître que vous êtes en hypoglycémie parce que
vous avez un ou plusieurs des signes suivants:
Pâleur
Sueurs
Troubles de la parole
Comportement bizarre, colère sans raison
Tremblements
Regard vide
Angoisse
Etat semblable à l'ivresse
QUE FAIRE SI VOUS AVEZ CES SIGNES ?
Agir rapidement, mais sans précipitation et sans affolement:
Si votre matériel d'auto-surveillance est à proximité : vérifier la glycémie (on
peut aussi le faire juste après avoir mangé les sucres)
Manger 3 morceaux de sucre
Puis, si le repas suivant est loin, manger un féculent (Pain, biscotte,
croissant,gâteau sec ... ), Il faut 5 à 10 minutes pour que le sucre agisse,
alors n'engloutissez pas une boite de sucre en 2 minutes !Quand le malaise à
disparu, il faut réfléchir pour trouver sa cause.
QUELLES SONT LES CAUSES DES HYPOGLYCEMIES ?
Il y a 3 causes principales aux hypoglycémies:
Repas non pris après l'injection d'insuline, ou insuffisant en glucides, ou
collation oubliée.
Exercice physique. (Si vous prévoyez un exercice physique important il faut
manger plus avant et après, et/ou baisser l'insuline avant).
Trop d'insuline. Il faudra alors baisser l'insuline correspondante à l'heure de
l'hypoglycérnie.
Autre cause d'hypoglycémie à connaître : la consommation d'alcool à jeun.
UNE HYPOGLYCEMIE EST-CE QUE C'EST GRAVE ?
NON : Même si l'hypoglycémie est profonde, que vous soyez seul, et que
vous tombiez dans le coma, le foie fabrique du sucre : vous vous réveillerez
spontanément après quelques heures et avec un bon mal de crâne. Les
hypoglycémies, même fréquentes, n'abîment pas le cerveau.
MAIS : L'hypoglycémie peut rendre dangereuses certaines situations : si
vous conduisez, si vous êtes en haut d'une grande échelle, si vous pratiquez
certains sports... Alors prenez vos précautions !

196
ET LE COMA?
Il peut arriver si vous n'avez pas senti venir l'hypoglycémie, ou si vous avez trop
tardé pour la corriger, que vous perdiez connaissance.
Il faudra alors que quelqu'un vous fasse une injection de glucagon. Ce geste n'est
pas réservé au médecin. Il est toujours sans danger.
Le glucagon se conserve dans le réfrigérateur. Il s'injecte en intramusculaire (dans
la fesse) ou comme l'insuline en sous-cutané. Il agit en 10 à 15 minutes, mais
parfois une deuxième injection est nécessaire. Après avoir été réveillé par le
glucagon il faudra manger des féculents et rechercher la cause de l'hypoglycémie.
APRES L'HYPOGLYCEMIE...
La glycémie peut être élevée (et il peut y avoir un peu d'acétone dans les urines il
ne faut pas en tenir compte).
AYEZ TOUJOURS DES SUCRES SUR VOUS, AU TRAVAIL, DANS VOTRE
VOITURE....
L'hypoglycémie n'est pas grave, seulement désagréable.
Un bon équilibre du diabète s'accompagne souvent de quelques hypoglycémies.

5.2. Que faire en cas d'acétone ou si le diabète "va mal" ?


QUE SIGNIFIE LA PRESENCE D'ACETONE DANS LES URINES ?
L'acétone est un "carburant" que fabrique l'organisme quand il ne peut plus utiliser
le sucre. Il y a donc deux situations dans lesquelles il peut y avoir de l'acétone:
Après une hypoglycémie, ou le matin à jeun :
Dans les urines : Acétone : Traces ou + ; Sucre: 0 ou +
Dans le sang: glycémie variable
Ce n'est pas grave.
Quand il n'y a pas assez d'insuline pour utiliser le sucre :
Dans les urines : Acétone : ++ ou +++ ; Sucre : +++ ou ++++
Dans le sang : glycémie élevée (plutôt supérieure à 2,5 g)
Cela peut devenir grave.
POURQUOI CELA PEUT-IL DEVENIR GRAVE ?
Parce que si vous ne faites rien, en quelques heures la glycémie et l'acétone
peuvent S'élever beaucoup et entraîner une déshydratation importante, le "coma
diabétique", que les médecins appellent acidocétose.
QUAND CELA PEUT-IL ARRIVER?
Oublie d'injection d'insuline, stylo qui ne fonctionne pas,
Forte fièvre,
Vomissements,
Accident,
Opération chirurgicale,
Si vous recevez certains traitements (cortisone...)
ou parfois sans raison apparente.
COMMENT SAVOIR QUE LE DIABETE VA MAL ?

197
D'abord en surveillant régulièrement son diabète :
Par la mesure de la glycémie
Par le contrôle des urines: 1 fois par jour d'habitude, plus souvent dans les
situations précédentes ou si la glycémie est supérieure à 2,5 g.
Plus tard, parce que les signes suivants apparaissent :
Soif intense, urines abondantes
Fatigue anormale, amaigrissement rapide
Nausées, mal au ventre

5.3. Que faire en cas d'acétone dans les urines ?


Y a-t-il du sucre dans les urines ?
Cas N°I : Sucre : 0 ou +. Acétone : traces ou + ;
Contrôlez les urines après avoir fait votre injection et mangé.
Cas N°2 : Sucre = ++ , +++ ou ++++, et glycémie-supérieure à 2 g :
Acétone : traces ou +:
Contrôlez les urines dans 1 ou 2 heures. Augmentez l'insuline le lendemain.
Acétone : ++ ou +++
Faites quelle que soit l'heure (y compris en dehors des heures habituelles
d'injection), un supplément d'insuline rapide (Actrapid, Umuline
Ordinaire, Orgasuline ordinaire) :5U si Ac = ++, 8U si Ac = +++
Prenez une collation, mangez normalement. Buvez beaucoup d'eau.
Contrôlez sang et urine 3 heures après:
Il n'y a plus d'acétone: Continuer quand même à surveiller,
augmenter l'insuline le lendemain.
Il y a encore de l'acétone : Refaire une injection d'insuline rapide et
une collation.
Le lendemain, et tant que dure la situation à l'origine de cet épisode
Augmentez les doses de vos insulines habituelles.
Autres cas:
Contrôlez de nouveau les urines, 1 heure après, si possible avec les bandelettes
Keto-Diabur.
Dans tous les cas :
Ne vous endormez jamais avec de l'acétone.
Si vous ne pouvez plus manger, contactez votre diabétologue
ou l'hôpital.
N'ARRETEZ JAMAIS L'INSULINE

6.Surveillance du traitement
6.1. A court terme
Il faut fréquemment vérifier que l'objectif glycémique est atteint, par
l'autosurveillance glycémique, mais aussi par la mesure au laboratoire des

198
glycémies à jeun et post-prandiales. Le dosage de l'hémoglobine glycosylée permet
d'apprécier objectivement l'équilibre glycémique des 2 derniers mois. Cependant
sa fiabilité dépend beaucoup de la méthode de dosage utilisée, et n'est pas toujours
bonne en pratique de ville. Le dosage des fructosamines est plus facile à réaliser,
mais est de moindre intérêt, car il reflète seulement l'équilibre glycémique des 2
dernières semaines.

6.2. Au long terme


C'est la surveillance des complications et des autres facteurs de risque. Sont
nécessaires tous les ans, chez tous les diabétiques (parfois plus souvent en cas de
complication évolutive) :
Examen ophtalmologique complet avec étude du fond d'oeil (dilaté, avec étude de
la périphérie au verre à 3 miroirs).
Dosage de la créatinine plasmatique et recherche d'albuminurie.
Examen clinique complet (notamment vasculaire et neurologique).

7. Annexes
Annexe I : Comment débuter une insulinothérapie en situation d'urgence
La mise en route d'une insulinothérapie est une situation à laquelle un interne est
souvent confronté. Rien n'est plus simple, et pourtant cela est rarement bien fait,
par méconnaissance du mode d'action de l'insuline.
Quelles sont les situations nécessitant en urgence le début d'une insulinothérapie ?
Quel que soit le chiffre, une hyperglycémie isolée ne mettra jamais en danger la vie
d'un patient dans les heures, ni même dans les jours qui viennent. Seule la
présence d'une acétonurie > ++ (encore faut-il penser à la chercher), et/ou d'une
déshydratation liée à l'hyperglycémie imposent le début rapide d'une
insulinothérapie.
En réanimation, ou avant une anesthésie, il peut être nécessaire de mettre en route
une insulinothérapie chez un patient jusqu'alors non-insulinotraité. Quel est
l'objectif glycérnique ?
Dans la plus part des situations d'urgence un objectif glycérnique "de sécurité" (1,0
g/1 à 2,5 g/1) est suffisant et acceptable pour au moins quelques jours.
Quelle voie choisir ?
Si le patient peut s'alimenter normalement, la voie sous-cutanée est la voie de
choix.
A chaque fois que l'alimentation est impossible ou difficile, la voie veineuse au
pousse-seringue électrique est la plus maniable.
Quel protocole ?
Il est indispensable d'associer un "débit de base" d'insuline dont le but est de
prévenir l'élévation de la glycémie, à des bolus dont le but est de corriger
rapidement les hyperglycémies. Si la glycémie est normale il ne faut pas arrêter
l'insuline, mais au

Annexe II : Ordonnance du patient insulinotraité


Insuline(s) x: flacons (pour seringue) ou cartouches (pour stylo)
Insuline rapide x: 2 flacons en réserve (en cas d'acétone)

199
Seringues à insuline 0,5, 1 ou 2 ml (Microfines + ®) ou Aiguilles pour stylo
(Microfines + ®)
Glucagon : 2 ampoules en réserve (en cas d'acétone) 2 Seringues 5 ml + 2 aiguilles
IM (pour glucagon)
Bandelettes pour glycémie capillaire (selon le lecteur, si pas de lecteur : SM test
20-800®), Bandelettes pour surveillance urinaire (Ketodiastix® ou KetoDiabur®)
Lancettes pour autopiqueur (Microfines +®)
Éventuellement autopiqueur (Glucolet®), Stylo à insuline, lecteur de glycémie
NB 1 : Toujours prescrire un peu plus d'insuline que nécessaire (en cas de perte ou
casse de flacons).
NB 2 : L'insuline et les seringues sont en vente libre en pharmacie. L'ordonnance
n'est utile que pour le remboursement.
NB 3 : Si le patient utilise un stylo, toujours prescrire des flacons et seringues à
garder en réserve au cas où le stylo tombe en panne.

Référence bibliographique :
United kingdom prospective diabetes study 24 : A 6-year, randomized, controlled
trial comparing sulfonylurea, insulin and metformin therapy in patients with newly
diagnosed type 2 diabetes that could not be controlled with diet therapy.
American College of Physicians 1998, 165-175.

Questions à choix multiples


1. L’éducation des diabétiques
A. A eu une importance sur la mortalité des patients similaire à la découverte de
l’insuline.
B. Concerne essentiellement les diabétiques à l’insuline
C. A permis une forte diminution des acidocétoses constituées.
D. Se pratique uniquement dans des centres hospitaliers spécialisés.
2. Les objectifs glycémiques dans le type 1
A. Sont le plus souvent la recherche de glycémies parfaitement normales.
B. Dépendent autant du contexte psycho-socio-culturel que du contexte médical
C. Sont évolutifs dans le temps.
D. Vont de pair avec la prise en charge des autres facteurs de risques vasculaires.

200
LE BILAN ANNUEL DE SURVEILLANCE DU
DIABETIQUE (n° 330 - 331)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation, Hôpital Laennec

LE BILAN ANNUEL DE SURVEILLANCE DU DIABETIQUE (n° 330 - 331)


1. Les complications
1.1 Les complications micro-angiopathiques
1.2. Le bilan macro-angiopathique
2. Les objectifs thérapeutiques
3. Les décisions
4. La prise en charge familiale

La rencontre régulière du diabétique avec son médecin est avant tout l’occasion
d’une discussion sur le vécu du patient, ses principales difficultés et tout autant ses
réussites et ses joies. Elle comprend aussi des aspects « techniques » qui peuvent
schématiquement se répartir en 4 chapitres.
Faire le bilan des complications
Vérifier que les objectifs thérapeutiques sont atteints
Prendre éventuellement de nouvelles décisions
Contribuer au dépistage et à la prévention du risque métabolique familial.

1. Les complications
Souvent voire toujours associées, il faut à chaque fois toutes les rechercher
d’autant qu’elles sont longtemps asymptomatiques.
Ce bilan peut être réalisé en plusieurs fois. L’interrogatoire cherchera des signes
fonctionnels en règle absents. L’examen clinique complet sera lui aussi longtemps
normal en dehors du poids à vérifier régulièrement.

1.1 Les complications micro-angiopathiques


L’examen ophtalmologique n’est pas un simple fond d’oeil restreint à l’examen
de la rétine, même si c’est le plus important. Il comprend aussi l’étude des
milieux de l’oeil (verre à 3 miroirs), le tonus, l’acuité visuelle de loin et de près.
La réponse qu’il faut exiger de voir par écrit sera d’autant plus précise que la
demande l’aura été. L’idéal est d’avoir un correspondant ophtalmologiste
particulièrement habitué à voir des diabétiques. Il pratiquera annuellement
l’examen ophtalmologique complet. L’angiographie, quand tout va bien, est
réalisée tous les 3 à 5 ans et comparée à une angiographie de référence réalisée
dès la découverte du diabète de type 2, car le début n’est jamais connu avec
précision. Pour les diabétiques de type1, l’angiographie ne sera utile qu’au bout
de 5 à 10 ans d’évolution de la maladie.
Le bilan rénal comprend simplement la créatininémie, la micro-albuminurie des

201
24 h et l’examen cytobactériologique des urines. Le ionogramme sanguin est
demandé si le patient prend des médicaments pouvant agir sur les électrolytes
(diurétiques épargneurs potassiques ou non, IEC, inhibiteur des récepteurs de
l’angiotensine II). Le ionogramme urinaire peut-être demandé pour vérifier
l’observance au régime désodé quand cette prescription existe.
Le bilan neurologique repose uniquement sur l’interrogatoire (paresthésies des
membres inférieurs) et l’examen clinique (sensibilité superficielle et profonde,
ROT), il ne faut pratiquer ni vitesse de conduction nerveuse, ni
électromyogramme même si l’examen neurologique est anormal.

1.2. Le bilan macro-angiopathique


La tension artérielle sera mesurée avec le plus grand soin et les chiffres seront
communiqués au patient et commentés. En cas de doute, des enregistrements
de longue durée (MAPA) peuvent être prescrits. Devant une HTA sévère, une
diastolique supérieure à 10 et résistante au traitement, on recherchera une
sténose de l’artère rénale par écho-doppler pulsé.
Les vaisseaux périphériques (cou et membres inférieurs) seront palpés et
auscultés. Dans les deux territoires des signes fonctionnels invitent à pratiquer
un écho-doppler. Cet examen peut-être demandé pour les membres inférieurs
devant un souffle auscultatoire ou l’abolition d’un pouls, mais ceci n’est
probablement pas utile dans le cas des vaisseaux du cou (efficacité des
traitements chirurgicaux peu concluante).
L’électrocardiogramme est pratiqué annuellement. L’électrocardiogramme
d’effort est demandé devant des signes cliniques compatibles avec un angor ou
des anomalies électriques à l’électrocardiogramme de base (au pire ischémie
myocardique silencieuse). La présence d’une albuminurie y compris micro,
traduit une atteinte diffuse du système vasculaire et est aussi une indication à
pratiquer l’ECG d’effort. Certains le recommandent systématiquement par
exemple après 15 ou 20 ans de diabète, ou d’emblée chez les diabétique de
type 2, ou après 5 ans de ménopause, ou encore chez le sujet de plus de 40 ans
reprenant le sport de façon active. C’est aussi en fonction du terrain :
antécédents familiaux vasculaires notamment cardiaques, hyperlipémie,
tabagisme, surcharge pondérale importante qu’on sera plus enclin à demander
cet ECG d’effort systématique. Une épreuve positive invite à pratiquer une
scintigraphie myocardique au thallium dont la positivité précède la prescription
de la coronarographie. En fonction du terrain, certains demandent une
scintigraphie myocardique, même devant l’absence de signe clinique et
d’électrocardiogramme d’effort perturbé, par exemple chez un jeune ou moins
jeune diabétique, tabagique, avec antécédents familiaux vasculaire et
hyperlipémie.

2. Les objectifs thérapeutiques


Quel que soit le type de diabète, les objectifs glycémiques peuvent être la
normoglycémie absolue 0,70 g/l à jeun, 1,20 après les repas (grossesse souhaitée
dans un avenir proche, par exemple) ou à l’inverse une plus grande liberté
thérapeutique et diététique (une personne âgée sans complication). Dans ce
dernier cas, des glycémies inférieures à 2g/l sont tout à fait satisfaisantes,
permettant d’éviter une symptomatologie fonctionnelle invalidante (syndrome
polyuro-polydypsique et asthénie) voire les complications aiguës (coma
acidocétosique ou osmolaire). En outre, pour ces patients, éviter des hypoglycémies
est aussi un objectif thérapeutique. L’hémoglobine glycosylée A1c reflète l’équilibre
cumulé sur 2 à 3 mois. Le dosage doit être effectué par une méthode fiable, de
préférence dans le même laboratoire. A demander 3-4 fois par an au maximum, ce

202
dosage « confirmatoire » ne remplace pas l’analyse régulière des données cliniques
et biologiques (auto-surveillance glycémique).
Les objectifs thérapeutiques concernent aussi le poids et la tension artérielle. La
quasi hypernormalisation (130/70) de cette dernière est presque toujours
indispensable devant des lésions micro-angiopathiques évolutives, en particulier
rénales. Il faut vérifier régulièrement que l’on est ni au delà, ni au dessous des
objectifs, qui peuvent par ailleurs changer en fonction de l’évolution de la maladie.

3. Les décisions
Elles concernent notamment :
L’adaptation voire un changement thérapeutique si les objectifs ne sont pas
atteints.
La nécessité de respecter un minimum de règles diététiques (réduction des
apports en sucres simples et lipides, favoriser les sucres lents) et
l’encouragement à pratiquer une activité physique significative doivent être
systématiquement rappelés et même notés sur l’ordonnance ,comme l’arrêt du
tabac si le problème se pose.
C’est également le moment de demander au patient la liste de tous les
médicaments qu’il prend parfois sans avoir pensé à en parler.
C’est aussi l’occasion d’insister sur l’observance du traitement notamment anti-
hypertenseur que près de la moitié des français abandonnent en raison d’effets
secondaires ou parce qu’ils se croient guéris. Or, les explications simples
augmentent de façon significative l’observance.
L’orientation vers un spécialiste devant des complications qui deviennent
parlantes est nécessaire : cardiologue, néphrologue par exemple dès que la
créatininémie est vers 200 µmol/l, chirurgien vasculaire , neurologue, etc... Au
nombre de spécialistes peut s’ajouter le diabétologue (consultation spécialisée,
hôpital de jour, hôpital de semaine) si le patient n’est pas déjà suivi avec la
collaboration de ce type de structure.

4. La prise en charge familiale


L’angoisse d’avoir un enfant diabétique insulinodépendant quand on est soi-même
atteint de cette maladie est presque constante, bien qu’objectivement 95 % des cas
soient sporadiques. Actuellement, l’état de prédiction est loin d’être formel et il
n’existe pas de prévention ayant fait la preuve de son efficacité. Néanmoins, devant
une demande pressante, il est souhaitable d’orienter la famille vers des structures
spécialisées en choisissant les plus affectueuses.
Qu’il s’agisse d’hérédité ou de facteurs environnementaux, le risque d’avoir des
descendants (ou ascendants, ou collatéraux) diabétiques quand on a un diabète de
type 2 est d’environ 50 %. C’est dire qu’idéalement pour ce type de diabète tous
les enfants, même très jeunes, devraient bénéficier d’une véritable prévention en
informant et aidant à suivre des règles dites hygiéno-diététiques qui dans un pays
comme la France sont simples (qualité de sa gastronomie) et destinées non à
altérer la qualité de vie mais à l’améliorer.

203
URGENCES METABOLIQUES CHEZ LE
DIABETIQUE
TROUBLES DE LA CONSCIENCE CHEZ LE
DIABETIQUE(n° 332)

Anne-Claire Voisin-Bouthillier
Service d'Endocrinologie - Diabétologie - Médecine Interne, Hôpital Boucicaut

1.ACIDOCETOSE
Les points importants sont résumés sur le Tableau I.

1.1. Physiopathologie
Elle résulte d'une carence profonde en Insuline associée à une insulinorésistance
par augmentation des hormones de contre régulation.
Il en résulte :
une HYPERGLYCEMIE (par absence de transport cellulaire du glucose et glyco-
génolyse, néoglucogénèse accrues)
d'où :
hyperosmolalité extra-cellulaire, déshydratation intra-cellulaire et fuite de
K+
glycosurie, diurèse osmotique
deshydratation extra-cellulaire, insuffisance rénale fonctionnelle qui aggrave
l'hyperglycémie (cf Tabl. II).
une CETOSE (l'Insuline inhibe la triglycéride lipase adipocytaire)
d'où :
libération d'acides gras libres et ß oxydation hépatique (cf Fig. 1)
cétogénèse hépatique
cétonurie, perte de Na+ et K+
acidose, hyperventilation secondaire réactionnelle
voire collapsus, dépression respiratoire

1.2. Causes de l'acidocétose diabétique


Le coma acidocétosique peut-être révélateur du diabète (de plus en plus rare en
France). Deux grandes causes à rechercher :
situation intercurrente (maladie) augmentant les besoins en insuline :
grossesse, corticoïdes, infections, chirurgie, infarctus, voire simple angine ;
"négligence" thérapeutique, abandon de la surveillance glycémique capillaire,
arrêt de l'insulinothérapie (volontaire, ou panne de pompe sous-cutanée

204
d'insuline).

Tableau I : ACIDOCETOSE, les points importants.

Elle résulte d'une carence profonde en L'acidocétose peut être révélatrice,


Insuline qui entraîne hyperglycémie, liée à un arrêt de l'insulinothérapie ou à
glycosurie, diurèse osmotique et une affection sévère quelle qu'elle soit,
cétonémie, cétonurie voire acidose en particulier infection.
métabolique.
CLINIQUEMENT, début insidieux avec :
- syndrome cardinal, troubles digestifs, déshydratation.
Phase d'acidocétose sévère avec :
obnubilation voire coma (10 %)
- polypnée (odeur acétonique de l'haleine) : traduisant l'acidose
BIOLOGIE
- diagnostic précoce par bandeletttes (glycémie capillaire et urinaire) ;
- gaz du sang, ionogramme sanguin chiffrent l'acidose avec trou anionique
augmenté
- natrémie variable, déplétion potassique constante ;
- urée, créatinine, hématocrite et protidémie chiffrent la déshydratation
TRAITEMENT PREVENTIF : +++
Dans les urines : TRAITEMENT CURATIF :
glycosurie et cétonurie - réhydratation,
- insulinothérapie,
- traitement des facteurs déclenchants,
Recherche d'un facteur - nursing ++
infectieux déclenchant - surveillance ++

Tableau II MECANISME SCHEMATIQUE DES ANOMALIES METABOLIQUES ET


HYDRO- ELECTROLYTIQUES DE L'ACIDOCETOSE DIABETIQUE

ACIDOSE METABOLIQUE
hyperproduction d'acide ß-hydroxybutyrique et d'acide acétique.
HYPERGLYCEMIE
glycogénolyse ;
hyperproduction endogène du glucose (néoglucogénèse) ;
diminution de la pénétration cellulaire.
DESHYDRATATION GLOBALE (75ml/kg) 10 - 15% poids, 60% IC
polyurie osmotique ;
vomissements

205
PERTE DE SODIUM (10mEq/kg)
élimination de corps cétoniques dans les urines ;
diurèse osmotique ;
vomissements (souvent)
PERTE DE POTASSIUM (5mEq/kg)
Secteur intra-cellulaire Æ secteur extra-cellulaire
glycogénolyse ;
protéolyse ;
hyper-osmolarité extra-cellulaire ;
acidose
Secteur extra-cellulaire Æ urines.
polyurie osmotique ;
corps cétoniques urinaires ;
hyperaldostéronisme secondaire. et pertes digestives
HYPERURICEMIE par diminution d'excrétion rénale

Fig. 1 DEVENIR DES ACIDES GRAS LIBRES A LONGUE CHAINE DANS LE FOIE

1.3. Clinique
Rarement, l'acido-cétose révèle le diabète de type 1 (et ne devrait plus se voir).
Dans 85% des cas elle se rencontre chez le DID, mais dans 15 % des cas chez le
DNID.

1.3.1. Phase initiale


Souvent insidieuse et d'évolution subaiguë, elle associe un syndrome cardinal avec
des troubles digestifs, des troubles visuels, une déshydratation modérée avec perte
de poids. La glycémie capillaire est élevée ou ≥ 2,50 g et la bandelette urinaire
retrouve de l'acétone (AC +++ dans les urines).

1.3.2. Signes du coma acidocétosique sévère


Conscience variable (normale 20 % - obnubilation 70 % - coma 10 %) souvent
résumé à une profonde asthénie ++ ;
Polypnée ; (K ssmaul) dans 90 % cas
Nausées, (80 % des cas) vomissements, douleurs abdominales (40 %) ;
Déshydratation importante intra et extra-cellulaire ;
(Hypothermie) ;
Crampes musculaires ;
Absence de signe neurologique en foyer ;
Cétonurie +++, glycosurie +++, gly capillaire > 13mmol/l ;
Collapsus 25% cas

206
une hyperleucocytose est fréquente en dehors de toute infection.

1.4. Biologie
Les gaz du sang chiffrent l'acidose (pH <7,3), avec des bicarbonates plasmatiques
<20 mM/l et un trou anionique >16. Au ionogramme sanguin, la natrémie est
variable, la kaliémie est variable mais la DEPLETION POTASSIQUE est CONSTANTE.
L'ECG recherche des signes d'hypokaliémie, signes d'ischémie ou d'infarctus.
Par ailleurs, on recherche une augmentation de l'urée et créat (insuf. rénale
fonctionnelle), de l'Ht et des protides (déshydratation extra-cellulaire). Peuvent être
augmentés de façon non spécifiques : les CPK, transaminases, l'amylasémie.
Liste - contrôle de ce qu'il faut faire devant une acidocétose diabétique :
vérification de la glycosurie et cétonurie
observation écrite à l'admission : conscience, pouls, TA, fréquence respiratoire,
poids.
Pose d'une voie veineuse.
Examens sanguins indispensables immédiatement : glycémie,
gazométrie,ionogramme sanguin (Na+, K+), NFS, protides.
Electrocardiogramme
Mesure de la diurèse horaire, sonde vésicale si altération de la conscience.
Vidange de l'estomac par sonde gastrique.
Radiographie du thorax et de l'abdomen.
Examens bactériologiques : ECBU, hémocultures.
Etablissement d'une feuille de surveillance horaire.
Traiter avant les résultats biologiques.

1.5. Diagnostic différentiel


L'abdomen aigu ∅ bandelette urinaire
Les acidoses métaboliques
Les autres comas diabétiques

1.6. Traitement

1.6.1. Curatif : cf tableau III

Tableau III :PROTOCOLE DE TRAITEMENT DE L'ACIDO-CETOSE DIABETIQUE


SEVERE

INSULINOTHERAPIE
à la pompe intra-veineuse ; (SE) de préférence
ou en bolus horaire intra-veineux (10 à 15 Unités/heure)
Lors de la disparition de la cétose, on passe aux injections sous-cutanées toutes les
3-4 heures, en fonction de la glycémie capillaire (après avoir fait une dernière
injection intra-veineuse en même temps que l'injection sous-cutanée pour éviter
tout hiatus). Puis on passe à 2 intermédiaires (NPH)/jour tout en faisant quelques

207
suppléments de rapide pour éviter les pics hyperglycémiques. La baisse de la
glycémie voire les hypoglycémies sont signes d'une mauvaise réanimation (signes
d'insuffisance d'apport glucosé) et ne doivent jamais entrainer une baisse de
l'insulinothérapie.
REHYDRATATION HYDRO-ELECTROLYTIQUE
1 litre en une heure ;
1 litre en deux heures ;
1 litre en trois heures ;
1 litre toutes les 4 heures.
On commence par :
500 cc maximum de bicarbonates iso-osmotiques à 14 °/°° en cas d'acido-
cétose sévère (pH < 7) ou menaçante ;
puis 1 à2 litres de sérum physiologique à 9°/°°
puis du glucosé isotonique avec 4 g de NaCl et 4 g de KCl par litre (en
fonction de la rapidité de la baisse de la glycémie).
Le potassium est en général apporté dès que la kaliémie est "apparemment"
normale (c'est parfois dès le début, rarement plus tard que 3 à 6 l), après contrôle
du ionogramme sanguin et de l'ECG, et en surveillant la diurèse. La dose de
potassium est adaptée en fonction des ionogrammes sanguins toutes les 4 heures.
On ne doit pas, en général, dépasser 2g KCl en une heure. On passe au G 5 %,
voire G 10 % dès que la glycémie devient inférieure à 2 g/l.
SI BESOIN, ANTIBIOTHERAPIE APRES HEMOCULTURES ET PRELEVEMENTS
LOCAUX
Si infection grave ou si terrain débilité, amoxycilline + acide clavulanique
(AUGMENTIN®), en attendant l'isolement du germe permettant une antibiothérapie
spécifique.
La posologie des antibiotiques doit être adaptée en tenant compte de l'insuffisance
rénale fonctionnelle habituelle.
NURSING +++ (cf Tableau II)
HBPM A DOSES PREVENTIVES
LA SURVEILLANCE DU COMA ACIDO-CETOSIQUE REPOSE SUR :
toutes les heures: conscience, fréquence respiratoire, pouls, tension
artérielle, diurèse éventuellement température, cétonurie, glycémie capillaire
toutes les 4 heures : ionogramme sanguin, glycémie, réserve alcaline, ECG.
TRAITEMENT DE LA CAUSE ++
< 5 % de MORTALITE

1.6.2. Préventif : cf tableau IV

Tableau IV LISTE CONTROLE POUR LA SURVEILLANCE ET LE TRAITEMENT DU


COMA DIABETIQUE

Matelas anti-escarre

208
Observation écrite à l'admission (fréquence respiratoire, pli cutané, tension
artérielle, pouls, conscience, pesée sur lit-balance)
Vérification de la glycosurie et de la cétonurie
Pose d'un cathéter transcutané.
Si diurèse spontanée impossible, sonde vésicale ; mesure de la diurèse horaire.
Examens sanguins usuels à l'admission plus de préférence sur sang artériel :
ionogramme avec bicarbonate et pH.
Electrocardiogramme initial.
Retrait des prothèses dentaires.
Vidange de l'estomac par sonde gastrique (mais non aspiration gastrique
continue).
Etablissement de la feuille de surveillance, horaire, clinique et biologique,
notamment glycosurie et cétonurie.
Electrocardiogramme vers la 4ème heure (surveillance de la kaliémie).
Examens sanguins entre la 4ème ou 6ème heure.
Hémocultures si le patient est fébrile.

Tableau V PREVENTION DE L'ACIDOCETOSE

L’Acidocetose :
L'acidocétose persiste heureusement rarement comme circonstance de découverte
du diabète sucré. Elle a quasiment disparu des complications menaçant le
diabétique avéré. Cela est dû à l'enseignement intensif dont bénéficient les patients
qui peuvent enrayer eux-mêmes toute décompensation débutante.
Le traitement de l'acidocétose est donc avant tout préventif
La situation suivante doit être connue de tous les diabétiques.et de tous les
étudiants en médecine
Conduite à tenir devant la présence simultanée de sucre et d'acétone dans les
urines.
Vérifier cette présence (la cétonurie peut avoir disparu)
Faire un supplément d'insuline rapide SC par exemple de 5 unités d'insuline
par croix d'acétone.
Manger le plus normalement possible pour éviter que l'action
hypoglycémiante (négativation de la glycosurie) soit plus rapide que l'action
anti-lipolytique (disparition de l'acétone).
Vérifier 2,3 heures après les urines. Il y a guérison, quelle que soit la
glycosurie, si l'acétone a disparu. Il faut faire un deuxième supplément,
quelle que soit la glycosurie si l'acétone persiste (cf Fig. 2).
Il faut continuer à manger (surtout si la glycosurie a baissé plus vite que
l'acétonurie). On peut faire jusqu'à 3 ou 4 suppléments sans inquiétude.
Parallèlement, impérativement rechercher une cause à cette
décompensation. S'il s'agit d'un maladie intercurrente préoccupante
(infection profonde) il faut débuter les suppléments, mais seul le traitement
de l'infection pourra définitivement apporter la guérison. S'il s'agit de
négligences thérapeutiques accumulées depuis plusieurs semaines avec un

209
retard pris dans l'insulino-thérapie, 1 ou 2 suppléments seront suffisants
pour rétablir l'équilibre.
L'HOSPITALISATION s'impose si la cause qu'il faut rechercher est suceptible
d'être grave, si l'alimentation est impossible (vomissements) ou si
l'acétonurie persiste après les injections d'insuline rapide.

Fig. 2

2.LES HYPOGLYCEMIES
L'effet secondaire principal de l'insulinothérapie est l'hypoglycémie. Dans les
enquêtes sur les revendications des patients, cette hantise arrive au premier plan
alors que les injections, tant redoutées au début de la maladie se placent loin
derrière. Or, sauf circonstance très exceptionnelle, l'hypoglycémie n'est jamais
grave au sens médical. Elle peut être génante psychologiquement ou socialement.
Les lésions cérébrales si craintes par les patients n'ont jamais été mises vraiment
en évidence. La plupart des enquêtes avec étude des fonctions cognitives ne
montrent pas de différences significatives chez les patients faisant des
hypoglycémies par rapport à ceux n'en faisant pas. Le diabétologue doit
constamment rappeler cela aux patients. En effet, l'hyperglycémie qui elle est
complètement asymptomatique ne fait pas peur du tout au patient et pourtant...
Le contrôle strict du diabète on l'a vu expose au discret "sur-risque"
d'hypoglycémie. Le patient doit donc parfaitement en connaître les signes. Le
tableau suivant est un rappel des signes cliniques d'hypoglycémie classés en
symptômes ß-adrénergiques et symptômes liés à la glucopénie cérébrale. Il est
suivi d'une présentation par ordre de fréquence décroissante des symptômes
ressentis par le patient, puis ceux reconnus par l'entourage, très utiles quand le
malade ne s'aperçoit pas qu'il est en hypoglycémie.

2.1. Symptômes de l'hypoglycémie

2.1.1. Classement physiopathogénique (cf Tableau VI)

Tableau VI LES SYMPTOMES DE L’HYPOGLYCEMIE

Symptômes neuro-végétatifs (adrénergiques)


palpitations pâleur,
tremblements, fringales, faim
sueurs palmaires, mydriase,
sueurs diffuses, baillements répétés.
pilo-érection,

Signes de neuroglycopénie
asthénie brusque,
ralentissement intellectuel, troubles de concentrations,

210
troubles de la vue troubles de l’humeur plus souvent à
type de tristesse, de mélancolie ou
(diplopie, perte de la vision des
d’angoisse que de jovialité ou
couleurs, perte de la vision de
d’euphorie,
profondeur du champ, ou au contraire
éloignement des objets, points brillants troubles du comportement voire
devant les yeux, flou visuel...), agitation, violence (agressivité,
égarement, attitudes bizarres..),
paresthésie des extrémités et/ou mouvement anormaux (succion,
grimaces)
péri-buccales,
confusion
troubles de la parole,
coma brutal, hypertonique,
trouble de l’équilibre, incoordination
convulsions, trismus, convulsions, Babinski.

2.1.2. Classification des symptômes :


Ressentis par le malade Perçus par l'entourage
Sueurs Paleur
Tremblements Coma
Trouble de la vue Sueurs
Fatigue Mutisme
Faim Comportement incohérent
Sentiment de fonctionner au ralenti Accès à la nervosité
Vertiges Tremblements
Paresthésies péri-bucale Yeux fixes, "vides"
Nervosité "Ralentissement" de la pensée
Froid Somnolence
Imprécision des gestes Accès de fou rire et pleurs
Sentiment de perte de connaissance Désorientation
imminente
Refus de resucrage
Gêne à l'élocution
Palpitations
Nausées
Céphalées
Angoisse +++ avec "pessimisme
"intense
Somnolence
Vomissements
Soif intense
Sentiment de bien-être
Aucun signe annonciateur

211
2.2. Etiologies
Toute hypoglycémie a une cause qu'il faut absolument retrouver. En effet, c'est la
cause qu'il faut traiter et il ne faut pas automatiquement baisser la dose d'insuline
correspondante. L'immense majorité des hypoglycémies sont liées défaut d'apport
calorique ou a un exercice physique inhabituellement important ou les deux. Toutes
les autres causes sont rares (erreur d'insuline, dose, concentration, lipodystrophies,
prise d'alcool, baisse des besoins en insuline). Les hypoglycémies devraient donc
pouvoir être facilement évitées dans leur ensemble.

2.3. Traitement
A défaut d'avoir pu être prévenue une hypoglycémie doit être traitée. Chaque
diabétique découvre rapidement le sucre d'absorption rapide qui lui convient le
mieux. Cela reste très souvent le classique morceau de sucre qui est le plus
efficace à défaut d'être le plus agréable.
L'entourage d'un diabétique doit systématiquement connaître le maniement du
Glucagon. Il faut surtout motiver cet entourage pour qu'il n'ait pas peur de
pratiquer cette injection. Cette dernière n'est jamais dangereuse, même si le coma
présenté par le patient n'est pas une hypoglycémie. En effet, dans toute les autres
causes de coma qu'il s'agisse d'un traumatisme ou d'un accident vasculaire, le
Glucagon endogène est déjà très élevé et ce n'est pas l'adjonction d'une dose suppl
mentaire qui changera quoi que ce soit. Tout diabétique insulinodépendant trouvé
dans le coma doit donc bénéficier d'une injection de Glucagon. En cas
d'hypoglycémie, le patient se réveille en 5 10 min.

2.4. Prévention
L'éducation des diabétiques est primordiale dans la prévention avec une attention
particulière sur l'adaptation des doses d'insuline et la manipulation des collations
(Tableaux VII, VIII).

2.5. Chez le DNID


Circonstances d'apparition d'une hypoglycémie :
erreur de dose d'un sulfamide, posologie trop forte pour glycémies peu
élevées+++ ;
alcool +++
but suicidaire (intoxication volontaire)
association médicamenteuse potentialisatrice (interférences +++)
(cf Tableau IX)

Tableau VII MESURES PREVENTIVES DE L'HYPOGLYCEMIE LORS D'UN EXERCICE


PHYSIQUE

Diminuer si possible l'insulinothérapie de la période correspondant à l'effort (par


exemple l'insuline rapide le dimanche matin avant de faire du vélo). Parfois
même le diabétique n'injectera que l'insuline retard sans l'insuline rapide.
Contrôler sa glycémie au bout du doigt avant le début de l'exercice physique :
si elle est inférieure à 2g/l, prendre une collation;
si elle est supérieure à 2g/l, ne pas prendre de collation, et commencer
progressivement l'activité physique ("petit footing").

212
Prendre des collations toutes les 1/2 heures environ.
Après l'activité, diminuer les doses d'insuline en se rappelant que l'effet
hypoglycémiant de l'exercice musculaire dure 12 à 24 heures
Contrôler la glycémie au coucher et prendre une collation (si glycémie <1,2 -
1,4 g/l)
Le risque d’hypoglycémie nocturne serait corrélé à la valeur de la glycémie de 22 H
mais en réalité souvent imprévisible.

TABLEAU VIII COLLATIONS APPORTANT 15g DE GLUCIDE

pour un RESUCRAGE pour une PREVENTION


= de l'hypoglycémie
effet hyperglycémiant RAPIDE =
effet hyperglycémiant LENT

3 morceaux de sucre 30g pain + 1 fromage


1 petite bouteille de jus de fruit (= 30g pain + 1 beurre ou 1 margarine
12,5cl)
1 fruit moyen
1/2 verre de soda (= 100ml)
madeleine
2 biscottes seules
3 à 4 sablés ou petits beurres
30g pain seul
1/2 croissant
2 cuillerées à café rases de confiture
4 carrés de chocolat
oumiel
1 mars (ou équivalent)
1 barre céréales
2 fruits secs (pruneaux, figues sèches,...)

Tableau IX

insuffisance rénale ou insuffisance hépato-cellulaire (contre-indications formelles


des sulfamides).
Seuls les sulfamides induisent des hypoglycémies d'autant que leur prise n'a pas
été suivie d'un repas. Les biguanides n'entrainent pas d'hypoglycémie, les
inhibiteurs de l'αglucosidase en théorie non plus (néanmoins : avoir du glucose sur
soi, car ces hypoglycémies ne répondent pas au saccharose).
Le traitement ne doit pas faire appel au Glucagon (qui stimule l'insulinosécrétion)
mais à une recharge glucosée PROLONGEE (demi-vie longue des sulfamides)

213
3. COMA HYPEROSMOLAIRE
Ce coma métabolique représente 5 à 10 % des comas métaboliques des
diabétiques. C'est l'un des plus graves survenant le plus souvent chez les malades
âgés. Il entraîne le décès du patient dans 20 à 40 % des cas, en raison des
complications infectieuses ou thromboemboliques, mais aussi de la survenue d'un
oedème cérébral ou collapsu cardio-vasculaire, induit par un traitement inapproprié.

3.1. Définition
Le coma hyperosmolaire se caractérise par une déshydratation massive.
Les malades sont habituellement comateux ou très somnolents.
Ce syndrome se définit par une glycémie égale ou supérieure à 6 g/l (33mmol/l),
une osmolarité plasmatique supérieure à 350 mosm/l, un pH supérieur ou égal à
7.20 à 7.30, une concentration de bicarbonates plasmatiques supérieure ou
15mmol/l, sans cétonémie significative.

3.2. Physiopathologie

3.2.1 L'équilibre osmotique normal et ses perturbations


Une hyperosmolalié extracellulaire entraîne un transfert d'eau hors des cellules et
une réduction de l'espace intracellulaire.
L'osmolalité plasmatique a d'étroites limites physiologiques entre 280 et 295
mmol/kg.
Pour 280 mmol/kg, la soif n'est pas ressentie, la sécrétion d'ADH est inhibée,
l'osmolarité urinaire est basse. Toute perte d'eau pure ou de liquide hypotonique
entraîne une élévation de l'osmolalité plasmatique, une sécrétion d'ADH et une
élévation de l'osmolalité urinaire. Au delà, la lutte contre l'hyperosmolalité dépend
essentiellement de la soif et de l'ingestion d'eau.
La diurèse osmotique induite par le glucose réalise une perte hypotonique d'eau et
de sels de Na + en particulier. Elle représente le facteur clé des troubles hydro-
électrolytiques du coma hyperosmolaire.

3.2.2. Le coma hyperosmolaire hyperglycémique des diabétiques (cf Fig.


3).
Dans un premier temps, l'hyperglycémie franche entraîne une polyurie osmotique.
Soif et polyurie apparaissent. Dans un second temps, si le patient n'absorbe pas de
boissons, l'hyperglycémie franche se transforme en hyperglycémie sévère avec
hyperosmolalit plasmatique.
Un tableau de déshydratation globale intra et extracellulaire avec réduction du flux
sanguin rénal et une insuffisance rénale fonctionnelle s'installent. En raison de
l'insuffisance rénale, la glycosurie reste limitéée majorant ainsi l'hyperglycémie.
Par ailleurs, l'hyperglycémie provoque une inhibition de l'insulinosécrétion.

3.3. Terrain favorisant et étiologies


Patients de plus de 60 ans
Diabète non insulinodépendant dans 95 % des cas
Méconnaissance antérieure du diabète et prise abusive de boissons sucrées pour
étancher la soif.

214
Tout facteur de déshydratation : diarrhée, vomissements, infection avec
syndrome infectieux bronchopulmonaire essentiellement, brûlures étendues
Une mauvaise accessibilité aux boissons est dans tous les cas un facteur
déclenchant nécessaire (par exemple : un patient perfusé insuffisamment et
"incapable" de boire) : trouble neurologique
Un défaut de surveillance de la diurèse, du bilan hydrique, de la glycémie
capillaire, du ionogramme sanguin (patient hospitalisé)
Les causes associées sont fréquentes
Un traitement inapproprié comme une prescription de diurétiques, de corticoïdes
est souvent un facteur précipitant.

3.4. Tableau Clinique


Le but est insidieux, progressif, sur plusieurs jours, marqué par une polyurie, une
adynamie et les premiers signes de déshydratation. La phase prodromique est plus
longue que dans le coma acido-cétosique.
En raison de l'absence de cétose majeure, la polyurie osmotique a le temps de se
développer.
Fig. 3

Cette installation progressive explique la profondeur de la déshydratation globale.


Donc, à la différence du tableau d'acidocétose diabétique, la déshydratation domine
l'ensemble et il ne s'y associe pas de polypnée, ni d'odeur acétonique de l'haleine,
spécifique de l'acidocétose.
Quelques jours plus tard, le tableau clinique se complète avec :
Des signes neurologiques : troubles de conscience, allant de l'obnubilation, au
coma,
Des signes en foyer (déficit moteur ou sensitif, asymétrie des reflexes, signe
de Babinski, hémianopsie)
Des crises comitiales
Une intense déshydratation globale avec polyurie abondante
La déshydratation intracellulaire est au premier plan, avec une perte de poids,
une sécheresse des muqueuses.Il s'associe bien sûr un tableau de
déshydratation extracellulaire avec persistance du pli cutané, hypotension
artérielle.
La température est variable : soit une hyperthermie en relation avec un
syndrome infectieux, soit une hypothermie d'origine centrale.
Des troubles digestifs : des nausées ou des vomissements associés à des
douleurs abdominales peuvent être observés.
La glycémie capillaire est très élevée, la glycosurie abondante sans cétonurie.
Pas de polypnée d'acidose.

3.5. Tableau Biologique


Il est caractérisé par :
une hyperosmolarité plasmatique.L'osmolarité est nettement supérieure à la
normale. Elle est habituellement calculée à partir de la glycémie et de la
natrémine. La formule la plus utilisée étant :OSMOLARITE PLASMATIQUE = (Na

215
(mmol/l) + 13) X 2 + glycémie (mmol/l).
Une hyperglycémie majeure sans acidose métabolique associée. La glycémie est
supérieure à 8 g/l (44 mmol/l).
Il n'existe pas d'acidose métabolique franche avec un pH sanguin à la limite
inférieure de la normale.
La natrémie peut être normale ou la natrémie mesurée, souvent proche de la
normale, ne reflète pas le stock sodé. Il faut calculer la natrémie corrigée selon
la formule de Katz (la natrémie mesurée doit être corrigée de 1.6 mmol/l pour
chaque gramme par litre de glucose).
Exemple : Glycémie à 11 g/l et Natrémie mesurée 144 mmol/l
Natrémie corrigée = 144 + (11 X 1.6) = 144 + 17.6 = 161.6 mmol/l
La kaliémie peut être normale, élevée ou basse mais dans tous les cas, il existe
une déplétion potassique (ECG+++)
Les bicarbonates sont normaux ou bas mais > à 15 mmol/l
Une insuffisance rénale, fonctionnelle ou organique est habituelle avec une
élévation modérée de la créatinémie plasmatique, de l'hématocrite et de la
protidémie.
On peut observer une augmentation des CPK et amylase.
Les prélèvements (hemocultures, ECBU, NFS) recherchent une infection.

3.6. Pronostic
Le coma hyperosmolaire reste l'une des complications métaboliques aigües les plus
redoutables chez les diabétiques. Le pourcentage de mortalité est actuellement de
40 % avec environ 50 % des décès qui surviennent dans les trois premiers jours.
La sévérité de ce coma métabolique souligne l'importance des mesures préventives
et du diagnostic précoce permettant un traitement adapté.

3.7. Complications
Hypotension et collapsus, oedème cérébral, déplétion potassique, infections,
thromboses artérielles et veineuses, troubles du rythme cardiaque, obstructions
canaliculaires (atelectasies, stomatites, parotidites, kératite voire pancréatite),
rhabdomyolyse, hémoglobinurie, tubulopathie aigüe anurique, séquelles
encéphaliques et psychiques.
20 % de mortalité.

3.8. Traitement

3.8.1. Traitement préventif


Le traitement préventif repose essentiellement sur la connaissance des signes
avant-coureurs et sur la bonne éducation du patient diabétique. Le sujet diabétique
non insulinodépendant de plus de 50 ans doit connaître le risque potentiel
d'accident hyperosmolaire en cas d'affections médicales ou chirurgicales, de prise
intercurrente de médicaments...

3.8.2. Traitement curatif - Tableau X.


Tableau X SCHEMA DE PROTOCOLE DE TRAITEMENT DU COMA HYPEROSMOLAIRE

216
Réhydratation
10 à 12 litres /jour : Elle est nécessaire pour rétablir une volémie normale,
pour la perfusion correcte des tissus et pour améliorer la fonction rénale.
1 litre en 1/2 heure
1 litre en 2 heures
puis 1 litre toutes les trois heures
Sérum physiologique à 9 %0 pour les trois premiers litres. Glucosé à 2.5 % ou
sérum physiologique à 4.5 % ultérieurement. Si hypotension : substituts du
plasma.
G5 % quand glycémie atteint 2.5 g/l. Ne pas avoir peur du Glucosé dans le coma
hyperosmolaire, la décroissance trop rapide de l'hyperglycémie augmente le risque
d'oedème cérébral.
Chlorure de potassium, en général à partir du 3ème litre de perfusion, en fonction
du ionogramme sanguin (sauf si oligo-anurie).
Insulinothérapie
5 à 10 Unités/heure jusqu'à glycémie environ 2.50 g/l, puis 3 ou 4 UI/heure ou
passage SC toutes les 3 ou 4 heures. Puis rapidement 2 NPH/jour.
HBPM à dose préventive
Nursing"
Humidification bronchique - aspiration pharyngée - soins de la cavité buccale.
Protection des conjonctives : collyre antiseptique, sérum physiologique. Matelas
alternating
Recherche et traitement du facteur déclenchant (antibiotiques après les
prélèvements)
Surveillance
Toutes les heures : conscience, pouls, TA, diurèse, glycémie capillaire
Toutes les 4 heures : ionogramme sanguin, ECG, glycémie, osmolalité
Traitement préventif ++
Education de tous les diabétiques surtout les DNID âgés, peu hyperglycémiques,
liste de conseils d'hydratation en particulier si fièvre ou temps chaud.

4. COMA PAR ACIDOSE LACTIQUE


C'est un accident métabolique rare mais gravissisme avec un taux de mortalité de
70 %.
L'acidose lactique évolue en l'absence de traitement vers le coma avec collapsus et
anurie.
Malheureusement, le diagnostic étant souvent méconnu, l'évolution est fatale en
quelques heures ou jours.
L'acidose lactique est le plus souvent la conséquence de l'administration de
traitements médicamenteux (Biguanides essentiellement).
Il s'agit donc d'une complication iatrogène qu'il faut savoir prévenir en respectant
les contre-indications des Biguanides.

217
4.1. Définition
Le coma par acidose lactique se définit par un tableau clinique et métabolique
d'acidose sévère associée une hyperlactatémie.
Il existe une baisse du pH sanguin inférieur à 7.25 en rapport avec une
accumulation plasmatique de lactates artériels supérieure à 6mmol/l.

4.2. Physiopathologie (cf Fig. 4)


Les lactates proviennent du catabolisme anaérobie du glucose.
L'hyperproduction survient en cas de mauvaise oxygénation tissulaire. Un foie
normal est capable de métaboliser de fortes productions périphériques d'acide
lactique, par l'intermédiaire de la néoglucogénèse.
Un déficit de la néoglucogénèse hépatique peut être la conséquence d'une hépatite
aigüe, d'une cirrhose, d'un état de choc, d'une intoxication alcoolique, d'un jeûne
prolongé et de la prise de Biguanides car les Biguanides bloquent la
néoglucogénèse hépatique et rénale.

4.3. Terrain favorisant et étiologies


Il existe un terrain de prédilection :
sujet âgé
diabétiques non insulinodépendants
traités par Biguanides
La metformine, seul Biguanide utilisé en France aujourd'hui, expose au risque
d'acidose lactique 10 fois moins que la phenformine (Insoral*) retirée du
commerce.

Fig. 4 PHYSIOPATHOLOGIE DE L’ACIDOSE LACTIQUE

FOIE SANG MUSCLE


Glucose glucose glucose
pyruvate lactate lactate
lactate
Cycle de Cori Le lactate, produit de la glycolyse anaérobie, est un des
substrats de la néoglucogénèse hépatique.
L ’ a c id o s e lac t iq u e , c o r r e s p o n d a n t à u n t a u x d e lac t a t e s é g a l o u
su périeu r à 5- 6 mmol/ l, con d u it à u n e acidose mét aboliqu e ( p H <
7 , 3 0 ) , q u i à s o n t o u r a g g r a v e l ’ h y p e r la c t a t é m ie . I l e x s it e e n e f f e t u n
v éritab l e c er c l e v i c i eu x ( p r o c e s s u s a u t o - a c c é l é r é ) :
l’acidose entraîne une chute du débit cardiaque et réduction de la perfusion
tissulaire qui aggrave l’hypoxie cellulaire et par voie de conséquence augmente
la production de lactates ;
le choc entraîne une hyper-sécrétion de catécholamines qui stimulent la
glycogénolyse conduisant à une production accrue de lactates ;
l’acidose et le choc entravent la néoglucogénèse hépatique, favorisant
l’accumulation de pyruvate et de lactates. L’acidose entraîne au contraire une
stimulation de la néoglucogénèse rénale, mais celle-ci est probablement réduite
en cas de tubulopathie aiguë secondaire au choc.Les quatres dérivés de la

218
metformine actuellement comercialisés en France sont :Glucophage retard*,
Glucophage*, Glucinan*, Stagid*Les Biguanides bloquent la néoglucogénèse à
partir du lactate avec non utilisation du lactate par le foie et augmentation de la
concentration plasmatique des lactates.Le facteur déclenchant est souvent en
relation avec une hypoperfusion tissulaire (choc, anémie sévère, sepsis,
tumeurs) associée une hypersécrétion de catécholamines dont les causes les
plus fréquentes sont :
Insuffisance cardiaque
Insuffisance respiratoire
Insuffisance rénale qui aggrave l'acidose métabolique et favorise l'accumulation
de Biguanides dans le sang.
nsuffisance hépatique qui entraîne un blocage de la néoglucogénèse avec
diminution de la clairance hépatique du lactate et un défaut d'épuration du
Biguanide
Facteur associé à rechercher : intoxication alcoolique aigüe responsable aussi
d'acidose lactique.

4.4.Tableau Clinique
Les signes peuvent apparaître soit progressivement avec un syndrome douloureux
surtout musculaire, soit brutalement avec d'emblée un tableau d'acidose sévère
associant :
Adynamie
Hypothemie
Deshydratation
Syndrome douloureux
Crampes et douleurs musculaires
douleurs abdominales
douleurs sternothoraciques
Signes neurologiques
agitation anxieuse
obnubilation voire coma
Signes cardio-vasculaires
hypotension artérielle
pincement de la différentielle
au maximum collapsus cardio-vasculaire
troubles du rythme cardique (dissociation auriculoventriculaire, rythme nodal)
Signes respiratoires
hyperpnée pouvant faire évoquer la dyspnée de Kussmaul mais il ne s'y associe
pas d'odeur acétonique de l'haleine.
Pas de déshydratation
Oligo-anurie précoce.

219
4.5. Tableau Biologique
Hyperglycémie constante mais modérée (entre 2.5 et 3.5 g/l) sans glycosurie
majeure
Acidose constante et majeure avec un pH < 7.10Cette acidose est métabolique
comme en témoigne l'abaissement des bicarbonates qui sont inférieurs à 10
mmol/litre.L'hyperkaliémie est par contre inconstante.
Augmentation du trou anionique.L'acide lactique occupe la place des
bicarbonates qui sont diminués/Les anions sont alors très inférieurs aux
cations.Le trou anionique est en général supérieur à 16 mmol/l (N< 5)
Lactatémie augmentée, entre 2 et 5 mmol/l (le taux de lactate normal est de
0.6 à 1 mmol/l)
Pas d'acétonurie.

4.6. Pronostic et complications


Le Pronostic reste sévère avec 70 % de mortalité.
Complications immédiates : collapsus cardio-vasculaire, anurie, bradycardie.
Complications tardives : thromboses artérielles ou veineuses, embolies
pulmonaires.

4.7. Traitement

4.7.1. Traitement préventif


La physiopathologie de l'acidose lactique permet de comprendre les règles de
prescription des Biguanides.
Ils sont formellement contre-indiqués en cas d' :
insuffisance rénale > 150 µmol/l, patente ou potentielle (diurétiques ++)
insuffisance hépatique
insuffisance cardiaque avec coronaropathie sous-jacente, insuffisance
respiratoire
ethylisme chronique
chez le sujet âgé de plus de 70 ans
pendant la grossesse
Il existe d'autres règles de prescription des Biguanides :
Arrêt 3 jours au moins avant toute anesthésie générale, examen radiologique
avec opacification iodée
Arrêt en cas d'affection aigüe telle que infarctus du myocarde, infection sévère,
choc, sepsis

4.7.2. Traitement curatif


LUTTE CONTRE L'ACIDOSE
Il s'agit de l'objectif prioritaire :
Les bicarbonnates ( 14 °/°° - 1 à 2 litres en 2 heures - but : ramener le pH
à 7.2) doivent être administrés prudemment car ils peuvent être responsable
d'une inflation hydrique avec hypervolémie qui n'est pas souhaitable d'autant

220
plus qu'il existe une insuffisance cardiaque et/ou rénale.
L'alcalinisation par THAM (trisaminol) permet une économie dans la charge
osmolaire extracellulaire.
L'épuration extrarénale permet une alcalinisation sans surcharge volémique
et l'élimination des lactates et biguanides (partiellement)
LUTTE CONTRE L'ANOXIE
Oxygénation des tissus avec une ventilation correcte.
Normalisation de la pression artérielle avec un remplissage vasculaire si
besoin, utilisation de drogues vasodilatatrices (nitroprussiate de sodium),
voire de la dobutamine en cas de bas débit cardiaque.
Maintien de la diurèse dans des valeurs normales en utilisant s'il le faut du
furosémide d'autant plus que l'on a fait appel aux bicarbonates de sodium.
AUTRES MESURES THERAPEUTIQUES
Soins de tout patient comateux : Nursing +++
Anticoagulant HBPM préventif
Insulinothérapie à faibles doses à discuter en fontion de l' équilibre
glycémique (l'insuline favorise la glycolyse aérobie)
SURVEILLANCE
Etat hémodynamique
Etat de conscience
Gazométrie artérielle
Lactatémie
Bicarbonates et ionogramme sanguin, glycémie
Créatinémie
L'acidose lactique chez le diabétique doit rester une complication d'exception et son
traitement est avant tout préventif reposant sur le respect strict des contre-
indications des Biguanides.
Le Tableau XI récapitule les points principaux des quatre comas diabétiques.

Tableau XI RECAPITULATIF DES DIFFERENTS COMAS DIABETIQUES

POINTS IMPORTANTS
HYPOGLYCEMIE ACIDOCETOSE HYPEROSMOLAIRE ACIDOSE
LACTIQUE
DID ou DNID DID DNID Douleurs Clinique
brutal ++, troubles
début insidieux, sujet âgé,
neuroglycopénie, digestifs,
symptômes S. cardinal, début progressif, polypnée,
adrénergiques déshydratation oligoanurie,
troubles
collapsus
digestifs
polypnée.

221
< 0,50 g/l > 2,50 g/l > 8 g/l 2,5 - 3,5 g/l Glycémie
+++ +++ +/- Glycosurie
+++ +/- 0 Cétonurie

Normal < 7,20 > 7,20 < 7,10 pH


Normaux < 15 mmol/l > 15 mmol/l < 10 mmol/l Bicarbonates
Normaux Normaux Normaux augmentés Lactates
Non importante majeure Non Déshydratation
Normale variable augmentée variable Na+
Normal déficit déficit potassique variable K+
potassique
Normale très augmentée>350 Normale Osmolalité
augmentée
Normal variable augmenté Trou anionique
augmenté
Resucrage Réhydratation Réhydratation Réanimation Traitement
+++
G30 % ou Insuline Alcalinisation curatif
Glucagon Insuline
Traitement EER
cause Nursing ++
Insuline
Traitement cause
+++ +++ ++ +++ Traitement
préventif
+++ ++ + +/- Fréquence

Questions a choix multiples


1.Une jeune patiente diabétique traitée par insuline vous appelle : elle a de la
fièvre, une angine, et des vomissements.
Vous lui conseillez :
A.D'arrêter son insuline en raison du risque d'hypoglycémie
B.De multiplier les contrôles de glycémie capillaire
C.De faire une bandelette urinaire si sa glycémie est élevée
D.De consulter rapidement si les vomissements persistent
E.De se mettre à jeun pendant 24 heures
2.En cas d'acidocétose :
A.Le pH est abaissé, de même que les bicarbonates
B.Il y a de l'acétone dans les urines sans forcément une glycosurie
C.La cause peut être infectieuse
D.Le traitement nécessite une réhydratation et de l'insuline par voie veineuse
E.On n'apporte jamais de chlorure de potassium dans la perfusion en raison
del'insuffisance rénale fonctionnelle.
3.Dans le coma hyperosmolaire

222
A.La deshydratation est modérée
B.L'acétonurie est souvent massive
C.Le traitement de la cause est essentiel ainsi que la prévention
D.La natrémie peut être très augmentée
E.L'hyperglycémie est modeste
4.Melle A. DID, traitée par deux injections rapides matin, midi et une semi-lente le
soir, s'inscrit à un cours de gymnastique le mercredi après-midi. Vous lui conseillez
ce jour là :
A.d'augmenter son insuline rapide de midi
B.De prendre un déjeuner consistant et d'emmener des collations
C. De diminuer l'insuline du soir
D.De contrôler sa glycémie capillaire avant l'effort physique, ainsi que le soir et
au coucher
E.De moins manger le soir au diner

223
DIABETE et GROSSESSE (n° 165)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation, Hôpital Laennec

DIABETE et GROSSESSE (n° 165)


Points importants
Introduction
1. Les risques
1.1. Risque foetal
1.2. Risque maternel
1.3. Grossesse et rétinopathie
2. Modalité de prise en charge
2.1. Diabétologique
2.2. Obstétricale.
Conclusion
Référence bibliographique
Questions à choix multiples

Points importants
La prise en charge préconceptionnelle est l’élément clé de la réussite d’une
grossesse chez la diabétique.
Elle comporte deux aspects
L’obtention de glycémie parfaite avant la fécondation.
Le bilan et la prise en charge des éventuelles complications
Il persiste un risque de malformations foetales supérieur à celui des femmes
non diabétiques.
La macrosomie, reflet direct de l’hyperglycémie maternelle peut et doit
disparaître.
Le risque maternel est très faible : aggravation transitoire des rétinopathies,
plus forte prévalence d’HTA.
Il faut rechercher un diabète gestationnel essentiellement chez les femmes
obèses, et/ou ayant des antécédents familiaux de DNID, et/ou ayant mis au
monde un enfant macrosome, et/ou ayant eu des anomalies glycémiques
transitoires.
Il est possible dans l’immense majorité des cas d’aboutir à un accouchement à
terme, par les voies naturelles d’un enfant en parfaite santé et sa mère aussi.

224
Introduction
Les diabétologues préconisent une préparation des grossesses chez les femmes
diabétiques, afin de réunir les conditions métaboliques optimales dès la
fécondation, et dans certains cas pour traiter avant la grossesse une complication
menaçante. La notion de "préconception" prend toute sa signification en
diabétologie. En effet, le contrôle rigoureux du diabète réduit considérablement le
risque de malformation foetale attribuable à l'hyperglycémie, ainsi que la fréquence
des avortements spontanés. Parallèlement la contraception n'est pas ici seulement
un droit, mais aussi une nécessité.

1. Les risques

1.1. Risque foetal


Il y a seulement quelques décennies, la mortalité périnatale des enfants de mères
diabétiques était d'au moins 50 % et le diabète insulino-dépendant était une
contre-indication formelle à la grossesse. Cette mortalité est maintenant inférieure
à 3 % dans les équipes expérimentées, contre environ 1,5 % dans la population
non diabétique. La maladie des membranes hyalines a pratiquement disparu, les
femmes diabétiques accouchant très près du terme. La prématurité, induite ou
spontanée, est un peu plus importante que dans la population non diabétique.
Au niveau des malformations foetales, le passif reste encore lourd avec environ 6
% de malformations chez l'enfant de mère diabétique, soit le double de la
population générale. Les malformations dites majeures sont plusieurs fois plus
fréquentes chez les diabétiques et responsables de la mortalité périnatale ou de
handicaps lourds et définitifs. Le risque est multiplié par 4 pour les malformations
cardiaques, par 6 pour les malformations rénales et plus encore pour les
malformations du système nerveux central.
Connaître précisément la cause de ces malformations aboutit à une prévention
efficace. L'expérimentation animale et les constatations cliniques incriminent
comme responsable principal l'hyperglycémie des premières semaines de la vie
foetale. Les troubles de l'organogénèse, qui aboutissent à ces malformations, ont
lieu dans les 6 à 8 premières semaines de la grossesse. C'est donc avant même la
fécondation que la prévention doit porter. L'hémoglobine glycosylée, bien dosée,
est un reflet fiable du contrôle glycémique des 2 mois précédent sa détermination :
elle est très significativement plus élevée pendant les premiers mois de la
grossesse des femmes donnant ultérieurement naissance à des enfants victimes de
malformations. Inversement, ce taux de malformation baisse significativement chez
les femmes bénéficiant d'un contrôle périconceptionnel excellent du diabète.
La macrosomie, définie par un poids de naissance supérieur au 90ème percentile
d'une courbe de croissance, est dépendante elle aussi de l'hyperglycémie
chronique, mais tout au cours de la grossesse. Le glucose de la mère passe
librement chez le foetus (alors qu'il n'y a pas de passage de l'insuline ni dans un
sens ni dans l'autre). Cette hyperglycémie induit un hyperinsulinisme réactionnel du
foetus conduisant à une lipogénèse accrue. La macrosomie peut conduire à des
difficultés lors de l'accouchement, comme la dystocie des épaules source de
souffrance périnatale et de paralysies du plexus brachial.

1.2. Risque maternel


Des glycémies normales sont également nécessaires pour la future maman. La
grossesse et son cortège d'hypersécrétion hormonale sont source
d'insulinorésistance donc d'augmentation des besoins en insuline. Chez la femme
ayant un pancréas normal, l'insulinosécrétion endogène double au cours de la

225
grossesse. Le même phénomène existe chez la diabétique, mais c'est la patiente
qui devra elle-même augmenter les doses pour couvrir les besoins en insuline. La
survenue d'une acido-cétose, conséquence de fautes grossières, souvent fatale
chez le foetus, est devenue rarissime.
L'hypertension artérielle n'est pas une complication spécifique de la grossesse chez
la diabétique, mais elle est beaucoup plus fréquente dans cette population : près de
25 %. L'hypertension peut être chronique, antérieure à la grossesse ou induite par
celle-ci, apparaissant après la 20ème semaine. Cette hypertension peut faire le lit
d'une toxémie menaçant foetus et mère. La prise en charge thérapeutique
notamment médicamenteuse de l'hypertension artérielle gravidique ne bénéficie
pas d'un consensus absolu. Il n'est pas formellement démontré qu'un bon contrôle
glycémique réduise le risque de voir apparaître une hypertension artérielle
gravidique, mais ce contrôle est nécessaire par ailleurs. Il parait logique de vouloir
pendant une grossesse obtenir un bon contrôle tensionel, puisque c'est ce qu'on
désire obtenir de toute façon pour les diabétiques en dehors des grossesses.
La grossesse n'aggrave pas le cours évolutif global de la fonction rénale qui
retourne en cas de modification au niveau antérieur à la grossesse. L'hyperfiltration
initiale de l'état gravidique peut s'accompagner d'une amélioration des fonctions
rénales mesurées par la clairance de la créatinine. Mais en fin de grossesse, la
protéinurie si elle est présente peut se majorer et les fonctions rénales se détériorer
(en l'absence d'insuffisance rénale préalable). En cas d'insuffisance rénale patente
préexistant à la grossesse, par exemple une créatininémie supérieure à 200 µmol/l,
les chances d'avoir un enfant vivant ne sont actuellement que d'environ 50 %,
même si des raretés ont été décrites comme des grossesses à terme chez des
patientes dialysées… Il est prudent d'annoncer au minimum le pronostic foetal à
une diabétique avec insuffisance rénale et plus encore associée à une hypertension,
qui souhaiterait à tout prix un enfant.
L'insuffisance coronarienne préexistante à la grossesse, heureusement
exceptionnelle, est source d'environ 50 % de décès des mères pendant la grossesse
et est probablement la seule contre indication formelle et pour le moment définitive
à la grossesse.
Le risque rétinien de la grossesse est décrit plus spécifiquement dans le paragraphe
suivant.

1.3. Grossesse et rétinopathie


Les femmes diabétiques n'ont pas de risque majeur oculaire pendant la grossesse,
mais il s'agit aussi de la complication la plus susceptible d'évoluer. L'apparition
d'une rétinopathie au cours de la grossesse est un événement rare mais possible
(quelques %). Les rétinopathies non proliférantes ont 50% de probabilité de
s'aggraver pendant la grossesse et c'est pour les formes les plus graves, les
rétinopathies proliférantes, que les risques sont supérieurs encore.
Pour le diabète insulinodépendant, l'âge le plus fréquent où apparait la maladie
étant compris entre 5 et 15 ans et les grossesses se déroulant une à deux
décennies plus tard, le risque statistique d'avoir une rétinopathie diabétique au
moment de la grossesse est important. En cas de rétinopathie patente, sa prise en
charge préalable dans le cadre de la préconception est indispensable. Le suivi
diabétologique rigoureux est dans ce cas plus que jamais nécessaire et l'obtention
d'un bon contrôle glycémique et tensionnel impératif. A défaut, toutes les
investigations (angiographies) et tous les traitements (laser) sont possibles
pendant la grossesse. La plupart des spécialistes pensent que l'aggravation
gravidique éventuelle est réversible peu après la fin de la grossesse. Sur plus de
500 grossesses diabétiques suivies en 10 ans, les auteurs n'ont jamais observé une
seule cécité induite par une grossesse.

226
2. Modalité de prise en charge

2.1. Diabétologique
Le cas le plus simple mais le plus rare est la prise en charge de la diabétique
insulinodépendante connue (1000 à 2000 grossesses par an pour 5 à 700.000
naissances chaque année en France).
La préconception, corollaire d'une contraception efficace, est parfaitement définie
dans ses objectifs, mais ils ne sont pas toujours atteints. La préconception
comporte 2 volets, le dépistage et le traitement éventuel des complications liées au
diabète (rein, yeux, infections urinaires, tension artérielle…) et l'obtention d'un
contrôle glycémique parfait passant quasi obligatoirement par des injections
multiples d'insuline (en règle 3 injections d'insuline rapide pré-prandiales et 2 bases
d'insuline intermédiaire matin et soir). Six contrôles glycémiques quotidiens et de
temps en temps un 7ème, nocturne, sont requis. Les carnets d'autosurveillance
sont analysés avec minutie et l'hémoglobine glycosylée A1c est déterminée tous les
2 mois. Les motivations des futures mamans sont tellement fortes que cet objectif
de perfection peut-être atteint quand la patiente a été confiée à un centre
expérimenté. Trop souvent, cet excellent équilibre n'est obtenu qu'après la
fécondation, ce qui reste très favorable pour limiter le risque de macrosomie, mais
est trop tardif pour la prévention des complications foetales. Pendant la grossesse,
la consultation diabétologique est idéalement bimensuelle. Le dosage de
l'acétonurie, de l'uricémie, l'albuminurie, et l'ECBU sont répétés mensuellement. La
surveillance ophtalmologique est trimestrielle, ou plus, en cas de problèmes. Dans
ce dernier cas, la surveillance est également intensifiée dans les mois qui suivent
l'accouchement pour vérifier le retour à l'état antérieur.
Il existe beaucoup plus de grossesses chez les diabétiques non
insulinodépendantes, car cette pathologie est environ 10 fois plus fréquente que
l'autre type de diabète. Ces patientes sont moins prises en charge que les autres
dans les centres spécialisés. Elles ont également moins fait l'objet d'études
épidémiologiques rigoureuses. Les risques foetaux, maternels, et diabétologiques,
sont peu différents de ceux du diabète de type I. Il est donc tout aussi important
chez ces patientes de normaliser les glycémies avant la conception et tout au long
de la grossesse. Les anti-diabétiques oraux sont plus inefficaces (rappelons que
l'insulinosécrétion doit doubler chez la femme enceinte) que dangereux. Un régime
hypocalorique (mais pas inférieur à 1700 Calories) peut normaliser une
hyperglycémie chronique modérée. Dans un très grand nombre de cas, ceci ne peut
être obtenu qu'avec une insulinothérapie intensifiée et l'insulinorésistance liée à la
grossesse et au surpoids peut conduire à l'emploi de doses extrêmement
importantes d'insuline.
Continuer à s'occuper du pronostic maternel après l'accouchement est une priorité
médicale pour les diabétologues, malheureusement, parmi le pourcentage déjà
faible de femmes diabétiques non insulinodépendantes enceintes bénéficiant d'une
prise en charge spécialisée pendant la grossesse, celles qui continuent à être
suivies par une équipe diabétologique expérimentée sont encore plus réduites.
Le diabète réellement "gestationnel" ne survient que pendant la grossesse,
n'existait pas avant et disparaît après celle-ci. Dans ces conditions, le risque de
malformations n'existe pas si les glycémies étaient normales en début de
grossesse. Le plus souvent, il s'agit d'un diabète non insulinodépendant méconnu
ou oublié que l'on diagnostique, hélas, trop tardivement après plusieurs semaines
de grossesse, quand l'organogenèse est déjà terminée. La prise en charge, même si
elle est tardive, est alors du même type que celle décrite précédemment. La non
obtention de glycémies normales conduit en règle à l'insulinothérapie. Il est
évidemment nécessaire d'individualiser cette stratégie. Une glycémie à 1,20 g par
litre, découverte au dernier mois avec des glycémies préalablement normales,

227
même si elle persiste après un régime, ne déclenchera probablement pas une
insulinothérapie, contrairement au même chiffre découvert après un mois de
grossesse chez une patiente ayant des antécédents obstétricaux à type
d'avortements ou de fausse-couches répétées.
La question principale qui se pose ici est certainement de définir qui doit bénéficier
de mesures (répétées) de la glycémie au cours de la grossesse, en sachant que si
idéalement la réponse devrait être : tout le monde, il est irréaliste de pouvoir le
faire sur le plan pratique et/ou économique. Il est nécessaire de doser la glycémie à
jeun et environ 1h30 à 2h après un repas à la première consultation et au delà de
la 26ème SA chez toutes les femmes obèses, les femmes ayant des antécédents
familiaux de diabète, des antécédents d'enfants de poids de naissance élevés pour
le terme, des antécédents d'anomalies glycémiques détectées sous pilule
oestroprogestative, sous corticothérapie et plus encore à l'occasion d'une
grossesse antérieure. La détection d'une glycosurie chez une femme n'ayant pas de
diabète connu, doit immédiatement faire pratiquer des glycémies, même si le
diagnostic le plus probable est un abaissement physiologique du seuil rénal. En cas
d'antécédents de mort in-utéro inexpliquée, de malformations majeures et
d'avortements précoces répétés, le bilan glycémique est indispensable et ce
d'autant plus que l'âge est élevé.

2.2. Obstétricale.
En dehors d'antécédents gynéco-obstétricaux indépendants du diabète, il n'est pas
nécessaire pour l'obstétricien de voir immédiatement une diabétique enceinte. Un
suivi mensuel est ensuite indispensable. Une première échographie sera pratiquée
entre la 8ème et la 12ème semaine d'aménorrhée pour dater avec précision le
terme. Une anomalie foetale éventuelle est systématiquement recherchée par un
échographiste expérimenté vers la 20ème semaine. Une dernière échographie est
pratiquée en fin de grossesse pour tenter notamment de déterminer le poids du
bébé qui reste difficile à apprécier. L'hydramnios est plus fréquent chez la
diabétique, de causes diverses, comme le déséquilibre du diabète. Il ne nécessite
pas de traitement particulier. Les autres préoccupations obstétricales comme
l'accouchement prématuré menaçant sont plus complexes chez la diabétique en
raison de l'effet hyperglycémiant des ß-mimétiques (cétose, puis acidose
nécessitant des doses d'insuline très importantes). Les modalités de la naissance
relèvent de services spécialisés. Le but de l'obstétrique moderne chez la diabétique
est d'aboutir à un accouchement à terme, par les voies naturelles, d'un enfant en
parfaite santé. Ce but est de plus en plus fréquemment atteint dans les centres
spécialisés comportant une collaboration entre l'obstétricien, le néo-natalogiste et le
diabétologue.

Conclusion
La natalité chez le DID est actuellement en France supérieure à 2 enfants/femme
donc plus importante que chez la femme non diabétique (inférieure à 2).
Bien encadrée (préconception, suivi médical, obstétrical et néonatologique) elle se
déroule parfaitement. C'est dans cette population que sont obtenus les meilleurs
contrôles glycémiques.
La prise en charge est beaucoup moins codifiée, moins efficace car moins réalisée
dans le cadre du DNID, situation pourtant beaucoup plus fréquente. La détection
des anomalies glycémiques pendant la grossesse et la prise en charges des
patientes très exposées au risque de DNID sont des domaines ou tout reste à faire.
Globalement les progrès et les résultats obtenus dans le domaine des grossesses
diabétiques sont parmi les acquis les plus brillants de la diabétologie moderne.

228
Référence bibliographique
Diabète et grossesse. J.J. ALTMAN
Mises à jour en Gynécologie et Obstétrique, Michel Tournaire ed.,
Diffusion Vigot-Paris, 1988 : 227-260.

Questions à choix multiples


1. La préconception dans le cadre d’une future grossesse chez une diabétique.
A. Cherche à obtenir des glycémies parfaites.
B. Fait le bilan et la prise en charge des éventuelles complications.
C. A pour but de déconseiller la grossesse chez la diabétique.
D. Débute à l’arrêt de la contraception
2. Il faut rechercher un diabète gestationnel
A. Chez toutes les femmes enceintes
B. Devant des antécédents familiaux des DNID
C. Devant des antécédents de macrosomie
D. Chez les obèses

229
OBESITE DE L’ADULTE (n° 250 - 333)

Nathalie Rich
Diabétologie - Nutrition - Transplantation, Hôpital Laennec

OBESITE DE L’ADULTE (n° 250 - 333)


Abréviations
Points importants
1. Introduction
2. Définitions
2.1. L’obésité.
2.2. En pratique clinique courante
2.3. Le poids idéal théorique (PIT).
2.4. Formes cliniques
2.5. Définition dynamique de l’obésité.
2.6. Remarques
3. Rappels physiologiques
3.1. Le bilan énergétique.
3.2. La théorie du pondérostat.
3.3. Les particularités du tissu adipeux.
4. Epidémiologie de l'obésité commune
5. Facteurs étiopathogeniques de l’obésité commune.
5.1. Le déséquilibre du bilan énergétique
5.2. Les facteurs environnementaux.
5.3. Les facteurs médicamenteux.
5.4. Les facteurs génétiques.
5.5. Les facteurs psychologiques.
5.6. Synthèse des facteurs étiopathogéniques d’intérêt dans l’obésité.
6. Etiologies rares de l’obésité.
6.1. L’obésité monogénique
6.2. Les obésités secondaires
7. Les complications de l’obésité
7.1. Les complications métaboliques
7.2. Les complications cardiovasculaires
7.3. Les complications respiratoires
7.4. Les complications rhumatologiques
7.5. Les complications hépatobiliaires

230
7.6. Les troubles trophiques
7.7. Les complications opératoires et post-opératoires
7.8. Obésité et grossesse
7.9. Obésité et cancers
7.10 Complications psychologiques.
8. Examen clinique
8.1. Interrogatoire
8.2. L’examen clinique.
9. Examens paracliniques
9.1. Examens systématiques
9.2. Autres examens.
9.3. La synthèse
10. Traitement
10.1. La diététique.
10.2. L’exercice physique.
10.3. Les médicaments.
10.4. Prise en charge psychologique
10.5. Les groupes d’obèses : Weight Watchers, TOPS, Silhouette
10.6. Les cures
10.7. La chirurgie
Références bibliographiques :
QUESTIONS A CHOIX MULTIPLES

Abréviations
BMI : body mass index
DEXA: Dual Energy X-ray Absorptiometry
IMC : indice de masse corporelle
MG : masse grasse
MM : masse maigre
MR : métabolisme de repos
PIT : poids idéal théorique
SAS : Syndrome d’apnée du sommeil

Points importants
A comprendre :
obésité commune = maladie multifactorielle
obésité androïde = exposée à des complications métaboliques et cardiovasculaires

231
La prise en charge thérapeutique de l’obésité doit tenir compte
de ses complications et du contexte psychologique voire psychiatrique
La réduction pondérale doit être lentement progressive (rebond)
A retenir :
obésité = excès de masse grasse
IMC, rapport T/H, Syndrome X, Syndrome d’apnée du sommeil
Valeur calorique des nutriments et apports qualitatifs idéaux
Bilan énergétique et composantes de la dépense énergétique

1. Introduction
L’obésité est une maladie de prévalence croissante et source de nombreuses
complications. Elle est de diagnostic le plus souvent évident, mais nécessite d’être
quantifiée. Son traitement qui repose en premier lieu sur la modification des
habitudes alimentaires et souvent sur la restriction alimentaire se solde souvent par
des échecs.

2. Définitions

2.1. L’obésité.
Elle est définie stricto sensu par un excès de masse grasse (MG) corporelle.
Pourcentage de MG corporelle (%)
Homme Femme
Sujet normal 10 à 15% 20 à 25%
Obésité > 15-20% > 25-30%

Toutefois, les méthodes de mesure directe de la MG sont coûteuses et complexes et


rarement disponibles en clinique courante : hydrodensitométrie, mesure de l’eau
totale par dilution isotopique ou chimique, impédancemétrie bio-électrique,
évaluation par résonance magnétique nucléaire (RMN), absorptiométrie
biphotonique (DEXA).
Seule la mesure des plis cutanés à l’aide d’une pince anthropométrique (compas de
Harpenden à pression constante) permet au clinicien une évaluation indirecte et
approximative de l’importance de la MG. Néanmoins, cette mesure est peu précise
et faiblement reproductible chez les sujets obèses (accès difficile aux différentes
régions mesurées, résultats surestimés, surtout en présence d’oedèmes). Elle ne
permet en outre que l’évaluation de la MG sous-cutanée mais pas la quantité de
graisse intra-abdominale.
On considère que le sujet est obèse si :
pli tricipital + pli abdominal + pli scapulaire + pli crural >100 mm.

2.2. En pratique clinique courante


L’obésité est estimée à l’aide d’un indice de référence international. Il s’agit d’un
indice de corpulence qui correspond au rapport du poids sur le carré de la taille
(P/T2 en kg/m2) : l’indice de masse corporelle (IMC) ou indice de Quetelet ou Body

232
Mass Index (BMI) pour les Anglo-Saxons. Sa mesure est aisée (balance et toise) et
reproductible, et sa corrélation avec la MG corporelle est bonne (de l’ordre de 0,8).
IMC
surcharge pondérale > 25 kg/m2 chez l’homme
> 27 kg/m2 chez la femme
obésité > 30 kg/m2
obésité morbide ou massive > 40 kg/m2

2.3. Le poids idéal théorique (PIT).


Enfin, des études statistiques menées par des compagnies d’assurance-vie (en
particulier aux USA) ont amené à définir l’obésité par un excès de poids. Le PIT a
alors été défini comme le poids où le risque morbide est le plus faible. La formule la
plus utilisée pour calculer le PIT était la formule de Lorenz, mais elle est tombée en
désuétude depuis l’utilisation de l’IMC :
Formule de Lorentz :T-100-(T-150/X) (X=2 Chez la femme, X=4 chez
l’homme)
Un sujet est considéré obèse lorsque : Poids > 120% du PIT

2.4. Formes cliniques

2.4.1. Classification morphologique.


En fonction de la répartition du tissu adipeux, on distingue 3 formes
morphologiques d’obésité :
L’obésité gynoïde où l’excès de MG est sous-cutané, prédominant dans la région
cruro-pelvienne. Elle est observée principalement chez la femme.
L’obésité androïde où l’excès de MG est viscéral, intra-abdominal. Elle est plus
fréquente chez l’homme mais s’observe aussi chez la femme.
L’obésité mixte regroupe les caractéristiques des deux précédantes et s’observe le
plus souvent dans les cas d’obésité massive.

2.4.2. Mesure de la répartition des graisses.


Le rapport tour de taille / tour de hanches (T/H).
C’est l’indice de distribution de la MG le plus utilisé en clinique.
Le tour de taille s’exprime en centimètres (cm) et se mesure au niveau de L4. Les
repères anatomiques sont l’ombilic et les crêtes iliaques.
Le tour de hanches (cm) se mesure au niveau des trochanters et là où les fesses
sont les plus proéminentes.
Un sujet est androïde lorsque le rapport T/H > 0,8
Un sujet est gynoïde si le rapport T/H < 0,8.
La tomodensitométrie.
Le rapport T/H estime de manière imparfaite la quantité de tissu adipeux viscéral
puisqu’il ne tient pas compte de l’épaisseur du tissu adipeux sous-cutané.
L’estimation de la répartition des graisses peut être effectuée de manière plus

233
précise par la réalisation d’une coupe scannographique en L4. Elle permet de
différencier le tissu adipeux sous-cutané abdominal du tissu adipeux viscéral
(rétropéritonéal, mésentérique et omental) mais cette méthode de mesure reste du
domaine de la recherche.

2.4.3. Intérêt de cette classification.


Il est important de classer l’obésité dans l’une des 3 formes morphologiques car
l’obésité androïde est plus à risque que l’obésité gynoïde au plan des complications
métaboliques et cardiovasculaires (Cf plus loin).
Même en l’absence d’obésité, la répartition préférentielle viscérale (intra-
abdominale) du tissu adipeux qui est déterminée génétiquement, joue un rôle
important sur le risque de survenue d’anomalies métaboliques et de maladies
cardiovsculaires (Cf plus loin).

2.5. Définition dynamique de l’obésité.


L’obésité évolue en deux phases. La phase de constitution (dynamique) témoigne
d’un bilan énergétique positif ; la phase de maintien (statique) résulte d’un nouvel
équilibre énergétique.

2.6. Remarques
Ces définitions de l’obésité ne servent que de base de référence. Elles sont fondées
sur la notion de risque lié au surpoids. Toutefois, elles ne tiennent pas compte
d’autres éléments qui jouent un rôle pronostic très important tels que l’âge de
survenue et l’ancienneté de l’obésité qu’il faudra préciser.

3. Rappels physiologiques

3.1. Le bilan énergétique.


Les réserves énergétiques sont constituées par la MG. Le bilan énergétique
correspond à l’énergie stockée par l’organisme :
Energie stockée (MG) = énergie ingérée - énergie dépensée
Les dépenses énergétiques comprennent :
le métabolisme de base :
C’est la dépense d’énergie mesurée le matin chez un sujet allongé, à jeun depuis
12 heures dans une ambiance thermique confortable (20°C). Il dépend
principalement de la masse maigre (MM).
Les sujets obèses qui ont une quantité de MG augmentée voient aussi leur MM
majorée. Aussi, leur métabolisme basal est bien souvent supérieur à celui des
sujets normo-pondéraux.
la thermogénèse :
C’est la dépense d’énergie liée à la prise alimentaire. La thermogénèse est donc
principalement postprandiale. Elle dépend de la mise en réserve des nutriments par
différentes voies métaboliques (néoglucogénèse, uréogénèse)
l’activité musculaire. :
C’est la composante la plus variable de la dépense énergétique totale.

234
3.2. La théorie du pondérostat.
Chez l’homme bien portant, il existe une homéostasie pondérale qui permet le
maintien du poids mais surtout des réserves énergétiques (constituées par la MG)
relativement stables. Elle implique un ajustement réciproque spontané de la prise
alimentaire et des dépenses énergétiques par des processus complexes encore mal
élucidés (neuro-hormonaux, métaboliques et comportementaux) de manière à ce
que le bilan énergétique soit nul.
Toutefois, cet état d’équilibre varie d’un sujet à l’autre. En effet, les individus sont
inégaux face à la nourriture et à la dépense d’énergie (facteurs génétiques). En
outre, le poids auquel s’ajuste un sujet varie au cours de la vie, notamment sous
l’influence de l’âge et du statut hormonal gonadique.
La prise de poids et l’obésité résultent d’un bilan énergétique positif (excès des
entrées et/ou insuffisance des dépenses).
La perte de poids résulte d’un bilan énergétique négatif (apports alimentaires
faibles et/ou augmentation des dépenses).
Il a été récemment mis en évidence une nouvelle hormone : la protéine Ob ou
leptine (du grec leptos = mince) qui serait impliquée dans l’homéostasie de la
composition corporelle. Il s’agit d’une protéine codée par le gène ob et sécrétée
spécifiquement par les adipocytes matures de manière proportionnelle à la quantité
de masse adipocytaire. Son site d’action serait le système nerveux central et plus
particulièrement l’hypothalamus où sont exprimés ses récepteurs spécifiques
(protéine Ob-R, codée par le gène db) pour contrôler la prise alimentaire
(diminution) et la dépense énergétique (augmentation).
Les taux plasmatiques de leptine sont bien plus élevés chez les sujets obèses que
chez les sujets normopondérés et sont hautement corrélés à la quantité de MG
corporelle. Cette augmentation de la leptinémie chez les sujets obèses semble
dépendre d’une majoration de sa forme libre circulante et résulter d’une résistance
à la leptine, secondaire à un transport saturable de l’hormone libre circulante à
travers la barrière hémato-encéphalique. De telles données qui expliqueraient la
coexistence obésité-leptinémie élevée ne sont encore que des hypothèses.

3.3. Les particularités du tissu adipeux.


L’hyperplasie adipocytaire :
Augmentation du nombre d’adypocytes. Elle apparaît lors de prises de poids
successives chez l’adulte (obésité massive) ou peut être constitutionnelle (obésité
infantile, pubertaire).
L’hypertrophie adipocytaire :
Augmentation de la taille des adipocytes. On l’observe principalement dans l’obésité
modérée de l’adulte.
L’obésité mixte :
L’accumulation de MG aboutit en premier lieu à une hypertrophie adipocytaire. Au
delà d’un certain volume cellulaire, apparaît une hyperplasie cellulaire.
Le processus d’amaigrissement implique une diminution de la taille des adipocytes
et non une diminution de leur nombre. Ainsi, la perte pondérale se trouve limitée
par le nombre d’adipocytes dans les cas d’obésité hyperplasiques, ce qui rend
pratiquement impossible un retour à un poids normal dans ce dernier cas.

4. Epidémiologie de l'obésité commune


L’obésité est de prévalence croissante, estimée entre 13 à 23% dans la population

235
européenne âgée de 20 à 75 ans et à 26% environ dans la population américaine
appartenant à la même tranche d’âge.
Les facteurs influençant la prévalence de l’obésité habituellement reconnus sont :
L’âge : l’incidence de l’obésité croît avec l’âge
Le sexe : l’obésité a une prédominance féminine
La génération : elle est plus fréquente de nos jours qu’au début du siècle.
L’éthnie : elle est plus fréquente chez les Indiens Pima d’Amérique, aux Philippines,
certains pays d’Afrique Noire.
Le niveau social et culturel : l’obésité est plus fréquente dans les classes
défavorisées des pays industrialisés et dans les classes les plus riches des pays en
voie de développement.

5. Facteurs étiopathogeniques de l’obésité commune.


L’étiopathogénie de l’obésité commune est complexe. En effet, cette maladie est
multifactorielle : elle résulte de l’interaction de multiples facteurs
environnementaux, culturels, socio-économiques, psycho-comportementaux et
héréditaires.

5.1. Le déséquilibre du bilan énergétique

5.1.1. Excès d’apports.


En dehors des erreurs alimentaires les plus courantes (Cf plus loin), il faut
rechercher :

5.1.1.1. L’hyperphagie prandiale.


Elle dépend de facteurs sociaux (convivialité, habitudes familiales, société de
consommation), de facteurs psychologiques (lutte contre l’anxiété, oralité de
compensation après l’arrêt du tabac), de facteurs endogènes (modification des
sensations de faim ou de satiété).

5.1.1.2. Les troubles du comportement alimentaire


Les compulsions alimentaires (“ craving ” des Anglo-Saxons) :
C’est une impulsion soudaine et irrésistible à consommer un aliment donné (notion
de choix) en dehors des heures habituelles de repas. Elle n’est pas déclenchée par
une sensation de faim mais par une envie exagérée de manger. Elle procure un
plaisir initial ; après coup, le sujet peut éprouver un certain degré de culpabilité.
Le grignotage :
c’est un acte automatique répétitif, sans faim, sans envie. Les quantités ingérées
sont souvent faibles.
La boulimie :
L’accès boulimique est caractérisé par des épisodes au cours desquels le sujet,
habituellement seul, consomme sans faim et avec gloutonnerie des quantités
énormes de nourriture, sans autre limite que sa capacité gastrique. N’importe quel
aliment est ingéré (pas de notion de choix). Ces accès surviennent à n’importe
quelle heure du nyctémère. La fin de la crise peut être marquée par des douleurs
abdominales, des vomissements spontanés ou provoqués. Le sujet est conscient du
caractère anormal de ce comportement. L’accès boulimique s’accompagne
d’angoisse et de honte. Il est suivi de sentiments d’impuissance, d’auto-

236
dépréciation et de dépression.
Les prises alimentaires nocturnes (“ night eating syndrom ” des Anglo-Saxons) :
Les sujets se réveillent et se lèvent pour manger sur un mode compulsif ou
boulimique.

5.1.2. Insuffisance des dépenses.


Le métabolisme de repos.
Le métabolisme de repos (MR) est en moyenne plus élevé chez les sujets obèses
que chez les sujets non obèses en raison du fait que l’excès de poids associe excès
de MG et augmentation de la MM. Néanmoins, il existe une héritabilité génétique du
MR. En effet, des sujets dont la composition corporelle en MM et MG est similaire
peuvent avoir un MR plus ou moins élevé. Il a été montré que le fait d’avoir un MR
plutôt bas augmente le risque de devenir obèse.
A noter que la nicotine et la caféine induisent une augmentation des dépenses
énergétiques. Ainsi, la simple interruption du tabagisme peut entraîner une prise
pondérale par diminution des dépenses (20 cigarettes par jour augmentent les
dépenses d’environ 200 Kcal par jour).
La thermogénèse post-prandiale.
Certains sujets pourraient présenter un déficit héréditaire de la thermogénèse post-
prandiale. Mais celui-ci n’interviendrait que pour moins de 10% des causes des
déficits des dépenses.
L’activité physique.
La sédentarité est un facteur d’augmentation du poids. Celle-ci peut être favorisée
par les difficultés de mobilisation secondaires à l’obésité. Il est à noter que le coût
calorique de l’effort musculaire modéré peut être diminué chez certains obèses
(héritabilité génétique).

5.2. Les facteurs environnementaux.


Sédentarité, rythmes des repas, composition de l’alimentation, niveau socio-
économique, stress. Changements de mode de vie ou d’alimentation.

5.3. Les facteurs médicamenteux.


Ce sont des causes fréquentes de prise pondérale, il faut les rechercher
systématiquement :
Insulinothérapie mal équilibrée chez un diabétique (action lipogénique et
antilipolytique), corticothérapie au long cours, psychotropes (antidépresseurs
tricycliques, neuroleptiques), contraception orale (estrogènes et progestatifs).

5.4. Les facteurs génétiques.


L’héritabilité génétique intervient pour 25% dans le déterminisme de l’obésité. En
effet, le génotype semble surtout influencer le MR, la thermogénèse, le coût
calorique de l’effort modéré et la distribution du tissu adipeux (viscérale ou sous-
cutanée).
La susceptibilité génétique à l’obésité n’apparaît le plus
souvent que dans un contexte environnemental favorisant l’obésité.

237
5.5. Les facteurs psychologiques.
Des événements psychologiques peuvent altérer le système neuro-endocrinien de
régulation du poids (agression, dérèglement immunologique, tensions
psychologiques).
En outre, des désordres psychologiques peuvent conduire à l’obésité par le biais
d’une modification du comportement alimentaire. La prise alimentaire est alors
motivée par des besoins émotionnels et psychoaffectifs et non physiologiques.
Ainsi, l’angoisse ou la dépression peuvent provoquer des compulsions alimentaires.
Il peut exister un auto-aggravation de l’obésité liée à des conflits internes ou une
perturbation de la vie relationnelle en rapport avec une intolérance de la société vis
à vis de l’obésité. Intervient alors la notion de bénéfices secondaires

5.6. Synthèse des facteurs étiopathogéniques d’intérêt dans l’obésité.

5.6.1. Les facteurs de prédisposition à l’obésité.


Génétiques et/ou constitutionnels
Antécédents familiaux d’obésité, poids “ normal ” élevé, antécédents personnels de
surpoids dans l’enfance (même si celui-ci a régressé), capacité de thermogénèse
diminuée, hyperréactivité neuro-hormonale au stress (plus fréquente chez les
sujets androïdes).
Environnementaux
Sédentarité, rythmes des repas, composition de l’alimentation, niveau socio-
économique, style de vie.

5.6.2. Les facteurs de déclenchement de l’obésité.


Génétiques et/ou constitutionnels
Changement de statut hormonal (physiologique ou pathologique)
Environnementaux
Stress, changement de mode de vie (familial, professionnel) ou d’alimentation,
troubles du comportement alimentaire, dépression, médicaments.

5.6.3. Les facteurs d’amplification et/ou d’entretien


de l’obésité.
Génétiques et/ou constitutionnels
Hyperplasie du tissu adipeux (dans l’obésité ayant débuté dès l’enfance et l’obésité
massive), hyperinsulinisme.
Environnementaux
Durée et ancienneté de l’obésité, alternances restriction/réplétion, stress, bénéfices
secondaires, réactions de l’entourage, médicaments.

6. Etiologies rares de l’obésité.

6.1. L’obésité monogénique


Elle est exceptionnelle et s’inscrit dans des syndromes malformatifs : Syndrome de
Prader-Willi-Labhart : obésité, petite taille, hypogonadisme primaire, hypotonie,

238
déficit intellectuel (anomalie du chromosome 15 dans 50% des cas), syndromes de
Lawrence-Moon, Biedel-Bardet et plus récemment identifiées : les mutations de la
leptine ou de son récepteur.

6.2. Les obésités secondaires

6.2.1. Les obésités d’origine endocrinienne sont rarement


En cause.
Le syndrome de Cushing :
il entraîne en réalité une modification de la répartition des graisses vers la région
facio-tronculaire, mais la prise pondérale reste modérée.
L’hypothyroïdie :
Elle s’associe en réalité à une infiltration cutanéo-muqueuse myxoemémateuse. La
prise de poids reste modérée (5 à 6 kg).
L’insulinome :
On l’évoque devant un tableau clinique et biologique d’hypoglycémie organique, la
prise pondérale peut être massive.
Les étiologies gonadiques ou corticosurrénaliennes :
Castrations, ménopause, hyper-androgénie.

6.2.2. Les obésités hypothalamiques par lésion du noyau ventro-médian


La destruction de ce noyau entraîne une hyperphagie, une diminution des dépenses
énergétiques et de nombreuses anomalies métaboliques et endocriniennes.
Les tumeurs intracraniennes : craniopharyngiome, adénome hypophysaire expansif,
tumeur du plancher du 3e ventricule.
Certains traumatismes craniens.
Les maladies infectieuses : syphilis, encéphalites.

7. Les complications de l’obésité


Elles sont fréquentes, souvent associées, mais pas inéluctables. La plupart d’entre
elles sont à rechercher systématiquement.

7.1. Les complications métaboliques


Troubles de la glycorégulation :
Intolérance au glucose (ITG) voire diabète non-insulinodépendant (diabète de type
2) qui répondent bien au régime.
Dyslipidémies :
Hypertriglycéridémie endogène (type IV), parfois hypercholestérolémie type IIb
avec augmentation des LDL et diminution des HDL. Le profil lipidique du sujet
obèse est donc athérogène. Elles répondent bien au régime.
Hyperuricémie :
Rarement responsable de crise de goutte ou de lithiase urinaire. Elle se majore lors
d’un régime (augmentation du catabolisme azoté) nécessitant un traitement
hypouricémiant préventif.

239
Ces anomalies métaboliques sont l’apanage de l’obésité androïde. Certaines d’entre
elles font partie intégrante du syndrome plurimétabolique de
Vague-Reaven ou syndrome X
Syndrome X : hypertriglycéridémie, augmentation des VLDL, augmentation du LDL-
cholestérol, diminution du HDL-cholestérol, hyperinsulinémie, intolérance au
glucose, augmentation des chiffres tensionnels.
Ces anomalies métaboliques jouent un rôle important dans l’apparition de maladies
cardiovasculaires (HTA, insuffisance coronarienne) et d’un diabète de type 2.

7.2. Les complications cardiovasculaires


HTA :
Elle est fréquente chez le sujet obèse androïde. Son évolution est parallèle à celle
de l’obésité. Elle répond donc bien à la réduction pondérale.
Insuffisance coronarienne (angor, infarctus) :
elle dépend de facteurs hémodynamiques et des anomalies métaboliques
athérogènes retrouvées dans l’obésité androïde (Cf. supra).
Insuffisance cardiaque :
L’insuffisance cardiaque gauche est favorisée par l’HTA et l’insuffisance
coronarienne mais l’obésité androïde peut contribuer à elle seule au développement
d’une IVG par les modifications hémodynamiques qu’elle entraîne. L’insuffisance
cardiaque droite est favorisée quant à elle par la fréquence des affections thrombo-
emboliques chez les sujets massivement obèses, l’insuffisance respiratoire et le
syndrome d’apnée du sommeil (Cf. infra).
Troubles du rythme :
tachycardie et fibrillation ventriculaire. Ils sont souvent secondaires au syndrome
d’apnée du sommeil.

7.3. Les complications respiratoires


Elles sont plus fréquentes dans l’obésité androïde et/ou massive en raison d’une
augmentation de la MG péripharyngée et de la circonférence du cou et d’une
diminution de l’ampliation diaphragmatique.
Les anomalies les plus souvent retrouvées sont :
l’hypoxémie avec normo- ou hypocapnie,
le syndrome d’hypoventilation alvéolaire (hypoxémie et hypercapnie) qui justifie
une prise en charge pneumologique
Le syndrome d’apnée du sommeil (SAS) ou syndrome de PickwickIl associe
somnolence diurne, céphalées matinales, ronflements, troubles psychiques
(diminution de l’efficience intellectuelle, troubles de la mémoire et de
l’attention).Ce syndrome est compliqué d’hypoxémie nocturne, d’hypoventilation
alvéolaire, d’HTA, d’hypertention artérielle pulmonaire, de troubles du rythme
cardiaque avec risques de mort subite. C’est une indication à la ventilation à
pression positive.

7.4. Les complications rhumatologiques


Aggravation des malformations congénitales de la hanche et des genoux.
Aggravation de l’arthrose : coxarthrose, gonarthrose et arthrose lombaire.

240
Troubles de la statique vertébrale responsables de dorsalgies, lombalgies,
radiculalgies.
Nécrose ischémique de la tête fémorale
Tendinites, talalgie plantaire.
Ces complications mécaniques, sources de sédentarité et d’impotence, contribuent
à aggraver l’obésité en limitant les possibilités d’exercice physique.

7.5. Les complications hépatobiliaires


Augmentation de fréquence des lithiases biliaires et stéatose hépatique.

7.6. Les troubles trophiques


Varices, ulcères variqueux, intertrigo, mycoses cutanées, dermites infectieuses
(érythrasma, folliculite), vergetures.

7.7. Les complications opératoires et post-opératoires


La chirurgie de l’obèse est à haut risque de mortalité (+30% par rapport à un sujet
de poids normal). De ce fait, une réduction pondérale est souvent exigée par le
chirurgien et l’anesthésiste avant une intervention non urgente.
Les risques principaux sont :
les troubles ventilatoires per-opératoires
les infections post-opératoires
les phlébites et embolies pulmonaires
les retards de cicatrisation.

7.8. Obésité et grossesse


Les risques de diabète, d’HTA gravidique, de pré-éclampsie, d’infection urinaire et
de thrombophlébite sont significativement accrus chez les femmes enceintes
obèses.

7.9. Obésité et cancers

7.9.1. Chez l’homme, l’obésité est associée à un risque accru de cancer de


la prostate et de cancer colorectal.

7.9.2. Chez la femme, l’obésité est associée à un risque accru de cancers


de l’endomètre, du sein et de l’ovaire.

7.10 Complications psychologiques.


Elles sont liées au retentissement de l’obésité au plan privé, professionnel et social.

8. Examen clinique

8.1. Interrogatoire

8.1.1. Motif de consultation.

241
Il doit être cerné car il peut s’agir d’une demande personnelle motivée, mais aussi
d’une demande favorisée par l’entourage du patient ou par un collègue pour prise
en charge primaire et/ou bilan et/ou dans le cadre d’une complication.
Ces données conditionnent les chances de succès mais aussi le mode de prise en
charge thérapeutique.

8.1.2. Histoire de l’obésité.


Il est nécessaire de préciser : date de début, facteurs déclenchants, d’entretien et
d’aggravation, évolution, le poids maximal atteint, le poids “ de forme ”, les
différentes tentatives de régime, personnelles ou guidées par un médecin ou un
groupe spécialisé (Weight Watchers). Les médicaments pris à cette occasion, la
réponse au régime, les raisons des échecs seront à préciser.
Cet interrogatoire devra être complété par la réalisation d’une courbe d’évolution
pondérale.

8.1.3. Evaluer le profil psychologique.


Cerner la personnalité du patient, la perception qu’il a de son corps, comment il est
perçu par son entourage, si son obésité est source de bénéfices secondaires.
Rechercher un trouble du comportement alimentaire.

8.1.4. Le mode de vie et facteurs de risque.


Activité physique, tabagisme et prise d’alcool à quantifier.

8.1.5. Antécédents personnels


Préciser les maladies métaboliques et les complications liées à l’obésité déjà
connues et prises en charge.
Rechercher l’existence de maladies associées ou d’une situation physiologique qui
contre-indiquent les régimes inférieurs à 1000 Cal/24h : cirrhose, insuffisance
rénale, cardiopathie décompensée, cancer, grossesse, enfant, vieillard.
Documenter l’histoire obstétricale : nombre de grossesse, poids pris au cours des
grossesses, poids après chaque grossesse, poids des enfants à la naissance.
Evaluer l’existence de troubles psychologiques ou psychiatriques qui conditionnent
la prise en charge thérapeutique et les chances de succès.

8.1.6. Antécédents familiaux.


Obésité, diabète, dyslipidémie, maladies cardio-vasculaires.

8.2. L’examen clinique.

8.2.1. Apprécier le degré d’obésité et son type morpho-logique.


Mesurer le poids et la taille pour calculer l’IMC et apprécier ainsi la réalité objective
de la surcharge pondérale, et évaluer la répartition préférentielle du tissu adipeux
(rapport T/H)

8.2.2. L’examen somatique.


L’examen clinique complet, sans oublier la mesure de la tension artérielle, permet
de rechercher des complications et des causes éventuelles d’obésité secondaire (Cf

242
supra).

9. Examens paracliniques

9.1. Examens systématiques

9.1.1. Biologiques
Un dosage de la glycémie à jeun, du cholestérol total, des triglycérides et de
l’uricémie devra être demandé à titre systématique.

9.1.2. Examens complémentaires


Un ECG devra être réalisé systématiquement.

9.2. Autres examens.


Ils seront demandés en fonction des données de l’interrogatoire, de l’examen
clinique et du bilan paraclinique initial.

9.3. La synthèse
L’analyse des données de l’interrogatoire, de l’examen clinique et du bilan
paraclinique permet d’orienter l’objectif thérapeutique tout en prenant en
considération les souhaits et objectifs de chaque individu.
Chaque individu a en effet sa définition personnelle du poids souhaitable. Elle
dépend de nombreux critères subjectifs : se sentir plus à l’aise, améliorer son
apparence physique, rester en bonne santé, améliorer ses capacités physiques ou
son état de santé.

9.3.1. Facteurs influençant l’objectif et le choix thérapeutique


Sévérité du surpoids
Interrogatoire alimentaire
antécédents familiaux
Comportement alimentaire
Distribution du tissu adipeux
Maladies somatiques associées
Age de début
Dépression
circonstances déclenchantes
Echecs antérieurs
Durée d’évolution
Bénéfices secondaires
Phase statique ou dynamique
Tolérance à la frustration.

9.3.2. Les objectifs et choix thérapeutiques.

243
Ils sont à définir en accord avec le patient :
Stabilisation pondérale ou réduction pondérale.
Prise en charge préventive et curative des complications
Prise en charge d’un TCA plutôt que du surpoids.
Prise en charge psychologique ou psychiatrique

10. Traitement

10.1. La diététique.
Elle repose sur les données de l’interrogatoire alimentaire et doit respecter les
habitudes alimentaires et goûts des patients (tolérer les collations s’il y a une
tendance au grignotage).

10.1.1. L’interrogatoire alimentaire


Même s’il est souvent peu fiable, il permet de mettre en évidence les principales
erreurs alimentaires mais aussi les modalités de prise des repas (3 repas +/-
collations ou au contraire saut des repas associé à un grignotage) et l’existence
d’un trouble du comportement alimentaire. Préciser qui fait la cuisine et les
courses.
L’interrogatoire alimentaire peut faire appel à l’analyse d’un carnet alimentaire (le
patient note ses apports alimentaires quotidiens sur un document prévu à cet
effet).
La quantification des apports :
1 g de lipides = 9 Kcal (Cal) 1 g de protides = 4 Cal
1 g de glucides = 4 Cal 1 g d’alcool = 7 Cal

L’appréciation de la qualité des apports :


L’apport souhaitable quotidien est :
lipides : 35%
glucides : 50% dont 1/3 de sucres simples 2/3 de sucres complexes
protides : 15%
Le tout réparti en 3 repas au minimum.
Les erreurs les plus courantes sont :
l’excès d’apports lipidiques (proches de 50% le plus souvent et aux dépens
des glucides)
l’excès d’apports en sucres rapides.
la ration protidique est le plus souvent respectée.
absence de petit déjeuner

10.1.2. La correction des erreurs diététiques qualitatives.


C’est le premier conseil diététique à donner au patient :
Eviter l’alcool et les sucres simples (les fruits sont riches en sucre ! pas plus de 3
fruits par jour et ce, au cours d’un repas), éviter les graisses saturées

244
(athérogènes) et privilégier les graisses poly-insaturées (poissons, huiles de
tournesol, de pépin de raisin) ou mono-insaturées (huile d’olive), indiquer les
aliments contenant des “ graisses cachées ” (viandes rouges, charcuteries,
fromages, aliments frits). Boissons non caloriques abondantes (eau, tisanes, thé,
café, voire boissons light). Utilisation d’édulcorants. Privilégier les sucres complexes
(effet satiétogène important) et les fibres alimentaires (elles retardent l’absorption
intestinale des sucres simples).
Ne jamais sauter de repas (favorise le grignotage).
REMARQUEZ QUE LE REGIME IDEAL EST CELUI PRESCRIT AUX SUJETS
DIABETIQUES.
UN REGIME SANS SEL NE FAIT PAS MAIGRIR, IL N’AGIT QUE SUR LA RETENTION
HYDRO-SODEE

10.1.3. La réduction des apports caloriques


La seule correction des erreurs diététiques au plan qualitatif peut permettre une
stabilisation ou une réduction pondérale. Le régime hypocalorique n’est donc
souvent prescrit qu’en deuxième intention. Il devra correspondre en moyenne à
une réduction calorique d’1/3 des apports alimentaires habituels des patients
Elle doit être raisonnable et adaptée à l’activité physique quotidienne liée
notamment à l’activité professionnelle, au sexe, à l’âge mais aussi et surtout aux
données de l’interrogatoire alimentaire.
Elle ne doit pas être inférieure à 1200 Cal/24h en ambulatoire. Un régime à moins
de 1000 Cal/24h nécessite une hospitalisation.
Une supplémentation vitaminique et minérale est indiquée dès lors qu’un régime
inférieur à 1200 Cal/24h est prescrit.

10.1.4. Objectifs.
Stabilisation pondérale initiale si le patient est en phase pondérale dynamique
ascendante. Réduction pondérale ensuite, et lentement progressive : perte d’au
maximum 2 kg/mois.
Une perte rapide et massive de poids induit, par des phénomènes d’adaptation
métabolique, une résistance ultérieure aux régimes et
un effet rebond dès la reprise d’une alimentation normale.
L’objectif pondéral est à fixer en accord avec le patient et dépend du contexte
psychologique et des complications associées à l’obésité.

10.2. L’exercice physique.


Il permet de préserver le capital musculaire (tout régime induit une fonte
musculaire) et d’augmenter les dépenses énergétiques. Il est indissociable du
régime alimentaire. Il doit être adapté aux capacités physiques et surtout de
mobilisation du patient (arthrose). L’activité physique régulière et modérée est plus
bénéfique que l’activité physique intensive ponctuelle.

10.3. Les médicaments.


Leur utilisation n’est pas recommandée.

10.3.1. Les médicaments efficaces mais toxiques.


Les amphétamines

245
Ils ont une action dopaminergique et bêta-adrénergique, ils sont anorexigènes.
Les effets indésirables sont : insomnie, tachycardie, euphorie, anxiété, psychose et
risque de dépendance.
Les hormones thyroïdiennes.
Elles ont un effet thermogénique en créant un état pathologique d’hyperthyroïdie.
Les conséquences cardiaques sont non négligeables.

10.3.2. Les médicaments inefficaces.


Les diurétiques.
Ils n’agissent que sur la rétention hydrosodée et induisent une hypokaliémie parfois
dangereuse.
La phytothérapie.
Elle n’a aucune efficacité reconnue

10.3.3. La dexfenfluramine (ISOMERIDE).


Cette molécule a été retirée du marché en Septembre 1997

10.4. Prise en charge psychologique


Psychothérapie et psychanalyse
Thérapie familiale ou de couple
Thérapie comportementale

10.5. Les groupes d’obèses : Weight Watchers, TOPS, Silhouette

10.6. Les cures


Elles sont indiquées uniquement dans le cadre d’obésités massives ou compliquées
(complications cardiovasculaires ou orthopédiques) pour passer une période
critique.

10.7. La chirurgie
La lipectomie.
Il s’agit surtout d’une excision de la peau excédentaire à visée purement plastique.
Elle n’est indiquée qu’à l’issue d’une réduction pondérale massive et acquise depuis
plusieurs mois (régions lombosacrées, fessières, brachiales, abdominales).
La liposuccion.
Permet la réduction des excès adipeux localisés. Là aussi, elle n’est indiquée qu’à
l’issue d’une réduction pondérale massive et acquise depuis plusieurs mois.
Les courts-circuits intestinaux.
Ils créent une malabsorption intestinale. Ils induisent de nombreuses complications
aiguës et chroniques, aussi ont-ils été abandonnés.
Les gastroplasties.
Il s’agit d’une réduction du volume gastrique qui limite la prise alimentaire. Son
indication est souvent limitée par le contexte psychique ou psychiatrique.

246
Références bibliographiques :
Les obésités. A. Basdevant, M. Le Barzic, B. Guy-Grand. 1993. Edité par PIL,
France.
Comportement alimentaire : du normal au pathologique. A. Basdevant, M. Le
Barzic, B. Guy-Grand. 1990. Edité par PIL, France.
Leptine et composition corporelle : analyse d’une population de sujets obèses.
N. Rich, Thèse de Doctorat en Médecine,1997.

QUESTIONS A CHOIX MULTIPLES


1. L’indice de masse corporelle
A. Est le rapport de la taille au carré sur le poids
B. Est un indice de corpulence désuet
C. Ne permet pas d’estimer la répartition du tissu adipeux
D. Permet de classer la surcharge pondérale selon son importance
2. L’obésité
A. Est un excès de masse grasse
B. Est le plus souvent d’origine génétique
C. Est associée à une augmentation de la masse maigre
D. Résulte d’une dyslipidémie
3. L’obésité androïde
A. Est une répartition de l’excès de tissu adipeux au niveau intra-abdominal
B. Ne s’observe que chez l’homme
C. Se complique de maladies métaboliques
D. Correspond à un rapport tour de taille/tour de hanches < 0,8
4. Le syndrome X associe
A. Hyperuricémie
B. Hypertriglycéridémie
C. Dyslipidémie de type IV
D. Augmentation des chiffres tensionnels
5. Le syndrome d’apnée du sommeil
A. Est plus fréquent dans l’obésité androïde
B. Se manifeste par des ronflements
C. Expose au risque d’arythmie cardiaque
D; Expose au risque de mort subite
6. LeS facteurs qui influencent la prévalence de l’obésité sont :
A. L’âge
B. Les antécédents familiaux d’obésité
C. Le fait d’appartenir à une classe sociale défavorisée dans un pays
industrialisé

247
D. Le stress
7. La prescription d’un régime bien équilibré doit comporter :
A. Une restriction sodée
B. Une supplémentation vitaminique dans tous les cas
C. 50% des apports caloriques habituels estimés lors de l’interrogatoire
alimentaire
D. Elle ne doit pas être inférieure à 1200 Cal/j en ambulatoire
8. Quelles sont les données sur les nutriments suivants qui sont fausses ?
A. Un gramme d’alcool apporte 7 Cal
B. Il y a des graisses cachées dans l’alcool
C. Les sucres simples sont plus caloriques que les sucres complexes
D. La ration protidique conseillée est de 15% par jour
9. Les complications de l’obésité sont :
A. L’hypersension artérielle
B. Le diabète de type 1
C. L’intertrigo
D. Le syndrome X chez les obèses gynoïdes
10. L’obésité
A. Est de moins en moins fréquente dans les pays industrialisés
B. Est souvent secondaire à une endocrinopathie
C. Contre-indique toute grossesse
D. Est le plus souvent hyperplasique chez l’enfant
11. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont fausses ?
A. Dans la compulsion alimentaire il existe une notion de choix des aliments
B. L’accès boulimique se solde toujours par des vomissements
C. Une tumeur intra-cranienne peut être responsable d’obésité
D. Les diurétiques facilitent l’amaigrissement.
12. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont vraies ?
A. Les neuroleptiques favorisent la prise pondérale
B. Le syndrome de Cushing induit une redistribution des graisses
C. L’hyperthyroïdie induit une prise pondérale
D. La thermogénèse fait partie intégrante du métabolisme de repos.
13. Les définitions suivantes sont vraies :
A. L’obésité massive correspond à un IMC > 40 kg/m2
B. L’obésité correspond à un pourcentage de MG > 25-30% chez la femme
C. La surcharge pondérale correspond à un IMC > 27 kg/m2 chez l’homme
D. On parle de répartition gynoïde des graisses lorsque le rapport T/H > 0,8
14. L’obésité est plus fréquente :
A. Chez les Indiens Pima d’Amérique

248
B. Chez les femmes ménopausées
C. Chez les sujets ayant une hyperréactivité hormonale au stress
D. Chez les sujets qui ont été obèses dans l’enfance
15. Il faut rechercher chez le sujet obèse androïde :
A. Une maladie coronarienne
B. Une dyslipidémie
C. Un diabète
D. Un syndrome d’apnée du sommeil
16. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont fausses ?
A. L’obésité gynoïde est moins à risque que l’obésité androïde
B. La répartition androïde des graisses n’est à risque que chez les sujets obèses
C. L’hyperphagie prandiale est un trouble du comportement alimentaire
D. Le tabagisme induit une augmentation des dépenses énergétiques

249
OBESITE DE L'ENFANT (n° 250 - 333)
Raja BRAUNER
Service d'Endocrinologie et Croissance
Faculté et Hopital Necker-Enfants Malades

OBESITE DE L'ENFANT (n° 250 - 333)


Abréviations
Les points les plus importants
1. Etiologies
1.1. Causes endocriniennes
1.2. Après lésion et/ou intervention chirurgicale sur la région hypothalamo-
hypophysaire (hyperphagie par lésion des centres hypothalamiques, lésion
responsable d'un hyperinsulinisme)
1.3. Syndromes particuliers
1.4. Surpoids "simple"
2. Complications
3. Traitement
4. Conclusion
Questions à choix multiples

Abréviations
BMI : body mass index
T4: thyroxine
TSH: thyroid stimulating hormone

Les points les plus importants


Le surpoids de l'enfant est dans la majorité des cas de "type simple", c'est-à-
dire non lié à une pathologie.
Le surpoids de l'enfant est très rarement dû à une pathologie endocrinienne.
Cependant celle-ci doit être recherchée systématiquement car elle conduit à un
traitement spécifique.
Devant un surpoids de l'enfant, les éléments qui font rechercher une pathologie
endocrinienne sont: avant tout le ralentissement de la vitesse de croissance
staturale, et la présence d'anomalies à l'examen clinique.
Si le surpoids est important et/ou associé à des anomalies cliniques, les
examens complémentaires de "débrouillage" pour rechercher une pathologie
endocrinienne sont: mesure des taux plasmatiques de T4, TSH, de la cortisolurie
des 24 heures et radiographie de la selle turcique de profil.

250
Le surpoids est défini par un excès de tissu adipeux. Pour la quantifier, on utilise
des courbes de référence comparant le poids à la taille. On parle de surpoids
lorsque le poids se situe au-dessus de +2 déviations standards par rapport à la
moyenne du poids pour la taille. Le niveau de l'excès pondéral est mieux compris
par l'enfant et par sa famille lorsqu'il est exprimé en kg. L'inconvénient de cette
méthode est qu'elle ne tient pas compte de l'âge de l'enfant. Or la corpulence varie
avec l'âge. L'indice de masse corporelle (BMI", poids/taille2) ou indice de Quetelet
est considéré comme un bon indicateur de la masse grasse.

1. Etiologies
Dans l'immense majorité des cas, il s'agit d'un surpoids "simple", c'est-à-dire non
lié à une pathologie. Cependant, certains surpoids sont secondaires à une
pathologie ou font partie d'un syndrome. Dans ces cas, la courbe de croissance
staturale et l'examen clinique montrent le plus souvent des anomalies.

1.1. Causes endocriniennes


Le surpoids est alors dans la majorité des cas associé à un ralentissement de la
vitesse de croissance staturale, ralentissement responsable d'un changement de
couloir de croissance. Trois pathologies endocriniennes peuvent entraîner surpoids
+ ralentissement statural :

1.1.1. Hypothyroïdie acquise


Son diagnostic est fait par la mesure du taux plasmatique de T4. Etant donné que
son étiologie est le plus souvent une thyroïdite, un goître est présent et le taux de
TSH est élevé.

1.1.2. Hypercorticisme
Les éléments cliniques en faveur d'un hypercorticisme sont : douleurs dorsales,
hypertension artérielle, distribution facio-tronculaire de la surcharge pondérale, et
vergetures pourpres.Il est recherché par la mesure de la cortisolurie des 24 heures
(norme <50 µg) au besoin complété par un cycle du cortisol.

1.1.3. Anomalies de la région hypothalamo-hypophysaire


En particulier tumeur de type craniopharyngiome.

1.2. Après lésion et/ou intervention chirurgicale sur la région


hypothalamo-hypophysaire (hyperphagie par lésion des centres
hypothalamiques, lésion responsable d'un hyperinsulinisme)

1.3. Syndromes particuliers


Le syndrome de Willi Prader associe retard mental, hypotonie, déficit statural,
insuffisance gonadique et surpoids.
Le syndrome de Laurence-Moon-Bardet-Biedl associe retard mental, polydactylie,
rétinite pigmentaire, insuffisance gonadique et surpoids.
L'importance de ces troubles, et en particulier du retard mental, dans chacun de
ces deux syndromes, est variable selon les patients.

251
1.4. Surpoids "simple"
La vitesse de croissance staturale est normale ou supérieure à la norme pour l'âge.
L'examen clinique précise la distribution du surpoids, la présence de vergetures et
la tension artérielle. Des anomalies biologiques sont décrites en association avec les
surpoids importants: hyperinsulinisme, augmentation du taux plasmatique d'acides
gras. Ces anomalies disparaissent lorsque le poids redevient normal et leur
recherche systématique n'est pas nécessaire chez l'enfant.
Le rôle relatif dans la constitution du surpoids des facteurs génétiques et d'un
apport alimentaire trop élevé est discuté. Il est en effet difficile de préciser ce qui
revient aux habitudes alimentaires familiales et au facteur génétique. Un des modes
d'intervention de celui-ci dans la constitution du surpoids serait : dans certaines
familles, la consommation énergétique pour la croissance et pour l'entretien serait
diminuée. L'existence d'animaux génétiquement obèses est en faveur du facteur
génétique. Cependant l'excès d'apport alimentaire est à considérer comme le
facteur essentiel sur les éléments suivants : 1) la mesure des ingesta chez les
enfants ayant un surpoids montre qu'ils sont supérieurs à la norme pour l'âge, 2) la
réduction de l'apport alimentaire entraîne une réduction pondérale, 3) un impact
diététique sur l'enfant et sur sa famille est possible, si on considère que l'excès
alimentaire joue un rôle prépondérant par rapport au facteur génétique. De plus,
les enfants ayant un surpoids ont souvent une inactivité relative et, semble-t-il, une
diminution de leur consommation énergétique lorsqu'ils sont actifs.

2. Complications
Les complications du surpoids "simple" sont rares chez l'enfant : hypertension
artérielle, gène cardio-vasculaire et gène respiratoire. Les deux risques sont : 1) les
mauvaises habitudes alimentaires qui conduisent à un surpoids à l'âge adulte, 2) la
mauvaise tolérance psychologique du surpoids. Les moqueries des camarades
conduisent à un repli de l'enfant sur lui-même. Le malaise du corps conduit à une
réduction de l'activité sportive et des activités de groupe.

3. Traitement
Les drogues, en particulier les anorexigènes, ne sont pas utilisées chez l'enfant. Un
soutien psychologique peut être bénéfique: 1) par la résolution d'un problème
responsable de la polyphagie; 2) il peut permettre une acceptation du régime et
une meilleure prise de conscience de l'image du corps. Une prise en charge en
groupe, avec des discussions diététiques, peut être efficace. Encourager l'enfant à
pratiquer le sport qui lui fait plaisir constitue aussi une bonne aide.
L'élément essentiel du traitement est la modification des habitudes alimentaires.
Ses principes sont : 1) réduction de l'apport calorique avec régime écrit et prise en
charge diététique, 2) réduction de la consommation des sucres et des graisses et
suppression des grignotages, 3) repas réguliers et en particulier nécessité d'un petit
déjeûner.

4. Conclusion
Le surpoids de l'enfant est le plus souvent lié à un excès d'apport alimentaire. Il est
très rarement lié à une anomalie endocrinienne mais celle-ci doit être reconnue car
elle nécessite un traitement spécifique. Le maintien d'une vitesse de croissance
staturale normale est contre une pathologie. Le traitement consiste en une prise en
charge diététique, au besoin complétée par une prise en charge psychologique.
Cas clinique - Surpoids de l'enfant

252
M..., âgé de 12 ans est adressé par son médecin traitant pour une prise de poids
rapide, associé à un ralentissement de la vitesse de croissance en taille. En effet,
dans les deux dernières années il a grossi de 15 kg et il a grandi seulement de 4
cm. Parallèlement il se plaint de douleurs dorsales importantes.
Il n'a pas d'antécédent pathologique personnel ou familial notable.
A l'examen clinique, on trouve une surcharge pondérale diffuse, des vergetures
pourpres et une maxima tensionnelle élevée à 150 mm de Hg.

Questions à choix multiples


1. Parmi les hypothèses étiologiques suivantes, quelle est la plus probable ?
A. Surpoids simple
B. Hypothyroïdie
C. Hypercorticisme
D. Déficit en hormone de croissance
E. Syndrome de Willi Prader
2. Parmi les examens complémentaires suivants, lequel (lesquels) demandez-vous
pour confirmer cette étiologie ?
A. Dosage du cholestérol plasmatique
B. Dosage du cortisol dans les urines de 24 heures
C. Dosage des triglycérides
D. Dosage de l'ACTH plasmatique
E. Cycle du cortisol plasmatique
3. Quel(s) examen(s) complémentaire(s) demandez-vous pour préciser le
retentissement général de la pathologie ?
A. Dosage de la glycémie à jeûn et en post-prandial
B. Réflexogramme achilléen
C. Densitométrie osseuse
D. Dosage de la calcémie
E. Dosage de TSH
4. Quel(s) examen(s) va (vont) être déterminants pour la suite de l'enquête
étiologique ?
A. Résultat de l'échocardiogramme
B. Calcémie
C. Taux plasmatique d'ACTH
D. Calciurie
E. Taux de triglycérides

253
ANOREXIE MENTALE (n° 250 - 334)
Philippe Touraine
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker

ANOREXIE MENTALE (n° 250 - 334)


Points importants
1. Diagnostic
1.1.L'anamnèse
1.2.Le terrain
1.3.Examen clinique
2. Conséquences hormonales et métaboliques
2.1. Hormonales
2.2. Métaboliques
3. Prise en charge thérapeutique
3.1. Immédiate
3.2. Le contrat de poids
3.3. Psychothérapie et autres traitements
3.4. Évolution
QUESTIONS À CHOIX MULTIPLES

Points importants
L'anorexie mentale survient le plus fréquemment à l'adolescence et concerne
avant tout les jeunes filles.
Il s'agit d'un trouble du comportement alimentaire multi-factoriel, survenant sur
une personnalité psychiquement prédisposée.
L'amaigrissement et l'aménorrhée constituent les deux stigmates majeurs de ce
tableau.
Le pronostic vital peut être mis en jeu imposant une prise en charge spécialisée.
Le suivi à long terme avec psychothérapie de soutien est nécessaire.

L'anorexie mentale est un trouble du comportement alimentaire caractérisé par une


restriction alimentaire volontaire alors même que le poids est initialement bas. Le
poids du corps atteint est à 15% au-dessous de celui attendu pour l'âge et la taille.
A cet amaigrissement se rajoute un deuxième symptôme majeur dans le cadre de
l'anorexie mentale, qui est l'aménorrhée, et qui constitue souvent le motif de
consultation permettant de faire le diagnostic initial.
L'anorexie touche 0,5 à 1% de la population féminine entre 16 et 25 ans et reste
très rare chez le garçon.

254
1. Diagnostic

1.1.L'anamnèse
permet le plus souvent de reconstituer l'histoire de l'anorexie. Très souvent les
premiers signes apparaissent entre 13 et 18 ans, chez des jeunes filles qui
n'avaient aucun problème apparent. Cependant, le début peut être plus précoce,
voire plus tardif au cours de la vie adulte. La recherche de facteurs déclenchants
est fondamentale : auto-restriction alimentaire en raison d'un constat personnel de
surpoids, parfois favorisée par des remarques de l'entourage; rupture affective,
deuil, expérience sexuelle traumatisante.

1.2.Le terrain
joue aussi un rôle fondamental, à la fois de la patiente et de sa famille.
La jeune fille
Elle est le plus souvent hyperactive guidée par un désir de performance et
montrant des signes d'indifférence à la fatigue, au froid, au sommeil. Tous les
prétextes sont bons pour "dépenser" des calories. Cette hyperactivité motrice se
double d'une hyperactivité intellectuelle, ces jeunes filles étant très
classiquement de "bonnes élèves", motivées par la performance intellectuelle. Cet
investissement professionnel et physique leur permet souvent de ne pas se
confronter aux problèmes inhérents à l'adolescence (découverte d'une féminité,
d'une relation affective). En ce sens, l'indifférence affichée de ces jeunes femmes à
toute expérience sexuelle est parlante. Néanmoins, derrière cette apparente
capacité à assumer, se cache le plus souvent une profonde absence de confiance en
soi, une anxiété voire un syndrome dépressif qu'il conviendra d'apprécier
initialement afin que la prise en charge thérapeutique soit la plus complète et
multidisciplinaire. La relation à la nourriture, mélange de fascination et de rejet est
aussi très ambiguë. Il n'est pas rare que ces jeunes femmes décrivent leur intérêt
pour la cuisine, leurs connaissances de la valeur calorique des aliments, leur plaisir
à préparer des repas pour des amis ou la famille tout en prenant soin de rejeter
leur "consommation" alimentaire pour contrôler leur poids. Ce double
comportement pathologique -relation à la nourriture et hyperactivité- s'associe à
une perception de leur corps qui est tout autant pathologique. L'anorexique ne sera
jamais satisfaite de son corps, qui sera toujours trop gros, voire difforme et
justifiant par là même la poursuite des conduites pathologiques précitées.
L'attitude de l'entourage familial
C’est un élément clé à prendre en compte aussi. En effet, très souvent l'anorexie ne
fait que cristalliser des conflits relationnels existant entre l'anorexique et sa famille,
qui en retour réagit initialement avec passion, ce qui ne fait qu'aggraver la
situation. Très souvent, l'image décrite de la famille est celle où le père est absent
mais surtout en retrait par rapport à la personnalité de la mère qui reporte sur ses
enfants ses fantasmes de réussite auxquels elle a dû elle-même renoncer pour
élever ses enfants, sans pour autant donner l'image d'une réussite de féminité
sexuelle. Il faudra d'emblée chercher à déculpabiliser l'entourage pour leur
permettre une acceptation progressive que le problème de leur fille n'est pas
organique et qu'il nécessitera une mobilisation collective familiale probablement sur
une très longue période.
Enfin, des facteurs socio-culturels
Ils sont sans doute importants comme facteurs déclenchants - l'idéal social du
corps féminin parfait, l'exaltation de la performance professionnelle - en sont
autant d'exemples.

255
1.3.Examen clinique
Trois symptômes dominent donc classiquement le tableau d'anorexie mentale.
L'anorexie
Elle est donc en réalité une conduite volontaire de restriction alimentaire. Les
jeunes filles nient le plus souvent ce comportement initialement mais une fois la
relation de confiance établie avec leur médecin, le reconnaissent volontiers. La peur
de grossir motive cette anorexie et justifie à leurs yeux la consommation
d'anorexigènes voire pour certaines la pratique de "vidange" grâce aux
vomissements provoqués, l'utilisation de laxatifs. Celle de diurétiques est par contre
plus rare, associée plus à une perte d'eau que de poids.
L'amaigrissement
Il peut être spectaculaire mais là encore l'attitude initiale de la patiente est à la
dénégation. Le pannicule adipeux fond révélant une personne squelettique, au
visage émacié. On note une amyotrophie musculaire constante; la peau est sèche,
recouverte parfois d'un fin duvet (lanugo); les ongles sont striés et cassants. On
notera une acrocyanose des extrémités, une hypothermie, parfois une
parotidomégalie témoin de la carence nutritionnelle. La tension artérielle est basse,
associée à une bradycardie, souvent responsables de malaises voire de syncopes.
L'aménorrhée
Elle est constante dans ce contexte, fonctionnelle et donc réversible. Son diagnostic
clinique est confirmé par l'absence de réponse à trois tests séquentiels aux
progestatifs 10 jours par mois, l'absence de menstruations signant la carence
oestrogénique.

2. Conséquences hormonales et métaboliques

2.1. Hormonales
L'aménorrhée est marquée par un profil associant des taux bas de
gonadotrophines, FSH et LH, avec des taux plasmatiques d'estradiol effondrés (<
20 pg/ml). Lors de la récupération, on assiste à une reprise de la pulsatilité de la
GnRH marquée par des taux de FSH supérieurs à ceux de LH.
D'autre part, on note un profil d'hypothyroïdie fonctionnelle avec surtout une T3
basse.
Une résistance à l'hormone de croissance est fréquente, expliquant pourquoi les
taux de GH urinaire sont souvent hauts.
Enfin, on retrouve un hypercortisolisme d'entraînement secondaire au stress induit
par la carence nutritionnelle, avec un FLU de 24 heures haut, mais freinable.

2.2. Métaboliques
Il faut avant tout rechercher des signes de déshydratation avec une élévation de
l'urée sanguine; on notera l'existence éventuelle d'une alcalose hypokaliémique,
témoin des pertes digestives en potassium (vomissements, utilisation des laxatifs);
l'hypercholestérolémie est fréquente, témoin plutôt de l'hypométabolisme
communément observé chez ces patientes et reflet de l'hypothyroïdie
précédemment décrite.

256
3. Prise en charge thérapeutique

3.1. Immédiate
L'urgence peut parfois être vitale lorsque des signes cliniques ou biologiques
témoignent d'une profonde dénutrition et déshydratation. La patiente doit être
hospitalisée, avec monitoring ECG, surtout s'il existe une hypokaliémie.

3.2. Le contrat de poids


Une fois la phase aigüe dépassée, la renutrition constitue l'étape thérapeutique la
plus complexe. Un contrat de poids doit s'établir entre la patiente et son médecin. Il
délimite ainsi un cadre qui permet d'éviter tout conflit ou malentendu ultérieur
entre les diverses parties concernées. L'objectif est le plus souvent que le poids à
atteindre soit 85% du poids idéal de la patiente. Cet objectif ne peut être atteint
qu'en augmentant progressivement la ration calorique : on débute souvent par une
ration de 30 Kcal/kg de poids les premiers jours, en augmentant de 200 à 300 kCal
tous les 3 à 5 jours. A ce contrat s'associe le plus souvent un isolement temporaire
de la patiente vis à vis de sa famille. Cette décision doit être préalablement
expliquée notamment à la famille qui, sinon, se retrouve en situation de grande
culpabilité. Cette mesure d'isolement ne peut être levée que si le contrat de poids
est respecté.

3.3. Psychothérapie et autres traitements


La prise en charge psychothérapeutique s'avère fondamentale, adaptée à chaque
patiente. La prise en charge concomitante de la famille pourra être discutée et le
suivi nécessaire, une fois la patiente sortie du milieu hospitalier.
Les traitements associés, comme les antidépresseurs, pourront être indiqués dans
certains cas.
Sur le plan hormonal, une substitution oestrogénique devra être discutée, pas dans
l'immédiat, la restauration de cycles menstruels étant souvent vécue comme un
retour vers la féminité et par là même déstabilisante. Néanmoins, une telle prise en
charge s'impose à moyen terme dans la mesure où la carence oestrogénique
s'accompagne invariablement d'une déminéralisation osseuse surtout si elle
survient au moment de la construction osseuse, soit classiquement au moment de
l'adolescence.

3.4. Évolution
Elle est difficile à systématiser; néanmoins, la longueur de la prise en charge
explique la fréquence des rechutes. L'anorexie reste une pathologie grave dès lors
que le pronostic vital peut être mis en jeu (5% de décès dans certaines études),
que ce soit par cachexie mais aussi par décompensation d'un syndrome dépressif
sous-jacent avec suicide.
Il ne faut cependant pas sous-estimer que près de 70% des anorexiques récupèrent
tant sur le plan du poids que de l'aménorrhée, mais peu d'entre elles parviennent à
se dégager de leur vision pathologique de leur corps.

QUESTIONS À CHOIX MULTIPLES


1.Donnez les réponses exactes concernant l'anorexie mentale
A. Peut se présenter sous des formes d'expression clinique variables
B. Ne concerne que les jeunes filles

257
C. S'associe toujours à des troubles du cycle menstruel
D. Peut mettre en jeu le pronostic vital
E. Doit être traitée dès le début par anti dépresseurs
2. Donnez les réponses exactes concernant l'anorexie mentale
A. Une hyperthyroïdie fonctionnelle explique en partie l'amaigrissement
B. L'hypercholestérolémie doit être traitée par des fibrates
C. Un taux de FSH supérieur à celui de la LH signe souvent une reprise de
fonctionnement de l'axe gonadotrope
D. Un traitement oestrogénique doit être systématiquement entrepris
E. L'hypokaliémie est liée le plus souvent aux pertes digestives

258
SYNDROME POLYURO-POLYDIPSIQUE
Raja BRAUNER
Service d'Endocrinologie et Croissance, Hopital Necker-Enfants Malades

SYNDROME POLYURO-POLYDIPSIQUE
Abréviations
Les points les plus importants
1. Hormone antidiurétique et régulation de l'eau
1.1. Hormone antidiurétique
1.2. Régulation de l'eau
2. Expression clinique
2.1. Nouveau-né et nourrisson
2.2. Enfant et adulte
3. Diagnostic
3.1. Diagnostic de trouble de concentration des urines
3.2. Diagnostic de pitresso-sensibilité
4. Etiologies et traitement
4.2. DI rénaux ou pitresso-résistants
5. Conduite pratique devant une polyuro-polydipsie
Cas clinique - SYNDROME POLYURO-POLYDIPSIQUE
Questions à choix multiples

Abréviations
AVP: arginine vasopressine
DDAVP: 1-déamino-8-D-arginine
DI: diabète insipide
Osm : osmolalité

Les points les plus importants


Une polyuro-polydipsie fait rechercher une glycosurie. L'absence de glycosurie
fait conclure à une diabète insipide.
Un trouble de concentration des urines peut être dû à une carence en hormone
antidiurétique (origine centrale) ou à une résistance à cette hormone (origine
rénale).
Un diabète insipide central peut être dû à une tumeur intracranienne non visible au
premier examen neuroradiologique. Il est donc nécessaire de répéter cet examen si
la première recherche étiologique est négative.

259
La polyuro-polydipsie peut être de type insipide ou être secondaire à une glycosurie
dans le cadre d'un diabète sucré. L'absence de sucre dans les urines exclut un
diabète sucré à l'origine de la polyurie. Nous n'envisagerons ici que le diabète
insipide.

1. Hormone antidiurétique et régulation de l'eau

1.1. Hormone antidiurétique


Elle est aussi appelée AVP ou vasopressine. Cette dénomination vient du fait que,
chez la majorité des mammifères, l'acide aminé en position 8 est l'arginine. L'AVP
est faite de 9 acides aminés. Elle est synthétisée au niveau des noyaux supra-
optiques et para-ventriculaires de l'hypothalamus. Puis elle est transportée au
niveau du tractus supra-optico-hypophysaire vers la post hypophyse où elle est
stockée. Des modifications de la composition de l'AVP en acides aminés conduisent
à des modifications de son action. Ainsi est fait le DDAVP (desmopressine,
Minirin®) utilisé pour traiter le DI. Les deux modifications conduisent à une
suppression de l'action hypertensive et à une augmentation de la durée d'action de
l'AVP. L'AVP agit sur le métabolisme de l'eau par un effet au niveau du rein : elle
permet la formation du gradient cortico-papillaire et elle rend perméable à l'eau le
tube collecteur.

1.2. Régulation de l'eau


L'osmolalité plasmatique est normalement maintenue stable avec des valeurs
comprises entre 280 et 290 mosm/kg. Cette stabilité est maintenue grâce à un
équilibre entre les entrées d'eau contrôlées par la soif et les sorties d'eau contrôlées
par l'AVP. Ainsi les volumes d'eau ingérée et éliminée varient et l'osmolalité urinaire
varie de 50 à 1300 mosm/kg. Le centre de la soif siège au niveau de
l'hypothalamus. Le contrôle de la soif et celui de la secrétion d'AVP passent par les
mêmes mécanismes. Ils se font par l'intermédiaire des osmo, des baro et des
volorécepteurs. Les osmorécepteurs sont situés dans l'hypothalamus antérieur, les
barorécepteurs dans la crosse de l'aorte et le sinus carotidien et les volorécepteurs
dans la paroi de l'oreillette gauche. L'augmentation de l'osmolalité du milieu
extracellulaire, la diminution de la pression ou du volume du sang entrainent une
augmentation de la secrétion d'AVP et une sensation de soif.

2. Expression clinique

2.1. Nouveau-né et nourrisson


La polyurie est souvent méconnue par l'entourage. Les signes cliniques traduisent
la déshydratation chronique : fièvre inexpliquée, anorexie, constipation, agitation.
La déshydratation chronique entraine un ralentissement de la prise pondérale puis
staturale. Elle expose à des accidents neurologiques.

2.2. Enfant et adulte


Le début de la polyuro-polydipsie est souvent brutal. L'importance de la polyurie
varie selon l'importance du trouble de concentration et selon la quantité de déchets
osmotiques à éliminer, donc selon le régime. Elle entraine des levers nocturnes,
une énurésie chez l'enfant d'âge intermédiaire, une anorexie et parfois des troubles
du comportement.

260
Les signes associés dépendent de l'étiologie du DI : signes d'hypertension
intracranienne ou troubles visuels secondaires à certaines tumeurs, ralentissement
de la vitesse de croissance staturale en cas d'insuffisance anté-hypophysaire
associée à l'insuffisance post-hypophysaire, signes généraux d'une histiocytose ou
d'une sarcoidose, signes rénaux dans certains DI rénaux.

3. Diagnostic
L'absence de sucre dans les urines exclut un diabète sucré à l'origine de la polyurie.
La mesure de la diurèse spontanée des 24 h confirme la polyurie et évalue son
importance. La diurèse quotidienne normale dépend de la quantité d'eau absorbée.
Elle est <0,5 litre avant l'âge de 1 an puis augmente jusqu'autour de 1,5-2 litres.
L'objectif des examens est 1) de montrer qu'il y a un trouble de concentration des
urines, 2) de savoir s'il est sensible à l'AVP.

3.1. Diagnostic de trouble de concentration des urines


L'osmolalité plasmatique doit être comparée à l'osmolalité urinaire sur la miction
concomitante et non sur un échantillon d'urines collecté sur plusieurs heures. La
mesure de la natrémie concomitante confirme le niveau de l'osmolalité
plasmatique. Dans certains cas, l'évaluation en situation basale permet de conclure.
Le plus souvent, une épreuve de restriction hydrique, obligatoirement faite sous
surveillance médicale en hospitalisation, est nécessaire.

Tab. I. - Diagnostic de trouble de concentration des urines

plasma Na mosm/kg Osm urinaire Conclusion Situation


mmol/l mosm/kg Osm
basale >300 >145 <700 tr
concentr.urines
280-290 <145 >800
normal
280-290 <145 <800
non concluant
restriction* idem
hydrique
*arrêter si perte de poids >5%, osm plasmatique >300 ou urinaire >800 mosm/kg,
durée >12h
Si conclusion difficile : doser l'AVP en hyperosmolalité.

3.2. Diagnostic de pitresso-sensibilité


L'administration d'AVP est faite en situation d'hyperosmolalité (basale ou en fin de
restriction hydrique). Une petite dose d'AVP, fonction du poids du patient, est
administrée par voie nasale. Parallèlement et en cas de soif importante, le patient
est autorisé à boire une petite quantité d'eau. Le DI est :
- pitresso-sensible (= central, par carence d'AVP) si l'osmolalité urinaire
mesurée 2 à 4h après l'administration d'AVP augmente de 50% ;
- pitresso-résistant (= rénal, par résistance à l'AVP) si l'osmolalité urinaire
n'augmente pas de manière significative.
La polydipsie primaire pose des problèmes diagnostiques avec le DI central.
Théoriquement, la distinction entre DI et polydipsie primaire est facile sur la

261
capacité à concentrer les urines qui est normale dans la polydipsie primaire.
Cependant, une polyurie prolongée peut perturber la capacité des reins à
concentrer les urines. Une épreuve de restriction hydrique par paliers permet alors
le diagnostic. Les étiologies de la polydipsie primaire sont : 1) polydipsie
psychogène ou potomanie, 2) polydipsie induite par un apport liquidien trop élevé
dès le jeune âge, 3) certaines tumeurs, en particulier des germinomes, qui altèrent
le fonctionnement du centre de la soif.

4. Etiologies et traitement
4.1. DI centraux ou pitresso-sensibles
4.1.1. Etiologies (Tableau II)
Le diagnostic étiologique est le principal problème posé par les DI centraux. En
effet, rapporter un DI à une étiologie est facile lorsqu'il survient après une
intervention chirurgicale sur la région hypothalamo-hypophysaire, après un
traumatisme cranien ou chez un patient ayant une histiocytose connue. Lorsqu'il
parait isolé, un examen neuro-radiologique et une évaluation de la fonction anté-
hypophysaire sont faits de manière systématique.
Tableau II. Etiologies du diabète insipide

Central ou pitresso-sensible
post-chirurgie de la région hypothalamo-hypophysaire, en particulier
craniopharyngiome
tumeurs (30% des DI centraux) en particulier germinome du plancher du
3e ventricule et craniopharyngiome
histiocytose
sarcoidose
séquelles de traumatisme ou de méningite
familial

Rénal ou pitresso-résistant
Isolé, appelé néphrogénique
associé à d'autres signes d'atteintes rénales
uropathies
malformations
néphronophtise
tubulopathie proximale dans le cadre d'un syndrome de Toni-Debré-
Fanconi primitif ou secondaire (en particulier à la cystinose)
acidose tubulaire distale
syndrome de Bartter
hypercalciurie idiopathique.

Lorsque l'examen neuroradiologique (tomodensitométrie ou IRM) montre une


image anormale de la région hypothalamo-hypophysaire, celle-ci fait discuter sa
nature et ses indications thérapeutiques. Lorsque l'examen ne montre pas

262
d'anomalie, le DI peut être soit idiopathique, soit secondaire à une histiocytose ou à
une tumeur non encore visible. Le diagnostic de DI idiopathique doit rester un
diagnostic d'exclusion. En effet, une tumeur du plancher du 3e ventricule, type
germinome, peut devenir visible seulement plusieurs mois, voire années, après le
début du DI.

4.1.2. Traitement
Ses objectifs sont : supprimer les levers nocturnes, permettre une scolarité et une
vie normale. Il est basé sur le DDAVP (Minirin®) en administration par cathéter
nasal (100 µg/ml), en spray nasal ou en comprimés (1 cp à 0,1 et 0,2 mg). C'est
un traitement efficace, simple, sans effet secondaire. La plupart des patients sont
équilibrés par 2 administrations quotidiennes.

4.2. DI rénaux ou pitresso-résistants

4.2.1. Etiologies
DI isolé
Il est appelé néphrogénique. Il se transmet le plus souvent selon le mode récessif,
lié au sexe avec une pénétrance variable chez les filles. Les garçons ont donc
souvent une forme plus sévère que les filles. Les premiers symptomes apparaissent
très souvent dès les premiers jours de vie et chez certains lors de l'arrêt de
l'allaitement maternel lorsque la charge osmotique s'accroit brutalement.
DI associé à d'autres signes d'atteinte rénale
L'atteinte peut porter seulement sur le tubule (troubles de concentration des urines
et hydro-électrolytique) ou sur le tubule et le glomérule (créatininémie et azotémie
augmentées, présence de protéinurie et/ou d'hématurie).

4.2.2. Traitement
Régime pauvre en résidus osmotiques (hyposodé, limité en potassium et en
protides) ; chez le nourrisson, le lait maternel est l'aliment de choix ;
Supplémentation hydrique, pouvant chez le nourrisson nécessiter un gavage
gastrique à débit constant ;
Diurétiques thiazidiques ;
Inhibiteurs de la synthèse des prostaglandines, en particulier l'Indométhacine.

5. Conduite pratique devant une polyuro-polydipsie


Les étapes successives sont :
exclure un diabète sucré par la recherche de glycosurie,
confirmer la polyurie par la mesure de la diurèse des 24h,
affirmer le trouble de concentration des urines par la comparaison des
osmolalités plasmatique et urinaire après restriction hydrique controlée,
préciser s'il est sensible à l'administration d'AVP (DI central) ou résistant (DI
rénal),
traiter.
Les difficultés peuvent venir de :
diagnostic entre origine centrale et origine rénale : le taux plasmatique d'AVP

263
mesuré en fin de restriction hydrique permet de les différencier (bas ou normal
si central, et élevé si rénal)
diagnostic entre DI (polyurie primaire) et potomanie (polydipsie primaire);
l'épreuve de restriction hydrique par paliers permet en principe de les
distinguer. En cas de doute, un examen neuroradiologique permet d'exclure une
tumeur hypothalamo-hypophysaire
la possibilité d'une tumeur intracranienne non visible au premier examen
neuroradiologique ; il est donc nécessaire de répéter cet examen si la recherche
étiologique est négative

Cas clinique - SYNDROME POLYURO-POLYDIPSIQUE


M... âgée de 15 ans est vue pour une polyuro-polydipsie apparue brutalement un
mois auparavant. Elle n'a pas d'antécédent pathologique personnel ou familial
notable. Elle a grandi régulièrement sur la moyenne. Elle est réglée régulièrement
depuis l'âge de 13 ans. Son examen clinique est normal. Sa diurèse est de 8 litres
par 24 heures. La recherche de sucre dans les urines est négative. Une mesure
faite le matin à jeun montre une osmolalité plasmatique élevée à 305 mosm/kg
alors que l'osmolalité urinaire est basse à 250 mosm/kg. L'administration
d'hormone antidiurétique (Minirin®) fait monter l'osmolalité urinaire à 800
mosm/kg.

Questions à choix multiples


1.Quel(s) est(sont) les arguments qui permettent d'affirmer que le diabète insipide
est d'origine centrale ?
A. Taux sanguin normal de créatinine
B. L'administration de Minirin augmente l'osmolalité urinaire
C. L'administration de Minirin réduit de manière importante la diurèse
D. Taux sanguin élevé de créatinine
E. Taux sanguin d'urée normal
2.Le problème qui peut être difficile à résoudre à la première évaluation est :
A. Réduire la diurèse
B. Exclure une origine rénale
C. Trouver l'étiologie du diabète insipide central
D. Exclure un diabète sucré
E. Faire le diagnostic de diabète insipide d'origine centrale
3.Les étiologies suivantes peuvent être responsables de ce diabète insipide
d'origine centrale sauf une :
A. Craniopharyngiome
B. Histiocytose
C. Sarcoidose
D. Néphronophtise
E. Germinome du plancher du 3e ventricule
4.Parmi les propositions concernant le traitement de ce diabète insipide d'origine
centrale, une seule est juste :

264
A. Administration d'antiprostaglandine
B. Administration d'hormone antidiurétique
C. Difficile à équilibrer
D. Nécessité de nombreuses administrations quotidiennes
E. Le plus souvent, il s'agit d'un traitement de courte durée

265
ADENOMES HYPOPHYSAIRES (n° 344)
Philippe Touraine,
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker

ADENOMES HYPOPHYSAIRES (n° 344)


Abréviations
Points importants

1.Adénomes somatotropes (à GH)


1.1. Rappel physiologique
1.2. Clinique de l'acromégalie
1.3. Diagnostic biologique
1.4. Diagnostic tumoral
1.5. Traitement
2. Les adénomes thyréotropes (à TSH)
3. Les adénomes gonadotropes
4. Adénomes corticotropes (cf. chapitre Hypercorticisme)
5. Insuffisance hypophysaire
Références bibliographiques
Questions à choix multiples

Abréviations
GHRH Growth Hormone Releasing Hormone
IGF-1 Insulin-like Growth Factor 1
GH Growth Hormone
TRH Thyrotropin Releasing Hormone
HGPO Hyperglycémie provoquée par voie orale
GnRH Gonadotropin Releasing Hormone (identique à LHR H)

Points importants
La prise en charge diagnostique et thérapeutique des adénomes hypophysaires
dépend à la fois de la taille de l'adénome et de la sécrétion hormonale associée.
Les adénomes à prolactine sont les plus fréquents (cf chapitre propre)
Les adénomes à GH sont diagnostiqués grâce à des signes cliniques très
caractéristiques.
Les adénomes à TSH sont exceptionnels; les adénomes gonadotropes sont le plus

266
souvent non sécrétants.
Un microadénome hypophysaire ne s'accompagne pas d'insuffisancehypophysaire,
ni de compression chiasmatique.
Un macroadénome hypophysaire doit toujours faire rechercher à la fois des signes
de compression chiasmatique et d'insuffisance hypophysaire associée.
Le traitement d'un adénome hypophysaire sera avant tout chirurgical. Il pourra être
médical en cas de microadénome à prolactine ;
il sera toujours médical de première intention en cas de macro-adénome à
prolactine. L'abstention thérapeutique pourra être
parfois préconisée en cas de microadénome non sécrétant.

Les adénomes hypophysaires se développent à partir des cellules de l'anté-


hypophyse et doivent schématiquement être distingués avant tout suivant leur
taille.
Ainsi, les microadénomes hypophysaires de moins de 10 mm de diamètre
doivent être explorés à la recherche d'une sécrétion hormonale excessive, la
prolactine étant le plus souvent impliquée (cf. chapitre correspondant). Ces
adénomes ne présentent quasiment jamais de caractère évolutif, à savoir que leur
taille reste le plus souvent inférieure au centimètre, la prise en charge
thérapeutique ayant, avant tout, comme objectif de corriger les conséquences
cliniques de l'hypersécrétion hormonale.
Les macroadénomes hypophysaires (taille supérieure à 10 mm) posent un tout
autre problème. Outre l'hypersécrétion hormonale éventuelle associée au processus
tumoral à rechercher, il faut toujours s'assurer du retentissement clinique du
macroadénome (céphalées, signes d'atteinte du champ visuel) qui conditionnent
souvent la démarche thérapeutique. D'autre part plus l'adénome est de grande
taille et compressif, plus le risque de voir les différentes fonctions hypophysaires
altérées est grand, d'où la nécessité de rechercher des signes d'insuffisance
hypophysaire.
Les adénomes à prolactine sont les plus fréquents : un chapitre entier leur
est consacré. Nous détaillerons essentiellement le cas des adénomes
somatotropes à l'origine d'un tableau d'acromégalie. Les adénomes corticotropes
sont essentiellement traités dans le chapitre Hypercorticismes. Nous verrons en fin
de chapitre quels sont les principaux signes de l'insuffisance hypophysaire.

1.Adénomes somatotropes (à GH)


L'acromégalie est définie par l'existence d'une sécrétion excessive de GH (hormone
de croissance) chez une personne ayant terminé sa croissance.
L'origine de l'acromégalie est quasi-exclusivement liée à l'existence d'un adénome
hypophysaire.

267
1.1. Rappel physiologique

ORGANES ET HORMONES ACTION


HYPOTHALAMUS Stimule la transcription du gène
GH-RH GH et la sécrétion GH
SOMATOSTATINE Inhibe la sécrétion de GH
HYPOPHYSE Stimule la production d’IGF-1
GH et s'oppose à celle de l'insuline
FOIE ET AUTRES TISSUS Stimule la croissance osseuse
IGF-1 et replication cellulaire

1.2. Clinique de l'acromégalie


Au début
Les signes initiaux sont le plus souvent peu spécifiques pouvant expliquer la
difficulté et le retard du diagnostic : céphalées, asthénie, douleurs rachidiennes,
troubles sexuels.
Dans un second temps
Il faut toujours apprécier les signes
liés à la tumeur
ceux liés à l'hypersécrétion hormonale
enfin, ceux qui sont la conséquence d'une altération des autres fonctions
hypophysaires.
Cette démarche s'applique à toutes les pathologies tumorales
hypophysaires.
Les signes liés à la tumeur :
C'est avant tout les céphalées et les troubles du champ visuel
L'existence d'un diabète insipide signe la présence d'un adénome d'extension
supra-sellaire.
Les signes liés à l’hypersécrétion de GH
C'est avant tout la dysmorphie crânio-faciale avec un prognathisme et une perte de
l’articulé dentaire, une hypertrophie des arcades sourcillières (signe du balcon) et
de l'os occipital (signe du chignon); des pieds et des mains élargies.
On doit rechercher des modifications de la peau avec des sueurs (++), un éventuel
acanthosis nigricans mais aussi des symptomes ostéo-articulaires, une
cyphoscoliose.
A l'examen, on recherchera une splanchnomégalie avec une hépato-splénomégalie,
un goître thyroidien et des signes d'infiltration de différents tissus : larynx (à
l'origine d'une raucité de la voix), trompe d’Eustache (à l'origine d'une
hyopoaccousie), une macroglossie, un syndrome du canal carpien.
Une hypertension artérielle sera systématiquement recherchée, de même qu'un

268
diabète. Enfin, l'existence de lithiases urinaires n'est pas rare, liées à
l'hypercalciurie fréquemment observée.
Les signes liés au retentissement hypophysaire
Signes d'hypogonadisme : baisse de la libido, impuissance, dépilation chez un
homme; troubles du cycle menstruel chez la femme; ostéoporose dans les deux
sexes.
Signes d'insuffisance thyréotrope : constipation, frilosité, asthénie, perte de
cheveux, prise de poids.
Signes d'insuffisance corticotrope : asthénie, dépigmentation de la peau,
hypoglycémie.
Enfin, il faut savoir que tout patient acromégale présente un risque plus élevé de
développer un cancer ou des polypes du colon, ainsi que certaines formes de
leucémie.

1.3. Diagnostic biologique


Il repose sur la mise en évidence d'une sécrétion excessive de GH:
Cycle de GH: GH> 5 ng/ml, lors de prélèvements horaires entre 8h et 16h.
IGF-1 plasmatique (Nle< 300 ng/ml) et GH urinaire (Nle <10 ng/24h) sont
retrouvés élevés.
GH sous HGPO (Dosage de la GH après charge en glucose (75 grs le plus
souvent)). Il s'agit du test diagnostic le plus classique. Il doit être pratiqué à
jeûn. Après un dosage de GH au temps -60, on pose un cathéter veineux puis
un nouveau dosage est pratiqué au temps 0 avant ingestion du glucose. Les
dosages se font ensuite toutes les 30 minutes pendant 2 heures. On attend
normalement une baisse de la GH à des taux inférieurs à 2 ng/ml au terme de
l'épreuve. Chez l'acromégale, on note une absence de freination dans plus de
75% des cas
Réponse anormale à divers stimuli comme au cours du test à la TRH qui est
positif chez 70%, alors que normalement on ne note pas de réponse.
Les autres dosages d'hormones anté-hypophysaires doivent être faits initialement :
Dosage des taux plasmatiques de prolactine, qui peut être haute soit parce qu'il
s'agit d'un adénome mixte (PRL + GH), soit du fait d'un syndrome de section de la
tige pituitaire.
Un test à la LH-RH accompagné d'un dosage d'estradiol indiquera la réactivité des
gonadotrophines hypohysaires tandis que le dosage du cortisol plasmatique de base
et 1 heure après un test au Synacthène ordinaire est fondamental pour éliminer
l'existence d'une éventuelle insuffisance cortico-surrénalienne associée.

1.4. Diagnostic tumoral


Il repose avant tout sur la pratique d'une imagerie hypophysaire (IRM surtout) pour
préciser l'existence d'un éventuel adénome hypophysaire, et son extension
(latérale, dans les sinus caverneux) ou supra-sellaire.
Un bilan ophtalmologique sera effectué dans le cas de macroadénomes à la
recherche de complications ophtalmologiques (Fond d'oeil, champ visuel),
témoignant alors d'une souffrance sur le trajet des voies optiques.

1.5. Traitement
C'est avant tout un traitement chirurgical avec exérèse sélective par voie trans-

269
sphénoidale de l'adénome. Dans les cas d'exérèse incomplète ou impossible, on
peut discuter deux alternatives : la radiothérapie externe qui est efficace au prix
souvent de l'obtention d'une insuffisance anté-hypophysaire à long terme. L'autre
alternative repose sur l'utilisation de dérivés de la somatostatine, traitement
médical efficace notamment sur les signes cliniques commme les sueurs, dont
l'efficacité anti-tumorale est souvent plus tardive que celle anti-hormonale. Ce
traitement injectable en IM est effectué tous les 10 à 15 jours et peut entraîner des
effets secondaires à type de diarrhée notamment. Son prix élevé reste aussi un
obstacle à son utilisation, tandis que la bromocriptine se révèle le plus souvent sans
grande efficacité.

2. Les adénomes thyréotropes (à TSH)


Ils sont exceptionnels. Ils entraînent une hyperthyroïdie qui le plus souvent est
initialement mise sur le compte d'une origine thyroidienne expliquant un retard au
diagnostic fréquent et des rechutes de l'hyperthyroidie malgré d'éventuels
traitements radicaux (iode radioactif ou thyroidectomie sub-totale).
Sur le plan biologique, les taux d'hormones thyroidiennes sont très hauts, ceux de
TSH plus fluctuants, et sur la plan dynamique il n'existe pas de réponse de la TSH à
la TRH, probablement du fait de l'absence de récepteurs à la TRH. Les adénomes à
TSH sont très souvent mixtes (40%), sécrétant aussi de la GH, de l'ACTH ou de la
prolactine : l'aménorrhée peut alors souvent s'expliquer par la sécrétion mixte de
prolactine. L'exploration dynamique de ces patients retrouve le plus souvent un
rapport de la sous-unité α/ TSH supérieur à 1, mais il est très variable d'un individu
à l'autre.
Sur le plan thérapeutique, outre l'intervention chirurgicale d'exérèse d'adénomes le
plus souvent volumineux, des traitements par octréotide en S.C ont été proposés
alors que la bromocriptine est souvent inefficace.

3. Les adénomes gonadotropes


Les adénomes gonadotropes avec sécrétion de gonadotrophines sont exceptionnels.
Les adénomes sécrétant de la FSH semblent plus communs que ceux sécrétant de
la LH. Ces sécrétions excessives ne sont pas modulées par la GnRH ou les
oestrogènes. Il n'y a pas de symptomatologie particulière observée au cours de ces
adénomes.
Les adénomes gonadotropes non sécrétants sont d'après des critères
immunocytochimiques assez fréquents. 25% des adénomes sont considérés comme
non sécrétants et dans 80% d'entre eux, l'expression d'un gène codant soit pour la
sous-unité α commune à la TSH, la FSH ou la LH ou pour la sous-unité ß spécifique
de chacune de ces glycoprotéines est retrouvée positive.
Sur le plan biologique, on retrouve parfois une sécrétion excessive de la sous-unité
α mais il est vraisemblable que le dosage de la sous-unité ß, spécifique, soit un
meilleur marqueur diagnostic, notamment lors d'une étude dynamique de sa
sécrétion sous TRH. L'origine même de cette synthèse excessive de ces
glycoprotéines n'est pas connue sinon le fait que ces tumeurs, comme la plupart
des tumeurs hypophysaires, ont une origine monoclonale.
Le traitement reste actuellement préférentiellement chirurgical, mais dépend avant
tout de la taille de l'adénome dans la mesure où, en absence de signes
d'hypersécrétion hormonale, c'est la taille de la tumeur qui doit servir d'indication à
une éventuelle prise en charge chirurgicale.

270
4. Adénomes corticotropes (cf. chapitre Hypercorticisme)

5. Insuffisance hypophysaire
Dans la pratique c'est la recherche de l'insuffisance corticotrope qui est importante
même si dans la pratique les décompensations surrénaliennes sont exceptionnelles
dans la mesure où il n'existe pas d'atteinte de la fonction minéralocorticoïde. Sur le
plan clinique, on note l'absence de mélanodermie, une asthénie, une perte de
poids, des malaises avec une tendance à l'hypoglycémie assez souvent révélatrice.
Le déficit gonadotrope
Il est à l'origine d'un tableau d’hypogonadisme avec, suivant l'âge de survenue du
processus tumoral, un retard pubertaire, une aménorrhée primo-secondaire, des
signes d'hypoestrogénie chez la femme avec une baisse de la libido, une
dyspareunie (douleurs au moment des rapports sexuels), des bouffées de chaleur,
une impuissance chez l'homme et une ostéoporose dans les deux cas.
Un traitement substitutif à base d'oestrogènes et de progestérone chez la femme et
d'androgènes chez l'homme sont à prescrire avec une surveillance de ces
traitements sur le volume tumoral.
Le déficit thyréotrope
Est marqué par les signes d'hypothyroidie, à savoir une prise de poids, une apathie,
une asthénie, une frilosité, une constipation. Le bilan retrouve alors une TSH
normale ou basse avec des hormones périphériques thyroidiennes basses.
Le traitement consiste en la prescription de Levothyrox, l'équilibre se faisant non
pas sur la TSH plasmatique mais sur les taux plasmatiques de FT4 et FT3.
Le déficit somatotrope
Est quasi constant dans les insuffisances hypophysaires, mais ne justifiant pas
actuellement le traitement par GH recombinante.

Références bibliographiques
Traité de Médecine de la Reproduction, 3ème édition. Touraine, Schaison et
Mauvais-Jarvis. Edité par Flammarion/Médecine-Sciences, 1997.
Williams Textbook of Endocrinology, 9th edition. Wilson, Foster, Kronenberg and
Larsen. Edited by Saunders, 1998.

Questions à choix multiples


1. Parmi les signes cliniques suivants, lesquels peuvent être directement dus à une
sécrétion excessive d'hormone de croissance ?
A. Frilosité
B. Sueurs nocturnes
C. Macroglossie
D. Syndrome du canal carpien
E. Hemianopsie bitemporale
2. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont exactes ?Un microadénome
hypophysaire :
A. Se définit par sa taille

271
B. S'associe toujours à une sécrétion excessive d'une hormone hypophysaire
C. Est souvent révélé par un diabète insipide
D. Evolue le plus souvent vers un macroadénome hypophysaire
E. Peut ne pas être opéré de première intention
3. En cas d'insuffisance hypophysaire, donnez les propositions exactes
A. L'insuffisance somatotrope est quasi-constante
B. L'insuffisance thyréotrope est marquée par une TSH haute et une T4
basse
C. L'insuffisance corticotrope est marquée par une tendance à l'hypoglycémie
associée à une mélanodermie.
D. Le test au synacthène ordinaire sur le cortisol est un bon test de
débrouillage.
E. Une ostéoporose peut être observée chez ces patients

272
LES HYPERPROLACTINEMIES
Philippe Touraine
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker

LES HYPERPROLACTINEMIES
Abréviations
Points importants
1. Rappel physiologique
2. Etiologies des hyperprolactinémies
3. Les conséquences d’une hyperprolactinémie
3.1. Risques liés à la tumeur
3.2.Risques liés à l’hypersécrétion de prolactine
4. Manifestations cliniques de l’hyperprolactinémie
5. Bilan à effectuer
6. Traitement des hyperprolactinémies
6.1. Lors d'hyperprolactinémie iatrogène
6.2. En cas de découverte d'un adénome à prolactine
6.3. Chez l’homme
6.4. Hyperprolactinémie et grossesse
Références Bibliographiques
Questions à choix multiples

Abréviations
TRH : Thyrotropin Releasing Hormone
TSH : Thyroid Stimulating Hormone
GH : Growth Hormone

Points importants
Les hyperprolactinémies représentent 20% des causes des troubles du cycle
menstruel.
La pratique d'une imagerie hypophysaire (scanner, IRM) permet d'individualiser
les causes adénomateuses qui s'opposent aux causes iatrogéniques, les plus
fréquentes.
Pour les microadénomes, le traitement sera soit médicamenteux, soit chirurgical
tandis qu'en cas de macroadénome à prolactine, le traitement sera, de première
intention, exclusivement médical.

273
Il n'y a souvent pas de contre-indication à une grossesse au cours des
hyperprolactinémies, sauf quelques cas de macroadénomes envahissants.
Les hyperprolactinémies ont pris une importance considérable ces dix dernières
années en raison de leur fréquence puisqu’on peut considérer que 20% des
anovulations d'origine hypothalamo-hypophysaire sont liées à une
hyperprolactinémie, et aussi compte-tenu de ses possibilités thérapeutiques.

1. Rappel physiologique
La prolactine est synthétisée et sécrétée par les cellules lactotropes de l'hypophyse.
Elle a la particularité d'être sous le contrôle inhibiteur dominant exercé par la
dopamine hypothalamique, ce qui explique d'emblée la fréquence des
hyperprolactinémies iatrogènes. Tout un ensemble de facteurs centraux et
périphériques participent néanmoins à la régulation de sa synthèse ; ainsi la TRH,
outre son action stimulatrice sur la libération de TSH par l'hypophyse, augmente
aussi celle de la prolactine.
Il n’existe pas à proprement parler de rétrocontrôle périphérique, comme pour les
autres hormones synthétisées par l'hypophyse, mais il faut noter le rôle stimulateur
bien démontré aujourd'hui des estrogènes sur la synthèse et la sécrétion de
prolactine et sur la prolifération des cellules lactotropes. Enfin, les hormones
thyroïdiennes exercent un contrôle freinateur sur la sécrétion de prolactine,
notamment par l'intermédiaire d'une stimulation de la dopamine.
Le seul rôle actuellement bien démontré de la prolactine sur le plan physiologique
est celui observé au cours de la lactation avec un effet inducteur sur la synthèse
des protéines du lait.

2. Etiologies des hyperprolactinémies


Il existe trois grandes causes d'hyperprolactinémie : les hyperprolactinémies
médicamenteuses, les adénomes à prolactine et enfin un ensemble de pathologies
qui peuvent s'accompagner d'hyperprolactinémie.
Les médicaments les plus souvent impliqués sont ceux qui augmentent le taux
de prolactine en bloquant les récepteurs dopaminergiques : ainsi, les
phénothiazines, l'halopéridol mais aussi le metoclopramide sont les plus connus,
mais il faut savoir aussi que certains antihypertenseurs comme l'α-méthylDOPA,
les dérivés opiacés, certains antagonistes du récepteur de l'histamine de type
H2 peuvent être à l'origine d'une hyperprolactinémie (Tableau I).

Tableau I : Médicaments responsables d'une hyperprolactinémie

α-méthylDOPA (Aldomet®)
Amphétamines

Cimétidine (Tagamet®)
Dérivés opiacés
IMAO
Phénothiazines

Halopéridol (Haldol®)

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Métoclopramide (Primperan®), Domperidone (Motilium®)

Sulpiride (Dogmatil®)

L'adénome à prolactine doit être systématiquement recherché. Il s'agit d'une


tumeur bénigne de l'hypophyse dont le diagnostic a été considérablement
facilité par le perfectionnement de l'imagerie hypophysaire (scanner, IRM)
puisque le seuil de détection d'un adénome est aujourd'hui de 3 mms. Le
diagnostic d'adénome se fait sur la visualisation d'une hypodensité hypophysaire
au scanner. Arbitrairement on parle de "microadénome" lorsque la taille de
l'image observée est inférieure à 10 mms, et de "macroadénome" quand elle est
supérieure.
Outre l'adénome à prolactine, il existe un certain nombre de situations
physiologiques ou pathologiques au cours desquelles la prolactine peut
augmenter (Tableau II). Ainsi, la grossesse s'accompagne normalement d'une
élévation du taux de prolactine et de la taille de l'hypophyse du fait de
l'hyperestrogénie qui règne au cours de la grossesse. Citons aussi le "stress",
qui peut parfois expliquer des taux modérément augmentés de prolactine.
L'hypothyroïdie est fréquemment associée à une hyperprolactinémie, liée à
une baisse de l'effet stimulateur qu'exercent les hormones thyroïdiennes sur la
dopamine hypothalamique. Enfin, l'insuffisance rénale chronique peut
entraîner une hyperprolactinémie modérée du fait de la diminution de la
clairance métabolique de la prolactine.

Tableau II : Facteurs augmentant la sécrétion de la Prolactine chez l'humain

Grossesse
Stress
Sommeil
Tumeurs hypophysaires :
Prolactinome
Acromégalie
Maladie de Cushing
Adénomes mixtes sécrétant la PRL et la GH ou l'ACTH
Syndrome de section de tige
Granulomatoses
Histiocytose, sarcoïdose, tuberculose de la tige pituitaire
Adénomes non sécrétants
Chirurgie, traumatisme crânien
Radiothérapie hypothalamique
Hypothyroïdie
Insuffisance rénale

275
3. Les conséquences d’une hyperprolactinémie
Il faut distinguer les risques liés à l’adénome et ceux liés à l’hypersécrétion de
prolactine.

3.1. Risques liés à la tumeur


Ce sont les risques liés à la croissance spontanée de la tumeur : d'une part
l'atteinte des autres fonctions antéhypophysaires -corticotrope et thyréotrope- par
compression tumorale des autres cellules hypophysaires et d'autre part le
retentissement sur le champ visuel qui, s'il est altéré, témoigne de la compression
du chiasma optique. La rapidité de croissance d'un adénome est très variable
suivant les cas. Les microadénomes ont le plus souvent une évolution très lente
avec dans moins de 5 % des cas une croissance et un développement supra-
sellaire. Il a même été décrit des cas de nécrose des microadénomes avec
régression tumorale et disparition des signes cliniques. Ce point est fondamental à
souligner car, comme on le reverra, l'attitude thérapeutique est le plus souvent non
chirurgicale en cas de microadénome.

3.2.Risques liés à l’hypersécrétion de prolactine


Il s'agit avant tout du retentissement sur l’axe gonadotrope.
L'action de l'hyperprolactinémie semble s'exercer au niveau hypothalamique,
entraînant une diminution de la pulsatilité de la GnRH comme en témoigne celle de
la fréquence de la sécrétion pulsatile de la LH, diminuant donc son efficacité. Une
action au niveau hypophysaire est peu probable, puisque la réponse hypophysaire
au test à la LHRH est conservée, avec des concentrations de FSH et de LH
similaires à celles des sujets témoins.
Chez la femme, il est important de situer deux degrés de retentissement de
l'hyperprolactinémie sur l'axe gonadotrope :
Lorsque le taux de prolactine est modérément élevé, inférieur le plus souvent à
100 ng/ml, il en résulte - chez la femme- une dysovulation, voire une
anovulation, avec persistance variable de la sécrétion d'estradiol mais
insuffisance ou absence de progestérone : les cycles sont irréguliers, allongés,
avec une hypofertilité et un tableau de déséquilibre estroprogestatif aux dépens
de la progestérone et hyperestrogénie relative.
Lorsque les taux de prolactine sont beaucoup plus élevés, il existe alors
généralement une hypooestrogénie avec comme conséquences une aménorrhée
mais aussi une déminéralisation osseuse.
Chez l'homme, l'hyperprolactinémie s'accompagne aussi d'une diminution de la
pulsatilité de la GnRH avec des taux de testostérone diminués et une réponse
leydigienne à l'hCG conservée.

4. Manifestations cliniques de l’hyperprolactinémie


Chez la femme, les circonstances de découverte de l'hyperprolactinémie sont
généralement en rapport avec son influence sur l'axe gonadotrope : il s’agit d’une
aménorrhée secondaire le plus souvent, plus rarement une aménorrhée primaire. Si
l'hyperprolactinémie est modérée (< 100 ng/ml), elle peut n'entraîner, surtout au
début, que des troubles du cycle menstruel qui devient irrégulier, tend à s'allonger,
devenant dysovulatoire puis anovulatoire. Il est par ailleurs important de noter que
la galactorrhée est un signe inconstant.
Chez l'homme, le diagnostic est plus tardif, plus souvent fait au stade de
macroadénome. Les principaux signes cliniques retrouvés à l'interrogatoire sont une

276
baisse de la libido, une impuissance, mais il est fréquent que des signes témoins
d'une tumeur hypophysaire à type de céphalées ou de baisse de l'acuité visuelle
soient l'occasion de découvrir l'hyperprolactinémie.

5. Bilan à effectuer
Le dosage plasmatique de la prolactine doit être demandé devant chacun des
signes cliniques évoqués. Ce dosage doit être effectué le matin à jeûn, si possible
dix minutes après la pose du cathéter, le "stress" pouvant être parfois responsable
d'augmentation de la prolactine. On ne peut parler de pathologie de la prolactine
chez la femme tant que la prolactine est inférieure à 20 ng/ml, et chez l'homme à
15 ng/ml. Néanmoins, devant tout chiffre considéré comme limite, un deuxième
dosage peut souvent être utile, infirmant ou confirmant l'impression première.
Le test à la TRH, avec notamment deux prélèvements de base aux temps -15 et 0,
reste un élément diagnostic de valeur puisqu'il permet d'une part de confirmer le
diagnostic d'hyperprolactinémie et d’autre part de vérifier son caractère stimulable
ou non. Une réponse négative avec taux de prolactine bloqué sous TRH est en
faveur du caractère "autonome" de la sécrétion et donc de son origine
adénomateuse rendant le test à la TRH plus informatif que le scanner dans les
microadénomes de très petite taille qui ne peuvent être visualisés. En revanche, les
hyperprolactinémies médicamenteuses s'accompagnent le plus souvent d'une
réponse conservée de la prolactine lors du test.
Le scanner centré sur l'hypophyse est à pratiquer devant toute hyperprolactinémie.
C'est l'examen indispensable puisqu'il permet, grâce à sa grande sensibilité, de
diagnostiquer même des petits adénomes ; il est incontestable qu'il a bouleversé
l'approche diagnostique et thérapeutique des hyperprolactinémies en permettant le
diagnostic d'adénomes non visualisables auparavant et en aidant le neuro-
chirurgien dans sa chirurgie d'exérèse. L'IRM est, dans le cas des adénomes à
prolactine, un examen radiologique à demander seulement en seconde intention
(essentiellement du fait de son coût), soit en cas de diagnostic douteux, soit pour
préciser l'extension d'un macroadénome envahissant avant une intervention
chirurgicale. Enfin, la radiographie de la selle turcique qui ne visualise pas
l’adénome mais seulement son retentissement osseux n'a actuellement plus de
grand intérêt diagnostic puisque l'effondrement du plancher sellaire, témoin d'un
volumineux adénome, est bien visible au scanner. Par contre, elle peut révéler des
signes évocateurs de pathologies aussi responsables d'une hyperprolactinémie
comme la présence de calcifications lors d'un crâniopharyngiome, mais qui sont
elles aussi visibles au scanner.

6. Traitement des hyperprolactinémies


Il existe deux situations bien distinctes a priori dans le cadre des
hyperprolactinémies : ce sont les hyperprolactinémies iatrogènes et les tumorales.

6.1. Lors d'hyperprolactinémie iatrogène


Le cas idéal est celui où l'arrêt du traitement responsable est possible. Il est dès
lors fondamental de s'assurer par un nouveau dosage 1 mois plus tard que le taux
de prolactine s'est normalisé.
Toutefois, le cas le plus fréquent est celui où le traitement ne peut être arrêté, chez
les malades suivis en psychiatrie par exemple et traités par des psychotropes.
Compte-tenu de ce qui a été précédemment dit, la correction des manifestations
cliniques ne devrait pouvoir se faire que par un traitement par les agonistes
dopaminergiques qui peuvent faire baisser les taux de prolactine afin de tenter de

277
régulariser les cycles chez la femme. Toutefois, il n'y a pas eu d'étude à ce jour
permettant d'apprécier l'effet d'un agoniste dopaminergique sur les manifestations
cliniques d'ordre psychiatrique. Dans la mesure où les molécules utilisées
aujourd'hui n'ont pas d'action sélective, on peut comprendre la réserve de certains
psychiatres à voir leurs patients traiter au long cours par la bromocriptine.

6.2. En cas de découverte d'un adénome à prolactine


C'est actuellement la taille de l'adénome qui oriente vers les différentes attitudes
possibles:
chirurgicale :
Il s'agit le plus souvent d'une adénomectomie par voie transsphénoïdale, plus
rarement (et seulement en cas d'adénome d'extension suprasellaire importante)
d'intervention par voie haute.
médicale :
Utilisant les agonistes de la dopamine, inhibiteur de la synthèse et de la sécrétion
de la prolactine, avec aussi une action anti-tumorale.
abstention thérapeutique,
généralement assortie d'un traitement progestatif séquentiel.
En cas de macroadénome, il existe actuellement un large consensus pour
proposer de première intention un traitement médicamenteux basé sur les
agonistes dopaminergiques. Leurs effets antisécrétoire et antitumoral sont nets
alors que les risques de récidive post-opératoire sont importants. Même en cas
d'atteinte visuelle, le traitement de première intention doit être médical avec des
résultats le plus souvent excellents dès les premiers jours de traitement. Ce n'est
qu'en cas d'aggravation du champ visuel sous traitement que la chirurgie
s'imposera alors.
Certains préfèrent opérer les microadénomes pensant que c'est à ce stade que
les résultats sont les meilleurs en ce qui concerne la baisse du taux de prolactine et
la préservation des autres fonctions hypophysaires. L'intervention par voie
transsphénoïdale est très largement pratiquée mais cette attitude est néanmoins
contestée dans la mesure où il s'agit d'un geste neuro-chirurgical, sur une
pathologie sans gravité et avec un risque de récidives à distance .
Pour d'autres, le traitement est toujours médical en raison de l'efficacité des
agonistes dopaminergiques sur la baisse du taux de prolactine et en outre, un effet
antitumoral démontré. Néanmoins, le traitement médicamenteux est très
fréquemment mal toléré au moins au début du traitement et ne constitue pas un
traitement curatif mais plutôt suspensif de l'hyperprolactinémie.
L'attitude thérapeutique que nous avons adoptée est la suivante :
Nous décidons le traitement chirurgical en cas :
de sécrétion de GH associée
de résistance, d'intolérance ou d'absence d'adhésion du patient au
traitement médical.
Le traitement médical :
Il fait appel aux agonistes dopaminergiques dont le chef de file est la bromocriptine
(Parlodel, comprimés à 2,5 et 10 mg) qui permet à la fois de freiner la sécrétion de
prolactine, de normaliser son taux plasmatique, de rétablir des cycles et enfin des
ovulations. La dose habituelle est de 5 mg par jour que l'on atteindra
progressivement en quelques jours et en fractionnant les doses au moment des
repas. La tolérance est dans l'ensemble satisfaisante ; les effets secondaires à type

278
de nausées, vomissements, impression vertigineuse sont décrits en début de
traitement. Plus récemment a été commercialisé le quinagolide (Norprolac,
comprimés à 75 et 150 mg) qui présente l'avantage de n'être pris qu'en une seule
prise quotidienne et souvent mieux toléré que le Parlodel.
L'efficacité thérapeutique sera établie :
cliniquement devant surtout le retour des cycles et éventuellement des
ovulations sur les courbes de température, voire la survenue d'une
grossesse.
biologiquement par un contrôle régulier de la prolactinémie, vérifiant sa
normalisation et permettant une adaptation de la posologie.
radiologiquement : un scanner de contrôle à 6 et 12 mois montrera parfois
une diminution de taille de l'adénome, correspondant à l'effet antitumoral de
la bromocriptine.
En l'absence d'efficacité clinique et/ou biologique, on peut progressivement
augmenter la dose de Parlodel. Rarement des doses de 30 mg seront nécessaires à
une normalisation du taux de la prolactine et au rétablissement des cycles. Au delà,
on parlera de "résistance à la bromocriptine".
L'abstention thérapeutique
De préférence assortie à un traitement progestatif chez la femme est possible
lorsque :
- l'adénome est petit
- qu'il n'existe pas de désir de grossesse
- qu'il s'agit d'une femme de 40 ans ou plus, avec un adénome peu évolutif.
En l'absence de désir de contraception, le traitement est administré 10 jours par
cycle (du 16ème au 25ème jour du cycle) ou 20 jours par cycle d'un progestatif en
cas de besoin de contraception. L'administration séquentielle d'un progestatif
permet alors :
- de contrebalancer l'hyperestrogénie relative (taux d'estradiol notable,
absence de progestérone) qui accompagne une hyperprolactinémie modérée
(prolactine inférieure à 100 ng/ml)
- d'entraîner des menstruations régulières à l'arrêt
- à moyen terme, il a été montré que les progestatifs norstéroïdes tendent à
diminuer la sécrétion de prolactine probablement par leur effet
antiestrogénique au niveau des cellules lactotropes.

6.3. Chez l’homme


La particularité du traitement tient au fait que le plus souvent on est en présence
de macroadénome à prolactine, à l’origine d’un tableau d’insuffisance gonadotrope
et parfois hypophysaire complet d’une part et d’autre part d’un retentissement
visuel du fait d’une compression chiasmatique. Actuellement, le consensus général
est à la mise en route d’emblée d’un traitement médicamenteux, le plus souvent
par la bromocriptine, qu’il y ait signes de compression chiasmatique ou non.
L’efficacité de la bromocriptine est le plus souvent spectaculaire, parfois même
dans les jours qui suivent la mise en route du traitement. Dans ce cas, la
bromocriptine doit être poursuivie et c’est dans un second temps que sera
discutée la poursuite le plus souvent à vie du traitement médicamenteux ou
l’opportunité d’une exérèse chirurgicale complémentaire.
En cas d’aggravation du champ visuel sous bromocriptine, l’indication

279
chirurgicale est formelle.
Le traitement complémentaire de l’insuffisance gonadotrope s’impose le plus
souvent. En effet, à moins d’une correction parfaite des taux de prolactine sous
bromocriptine, il persiste un hypogonadisme clinique et biologique (testostérone
≤ 2 ng/ml) qui impose l’adjonction d’un traitement par androgènes, soit sous
forme d’énanthate de testostérone injectable (Androtardyl®), soit sous forme
de gel de Dihydrotestostérone, par voie percutanée (Andractim®).

6.4. Hyperprolactinémie et grossesse


En cas de microadénome, la bromocriptine sera interrompue au début de la
grossesse et la surveillance portera sur la clinique et éventuellement sur le
champ visuel (une à deux fois pendant la grossesse). En effet le risque
exceptionnel de transformation d'un microadénome en macroadénome au
cours de la grossesse justifie une telle attitude .
En cas de macroadénome à prolactine, la bromocriptine sera maintenue à
la même dose pendant toute la grossesse afin d'éviter l'augmentation de
volume de l'hypophyse consécutive à l'inflation hormonale, cette
augmentation de volume pouvant, dans le cas d'un macroadénome, être à
l'origine d'une compression chiasmatique. La surveillance devra être
effectuée par des examens du champ visuel aux 3ème, 6ème et 8ème mois
de la grossesse.
Dans tous les cas, un bilan complet (hormonal et morphologique) hypophysaire
sera réalisé dans le post-partum afin d'estimer le retentissement de la grossesse
sur l'adénome : augmentation de volume, stabilité voire diminution ou disparition
totale de l'adénome du fait d'une nécrose tumorale au cours de la grossesse.

Références Bibliographiques
Bricaire C., Kerlan V., Kuttenn F., Mauvais-Jarvis P. La grossesse : une modalité
de guérison des adénomes à prolactine? Presse Méd. 1988 ; 17 : 2117-2119.
Klibanski A., Biller B. M., Rosenthal D. I., Schoenfeld D.A., Saxe V. Effects of
prolactin and estrogen deficiency in amenorrheic bone loss. J. Clin. Endocrinol.
Metab. 1988 ; 67 : 124-29.
Klibanski A., Greenspan S.L. Increase in bone mass after treatment of
hyperprolactinemic amenorrhea. N. Engl. J. Med. 1984 ; 315 : 542-6.
Molitch M.E. Pregnancy and the hyperprolactinemic woman. N. Engl. J. Med.
1985 ; 312 : 1364-70.
Sauder S. E., Frager M., Case G.D., Kelch R.P., Marshall J.C., Abnormal patterns
of pulsatile luteinizing hormone secretion in women with hyperprolactinemia and
amenorrhea: responses to Bromocriptine. J. Clin. Endocrinol. Metab. 1984 ; 59 :
941-8.
Schlechte J., Dolan K., Sherman B., Chapler F., Luciano A. The natural history of
untreated hyperprolactinemia: a prospective analysis. J. Clin. Endocrinol. Metab.
1989 ; 68 : 412-8.
Serri O., Rasio E., Beauregard H., Hardy J., Somma M. Recurrence of
hyperprolactinemia after selective transsphenoidal adenomectomy in women
with prolactinoma. N. Engl. J. Med. 1983 ; 309 : 280-3.
Sisam D.A., Sheehan J.P., Sheeler L.R. The natural history of untreated
microprolactinomas. Fertil. Steril. 1987 ; 48 : 67-71.

280
Touraine P. et Kuttenn F. - Faut-il traiter toutes les hyperprolactinémies? La Rev. du Prat.
1993, 213, 20-27.

Questions à choix multiples


1. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont exactes?
A. Une hyperprolactinémie est le plus souvent révélée par des troubles du cycle
menstruel chez la femme
B. La galactorrhée est quasi-constante au cours des hypeprolactinémies
C. Un taux de prolactine ponctuel inférieur à 40 ng/ml suffit à poser le
diagnostic d'une hyperprolactinémie
D. L'hyperthyroidie est une cause d'hyperprolactinémie à éliminer par un simple
dosage de TSH
E. L'insuffisance rénale est à l'origine d'une hyperprolactinémie par défaut de
filtration glomérulaire
2. Concernant la régulation de la prolactine, donnez les propositions exactes
A. Les oestrogènes stimulent la synthèse de prolactine
B. La dopamine potentialise l'effet stimulateur des oestrogènes sur le taux de
prolactine
C. L'hypothyroidie peut s'accompager d'une hyperprolactinémie par défaut de
stimulation de la dopamine par les hormones thyroidiennes
D. La grossesse est associée souvent à une hyperprolactinémie
E. La TRH stimule le taux de prolactine
3. Concernant les adénomes à prolactine, donnez les réponses exactes
A. Une IRM hypophysaire élimine formellement l'existence d'un microadénome
hypophysaire
B. Un adénome mixte (PRL + GH) a une densité hypophysaire différente de
l'adénome à PRL pur
C. Un adénome non sécrétant peut être associé à des taux de PRL hauts
D. Les adénomes à prolactine sont de plus grande taille chez la femme que chez
l'homme du fait de la stimulation estrogénique
E. Un macroadénome à PRL doit être traité médicalement de première intention
4. Concernant les hyperprolactinémies, donnez les propositions exactes
A. L'IRM est le meilleur examen radiologique pour détecter un adénome à PRL
B. Les hyperprolactinémies médicamenteuses restent exceptionnelles
C. Une grossesse ne peut être envisagée qu'après exérèse chirurgicale d'un
adénome
D. Les insuffisances hypophysaires sont fréquentes après exérèse d'un micro-
adénome hypophysaire
E. Le traitement médicamenteux repose sur l'utilisation des agonistes de la
dopamine

281
LES AMENORRHEES (n° 18)
Philippe Touraine
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker

LES AMENORRHEES (n° 18)


Abréviations
Points importants
1. Rappel physiologique
2. Les aménorrhées primaires
2.1.Aménorrhée primaire avec impubérisme
2.2. Aménorrhée primaire sans impubérisme
3. Aménorrhées secondaires
3.1.“Aménorrhées épiphénomènes”
3.2. Origine utérine
3.3. Origine ovarienne
3.4. Origine hypophysaire
3.5. Origine hypothalamique dite "psychogène".
3.6. Aménorrhée post-pilule
Références bibliographiques
Q.C.M. AMENORRHEE

Abréviations
FSH : Follicle Stimulating Hormone
LH :Luteotropic Hormone
GnRH :Gonadotropin Releasing Hormone

Points importants
L'aménorrhée secondaire témoigne d'une rupture de la cyclicité
menstruelle.Celle-ci met en jeu un ensemble de structures anatomiques, de
l'hypothalamus à l'utérus, dont chacune est fondamentale pour permettre
l'obtention de menstruations cycliques régulières.
L'examen clinique aidé de quelques dosages hormonaux suffit alors pour
comprendre la base physiopathologique de l'aménorrhée et permettre la
thérapeutique la plus adéquate.
Il faut toujours penser à la grossesse en 1ère intention devant toute
aménorrhée secondaire.
Les dosages plasmatiques d’estradiol et de FSH sont avec celui de la prolactine à
faire dans un premier temps. Un estradiol et une FSH bas orienteront vers une

282
origine hypothalamo-hypophy-saire de l’aménorrhée tandis qu’un taux haut de
FSH signera l’existence d’une insuffisance ovarienne.
Enfin, la pratique dans certains cas - notamment d'une aménorrhée primaire
avec retard pubertaire- d’un scanner ou d'une IRM centré(e) sur la selle turcique
constitue un examen complémentaire précieux à la recherche d’une tumeur
hypothalamo-hypophysaire.L'aménorrhée se définit comme l'absence prolongée
de règles. On distingue classiquement
l'aménorrhée primaire chez la jeune fille de 17 ans ou plus qui n'a jamais eu ses
règles
l'aménorrhée secondaire chez la femme n'ayant pas eu ses règles depuis au
moins trois mois.
Grâce à un interrogatoire bien mené, à l'examen clinique et à la pratique de
certains examens complémentaires, le diagnostic étiologique pourra être posé et le
traitement adéquat proposé à la patiente.

1. Rappel physiologique
La survenue des menstruations implique l'intégrité de l'axe gonadotrope (système
nerveux central, hypothalamus, hypophyse, ovaires) et du tractus génital (utérus,
vagin). Toute perturbation à l'un de ces niveaux peut être à l'origine d'une
aménorrhée.
La menstruation est une hémorragie utérine correspondant à l'élimination de
l'endomètre nécrosé qui se produit
soit ≤14 jours après l'ovulation, en absence de fécondation et de nidation; elle
survient après la chute brutale des taux d'estradiol et de progestérone
soit en cas d'anovulation, lors des fluctuations du taux d'oestrogènes,
aboutissant à une hémorragie de privation qui survient de façon anarchique.Les
sécrétions des hormones ovariennes, estradiol et progestérone sont sous la
dépendance des gonadotrophines hypophysaires, FSH et LH, elles-mêmes sous
le contrôle d'une neurohormone hypothalamique, la GnRH encore appelée
classiquement LH-RH. La sécrétion de la GnRH a la particularité d'être pulsatile,
la libération pulsatile de GnRH variant en fréquence et en amplitude tout le long
du cycle menstruel, sous les influences stimulatrices ou inhibitrices de certains
facteurs hormonaux ou neuroendocriniens. Des variations de l’amplitude et de la
fréquence de la libération pulsatile de GnRH dépendent les modifications du
rapport de sécrétion FSH/LH. Il est enfin important de noter que deux
mécanismes principaux conditionnent l'intégrité du cycle menstruel :
le pic préovulatoire d'estradiol qui va permettre d'augmenter la sensibilité des
cellules gonadotropes de l'hypophyse à la GnRH et être à l'origine du pic
ovulatoire de LH à mi-cycle
la lutéolyse automatique du corps jaune au 14ème jour qui s'accompagne de la
suppression du rétrocontrôle négatif de la progestérone au niveau de
l'hypothalamus, aboutissant au redémarrage de la sécrétion pulsatile de la
GnRH. A partir de ce bref rappel physiologique, on conçoit mieux que toute
perturbation d'un maillon de cette chaîne puisse entraîner une aménorrhée.

2. Les aménorrhées primaires


Même si l'âge normal de survenue des premières règles se situe entre 11 et 14 ans
(12 ans 3/4 en moyenne), ce n'est qu'à partir de 17 ans qu'un bilan étiologique doit
être mené.
L'interrogatoire s'attachera à préciser :

283
les antécédents médicaux (maladie chronique), chirurgicaux et les traitements
suivis par la jeune fille.
les antécédents familiaux avec la notion de puberté tardive dans la famille
l'évolution de la courbe staturale et pondérale de la patiente
le mode de vie et l'environnement social et familial
l'existence de douleurs pelviennes, de galactorrhée, de céphalées et de troubles
visuels.
L'examen physique, sera avant tout centré sur la recherche de signes pubertaires
et appréciera outre le développement des caractères sexuels secondaires (pilosité
pubienne et axillaire, développement mammaire), l'existence d'une galactorrhée ou
de signes d'hyperandrogénie clinique.
On distingue deux grands groupes d'étiologies aux aménorrhées primaires en
fonction de leur association ou non à un impubérisme.

2.1.Aménorrhée primaire avec impubérisme

2.1.1. Il existe un retard staturo-pondéral et pubertaire


Le plus souvent ce tableau est associé à un déficit global des fonctions
hypophysaires : somatotrope, gonadotrope, corticotrope et thyréotrope. Le
problème est étiologique et il faut rechercher avant tout une tumeur hypothalamo-
hypophysaire. La pratique d'un scanner centré sur l'hypophyse est le moyen unique
et fondamental pour s'assurer de l'absence d'une telle tumeur. En effet la radio de
la selle turcique isolée permettra de retrouver des signes indirects comme
l'effondrement du plancher sellaire en cas de volumineuse tumeur ou l'existence de
calcifications évocatrices de crâniopharyngiome mais ne permettra aucunement de
diagnostiquer des tumeurs plus petites , inférieures à 10 mms.
Les formations tumorales les plus fréquentes à cet âge sont d'une part le
crâniopharyngiome, à développement essentiellement suprasellaire et caractérisé
par des calcifications et une structure très hétérogène et d'autre part les adénomes
hypophysaires, essentiellement l'adénome à prolactine ou l'adénome non sécrétant
(les adénomes à GH ou ACTH sont rares).
Toute découverte d'une tumeur hypophysaire imposera un bilan des complications
liées à la tumeur (examen ophtalmologique complet avec champ visuel) et un bilan
visant à apprécier le retentissement sur les autres fonctions hypophysaires (bilan
thyroidien, somatotrope, cortico-surrénalien et recherche d'un diabète insipide).
Outre les causes tumorales, il faut souligner qu’une aménorrhée primaire peut être
la conséquence d’un traumatisme crânien, d’une arachnoïdite ou d’une méningite.
Le traitement est à la fois celui de la cause tumorale et de l'insuffisance
hypophysaire secondaire. Il est chirurgical en cas d'adénome non sécrétant ou de
crânopharyngiome; il peut être médical en cas d'adénome à prolactine, le
traitement reposant sur les agonistes dopaminergiques.
Le traitement substitutif, lui, visera à corriger le déficit surrénalien avant tout, mais
aussi thyroïdien, et éventuellement somatotope. Le traitement de la carence
oestroprogestative devra être mené en deux étapes :
d'abord une correction oestrogénique isolée, en continu, permettant le
développement des caractères sexuels secondaires
ensuite un traitement oestro-progestatif séquentiel. Ainsi l'association à un
oestrogène du 1er au 25ème jour du mois, de progestérone naturelle du 16ème au
25ème jour permettra l'instauration de cycles artificiels.

284
2.1.2. Le déficit gonadotrope isolé.
Il réalise un hypogonadisme hypogonadotrophique. Un adénome hypophysaire peut
être à l’origine d’un tel tableau mais il s’agit le plus souvent du Syndrome de De
Morsier, rare, qui associe à l'hypogonadisme une anosmie. Outre l'anosmie
retrouvée dans ce syndrome, un trait fréquemment retrouvé chez ces jeunes filles
est l'existence d'une grande taille qui s'explique du fait de l'absence de soudure des
cartilages de conjugaison.
Le bilan hormonal pratiqué retrouve des taux de gonadotrophines effondrées (FSH
et LH inférieures à 2 mUI/ml) ainsi que ceux d'estradiol (< 20 pg/ml). Le test à la
LH-RH retrouve le plus souvent une réponse nulle, du fait à la fois d'une absence
prolongée de stimulation hypophysaire par la GnRH et d'une absence
d’imprégnation des cellules gonadotropes par les oestrogènes.
Le traitement sera donc exclusivement à visée substitutive en oestrogènes et
progestérone. Là encore, le traitement débutera par la prescription d'oestrogènes
en continu pour permettre le développement mammaire. Lors de la survenue de
règles sous traitement oestrogénique seul, la prescription d'oestrogènes et de
progestatifs en traitement séquentiel est à proposer. Il est toujours plus
souhaitable d'utiliser dans un tel contexte des oestrogènes et de la progestérone
naturels plutôt qu'un traitement oestroprogestatif antigonadotrope pour éviter de
masquer un éventuel retard pubertaire, dont le diagnostic différentiel avec le déficit
gonadotrope isolé peut être souvent difficile. Ultérieurement, en cas de désir de
grossesse, l’utilisation de la pompe à GnRH, qui reproduit physiologiquement la
libération pulsatile de GnRH, permet l’obtention de grossesse. Le principe consiste
en la pose d’un cathéter en intra-veineux, la libération de GnRH se faisant toutes
les 90 minutes. Les résultats sont dans l’ensemble très bons.

2.1.3.Dysgénésie gonadique
L'impubérisme s'accompagne parfois d'anomalies du morphotype qui permettent
d'évoquer alors d'emblée ce diagnostic : c'est le cas du syndrome de Turner, qui
associe :
- une petite taille,
- un impubérisme,
- des dysmorphies,à un caryotype XO.
L'impubérisme est total avec des organes génitaux de type infantile (vulve, vagin).
Le syndrome dysmorphique associe classiquement un cou palmé, une implantation
basse des cheveux, des naevi cutanés, un cubitus valgus, un raccourcissement du
4ème métacarpien.
A ce syndrome dysmorphique s'associe un nanisme aboutissant à une taille
définitive le plus souvent inférieure à 1,50 m.
Le diagnostic repose sur l'existence d'un profil hormonal d'hypogonadisme
hypergonadotrophique avec un estradiol effondré et des gonadotrophines élevées
(> 50 mUI/l). L'absence de corpuscule de Barr à l’examen du sexe chromatinien
permet de confirmer le diagnostic avant d'avoir le résultat du caryotype de type 46
XO.
Il n'est pas nécessaire alors de pratiquer une coelioscopie qui retrouverait un aspect
de bandelettes ovariennes sans présence de cellules germinales sur le prélèvement
biopsique.
Le traitement substitutif oestroprogestatif sera à entreprendre comme pour les
autres causes, d'abord oestrogénique puis séquentiel, mais ne devra être débuté
qu'une fois la croissance achevée pour éviter une soudure précoce des cartilages de

285
conjugaison. Le traitement spécifique par la GH recombinante est de plus en plus
proposé sans qu’on sache si en définitive, la taille finale est supérieure à ce qu’elle
aurait été, sans traitement. Enfin le problème de la stérilité, bien sûr définitive, sera
progressivement abordé, le seul recours étant celui du don d'ovocytes.

2.1.4.Le retard pubertaire simple


C'est l'étiologie la plus fréquente et celle qui ne sera retenue qu'une fois éliminées
les autres causes. Le tableau clinique retrouve un stade pubertaire P2S2 à l'âge de
16 ans.
L'interrogatoire peut retrouver une notion de puberté tardive dans la famille.
L'examen clinique peut noter des signes de début pubertaire comme une acné et
surtout une modification du mamelon. L'examen permet de retrouver une vulve et
un vagin de taille normale; au toucher rectal, l'utérus peut être perçu.
L'échographie pelvienne retrouvera un utérus et des ovaires, mais il faut savoir que
chez les jeunes filles impubères, l'utérus est parfois difficile à identifier.
La radiographie de la main est à pratiquer systématiquement pour rechercher le
sésamoïde du pouce qui, s'il est présent, confirmera le début de la puberté.
Sur le plan hormonal, on retrouve des taux plasmatiques d’estradiol et des
gonadotrophines bas; le test à la LH-RH peut être informatif s'il retrouve une
réponse préférentielle sur la FSH, qui est une réponse classique au début de la
puberté. Cependant, ce test peut être négatif et il devient dès lors difficile de
distinguer, avant 18 ans, le retard pubertaire simple du déficit gonadotrope isolé.
Il faut alors rassurer la patiente et sa famille. Cependant, après 18 ans, il devient
important de permettre à la jeune fille de mener une vie sociale en rapport avec
son âge.
Le traitement oestroprogestatif tel qu'il a été décrit préalablement est à proposer 4
mois sur 6, la fenêtre thérapeutique de 2 mois permettant d'assister à un éventuel
démarrage d'une puberté retardée comme en témoigneraient alors la survenue
spontanée de règles ou l'augmentation des taux plasmatiques d'estradiol.

2.2. Aménorrhée primaire sans impubérisme


La puberté est normale mais il existe une aménorrhée primaire.

2.2.1. Anomalies des organes génitaux


Dans ce cas, l'aménorrhée s'associe à un morphotype normal, des taux d'hormones
hypophysaires et d'estradiol normaux. La courbe de température, si elle est
pratiquée, retrouve un aspect diphasique témoignant d'une fonction ovarienne
normale et donc d'une anomalie en aval.
L'imperforation hyménéale
Est très rare et est évoquée devant l'existence de douleurs pelviennes cycliques. A
l'examen, on notera une membrane hyménéale imperforée, bleutée, bombée par la
rétention vaginale du sang des règles. Le traitement est chirurgical, consistant en
une incision de l'hymen, en prenant toutes les précautions d'asepsie nécessaires
compte-tenu du risque infectieux majeur.
L'absence congénitale de vagin.
A l'interrogatoire on retrouve des douleurs pelviennes chroniques et à l'examen
mené avec un stylet, on note tout au plus une simple dépression de quelques
centimètres. Le traitement chirurgical ne doit être alors confié qu'à un chirurgien
expérimenté en chirurgie gynécologique reconstructrice.

286
Syndrome de Rokitansky Kuster
L’absence d’utérus s'intègre le plus souvent dans le cadre du Syndrome de
Rokitansky- Kuster associant une absence congénitale à la fois d'utérus (évoqué
par l’échographie pelvienne, confirmé par la coelioscopie) et de vagin. Le traitement
chirurgical visera à la reconstruction d'une cavité vaginale pour permettre une vie
sexuelle.

2.2.2. Syndrome de féminisation testiculaire


C'est un syndrome rare, caractérisé par l'apparition à la puberté de caractères
sexuels secondaires, mais l'attention est attirée par l'absence de pilosité pubienne
ou axillaire.
A l'interrogatoire, on ne retrouve pas de notion d'ambiguïté sexuelle à la naissance.
A l'examen, le vagin est court et la palpation de gonades en position inguinale n'est
pas inhabituelle.
Dans sa forme complète, le tableau hormonal est typique retrouvant un taux de
testostérone haut, à 2 à 3 fois la valeur des taux masculins; les taux d'estradiol
sont aussi hauts, entre 100 et 200 pg/ml, produits de la sécrétion testiculaire et de
l’aromatisation périphérique des androgènes. Le taux de LH est haut, celui de FSH
normal ou peu élevé. Le caryotype retrouvé est 46 XY.
Le mécanisme de ce syndrome est mieux compris aujourd'hui grâce aux progrès
apportés par l'analyse moléculaire du gène du récepteur des androgènes. Diverses
mutations sur le gène codant pour le récepteur des androgènes sont à l'origine
d'une insensibilité complète aux hormones mâles, chez des sujets aux sexes
génétique et gonadique masculins.
La présentation phénotypique du sujet enfant est donc celui d'une petite fille. A
l'adolescence, les taux élevés d'androgènes sont aromatisés en oestrogènes, à
l'origine du développement pubertaire féminin. L’absence de pilosité s'expliquant
par l'absence d'action possible des androgènes.
Le traitement consiste chez ces sujets au morphotype et à la psychologie féminine
en l'exérèse des testicules ectopique, qui présentent un risque de dégénerescence.
La gonadectomie est à proposer après la puberté pour permettre à ces patientes
d'avoir une puberté normale et harmonieuse. Après gonadectomie, un traitement
oestroprogestatif substitutif évite les bouffées de chaleur et les effets néfastes de
l'hypooestrogénie (sécheresse des muqueuses, asthénie, déminéralisation
osseuse).

2.2.3. Syndrome des ovaires polykystiques


Dans ce contexte d'aménorrhée primaire, il s'agit le plus souvent du syndrome des
ovaires polykystisques de type I où le trouble est primitif : il s’agit d’une
spanioménorrhée intense, anovulatoire, s’accompagnant d’une hyperandrogénie
clinique (hirsutisme, acné), de gros ovaires lisses à l’examen clinique et
micropolykystiques en échographie. Les androgènes plasmatiques sont hauts,
surtout la D4-androstènedione. Les taux de gonadotrophines sont dissociés : haut
pour la LH, normal ou bas pour la FSH. Le test à la GnRH retrouve une réponse
explosive sur la LH. Le test aux progestatifs est le plus souvent positif témoignant
alors de la réalité de l'imprégnation oestrogénique (>50 pg/ml). Il semble que la
cause première soit une hypersécrétion de GnRH, en amplitude et en fréquence.
Le traitement symptomatique du syndrome des ovaires polykystiques reposera sur
la restauration des cycles grâce à l'utilisation d'un traitement progestatif 10 jours
par mois.
En cas de besoin de contraception, on pourra proposer une contraception

287
oestroprogestative normodosée qui permettra un freinage optimal de l'axe
gonadotrope.
On pourra surtout si le tableau d'hyperandrogénie est majeur, proposer un
traitement associant l'acétate de cyprotérone à un oestrogène, l'acétate de
cyprotérone présentant une action antiandrogénique majeure en plus d'une forte
action antigonadotrope.
En cas de désir de grossesse, un traitement par citrate de clomiphène est le
traitement de choix, donnant le plus souvent de bons résultats.

2.2.4. L'hyperplasie congénitale des surrénales à révélation tardive


Il s’agit du tableau d’hyperplasie congénitale des surrénales par déficit
enzymatique, le plus souvent en 21-hydroxylase, ou en 11-hydroxylase (15 à 20
fois mois fréquent).
Ces déficits enzymatiques sur la voie des glucocorticoïdes, et à un moindre degré
des minéralocorticoïdes, entraîne à la fois un déficit sur ces axes, et une
hyperproduction d’androgènes.
Soit le déficit est complet et sévère et le diagnostic est alors fait à la naissance
devant une ambiguïté sexuelle ± un syndrome de perte de sel, sur des taux
plasmatiques hauts de 17-hydroxyprogestérone pour le bloc en 21 hydroxylase
et de 11-désoxycortisol (composé S) pour le bloc en 11 hydroxylase. Ces formes
à révélation précoce arrivent à la puberté avec un diagnostic déjà établi et un
traitement entrepris de longue date. La survenue des règles dépend de
l’équilibration hormonale : freinage suffisant (par l’hydrocorticisme
généralement) des androgènes (T, A) sans surdosage.
Soit le déficit est partiel, responsable d’une forme à révélation tardive para - ou
post pubertaire. Le motif de consultation le plus fréquent est l’hirsutisme.
Peuvent y être associés : a) d’autres signes d’hyperandrogénie : hypertrophie
clitoridienne ± marquée, ébauche de soudure postérieure des grandes lèvres,
morphogramme masculin et b) des troubles des règles : la ménarche retardée
peut entraîner la consultation pour aménorrhée primaire, éventuellement suivie
d’une spanioménorrhée a- ou dysovulatoire.
L’existence d’une hypertension est rarement déjà présente dans le bloc en 11-
hydroxylase par excès de production de 11-désoxycorticostérone).
La notion d’hyperplasie surrénalienne dans la famille, oriente le diagnostic. Et dans
tous les cas, que le tableau soit évocateur ou très atténué, le diagnostic repose sur
le test au synacthène (0,25 mg IM) qui entraîne une réponse explosive du stéroïde
précurseur juste en amont du bloc 17-hydroxyprogestérone ou 11-désoxycortisol
selon les cas.
Le traitement repose sur l’hydrocorticisme à titre à la fois substitutif du déficit en
cortisol et freinateur de l’ACTH et de l’hyperproduction surrénalienne d’androgènes.
Souvent, on préférera un traitement antiandrogénique à base d'acétate de
cyprotérone, qui est plus efficace sur l'amélioration des signes d'hyperandrogénie.

3. Aménorrhées secondaires
Il faut toujours garder présent à l'esprit que la grossesse constitue la cause la plus
fréquente d'aménorrhée secondaire. L’examen clinique à la recherche d’un gros
utérus, d’un col violacé et la confirmation de la grossesse par un seul dosage de
bhCG permet souvent d'éviter la multiplication de bilans inutiles.

288
3.1.“Aménorrhées épiphénomènes”
L'aménorrhée peut en effet survenir dans le cadre de maladies générales
(insuffisance rénale, cardiopathie, hépatopathie) et n'être donc qu'un
épiphénomène dont la régression est souvent liée à l'amélioration de la pathologie
sous-jacente.
Outre ces pathologies générales, il faut savoir que nombre de pathologies
endocriniennes peuvent s'accompagner d'une aménorrhée qui, là encore,
régressera avec la correction de la pathologie sous-jacente. Ainsi, il en va :
des pathologies thyroïdiennes
des pathologies surrénaliennes, au cours de la maladie d'Addison mais surtout
dans les tableaux d'hypercorticisme où l'aménorrhée constitue un des premiers
signes.

3.2. Origine utérine


L'aménorrhée peut être secondaire à des synéchies utérines, conséquence de
processus infectieux (tuberculose, endométrite à germes banals) mais aussi
traumatique (curetage abrasif).
Le diagnostic sera évoqué d'emblée d'après l'interrogatoire, conforté par l'existence
d'une courbe thermique diphasique, d'un bilan hormonal normal et de l'absence de
menstruations suite à un traitement oestroprogestatif.
La pratique d'une hystéroscopie ou d'une hystérosalpingographie confirmera le
diagnostic.
Le traitement visera à lever la synéchie et à régénérer, grâce à un traitement
oestroprogestatif séquentiel, la muqueuse utérine.

3.3. Origine ovarienne


Dans ce cas, l'aménorrhée peut résulter de trois mécanismes totalement différents:
soit il s'agit d'une insuffisance ovarienne,
soit un syndrome des ovaires polykystiques.
soit une tumeur virilisante de l'ovaire où l'hyperandrogénie importante est
àl'origined'une inhibition de la fonction gonadotrope.

3.3.1. Insuffisance ovarienne


L'insuffisance ovarienne associe le plus souvent à l'aménorrhée secondaire des
bouffées de chaleur.
Le diagnostic peut être évident en cas d’antécédent de radio- ou de chimiothérapie.
Sinon, on parlera de “ménopause précoce”, liée à un épuisement du capital
folliculaire ovarien; la recherche d’antécédents du même type dans la famille nous
confortera dans ce diagnostic.
Mais il peut s'agir aussi de dysgénésie gonadique (mosaïque découverte à
l’examen du caryotype), d'ovarite auto-immune avec présence d'anticorps anti-
ovaires (rarement mis en évidence), ou de l’exceptionnel Syndrome de Résistance
des Ovaires aux Gonadotrophines.
Quelle qu'en soit l'origine, la patiente présente un tableau hormonal associant des
taux d'estradiol effondré et de FSH très haut et la priorité thérapeutique sera de
pallier les effets de la carence oestrogénique. Un traitement séquentiel associant
oestrogènes et progestatifs s'imposera donc sauf - bien sûr- dans le cas
d'insuffisance ovarienne survenue dans le cadre de traitement de cancers

289
oestrogénodépendants.

3.3.2. Syndrome des Ovaires Polykystiques.


Tout comme il peut être responsable d'une aménorrhée primaire, ce syndrome peut
être à l'origine d'une aménorrhée secondaire, même s'il est vrai que la plupart des
patientes décrivent plutôt l'existence d'une spanioménorrhée, généralement
associée à une hyperandrogénie et une surcharge pondérale.
Là encore, la perte de la fonction cyclique répond à une anomalie du rapport
FSH/LH, au profit de LH, favorisé par l’altération des rétrocontrôles stéroïdiens. Ce
syndrome peut être secondaire à de multiples causes. Il peut s'agir d'une cause
locale (endométriose), générale (variation pondérale), endocrinienne
(hyperprolactinémie modérée, hyperthyroïdie) mais aussi un syndrome de Cushing,
une hyperplasie bilatérale des surrénales, ou encore médicamenteuse
(hyperprolactinémiants, certaines micropilules progestatives, voire des pilules
faiblement dosées en oestrogènes à l'origine d'une faible freination ovarienne).
Le traitement sera bien sûr celui de la cause, alors que sur le plan symptomatique,
la restauration des cycles pourra être obtenue grâce à l'utilisation d'un traitement
progestatif 10 jours par mois.

3.3.3. Tumeur ovarienne virilisante


Il s'agit d'un diagnostic rare mais auquel il faut penser devant la survenue rapide
de signes d'hyperandrogénie (acné, hirsutisme) et d'une aménorrhée secondaire
chez une femme jusque là bien réglée. L'hirsutisme peut être majeur, avec
apparition d'une pilosité sur le visage, le torse, associée à une raucité de la voix. Le
diagnostic est étayé par la découverte de taux plasmatiques de testostérone le plus
souvent supérieurs à 1,5 ng/ml (Nle entre 0,2 et 0,4 ng/ml). Les taux de
gonadotrophines sont le plus souvent effondrés, la conversion des androgènes en
oestrogènes expliquant la freination de sécrétion des gonadotrophines.
En cas de tumeur ovarienne, les examens morphologiques (échographie,
tomodensitométrie) ne permettent pas la mise en évidence d'une tumeur de très
petite taille mais sécrétant de grandes quantités de D4- androstènedione et de
testostérone, androgènes puissants, expliquant l'apparition de signes cliniques
avant même que ne soit visualisée la tumeur. C'est le cathétérisme des veines
ovariennes qui permet jusqu'à maintenant avec le plus de sensibilité de rechercher
une asymétrie du gradient de sécrétion des androgènes entre les deux ovaires,
signant l'unilatéralité de la tumeur. L'exérèse chirurgicale s'impose et le pronostic
est généralement bon.

3.4. Origine hypophysaire


Les causes tumorales sont les plus fréquentes. Le mécanisme peut en être mixte, à
savoir l'existence d'une insuffisance gonadotrope liée d'une part au volume tumoral
et d'autre part à l'hypersécrétion d'une hormone, la prolactine étant le plus souvent
en cause.

3.4.1. Hyperprolactinémies (cf. chapitre suivant)


Outre les adénomes à prolactine, d'autres adénomes peuvent être à l'origine d'une
aménorrhée comme les adénomes non sécrétants ou ceux responsables d'une
maladie de Cushing. Le traitement sera alors chirurgical. Toutes les causes
tumorales ou infectieuses à l’origine d’une aménorrhée primaire peuvent être aussi
à l’origine d’une aménorrhée secondaire (cf chap. Aménorrhées primaires).

290
3.4.2. Causes non tumorales
Outre l'aménorrhée secondaire à une adénomectomie hypophysaire entraînant une
insuffisance gonadotrope, il faut retenir l'insuffisance gonadotrope liée à une
nécrose hypophysaire, dans le cadre du syndrome de Sheehan.
On retrouve toujours d'après l'interrogatoire l'existence d'un accouchement très
hémorragique mais aussi suite à tout autre traumatisme à l'origine d'une nécrose
ischémique.
Dans sa forme globale, le tableau est celui d'une aménorrhée secondaire débutant
avec l'absence de retour de couches lors du post-partum, d'une absence de montée
laiteuse et d'un tableau plus général de panhypopituitarisme.
Les dosages hormonaux des hormones périphériques ainsi que les tests de
stimulation hypophysaire confirmeront le diagnostic.
Le traitement sera avant tout substitutif des diverses fonctions antéhypophysaires
et en ce qui concerne l'axe gonadotrope, associera un oestrogène du 1er au 25ème
jour du mois et un progestatif les 10 ou 12 derniers jours du traitement
oestrogénique.
Les autres causes non tumorales sont plus rares. Elles sont décrites comme
hypophysaires, mais elles peuvent aussi atteindre la tige pituitaire et la base
hypothalamique :
traumatique (section de la tige)
chirurgicale : après exérèse d'adénome hypophysaire
infectieuse : arachnoïdite, séquelles de méningite
infiltration de la base : sarcoïdose, réticulose X...

3.5. Origine hypothalamique dite "psychogène".


Ces aménorrhées surviennent souvent chez une jeune fille antérieurement bien
réglée, dans des conditions diverses allant de l'anorexie mentale au traumatisme
affectif en passant par l'entraînement physique intensif.
L'interrogatoire recherchera l'existence d'un choc affectif, d'une déception
sentimentale, d'une transplantation. Ces aménorrhées peuvent s'accompagner
d'une modification pondérale.
Sur le plan hormonal, on retrouve le plus souvent des taux d'estradiol effondrés de
même que ceux des gonadotrophines. La réponse au test à la LH-RH est
initialement le plus souvent nulle. Le mécanisme de ces aménorrhées reste encore
discuté mais l'existence d'un stress à l'origine d'une hyperstimulation du CRF et
ensuite de b-endorphine, inhibiteur de l'ovulation, est le mécanisme le plus
probable.
Sur le plan thérapeutique, il faut savoir avant tout rassurer, favoriser une
alimentation normale et prendre en charge psychologiquement la patiente. Ces
aménorrhées sont le plus souvent transitoires.
Le traitement hormonal dépend de la profondeur de l’hypoestrogénie :
si la persistance d’une imprégnation estrogénique permet un test à la
progestérone positif, il est possible de continuer un tel traitement progestatif
séquentiel les 10 premiers jours de chaque mois, 4 mois sur 6, la fenêtre
thérapeutique permettant de constater une possible reprise de cycles.
si l’hypoestrogénie est profonde, le test à la progestérone est bien sûr négatif.
Un traitement substitutif associant estradiol et progestérone selon les schémas
antérieurement décrits est nécessaire pour assurer la trophicité cutanéo

291
muqueuse, favoriser un confort physique et psychique et prévenir la
déminéralisation osseuse.
Une fenêtre thérapeutique tous les six mois est souhaitable pour permettre
d'observer une éventuelle reprise de la fonction gonadotrope. Dans ce cas, et
pendant une période intermédiaire, on note une réponse préférentielle de la FSH
sur la LH au cours du test à la LH-RH. Le passage au seul traitement progestatif 10
jours par mois s'impose alors.
En cas de désir de grossesse, tout dépend du stade de déficit gonadotrope. En
phase de récupération, un traitement par citrate de Clomiphène peut être proposé.
En cas d'insuffisance gonadotrope globale persistante, un traitement par
administration pulsatile de LH-RH à l'aide d'une pompe portable peut être proposé,
avec obtention de résultats tout à fait remarquables.

3.6. Aménorrhée post-pilule


On parle d'aménorrhée post-pilule lorsque les règles ne sont pas survenues trois
mois après l'arrêt d'une pilule.
Le diagnostic à éliminer avant tout est celui d'une grossesse. Ensuite, le dosage de
la prolactine s'impose à la recherche d'une hyperprolactinémie préexistante à la
prise de la pilule et masquée pendant la prise de celle-ci. L'hyperprolactinémie
représente 25% des aménorrhées post-pilule. La pratique d'un test à la TRH et d'un
scanner hypophysaire permettront de faire le diagnostic.
En absence d'anomalie hormonale, on parlera de simple inertie de l'axe
gonadotrope; dans ce cas un traitement progestatif séquentiel, 10 jours par mois,
permettra de vérifier l'imprégnation oestrogénique endogène, de contrebalancer
une éventuelle hyperoestrogénie transitoire et d'entraîner des cycles réguliers. En
cas de non reprise des cycles, un test au citrate de Clomiphène devrait permettre le
retour d’une ovulation et la survenue ultérieure de cycles normaux.
En conclusion, la démarche diagnostique d’une aménorrhée passe avant tout par un
examen clinique minutieux qui d’emblée pourra orienter vers une étiologie
particulière. Ainsi, l’existence d’une galactorrhée pourra révéler une
hyperprolactinémie, une dysmorphie associée à un nanisme un syndrome de
Turner. Les dosages plasmatiques d’estradiol et de FSH sont avec celui de la
prolactine à faire dans un premier temps. Ainsi, un estradiol et une FSH bas
orienteront vers une origine hypothalamo-hypophysaire de l’aménorrhée tandis
qu’un taux haut de FSH signera l’existence d’une insuffisance ovarienne. Enfin, la
pratique dans certains cas d’un scanner centré sur la selle turcique constitue un
examen complémentaire précieux à la recherche d’une tumeur hypothalamo-
hypophysaire. C’est au prix de cette démarche que le diagnostic de l’aménorrhée
pourra être correctement posé et le traitement adéquat entrepris.

Références bibliographiques
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France) Endocrinologie 10027 C20, 1991 : 8 pages
CROWLEY W., FILICORI M., SPRATT D.F., SANTORO N. F. The physiology of
gonadotropin-releasing hormone (GnRH) secretion in men and women. Recent
Prog. Horm. Res., 1988 ; 41 : 473-531
FERIN M. Contrôle neuroendocrinien de la fonction gonadotrope. In : Médecine
de la reproduction. P. Mauvais-Jarvis, R; Sitruk-Ware (eds) 2e ed. Flammarion
Médecine-Science ed., Paris, 1988 : pp. 1-16
GOMPEL A., MAUVAIS-JARVIS P. Introductrion of ovulation with pulsatile GnRH
in hypothalamic amenorrhea. Hum. Reprod., 1988 : 3 : 473-477
KUTTENN F., BRICAIRE C. Hyperplasie congénitale des surrénales. In :

292
L’hirsutisme, Monographie. Flammarion Médecine-Science ed., Paris, 1988 : pp.
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KUTTENN F., RIGAUD C., WRIGHT F. MAUVAIS-JARVIS P. Treatment of
hirsutisme by oral cyproterone acetate and percutaneous estradiol. J. Clin.
Endocrinol. Metab., 1980 ; 51 : 1107-1111
RACCAH-TEBEKA B., KUTTENN F., Aménorrhées. Encycl. Med. Chir. (Paris-
France), Thérapeutique, 25219 A 10, 1992 : 10 p.
REAME M.E., SAUDER S. E., CASE G., KELCH R. P., MARCHA J.C. Pulsatile
gonadotropin secretion in women with hypothalamic amenorrhea : evidence that
reduced frequency of GnRH secretion in the mechanism of persistent
anovulation. J. Clin. Endocrinol. Metab., 1983 ; 51 : 851-858
SITRUK-WARE R., VARIN C., CLAIR F., MAUGIS E.L., FERMANIAN J., MAUVAIS-
JARVIS P.In vivo effects of progestins on prolactin secretion. J. Clin. Endocrinol.
Metab., 1983 ; 50 : 575-578

Q.C.M. AMENORRHEE
1. Dans le cadre du bilan d'une aménorrhée secondaire, quels sont les examens
nécessaires à votre orientation diagnostique :
A.Prolactine
B.Estradiol
C. Progestérone
D.FSH
E. Hormone de Croissance (GH)
2. L'origine ovarienne d'une aménorrhée peut-être suggérée par :
A.Des tests séquentiels aux progestatifs négatifs
B.Une FSH élevée
C.L'existence d'une galactorrhée
D.Un scanner hypophysaire normal
E. Un test à la LH-RH négatif
3. Le tableau d'Ovaires Polykystiques (OPK) peut associer :
A.Des signes d'hyperandrogénie
B.Une insulinorésistance
C.Des tests séquentiels aux progestatifs négatifs
D.Des follicules immatures
E.Des taux de progestérone le plus souvent normaux.

293
MENOPAUSE (n° 154)

Catherine Deneux
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker

MENOPAUSE (n° 154)


Abréviations
Points importants
1. Définitions
1.1. Préménopause
1.2. Ménopause
2. Annexes : tableaux et figures
Références bibliographiques :
Questions à choix multiples

Abréviations
THS : traitement hormonal substitutif
AT III : antithrombine III
ATCD : antécédents
CI : contre-iondications

Points importants
* Ne pas confondre :
- la Pré-Ménopause, tant que persiste une secrétion d'estradiol, qui se
traduit par anovulation, dysovulation, cycles irréguliers, signes d'hyperestrogénie
relative
- la Ménopause : il n'y a plus de secrétion d'estradiol. Le taux de FSH est
haut. Le test à la progestérone est négatif (= pas de règles).
* Importance de la prise en charge de la préménopause : nécessité de corriger le
déficit en progestérone et l’hyperestrogénie relative par l’administration de
progestatifs 10 jours/mois, du 16ème au 25ème jour du cycle.
* En l’absence de traitement hormonal, la ménopause confirmée est responsable de
signes de privation oestrogénique :
- à court terme : bouffées de chaleur, asthénie, humeur dépressive, signes
génito-urinaires de carence estrogénique
- à plus long terme : augmentation du risque d’ostéoporose, augmentation
du risque cardio-vasculaire

294
* Le traitement consiste en l'administration d'estradiol et de progestérone.
* L’association d’un progestatif au traitement estrogénique est indispensable afin
d’éviter le risque de développement d’un cancer endométrial.
* Les seules contre-indications formelles du THS sont les ATCD de cancer
estrogeno-dépendant (sein, endomètre).
* Ne pas faire d’amalgame entre contraception estroprogestative et traitement
hormonal substitutif de ménopause estroprogestatif : contre-indications et effets
secondaires différents (du fait de molécules, doses, et voies d’administration
différentes).
En particulier, les ATCD cardio-vasculaires artériels et les désordres
métaboliques ne contre-indiquent pas le THS de ménopause.

1. Définitions
La ménopause se définit éthymologiquement comme la cessation des
règles. Elle est liée au vieillissement de l’ovaire et à l’épuisement du capital
folliculaire (la diminution progressive du capital folliculaire ovarien débute durant la
vie foetale et se poursuit dans l’enfance et tout au long de la vie génitale),
induisant une insuffisance estrogénique.
La ménopause naturelle survient, en France, en moyenne entre 50 et 55
ans. La ménopause est dite “ précoce ” si elle survient avant l’âge de 40 ans. Elle
peut être induite par des causes évidentes : castration chirurgicale, radiothérapie,
chimiothérapie, maladies virales (ovarite ourlienne) ou spontanée. Une ménopause
précoce spontanée impose un bilan étiologique comportant un caryotype (mosaïque
turnérienne méconnue) et la recherche d’anticorps anti-ovaires (causes auto-
immunes). On retrouvera parfois des antécédents familiaux identiques.
La ménopause proprement dite est précédée d’une période de transition : la
“ préménopause ” (périménopause pour les anglo-saxons), de durée variable, qui
est caractérisée par l’installation progressive d’irrégularités menstruelles.

1.1. Préménopause
Cette période correspond à la diminution progressive de la fonction exocrine
de l’ovaire, avec raréfaction puis disparition des ovulations, alors que la fonction
endocrine persiste de façon incomplète et dissociée. Sur le plan clinique, cela se
traduit par l’installation d’irrégularités menstruelles avec cycles dysovulatoires. Sur
le plan hormonal, il en résulte un déficit en progestérone contrastant avec une
sécrétion d’estradiol normale voire élevée; on parle alors d’hyperestrogénie
relative.

1.1.1. Aspects cliniques et hormonaux


Cette période, qui s’étend sur plusieurs années, peut schématiquement être divisée
en trois phases :
1. Première phase dite phase folliculaire courte :
Elle est caractérisée par un raccourcissement des cycles (<25 jours) qui
restent réguliers et ovulatoires. La phase folliculaire est courte (9-10 jours),
alors que la phase lutéale reste de durée normale.
Biologiquement, la seule modification hormonale est une légère élévation de
la FSH plasmatique.
Cette période se caractérise par une nette réduction de la fertilité.

295
2. Deuxième phase dite de corps jaune inadéquat :
Elle est caractérisée par la raréfaction des follicules et par l’inefficacité croissante de
la FSH à parvenir à une maturation folliculaire cyclique normale. L’élévation de la
FSH s’accentue, et du fait de cette hyperstimulation, l’hyperestrogénie est
fréquente (estradiol plasmatique > 200 pg/ml). Les ovulations deviennent tardives
et de qualité médiocre, avec formation d’un corps jaune de mauvaise qualité. La
phase lutéale est raccourcie à 10 - 12 jours et la concentration plasmatique de
progestérone est constamment diminuée.
Ce déséquilibre estroprogestatif favorise oedème et hyperplasie au niveau des
tissus cibles, en particulier le sein et l’endomètre. Ceci se traduit
par des manifestations fonctionnelles : syndrôme prémenstruel, mastodynies
et par le développement de lésions tissulaires : mastopathie bénigne,
hyperplasie endométriale, fibromyomes utérins.
3. Troisième phase dite phase anovulatoire :
Elle correspond à l’épuisement du stock folliculaire. Les ovulations ont disparu mais
les concentrations d’estradiol sont variables et parfois encore hautes.
La FSH plasmatique s’élève encore pour approcher des taux observés après la
ménopause. La LH commence à s’élever.
Les cycles sont longs avec hémorragies de privation irrégulières.

Tableau I - Préménopause ----> Ménopause = les 4 phases

1ère phase : . 41-43 ans


. FSH +
. ovulation précoce
foll. lut.
10 j 13 j

2ème phase :. FSH ++ mais moins efficace


. ovulation tardive
. corps jaune inadéquat
foll. lut.
25 j 10 j
E2 = 200-600pg/ml

3ème phase :. FSH +++


. mais anovulation
cycles longs
E2 = 100pg/ml

4ème phase : . FSH ++++ - E2 effondré - test progestatif négatif


. plus de follicules

296
1.1.2. Traitement
En pratique, au cours de la première phase de la préménopause, ancun traitement
n’est nécessaire.
Par contre, il est souhaitable qu’un traitement séquentiel par des progestatifs
soit instauré dès qu’apparait une insuffisance lutéale :
- ce traitement est administré du 16ème au 25ème jour du cycle,
c’est à dire durant la phase lutéale théorique.
- il permet de régulariser les cycles, mais surtout de prévenir les
conséquences tissulaires du déséquilibre estroprogestatif.
- choix du type de progestatif (cf. tableau 2): il dépend de la
symptomatologie clinique de chaque femme et de l’existence éventuelle de lésions
mammaires ou utérines.

. norstéroïdes : en cas de symptômes mammaires ou utérins


importants
et en l’absence de contre-indications
métaboliques (diabète, HTA, dyslipidémie)
. prégnanes ou norprégnanes : dans tous les autres cas.
- Ce traitement progestatif peut, de plus, assurer une contraception
(bien qu’aucun progestatif, à l'exception de l'Orgamétril°, ne dispose d’AMM dans
cette indication) s’il est utilisé à dose antigonadotrope, c’est à dire . pour les
norstéroides : du 10 ème au 25ème jour pour des cycles de durée normale, du
5ème au 25ème jour si les cycles durent moins de 26 jours (avec donc risque d
'ovulation précoce).
. pour les prégnanes et norprégnanes : du 5ème au 25ème jour.

Il est souhaitable que le traitement progestatif soit poursuivi tant qu’il


déclenche des règles. L’absence de règles à l’arrêt du traitement traduit une
imprégnation estrogénique insuffisante de la muqueuse, secondaire à l’épuisement
de la sécrétion ovarienne. On est alors au stade de ménopause confirmée.

1.2. Ménopause
La ménopause correspond à l’arrêt définitif du fonctionnement ovarien, avec une
aménorrhée irréversible. Celle-ci est confirmée en pratique par un test aux
progestatifs negatif (c’est à dire par l’absence de règles après prise d’un progestatif
pendant 10 jours), 3 cycles consécutivement.
La concentration sérique d’estradiol est effondrée (< 20 pg/ml). Les concentrations
plasmatiques des gonadotrophines FSH et LH sont élevées.

1.2.1. Conséquences cliniques


A court et moyen terme :
Troubles neuro-végétatifs : bouffées de chaleur
trouble fonctionnel le plus fréquent, observées chez environ 60 % des
femmes.

297
manifestations vasomotrices avec sensation de chaleur et crises
sudorales, à prédominance nocturne.
surtout pendant les 2 premières années après l’installation de la ménopause ;
parfois pendant 10 ans.
Troubles psychiques :
asthénie
irritabilité, anxiété, troubles du sommeil, syndrôme dépressif
baisse de la libido
Troubles génito-urinaires :
Aprés plusieurs mois de carence estrogénique, apparait une atrophie du tractus
génital, et des troubles de la statique pelvienne. Les muqueuses génitales sont
pâles et atrophiques lors de l’examen au spéculum. Signes fonctionnels :
sensation de sécheresse vaginale, dyspareunie
incontinence urinaire
A long terme :
Ostéoporose :
La carence estrogénique induit une perte osseuse accélérée qui s’ajoute à la perte
osseuse physiologique liée au vieillissement. Elle est maximale les premières
années qui suivent la ménopause. Chez les femmes dont la minéralisation était
faible ou dont la vitesse de déminéralisation est rapide, elle peut aboutir à une
ostéopénie sévère. Elle intéresse l’os cortical (poignet, fémur) et surtout l’os
trabéculaire (vertèbres).
Les mécanismes d’action des estrogènes sur l’os sont encore mal connus : ils ont
une puissante action inhibitrice de la résorption osseuse, et auraient également une
action directe sur la formation osseuse.
Cette perte osseuse explique l’incidence accrue chez les femmes âgées des
fractures-tassements vertébraux, et des fractures du poignet et du col du fémur.
Pathologies cardio-vasculaires :
L’incidence des maladies cardio-vasculaires chez les femmes en période d’activité
génitale est inférieure à celle observée chez les hommes du même âge. De plus,
diverses études épidémiologiques suggèrent une augmentation du risque
coronarien associée à la ménopause.
Les estrogènes endogènes exerceraient donc un effet protecteur vis à vis du risque
vasculaire artériel. Deux mécanismes pourraient concourir à cette action protectrice
: d’une part un effet direct des estrogènes sur les parois vasculaires, démontré
chez l’animal ; d’autre part, un effet bénéfique sur le profil lipidique.

1.2.2. Traitement
Le traitement hormonal substitutif (THS) ne doit être instauré
qu’après confirmation de la ménopause :
- soit biologiquement par la constatation d’une concentration plasmatique
d’estradiol effondrée associée à des taux de gonadotrophines élevés, notamment
chez les femmes hystérectomisées.
- soit cliniquement par la négativité de 3 tests aux progestatifs consécutifs,
éventuellement associés à des bouffées de chaleur.

298
Les bénéfices attendus du THS sont :
- à court terme: disparition des signes fonctionnels gênant la qualité
de vie des patientes : bouffées de chaleur, troubles de l’humeur, manifestations
génito-urinaires.
- à long terme : . prévention de la perte osseuse
. rôle potentiellement bénéfique sur
la morbimortalité cardio-vasculaire et
l’incidence de la maladie d’Alzheimer

Le THS ayant pour but de corriger les troubles secondaires à la carence


estrogénique, il doit donc, pour être efficace, permettre d’obtenir une concentration
d’estradiol moyenne comprise entre 60 et 80 pg/ml (dosage d’estradiolémie
généralement inutile en pratique).

Principes :
a. Respecter les contre-indications de l’estrogénothérapie :
- liées à leur pouvoir mitogène :
CI absolues : ATCD personnels de cancer du sein et de l’endomètre
CI relatives : ATCD personnels de mastopathie bénigne, de fibromes utérins
ATCD familiaux de cancer du sein : à évaluer au cas par cas
- liées aux effets vasculaires et métaboliques :
Elles concernent - les estrogènes de synthèse : non indiqués dans le THS de
ménopause
- de façon relative : les estrogènes naturels ou conjugués
équins, administrés par voie orale; l’effet de premier passage hépatique aurait des
conséquences défavorables sur les paramètres de la coagulation.
En cas d’antécédents cardio-vasculaires, d’HTA, ou de troubles métaboliques
glucido-lipidiques, on choisira donc une estrogénothérapie extradigestive
(transdermique ou percutanée).
Les antécédents thrombo-emboliques veineux contre-indiquent la voie
orale ; l’utilisation de la voie extradigestive est possible en l’absence d’anomalie
constititionnelle de la coagulation ; l’indication est à discuter au cas par cas en
fonction du rapport bénéfice-risque.

b. Toujours associer un progestatif à l’estrogénothérapie :


Ceci empêche la survenue d’une hyperplasie de l’endomètre, voire d’un
carcinome, que peuvent provoquer les estrogènes administrés seuls.
L’administration d’un progestatif à dose suffisante, au minimum 12 jours par
mois, prévient ce risque.

c. Utiliser des molécules et une voie d’administration respectant au


mieux la physiologie :
- Pour l’estrogénothérapie, on dispose (cf. Tableau III):
. du 17ß-estradiol par voie transdermique, sous forme de patchs ou

299
de gel.
. par voie orale : estradiol micronisé, valérate d’estradiol, estrogènes
conjugués équins.
. rappel : l’ethinyl-estradiol, composante estrogénique des pilules
estro-progestatives, n’est pas utilisé dans l’indication du THS.

L’administration transdermique ou percutanée de 17ß-estradiol présenterait


l’avantage d’une plus grande innocuité métabolique et vasculaire du fait de
l’absence de premier passage hépatique.
(Il faut cependant noter que les études ayant évalué l’effet du THS sont presque
toujours des études anglo-saxonnes où l’estrogène utilisé est un estrogène
conjugué équin.)
De plus, elle permet une adaptation plus facile de la dose.

- Pour le traitement progestatif associé, on aura recours (cf. Tableau II):


. à la progestérone naturelle et ses dérivés
. ou aux prégnanes et norprégnanes

Traitement adaptable :
Afin de moduler le type de molécule et la dose utilisée en fonction de
l’efficacité et la tolérance de chaque patiente.
Dans ce cadre, les associations combinées estro-progestatives “ prêtes-à-
l’emploi ” disponibles en France seulement sous forme orale, présentent
l’inconvénient de ne pas pouvoir être adaptées en fonction des effets observés.

En pratique :
a. Bilan préthérapeutique à la recherche des contre-indications :
- Interrogatoire :
. ATCD personnels : pathologies mammaires et utérines, pathologies cardio-
vasculaires et thrombo-emboliques, troubles métaboliques (dyslipidémie,
hyperglycémie)
. ATCD familiaux : cancer du sein, accidents thrombo-emboliques.
- Examen clinique :
. général : poids, prise de la TA, état veineux des membres inférieurs.
. gynécologique : palpation mammaire, toucher vaginal appréciant la taille
de l’utérus, réalisation de frottis cervico-vaginaux.

- Examens complémentaires :
. mammographie, prescrite systématiquement.
. recherche de troubles métaboliques : glycémie à jeûn, cholestérolémie
totale, triglycéridémie.
. en cas d’ATCD thrombo-emboliques veineux presonnels ou familiaux : bilan
d’hémostase à la recherche d’un déficit en AT III, Protéine C, Protéine S, ou d’une

300
résistance à la protéine C activée ou d'une mutation du facteur II..

b. Choix du traitement administré :


- Choix des molécules et de la voie d’administration :
. l’estrogène : selon les principes énoncés plus haut, on choisira plutôt en
première intention le 17ß- estradiol administré par voie cutanée:
. soit sous forme de gel : dose moyenne de 1.5
mg/jour
. soit sous forme de patch, changé tous les 3 ou 4 jours
: dosage moyen à 50 γ.
Si le THS est débuté à distance de la ménopause, on commencera par des
petites doses d’estrogène.

. le progestatif :
. la progestérone naturelle (ou un dérivé) est choisie en première
intention, en l’absence de facteur mammaire (mastodynies, ATCD de mastopathie
bénigne), ou endométrial (ATCD d’hyperplasie endométriale, de fibrome).
. dans ces dernières situations, on préférera des progestatifs plus
puissants, le plus souvent les dérivés pregnanes ou norpregnanes; rarement, les
dérivés norstéroides en raison de leur effets secondaires métaboliques.

- Schéma thérapeutique (cf. Figure 1) :


. Le schéma habituellement proposé est séquentiel , constitué par
l’administration de l’estrogène du 1er au 25ème jour du mois, associée à celle du
progestatif du 14ème au 25ème jour du mois.
La survenue d’ un saignement (hémorragie de privation), le plus souvent 2 à
3 jours après l’arrêt du THS, est habituelle mais non systématique, et tend à
disparaitre après plusieurs mois ou années.
. Si la patiente ne souhaite pas de saignement, on peut proposer un schéma
combiné continu. L’inconvénient de ce mode d’administration est la survenue assez
fréquente de métrorragies, faisant évoquer la possibilité d’une lésion organique.

- Exemple d’ordonnance :
OESTROGEL : une réglette par jour du 1er au 25ème jour du mois, à
appliquer sur l'abdomen.
UTROGESTAN : 2 capsules par jour du 14ème au 25ème jour du mois

c. Surveillance du traitement :
- Examen clinique : tous les 3 mois pendant les 6 premiers mois,
puis tous les 6 mois.
. Interrogatoire :
recherche de signes de surdosage : mastodynies, sensation de gonflement;
de sous-dosage : bouffées de chaleur, sécheresse vaginale.
Examen : poids, TA, examen mammaire et pelvien.

301
- Mammographie : tous les 2 ans en l’absence de signes d’appel
(RMO).
- Surveillance métabolique (glucido-lipidique): à 6 mois puis
tous les 2 ans.
- En cas de saignement survenant en dehors de la fenêtre
thérapeutique dans le schéma séquentiel, ou lors du traitement continu, il convient
de rechercher une cause endométriale organique : biopsie d’endomètre,
échographie, et surtout hystéroscopie.

Cette surveillance permet d’adapter le traitement, et de dépister la survenue


d’une pathologie mammaire ou endométriale.

Le THS peut être débuté quel que soit le délai après l’installation de la
ménopause. Sa durée n’est pas limitée sauf en cas de survenue d’une pathologie
mammaire ou utérine imposant son arrêt.

2. Annexes : tableaux et figures


Tableau II : Progestatifs utilisés dans le traitement de l’insuffisance lutéale et de
la ménopause.

Classe DCI Nom Doses habituelles


Commercial lors d'un traitement
séquentiel
Progestérone Progestérone Utrogestan 2 gélules : 200 mg
naturelle micronisée
et dérivés Rétro-progestérone Duphaston 2 cps : 20 mg
Pregnanes Acétate de Lutéran 5 2 cps : 10 mg
(dérivés de la 17 chlormadinone
OH-progestérone)
Médrogestérone Colprone 5 2 cps : 10 mg

Acétate de Gestoral 2 cps : 20 mg


medroxyprogestérone
Norpregnanes Acétate de nomégestrol Lutenyl 1 cp : 5 mg
(dérivés de la 19-
nor-progestérone) Promégestone Surgestone 500 1 cp : 500 mg

Démégestone Lutionex 2 cps : 1000 mg

302
Norstéroïdes Lynestrenol Orgamétril 2 cps : 10 mg
(dérivés de la 19-
nortestostérone) Acétate de Primolut-nor 1 cp : 10 mg
noréthistérone

Noréthistérone Norluten 2 cps : 10 mg

Tableau III : Principaux types d’estrogènes utilisés dans le traitement de la


ménopause

Classe DCI Nom commercial Présentation


Oestrogènes 17ß-estradiol Patchs :
naturels
"transdermiques" Dermestril Patch 25 - 50 -100 µg (1)
Estraderm Patch 25 - 50 -100 µg

Menorest Patch 37,5 - 50 - 100 µg

Oesclim Patch 25 - 37,5 - 50 -


75 - 100 µg

Systen Patch 50 µg
"percutanés"
Gel :

Estreva 0,50 mg/pression


Oestrodose 0,75 mg/pression
Oestrogel 1,50 mg/réglette

303
Oestrogènes 17ß-estradiol Estreva Cp 1,5 mg
naturels par
voie orale Estrofem Cp 1 - 2 mg

Oromone Cp 2 mg

Provames Cp 1 - 2 mg

Valérate Progynova Cp 1 - 2 mg
d'estradiol

Oestrogènes Prémarin Cp 0,625 - 1,25 mg


conjugués
équins

(1) la dose indiquée est celle administrée par 24 h. mais l'application du patch se
fait 2 fois/semaine.

Figure 1 : Différents schémas d’administration du THS

1. Schéma séquentiel discontinu classique : J 1 – J 25 + 12 jours de progestatif

J1 J14 J25
|————————————————————| Oestrogène

|—————————| Progestatif

2. Schéma combiné discontinu: J 1 – J 25

|————————————————————| Oestrogène

|————————————————————| Progestatif

3. Schéma combiné continu : J 1 – J 31

J1 J31
|————————————————————————| Oestrogène

|————————————————————————| Progestatif 1/2 dose

304
Tableau IV : Critères d’appréciation de la tolérance clinique des estrogènes

Signes de sous-dosage :
Persistance ou réapparition des bouffées de chaleur
Asthénie
Céphalées
Frilosité
Manque de tonus, état dépressif
Douleurs articulaires
Troubles urinaires
Sécheresse vaginale
Signes de surdosage
Mastodynies
Prise de poids
Ballonnement abdominal
Jambes lourdes
Nervosité, irritabilité, insomnie

Références bibliographiques :
1. Bricaire C, Sitruk-Ware R. Péri et post-ménopause . In : P. Mauvais-Jarvis, G.
Schaison, Ph Touraine. Médecine de la reproduction. 3ème édition. Eds Médecine –
Sciences Flammarion. Paris 1997 : :402-421.

2. Plu-Bureau G. Ménopause. In P Godeau ; Herson S, Piette JC. Traité de


médecine. 3ème Edition. Eds Médecine – Sciences Flammarion. Paris 1996 : 1838-
1841.

3. De Lignières B, Vincens M. Utilisation thérapeutique des estrogènes. In : P.


Mauvais-Jarvis, G. Schaison, Ph Touraine. Médecine de la reproduction. 3ème
édition. Eds Médecine – Sciences Flammarion. Paris 1997 : 467 - 480.

4. Raccah-Tebeka B. Progestatifs. In : P. Mauvais-Jarvis, G. Schaison, Ph Touraine.


Médecine de la reproduction. 3ème édition. Eds Médecine – Sciences Flammarion.
Paris 1997 : 481-514.

Questions à choix multiples


1. A propos de la préménopause :
C’est une période propice au développement de fibromyomes utérins

305
Les mastodynies, fréquentes au cours de cette période, sont la conséquence de
l’hypoestrogénie.
Aucun traitement hormonal n’est souhaitable au cours de cette phase.
L’administration séquentielle d’un progestatif peut permettre de régulariser les
cycles.
La survenue d’une grossesse est possible au cours de cette période.
2. La ménopause :
Est liée au vieillissement hypothalamo-hypophysaire entrainant un défaut de
stimulation des ovaires.
Est dite précoce si elle survient avant 40 ans.
S’associe à une perte osseuse accélérée, du fait essentiellement de la carence
en progestérone.
Peut être affirmée devant l’absence de règles spontanées depuis 3 mois chez
une femme de 50 ans.
Peut s’accompagner de modifications de l’humeur.
3. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont des contre-indications au
traitement hormonal de la ménopause :
Hypercholestérolémie familiale
Hypertension artérielle
Antécédent personnel de cancer du sein
Coronaropathie
Ostéoporose
4. En cas de mastodynies lors d’un traitement hormonal de la ménopause, il
convient de :
Diminuer la dose quotidienne de progestatif
Diminuer la dose quotidienne d’estrogène
Diminuer la durée de prise d’estrogène
Associer un diurétique
Arrêter le traitement
5. Au cours de la surveillance d’un traitement hormonal de ménopause:
Il convient de réaliser une ostéodensitométrie tous les ans.
Les frottis cervico-vaginaux ne sont plus utiles au-delà de 50 ans.
En cas de traitement séquentiel, la survenue de saignements pendant la fenêtre
thérapeutique doit faire pratiquer une hystéroscopie.
Une hyperlipidémie doit être recherchée après 6 mois de traitement;
Une mammographie doit être régulièrement réalisée, même en l’absence de
signe d’appel clinique.

306
CONTRACEPTION (n° 155)
Catherine Deneux
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker

CONTRACEPTION (n° 155)


Abréviations
Points Importants
1. Contraception hormonale
1.1. Contraception orale
1.2.Contraception parentérale
1.3. Analogues de la LHRH
1.4. L'antiprogestérone : RU 486
2. Contraception mécanique
2.1. Stérilets ou dispositifs intra-utérins
2.1.1.Types
2.2. Contraception intravaginale
3. Contraception post-coïtale par les estrogènes
4. Stérilisation tubaire
5.Contraception masculine
5.1. Préservatifs
5.2. Méthodes hormonales
5.3. Vasectomie
5.4. Gossypol
En conclusion
Références bibliographiques
Questions à choix multiples

Abréviations
EP Estroprogestatif
NO monoxyde d'azote
OE estrogène

Points Importants
Effet contraceptif des contraceptions hormonales :
-estroprogestatifs : inhibition gonadotrope réalisée par le progestatif

307
essentiellement par l’éthinyl-estradiol pour les pilules normodosées
-macroprogestatifs : inhibition gonadotrope
microprogestatifs : action locale sur la glaire, la motilité tubaire, la nidation.
Recherche de contre-indications aux différents modes de contraception:
interrogatoire : antécédents personnels et familiaux
examen clinique : poids, TA, état veineux, palpation mammaire, examen
gynecologique
examens biologiques : glycémie, bilan lipidique
bilan de coagulation en cas d’antécédents thromboemboliques personnels ou
familiaux
Schématiquement, choix d’une contraception en fonction
du terrain :
Jeune fille : minipilule estroprogestative
-Femme non nullipare < 35-40 ans : minipilule estroprogestative ou stérilet
Au delà de 35-40 ans : macroprogestatifs ou stérilet (sauf si nullipare)
En cas de contre-indications métaboliques (diabète, dyslipémie, HTA, tabac) :
< 35-40 ans : microprogestatifs
au delà : macroprogestatifs

en l’absence de nulliparité : stérilet, quel que soit l’âge


La contraception devrait offrir une efficacité totale, une innocuité complète, une
bonne acceptabilité et préserver la fertilité ultérieure. Une telle méthode n'est pas à
l'heure actuelle disponible.
Deux grands types de méthodes peuvent être proposés aux femmes : les
contraceptions hormonales et les contraceptions mécaniques.

1. Contraception hormonale

1.1. Contraception orale

1.1.1.Estroprogestatifs (EP) :
Un peu moins de 30% des femmes françaises en période d'activité génitale utilisent
la pilule classique.
Composition des EP.
l'ethinyl-estradiol est actuellement le seul estrogène de synthèse à être
utilisé,
il est employé pour son pouvoir antigonadotrope, complet à 100 µg/24 h,
modéré ou négligeable à 30 µg/24 h.
les progestatifs sont dérivés du groupe des norstéroïdes en raison du fort
pouvoir antigonadotrope de ces produits. Leur action contraceptive s'exerce
à plusieurs niveaux : antigonadotropes, ils ont également une action
périphérique s'opposant à la nidation par atrophie de l'endomètre, ils rendent
la glaire impropre à la pénétration des spermatozoïdes et diminuent la

308
mobilité tubaire.
Classification des pilules (Tableau I)
En fonction du contenu en estrogène, on distingue :
les pilules macrodosées > 50 µg d'éthinyl estradiol,
les pilules normodosées : 50 µg,
les pilules minidosées : < 50 µg.
En fonction du mode d'administration des estrogènes et des progestatifs :
pilules combinées (ou monophasiques) où la composition des comprimés est
fixe au cours du cycle ;
pilules biphasiques où 2 types de comprimés de composition différente
existent au cours du cycle ;
pilules triphasiques comportant 3 types de comprimés ;
pilules séquentielles où l'éthinyl-estradiol est administré seul 7 à 14 jours
puis en association avec un progestatif.
En fonction du contenu relatif en estrogène et en progestatif :
Il existe des produits a) à prédominance estrogénique = "climat" estrogénique, b) à
prédo-minance progestative : pilule progestative dominante, et c) des pilules
équilibrées. Il est tout à fait essentiel de bien connaître la composition des pilules
afin d'en indiquer correctement l'emploi.
.Association aux dérivés récents (dits "de 3ème génération") des norstéroïdes.
Dans le but de diminuer les effets secondaires des associations estroprogestatives,
en partie imputés au pouvoir androgénique des norstéroïdes, les laboratoires
pharmaceutiques ont mis au point des molécules dérivées des norstéroïdes mais qui
seraient moins androgéniques que les molécules connues auparavant. Il s'agit du
désogestrel, du gestodène et du norgestimate. Ces produits sont dérivés du
norgestrel et lui sont toujours comparés dans les études pharmacologiques ; or, ce
gonane est le plus androgénique de tous les progestatifs. Certains de ces produits
conservent en fait un certain pouvoir androgénique. De plus, les associations ainsi
générées avec l'éthinyl-estradiol paraissent privilégier la potentialité estrogénique
ce qui peut en limiter la tolérance au niveau des tissus-cibles. Une augmentation
des accidents thromboemboliques a par ailleurs été rapportée.
Mode d'administration
Les pilules normodosées sont débutées au 5° jour du cycle, poursuivies 21 jours et
interrompues 7 jours, période pendant laquelle surviennent les métrorragies de
privation. Les pilules minidosées sont débutées au 1er jour du premier cycle de
traitement en raison de leur efficacité plus faible.
Effets secondaires des estroprogestatifs

1.1.2.RISQUES VASCULAIRE ET THROMBOEMBOLIQUE.


Plusieurs études ont montré une corrélation positive entre la mortalité par accidents
cardiovasculaires chez la femme et l'utilisation d'estroprogestatifs. Les accidents
observés sont artériels (AVC, infarctus du myocarde), hémorragiques (hémorragie
méningée) ou veineux (phlébite, embolie pulmonaire). Cette mortalité s'accroît
avec l'âge et le tabagisme (tableau II). L'association à d'autres facteurs de risque
(hyperlipémie, HTA, diabète...) potentialise également le risque dû aux
contraceptifs.
Tietze a montré que si l'absence de contraception exposait toujours à une mortalité

309
plus importante que n'importe quel type de contraception, ceci n'était plus vrai pour
la contraception orale après 40 ans.
Si la diminution du contenu des estrogènes de 100 µg à 50 µg a permis de réduire
le nombre d'accidents cardiovasculaires, la preuve du bénéfice théorique obtenu par
le passage de 50 à 40, 30, et maintenant 20 µg n'est pas encore réellement
apportée.

Tableau II : Mortalité par accidents cardio-vasculaires en fonction de l'âge et du


tabagisme pour 100.000 années femmes, d'après l'étude des praticiens anglais
portant sur 46.000 femmes(Lancet 1981, I, 541).

Age (ans) Tabac Taux de décès Risque relatif


Contraception
Contraceptio contrôles versus
n contrôles

15-24 - 0 0 -
+ 10.5 0
25 - 34 - 4.4 2.7 1.6
+ 14.2 4.2 3.4
35 - 44 - 21.5 6.4 3.3
+ 63.4 15.2 4.2
> 45 - 52.4 11.4 4.6
+ 206.7 27.9 7.4

1.1.3.MECANISMES DU RISQUE VASCULAIRE.


Les facteurs à prendre en compte dans le risque vasculaire des estroprogestatifs
sont :
leur action sur la paroi vasculaire :
sur les facteurs de la coagulation
sur les métabolismes glucidiques, lipidiques et la TA.
Il ne semble pas que l'effet délétère se situe au niveau de la paroi des vaisseaux,
car les estrogènes, y compris les estrogènes de synthèse, paraissent plutôt
bénéfiques à ce niveau :
- action antiathérogène, par un effet antioxydant et modification du
métabolisme des lipides au sein de la paroi artérielle
- action vasodilatatrice, en favorisant la synthèse de monoxyde d'azote (NO)
facteur relaxant de l'endothelium vasculaire, la synthèse de prostacycline,
mais aussi par un effet direct sur la paroi artérielle impliquant le blocage des
canaux calciques.L'action des progestatifs est moins bien connu.
En revanche, et contrairement au traitement substitutif de la ménopause qui fait
appel à des molécules (estradiol naturel), des voies d'administration (possiblement
extra-digestive), et des doses différentes (plus faibles) (Tableau III) et a un effet
protecteur de la paroi vasculaire, les estroprogestatifs augmentent le risque
vasculaire par un mécanisme qui paraît essentiellement thromboembolique, par
leurs effets sur les facteurs de la coagulation, et aussi la tension artérielle et les
métabolismes lipidique et hydrocarboné.

310
Tableau III : Différences des risques vasculaires en contraception et traitement
de la ménopause. * OE = estrogènes

CONTRACEPTION TRAITEMENT SUBSTITUTIF


ESTROPROGESTATIVE DE MENOPAUSE
molécules -OE* synthèse -OE naturels
- norstéroïde - Progestérone ou
(nor)-pregnanes
doses supra physiologiques physiologiques
voie orale orale ou extra digestive
Risque vasculaire THROMBOSE ATHEROSCLEROSE

Coagulation :
Le risque thromboembolique existe dès les premiers mois de prescription
d'estroprogestatifs et ne peut être prévu par des tests de coagulation.
Les estrogènes de synthèses sont responsables d'une hyper-coagulabilité en
rapport avec une synthèse accrue de facteurs de la coagulation et d'une diminution
des anticoagulants naturels (antithrombine III), action située au niveau hépatique.
Cette action persiste avec les pilules minidosées.
L'effet des progestatifs norstéroïdes reste mal étudié. Il ne fait cependant pas de
doute qu'à fortes doses ils aient une potentialité thromboembolique. A faibles doses
(microprogestatifs) seul le lynestrenol modifie l'antithrombine III.
Tension artérielle :
L'élévation des pressions systolique et diastolique est pratiquement constante sous
estroprogestatifs (95 p. cent des femmes) ce qui constitue en soi un facteur de
risque vasculaire. Cinq pour cent environ des femmes deviennent hypertendues.
L'existence d'antécédents familiaux d'HTA prédispose tout particulièrement à ce
risque. Les estrogènes de synthèse induisent une rétention hydrosodée ; ils
stimulent la synthèse d'angio-tensinogène (substrat de la rénine) au niveau
hépatique et modifient les constantes cinétiques de la réaction rénine. Les
progestatifs ont certainement aussi une responsabilité dans le risque hypertensif,
variable avec les molécules et encore mal étudié. L'effet positif de la baisse du
contenu en estrogènes en dessous de 50 µg ne paraît pas être aussi net sur les
chiffres de pression artérielle que celui obtenu par le passage de 100 à 50 µg.
Métabolisme lipidique :
Les estrogènes de synthèse administrés per os sont responsables d'une synthèse
accrue des VLDL et donc d'une élévation des triglycérides plasmatiques de l'ordre
de 20 à 80 p. cent par rapport au taux initial. Dans 80 p. cent des cas, les chiffres
normaux ne sont pas dépassés. Les progestatifs norstéroïdes sont capables, s'ils
sont très androgéniques (c'est le cas du norgestrel) d'abaisser les triglycérides. La
résultante de l'effet sur les triglycérides dépend de la potentialité relative de la
pilule employée.
Les estrogènes de synthèse élèvent en parallèle le HDL-cholestérol par baisse de
son épuration hépatique. Les progestatifs norstéroïdes ont un effet inverse corrélé
au pouvoir androgénique. La résultante est là encore fonction de la nature de
l'association progestative : plus une pilule est estrogénique, plus elle élève le HDL-
C, mais cette élévation est associée toujours à une élévation parallèle des
triglycérides. Peut-on raisonnablement considérer que la seule optimisation du

311
rapport HDL/LDL, quel que soit son mécanisme, est corrélée à une amélioration du
risque cardiovasculaire ?
L'effet sur le métabolisme des lipides n'est pas significativement différent à 50 µg
et 30 ou 40 µg d'éthinyl estradiol. On a même montré que 20 µg d'éthinyl-estradiol
administrés isolément peuvent être responsables d'une élévation des triglycérides.
Métabolisme hydrocarboné :
Les estroprogestatifs altèrent la tolérance aux hydrates de carbone. Le rôle des
estrogènes de synthèse paraît majeur mais le mécanisme exact de leur action reste
incomplètement élucidé (insulinorésistance, stimulation de la glucogénèse
hépatique...).
Les progestatifs (norstéroïdes) ont une action anabolisante plus ou moins marquée.
Quoi qu'il en soit, l'association estroprogestative est diabétogène et l'existence d'un
diabète représente une contre-indication à la prescription d'estroprogestatifs, quelle
que soit la formule ou la composition des estroprogestatifs, l'intolérance
hydrocarbonée persistant avec les pilules minidosées, et celles contenant un
progestatif dit "de 3ème génération".
Action sur le poids :
Une prise de poids peut survenir sous estroprogestatifs, plusieurs facteurs sont
impliqués : rétention hydrosodée, effets anabolisants des progestatifs, stimulation
de l'appétit par les estroprogestatifs. Devant une prise de poids exagérée, il faut
rechercher un diabète ou une hyperlipidémie.
En résumé les estroprogestatifs élèvent les triglycérides, la TA, modifient la crase
sanguine, le métabolisme glucidique. Les effets se conjuguent pour accroître le
risque vasculaire, d'autant qu'il existe une potentialisation des différents facteurs :
si le risque de faire un infarctus du myocarde est de 1 en l'absence de tout facteur
de risque, il est multiplié par 4 s'il y a un facteur, par 10 s'il y en a deux, par 78 à
170 s'il y en a trois ou plus.

1.1.3.RISQUE CELLULAIRE.
Estrogènes et progestatifs ont un effet antagoniste sur les tissus cibles (sein,
endomètre). Les estrogènes stimulent la croissance et la multiplication cellulaires,
la progestérone s'oppose à leur action et transforme les tissus prolifératifs en tissus
secrétoires. Toute hyperestrogénie absolue (taux nul de progestérone) ou relative
(rapport estrogène/progestatif supérieur à 1) favorise l'apparition de dystrophies
bénignes ou malignes du sein et de l'endomètre. Ainsi :
le risque de cancer de l'endomètre est accru chez les femmes jeunes sous
contraception séquentielle fortement dosée en estrogènes prescrite de manière
prolongée ;
2) le risque de cancer du sein est augmenté de 7 à 11 fois chez les femmes
sous contraceptifs oraux ayant une mastopathie bénigne préexistante ou
apparue au cours de la prise d'estroprogestatifs ;
3) le risque de mastopathie bénigne est inversement proportionnel au taux de
progestatif, à dose estrogénique égale ; 4) en revanche, une contraception orale
équilibrée protège contre la survenue de dystrophie en supprimant une
sécrétion inadéquate de gonadotrophines, responsable de dysovulation et donc
d'hyper-estrogénie relative.
C'est dire qu'il ne faut pas prescrire de contraception orale chez les femmes ayant
des antécédents personnels de mastopathie bénigne, de cancer du sein ou de
l'endomètre. La notion de cancer hormonodépendant dans la famille proche incite
également à la prudence.

312
Jusqu'au début des années 80, les études épidémiologiques portant sur
l'aggravation éventuelle du risque de cancer du sein sous contraceptifs oraux,
étaient rassurantes, montrant un effet neutre voire protecteur des contraceptifs
oraux. Des études plus récentes pondèrent cependant un peu cet optimisme : elles
montrent de manière assez concluante qu'il existerait une majoration du risque
chez les femmes ayant utilisé la pilule à un âge précoce, avant la première
grossesse menée à terme et pendant une durée prolongée (> 8 ans). Cependant le
nombre de femmes ayant un cancer du sein et appartenant à ces groupes est
encore très restreint, compte tenu de la latence prolongée de sa survenue, rendant
à l'heure actuelle impossible une mise en cause majeure de la pilule. De plus, la
variété des types de pilules utilisées rend aléatoire une analyse du risque en
fonction de leur composition. Les exigences épidémiologiques nécessitent
d'attendre la fin du siècle pour savoir si réellement la pilule constitue un facteur
certain d'aggravation du risque de cancer du sein, et compte-tenu des bénéfices
globaux apportés par ce type de contraception il ne saurait s'agir, dans l'état actuel
des connaissances, d'en déconseiller l'emploi, sous couvert du respect des contre-
indications.
Sous mini-pilule, on s'attachera tout particulièrement à dépister la survenue de
dystrophies bénignes (mastodynie, syndrome prémenstruel, kyste fonctionnel de
l'ovaire). Leur action antigonadotrope étant souvent incomplète, une sécrétion
endogène d'estrogène notable peut persister (responsable d'une hyperestrogénie
relative). Il semble que les préparations triphasiques, mises au point dans le but de
diminuer les spottings soient plus souvent responsables de dystrophies ovariennes.
On manque encore d'informations sur le retentissement des nouvelles classes de
mini pilules comportant des progestatifs dits de "3ème génération".
Les cancers malpighiens ne sont pas hormonodépendants. La présence de dysplasie
du col ou d'antécédents de cancer malpighiens ne représente pas une contre-
indication à l'emploi des estroprogestatifs. La fréquence du cancer du col n'est pas
modifiée par la pilule et les consultations nécessaires au renouvellement des
ordonnances permettent d'en pratiquer le dépistage précoce.

1.1.4.RISQUE HEPATIQUE.
Estrogènes de synthèse et progestatifs peuvent être responsables de cholestase ou
de son équivalent le prurigo (tout comme la grossesse), d'élévation modérée des
transaminases (rôle du radical alkyl en C17 nécessaire à leur action par voie orale
en ralentissant leur métabolisme hépatique).
Au décours d'une hépatite virale, il est conseillé d'attendre un mois après la
normalisation des transaminases pour prescrire un estro- progestatif. En revanche
les hépatopathies persistantes contre-indiquent la prise d'estroprogestatifs.
La péliose et les tumeurs hépatiques (adénomes, hamartomes, hyperplasie
nodulaire) sont peu fréquentes. Le risque d'adénome augmente après 7 ans
d'utilisation de la contraception orale. Les décès (estimés à 16 p. cent dans une
série de 70 cas) se font par rupture et hémorragie.
L'augmentation de la fréquence de la lithiase biliaire cholestérolique est dûe à la
modification de la composition de la bile par les estrogènes de synthèse (diminution
des acides biliaires et augmentation du cholestérol).
AMENORRHEES "'POST-PILULES" ET PROLACTINE.

Les estrogènes stimulent la multiplication des cellules hypophysaires à prolactine.


La prise d'estroprogestatifs démasque ainsi un certain nombre d'adénomes à
prolactine. Il est de bonne règle de pratiquer un dosage de prolactine s'il survient
une aménorrhée à l'arrêt de la pilule, ou chez des femmes mal réglées avant la
prescription de cycles artificiels.
L'interruption à intervalles réguliers de la contraception orale, dans le but d'éviter

313
un freinage trop prolongé de l'axe hypothalamo- hypophysaire, ne paraît pas
souhaitable (risque élevé de grossesses pendant la "fenêtre", la nécessité d'un
autre type de contraception n'étant pas toujours bien comprise - effet nocif du
freinage prolongé non prouvé). En revanche, un dosage occasionnel de prolactine
peut permettre de dépister une hyperprolactinémie latente.
L'aménorrhée peut être normoprolactinémique : il s'agit souvent d'une aménorrhée
"psychogène" dont la cause est confondue avec celle qui a provoqué l'abandon de
la contraception.
Dans tous les cas, un bilan endocrinien complet doit être pratiqué avant de
prescrire à nouveau un traitement hormonal.

1.1.5.COMPLICATIONS DERMATOLOGIQUES.
Chloasma, herpès gestationnis, acné, séborrhée et hirsutisme sont directement en
rapport avec la nature hormonale de la prescription. Le lupus érythémateux
disséminé, la porphyrie cutanée sont favorisés par l'administration d'estrogènes ; la
survenue de toxidermie, d'érythème noueux est possible.
- Indications, contre-indications (voir Tableau IV).
- Prescription et surveillance.
Lors de la première consultation, un examen clinique et un bilan biologique
dépistent les contre-indications : 1) par l'interrogatoire : les antécédents
personnels ou familiaux s'opposant au traitement (notamment les accidents
vasculaires précoces familiaux qui semblent exposer au risque d'accidents
vasculaires sous pilule) ; 2) par l'examen clinique : HTA, obésité, mastopathies
bénignes ou malignes ; 3) par la biologie : bilan lipidique (cholestérol, triglycérides
à jeun), glycémie à jeun et post- prandiale. On répète ce bilan à trois mois, à six
mois, puis tous les ans.
Aucun test de l'hémostase ne permet de prévoir un risque thromboembolique. S'il
existe une pathologie familiale de thrombose, un dosage d'antithrombine III, de
Protéine C, de Protéine S, une recherche de Résistance à la Protéine C activée
(mutation Leyden du facteur V) et une recherche de la mutation du Facteur II,
permettent de dépister un déficit congénital.
Des frottis de dépistage sont pratiqués une fois par an.
En cours de traitement, on s'attache à dépister : survenue de mastodynie,
mastopathies bénignes, kyste fonctionnel de l'ovaire, ce qui doit faire modifier la
thérapeutique.
Le choix de l'estroprogestatif de première intention reste discuté : la majorité des
auteurs conseillent une prescription de minipilule en raison de la réduction
théorique du risque vasculaire parallèle à la réduction du contenu en stéroîdes de
synthèse. Si tel est le cas, il est tout à fait important de dépister un effet
antigonadotrope incomplet, inconvénient majeur de ces produits. Il ne faut alors
pas hésiter à faire appel à une pilule plus fortement dosée.

314
Tableau IV

CONTRE-INDICATIONS INDICATIONS PARTICULIERES


METABOLIQUES ET VASCULAIRES METABOLIQUES ET VASCULAIRES
Diabète
HTA
Obésité
Cardiopathies
Thrombo-embolie Pathologie vasculaire
cérébrale et périphérique
Angor
Acné,séborrhée,hirsutisme
Migraines
Hyperlipidémie: pilule estrogénique
Tabagisme dominante
Insuffisance rénale Mastodynie sous minipilule ou pilule
équilibrée
Antécédents familiaux d'accidents
antécédents d'endométriose,
vasculaires précoces
d'hyperplasie endométriale, de
Varices importantes fibrome : pilule progestative
dominante
Après un curetage : pilule séquentielle
En cas de nausées, prise de poids :
pilule plus faiblement dosée en
estrogène
CELLULAIRES -
Mastopathies bénignes et malignes
Hémorragies génitales non explorées
Endométriose
Tumeurs hypophysaires
Otospongiose

AUTRES -
Affections hépatiques sévères ou
récentes
Lupus
Porphyries

1.1.2. Progestatifs :
les progestatifs utilisés en contraception appartiennent à deux classes. Celle des
norstéroïdes (macro ou microdosés) et celle des prégnanes et de leurs dérivés, les
norpregnanes, employés seulement à fortes doses.

315
1.1.2.1.Norstéroïdes :
Ces progestatifs sont dérivés de la normethyltestostérone par suppression d'un
groupe methyl en C19.
Propriétés :
Ils sont caractérisés par un certain nombre de propriétés souvent différentes de
celle de la progestérone naturelle :
propriétés communes et passant par le récepteur de la progestérone
ce sont d'excellent antiestrogènes :
ils diminuent la quantité de récepteur de l'estradiol, et ils stimulent
l'activité de l'enzyme 17ß-hydroxystéroïde déshydrogénase,
ils s'opposent à la prolifération endométriale, atrophiant l'endomètre
aux fortes doses. Ils s'opposent aussi à l'effet des estrogènes au
niveau mammaire, freinant la prolifération épithéliale et l'oedème
induit par les estrogènes.
Ce sont de puissants antigonadotropes, à fortes doses, propriété
exploitée pour la contraception.
En revanche, ils sont dépourvus de certaines actions de la
progestérone :
ils se lient comme elle au récepteur des androgènes mais contrairement à
la progestérone qui a un pouvoir antiandrogènique, ils peuvent avoir un
certain degré d'effet androgénique (chez - 15 % des sujets).
Ils peuvent avoir une action de rétention hydrosodée par synthèse accrue
d'angiotensinogène au niveau hépatique, contrairement à la progestérone
qui est antiminéralocorticoïde.
Mode de prescription
. Progestatifs macrodosés :
Administrés à la dose de 10 mg/jour du 10° au 25° jour du cycle si les cycles sont
de 26 jours ou plus et du 5° au 25° jour en cas de cycles courts. Ils sont très
efficaces.
Ils sont particulièrement indiqués lorsqu'existe une maladie estrogéno-dépendante
= mastopathie, hyperplasie endométriale, fibrome, tumeur hypophysaire.
Leur emploi est limité par leur retentissement métabolique et vasculaire =
susceptible d'interférer avec le métabolisme glucidique, lipidique, la pression
artérielle, le poids, et non dénués de risques thromboemboliques. Leur emploi est
restreint aux patientes dépourvues de pathologie vasculaire et métabolique.
- Progestatifs microdosés (Tableau V)
Ils sont prescrits à très faibles doses, en continu et doivent être pris à heure fixe.
Ils ne sont efficaces qu'après le premier mois d'utilisation.
A ces doses ils respectent théoriquement l'ovulation, leur action étant uniquement
périphérique et triple : - coagulation de la glaire, qui la rend imperméable aux
spermatozoïdes, - atrophie de l'endomètre qui devient défavorable à la nidation, -
ralentissement du transit tubaire de l'ovule.
En fait, dans un cas sur deux, la dose est suffisante pour exercer un effet
antigonadotrope partiel : le pic de LH est écrêté et des dystrophies ovariennes sont
ainsi induites, en limitant l'emploi. Les antécédents de kystes ovariens fonctionnels
constituent donc une contre-indication. De plus, leur mode d'action rend compte de
leur efficacité limitée.

316
A ces doses en revanche, il n'existe aucun retentissement vasculaire ni
métabolique, ce qui en a fait la contraception de choix de la femme à haut risque.
Effets secondaires : leur efficacité reste incomplète, surtout si sont associés des
médicaments pouvant diminuer l'absorption digestive (antibiotiques) ou accélérant
leur dégradation hépatique (inducteurs enzymatiques). Dans de tels cas, il faut
utiliser un autre mode de contraception tant que dure le traitement.
Les spottings et l'aménorrhée sont fréquents,
ils favorisent la survenue de grossesses extra-utérines,
l'apparition de kystes fonctionnels de l'ovaire et/ou d'intolérance mammaire doit
en faire interrompre l'administration.

Tableau V

EXLUTON Lynestrenol 0,5 mg


MICROVAL Levonorgestrel 0,03 mg
MILLIGYNON acétate de norethistérone 0,6 mg
OGYLINE norgestriénone 0,350 mg

1.1.2.2.Pregnanes :
Ce sont des progestatifs dérivés de la 17-hydroxyprogestérone. Les principaux
employés sont l'acétate de chlormadinone et l'acétate de cyprotérone.
Ils sont doués de propriétés proches de la progestérone : pouvoir
progestomimétique sur l'endomètre, activité antiestrogène (plus modeste que celle
des norstéroïdes), activité antigonadotrope qui nécessite des doses plus élevées
que celles employées pour les norstéroïdes. Ils n'ont pratiquement pas d'activité
androgène. L'acétate de cyprotérone, qui en fait partie, est un puissant
antiandrogène.
Leur mode d'action contraceptive est exercé par leur pouvoir antigonadotrope joint
aux actions périphériques des progestatifs. Cependant, ils ne sont pas équivalents :
l'acétate de chlormadinone est employé à la dose de 10 mg par jour en 2 prises
obligatoires en raison de la demi-vie relativement courte, en continu ou du 5°
au 25° jour chez les femmes ayant une fertilité réduite. A ces doses, l'effet
freinateur sur l'ovaire peut être incomplet, variable selon les patientes. Il est
souvent responsable de spottings parfois gênants.
L'acétate de cyprotérone est employé à la dose de 50 mg par jour en une prise
(un comprimé). A cette posologie, c'est un puissant antigonadotrope dont l'effet
met cependant 2 mois à être total. Il s'administre du 5° au 25° jour du premier
cycle, arrêt 7 jours, reprise 21 jours etc... En raison de l'hypoestrogénie induite,
on associe une administration d'estradiol percutané dans un but uniquement
substitutif. Son indication privilégiée est le traitement de l'hirsutisme et de
l'acné sévères.
Ces produits sont dénués de tout retentissement métabolique et vasculaire. Ils
peuvent donc être appelés à remplacer les microprogestatifs dans la contraception
de la femme à risque. Signalons l'intérêt de l'Androcur® (sans estrogénothérapie
associée) chez les femmes lupiques, constituant la seule contraception totalement
efficace proposée dans cette pathologie.

317
1.1.2.3.Norpregnanes :
ces progestatifs sont dérivés des pregnanes par perte d'un radical methyl en C19.
Ces produits sont d'emploi récent dans la contraception. Ceux utilisés dans cette
indication sont l'acétate de nomegestrol et la surgestone. Administrés du 5° au 25°
jours du cycle, ils exercent leur effet contraceptif au niveau central et périphérique.
On manque encore de recul pour affirmer leur efficacité contraceptive qui paraît
meilleure pour l'acétate de nomegestrol que pour la surgestone aux doses utilisées.
On manque également encore d'informations concernant leur tolérance métabolique
et vasculaire bien que les premières études tendent à montrer leur innocuité.
Leur principal inconvénient est la survenue fréquente de troubles des règles :
spotting, aménorrhée.
Il est possible qu'ils constituent dans l'avenir une alternative pour la contraception
chez les patientes à risque métabolique et à fertilité diminuée.

1.1.3. Interactions médicamenteuses


- Médicaments diminuant l'efficacité des contraceptifs oraux :
inducteurs enzymatiques
barbituriques, phenytoïne, carbamazépine, primidone, méprobamate, gluthétimide,
griséofulvine, rifampicine, dérivés pyrazolés, chlorpromazine, DDT.
diminution de l'absorption digestive
Les antibiotiques en modifiant la flore intestinale modifient le cycle entéro-
hépatique : ampicilline, oxacilline, tétracycline.
Interaction des contraceptifs oraux avec d'autres médicaments :
Toxicité accrue de : antidépresseur tricyclique (imipramine), benzo-
diazépines, métoprolol et propanolol, caféine, phénytoïne, theophylline et
dérivés .
Hépatotoxicité en association avec : la cyclosporine, la troléan-domycine.
Efficacité diminuée de : guanéthidine, methyldopa, paracétamol,
hypoglycémiants oraux, anticoagulants oraux.

1.2.Contraception parentérale
Dans le but de diminuer les effets secondaires des contraceptifs oraux en rapport
notamment avec l'effet de premier passage hépatique, des tentatives sont
conduites pour administrer les produits par voie extradigestive.
Les molécules administrées sont presque toujours des progestatifs norstéroïdes
en particulier le norgestrel.
Administration par anneaux vaginaux : ce sont des anneaux de silastic
composés d'un réservoir contenant du norgestrel seul ou associé à de l'estradiol.
Le produit est absorbé par voie vaginale et diffuse dans l'organisme.
L'administration extra-digestive permet la bonne tolérance métabolique.
L'anneau est placé dans le vagin 3 semaines et retiré la 4° pour permettre les
métrorragies de privation. Les effets secondaires sont surtout locaux.

Administration par implants : Norplant®. Six capsules de silastic contenant du


norgestrel sont implantées dans le tissu sous-cutané de la face antérieure du
bras ; le norgestrel est diffusé de manière constante. Aux taux plasmatiques
obtenus, le mode d'action contraceptive est analogue à celui des
microprogestatifs per os mais la diffusion continue explique probablement la
meilleure efficacité. Cette contraception est efficace pendant 5 ans, peut être

318
retirée n'importe quand. Les spottings sont fréquents la première année et
diminuent après.
Administration IM de copolymères contenant du norgestrel. Elle permet
d'assurer une contraception pendant 3 à 6 mois sans effets secondaires
systémiques. Elle reste peu employée.
L'acétate de médroxyprogestérone est utilisé sous forme injectable retard
(dépo-) depuis longtemps. Il est en principe actif 3 mois après une injection de
500 mg. Dans les jours suivant l'injection le taux plasmatique est élevé mais
décroît au cours du temps et l'effet antigonadotrope devient incomplet en fin de
période d'efficacité.
Ce produit, aux doses fortes employées, bien qu'appartenant au groupe des
pregnanes, est susceptible de modifier les fractions lipidiques (baisse du HDL-C) et
de comporter un risque thromboembolique. Certains imputent cet effet à une
liaison de la molécule au récepteur des androgènes, d'autres à une liaison
relativement importante au récepteur des glucocorticoïdes.

1.3. Analogues de la LHRH


Ce sont des produits beaucoup plus puissants que la molécule naturelle en raison
de la substitution d'acides aminés hydrophobes dans les régions clés du
décapeptide (en position 6 et 10). Ils se lient au récepteur de la LH-RH et sont
responsables initialement d'un effet biologique (libération de LH et de FSH).
Cependant, leur temps de liaison aux récepteurs est élevé ; ainsi les récepteurs
disparaissent de la surface de la cellule gonadotrope hypophysaire, aboutissant au
phénomène de désensibilisation hypophysaire : la stimulation de la sécrétion de LH
et de FSH est ainsi supprimée.
La voie d'administration est intranasale ou sous-cutanée. La dose varie de 400 à
600 µg/jour en une seule prise par voie intranasale. A 400 µg/jour, il persiste une
sécrétion endogène d'estradiol indiquant l'association à un progestatif séquentiel.
En revanche, une freination plus complète de la sécrétion ovarienne expose aux
inconvénients d'une hypoestrogénie prolongée et est obtenue aussi par voie sous-
cutanée. C'est dire que ces produits ne peuvent pas répondre aux exigences d'une
contraception tout-venant, d'autant que leur coût en est extrêmement élevé. En
revanche, ils peuvent être intéressants chez les patientes à haut risque
métabolique et thromboembolique ou dans les maladies estrogénodépendantes,
permettant de réaliser une castration chimique transitoire en raison des
inconvénients majeurs de l'hypoestrogénie.

1.4. L'antiprogestérone : RU 486


Il s'agit en fait plutôt d'une méthode abortive. C'est une molécule non stéroïdienne
proposée comme antiprogestérone et antiglucocorticoïde. Il s'oppose à l'action de la
progestérone lorsqu'il y a eu nidation au niveau de la zone d'implantation de l'oeuf
dans la muqueuse utérine. Il a aussi un effet antigonadotrope (par action
progestative partielle). Il est actif à la dose de 600 mg en une seule prise,
seulement s'il y a eu nidation, avant 7 semaines d'aménorrhée, avec une efficacité
de 85 %. L'association aux prostaglandines améliore l'efficacité.
Cette méthode nécessite un environnement médical avec la pratique d'examens
cliniques, de dosages de ß-hCG et d'échographies utérines : il faut vérifier
l'efficacité de la méthode, un saignement survenant même en cas d'échec. Le
produit n'est pas ou peu actif sur les GEU.
La nécessité de transfusions existe dans 2 à 3 % des cas.
Des hémorragies importantes surviennent dans 18 % des cas.

319
2. Contraception mécanique

2.1. Stérilets ou dispositifs intra-utérins


Les dispositifs intra-utérins sont employés par environ 10 p. cent des femmes en
âge de procréer.

2.1.1.Types
Il en existe diffrents modèles.
Stérilets au cuivre :
Gravigarde, Gyne-T 200 et 380, ML Cu 250 et 375, Nova T Schering, Ombrelle 250,
T au cuivre Schering, T Cuivre-argent Schering. L'adjonction de cuivre permet
d'augmenter l'effet contraceptif, de diminuer la taille du stérilet et d'en améliorer la
tolérance. A changer tous les deux ans.
Stérilet à la progestérone :

Progestasert® : diminue les hémorragies mais favorise les GEU, au au


levonorsgestrel : Mirena®, présenté comme plus efficace.

2.1.2.Efficacité et mode d'action


L'indice de Pearl est entre 1 et 4 p. cent* (entre 1 et 2 p. cent pour les stérilets au
cuivre).
Le mode d'action est incomplètement connu : on admet que le corps étranger
produit une réaction inflammatoire inhibant l'implantation de l'oeuf.
La présence du cuivre renforce la réaction endométriale ; il y a également une
modification des réactions enzymatiques locales.

2.1.3.Mise en place du stérilet


Chaque stérilet a un inserteur de modèle différent. Les stérilets sont, en règle,
livrés avec leur propre inserteur. La pose s'effectue après une hystérométrie avec
une asepsie rigoureuse et impérative. Les fils sont coupés et on apprend à la
femme la technique de surveillance afin de dépister une éventuelle expulsion. Le
moment le plus opportun pour la pose se situe à la fin des règles (le col est encore
entrouvert et le risque de grossesse minime) mais il peut être posé en post-
abortum ou post-partum immédiat. Signalons la possibilité d'une contraception
post-coïtale offerte par la pose d'un stérilet moins de cinq jours après le rapport
fécondant (d'autant plus efficace que l'on est proche du rapport).

2.1.4.Inconvénients et accidents
GROSSESSE
Si une grossesse intra-utérine survient, il est recommandé d'enlever le dispositif
intra-utérin. Cette attitude est justifiée par l'augmentation du risque d'avortement
septique et de septicémie si le stérilet est laissé en place.
Le taux de fausses couches spontanées avec stérilet en place est élevé (55 p. cent)
; si le dispositif intra-utérin est retiré, il atteint 20 à 30 p. cent.
GROSSESSE EXTRA-UTERINE
Sa fréquence est d'environ 5 p. cent : une grossesse sur 20 est ectopique (pour
une fréquence de 1/300 grossesses dans la population normale). Si le stérilet
diminue la fréquence de la grossesse intra-utérine, il est sans action sur la

320
grossesse extra-utérine et le risque relatif de celle-ci est donc accru.

* Nombre de grossesses pour 100 années femmes = nombre de grossesses x 1200


nombre de mois d'observation
EXPULSIONS.
Leur taux est variablement apprécié (1 à 2 p. cent), plus important chez la
nullipare, il est maximal pendant les trois premiers mois suivant l'insertion et dans
le post-partum.
Elles représentent 0,2 à 8,7 pour mille insertions. Elles sont moins fréquentes avec
les nouvelles techniques d'insertion par retrait. Elles surviennent le plus souvent
lors de la pose mais sont parfois tardives. Elles sont favorisées par la nulliparité, la
grande multiparité, la présence de lésions de tuberculose ou d'adénomyose
fragilisant l'utérus, l'existence d'une cicatrice utérine corporéale. Elles doivent être
suspectées si les fils disparaissent ; elles sont souvent indolores. Le stérilet peut
être enlevé (après avoir été repéré par radiographie de l'abdomen sans
préparation) sous coelioscopie si la migration est récente. Des adhérences se
développent rapidement indiquant la laparotomie si le diagnostic est retardé.
MENO et METRORRAGIES.
Avant de leur attribuer une valeur fonctionnelle, les causes organiques habituelles
doivent être éliminées. Le volume des règles augmente presque constamment
après la pose d'un stérilet.
LES DOULEURS
Elles sont une cause non négligeable d'échec de la méthode. Il faut toujours
s'assurer qu'elles ne signent pas une grossesse extra-utérine ou une salpingite. Le
retrait et la pose d'un autre stérilet peuvent être efficaces. Il semble que la
motivation de l'opérateur intervenant dans la pose du stérilet soit fondamentale.
LES INFECTIONS.
Elles sont le risque majeur du stérilet. Elles peuvent être responsables de stérilité
définitive. C'est dire que la pose d'un stérilet chez une nullipare doit rester
exceptionnelle. Leur fréquence est diversement appréciée : on inclut dans certaines
études les infections non confirmées par coelioscopie. Le risque de salpingite est
augmenté de 3 à 7, plus important chez la nullipare.
CONTRE-INDICATIONS
Les contre-indications seront dépistées par l'interrogatoire et l'examen clinique
(comportant des frottis systématiques). Ce sont : les antécédents d'infections
annexielles aiguës ou chroniques, les myomes sous muqueux et polypes, les
malformations utérines, les cicatrices utérines corporéales, les synéchies, les
affections malignes gynécologiques, la grossesse bien sûr.

2.2. Contraception intravaginale


Diaphragmes
L'efficacité du diaphragme est donnée, par l'indice de Pearl, entre 1,4 et 4
(l'efficacité augmentant avec la durée d'utilisation). C'est une capsule de
caoutchouc souple munie d'un ressort qui permet l'application sur les parois
vaginales. Il se place au maximum deux heures avant le rapport et doit être laissé
en place huit heures après. L'association à des crèmes ou à des gels spermicides
est indispensable. Il en existe de différentes tailles ; à l'occasion de la consultation
gynécologique on détermine la taille adaptée à la femme et on lui explique le
maniement du diaphragme en vérifiant la bonne compréhension de la méthode
(mise en place correcte vérifiée par le repérage du col à travers le caoutchouc). On

321
considère que la grande majorité des échecs provient d'une mauvaise utilisation du
dispositif.
Les contre-indications sont 1) locales : prolapsus utérin important, cystocèle ou
rectocèle importants, rétroversion ou antéversion utérines sévères, déchirures
périnéales, fistules recto ou vésico-vaginales, le post-partum immédiat ; 2) d'ordre
psychologique : aversion manifeste à la méthode, incapacité d'apprendre son
utilisation correcte.
Les incidents sont rares : irritation ou allergie au caoutchouc ou aux spermicides (le
changement de marque permet de trouver une solution).
Spermicides
Leur utilisation isolée est insuffisante, leur efficacité étant inférieure à celle du
diaphragme.
Les spermicides sont des substances placées dans le vagin sous forme d'ovules, de
crème, de gel. Ils agissent en modifiant le pH vaginal et/ou en provoquant une
destruction des spermatozoïdes. Leur efficacité est extrêmement variable.
Actuellement, on dispose surtout de dérivés du chlorure de benzalkonium. Pour ces
derniers, les unidoses ou la crème semblent plus efficaces que les ovules ; leur
durée d'action est de 10 heures, et 4 heures. Les premiers peuvent être mis en
position debout, les derniers doivent être mis en position allongée, la femme
observant cette position au moins dix minutes avant le rapport. Il ne doit pas être
fait de toilette vaginale avant ni pendant plusieurs heures après le rapport. Une
toilette vulvaire est possible. Un intérêt supplémentaire des spermicides est leur
propriété antiseptique jouant un rôle certain dans la prévention des maladies
vénériennes.

Tampons spermicides Pharmatex®


Ce sont des éponges composées de mousse polyvinylique imbibée de spermicide
(chlorure de benzalkonium). L'efficacité est immédiate dès l'introduction vaginale et
dure 24 heures. Aucune toilette vaginale ne doit être pratiquée tant qu'il est en
place, comme pour les autres spermicides.

3. Contraception post-coïtale par les estrogènes


Les produits utilisés sont : le diéthylstilbestrol à la dose de 50 mg/24 h, l'éthinyl-
estradiol : 500 µg/24 h et les estrogènes conjugués : 30 mg/24 h pendant 3 à 5
jours. Si le pic de LH n'a pas eu lieu, les estrogènes le retardent. S'il a eu lieu, ils
font proliférer la muqueuse la rendant impropre à une nidation. Ils doivent être
administrés moins de 72 heures après le rapport et leur efficacité (entre 0 et 2,4 p.
cent d'échecs) est d'autant meilleure que la prise est précoce. La tolérance est
médiocre (nausées et vomissements pratiquement constants).
Par les estroprogestatifs

L'administration de 2 comprimés de Stediril® à 12 heures d’intervalle est


actuellement proposée.
Stérilet
Il est possible de réaliser une contraception post-coïtale par la pose d'un stérilet au
cuivre moins de cinq jours après un rapport fécondant.

4. Stérilisation tubaire
L'efficacité de la stérilisation tubaire est totale. Les techniques employées
actuellement tendent à permettre une certaine réversibilité de l'acte. Certaines

322
peuvent être pratiquées par voie coelioscopique. L'électrocoa-gulation et la
thermocoagulation font place aux méthodes mécaniques par clips ou agrafes
permettant une reperméabilisation plus aisée. L'hospitalisation est de courte durée
(quelques heures à 24 heures).
S'il existe des contre-indications à la coelioscopie (laparotomie antérieure,
affections cardiorespiratoires, obésité), d'autres voies d'abord sont possibles
(minilaparotomie, culdotomie postérieure).
Cette intervention ne peut être pratiquée qu'avec l'accord écrit des deux membres
du couple. Les succès des interventions de déstérilisation sont estimés à 30 p. cent.

5.Contraception masculine

5.1. Préservatifs
Les préservatifs dont on dispose actuellement ont une efficacité assez satisfaisante
(indice de Pearl : 3 à 5 p. cent). Les échecs tiennent, semble-t-il, aux erreurs
d'utilisation. Le préservatif doit être placé avant toute pénétration et changé avant
tout nouveau contact. Ils constituent une prévention efficace de la transmission des
maladies vénériennes. Certains sont lubrifiés, d'autres enduits de spermicides, ce
qui renforce leur efficacité.

5.2. Méthodes hormonales


Les méthodes hormonales ont en commun leur efficacité incomplète et le délai
d'action et de réversibilité tenant à la durée de la spermatogenèse (trois mois). Les
stéroïdes employés ou les analogues de la LHRH ont une action antigonadotrope sur
FSH et LH. La testostérone doit être administrée à fortes doses et les effets
secondaires sont importants (métaboliques et hépatique). Les progestatifs, l'acétate
de cyprotérone, les analogues de la LHRH, doivent être associés à la testostérone
pour préserver une libido ce qui en diminue l'efficacité contraceptive.

5.3. Vasectomie
L'efficacité de la vasectomie est excellente. Les accidents et incidents sont
pratiquement inexistants. La réversibilité est fonction de la technique employée
pour la stérilisation, du délai entre celle-ci et la demande de déstérilisation. Elle
peut atteindre 70 p. cent.

5.4. Gossypol
Extrait du coton, le gossypol inhibe la mobilité des spermatozoïdes. En
expérimentation en Chine, des dérivés moins toxiques sont à l'étude :
l'inconvénient majeure de ce produit est la réversibilité inconstante de son action.
Des tubulopathies avec perte de potassium ont été rapportées. Le principe de ce
produit ou de ses dérivés serait cependant idéal : actif sélectivement (et
réversiblement) sur la spermatogenèse, il respecte la fonction endocrine du
testicule.

En conclusion
Aucune contraception n'est actuellement idéale ; chaque patiente constitue un cas
particulier et il faut bien connaître les méthodes à proposer afin de trouver la
solution la mieux adaptée et ne pas hésiter à en varier au cours du temps.

323
Références bibliographiques
1. Basdevant A, De Lignières B, Conard J. Contraception hormonale féminine. In :
P. Mauvais-Jarvis, G. Schaison, Ph Touraine, eds. Médecine de la Reproduction.
3ème édition. Ed Médecine–Sciences, Flammarion. Paris 1997 : 517-527.
2. Duranteau L, Lorgerot-Lebrun H. Contraception hormonale chez la femme.
Médecine Thérapeutique 1996 ; 2 : 453-470.
3. Spira A, Plu-Bureau G. Contraceptifs oraux remboursés et non remboursés :
analyse critique. Eds INSERM Paris 1993.

Questions à choix multiples


1. Les pilules microprogestatives :
A. Peuvent entraîner une aménorrhée
B. Exercent un effet contraceptif par inhibition gonadotrope
C. Sont contre-indiquées en cas de diabète
D. Peuvent favoriser la survenue de kystes ovariens.
E. Sont un facteur de risque de grossesse extra-utérine
2. Une mastodynie (tension douloureuse des seins) sous pilule contraceptive :
A. Est sans conséquence et banale
B. Témoigne d’un déséquilibre estroprogestatif
C. Doit, si elle persiste, faire changer de pilule
D. Est fréquente en cas de contraception macroprogestative
E. Evoque l’existence d’oedème du tissu mammaire
3. Le risque d’accident cardio-vasculaire lors de la prise d’une contraception
estroprogestative est augmenté en cas de :
A. Diabète
B. Hypertension artérielle
C. Hypercholestérolémie
D. Age > 40 ans
E. Tabagisme
4. Les pilules séquentielles normodosées ou macrodosées peuvent être utilisées :
A. Temporairement après un curetage
B. Chez une femme de 30 ans primipare désirant une contraception
C. En cas de mastopathie bénigne
D. En cas d’hyperplasie utérine
E. En cas de fibrome utérin
5. Quelle contraception pouvez-vous proposer à une femme de 41ans, ayant
eu 2 enfants et tabagique :
A. Pilule estroprogestative minidosée
B. Stérilet

324
C. Pilule estroprogestative normodosée
D. Macroprogestatif
E. Préservatifs

325
DYSLIPIDEMIES
Sophie VIDAL-JESSEL

Dyslipidémies
Liste des abréviations
INTRODUCTION
PHYSIOPATHOLOGIE
1.1 Les lipides
1.2 Les lipoprotéines
1.3 Le métabolisme des lipoprotéines
CLASSIFICATION
2.1 Les dyslipidémies primitives
2.2 Les dyslipidémies secondaires
3 CLINIQUE
3.1 Les signes cliniques
3.2 Les signes biologiques
4 Le traitement
4.1 Les moyens thérapeutiques
4.2 Les indications

Liste des abréviations


AA Acide aminé
ACAT Acyl coA cholestérol acyl tranférase
AG Acide gras
AGL Acide gras libre
CE Cholestérol estérifié
CHOL Cholestérol
CL Cholestérol libre
CT Cholestérol total
CM Chylomicrons
HDL High density lipoprotéin
IDL Intermedary density lipoprotéin
LDL Low density lipoprotéin
LH Lipase hépatique
LPL Lipoprotéine lipase

326
RET Ration énergétique totale
TG Triglycérides
VLDL Very low density lipoprotein

INTRODUCTION
Sous le terme de dyslipidémie sont regroupées plusieurs pathologies qui ont comme
point commun, l'augmentation de certains lipides sanguins. Elles peuvent être
d'origine génétique, ou environnementale, mais le plus souvent multifactorielles.
Elles sont importantes à connaître, à dépister, et à traiter car certaines peuvent
exposer à des accidents aigus. Mais surtout, elles peuvent comme
l'hypercholestérolémie, être un facteur de risque cardio-vasculaire majeur qu'il faut
s'efforcer de corriger à tout prix.
Après un rappel de la physiopathologie, seront abordés : la classification, les signes
cliniques et la prise en charge thérapeutique des dyslipidémies.

PHYSIOPATHOLOGIE

1.1 Les lipides


Les lipides sanguins sont : le cholestérol total (CHOL), les triglycérides (TG), les
phospholipides (PL) et les acides gras libres (AG).

1.1.1 Les acides gras


Les acides gras sont formés d'une chaîne carbonée, avec un nombre pair de
carbone, plus ou moins longue qui se termine par un radical COOH et répondent
donc à la formule chimique suivante : CH3-(CH2)n-COOH.

COOH

CH3
Acide gras saturé
COOH

CH3
AG monoinsaturé

COOH

CH3
AG polyinsaturé

Lorsque l'AG ne contient pas de double liaison, on parle d'AG saturé ; s'il a une
double liaison, on le dit monoinsaturé ; enfin, s'il a plusieurs doubles liaisons on
parle d'AG polyinsaturé.
On appelle AG essentiels, les acides gras indispensables à l'organisme et que celui
ci n'est pas capable de synthétiser.

327
Les acides gras sont une source d’énergie pour les muscles.

1.1.2. Le cholestérol
Le cholestérol total est la somme du cholestérol libre et du cholestérol estérifié.
La molécule du cholestérol est une chaîne aromatique qui se présente ainsi :

CH3

CH3
CH3
CH3
CH3

3
OH

Le cholestérol estérifié a 1 molécule d'AG branchée en position 3.


Le cholestérol est le précurseur des hormones stéroïdiennes et des acides biliaires.
Il est également le constituant essentiel des membranes cellulaires.

1.3 Les triglycérides


Les triglycérides sont composés d'une molécule de glycérol sur laquelle sont
branchées 3 molécules d'AG sur les carbones 1, 2, et 3.

H H
H C OH H C AG
H C OH H C AG
H C OH H C AG
H H
Molécule de Molécule de
glycérol triglicérides

Ils représentent 95% des lipides d'origine alimentaires.

1.1.4 Les phospholipides


Constituants essentiels des membranes cellulaires, les phospholipides ont une
structure plus complexe et diverse suivant les molécules. Ces molécules
contiennent un acide phosphorique qui les rend polaires et qui leur permet de servir
d'interface entre le milieu aqueux et les éléments hydrophobes.

1.2 Les lipoprotéines


Les lipides sont insolubles dans l'eau. Pour permettre leur solubilisation dans le
plasma et leur circulation dans l'organisme, ils sont fixés à des protéines que l'on

328
appelle « apoprotéines ». Le complexe « apoprotéine + lipide » constitue une
« lipoprotéine ». Les lipoprotéines répondent toutes à la même structure générale :
un noyau central constitué de cholestérol estérifié et de triglycérides ainsi qu’une
couronne périphérique composée d'apoprotéine, de cholestérol libre et de
phospholipides.

Apoprotéine

CE
Phospholipide
TG

Cholestérol
libre

Il existe 5 lipoprotéines principales :


les chylomicrons,
les VLDL (very low density lipoprotéin),
les LDL (low density lipoprotéin),
les IDL (intermedary density lipoprotéin),
les HDL (high density lipoprotéin).
Leur composition en triglycérides et cholestérol est variable.

1.2.1 les chylomicrons


Ce sont des molécules volumineuses. En électrophorèses, elles ne migrent pas et
restent à l'origine. Les apoprotéines majoritaires sont l'Apo B48, l'Apo C et l'Apo E.
Ils contiennent 86 à 90% de TG, et 0,5 à 3% de CHOL. Ils assurent le transport des
TG d'origine exogène (alimentaire) et ne sont retrouvés normalement qu'en période
postprandiale.

1.2.2 les VLDL


Cette lipoprotéine a, en électrophorèse, une migration intermédiaire en préß. Les
principales Apoprotéines sont l'Apo B100, l'Apo C et l'Apo E. Elle est riche en TG
puisqu'elle en contient 55 à 60% de TG pour 18 à 22% de CHOL. Les TG
transportés sont ceux d'origine endogène.

1.2.3 les LDL


En électrophorèse cette lipoprotéine a une migration intermédiaire en ß. Elle est
riche en CHOL : 40 à 50% de CHOL pour 8 à 12% de TG. On la retrouve à jeun
dans le plasma. Elle assure la distribution du CHOL aux tissus périphériques.
L'Apoprotéine majoritaire est l'Apo B100.

1.2.4 Les HDL


Elle migre sur la bande α en électrophorèse. Elle contient les Apoprotéines A, C et
E. Paradoxalement cette lipoprotéine est dite riche en CHOL, mais elle n'en contient
que 17 à 23%. Elle contient peu de TG : 3 à 6%. Elle assure le transport “reverse”

329
du CHOL (transfert du CHOL des tissus périphérique au foie).

1.3 Le métabolisme des lipoprotéines

1.3.1 le métabolisme des chylomicrons (CM)


Les TG d'origine alimentaire subissent l'action de la lipase gastrique dans l’estomac,
puis pancréatique dans le tube digestif. Ils sont alors hydrolysés en AG, en glycérol
et en monoglycérides qui sont absorbés par les cellules épithéliales de la muqueuse
digestive. Les TG sont resynthétisés dans la muqueuse digestive et sont déversés
dans la circulation générale après un trajet lymphatique. Dans la circulation
générale, les chylomicrons se chargent en apoprotéine, en particulier en Apo CII
transférée des HDL. Sous l'effet de l'Apo CII, la lipoprotéine lipase est activée et les
TG sont hydrolysés, libérant ainsi des AG libres qui sont captés par les tissus
périphériques (adipeux et muscle). Les chylomicrons s'appauvrissent en TG et
donnent naissance à des particules : les « remnants » de chylomicrons,
proportionnellement plus riches en CHOL. Les remnants de chylomicrons sont
captés par le foie, par l'intermédiaire de récepteurs spécifiques, où ils subissent une
dégradation complète.
En l'absence de lipoprotéine lipase, il n'y a pas d'hydrolyse des TG et il existe une
hypertriglycéridémie.

Rémnant
CM FOIE
Tube digestif
Apo CII
Apo CII
LPL

TG CM
Tissus Adipeux

E E AGL
B48 B48
Muscle

1.3.2 le métabolisme des VLDL


Les TG endogènes sont synthétisés par le foie à partir des résidus glucidiques, de
l'hydrolyse des chylomicrons, et de la lipolyse du tissus adipeux. Ces TG associés
aux l'apoprotéines B100, C et E et au cholestérol forme les VLDL. Ces VLDL
subissent l'action de la lipoprotéine lipase, activée par l'apo CII, qui permet la
libération des TG captés par les tissus périphériques (tissus adipeux et muscle). Ces
particules VLDL, ainsi appauvries en TG et enrichies proportionnellement en CHOL
deviennent des IDL ou remnants de VLDL qui vont se fixer sur des récepteurs
spécifiques au niveau du foie. Dans le foie, une partie des IDL va être catabolisée,
une autre partie sera transformée en LDL sous l'action de la lipase hépatique.
En l'absence de lipoprotéine lipase, il y a une accumulation de VLDL se traduisant
par une augmentation des TG et du CHOL.

330
E B100 E B100 E
B100 LPL

FOIE VLDL IDL LDL

Lipase hépatique
Apo CII
Recepteur ApoBE TG

Tissus
Muscle
Adipeux

1.3.3. le métabolisme des LDL


Les LDL sont synthétisées à partir des IDL par la lipase hépatique. Le LDL va se
fixer sur les récepteurs membranaires de l'apoprotéine B100 et E des cellules des
tissus périphériques et hépatiques.

FOIE

B100 E B100 E

IDL LDL

LH
Tissus
périph

Après fixation au récepteur, la lipoprotéine est internalisée, puis hydrolysée par les
enzymes lysosomiales, libérant ainsi du cholestérol libre. Cette libération entraîne :
un rétrocontrôle négatif sur la synthèse et la mobilisation des récepteurs du LDL ;
une activation de l'Acyl CoA cholestérol acyl transférase qui permet le stockage du
CHOL dans la cellule sous forme estérifiée ;
un rétrocontrôle négatif sur l'activité de l'HMG CoA réductase, enzyme-clé de la
synthèse du CHOL.
En cas de déficit ou de saturation des récepteurs LDL, l'épuration du CHOL ne peut
avoir lieu. Cela se traduit par une augmentation du CHOL total. Après avoir
séjourné plus longtemps dans le plasma, celui ci est épuré par les récepteurs
"scavenger" des macrophages. Il est internalisé, puis dégradé par le macrophage
en CHOL libre. Le CHOL libre y est ensuite estérifié, puis stocké. Le macrophage
prend alors l'aspect d'une cellule spumeuse qui va se déposer dans les parois
artérielles et former les stries lipidiques correspondant aux premières lésions
d'athérosclérose.

331
LDL
Récepteurs
CL
a
LDL b
c
AA CE

1 2 3 4

1 Fixation a diminution de l'activité de


2 Internalisation HMG coA réductase
b activation de l'ACAT
3 Hydrolyse lysosomiale
c diminution du nombre de
4 Régulation enzymatique récepteurs des LDL

1.3.4 Le métabolisme des HDL


Les HDL naissantes sont synthétisées par le foie, le tube digestif, mais proviennent
aussi du catabolisme des VLDL, et des chylomicrons. Elles s’enrichissent
progress4ement en Apo A (provenant des chylomicrons) et en CHOL libre
(provenant des membranes cellulaires). Le CHOL libre est ensuite estérifié sous
l’action de la LCAT (lecithin cholesterol acyl transférase) activée par l’Apo A1. Les
HDL naissantes se transforment ainsi en HDL 3 puis en HDL 2. Parallèlement, l’Apo
E des HDL est transférée aux VLDL. Les HDL2 se fixent sur les récepteurs Apo A1
du foie, où elles sont ensuite métabolisées et éliminées dans les sels biliaires. Les
HDL2 peuvent être retransformées en HDL 3 sous l’action de la lipase hépatique. Il
existe des échanges entre les molécules de HDL 2 et de VLDL. En effet sous l’action
de la CETP (cholesterol ester transfert protein) les TG des VLDL migrent sur les
HDL2, tandis que le CHOL estérifié des HDL2 migrent vers les VLDL. Il existe donc
des échanges continus entre les HDL2 et HDL3 ainsi qu’entre les HDL2 et les VLDL.

332
II CLASSIFICATION
Il faut distinguer les hyperlipidémies primitives des secondaires. Ces dernières
doivent systématiquement être éliminées. En effet, la prise en charge de la maladie
primitive permet dans la majorité des cas de normaliser le bilan lipidique. Pour ce
qui est des dyslipidémies primitives, la classification retenue est la classification
internationale de Frederickson.
Classification Anomalie des Fréquence
lipoprotéines
internationale
Type I chylomicrons <1%
Type IIa LDL 40 %
Type IIb LDL + VLDL 30 %
Type III IDL + VLDL <1 %
Type 4 VLDL 30 %
Type V Chylomicrons + VLDL <1 %

2.1 Les dyslipidémies primitives

2.1.1 Dyslipidémie de type I


L'hyperlipoprotéinémie de type I est liée à un défaut d'activité de la lipoprotéine
lipase, empêchant l'hydrolyse des chylomicrons. Ce défaut d'activité est lié soit à un
déficit en LPL, soit en un déficit de son activateur l'Apo CII. Elle est exceptionnelle
et de transmission autosomique récessive.
Elle se caractérise par :
un sérum lactescent à jeun ;
une augmentation des chylomicrons ;

333
un CHOL normal ou légèrement augmenté ;
une sensibilité à l'alimentation ;
pas de migration en électrophorèses.
Cette dyslipidémie n'est pas athérogène.

2.1.2 Dyslipidémie de type IIa


Il s'agit de l'hypercholestérolémie essentielle. Le plus fréquemment, elle est liée à
une anomalie des récepteurs du LDL cholestérol qualitative ou quantitative. On
distingue la forme polygénique non familiale, en partie liée à des erreurs
diététiques, de la forme familiale autosomique dominante, qui peut s'accompagner
de taux de cholestérol très élevés. Elle se caractérise par :
Un sérum clair ;
un cholestérol total augmenté, au dépend du cholestérol LDL ;
Apo B est élevée ;
un HDL chol normal ou bas ;
Apo A est diminué ;
des TG normaux ou légèrement augmentés ;
en électrophorèses, migration en zone β.
Cette dyslipidémie est très fortement athérogène.

2.1.3 Dyslipidémie de type IIb


C'est l'hyperlipidémie combinée ou mixte. De grande fréquence, elle est secondaire
à une hypersécrétion de VLDL. Il s'agit une anomalie de transmission familiale
autosomique dominante ou d'une association d'une dyslipidémie de type IIa et 4
Elle se caractérise par :
un sérum trouble ou opalescent;
un cholestérol total augmenté au dépend du LDL Chol ;
une augmentation de l'Apo B ;
des TG augmentés ;
un HDL Chol bas ;
une diminution de l'Apo A ;
migration en préβ lipoprotéine à l'électrophorèse.
Cette dyslipidémie est très athérogène.

2.1.4 Dyslipidémie de type III


Elle est aussi appelée dysbêta-lipoprotéinémie. De fréquence très rare, elle est
secondaire à une absence de reconnaissance des IDL par leur récepteur, secondaire
à une anomalie de l'apoprotéine E (phénotype homozygote E2/E2). C’est une
pathologie de transmission autosomique récessive. Il existe alors une accumulation
des IDL qui se caractérise par :
un sérum trouble à jeun,
une augmentation importante des triglycérides,
une augmentation importante du cholestérol total,

334
une migration en électrophorèses entre les bandes pré-β et β
Cette dyslipidémie est athérogène.

2.1.5 Dyslipidémie de type 4


C'est la dyslipidémie glucido, alcoolo, pléthorro-dépendante. Néanmoins, il existe
une transmission familiale possible selon le mode autosomique dominant. Elle est
secondaire à un défaut de fonctionnement ou un déficit de la LPL. Les taux de TG
peuvent être très importants surtout en cas de combinaison des formes familiales
et des facteurs environnementaux. Ils peuvent aller alors jusqu'à 100 g/l. La
dyslipidémie de type 4 est fréquente et est caractérisée par :
un sérum à jeun trouble ;
des triglycérides très augmentés ;
un cholestérol total normal ;
un LDL cholestérol normal ;
une apo B normale ;
un HDL bas ;
une apo A basse ;
une migration en bande préβ en électrophorèses.
Cette dyslipidémie est athérogène.

2.1.6 Dyslipidémie de type V


Il s'agit d'une augmentation des TG dépendante de facteurs alimentaires :
consommation de graisse et de glucides. Elle est très rare et se caractérise par :
un sérum à jeun lactescent ;
une augmentation des TG très importante ;
une augmentation des chylomicrons ;
un cholestérol total normal.
Cette dyslipidémie est probablement athérogène.

2.2 Les dyslipidémies secondaires


Certaines circonstances physiologiques ou pathologiques entraînent des
modifications du bilan lipidiques et des dyslipidémies que l'on nomme alors
dyslipidémies secondaires. Elles doivent être systématiquement recherchées et
éliminées car elles modifient la prise en charge de la dyslipidémie. En effet, il faut,
avant toute chose, traiter la pathologie en cause. Le plus souvent, cela permet de
normaliser les anomalies lipidiques. Parfois, les anomalies lipidiques ne se
normalisent pas complètement, et il faut alors envisager une prise en charge
identique à celle faite dans les dyslipidémies primitives.

2.2.1 La grossesse
On observe, une augmentation de 50% du cholestérol total et des triglycérides qui
sont multipliés par 3 (tableau de dyslipidémie de type IIb).
Ceci est du à l'augmentation des œstrogènes.
Le bilan lipidique est donc ininterprétable durant la grossesse et doit donc être
recontrôlé en post partum. En aucun cas, il ne faut envisager de traiter une

335
dyslipidémie durant la grossesse.

2.2.2 Le diabète
Les anomalies lipidiques sont très fréquentes au cours du diabète, en particulier au
cours du diabète de type 2. L’hypertriglycéridémie réalisant alors un tableau de
dyslipidémie de type 4 ou de type IIb, est l’anomalie rencontrée le plus
fréquemment. Elle existe dans le diabète de type 1, en cas de déséquilibre
important. Il existe alors une insulinocarence qui diminue l'action de la lipoprotéine
lipase entraînant une augmentation des CM et des VLDL par défaut d'élimination.
L'hypertriglycéridémie peut être très importante, supérieure à 10 g/l, et expose
alors au risque de pancréatite aiguë. Un traitement par insuline, normalisant les
glycémies, permet un retour rapide en quelques jours à la normale.
Dans le diabète de type 2, l'hypertriglycéridémie est liée à deux mécanismes.
L'insulinopénie relative entraîne une diminution de l'action de la lipoprotéine lipase.
L'insulinorésistance entraîne une augmentation de la lipolyse. Des acides gras libres
sont libérés, favorisant ainsi la synthèse de TG. Il existe une augmentation des
VLDL riches en triglycérides et en cholestérol. Ces anomalies sont athérogènes.
L'augmentation des VLDL entraîne par le biais des protéines de transfert et en
particulier la CETP, une baisse du HDL cholestérol, qui est à lui seul un facteur
d'athérogénécité.

2.2.3 L'hypothyroïdie
Le déficit en hormones thyroïdiennes a comme conséquence, une diminution de la
synthèse et du catabolisme du CHOL. Ceci entraîne une augmentation du CHOL
portant sur le LDL. Il existe aussi une augmentation des triglycérides par le biais
d'une diminution de l'action de la lipoprotéine lipase et de la lipase hépatique. Il
existe donc un tableau de dyslipidémie de type IIa ou IIb.

2.2.4 La cholestase
Au cours des cholestases hépatiques est observé, une augmentation du cholestérol
total réalisant ainsi une dyslipidémie de type IIa, et une augmentation des
phospholipides.

2.2.5. Le syndrome néphrotique et l'insuffisance rénale chronique.


On observe des tableaux de dyslipidémies de type IIa, IIb ainsi que parfois de type
4 et III. Ces anomalies semblent être liées à l'hypoprotidémie par un mécanisme
mal connu. En effet la correction de l'hypoalbuminémie corrige la dyslipidémie.
Dans l'insuffisance rénale chronique, il existe une hypertriglycéridémie liée à
l'augmentation de la synthèse hépatique des VLDL en réponse à la perte protéique
urinaire.

2.2.6 Le syndrome de Cushing


Il existe une augmentation du CHOL et des TG réalisant un type IIb. Ces anomalies
sont liées :
à l'augmentation de la synthèse des VLDL au niveau hépatique
à une diminution de la lipoprotéine lipase
à une augmentation du HDL par une diminution de l'activité de la CETP.

2.2.7 Les anomalies iatrogènes

336
De nombreux traitements entraînent des modifications du bilan lipidique. Pour
certains traitements, comme les rétinoïdes, un bilan lipidique préalable est
nécessaire avant toute prescription. De même la surveillance lipidique régulière est
nécessaire et la survenue d'anomalies, peut amener à modifier le traitement.
Les corticoïdes entraînent des anomalies lipidiques, identiques à celles rencontrés
dans le syndrome de Cushing.
Les œstrogènes (Pilule contraceptives....) diminuent l'activité de la lipoprotéine
lipase, et augmentent ainsi les TG. Ils augmentent aussi le HDL.
Certains traitements antihypertenseurs modifie le bilan lipidique. Les diurétiques,
en particulier les thiazidiques, augmentent le VLDL, modifiant ainsi le CHOL total et
surtout les TG. Les béta-bloquants inhibent la lipoprotéine lipase et augmentant
ainsi les TG; le CHOL est peu modifié.
Les rétinoïdes entraînent une dyslipidémie de type IIb.

3 CLINIQUE

3.1 Les signes cliniques


Le plus souvent asymptomatique, les dyslipidémies peuvent néanmoins avoir des
manifestations cliniques qui doivent faire pratiquer un dosage des lipides sanguins.
Le plus souvent, elles sont diagnostiquées par un dosage sanguin effectué de
manière systématique (bilan pratiqué du fait de la présence d'un autre facteur de
risque cardiovasculaire, d'une pathologie associée, d'un traitement particulier...).

3.1.1 Les manifestations d'athérosclérose


Ces manifestations sont très peu spécifiques. En effet l'athérosclérose est
multifactorielle. Les dyslipidémies sont néanmoins un facteur de risque majeur.
Toutes manifestations d'athérosclérose, à fortiori si elle survient chez un sujet
jeune, doit faire rechercher une dyslipidémie. Il s'agit le plus souvent de
manifestations cardiaques (angor, IDM) mais il peut s'agir aussi de manifestations
extra-cardiaques : neurologiques... Toutes les dyslipidémies sont, à l'exception de
la dyslipidémie de type I, athérogènes.

3.1.2 Les manifestations cutanées

3.1.2.1 Les xanthélasma


Il s'agit de dépôts de cholestérol sous cutanés. Cela se présente sous la forme de
petites papules jaunâtres qui siègent volontiers au niveau des paupières mais qui
peuvent être plus généralisées. Ces dépôts se rencontre surtout dans le type IIa,
mais aussi dans les types IIb, 3, 4.

3.1.2.2 Les xanthomes tendineux


Ces dépôts sont plus volumineux, et siègent au niveau des tendons d'Achille et des
tendons des extenseurs des doigts. Il s'agit de grosses tubérosités. On les
rencontre dans le type IIa, IIb, 3, et 4.

3.1.2.3 Les xanthomes cutanés


Là encore, il s'agit de dépôts de cholestérol plus volumineux, qui siègent au niveau
cutané. Ils peuvent être plan ou tubéreux. Ils sont exceptionnels et se rencontrent
au cours des types IIa et 3 dans les formes homozygotes.

337
3.1.2.4 Les xanthomatoses éruptives
Il s'agit d'éruptions cutanées de survenue aiguë, faites de petites papules
jaunâtres, qui peuvent siéger sur tout le corps, mais prédominant au niveau de
l'abdomen et du dos. Elle s'observent au cours des augmentations brutales des
triglycérides et donc dans les dyslipidémies de type IIb, 4, V et I.

3.1.3 Manifestations oculaires


La présence d’un arc cornéen correspond à un dépôt de cholestérol. Cela se traduit
par un iris ayant un contour blanchâtre et bleuté. Il n’est significatif que si il
apparaît avant l’âge de 50 ans. Il peut être présent dans les types IIa et IIb.

3.1.4 Manifestations abdominales

3.1.4.1 La pancréatite aiguë


La pancréatite aiguë peut survenir en cas d’hypertriglycéridémie dés que celle ci
dépasse 10 g/l. Elle se manifestent par des douleurs abdominales et n’a pas de
particularité clinique en dehors de l’augmentation concomitante des TG. Elle se
rencontre dans les dyslipidémies de type I, IIb, V et surtout dans le type 4. Elle
survient souvent après un excès alimentaire ou alcoolique qui entraîne une brutale
augmentation des TG. Le dosage des triglycérides fait partie du bilan étiologique
des pancréatites aiguës.

3.1.4.2 La stéatose hépatique


Elle se rencontre en cas d’hypertriglycéridémie. Elle peut entraîner des
perturbations du bilan hépatique (cytolyse et/ou cholestase hépatique). En
échographie, le foie apparaît hyper dense. Elle est le plus souvent asymptomatique
cliniquement et réversible, si on normalise les TG.

3.2 Les signes biologiques


Après avoir suspecté le diagnostic cliniquement, celui-ci est confirmé par un dosage
biologique. Il doit s’effectuer chez un patient strictement à jeun de 12 heures. Il
doit comporter un dosage du cholestérol total et des triglycérides. Si ce premier
bilan est pathologique, il faut le compléter en demandant le HDL Cholestérol, et
déterminer le LDL cholestérol qui se calcule grâce à la formule de Friedewald et
Frederickson :
LDLChol = CHOL T - HDL - TG
Cette formule ne s’applique que si les triglycérides sont inférieurs à 3 g/l. La valeur
TG/5 correspond au VLDL Cholestérol.
Le taux de cholestérol varie avec l’âge et augmente avec celui ci. Il est classique de
dire que le cholestérolémie normale est de 2g/l avec en décimale l’âge, par
exemple : à 40 ans la cholestérolémie observée est de 2,40 g/l. Néanmoins, il a été
démontré que le risque cardiovasculaire était croissant avec l’augmentation du
cholestérol. Il faut donc tenir compte des facteurs de risque cardiovasculaires
associés pour interpréter le bilan lipidique.

4 Le traitement

4.1 Les moyens thérapeutiques

4.1.1 La diététique

338
Le « régime » est le premier acte thérapeutique. Si la correction de l’hyperlipidémie
n’est pas obtenue avec les règles diététiques, on pourra prescrire un traitement
médicamenteux. Cependant les hyperlipidémies familiales génétiques tel que le
type IIa répondent souvent mal aux règles diététiques. En effet on obtient
seulement une baisse de 20% du cholestérol total initial, ce qui est généralement
insuffisant pour normaliser les anomalies lipidiques initiales.
Le régime doit être adapté à chaque patient et doit tenir compte de ses habitudes
alimentaires. Lorsqu’il existe un surpoids, il convient d’essayer de le réduire. En
effet, une réduction de quelques kilos permet d’améliorer les paramètres lipidiques.
L’apport total en graisse ne doit pas excéder 30 à 35%.

4.1.1.1La diététique des hypertriglycéridémies


Les glucides
Les régimes riches en glucides augmentent les TG. Dans les dyslipidémies avec TG
augmentés (type 4, I, V), il convient de limiter les apports glucidiques à 50% de la
RET (ration énergétique totale).
L’alcool
Chez certains sujets présentant une certaine sensibilité, l’alcool peut augmenter les
TG par le biais d’une augmentation de la synthèse des VLDL et entraîner alors des
dyslipidémies de type I, 4 ou V. Dans ce cas là, le traitement est l’éviction de toute
consommation de boissons alcoolisées.
Les TG à chaînes moyennes
Ils sont indiqués dans le type I. Associés à un régime très pauvre en graisse, ils
permettent de diminuer les TG. En effet, l’absorption des TG n’entraînent pas la
formation de CM.

4.1.1.2 La diététique des hypercholestérolémies


Diminution de l’apport en cholestérol et des graisses saturées.
Si les apports en cholestérol alimentaires sont importants, il existe une
augmentation de la synthèse de LDL ainsi qu’une diminution du nombres de
récepteurs qui catabolisent le LDL. La consommation d’AG saturés diminue la
clearance du LDL. Ceci a pour conséquence une augmentation de la cholestérolémie
totale aux dépens du LDL cholestérol.. C’est pourquoi, en cas
d’hypercholestérolémie, on préconise un régime limitant les apports en cholestérol
à 300mg/j. Il faut également limiter les apports en graisses saturées (graisse
d’origine animale : beurre, charcuterie, viande grasse, fromages gras, crème
fraîche…) à 10% de la RET.
Utilisation de graisses poly insaturées
Lorsqu’on augmente le pourcentage de graisses poly insaturées au sein de la ration
lipidique totale en utilisant des huiles tel que l’huile de maïs, soja et tournesol, on
obtient une diminution du VLDL cholestérol et du LDL cholestérol. On conseille donc
un apport qui doit être au environ de 10% de la RET.
Utilisation de graisses mono insaturées
Lorsqu’on augmente le pourcentage de graisses poly insaturées au sein de la ration
lipidique totale en utilisant des huiles tel que l’huile d’olive, on obtient une
diminution du cholesterol total sans modification du HDL et des TG. Ces régimes
s’accompagnent d’une diminution de l’incidence de l’athéroscléroses. Les apports en
graisses mono insaturées doivent représenter 10 à15% de la RET.
Les fibres
Il existe une relation inverse entre une consommation de fibres et l’incidence des

339
maladies cardiovasculaires. Néanmoins, le pouvoir hypocholestérolémiant des fibres
n’a pas été démontré.

4.1.2 Les traitements médicamenteux

4.1.2.1 Les statines


Certaines ont montré leur efficacité en prévention primaire et secondaire sur la
survenue d'évènements coronariens, en terme de morbidité et de mortalité.
Ils diminuent très efficacement le CHOL total et le LDL cholestérol. Ils sont moins
efficaces sur les TG. Ils augmentent légèrement le HDL .
Ce sont des inhibiteurs de l'HMGCoA réductase.
Leur tolérance générale est bonne. Il peut y avoir des troubles digestifs, des
insomnies. Des douleurs musculaires, pouvant aller jusqu'à la rhabdomyolyse,
peuvent survenir et nécessitent alors l'arrêt du traitement. Les rhabdomyolyses
sont favorisées par la prise concomitante de fibrates. Elles imposent une
surveillance régulière des CPK. L'augmentation des CPK peut survenir sans qu'elle
s'accompagne de signe clinique. Sur le plan biologique, on peut observer également
une cytolyse hépatique qui justifie une surveillance régulière biologique des
transaminases.

4.1.2.2 Les fibrates


Ils diminuent le CHOL total et le LDL ainsi que les TG. Ils augmentent de manière
significative le HDL.
Ils augmentent l'action de la lipoprotéine lipase et diminuent donc les TG en
diminuant la synthèse des TG hépatiques et en augmentant le catabolismes des
VLDL. Leur effet hypocholestérolémiant répond à un mécanisme moins connu.
Leur tolérance générale est bonne, mais on peut voir survenir des troubles
digestifs, une asthénie, une impuissance. Sur le plan biologique on peut observer
une cytolyse hépatique et une augmentation des CPK. Il faut noter qu'ils
potentialisent l'action des anti-vitamines K du fait de leur fixation aux protéines
plasmatiques. Il est donc indispensable de renforcer la surveillance de L'INR en cas
d'introduction d'un fibrate chez un patient anti-coagulé. Les fibrates sont contre-
indiqués en cas d'insuffisance rénale ou hépato-cellulaire.

4.1.2.3 Questran
Il s'agit d'une résine échangeuse d'ions.
Elle diminue le CHOL total et le LDL. Elle ne baisse pas les TG, et parfois les
augmente. Elle n'a pas d'action sur le HDL.
Elle est mal tolérée sur le plan digestif (constipation opiniâtre), et gène l'absorption
d'acide folique, des vitamines hydrosolubles et des autres traitements qu'il faut
alors prendre à distance (1h30) de la prise de Questran.

4.1.2.4 Les huiles de poissons


Ce sont des huiles extraites de poissons gras qui sont riches en AG oméga3. Elles
diminuent les TG ( diminution des VLDL).
Elles diminuent la synthèse hépatique des TG et augmentent le catabolisme des
VLDL en augmentant l'activité de la lipoprotéine lipase.
Leur tolérance digestive est moyenne. Ils ne sont plus remboursés par la sécurité
sociale.

340
4.2 Les indications
Selon les recommandations de l'ANAES, elles tiennent compte de
de l'existence de facteur de risque cardiovasculaire associé (FDRCV)
des antécédents personnels d'accidents coronariens (prévention primaire ou
secondaire).
Les valeurs d'interventions et les valeurs cibles à obtenir tiennent compte de
l'ensemble de ces données. Elles sont résumées dans le tableau 1.
Les indications des traitements médicamenteux sont discutés en fonction du type
de dyslipidémie et sont résumées dans le tableau 2.

341
Traitement diététique Traitement médicamenteux
instauration valeur cible à obtenir instauration valeur cible à obtenir

Homme de moins de 45 ans ou


femme non ménopausée et
≥2.20 <1.60 Pas en première intention
aucun FDRCV Sans
coronaropathie
Homme de moins de 45 ans ou
femme non ménopausée et
≥2.20 <1.60
aucun FDRCV et Echec de la
diététique suivie pdt 6 mois,
sans coronaropathie
sujet ayant 1 autre FDRCV ≥1.60
sans coronaropathie <1.60 ≥1.90 <1.60
sujet ayant 2 autres FDRCV
sans coronaropathie ≥1.30 <1.30 ≥1.60 <1.30
sujet ayant une coronaropathie
avérée
≥1.30 ≤1.0 ≥1.30 ≤1.0

Tableau 1 : Valeurs d’instauration de traitement hypolipémiant et valeurs cibles

342
Diététique Statines Fibrates Questran AG ω3

Type I +++ Non Non Non Non

Type IIa + Oui ++ en 1ère intention Si échec Statine , en Si échec Statine , en Non
association association

Type IIb ++ Oui si on parvient à normaliser TG Oui Non Non

Type III +++ Non Oui ++ Non Non

Type IV +++ Non Oui ++ Non Oui ±

TypeV ± Non Non Non Non

Tableau 2 : indication des différents traitements hypolipémiants

343
4.2.1 Traitement de la dyslipidémie de type I
Il repose essentiellement sur la diététique. Il faut avant tout limiter au maximum
l’apport alimentaire en graisse. On peut utiliser les AG à chaînes moyennes. Il
n’existe pas de traitement médicamenteux.

4.2.2 Traitement de la dyslipidémie de type IIa


Après l’échec des mesures diététiques que l’on instaure sur un temps plus ou moins
court et qui sont souvent insuffisantes, il faut prescrire en première intention un
traitement par statine seul. Le traitement par fibrates ou questran en première
intention ne se justifie plus compte tenu des résultats des études démontrant
l’efficacité des statines en prévention primaire et secondaire sur la survenue
d'évènements coronariens, en terme de morbidité et de mortalité. En cas d’échec
des statines à bonnes posologies, certaines équipes spécialisées et sous
surveillance biologique (risque de majoration d’effet secondaires en particulier de
rhabdomyolyse) font une bi thérapie statine-fibrate. On peut également associer
aux statines du questran sous réserve d’une bonne tolérance et d’une prise à
distance des deux traitements.

4.2.3 Traitement de la dyslipidémie de type IIb


Après l’échec des mesures diététiques que l’on instaure sur un temps plus ou moins
court et qui est souvent efficace, on peut prescrire en première intention une
statine. Il faut néanmoins s’assurer que l’on arr4e à normaliser les TG. En pratique,
on ne peut les prescrire que si les TG ne sont pas trop élevés. Il faut donc souvent
préférer les fibrates.

4.2.4 Traitement de la dyslipidémie de type 3


La diététique est souvent très efficace. Si la diététique seul n’est pas suffisante, il
faut alors prescrire un fibrate.

4.2.5 Traitement de la dyslipidémie de type 4


Là encore, la diététique est très efficace, et ce dans 90% des cas. En cas d’échec,
ou de correction incomplète du bilan lipidique, il faut prescrire préférentiellement
des fibrates. C’est dans cette indication également que les huiles de poisson
peuvent être prescrites.

4.2.6 Traitement de la dyslipidémie de type V


Le seul traitement est la diététique qui n’est pas toujours efficace. Il n’existe pas de
traitement médicamenteux.

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