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ENDOCRINOLOGIE – DIABETOLOGIE
2002-2003 D.C.E.M.3
1
ENDOCRINOLOGIE - DIABETOLOGIE
LA THYROIDE : Glossaire et abréviations
LA THYROIDE : OUVRAGES
PRÉ-REQUIS EN THYROIDE
HYPERTHYROIDIES (n° 337)
HYPOTHYROIDIE DE L'ADULTE (n° 338)
HYPERTHYROIDIES DE L'ENFANT (n°337)
HYPOTHYROIDIES DE L'ENFANT (n° 338)
THYROIDITES
GOITRE (n° 58)
CANCERS DE LA THYROIDE (n° 339)
HYPERCORTISOLISME (n° 341)
HYPERTENSION ARTERIELLE D’ORIGINE ENDOCRINIENNE DE L'ADULTE (n° 123)
CLASSIFICATION PHYSIOPATHOLOGIQUE DES DIABETES (n°330-331)
COMPLICATIONS CHRONIQUES DU DIABETE (N° 330 - 331)
RETINOPATHIE DIABETIQUE (n° 219 - 330 - 331)
NEUROPATHIES DIABÉTIQUES (n° 221 - 330 - 331)
NEPHROPATHIE DIABETIQUE(n° 330 - 331)
DIABETE INSULINO-DEPENDANT DE L'ENFANT (n° 330)
TRAITEMENT DU DIABETE SUCRÉ (n° 330 - 331 - 332)
LE BILAN ANNUEL DE SURVEILLANCE DU DIABETIQUE (n° 330 - 331)
URGENCES METABOLIQUES CHEZ LE DIABETIQUE TROUBLES DE LA CONSCIENCE
CHEZ LE DIABETIQUE(n° 332)
DIABETE et GROSSESSE (n° 165)
OBESITE DE L’ADULTE (n° 250 - 333)
OBESITE DE L'ENFANT (n° 250 - 333)
ANOREXIE MENTALE (n° 250 - 334)
SYNDROME POLYURO-POLYDIPSIQUE
ADENOMES HYPOPHYSAIRES (n° 344)
LES HYPERPROLACTINEMIES
LES AMENORRHEES (n° 18)
MENOPAUSE (n° 154)
CONTRACEPTION (n° 155)
DYSLIPIDEMIES
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LA THYROIDE : Glossaire et abréviations
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Strumite: thyroïdite subaiguë sur goitre
T4: thyroxine, T3: triiodothyronine (parfois lT4 ou lT3 pour levo...)
TCT: thyrocalcitonine
TDM: scanner
TPO: thyropéroxydase
TRAK: méthode de dosage des anticorps dirigés contre le R-TSH
TG: thyroglobuline; protéine spécifique de tissu support de la synthèse de
hormones thyroïdiennes
TSH: thyroid stimulating hormone
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LA THYROIDE : OUVRAGES
On pourra consulter:
1. "La Thyroide". Sous la direction de J. Leclère, J. Orgiazzi, B. Rousset, JL
Schlienger, JL Wemeau. Expansion Scientifique Française, 1992.
2. "Pathologie Thyroïdienne - Diagnostic et Traitement". Aubène Léger. Médecine-
Sciences, Flammarion, 2ème édition, 1998.
3. "Tumeurs de la Thyroïde". Schlumberger M, Pacini, F. Nucléon, 1997.
4. "La prise en charge diagnostique du nodule thyroïdien". ANDEM, éditions Norbert
Attali, déc. 1995.
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PRÉ-REQUIS EN THYROIDE
Jérôme Clerc
Service de Médecine Nucléaire - Hôpital Necker
1.Points importants
1. La thyroïde assure la synthèse, le stockage et la libération des deux
hormones thyroïdiennes qui sont des molécules iodées: T4 ou thyroxine et T3 ou
triiodothyronine.
2. La biosynthèse des hormones thyroïdiennes comporte deux étapes
fondamentales: la captation de l'iodure au niveau de la membrane basale, par une
pompe spécifique: le "SIT" et "l'accrochage" de l'iode sur la thyroglobuline stockée
dans la colloïde, correspondant au mécanisme d'organification-couplage.
3. L'hormone thyréotrope hypophysaire ou TSH, stimule l'hormonogénèse
thyroïdienne en activant un récepteur membranaire du thyréocyte.
4. L'hormonosynthèse thyroïdienne est régulée selon un rétrocontrôle négatif
définissant l'axe hypothalamus (TRH) - hypophyse (TSH) - thyroïde (T4 & T3).
5. En cas d'hyperthyroïdie et chaque fois que la T4 est élevée, la commande
cérébrale est coupée: la TSH devienne basse à nulle. Ce phénomène permet le
diagnostic biologique des hyperthyroïdies (0 ≤ TSH ≤ min).
6. En cas d'hypothyroïdie due à une atteinte de la glande, la commande
cérébrale est augmentée de sorte que la valeur de la TSH s'élève. Ce phénomène
permet le diagnostic biologique des hypothyroïdies (TSH ≥ Max).
NB: min [MAX]: valeur minimale [Maximale] de l'intervalle de normalité du dosage
2.Physiologie
La glande thyroïde est une glande endocrine assurant la synthèse des
hormones thyroïdiennes, Thyroxine (T4) & Triiodothyronine (T3). Les hormones
thyroïdiennes sont des molécules iodées (4 I pour T4 et 3 I pour T3).
La physiologie thyroïdienne est marquée par deux particularités : 1) la
glande assure un stockage hormonal de plusieurs semaines permettant de pallier
aux variations de l'apport iodé alimentaire 2) il existe un mécanisme spécifique
assurant d'une part, la captation de l'iodure plasmatique (l'iode est un élément
rare), et d'autre part son incorporation à une protéine spécifique de tissu, la
thyroglobuline (TG).
La sécrétion thyroïdienne obéit à un mécanisme classique de rétrocontrôle
négatif hypothalamo-hypophysaire.
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2.1Cellule et Follicule thyroïdiens.
L'unité fonctionnelle élémentaire thyroïdienne est le follicule thyroïdien, qui est une
structure grossièrement sphérique de 200-400 µm, centrée par une substance
colloïde composée essentiellement de TG en suspension. Ce follicule est limité en
périphérie par une monocouche de cellules thyroïdiennes, ou thyréocytes. Ces
cellules sont cubiques et mesurent environ 8 µm de hauteur.
L'I° est "accroché" sur des résidus tyrosine de la TG, pour former des
composés mono ou diiodotyrosyls (MIT, DIT). Cette étape porte le nom
"d'organification". Enfin, les MIT et les DIT sont couplés au sein de la TG pour
former la T4 ou la T3 (Figure 2).
En C, il est indiqué que la TG est résorbée par micropinocytose, dans la
cellule où elle subit une protéolyse libérant alors les hormones actives, T4 et T3
passant dans le capillaire sanguin basal, et les résidus MIT et DIT qui sont désiodés
in situ, permettant un recyclage de l'iode.
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Figure 1. Schéma fonctionnel simplifié du follicule thyroïdien.
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Figure 2: les hormones thyroïdiennes au sein de la Thyroglobuline (TG)
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Figure 4. Axe Thyréotrope.
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b) Autoactivation permanente du récepteur de la TSH secondaire à une
mutation sporadique (rarement germinale) : hyperthyroïdies autonomes (adénome
toxique, goitres multinodulaires toxiques).
Dans certains cas, l'élévation de la T4 (T3) n'est pas secondaire à une
hyperproduction d'origine thyroïdienne; on parle de thyrotoxicose (effets d'une
surimprégnation de T4), sans hyperthyroïdie:
c) Intoxication iatrogène par les hormones thyroïdiennes (T4, T3, dérivés)
d) Destruction partielle du tissu endocrine lors des thyroïdites (infectieuses,
auto-immunes etc...) avec libération excessive d'hormones.
e) toxicité de l'iode stable sur le follicule (hyperthyroïdie induite par une
surcharge iodée)
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1.3. Médicaments thyroïdiens - sites d'action cellulaire
La figure 5 représente les principaux sites d'action des médicaments thyroïdiens.
Le récepteur de la TSH peut être stimulé par des anticorps (anti R-TSH) en
pathologie (maladie de Basedow). Enfin, certains médicaments inhibent la
conversion de la T4 en T3.
Les antithyroïdiens de synthèse (carbimazole, propylthiouracile) agissent comme
faux substrats, et inhibent l'organification de l'iodure sur la TG (étapes II & III).
L'iode stable inhibe sa propre organification et diminue les étapes finales de la
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sécrétion des hormones thyroïdiennes. Les corticoïdes inhibent la sortie des
hormones thyroïdiennes.
2. Examens complémentaires
2.1. Biologie
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Figure 6a: méthode immunométrique de dosage
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Quel que soit le système utilisé, on peut faire deux remarques: 1) le dosage
est immunologique et non pondéral vrai. Il dépend donc des anticorps et du traceur
analogue fourni par chaque firme pharmaceutique. 2) le chiffre absolu
correspondant au dosage est susceptible de varier selon la méthode (on dit la
trousse de dosage) utilisée. Ces variations font l'objet de contrôles de qualité intra
et inter laboratoires.
T4 libre (pM/l) 10 - 20
T3 libre (pM/l) 5 -10
Ac anti TG < 100 UI/l normalement absent
Ac anti TPO < 80 UI/l normalement absent
Ac anti R-TSH < 10 UI/l normalement absent
iodurie < 150 µg/j
Thyroglobuline < 35 µg/l sujet non opéré
Thyroglobuline < 0,5 µg/l cancer thyroïdien traité et guéri
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haut à 0,50 µU/ml, on diagnostiquera presque tous les sujets en hyperthyroïdie
(Se: 0,98), mais on identifiera à tort de nombreux sujets normaux (Spe= 0,4).
Ainsi, on peut jouer sur la valeur seuil d'une norme pour rendre un test plus
sensible ou plus spécifique, selon un choix décisionnel défini à priori.
2.2. Imagerie
L'imagerie thyroïdienne repose sur l'échographie et la scintigraphie. On
distingue en imagerie deux ordres d'information: les renseignements anatomiques
et morphométriques et les renseignements fonctionnels ou de caractérisation
tissulaire. Enfin, les méthodes d'imagerie sont plus ou moins reproductibles. Pour
mesurer ce paramètre on utilise un test d'agrément ou test kappa qui varie de 1
(accord parfait) à -1 (discordance totale) en passant par 0 (concordance au
hasard).
2.2.1. Echographie
Echographie couplée à l'étude Doppler de la vascularisation
glandulaire et nodulaire réalise une image anatomo-fonctionnelle.
Image anatomique, résolue à 1 mm avec l'emploi de sondes de haute
fréquence, elle permet de caractériser la volumétrie des lobes et des nodules,
expliquant les rôle clé de l'échographie dans la surveillance des nodules et des
goitres.
L'image est également en partie fonctionnelle, car le signal échographique
reflète essentiellement la densité colloïdale, donnant ainsi indirectement accès à
une caractérisation tissulaire, car les cancers et les thyroïdites sont des lésions
pauvres en colloïde donc hypoéchogènes.
L'échographie nécessite néanmoins un matériel spécifique et une grande
expérience technique et médicale.
Elle dépend de l'opérateur à l'acquisition et à la lecture, de sorte que
l'agrément inter-observateur reste de l'ordre de 0.5-0.6 (k). Enfin, elle ne fournit
pas d'image globale de la glande si bien que la qualité des coupes présentées et du
compte rendu sont déterminantes.
Les tissus liquidiens (vaisseaux, muscles, glande) ont une bonne
transmission de l'écho tandis que les tissus osseux et surtout aériens (trachée,
oesophage) conduisent à une réflexion presque totale du signal
Le Doppler mesure la vélocité du sang (environ 0,2 m/s en artériel) et est
couplé à l'échographie. Un codage en pseudo-couleur du sang veineux (bleu) et
artériel (rouge) est superposé à l'image de la coupe.
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2.2.2. Scintigraphie.
La scintigraphie thyroïdienne réalise une image anatomo-fonctionnelle
et quantifiable de la thyroïde.
Anatomique, car la scintigraphie n'est autre que la représentation de la
distribution volumique de radiotraceurs spécifiquement captés par les vésicules
thyroïdiennes constituant la glande.
Avec l'utilisation de l'I123, cette image est de plus fonctionnelle car la
captation vésiculaire de l'iode reflète à chaque instant le nombre et la fonction des
vésicules (pompes à iode, organification et sécrétion), toutes fonctions étant
stimulées par la TSH.
Enfin, l'image scintigraphique est globale, indépendante de l'opérateur à
l'acquisition, facilement stockable (fichiers < 100 ko) et exportable par les réseaux
d'images (télédiagnostic). Sa reproductibilité est d'environ 0,8 (k).
Appareillage et traceurs.
La scintigraphie thyroïdienne est réalisée avec une caméra à scintillation
équipée d'un collimateur dédié à trou unique (pinhole), garantissant une résolution
de 7 mm en situation réelle, au prix d'une minime déformation des contours.
La fixation thyroïdienne de l'iode est déterminée soit à l'aide d'une sonde
comptant l'activité cervicale, soit à partir de l'image scintigraphique numérique.
Les traceurs sont présentés dans le tableau II.
La dose absorbée (irradiation) par la thyroïde lors d'une scintigraphie (I123)
est d'environ 0,02 mGy (0,07 mGy pour un cliché de thorax) et la dose efficace
(radioprotection) d'environ 0,9 mSv.
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régulièrement de la périphérie de l'image vers le coeur des lobes (valeur max). Les
contours sont réguliers. On projette les données de la palpation sur l'image qui doit
être calibrée en taille pour donner accès au volume. La masse des lobes se déduit
de la surface de projection comme: m = 0,47 (S) 1,5.
2.3. Cytologie.
La cytoponction est en fait une cytoaspiration à l'aiguille fine des zones
pathologiques, le plus souvent nodulaires, vues en imagerie (écho ou scinti). On
utilise une aiguille fine (23 à 27 Gauge), montée ou non, en réalisant 2 à 4
passages par nodules, suivis d'un étalement sur lame. On exige pour que
l'interprétation soit significative au moins 5 groupes de cellules contenant au moins
10 cellules. Elle dépend fortement de l'opérateur (médecin préleveur et cytologiste
lecteur). Un opérateur réalisant moins de 50 CP/an a un % de prélèvements non
significatifs supérieur à 50%. On décrit quatre types de résultats, pour les équipes
entraînées: prélèvements non significatifs (5 à 20%), prélèvements bénins (60%),
prélèvements suspects (20%) et prélèvements cancéreux (5-10%). Le nodule
cancéreux étant rare, la VPP de la cytologie est seulement de 20% (prévalence
5%), voire 5% (prévalence 1%).
C'est un examen très utile pour le diagnostic de malignité des nodules,
essentiellement des cancers papillaires. Le coût est de 615 FF. La cytoponction ne
fait pas le diagnostic des nodules autonomes, qui ne sont pas cancéreux et
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nécessitent un traitement spécifique.
test / maladie M+ M-
T+ vrai + (VP) faux + (FP)
T- faux - (FN) vrai - (VN)
On définit:
la sensibilité: Se = VP / (VP + FN)
la spécificité: Spe = VN / (VN + FP)
Sont déterminantes pour la stratégie les valeurs prédictives, qui dépendent de la
prévalence (p) de la maladie dans la population où est faite le test.
On définit : la valeur prédictive positive, VPP = p Se / [(p Se + (1 -p) (1 - Sp)]
la valeur prédictive négative, VPN = Sp (1 - p) / [(Sp (1 -p) + p (1 - Se)]
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HYPERTHYROIDIES (n° 337)
Jean-Claude Valcke
Endocrinologie - Diabétologie - Médecine Interne, Hôpital Boucicaut
HYPERTHYROIDIES (n° 337)
Points importants
1. Définition
2. Etiologie
3. Physiopathologie
3.1. De la thyrotoxicose (TT)
3.2. Des différentes étiologies
4. Diagnostic
4.1. Diagnostic clinique et biologique de la thyrotoxicose
4.2. Complications évolutives de la thyrotoxicose*
4.3. Diagnostic des diverses variétés étiologiques de TT
5. Traitement
5.1. La Maladie de Basedow
5.2. Traitement de l'adénome toxique
5.3. G.M.N.T
5.4. Hyperthyroïdie induite par l'Iode
5.5. Traitement des complications des TT communes aux diverses etiologies
Références Bibliographiques
Questions à choix multiples
Points importants
L’hyperthyroïdie est l’expression clinique et biologique d’un excès en hormones
thyroïdiennes (HT).
Les H.T. exercent leurs effets physiologiques sur les récepteurs cellulaires de
nombreux tissus et métabolismes. De ce fait, leur présence en excès s’exprime
de façon polymorphe, peu spécifique dans ses stades initiaux.
Cependant, la fiabilité et la simplicité des explorations fonctionnelles
thyroïdiennes permettent un diagnostic précoce dans les formes douteuses ; et
en premier lieu le dosage de TSH plasmatique dont le taux est abaissé ou
effondré (sauf dans la forme étiologique exceptionnelle qu’est l’adénome
thyréotrope secréteur de TSH).
L’hyperthyroïdie est un syndrome clinique et biologique qui relève de causes
diverses dont chacune a des caractères cliniques et biologiques particuliers. Les
deux étiologies les plus fréquentes sont la maladie de Basedow, maladie
autoimmune spécifique d’organe, et les goîtres uni- ou multi-nodulaires
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toxiques.
Les complications sont soit le fait de l’hyperthyroïdie elle-même, méconnue ou
évoluée et insuffisamment traitée (exemple : les cardiothyréoses et la crise
toxique) ; soit le fait d’une étiologie particulière (exemple : l’ophtalmopathie
basedowienne).
Les principes du traitement, relativement complexe, doivent être bien connus.
S’il existe un traitement commun aux diverses variétés étiologiques de
l’hyperthyroïdie, il convient de l’adapter en fonction de chaque étiologie.
Parmi les complications du traitement, les plus graves sont : les accidents
granulopéniques provoqués par les antithyroïdiens de synthèse ; les
complications de la chirurgie justifiant des équipes spécialisées ; la survenue
fréquente, souvent tardive et méconnue d’une hypothyroïdie après
administration d’iode radio-actif.
1. Définition
L'hyperthyroïdie ou thyrotoxicose se définit comme l'ensemble des signes cliniques
et biologiques provoqués par des taux élevés d'hormones thyroïdiennes (H.T.)
libres, dont la régulation physiologique est abolie.
2. Etiologie
Le tableau ci-dessous indique les causes des thyrotoxicoses.
3. Physiopathologie
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métabolique : augmentation de la consommation de O2 et de la production de
chaleur ; catabolisme protidique et lipidique avec lipolyse expliquant
l'amaigrissement ; augmentation de la glycogénolyse hépatique et de la
néoglycogénèse aboutissant à une augmentation de la production sus-hépatique
de glucose.
cardio-vasculaire : effets chronotrope et inotrope positifs avec augmentation du
débit cardiaque et diminution des résistances artérielles périphériques (effet
direct des hormones thyroïdiennes et indirect via les beta récepteurs du
système nerveux autonome).
digestif : augmentation de la motilité intestinale
osseux : augmentation de la résorption et de la formation osseuse au profit de
la première avec à la longue ostéopénie
système nerveux central : augmentation de l'excitabilité
musculaire : diminution de la masse musculaire avec amyotrophie
4. Diagnostic
Trois types de faits doivent être envisagés :
Le syndrôme clinique et biologique de thyrotoxicose (TT), qui est COMMUN aux
différentes étiologies
Les COMPLICATIONS évolutives de la TT, parfois graves, cardiothyréose et crise
aiguë thyrotoxique.
Les éléments cliniques et biologiques PARTICULIERS A CHAQUE ETIOLOGIE.
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tension artérielle systolique avec baisse de la diastolique (différentielle
élargie), choc de pointe augmenté, bruits du coeur intenses, parfois souffle
systolique d'éjection de haut débit.
DYSPNEE D'EFFORT
Signes généraux :
AMAIGRISSEMENT presque constant, contrastant avec la conservation de
l'appétit voire une POLYPHAGIE.
ASTHENIE physique, liée à l'atteinte musculaire
POLYURO-POLYDYPSIE MODEREE.
Troubles neuro-psychiques (surtout nets chez la jeune femme atteinte de
maladie de Basedow)
TREMBLEMENT, fin, rapide, permanent, exagéré par les émotions, net au
niveau des mains.
NERVOSITE accrue, irritabilité, hyperactivité stérile, pleurs faciles, insomnie
fréquente. Et parfois des signes plus graves : angoisse, état dépressif,
troubles du comportement.
SIGNES DIGESTIFS inconstants : outre la polyphagie, DIARRHEE ou plus
souvent fréquence accrue des selles
Troubles de la thermorégulation, rarement signalés :
THERMOPHOBIE, hypersudation, parfois élévation thermique modérée, vaso-
dilatation cutanée, avec notamment MAINS CHAUDES et MOITES.
Signes musculaires :
MYOPATHIE PROXIMALE : excéllent signe d'une hyperthyroïdie déjà évoluée
mise en évidence par la difficulté de passer de la position accroupie à la
position debout et le signe du tabouret. Amyotrophie rhizomélique plus
tardive.
Accessoirement :
Chez l'homme, GYNECOMASTIE, dans 20 à 40 % des cas ; baisse de la libido
Chez la femme, SPANIOMENORRHEE.
Dans les deux sexes, OSTEOPOROSE douloureuse dans les formes évoluées
Signes cutanés : onycolysis, pigmentation cutanée
Tous ces signes, lorsqu'ils sont associés, permettent aisément de reconnaître la
thyrotoxicose ; mais il est des cas de diagnostic plus difficile lorsque la combinaison
ou l'intensité des symptômes varie ou en fonction de "terrains particuliers". Ce sont
les formes cliniques.
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par des troubles du caractère, des difficultés scolaires, une accélération de
croissance (cf le chapitre hyperthyroïdie de l'enfant).
Chez le sujet âgé :
TT insidieuse et souvent LONGTEMPS MECONNUE :
adynamie et apathie plutôt que nervosité et agitation
anorexie plutôt que polyphagie conduisant à la cachexie
signes musculaires majeurs
signes cardiaques prédominants, souvent révélateurs telle une
cardiothyréose
Chez la femme enceinte :
L'hyperthyroïdie est rare car la fécondité est diminuée. Mais la maladie de
Basedow est possible avant ou pendant la grossesse.
Le diagnostic peut être initialement méconnu car thermophobie, peau
chaude, palpitations, nervosité et petit goître peuvent s'observer chez la
femme enceinte non hyperthyroïdienne.
La T4 totale est élevée à cause de l'augmentation de la TBG mais la T4 libre
est normale chez la femme non hyperthyroïdienne.
Les problèmes thérapeutiques sont délicats (cf infra).
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hypercalcémie (dans environ 10 % des cas)
Bien qu'inutiles au diagnostic, ces modifications humorales méritent d'être
connues et interprétées dans le contexte de thyrotoxicose
LA THYROTOXICOSE, UN DIAGNOSTIC HORMONAL SIMPLE
Elévation de T4 libre et/ou de T3 libre*
ABAISSEMENT ou EFFONDREMENT DE LA TSH PLASMATIQUE (signe le plus
sensible)
* En première intention, demander T4 libre et TSH. Si T4 libre est normale et
TSH basse, demander en deuxième intention T3 libre.
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L'insuffisance coronarienne
Beaucoup plus rare. C'est en général l'aggravation ou la révélation d'une
insuffisance coronarienne pré-existante s'exprimant sous forme d'angor spontané
ou d'effort, rapidement amélioré par le retour à l'euthyroïdie.
Maladie thrombo-embolique
Bien qu'il ne s'agisse pas à proprement parler d'une cardiothyréose, cette entité
mérite d'être individualisée ici, du fait de sa gravité et de ses relations avec les
complications cardiaques. Il s'agit d'embolies artérielles, cérébrale dans la moitié
des cas, responsable d'un certain nombre de décès. Elles ne surviennent que dans
les TT en FA et surtout s'il existe une insuffisance cardiaque. Bien que faible avant
le traitement de la TT, le risque embolique existe avant, pendant et après le retour
à l'euthyroïdie. Ceci indique la nécessité d'une traitement anticoagulant commencé
dès le diagnostic de la FA. Le risque emboligène est surtout réel chez le sujet âgé.
EN PRATIQUE, en présence de TAC, risque d'embolie artérielle chez le sujet de plus
de 60 ans.
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il peut s'agir d'une simple insuffisance ou arrêt des doses d'antithyroïdiens.
4.3.1.1.Physiopathologie :
Maladie autoimmune spécifique d'organe dont les mécanismes sont incomplètement
compris.
Prédisposition génétique, attestée d'une part par la plus grande fréquence que
dans la population normale de certains antigènes d'histocompatibilité HLA : en
occident, l'haplotype HLA B8 DR3 ; d'autre part, par le caractère familial de
l'affection : 15 % des parents proches d'un sujet atteint de maladie de Basedow
ont une affection thyroïdienne.
Anomalie de l'immunorégulation tissulaire et humorale attestée par :
l'association possible du Basedow à d'autres maladies auto-immunes
(Biermer, myasthénie, vitiligo, diabète, insuffisance surrénale)
l'infiltration lymphocytaire du corps thyroïde
la présence d'anticorps anti-thyroïdiens (antithyroperoxydase et antithyro-
globuline)
la dysfonction des lymphocytes T auxiliaires
la présence d'immunoglobulines G (IgG) : auto-anticorps circulants, se fixant
sur le récepteur membranaire des cellules thyroïdiennes (anticorps
antirécepteur de la TSH ou R-TSH) dont on retiendra schématiquement deux
types :
anticorps mimant les effets de la TSH par stimulation de l'adényl-cyclase,
de la production de cAMP et de la synthèse hormonale et protéique. Ce
sont les TSI (thyroïd stimulating immunoglobulin) ou TSAb (Thyroïd
stimulating antibodies)
anticorps inhibant la fixation de TSH. Ce sont les TBII (Thyroïd binding
inhibiting immunoglobulin)
D'autres immunoglobulines dirigées contre un antigène des muscles
orbitaires incomplètement déterminé, expliqueraient les manifestations
oculaires et dermatologiques.
Le rôle de virus, bactéries, stress, dans le déclenchement de l'anomalie
immunitaire est possible mais non prouvé. La maladie de Basedow a souvent un
début brusque à l'occasion d'un stress.
Quelle que soit la séquence exacte des événements immunologiques, les
immunoglobulines circulantes stimulent la totalité du corps thyroïde. Il en
résulte un excès de secrétion hormonale qui bloque la secrétion hypophysaire de
TSH. L'activité thyroïdienne est autonome (et non plus TSH-dépendante).
Retenir : présence d'immunoglobulines stimulantes, mimant l'effet de TSH et
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entrainant l'hyperthyroïdie : TSI ou TSAb.
4.3.1.2.Clinique
Les signes de thyrotoxicose déjà décrits sont sans particularité si ce n'est
l'importance des signes neuropsychiques.
Le GOITRE est diffus, parfois asymétrique, homogène, vasculaire (siège d'un
thrill ou d'un souffle systolique ou continu), ferme, élastique, indolore, sans
adénopathie ni signes inflammatoires. Présent dans 80 à 90 % des cas (il
manque souvent chez le sujet âgé et l'homme). De taille variable : double ou
triple le volume thyroïdien parfois plus, donc visible ou à rechercher
soigneusement avec une technique parfaite.
L'OPHTALMOPATHIE, inconstante : présente cliniquement dans la moitié
des cas mais fréquente (85 % des cas) si recherchée par TDM orbitaire. Elle
associe de façon variable :
rétraction de la paupière supérieure, asynergie oculopalpébrale (signe de
Von Graefe), élargissement de la fente palpébrale, fixité du regard,
constituent le syndrôme oculaire adrénalo-thyroxinique et à ce titre, peuvent
s'observer dans toutes les TT (ils ne sont donc pas spécifiques du Basedow
mais décrits ici pour des raisons pratiques)
l'exophtalmie ou protrusion des globes oculaires, mesurée à
l'exophtalmomètre de Hertel est acquise, axiale, réductible, bilatérale et
symétrique. Elle peut être unilatérale.
les signes inflammatoires mineurs : oedème palpébral, sensation de sable,
picotements, larmoiement. Plus importants : hypertrophie des glandes
lacrymales, chémosis débutant.
l'atteinte musculaire, révélée par une diplopie verticale (droit inférieur) puis
horizontale, confirmée par la TDM (qui élimine les diagnostics différentiels :
tumeurs orbitaires, métastases des muscles extra-oculaires, fistule carotido-
caverneuse et myosite aiguë orbitaire)
on recherchera une atteinte cornéenne ou nerveuse témoin d'une
exophtalmie maligne, véritable complication (cf. infra).
Tous ces signes, à l'exclusion du syndrôme adrénalino-thyroxinique, sont liés à des
phénomènes inflammatoires d'origine autoimmune (mais de mécanisme
indéterminé), interessant les tissus rétro-orbitaires et les muscles extrinsèques
La DERMOPATHIE basedowienne (encore appelée myxoedème prétibial) est
beaucoup plus rare (1 à 2 %) : induration de la peau en placards surélevés
souvent confluents, de couleur violacée, ou brune, situés au tiers inférieur des
faces latérales et antérieure des deux jambes, au-dessus du coup de pied,
parfois associée à un hippocratisme digital (acropachie).
AU TOTAL :
Soit il s'agit de l'association éloquente de tous les signes ou plus souvent : TT +
GOITRE + SIGNES OCULAIRES et le diagnostic est évident dès la première
consultation.
Soit il s'agit de formes dissociées de diagnostic plus délicat :
TT en apparence isolée
ophtalmopathie inflammatoire isolée, précédant les signes de TT et le goître : le
diagnostic sera assuré par la TDM orbitaire.
28
Autres formes cliniques :
Basedow néonatal chez les nourrissons nés de mère basedowienne. Lié au
passage transplacentaire des immunostimulines, il disparaît spontanément
en quelques semaines
Goître basedowifié : Basedow survenant chez un sujet qui avait
antérieurement un goître.
Principaux signes cliniques de la maladie de Basedow
goitre diffus
exophtalmie inflammatoire
thyrotoxicose : tachycardie, amaigrissement, tremblement etc.
4.3.1.4. Evolution.
Les rémissions spontanées par "extinction" de la maladie immunologique sont
tardives et peuvent être difficilement attendues. L'évolution habituelle se fait
par poussées, à l'occasion de fatigue, stress, épisodes de la vie génitale, et peut
se compliquer :
en plus des complications de la TT déjà vues et pouvant mettre en cause le
pronostic vital : cardiothyréose, crise aiguë thyrotoxique
une complication spécifique de la maladie de Basedow : l'exophtalmie
maligne :
aggravation des signes déjà vus
protrusion majeure avec subluxation douloureuse des globes oculaires et
occlusion palpébrale impossible
phénomènes inflammatoires intenses avec oedème cornéen, chémosis,
paralysie des muscles oculaires,
kératite et ulcération de la cornée
atteinte du nerf optique de nature compressive pouvant conduire à la
cécité, heureusement devenue exceptionnelle.
29
4.3.2. L'adénome toxique
4.3.2.1.Généralités
Il s'agit d'un nodule thyroïdien autonome et hyperfonctionnel. Deuxième cause
d'hyperthyroïdie : apparaît plus tardivement (45-50 ans). 4 à 5 femmes pour 1
homme.
4.3.2.2.Physiopathologie
L'adénome toxique provient de la replication accélérée d'un clone cellulaire
hyperactif au sein d'une thyroïde par ailleurs normale. La cause en est inconnue
mais n'est pas de nature auto-immune. D'abord autonome (c'est-à-dire échappant
à la régulation physiologique de TSH et non freinable) mais non toxique (c'est-à-
dire sans élévation des HT), son augmentation de volume aboutit à une production
hormonale accrue, un blocage de TSH et la mise au repos fonctionnelle du tissu
thyroïdien péri-nodulaire et contro-latéral. Cette néoplasie thyroïdienne est toujours
bénigne : adénome folliculaire bénin.
4.3.2.3.Clinique
Dans la forme complète, c'est l'association nodule thyroïdien solitaire-thyrotoxicose,
l'un ou l'autre des deux éléments étant révélateur et faisant rechercher le second.
le nodule est ferme, indolore, mobile, non vasculaire et isolé : sans
adénopathie, ni signe inflammatoire. Son diamètre est presque toujours
supérieur à 3 cm. Le reste du parenchyme thyroïdien est difficilement ou non
palpé.
la thyrotoxicose est moins nette que dans la maladie de Basedow, progressive
ou intermittente, à prédominance cardio-vasculaire : TAC et insuffisance
cardiaque peuvent être révélatrices, associées à des signes musculaires et un
amaigrissement. Il n'y a pas de signe oculaire (au maximum une rétraction de la
paupière supérieure), ni signe cutané.
4.3.2.4.Examens complémentaires
T4 et T3 libres sont augmentées et TSH abaissée.
Parfois, il y a sécrétion prédominante ou exclusive de T3. Il n'y a aucune anomalie
de l'auto-immunité.
La scintigraphie est l'examen essentiel.
Elle montre (cf. polycopié d'iconographie) une fixation exclusive de l'isotope au
niveau du nodule palpé avec "extinction" du parenchyme avoisinant et
controlatéral.
L'échographie doppler
Montre un nodule plein, hyper vascularisé, et permet de vérifier la présence du lobe
controlatéral atrophié.
4.3.2.5.Evolution
Aggravation progressive avec le volume du nodule, accélérée en cas de
surcharge iodée.
Possibilité d'une nécrose hémorragique spontanée du nodule aboutissant à un
nodule hypofonctionnel.
30
4.3.3.1.Généralités
Fréquence moins grande en Europe que l'adénome solitaire. 4 femmes pour 1
homme. Sujets plus âgés : 50 à 70 ans.
4.3.3.2.Physiopathologie :
Survenue, presque toujours au sein d'un goitre ancien, de plusieurs aires
autonomes et hyperactives. Ces aires hyperactives correspondent habituellement
aux nodules macroscopiques palpés. A côté d'elles, le tissu thyroïdien normal est
mis au repos. Il existe enfin des zones inactives, nodulaires : "nodule froid" et des
zones fibreuses. Lorsque les zones autonomes croissent suffisamment, la TT
apparaît et la sécrétion de TSH est bloquée.
Noter le rôle aggravant possible d'une surcharge iodée sur une thyrotoxicose
jusque là inapparente.
4.3.3.3.Clinique
Association d'un goitre multinodulaire souvent asymétrique et volumineux, parfois
compressif, et d'une TT. Le GMNT est découvert : soit au cours de la surveillance
systématique d'un goitre multinodulaire connu (intérêt du dosage régulier de TSH),
soit à l'occasion d'une TT (qui fait rechercher un goitre). Celle-ci est habituellement
modérée, de début insidieux, à prédominance cardio-vasculaire (sujet âgé), sans
signe oculaire.
4.3.3.4.Signes biologiques
Outre l'élévation des HT et l'abaissement de TSH, la scintigraphie montre des zones
"chaudes" correspondant à des nodules palpés et des "zones éteintes", froides. Il
n'y a pas d'anomalie de l'auto-immunité.
4.3.4.1.Physiopathologie
Deux situations doivent être distinguées :
Existence d'une pathologie thyroïdienne autonome antérieure (goître
multinodulaire, maladie de Basedow, adénome toxique), révélée par la
surcharge iodée qui l'aggrave.
Véritable hyperthyroïdie induite par l'iode survenant sur corps thyroïde
antérieurement sain, de mécanisme incomplètement élucidé. C'est cet aspect
seulement qui est décrit ci-dessous aux plans clinique et biologique.
4.3.4.2.Clinique
La TT survient au début, pendant ou après (quelques mois à plusieurs années) la
surcharge iodée. Présence inconstante d'un goître modéré, ferme, indolore,
avasculaire. Pas de signe oculaire.
TT d'intensité variable : amaigrissement et signes musculaires dominent ainsi que
l'aggravation de la maladie cardiaque (ayant justifié l'AMIODARONE)
4.3.4.3.Biologie
Elévation des hormones thyroïdiennes, principalement de T4. Effondrement de TSH,
iodémie et iodurie des 24 heures très élevées.
La scintigraphie est "blanche" avec captation nulle. Absence d'anticorps anti-
31
récepteurs de la TSH.
4.3.6.1.Cliniquement
Thyrotoxicose pure, sans signe oculaire, pas de goître et même atrophie du corps
thyroïde.
4.3.6.2.Biologiquement
Elévation des hormones thyroïdiennes et abaissement de TSH. L'effondrement de la
thyroglobuline plasmatique est une marque caractéristique de cette étiologie.
La fixation d'IRA est nulle et la scintigraphie est "blanche" posant le diagnostic
différentiel des autres scintigraphies blanches (hyperthyroïdie induite par l'iode,
thyroïdite sub-aiguë, thyroïdite silencieuse et thyroïdite du post-partum).
5. Traitement
Bien que les méthodes thérapeutiques puissent être appliquées aux principales
32
formes étiologiques, il paraît préférable de ne pas les décrire séparément mais
plutôt à propos de chaque étiologie.
33
La réversibilité de l'agranulocytose intervient en quelques jours ou 2 à 3
semaines, éventuellement accélérée par l'utilisation des facteurs de croissance de la
leucopoïèse.
Enfin, pas d'effet tératogène, mais ils passent la barrière placentaire et peuvent
altérer la fonction thyroïdienne du foetus. Avant leur prescription, il faut rechercher
une grossesse et/ou assurer une contraception.
Posologie et mode d'utilisation
Traitement d'attaque :
dans les formes modérées d'hyperthyroïdie, la tendance actuelle est aux doses
modérées : 6 comprimés par jour de NEOMERCAZOLE ou de PTU.
Une dose élevée initiale (8 à 12 comprimés) est encore utilisée par certains ou
réservée au formes graves d'emblée.
Traitement d'entretien :
A partir de la 6ème ou 8ème semaine, les doses peuvent être diminuées en
fonction des résultats. Deux attitudes sont proposées :
Faible posologie pour éviter toute hypothyroïdie et/ou augmentation de
volume du goître
posologie plus élevée (par exemple 30 à 40 mg de NEOMERCAZOL)
compensée par une hormonothérapie substitutive par l'hormone
thyroïdienne.
Quel que soit le traitement, la surveillance est régulière cliniquement et
biologiquement pour éviter la persistance d'une thyrotoxicose ou une
hypothyroïdie.
La durée du traitement est de 18 à 24 mois.
Résultat :
Initialement, l'efficacité est quasi constante (sauf en cas de saturation iodée
où l'effet des ATS devient faible ou de gros goîtres)
A distance et après arrêt des ATS, le pourcentage de guérison est d'environ
50 %.
34
5.1.1.3.Chirurgie
Il s'agit d'une thyroïdectomie sub-totale, laissant 3 à 5 gr de tissu thyroïdien de
chaque côté. Ce traitement radical et efficace doit être pratiqué :
chez un patient euthyroïdien (c'est-à-dire préparé par les ATS pour éviter la crise
aiguë ou par les bétabloquants et l'iodothérapie en cas de contre-indication des
ATS).
Les inconvénients sont :
dans l'immédiat l'exceptionnel hématome suffocant, l'hypocalcémie par
hypoparathyroïdie, la lésion des nerfs récurrents, toutes ces complications
pouvant être évitées par un chirurgien entrainé.
au long terme, récidive et plus souvent hypothyroïdie lontaine, définitive.
5.1.1.4.Autres traitements
Repos (arrêt de travail) et sédatifs (Tranxène) sont indispensables
L'iode minéral stable inhibe l'organification et diminue la protéolyse de la
thyroglobuline, donc la libération hormonale. Il a un effet rapide mais :
il passe la barrière placentaire et ne doit pas être utilisé chez la femme
enceinte.
il diminue l'action des ATS
son effet est transitoire par échappement
A ce titre, il n'est jamais utilisé seul mais à titre d'appoint pour la préparation à la
chirurgie ou en situation d'urgence.
Il est le plus souvent utilisé sous forme de solution de Lugol fort. Une goutte de la
solution correspond à 6 mg d'iode et la posologie habituelle est de 30 à 60 gouttes
par jour.
Les bétabloqueurs (BB)
Il s'agit d'une thérapeutique utile, réduisant la tachycardie, le tremblement, les
sueurs et prévenant probablement la survenue des troubles du rythme mais ils ne
diminuent pas la secrétion d'HT.
Le PROPANOLOL ou AVLOCARDYL® est souvent utilisé : 20 à 40 mg 4 fois par jour
à doses progressives en tenant compte des contre-indications cardio-pulmonaires.
Le lithium
Est un autre inhibiteur de la protéolyse complémentaire de l'iode mais son
maniement est difficile du fait de sa toxicité cardiaque et rénale
Une contraception efficace
Elle sera prescrite en cas d'utilisation des ATS
35
Basedow du sujet de plus de 40 ans
A goître petit ou modéré, à thyrotoxicose moyenne ou forte : indication de l'IRA
(avec parfois au début des ATS dans l'attente de l'effet retardé de l'IRA).
Goître volumineux, hyperthyroïdie sévère ou modérée.
C'est l'indication de la chirurgie précédée d'une phase médicale de préparation (ATS
+ BB + IODE) pendant 6 à 8 semaines, amenant le malade à une euthyroïdie
parfaite.
36
majeurs : tarsorraphie, radiothérapie externe orbitaire, décompression orbitaire
chirurgicale, plasmaphérèses...
Les séquelles inesthétiques importantes : rétraction palpébrale, strabisme,
protrusion, pourront être améliorées par la chirurgie.
5.3. G.M.N.T
La réduction chirurgicale du parenchyme thyroïdien est le traitement de choix.
Eventuellement après préparation par les ATS. Elle est impérative s'il existe des
signes de compression.
L'IRA thérapie sera réservée aux contrindications de la chirurgie.
5.5.1. Cardiothyréose
Elle nécessite une hospitalisation.
La correction rapide de l'hyperthyroïdie est la base du traitement : ATS à fortes
doses.
La TAC est ralentie par les bêtabloquants sous couvert d'un traitement anti-
coagulant. En l'absence de réversion spontanée de la TAC après retour à
l'euthyroïdie, on attendra quelques semaines avant de tenter une cardioversion
chimique ou électrique.
L'insuffisance cardiaque nécessite diurétiques, fortes doses de Digitaline, dérivés
nitrés. Les BB sont en principe contre-indiqués.
37
Le traitement d'urgence en unité de soins intensifs associe :
Réanimation
réhydratation, sédatifs, refroidissement (par paracétamol et non pas aspirine),
oxygénothérapie, digitaline, diurétiques, dérivés nitrés, anticoagulants
Traitement de l'hyperthyroïdie :
- Fortes doses d'ATS (PTU de préférence) par sonde gastrique, 18 à 24
comprimés de PTU pendant 1 à 2 jours, diminués ensuite à 9 comprimés par
jour.
- Iode minéral : Lugol fort par la sonde ou 1gr IV lente d'iodure de sodium
toutes les 12 heures (le traitement iodé devra être commencé quelques heures
après les ATS)
- Corticothérapie IV à fortes doses
- BB sauf en cas d'insuffisance cardiaque.
- Dans certains cas, les plasmaphérèses sont indiqués.
Références Bibliographiques
- A. Léger : La Pathologie Thyroïdienne. Médecine-Sciences Flammarion, Paris.
- J. Leclere : La Thyroïde. Expansion Scientifique Française.
38
A. D’une aggravation de l’ophtalmopathie
B. D’une hyperthyroïdie
C. D’une insuffisance parathyroïdienne
D. D’une granulopénie
E. D’une hypothyroïdie
5. Le thyroïdectomie sub-totale peut être utilisée :
A. Dans l’hyperthyroïdie induite par l’iode
B. Dans la thyroïdite de de Quervain
C. Dans la maladie de Basedow
D. Dans l’adénome toxique
E. Dans l’adénome thyréotrope.
39
HYPOTHYROIDIE DE L'ADULTE (n° 338)
Jean-Claude Valcke
Endocrinologie - Diabétologie - Médecine Interne
Hôpital Boucicaut
Points importants
L'hypothyroïdie est l'expression clinique et biologique de la carence en
hormones thyroïdiennes (HT).
Les HT exercent leurs effets physiologiques sur de nombreux tissus et
métabolismes ; de ce fait, leur carence s'exprime de façon polymorphe, peu
spécifique dans ses stades initiaux.
Cependant, la qualité de l'exploration fonctionnelle thyroïdienne actuelle permet
40
un diagnostic précoce et ainsi d'éviter les formes évoluées et compliquées, en
particulier le coma hypothyroïdien.
L'hypothyroïdie résulte soit d'une altération fonctionnelle et/ou organique du
corps thyroïde (C.T.) lui-même : ce sont les hypothyroïdies primaires ou
périphériques (95 % des étiologies), soit d’un déficit de la commande
hypothalamo-hypophysaire : ce sont les hypothyroïdies secondaires ou centrales
(5 % des étiologies)
Dans tous les cas, il faut préciser la cause de l'hypothyroïdie, quelque fois
directement curable
le traitement, le plus souvent substitutif à vie, est simple mais doit toujours
prendre en compte une observance médiocre, le risque d'une décompensation
coronarienne chez le sujet âgé, plus rarement le risque d'une insuffisance
surrénale aiguë. Il permet d'éviter une complication rare mais redoutable : le
coma hypothyroïdien.
1. Définition
C'est l'expression clinique et biologique de la carence en hormones thyroïdiennes
(H.T.).
2. Etiologie
Le tableau ci-dessous indique les causes principales de l'hypothyroïdie de l'adulte :
41
irradiations
3. Physiopathologie
3.1. De l'hypothyroïdie
La carence en H.T. a de multiples conséquences métaboliques et tissulaires :
3.1.1. Métaboliques
Diminution de la consommation d'O2 et de la production de chaleur centrale
(diminution du métabolisme de base) ;
Lipides : diminution de la dégradation du cholestérol et des LDL apoprotéines ;
diminution du catabolisme des VLDL ;
Protides : diminution de la synthèse et de la dégradation protéiques ;
Glucides : diminution de l'absorption intestinale et de la néoglucogénèse.
3.1.2.Tissulaires
Le tissu sous-cutané (tous les tissus en fait) est infiltré par le dépot de
glycosaminoglycans (GAG) substance composée de mucopolysaccharides,
d'acide hyaluronique et de condroïtine (défaut de dégradation).
Système cardiovasculaire : diminution des effets chronotrope et inotrope positifs
des HT conduisant à une diminution du débit cardiaque par abaissement de la
fréquence cardiaque et ralentissement de la contraction myocardique. L'HTA
n'est probablement qu'une association ; l'accélération probable de
l'athérogénèse par les modifications lipidiques favorise l'insuffisance coronaire.
Poumon : effet musculaire périphérique et nerveux central, aboutissant à une
hypoventilation avec hypoxie-hypercapnie
Système nerveux central : ralentissement de l'activité
Diminution de l'érythropoïèse
Muscle : ralentissement de la contraction et de la relaxation musculaires.
Système digestif : hypopéristaltisme oesophagien, gastrique, intestinal et
colique
Retentissement hormonal : diminution du catabolisme du cortisol ; diminution
de l'hormone de croissance et de sa réponse à divers stimuli ; diminution de la
clearance de l'eau libre en partie liée à une hypersecrétion d'hormone
antidiurétique (ADH) ; diminution de l'action de la PTH ; augmentation de la
prolactine dans 75 % des cas par divers mécanismes.
42
l'association possible à d'autres maladies auto-immunes
la fréquence du groupe HLA B8-DR3 chez ces patientes.
4. Diagnostic
43
En présence de cette symptomatologie frustre, l'utilisation large des dosages
hormonaux permet de la rattacher à l'hypothyroïdie et d'entreprendre un
traitement précoce.
4.1.2.1.Signes cutanéo-muqueux :
L'infiltration des espaces interstitiels par une substance mucoïde (GAG) qui
s'hydrate modérément :
rend compte de la prise de poids, modérée, sans véritable obésité ;
donne un aspect évocateur dès l'inspection. Cette infiltration diffuse intéresse :
• la peau donnant le myxoedème ou faux oedème, élastique, ne prenant pas
le godet . épaississant les paupières, le dos des mains et des pieds, les
doigts et orteils boudinésla face bouffie "en pleine lune"
• les muqueuses avec :
macroglossie, par épaississement de la langue
hypoacousie (par infiltration de la trompe d'Eustache)
ronflement nocturne
voix rauque, grave (par infiltration des cordes vocales), évocatrice, car
monocorde et lente
en outre la peau est :
sèche par tarrissement sudoral et sébacé
froide
pâle : pâleur cireuse, ou jaunâtre, nette au visage où les pommettes et
oreilles sont cyanosées ; paumes et plantes colorées, jaunâtres.
les phanères sont atteints :
cheveux raréfiés, secs, cassants
ongles striés et cassants
dépilation axilo-pubienne (le signe de la queue du sourcil classique est
plus rare).
4.1.2.2.Signes neuromusculaires :
Le maître mot est RALENTISSEMENT.
Ralentissement psychique avec :
indifférence à son état, somnolence, apathie, aspect inexpressif
diminution de l'attention, mémoire, idéation
Ralentissement moteur : asthénie d'effort ; geste rare et lent
Outre ce ralentissement psycho-moteur, on peut observer :
des paresthésies dans le territoire du nerf médian témoin d'un syndrome du
canal carpien
44
des troubles du comportement intermittent : bouffées de colère ou de
dépression
4.1.2.3.Signes musculaires :
Outre l'asthénie musculaire, il s'agit de : l'enraidissement, les CRAMPES, la lenteur
de décontraction et l'hypertrophie musculaire
4.1.2.4.Signes cardio-vasculaires :
Dyspnée d'effort, précordialgies, peuvent dominer le tableau clinique
Les bruits du coeur sont assourdis.
La bradycardie est inconstante
Les signes sont surtout paracliniques :
cardiomégalie, peu battante à la radio, témoin de l'infiltration myocardique et de
l'épanchement péricardique
ECG : bas voltage, T plat ou inversé
L'échocardiographie précise ces données myocardiques et péricardiques.
4.1.2.5.Signes digestifs :
Anorexie, nausée, dysphagie
Constipation, symptome le plus net,
à un stade très évolué, mégacolon et iléus paralytique peuvent s'observer
une ascite, riche en protéine, est présente dans 4 % des cas
AU TOTAL :
L'hypothyroïdie entraîne une grave dysfonction neuromusculaire, cardiorespiratoire
et gastro-intestinale.
45
LES FORMES MONO OU PAUCISYMPTOMATIQUES
Formes de début, fréquentes, diagnostic précoce grâce au dosage de TSH
LES FORMES ATYPIQUES
Savoir penser à l'hypothyroïdie
LE COMA MYXOEDEMATEUX
Terme évolutif d'une hypothyroïdie non traitée
Ce polymorphisme clinique pose de nombreux problèmes diagnostics. Qu'il s'agisse
:
de formes mono ou paucisymptomatiques de début
de formes trompeuses (avec un syndrome au premier plan)
musculaires, pseudomyotonique, hypertrophie pseudomyopathique
neuropsychique : démence, délire, syndrome cérébelleux
avec troubles génitaux révélateurs : ménorrhagies, surtout
syndrôme d'aménorrhée-galactorrhée par hyperprolactinémie ; insuffisance
lutéale et infertilité, avortements précoces répétés.
formes œdémateuses avec épanchement pleural, épanchement péricardique
(tamponnade ....), ascite, tous riches en protéines et cholestérol
à révélation biologique (on les reverra) : hypercholestérolémie, anémie,
élévation de TSH isolée (forme infra clinique)
46
mortelle dans 50 à 80 % des cas, malgré le traitement. Parfois révélateur de
l'hypothyroïdie et de diagnostic difficile.
Cliniquement : C'est l'installation progressive :
d'un COMA plus ou moins profond, sans signe de localisation, areflexique
avec souvent hyperprotéinorachie jusqu'à 3 g/l, associé dans 1/4 des cas
à des crises convulsives généralisées.
et aux signes classiques accentués : bradycardie, bradypnée,
hypotension, infiltration cutanée plus ou moins nette et surtout
hypothermie, excellent signe, parfois inférieur à 35°, présente dans 80 %
des cas
Biologiquement :
Hyponatrémie, hypokaliémie, hypoglycémie, anémie, hypoxie, et acidose
respiratoire (par hypoventilation alvéolaire d'origines centrale et
musculaire, encombrement, macroglossie).
Les facteurs déclenchants sont à connaître :
froid (95 % des comas surviennent en hiver)
infection
stress chirurgical ou traumatique
hémorragie
AVC (parfois au premier plan, peut faire méconnaître le coma
hypothyroïdien)
médicament (sédatifs, barbituriques, opiacés).
LE COMA MYXOEDEMATEUX
- Sans signe de localisation, aréflexique
- Crises convulsives généralisées (dans 1/4 des cas)
- Bradypnée
- Bradycardie (+ microvoltage et anomalie
de la repolarisation à l'ECG)
- Hypotension artérielle
- Hyponatrémie
- Hypoglycémie
- Anémie
- Hypoxie (hypoventilation alvéolaire)
47
4.3. Diagnostic biologique
Etant donné les difficultés du diagnostic des formes précoces, les examens de
laboratoire doivent être largement utilisés.
4.3.1.1.Situation typique :
L'abaissement de la T4 libre caractérise l'hypothyroïdie (T4 est le principal
produit de secrétion du CT)
Le taux de T3 a moins d'intérêt car :
il peut être encore normal alors que la T4 est abaissée
il est fréquemment abaissé chez des sujets euthyroïdiens mais atteints
d'une maladie non thyroïdienne aiguë ou chronique (infection aiguë,
cirrhose, insuffisance rénale, diabète, dénutrition etc..). C'est le
syndrôme de basse T3 isolée.
L'élévation du taux de TSH plasmatique est le test le plus sensible du diagnostic
d'hypothyroïdie primaire.
4.3.1.2.Autres possibilités :
Au début des hyposecrétions thyroïdiennes, les taux plasmatiques de T4 et de
T3 peuvent être encore dans la fourchette de la zone normale, compensées par
une hypersecrétion de TSH dont le taux est isolément élevé.
Le test à la TRH n'a plus de véritable intérêt dans l'hypothyroïdie primaire,
compte-tenu de l'extrême sensibilité du dosage de TSH.
48
ménométrorrhagie.
Enzymes musculaires élevées : CPK MM
Hyponatrémie de dilution dans les formes sévères
49
anatomique de la thyroïde : thyroïdectomie totale pour cancer ou sub-totale
pour Basedow ou GMNT ; iode radio-actif ; radiothérapie pour cancer du larynx,
de l'oesophage ou maladie de Hodgkin.
L'hypothyroïdie peut survenir de façon retardée, loin du geste thérapeutique.
4.4.1.2.AVEC GOITRE
Thyroïdite chronique d'Hashimoto (cf le chapitre thyroïdite)
C'est l'étiologie avec goître la plus fréquente, chez la femme entre 40 et 60
ans.
L'hypothyroïdie y est inconstante et apparaît en cours d'évolution. Elle peut
être déclenchée par une saturation iodée à laquelle ce type de thyroïdite est
très sensible.
Le diagnostic est facile :
sur les caractères du goître,
la présence d'anticorps anti-thyroïdiens à titre élevé (anti thyroglobuline
et anti TPO)
Elle peut être associée à une MALADIE D'ADDISON d'origine auto-
immune : elle constitue le syndrôme de Schmidt.
N.B.:d'autres thyroïdites (cf Chapitre "Thyroïdite") :
subaiguë de de Quervain à rechute
thyroïdite "indolore" ou silencieuse
thyroïdite du post-partum
peuvent, plus rarement, évoluer vers une hypothyroïdie.
Hypothyroïdie médicamenteuse
Il s'agit d'une altération fonctionnelle, acquise et réversible de la thyroïde.
L'origine peut être évidente :
prise d'ATS
prise de lithium
méconnue à rechercher
prise excessive d'iode. La saturation iodée est compliquée d'hypothyroïdie dans
environ 5 % des cas.
De nombreux produits sont en cause, mais surtout l'AMIODARONE et les produits
de contraste.
Il s'agit d'une hypothyroïdie modérée avec goître ferme. Iodémie et iodurie élevées.
Fixation précoce du radio-iode (une image scintigraphique correcte peut être
obtenue de 30 à 60 mn) : la fixation n'est pas effondrée du fait de la stimulation
par la TSH de la captation de l'iode. Test au perchlorate positif : il démontre
l'augmentation du pool intrathyroïdien d'iodure et le bloc de l'organification et
suggère que l'hypothyroïdie est secondaire à la surcharge iodée.
L'hypothyroïdie rétrocède après l'arrêt du médicament, souvent lentement.
Cependant, elle peut être définitive quand il existe des anomalies sous-jacentes de
la fonction thyroïdienne (thyroïdite antérieure latente ; traitement antérieur par
radio-iode).
Le goître endémique par carence iodée
50
Bien que devenue rare en Europe, la carence iodée persiste en France. Elle
provoque fréquemment des goîtres chez l'enfant. Associée à d'autres facteurs :
goitrigènes alimentaires, facteurs génétiques, elle explique une part des goîtres
sporadiques de l'adulte. Mais l'hypothyroïdie y est rare.
Causes plus rares d'hypothyroïdie primaire
Les déficits congénitaux de l'hormonosynthèse représentent 10 à 20% des
hypothyroïdies de l'enfant. La révélation chez l'adulte est rare :
hypothyroïdie avec goître à captation habituellement élevée.
Les dysgénésie thyroïdiennes, notamment les ectopies du corps thyroïde,
cause majeure chez l'enfant, se révèlent quelques fois chez l'adulte jeune. A
la scintigraphie, pas de CT en position normale mais en position haute (base
de la langue par exemple).
Destruction exceptionnelle du CT par un processus infiltratif : sarcoïdose,
amylose, néoplasme ou lymphome diffus, thyroïdite de Riedel etc..
5. Traitement
Son but est de restaurer les concentrationsy tissulaires adéquates d'HT pour
supprimer les anomalies cliniques et biologiques.
51
Il est rarement étiologique :
suppression d'un médicament
d'une surcharge iodée
ablation d'une tumeur hypophysaire
traitement d'une sarcoïdose.
Il s'agit le plus souvent d'un TRAITEMENT SUBSTITUTIF A VIE, qu'il faudra faire
accepter par le patient.
5.2. Posologie
Chez l'adulte jeune : 2 à 2,5 µg/Kg/j, c'est-à-dire 150 à 200 µg/jour (quelques
patients ont besoin de doses supérieures à 200 µg par jour car l'absorption varie
d'un sujet à l'autre).
Chez le sujet âgé : diminution de 15 à 20 % par décade : 1,6 à 1,9 µg/Kg/j soit
60 à 80 µg à 80 ans.
52
Chez le sujet de plus de 40 ans, avec hypothyroïdie ancienne et soupçonné
d'insuffisance coronarienne, le traitement sera extrêmement prudent et
progressif pour éviter l'aggravation de l'insuffisance coronarienne.
Par exemple : après un bilan cardiovasculaire soigneux, 10 à 20 µg de THYROXINE
par jour, à augmenter de la même dose toutes les 2 à 3 semaines, sous couvert de
suivi électrocardiographique et de médications anti-angineuses :
BB dès l'accélération du pouls
dérivés nitrés après correction de l'hypovolémie
inhibiteurs calciques
53
5.6. Le coma
C'est une urgence à traiter en milieu hospitalier. On n'attendra pas les résultats des
dosages hormonaux. Dès les prélèvements sanguins faits, on utilisera les mesues
suivantes :
LT4 : 200 à 500 µg IV lente ou IM le premier jour (pour saturer le pool des
protéines vectrices). Puis 50 à 100 µg IV chaque jour.
HYDROCORTISONE : 200 à 300 mg IV toutes les 3 à 4 heures puis 100 mg par
jour.
Oxygénation et assistance respiratoire
Pas de charge hydrique ou sodée importante. L'hyponatrémie de dilution est
corrigée par la CORTISONE, la THYROXINE, et parfois une restriction hydrique.
En cas de choc : solutés de remplissage ou sang
Compensation de l'hypoglycémie
Pas de correction active de l'hypothermie ; pas de sédatif.
Traitement de la cause déclenchante
EN CONCLUSION :
3 risques thérapeutiques principaux :
Mauvaise compliance :
Décompensation d'une insuffisance coronarienne
Plus rarement, méconnaissance d'une insuffisance surrénalienne se révélant par
une crise aiguë.
LES POINTS ESSENTIELS DU TRAITEMENT
1) Utiliser préférentiellement la L-THYROXINE
2) Juger sur le taux de TSH le caractère adapté de la posologie
3) Dépister et traiter une insuffisance coronarienne avant de traiter par THYROXINE
4) Dépister et traiter une insuffisance surrénale avant le traitement par THYROXINE
5) Posologies très lentement progressives chez le sujet âgé, et particulièrement en cas
d'insuffisance coronarienne.
Références bibliographiques :
- A. Léger : La Pathologie Thyroïdienne. Médecine-Sciences Flammarion, Paris.
- J. Leclere : La Thyroïde. Expansion Scientifique Française.
54
E. Une diminution de la relaxation musculaire
2. Les AC antithyroïdiens peuvent être observés dans :
A. La maladie de Basedow
B. Le goître multinodulaire toxique
C. La thyroïdite de de Quervain
D. La thyroïdite du post partum
E. L'hypothyroïdie provoquée par l'amiodarone
3. Dans l'hypothyroïdie, les dosages hormonaux peuvent montrer les résultats
suivants :
A. Abaissement de T4 L et de T3 L
B. Abaissement de T4 L et élévation de TSH
C. Abaissement de T4L et TSH normale ou basse
D. Abaissement isolé de T3
E. Elévation isolée de T3
4. Dans l'hypothyroïdie, les anomalies biologiques suivantes peuvent être
observées :
A. Anémie macrocytaire
B. Elévation des ALAT-ASAT
C. Elévation des CPK
D. Hypocholestérolémie
E. Hyperprolactinémie
5. Dans quelle(s) étiologie(s) de l'hypothyroïdie, un goître peut-il être présent:
A. Carence iodée
B. Après traitement par l'IRA d'une maladie de Basedow
C. Maladie de Sheehan
D. Thyroïdite d'Hashimoto
E. Hypothyroïdie au cours de la lithothérapie.
55
HYPERTHYROIDIES DE L'ENFANT (n°337)
Raja Brauner
Service d'Endocrinologie et Croissance
Faculté et Hôpital Necker-Enfants Malades.
Abréviations
TRAb : thyroïd receptor antibodies
TRAc : thyroïde récepteur anticorps = Ac antirécepteur de la TSH
TSI : thyroïd stimulating immunoglobulins
TSH: thyroïd stimulating hormone
T4: thyroxine
56
1. Etiologies et physiopathologie
2. Diagnostic
Tableau I : Signes de l'hyperthyroïdie de l'enfant
57
L'échographie thyroïdienne confirme le goitre. La scintigraphie n'est nécessaire que
dans les cas où il y a un doute diagnostique sur un nodule.
3.1. Antithyroïdiens
Ils sont le traitement le plus utilisé et prescrit en premier chez l'enfant. Il s'agit
essentiellement de carbimazole (Néomercazole®, 1 cp = 5mg), plus rarement du
benzylthiouracile (Basdène®, 1 cp= 25 mg). Ils peuvent entraîner une neutropénie,
surtout au début du traitement. Il convient donc de vérifier la numération formule
sanguine. La dose initiale de Néomercazole® est de 20 mg/m2. Elle peut ensuite
être rapidement diminuée jusqu'à une dose d'entretien, obtenue au bout d'environ
un an, se situant entre la moitié et le tiers de la dose initiale. Le problème est la
durée du traitement. En effet, les tentatives d'arrêt sont souvent suivies de
rechute.
Référence
Brauner R, Fontoura M. , Pathologie de la glande thyroïde chez l'enfant. Editions
techniques. Encycl
58
HYPOTHYROIDIES DE L'ENFANT (n° 338)
Raja BRAUNER
Service d'Endocrinologie et Croissance
Faculté et Hôpital Necker-Enfants Malades.
Abréviations
TRH ou TRF : thyrotropin releasing factor
TSH : thyroid stimulating hormone
T4 : thyroxine
T3 : triiodothyronine
T3 :reverse T3
59
poids évoque une hypothyroïdie.
Organe Hormone
Hypothalamus TRH ou TRF
Anté-hypophyse TSH
Thyroïde T4, T3, rT3
1. Etiologies et physiopathologie
Le taux plasmatique de TSH est augmenté dans les formes périphériques et normal
ou bas dans les formes centrales. Dans les formes centrales, un test à la TRH est
nécessaire au diagnostic : il montre une augmentation insuffisante de la TSH
lorsque l'atteinte est hypophysaire et une réponse ample et prolongée de la TSH
lorsque l'atteinte est hypothalamique.
Tableau II : Principales étiologies de l'hypothyroïdie de l'enfant
Congénitale
Périphérique (TSH augmentée )
ectopie
athyréose
glande en place (troubles de l'hormonosynthèse, autres)
transitoire du nouveau né
Centrale (TSH normale ou diminuée )
insuffisance hypothalamo-hypophysaire
Acquise
Périphérique
anomalies congénitales à expression tardive
thyroïdite auto-immune
irradiation cervicale
goitre endémique (carence en iode)
surcharge (thalassémie, cystinose...)
Centrale
insuffisance hypothalamo-hypophysaire
idiopathique, tumorale ou après irradiation crânienne
60
Le diagnostic étiologique de l'hypothyroïdie congénitale périphérique repose sur le
résultat de la cartographie thyroïdienne obtenue par scintigraphie (à l'iode 123 ou
au Technétium). De 1977 à 1988 et dans le cadre de l'association française pour le
dépistage et la prévention des handicaps de l'enfant, 1895 cas ont été dépistés en
France. La distribution des étiologies est la suivantes : ectopie 50%, athyréose
26%, glande en place 16% ; 8% des enfants n'ont pas eu de scintigraphie. La
cause de la dysgénésie thyroïdienne (ectopie, athyréose) n'est pas connue. Parmi
les hypothyroïdies avec glande en place, la moitié environ est due à un trouble de
l'hormonosynthèse thyroïdienne. L'autre moitié reste de mécanisme inconnu en
dehors de quelques cas d'hypothyroïdie due à une anomalie du gène du récepteur
de la TSH. Les troubles de l'hormonosynthèse se transmettent sur le mode
autosomique récessif ; un goitre est fréquent.
1.1.2. Centrale
Elle est beaucoup plus rare que l'hypothyroïdie périphérique. L'insuffisance en TSH
fait partie d'une insuffisance anté-hypophysaire incluant l'hormone de croissance
dans tous les cas. Son mécanisme est varié : secondaire à une anomalie génétique
ou du développement, ou à un traumatisme pré- ou per-natal.
1.2.1. Périphérique
L'hypothyroïdie a le plus souvent une expression clinique et biologique. A l'inverse,
dans certains cas, elle peut être compensée : le maintien d'un taux plasmatique de
T4 normal ou à la limite inférieure de la normale est obtenu au prix d'une
hypersécrétion de TSH. Cette situation peut se maintenir longtemps ou évoluer vers
l'hypothyroïdie décompensée.
Parmi les étiologies des hypothyroïdies acquises de l'enfant (Tableau II), la plus
fréquente est la thyroïdite de Hashimoto (avec présence d'anticorps antithyroïdiens
circulants de type antithyroglobuline et antimicrosomaux).
1.2.2. Centrale
L'insuffisance acquise en TSH fait partie, comme dans les formes congénitales,
d'une insuffisance anté-hypophysaire incluant l'hormone de croissance dans tous
les cas. Parmi les causes d'hypothyroïdie centrale acquise, citons les tumeurs de
cette région, en particulier le craniopharyngiome et l'irradiation crânienne.
2. Diagnostic
Le diagnostic est confirmé par le taux plasmatique de T4 abaissé. Le taux
plasmatique de TSH dépend de l'étiologie (voir plus haut).
61
prolongation de l'ictère néonatal
hypotonie axiale
fontanelle postérieure large
En l'absence de traitement
insuffisance de croissance staturale
retard d'âge osseux
retard psychomoteur
2.2. Enfant
Le tableau clinique dépend de l'importance de l'hypothyroïdie. Le signe le plus
évocateur est le ralentissement de la vitesse de croissance en taille, surtout s'il est
associé à une prise de poids. L'âge au ralentissement est un indicateur du début de
l'hypothyroïdie. Les autres signes sont: asthénie, constipation, frilosité, diminution
des performances scolaires. A l'examen clinique, il y a souvent une bradycardie. La
présence d'un goitre dépend de l'étiologie de l'hypothyroïdie.
L'âge osseux, évalué sur la radiographie de la main et du poignet gauches de face
par comparaison avec l'atlas de Greulich et Pyle, est inférieur à l'âge chronologique
(écart souvent supérieur à 2 ans).
62
(Lévothyrox®, 1 comprimé = 25, 50 75, 100 et 150 µg). Les gouttes sont utilisées
durant la première année de vie, puis elles sont remplacées par des comprimés. Le
traitement est administré en une prise quotidienne.
La posologie est de 8 µg/kg/jour durant le premier trimestre de vie, puis les
besoins diminuent pour atteindre 5 µg/kg/j vers l'âge de 2 ans. La surveillance se
fait sur les données cliniques (évolution de la croissance staturo-pondérale,
fréquence cardiaque) et sur les taux plasmatiques de T4 et TSH. La dose est
ajustée pour maintenir la T4 dans la zone limite supérieure de la normale et la TSH
détectable et <5 mU/l. Il est essentiel que le contrôle soit parfait, surtout durant la
première année de vie et ce en raison du rôle des hormones thyroïdiennes dans le
développement des structures nerveuses. Durant cette période, des ajustements
fréquents de la dose sont nécessaires du fait des modifications rapides du poids.
Une hyposidérémie est à rechercher et à corriger. Dans les hypothyroïdies d'origine
centrale, le traitement par T4 est associé au traitement des autres insuffisances
hypophysaires. Le traitement substitutif est nécessaire à vie, sauf dans certaines
thyroïdites avec récupération d'une fonction thyroïdienne normale. Le traitement
permet un rattrapage staturo-pondéral et une régression des troubles. Dans les
formes congénitales, le pronostic est bon si le traitement est débuté tôt (avant l'âge
de 1mois, voir question n° 167)
Référence bibliographique
Brauner R, Fontoura M., Pathologie de la glande thyroïde chez l'enfant. Editions
techniques. Encycl Med Chir (Paris, France) Pédiatrie, 4-105-A-10, 1995, 7p
63
B. Il est régulièrement adapté au poids
C. Il est administré en une prise quotidienne
D. La croissance staturale est médiocre
E. Il doit être commencé le plut tôt possible
3. Le dépistage néonatal systématique de l'hypothyroïdie congénitale a été mis en
place pour les raisons suivantes:
A. Fréquence élevée de 1/4000 de l'hypothyroïdie congénitale
B. Le pronostic mental dépend de la précocité du traitement
C. Le rattrapage statural est médiocre si le traitement est débuté après l'âge de
6 mois
D. Le diagnostic clinique d'hypothyroïdie est difficile chez le nouveau né
E. Fréquence de 1/1000 de l'hypothyroïdie congénitale
4. Les critères habituellement utilisés pour dire que la dose de thyroxine
administrée est correcte sont :
A. Croissance staturale normale
B. Taux sanguin de TSH normal
C. Taux sanguin de thyroxine normal
D. Réflexogramme achilléen normal
E. Taux sanguin de cholestérol normal
64
THYROIDITES
Jean-Claude VALCKE
Service d'Endocrinologie - Diabètologie - Médecine Interne
Hôpital Boucicaut
THYROIDITES
1. Définition
2. Thyroïdites aiguës
2.1. Thyroïdite aiguë suppurée
2.2. Thyroïdites liées a l'iode radio-actif
3. Thyroidite sub-aigüe
3.1. Etiologie
3.2. Physiopathologie
3.3. Diagnostic
3.4. Evolution - Pronostic
3.5. Traitement
4. Thyroïdites chroniques
4.1. Etiologie-Physiopathologie
4.2. Thyroïdite d'Hashimoto
4.3. Thyroïdite indolore et thyroïdite du post-partum
5. Thyroidite de Riedel
Questions à choix multiples
1. Définition
Il s'agit d'états inflammatoires survenant sur un CT antérieurement sain :
d'étiologies diverses,
d'intensité variable : aiguë, subaiguë ou chronique,
s'accompagnant d'euthyroïdie ou de dysthyroïdie souvent transitoires.
65
maladie d'Hashimoto (forme goitreuse)
thyroïdites atrophiques
thyroïdites silencieuses, indolores
thyroïdites du post-partum
2. Thyroïdites aiguës
2.1.1. Etiologie
Devenue très rare, il s'agit d'une invasion bactérienne localisée de la thyroïde par
voie hématogène ou lymphatique au cours d'une septicémie ou d'une affection de
voisinage.
Les germes abituellement en cause sont la streptocoque hémolytique, le
staphylocoque doré, le pneumocoque ou un germe anaérobie.
2.1.2. Diagnostic
Il est facile sur :
Début brusque par une douleur cervicale antérieure vive et une dysphagie.
Une tuméfaction localisée avec signes inflammatoires, ayant parfois atteint le
stade d'abcès.
Un contexte évident septicémique.
Les hormones thyroïdiennes sont normales et le diagnostic est assuré par les
hémocultures et parfois la ponction d'un abcès.
2.1.3. Evolution
Elle est habituellement favorable grâce à une antibiothérapie adaptée et parfois un
drainage chirurgical.
2.2.1. Physiopathologie
L'administration d'une dose thérapeutique d'I 131 entraine une nécrose cellulaire
au niveau des follicules associée à un processus inflammatoire.
2.2.2. Diagnostic
Il est facile par la surveillance systématique post-IRA thérapie : une à trois
semaines après le traitement, survenue d'une exacerbation de la thyrotoxicose
(relargage d'HT) et/ou de douleurs au niveau du CT.
66
2.2.3. Evolution
La thyroïdite régresse spontanément en quelques semaines. Le risque évolutif est,
chez le sujet âgé ou porteur de cardiopathie, la survenue ou l'aggravation d'une
cardiothyréose ou d'une crise aiguë.
2.1.4. Traitement
Il n'y a pas de traitement spécifique. Le risque de l'aggravation de la TT chez les
sujets fragiles sera prévenu par l'administration d'ATS et/ou de BB juste après l'IRA
thérapie.
3. Thyroidite sub-aigüe
C'est une thyroïdite souvent méconnue, donc probablement plus fréquente qu'on ne
le dit, appelée aussi : de DE QUERVAIN, granulomateuse ou à cellules géantes.
3.1. Etiologie
Elle est très certainement d'origine virale, mais sans virus spécifique. Elle survient
volontiers au cours des épidémies de rougeole, grippe, oreillons, ainsi qu'avec les
virus ECHO, coxsackie, adénovirus.
3.2. Physiopathologie
Le terrain est particulier : 10 femmes pour 1 homme surtout de 20 à 60 ans, mais
en fait à tout âge ; présence fréquente de l'antigène d'histocompatibilité HLA B35
ou HLA B25.
L'atteinte inflammatoire est diffuse, marquée par une infiltration granulomateuse
des follicules ; elle aboutit à une destruction des cellules folliculaires et la libération
massive d'hormones thyroïdiennes. Elle sera suivie d'une régénération du tissu
thyroïdien et d'une restitution ad integrum.
3.3. Diagnostic
3.3.1. Clinique :
Il repose sur trois syndrômes :
Une maladie infectieuse
générale plus ou moins brutale avec fièvre élevée, asthénie intense, céphalées,
arthralgies, myalgies, parfois précédée quelques jours plus tôt par une affection des
voies aériennes supérieures.
Un syndrôme local :
douleurs cervicales antérieures faisant découvrir :
un goître peu volumineux, diffus, homogène, ferme, surtout DOULOUREUX
avec IRRADIATIONS aux oreilles et à la nuque parfois révélatrices
(diagnostics souvent érronés des maladies de la sphère ORL)
Un syndrôme de thyrotoxicose,
1 à 2 semaines après le début, avec palpitations, sueurs, tachycardie,
tremblement, amaigrissement, SANS signe oculaire.
67
Ils confirment le diagnostic :
VS toujours élevée au-dessus de 50 mm ; hyperalpha2globulinémie et
hyperleucocytose modérée
Elévation de T4, T3 et de la thyroglobuline et TSH abaissée
Anticorps antithyroïdiens négatifs
Scintigraphie "blanche" (par freination de TSH et lésion des cellules
thyroïdiennes)
Captation nulle ou faible
3.5. Traitement
On utilisera uniquement dans les formes très douloureuses :
les SALICYLATES : 2 à 3 gr par jour
4. Thyroïdites chroniques
Il s'agit de thyroïdites auto-immunes dont la maladie d'Hashimoto est l'aspect le
plus fréquent et le plus typique.
Au plan nosologique, les thyroïdites auto-immune comprennent :
outre la thyroïdite d'Hashimoto (avec goitre),
l'atrophie "idiopathique" du CT (cf chapitre hypothyroïdie),
une grande part des thyroïdites du post-partum,
probablement la majorité des thyroïdites indolores
4.1. Etiologie-Physiopathologie
68
Terrain prédisposé :
prédominance chez la femme de 40 à 60 ans, mais l'affection peut se voir
aussi chez l'enfant et l'adolescent ;
corrélation entre la fréquence de la thyroïdite d'Hashimoto et la présence de
l'antigène d'histocompatibilité HLA-DR5 (et HLA-DR3 dans les formes
atrophiques),
cas familiaux ;
Anomalie de l'immunosurveillance :
altération des immunités à médiation cellulaire et humorale :
production d'anticorps cytotoxiques et d'immunoglobulines de type divers,
notamment auto-anticorps se fixant sur le récepteur de la TSH et bloquant
l'activité de celle-ci.
Association à d'autres maladie auto-immunes
4.1.3. Anatomiquement
La thyroïdite d'Hashimoto est caractérisée par une hyperplasie folliculaire, de vastes
plages d'infiltrats lymphoplasmocytaires, des follicules lymphoïdes avec centre
germinatif, et une sclérose interstitielle débutante. Il en résulte une destruction
progressive des vésicules thyroïdiennes et des modifications hyper-eosinophiles de
quelques cellules parenchymateuses, hypertrophiées, appelées cellules de Hürtle.
69
anti TPO > 1/1000ème
VS et taux des gammaglobulines sont modérément élevées
T3 et T4 sont normales au moins initialement ainsi que la TSH
La scintigraphie
sans grand intérêt, montre une fixation hétérogène et faible
4.2.5. Traitement
Il est palliatif :
thyroxine en cas d'hypothyroïdie,chirurgie en cas de suspicion de cancer (forme
nodulaire).
La corticothérapie est sans efficacité sur l'évolution à long terme
4.3.2. Diagnostic
70
4.3.2.1.Les signes cliniques associent :
un goître modéré, indolore
une thyrotoxicose initiale souvent révélatrice de l'affection, mais transitoire
durant 1 à 2 mois. Il n'y a pas de signes oculaires.
4.3.2.2.Examens complémentaires :
VS normale ou peu élevée
HT élevées ; TSH abaissée
Autoanticorps faiblement positifs
Fixation basse ou nulle
Scintigraphie "blanche"
4.3.2.3.Formes cliniques :
Une forme particulière de thyroïdite silencieuse est LA THYROIDITE DU POST-
PARTUM.
Elle a tous les caractères d'une thyroïdite silencieuse :
- phase de thyrotoxicose avec petit goître indolore, un mois après
l'accouchement. Autoanticorps présents à positivité modérée.
- puis, hypothyroïdie transitoire et retour à l'euthyroïdie.
D'autres évolutions sont possibles :
hypothyroïdie d'emblée mais transitoire
évolution vers une thyroïdite d'Hashimoto typique
hypo- ou hyperthyroïdie permanente nécessitant un traitement
4.3.2.4.Evolution
La thyroïdite silencieuse, après la phase de thyrotoxicose qui dure quelques
semaines ou mois, évolue vers la guérison (CT et fixation normaux). Des rechutes
sont possibles.
4.3.2.5.Traitement
L'évolution spontanée vers la guérison recommande de n'utiliser aucune
thérapeutique agressive.
Les ATS d'ailleurs, s'ils sont utilisés, entraînent rapidement une hypothyroïdie (ou
sont inefficaces au stade de re largage des HT). Les BB peuvent être justifiés
pendant la phase transitoire de thyrotoxicose.
5. Thyroidite de Riedel
C'est une forme exceptionnelle de thyroïdite d'évolution très lente. Elle s'observe
surtout chez la femme de 30 à 70 ans. Elle est de cause inconnue.
Histologiquement
C'est une fibrose invasive, destructrice.
Cliniquement
Le goitre Il est dur, compressif, souvent adhérent. Les hormones thyroïdiennes sont
normales ou basses.
71
Le traitement
Il est chirurgical en cas de compression et surtout pour pratiquer un examen
anatomopathologique et éliminer un cancer.
72
GOITRE (n° 58)
Jérôme Clerc
Service de Médecine Nucléaire - Hôpital Necker
Points importants
1.Le goitre est une augmentation du volume thyroïdien dont le diagnostic repose
sur la palpation. On parle de goitre si, au minimum, un lobe est supérieur à la
2ème phalange du pouce du sujet.
2.Le goitre est une maladie très fréquente dont la cause principale sur la planète
est la carence iodée alimentaire aggravée par certaines habitudes alimentaires:
consommation de manioc, cruciféracés. On parle de goitre endémique lorsque plus
de 10% de la population est porteuse d'un goitre.
3.Le goitre sporadique domine dans les pays assurant des apports iodés
alimentaires quotidiens > 100 µg/j. Ses causes sont alors génétiques, toxiques ou
secondaires (puberté, grossesse, médicaments etc..)
4. Les complications des goitres sont:
73
l'apparition de nodules, soulevant le problème du cancer
l'apparition d'une hyperthyroïdie: maladie de Basedow, goitre multinodulaire
toxique, goitre secondairement toxique ou autonomisé, thyroïdite subaiguës sur
goitres
l'apparition d'une hypothyroïdie: maladie de Hashimoto, causes iatrogènes, suites
des thyroïdites subaiguës, hypothyroïdie induite par une surcharge iodée...
l'apparition de signes compressifs, notamment en cas de goitres plongeants ou
monstrueux: dyspnée (trachée), dysphagie (oesophage), dysphonie (N.récurrent,
N. laryngé sup.) rarement, mais suspectes d'une évolution néoplasique.
5.La surveillance et le traitement des goitres relèvent de leur étiologie.
Les trois traitements majeurs des goitres sont: l'hormone thyroïdienne (goitres
récents et hypothyroïdies), la chirurgie (goitres nodulaires), l'iode 131 (goitres
nodulaires toxiques et contre-indications de la chirurgie).
1. Définition
Le goitre se définit comme une augmentation de volume de la thyroïde secondaire
à une augmentation du capital folliculaire.
Cette définition exclut les augmentations strictement focales (nodules) et pour
certains les thyroïdites, où l'infiltrat inflammatoire est alors responsable de
l'augmentation volumique.
2. Diagnostic
normale (grade 0A): chaque lobe est < à la 2ème phalange du pouce du patient
grades 0B: un lobe est > à la 2ème phalange du pouce, mais la thyroïde n'est pas
visible même si le cou est en hyperextension
grade 1: la thyroïde est visible avec attention, en position normale ou en
hyperextension
grade 2 & 3: la thyroïde est facilement visible à l'inspection (2) voire à distance (3)
grade 4: goitre monstrueux
2.2.Anatomie Pathologique
Au début, le goitre est diffus et répond à une hypertrophie des cellules folliculaires.
Puis, les vésicules se chargent en colloïde tandis que l'épithélium s'amincit.
74
Enfin, le goitre devient hétérogène avec formation de nodules qui vont grossir, se
nécroser, saigner, fusionner, donnant tous les aspects des goitres multinodulaires
vieillis. La croissance folliculaire se fait le plus souvent de façon multiclonale.
3. Etiologies
Toutes les situations où existent un défaut d'apport en iode et/ou trouble de
l'hormonogénèse, acquis ou congénital, peuvent entraîner par mise en jeu du
rétrocontrôle, une élévation de la TSH responsable au moins de l'initiation du
goitre.
75
hypothyroïdie avec retard de croissance,
constatation de la réversion du crétinisme après correction de la déficience
iodée.
La prévention du goitre carentiel passe par la supplémentation iodée de
l'alimentation ou par une prophylaxie médicamenteuse directe (Lipiodol
injectable et bientôt per os, 2 à 3 gélules par an).
En France la prophylaxie est théoriquement assurée par l'iodation du sel
alimentaire.
4. Clinique
4.1.Découverte
La découverte du goitre relève actuellement de l'examen clinique systématique ou
d'une consultation de la médecine du travail, d'une découverte incidente lors d'un
examen d'imagerie cervicale (Doppler), d'une gêne cervicale, plus rarement d'un
dysfonctionnement sécrétoire, hyper ou hypothyroïdie. La gêne cervicale
correspond au minimum à une sensation de pression cervicale, souvent
permanente. Elle peut résulter d'un goitre volumineux ou de consistance ferme à
dure.
76
Chercher l'existence de nodules associés:
Nombre, siège, taille, à consigner sur un schéma.
Chercher des signes évoquant une pathologie auto-immune:
Anamnèse, autres pathologies auto-immunes, signes extra-thyroïdiens de la
maladie de Basedow et de Hashimoto.
Noter les médicaments interférant
avec la thyroïde: hormones thyroïdiennes, iode et médicaments iodés
(cordarone, produits de contraste), antithyroïdiens, 131I, lithium.
avec l'axe thyréotrope (inhibiteurs TSH): corticoïdes, somatostatine,
dopamine, hormones thyroïdiennes et dérivées.
Noter les pathologies générales interférant avec l'axe thyréotrope:
Maladies graves évolutives, dépression, insuffisance rénale - hémodialyse, tumeurs
hypothalamo-hypophysaires parfois responsables de déficits thyréotropes;
l'acromégalie s'accompagne fréquemment d'un goitre.
77
goitre (multi)- familial, évolution EU goitre multinodulaire
nodulaire lente,
simple
complications
(/): Hyper (/): autonomisé, toxique
goitre nodulaire compressions EU évoquer un cancer
dur ou évolutif
adénopathies
goitre ferme et infectieux, Hyper./EU thyroïdite subaiguë
sensible
transitoire, récent (strumite)
goitre diffus congénital Hypo. trouble de
l'hormonogénèse
5. Examens complémentaires.
Trois examens dominent l'exploration des goitres: la biologie, l'imagerie -
échographie et scintigraphie -, la cytologie thyroïdienne en cas de nodules
palpables (ou > 10 mm, en échographie).
5.1. Biologie.
Devant un goitre, on dosera la TSH pour s'assurer de la normalité de la fonction
thyroïdienne.
S'il existe des signes cliniques d'hyperthyroïdie, on ajoutera un dosage de T4
libre. En cas d'hyperthyroïdie, on peut également prescrire un dosage des
anticorps anti R-TSH ("TRAK"), si la maladie de Basedow n'est pas typique
cliniquement.
S'il existe des signes cliniques d'hypothyroïdie, ou des arguments pour une
maladie auto-immune (goitre ferme, contexte familial ou personnel,
imagerie...), on demandera en plus de la TSH, la T4 libre et les anticorps
antithyroïdiens (ACATT: anti TG & anti TPO).
78
5.2. Imagerie.
5.2.1. Echographie.
L'échographie est prescrite de première intention, si la palpation est anormale.
Elle permet de mesurer le volume lobaire qui se calcule comme: V = π A B C / 6
(diamètres principaux). Elle montre des nodules infracliniques très fréquents,
mais de signification pathologique incertaine, et des nodules > 10 mm, qui
nécessitent une prise en charge (cf. nodule).
Au début le goitre est homogène puis devient hétérogène, secondairement à
l'apparition de nodules (goitre nodulaire) ou à des modifications de l'échostructure
globale. Les zones hypoéchogènes focales et globales évoquent les thyroïdites (cf.
infra). Un parenchyme globalement hétérogène avec zones pseudo-nodulaires
hypoéchogènes plaide pour une maladie de Hashimoto (MH) en phase de début.
Le caractère multinodulaire des goitres est très fréquent ( > 80%) et doit faire
discuter des exérèses plus larges afin de limiter le taux de réintervention.
L'échographie est utile à l'étude du suivi morphométrique des nodules et permet
d'apprécier leur augmentation de volume qui est un critère majeur pour indiquer
une cytologie ou une sanction chirurgicale.
L'existence d'un goitre hypoéchogène hypervasculaire et de vitesses
circulatoires élevées (0.5 à 1 m/s) évoque une maladie de Basedow.
L'échographie montre une hypoéchogénicité globale et profonde avec
augmentation modérée des vitesses circulatoires, dans les strumites (thyroïdites
subaiguës De Quervain sur goitre).
Dans la thyroïdite chronique de Hashimoto (MH) l'échogénicité est très variable,
classiquement diminuée, plus ou moins corrélée à l'hypothyroïdie biologique
dans les formes débutantes, majoritairement vues actuellement. Les vitesses
circulatoires sont ici normales ou discrètement élevées.
Limites de l'échographie: reproductibilité médiocre - sensibilité & spécificité
médiocres dans le diagnostic étiologique des hyperthyroïdies - performance
limitée pour les thyroïdes plongeantes - pas de diagnostic des nodules
thyroïdiens autonomes, des pathologies de l'iode.
5.2.2. Scintigraphie
La scintigraphie est prescrite de seconde intention
si l'échographie est anormale (nodule ≥ 10 mm)
si la fonction est anormale (hyperthyroïdie).
C'est un examen utile à la phase diagnostique; ce n'est pas un examen de
surveillance. Elle permet de mesurer le volume lobaire qui se calcule comme:
0,47 (π A B / 4)1,5 , où A, B la hauteur et la largeur du lobe.
Elle montre, avec une très bonne reproductibilité, les seuls nodules nécessitant
une prise en charge (> 10 mm). C'est le seul examen permettant d'identifier les
nodules chauds.
La thyroïde est initialement homogène en scintigraphie, puis devient
hétérogène, secondairement à l'apparition de nodules (goitre nodulaire), dont la
capacité de fixation est différente de celle du tissu sain.
Le caractère multinodulaire des goitres est très fréquent et doit faire discuter
des exérèses plus larges en cas d'atteinte bilatérale, afin de limiter le taux de
réintervention. Le caractère plongeant n'est pas un obstacle à l'imagerie
scintigraphique.
79
Des nodules froids et chauds peuvent être identifiés au sein des goitres. Les
nodules chauds évoluent dans 70% des cas vers l'hyperthyroïdie à 10 ans.
L'existence d'un goitre homogène hyperfixant (> 30% à 120') est
pathognomonique d'une maladie de Basedow. La scintigraphie fait le diagnostic
des formes intriquées avec une maladie de Hashimoto ("Hashitoxicoses")
Dans la thyroïdite chronique de Hashimoto (MH), la scintigraphie montre des
zones encore fonctionnelles, contrastées, et des plages non nodulaires mal
contrastées. La fixation est élevée au début de la maladie (> 15%), puis
s'effondre à la phase d'état (< 7% à 120').
Dans les strumites (et les thyroïdites subaiguës De Quervain), la scintigraphie
montre une image très mal contrastée, en rapport avec une fixation effondrée.
La scintigraphie identifie les pathologies liées à un défaut d'apport (goitre avide
d'iode) ou un excès d'apport iodé (hyper et hypothyroïdie).
80
Figure 1 Goitre: orientation initiale
6.1.1.Resultats:
Tout est normal : GOITRE SIMPLE
Les AC anti-TPO sont > 0.
Il peut s'agir d'une maladie de HASHIMOTO en phase de début, d'une
maladie de BASEDOW Euthyroïdienne.
Conforter le diagnostic par l'imagerie (échographie, puis scintigraphie en
l'absence de confirmation diagnostique). Il faut rapprocher la surveillance
biologique et /ou traiter, selon les circonstances.
Si l'iodurie est basse :
Il s'agit d'un GOITRE CARENTIEL. Il faut traiter par la thyroxine et
81
supplémenter l'alimentation en iode (mesures diététiques ou
médicamenteuses)].
L'échographie est hétérogène ou montre des micro-nodules (< 10 mm).
Il s'agit d'un GOITRE HETEROGENE SIMPLE ou d'un GOITRE
(MULTI)MICRONODULAIRE SIMPLE.
6.1.2.Conduite à tenir:
Si le goitre est bien toléré, instituer une simple surveillance clinique espacée (/
1 à 2 ans)
Si le goitre est récent, mou, gênant, proposer un traitement par la LT4 (75 à
100 µg/j), de sorte que la TSH soit normale basse. Il faut alors évaluer l'effet du
traitement à 1 an, par une échographie (variation du volume).
En présence d'un goitre micronodulaire, on discutera plus volontiers un
traitement par la LT4 (75 à 100 µg/j), d'autant que la TSH est normale-haute.
Le traitement n'est maintenu que s'il existe une diminution à 1 an du volume du
goitre et/ou une régression des nodules (échographie de surveillance).
En cas de goître monstrueux (stade 4), il faut rechercher les complications
éventuelles: hyperthyroïdie, compression et cancer et Prescrire: TSH, T4 libre,
AC anti TPO & anti TG, scintigraphie thyroïdienne, radiographie de thorax (en
cas de compression: tomographies de trachée ou TDM). Le traitement est
chirurgical ou relève de l'iode 131 à visée réductrice, en cas de contre-indication
opératoire.
6.2.1.Conduite a tenir
Rechercher les circonstances favorisantes et les complications éventuelles des
goitres: cancer, autonomisation, compression...
Prescrire: TSH, échographie, "ACATT": anti TPO et anti-TG, scintigraphie,
cytologie thyroïdienne (nodule hypofonctionnel).
Si le patient vient ou habite une zone d'endémie goitreuse, s'il existe une
carence alimentaire ou s'il s'agit d'une femme enceinte, doser l'iodurie des 24
h].
L'arbre décisionnel est présenté Figure 2.
82
Figure 2 : Exploration des "goitres nodulaires"
83
chaudes. Les nodules chauds sont exceptionnellement cancéreux et le risque à
terme est une hyperthyroïdie d'évolution très lentement progressive,
dangereuse sur le plan cardiaque.
Il faut envisager un traitement dès que la TSH diminue ou d'emblée si elle est <
0.1 µU/ml. Il est inutile à dangereux de prescrire de la T4 en cas de nodule
autonome.
surveiller le goitre et les nodules, par échographie et cytologie.
On peut discuter un traitement freinateur (LT4) , si la TSH est > 2 µU/m
Certains recommandent de doser une fois la Thyrocalcitonine (TCT, cf. cancer)
GMT avec surcharge ACATT < 0 focale du contraste nodules tous types
iodée
à fixation basse
Hyperthyroïdie ACATT < 0 Fixation nulle normale
iatrogène et factice
TG Nle ou basse
84
Tableau V : Goitre en hypothyroïdie ± nodule (La TSH est ≥ MAX (µU/ml))s
85
Fig. 1 - Schéma simplifié des rapports anatomiques palpatoires de la thyroïde, face
antérieure.
Les différentes structures sont superposées. A droite (A), on a représenté un lobe
thyroïdien normal et son isthme se projetant sur les premiers anneaux trachéaux. A
gauche (B), image d'un goitre multinodulaire volumineux dont le pôle inférieur,
rétroclaviculaire est impalpable.
86
Fig. 2 - Scintigraphie : Goitre multinodulaire Toxique
87
Fig. 3 - Scintigraphie: Goitre Multinodulaire (Nodules froids multiples)
88
Fig. 4 - Scintigraphie: Maladie de Basedow typique
89
Fig. 5 - Scintigraphie: Goitre Hétéronodulaire
90
Fig. 6 - Scintigraphie : Thyroïdite de Hashimoto
- Petit goitre ferme non nodulaire chez une patiente en euthyroïdie clinique et en
hypothyroïdie biologique modérée. TSH: 3,25 µU/ml, T4 libre: 11 pM/l (N<20).
Le lobe droit pèse 11 g et lobe gauche 9 g. La répartition du contraste est très
anormale avec à droite une zone hyper contrastée apicale et une zone centrale et
inférieure mal contrastée. A gauche, on observe un trou de fixation centro lobaire.
Ces défauts de captation de l'iodure correspondent à des zones détruites ou
infiltrées de lymphocytes dans le cadre d'une thyroïdite chronique auto-immune.
Anticorps anti-thyroïdiens: ATPO: 2569 UI/L
La fixation globale est normale basse à 8% (N : 12 ± 5%).
91
Questions à choix multiples
1. Citez les facteurs impliqués dans la genèse des goîtres parmi:
A. Une carence iodée
B. Une acromégalie
C. Un traitement par le Lithium
D. Un traitement par la LT4 (Thyroxine)
E Un taux élevé de prolactine
2. Parmi les propositions suivantes concernant le goître, une seule est exacte.
Laquelle ?
A. La définition du goître repose sur les données de l'échographie
B. La première cause de goître sur la planète est un trouble génétique de la
synthèse des hormones thyroïdiennes
C. Le manioc est un aliment naturel anti-goîtrigène
D. En cas de carence iodée, la thyroïde synthétise davantage de triiodothyronine
que de thyroxine
E. La prévalence du goître est évaluée à 2%, en France
3. Citez parmi les manifestations suivantes, celles qui peuvent compliquer
l'évolution d'un goître
A. Une dyspnée à prédominance expiratoire
B. Une dysphonie
C. Un syndrome cave supérieur
D. Un cancer nodulaire
E. Une tachyarythmie par fibrillation auriculaire
4. En présence d'un goitre et d'une hyperthyroïdie on évoquera une strumite
devant:
A. Un goitre mou et indolent
B. Une mesure de fixation effondrée de l'iode 123
C. La présence d'anticorps dirigés contre le récepteur de la TSH
D. Un taux de thyroglobuline effondré
E. Un taux de thyrocalcitonine élevé
92
CANCERS DE LA THYROIDE (n° 339)
Jérôme Clerc
Service de Médecine Nucléaire - Hôpital Necker
Points importants
Le cancer thyroïdien nodulaire est une affection rare dont la mortalité spécifique
est basse (<1% de tous les cancers), lorsque le traitement est bien conduit.
On distingue les cancers thyroïdiens différenciés (CTD) de souche folliculaire
(80%), des cancers médullaires (CMT) dérivés des cellules à thyrocalcitonine
(5%), Les cancers de souche folliculaire correspondent à 2 variétés: les cancers
papillaires (70%), caractérisés par des anomalies nucléaires détectables par la
cytologie, et les cancers vésiculaires, caractérisés par des anomalies
architecturales et des signes d'invasion. Les cancers papillo-vésiculaires sont
93
rattachés au groupe des cancers papillaires.
Le principal facteur de risque du CTD est l'exposition à une irradiation cervicale,
notamment dans l'enfance.
Le traitement du CTD repose sur la chirurgie, l'iode 131 et l'administration de
thyroxine.Pour les nodules ≥ 10 mm, la chirurgie est une thyroïdectomie totale
avec curage ganglionnaire homolatéral (jugulo-carotidien & récurrentiel) et du
compartiment central.L'iode 131 (4 GBq), administré en chambre protégée,
permet de détruire les reliquats thyroïdiens de la chirurgie, les foyers
microscopiques de cancers et fait le bilan d'extension par la scintigraphie du
corps entier. La contre-indication majeure est la grossesse.La thyroxine (T4) est
donnée à visée de freination de la TSH, car le cancer thyroïdien est hormono-
dépendant. La freination est définie par une valeur de TSH ≤ 0,1 µU/ml,
obtenue par la prescription de thyroxine (en moyenne: 2,5 µg/kg.j).
La surveillance du cancer traité repose sur la clinique et le dosage de la
thyroglobuline (TG), associé à la scintigraphie à l'iode 131. La clinique, aidée de
l'échographie cervicale, recherche les récidives locales et ganglionnaires.Le
dosage de la thyroglobuline doit montrer une valeur effondrée (TG < 1 µg/l) lors
du bilan pratiqué en défreination (TSH ≥ 30 µU/ml). Son élévation signe la
persistance de tissu thyroïdien sain ou métastatique.La scintigraphie à l'iode 131
ne doit plus normalement montrer de foyers fixants, après traitement.
Les principaux facteurs de mauvais pronostic du CTD sont: l'âge > 45 ans, la
taille de la tumeur, l'existence d'un franchissement capsulaire ou d'emboles
vasculaires, l'existence de métastases.
Le cancer médullaire de la thyroïde, de pronostic plus sombre, possède un
marqueur biologique: la thyrocalcitonine (TCT) et un marqueur génétique
permettant le diagnostic précoce des formes familiales, la mutation du gène ret. La
forme sporadique (80%) se présente comme un nodule associé à une élévation de
la TCT. La forme familiale, autosomique dominante peut s'intégrer dans le cadre
d'une néoplasie endocrinienne multiple (NEM).
1. Introduction
La glande thyroïde renferme quatre structures histologiques distinctes, pouvant
chacune donner naissance à des tumeurs: les vésicules thyroïdiennes ( cancers
papillaires et vésiculaires), les cellules C ou para folliculaires sécrétant la
Thyrocalcitonine (TCT) ( cancers médullaires), une trame conjonctivo-vasculaire
( sarcomes, angioendothéliomes) et des infiltrats de cellules lymphocytaires (
lymphomes).
Les épithéliomas thyroïdiens différenciés représentent 80 % de l'ensemble des
cancers thyroïdiens et ont un pronostic relativement favorable (S5ans > 85%).
Ils sont caractérisés par deux particularités originales: (i) leur capacité de capter
l'iode, qui administré sous forme d'un isotope radioactif (131I) permet la
localisation et l'irradiation spécifique des cellules cancéreuses et (ii) la sécrétion de
Thyroglobuline (TG), qui facilite la surveillance de l'évolution et le diagnostic
précoce d'éventuelles métastases.
2. Epidémiologie
Le cancer thyroïdien garde une incidence stable et basse voisine pour les formes
symptomatiques de 1 à 3 / 100 000 chez l'homme et 2 à 5 / 100 000 chez la
94
femme.
La mortalité globale est très faible, de l'ordre de 0,5 pour 100 mille, soit moins de
1% de l'ensemble des décès par cancer.
Facteurs de risques : Le principal facteur de risque est l'exposition à une irradiation
cervicale externe (teigne du cuir chevelu, angiomes de la face et du tronc,
hypertrophie thymique, autres radiothérapies) qui augmente le risque de
développement des nodules thyroïdiens et des cancers papillaires (90%). Des doses
délivrées aussi basses que 7 cGy sont incriminées et il existe une relation dose-
effet pour les valeurs de dose plus élevées. Ces cancers se développent avec une
latence d'environ 10 années avec un pic de fréquence à 20-30 années post-
irradiation.
Les autres facteurs sont : le sexe (4 femmes / 1 homme), l'âge qui est de 50 ans
en moyenne au moment du diagnostic. Ce cancer est rare chez l'enfant de moins
de 17 ans, sauf en cas d'irradiation.
La prévalence du type de cancer varie avec l'apport iodé des populations. Dans les
pays à apports élevés (300 à 600 µg/j), comme les USA, la fréquence des cancers
vésiculaires et anaplasiques - formes de plus mauvais pronostic - diminue au profit
des variétés papillaires.
Il existe une prédisposition familiale au cancer thyroïdien augmentant les risque
relatif pour les apparentés au premier degré.
Des anomalies caryotypiques (chromosomes 10 & 17) et des activations
d'oncogènes: ras, gsp, trk et ret sont également décrites.
Enfin, les sujets atteints de polypose colique ou d'un syndrome de Gardner ont un
risque très accru (> x 100) de développer un cancer papillaire.
3. Anatomie pathologique
95
Tumeurs primitives épithéliales dérivant cancer médullaire de la thyroïde
des cellules C (CMT: 5%)
(sporadique ou familial, association aux NEM)
Tumeurs primitives sarcome, lymphomes, tératomes...
non épithéliales
Tumeurs secondaires (<1%) métastases
96
4. Diagnostic
4.2. Clinique
Palper le corps thyroïde à la recherche d'un nodule et en noter les
caractéristiques : siège, consistance, évolutivité, adhérence aux structures de
voisinage.
Palper les chaînes ganglionnaires cervicales et sus-claviculaires à la recherche
d'adénopathies. Le drainage lymphatique de la thyroïde se fait par les chaînes
spinales, cervicales transverses, jugulo-carotidiennes et récurrentielles.
Rechercher des signes d'extension: dyspnée, dysphagie, dysphonie, douleur, à
explorer par un examen ORL et stomatologique, une radiographie de thorax et
de trachée.
97
Tableau II : Anamnèse, signes et symptômes évoquant une lésion thyroïdienne
maligne
4.3. Stratégie
Elle est exposée au chapitre: "nodule thyroïdien" et repose sur la clinique,
l'échographie, la cytologie, la scintigraphie. Brièvement:
Le cancer est probable d'emblée ou l'indication opératoire inévitable:
gros nodules (> 35 mm), nodules gênants
il existe à l'anamnèse ou à l'examen clinique des signes et symptômes
évoquant une lésion maligne
l'échographie montre des signes suspects: lésion hypoéchogène mal limitée,
contenant des calcifications et/ou une vascularisation centrale au doppler.
La décision d'opérer étant prise, il faut faciliter le traitement et réaliser à ce
stade:
un dosage de Thyrocalcitonine, car la découverte d'un cancer médullaire
imposerait une thyroïdectomie totale avec évidemment ganglionnaire
une cytoponction (à titre "thérapeutique"), qui permettra de prévenir le
patient, le chirurgien et l'anatomo-pathologiste (10 - 15 % de FN lors de la
lecture des lames à l'examen extemporané)
une scintigraphie, en cas de TSH ≤ 0,5 µU/ml, de nodule sur goitre, de
goitre plongeant, d'âge > 45 ans, d'échographie non contributive et chaque
fois que l'état du parenchyme extra-nodulaire n'est pas normal, afin
d'indiquer des exérèses élargies (limiter le % de réintervention).
Le cancer n'est pas évident d'emblée (cf. Stratégie d'exploration des nodules).
En cas de clinique et d'échographie non suspectes d'emblée (> 95% des cas), la
prévalence du cancer est très basse, négligeable devant celle des NTA. On
applique la stratégie d'exploration des nodules. Le diagnostic repose la plupart
du temps sur la cytologie dirigée sur les zones pathologiques, inventoriées par
la clinique (kappa: 0,2), l'échographie (kappa: 0 à 0,6), la scintigraphie ( kappa
98
> 0.7).
L'indication opératoire est posée devant une cytologie cancéreuse, une cytologie
suspecte notamment en cas de gros volume ou de l'existence de critères de
suspicion, cliniques ou échographiques, une augmentation régulière de la taille
du nodule lors de la surveillance échographique. En cas de cytologie non
contributive, on réitère une fois le prélèvement et on finit par opérer s'il est à
nouveau non significatif.
5. Evolution
Le cancer papillaire a une croissance spontanée lente. Il donne souvent des
métastases ganglionnaires cervicales. Les métastases à distance sont pulmonaires,
rarement osseuses. Les métastases pulmonaires sont miliaires et micro-nodulaires
(9/10), plus rarement macro-nodulaires.
Le cancer vésiculaire est de moins bon pronostic. Ses métastases à distances
souvent osseuses sont révélatrices dans la moitié des cas. Elles sont
radiologiquement lytiques pures (sauf en cas de tassement vertébral) et sont
principalement localisées au bassin et au rachis. Les métastases pulmonaires sont
plus souvent macro-nodulaires. Tous patients confondus, les métastases
intéressent le poumon (50-70%), l'os (25-30%), plus rarement le cerveau.
6. Traitement
Effectué en milieu spécialisé il repose sur l'association séquentielle: chirurgie, iode
131 et freination hormonale par la LThyroxine. Le traitement est conditionné par les
facteurs pronostiques.
6.1.1. Chirurgie
La plupart des équipes préconisent la thyroïdectomie totale extra capsulaire, ou
sub-totale (lobo-isthmectomie extra-capsulaire du coté du nodule et sous-
capsulaire sur le lobe opposé), si les parathyroïdes ne sont pas bien repérées, avec
curage jugulo-carotidien, sus-claviculaire et récurrentiel homolatéral.
Cette attitude est la seule qui permette (i) d'enlever les éventuels foyers
controlatéraux d'un cancer multifocal (ii) de faire une destruction complémentaire
du parenchyme restant en post-opératoire par l'iode 131* (iii) d'optimiser la
surveillance scintigraphique et biologique (TG), (iv) de supprimer la surveillance du
lobe controlatéral qui sera fréquemment réopéré.
D'autres préfèrent se limiter à une lobo-isthmectomie uniquement dans les cas à
pronostic favorable: lésion de petite taille (<10 mm) et absence d'envahissement
de l'isthme, histologie bien différenciée, extension négative, âge jeune. Cette
99
attitude permet de limiter les complications de la chirurgie et ne modifierait pas le
pronostic évolutif des petites lésions opérées, mais impose une surveillance du tissu
thyroïdien laissé en place.
100
L'iode 131 est un isotope radioactif de l'iode 127 (stable) se désintégrant par
émission d'un rayonnement ß (90%, émission électronique) et d'un
rayonnement gamma (10%, émission électromagnétique). L'émission ß cause la
majeure partie de l'irradiation tandis que le rayonnement gamma permet la
détection externe par scintigraphie.
101
102
Tableau V : Contre-indications et complications du traitement par I131
La LT4 existe sous forme de LEVOTHYROX (25, 50, 75, 100 et 150 µg) et de
THYROXINE (cps à 100 µg, gouttes à 5 µg/goutte). La mise en oeuvre du
traitement hormonal, après la dose thérapeutique d'iode 131, doit se faire d'emblée
à posologie maximale chez l'adulte jeune, indemne de pathologie cardiaque. Dans
le cas contraire, il faut instaurer progressivement l'hormonothérapie.
6.2. Surveillance.
La surveillance doit être maintenue à vie, car il existe des rechutes très tardives,
d'autant mieux accessibles au traitement qu'elles sont dépistées tôt.
La surveillance repose sur la clinique, le dosage de la Thyroglobuline, et l'imagerie
scintigraphie à l'iode 131 ± échographie. Ces trois modalités sont complémentaires
et ne sauraient se substituer l'une à l'autre.
103
TSH ≤ 0,10 µU/ml
T4 libre normale haute (on peut accepter 120% de la norme sup., en
l'absence de signes cliniques)
T3 libre normale
Thyroglobuline < 0,1 µg/l.
dépister des rechutes ou une maladie persistante par le dosage de la
thyroglobuline (TG)
Ce dosage peut se faire alors que le patient reçoit l'hormonothérapie. Il est
alors moins sensible, car la synthèse de la TG dépend de la stimulation par la
TSH.
Pour sensibiliser le test, on peut faire le dosage lors d'une épreuve d'arrêt de
3 semaines, garantissant une TSH > 25 µU/ml, ou bientôt après
administration de rTSH, sous traitement par la lT4. Cette épreuve est
d'indication spécialisée.
Le résultat du dosage de la TG dépend de l'avancée de la maladie:
En présence de métastases viscérales, la TG est élevée en freination (TSH ≤
0,1 µU/ml) chez 90% des patients, et pratiquement chez 100% des patients
si la TG est dosée en stimulation (TSH > 25 µU/ml).
En présence de métastases ganglionnaires, la TG est élevée en freination
(TSH ≤ 0,1 µU/ml) chez 80% des patients et chez 90% des patients si la TG
est dosée en stimulation (TSH > 25 µU/ml).
En rémission complète ou en guérison, la TG est < 1 µg/l en freination (TSH
≤ 0,1 µU/ml). Elle peut être modérément élevée chez 10% des patients, si la
TG est dosée en stimulation (TSH > 25 µU/ml), notamment en présence de
reliquats cervicaux persistants.
La scintigraphie du corps entier à l'iode 131
C’est l'examen d'imagerie de référence. Elle doit être faite en stimulation par
la TSH (> 25 µU/ml), endogène, après arrêt du traitement par la thyroxine
(4 semaines), ou exogène, sous traitement par thyroxine (2 IM à 48 h de
rTSH).
Elle permet le diagnostic des récidives et des métastases fixantes (2/3), et le
contrôle de leur disparition après traitement par l'iode 131.
Les cancers thyroïdiens évolutifs, ne fixant plus l'iode 131, sont susceptibles
d'être visualisés par d'autres scintigraphies (111In-octréoscan, 18F-FDG).
L'imagerie non spécifique:
systématique:
radiographie de thorax (3 à 5 ans) à la recherche d'une miliaire, de
nodules
échographie cervicale: état de la loge thyroïdienne et adénopathies
sur signes d'appels:
Radiographies orientées du squelette
TDM ou IRM localisées,
Autres :scintigraphies (osseuse etc..).
La stratégie de surveillance intégrée est présentée figure2. Brièvement, les
récidives et les rechutes sont évoquées devant une élévation du taux
plasmatique de Thyroglobuline ou une imagerie positive.
104
Les récidives loco-régionales sont visualisées par la scintigraphie et doivent être
opérées, si possible, puis traitées par l'iode 131. La dose thérapeutique permet
également de sensibiliser la scintigraphie qui sera refaite 5 à 7 jours plus tard et
peut permettre de détecter des lésions inconnues.
Les métastases pulmonaires sont traitées par l'iode 131, jusqu'à disparition. Les
formes miliaires guérissent habituellement (95%) et le pronostic chute avec la
taille des nodules.
Les métastases osseuses doivent être opérées de première intention, puis
traitées par l'iode 131.
Les patients ayant une élévation de la TG à imagerie négative sont traités au
moins une fois par l'iode 131 (foyers microscopiques infra-scintigraphiques). La
scintigraphie au fluorodéoxy-glucose peut être utile si la scintigraphie ne fixe
plus l'iode 131.
Traitement des rechutes non opérables & non fixantes : Radiothérapie et
chimiothérapie sont les seuls recours quand l'exérèse du cancer thyroïdien
(primaire, récidive ou métastase) est impossible ou incomplète et qu'il ne fixe
pas l'iode. On propose 50 Gy en 5 semaines avec surdosage local de 5 Gy au
niveau du cou, et 30 Gy en 10 séances au niveau des os. La chimiothérapie est
décevante.
stade pTNM âge < 45ans âge > 45 ans récidive / décès*
stade I M<O T1 ≤ 10 mm 15% / < 2%
stade II M >0 T2 (10 < taille < 40 mm), ou 22% / 15 %
T3 (taille ≥ 40 mm)
stade III - T4 (extra capsulaire), ou 45% / 30%
N >0
105
stade IV - M>0 65% / > 60%
* d'après Loh KC, J Clin Endocrinol Metab, 1997:82(11):3553-3562
En l'absence de métastase à distance lors du diagnostic initial, et après traitement
radical, la survie globale est de 80 % à 10 ans, 60 % à 20 ans, 50 % à 30 ans. En
présence de métastase initiale, le pronostic est plus sombre: 50 % à 5 ans, 40 % à
10 ans. La présence d'adénopathies cervicales métastatiques ne semble pas
affecter pas le pronostic du cancer papillaire à 20 ans, mais favorise les rechutes
cervicales et les métastases pulmonaires.
La classification pTNM reste la plus employée et résume bien l'importance de l'âge
et de la taille tumorale. Avant 45 ans, il n'est pas possible d'avoir un stade > 2.
Fig. 2 : Surveillance au long cours d'un Patient Traité Par Iode 131
106
Légende : Principes de la surveillance d'un patient opéré et traité par l'iode 131.
Si le bilan est < 0 à 6 mois (clinique et échographie cervicale normales +
scintigraphie 131I normale + TG < 1 ng/ml), il suffit de surveiller la qualité du
traitement par lT4 (TSH ≤ 0.1 µU/ml) 2 fois/an, le dosage de TG (< 1 ng/ml), 1
fois/an. En fonction des facteurs pronostiques, tous les 3 à 5 ans, on proposera un
dosage de TG après administration de TSH recombinante (ou après sevrage en
LT4).
En présence de métastases, le traitement dépend de leur nature: chirurgie
première pour l'os , le poumon, les ganglions gros ou multiples puis 131I. Dans les
autres cas on traite d'emblée par 131I.
Si la TG est élevée de base ou sous stimulation par la TSH, on traite par 131I avec
scintigraphie sur dose thérapeutique.
107
Fig.3 : Séquence isotopique habituelle
108
Fig. 4 : métastases pulmonaires (131I) et osseuse (flèche)
109
La présence d'un contingent anaplasique dans un cancer différencié doit faire
considérer la tumeur comme anaplasique. Les cellules anaplasiques ne fixent pas
l'iode 131. Le marquage immuno-histochimique est parfois positif pour la TG (0 à
50 % de marquage), ou pour la kératine (40%).
La recherche d'oncogènes retrouve l'activation de ras, comme dans l'adénome et le
cancer différencié, mais surtout des mutations du gène de la p53.
8.1.2. Diagnostic.
Il s'agit d'une tumeur thyroïdienne rapidement progressive ou de la modification
d'un goitre connu. Les signes de compression ou d'extension loco-régionale sont
fréquents de même que les adénopathies. Les métastases sont fréquentes d'emblée
(20%), surtout pulmonaires. Le goitre peut être douloureux.
La scintigraphie montre une zone froide ± limitée, une déviation trachéale.
L'échographie montre un ou des nodules hypoéchogènes mal limités, avec possible
effraction de capsule. La cytoponction fait le diagnostic.
8.1.3. Traitement.
Il associe chirurgie, de réduction ou d'exérèse, radiothérapie externe et
chimiothérapie.
Dans les cas favorables la chirurgie est réalisable d'emblée puis est associée à une
radiothérapie externe hyper fractionnée (30 à 60 Gy en 40 jours), et une
chimiothérapie reposant sur la doxorubicine ou l'association bléomycine,
cyclophosphamide, 5FU. Parfois l'association première [radiothérapie +
chimiothérapie], permet une chirurgie seconde plus efficace. Le traitement du
cancer cervical prime pour éviter l'extension locale, source de décès par
suffocation. Le traitement des métastases est décevant.
La médiane de survie est de 1 an mais des réponses complètes et durables (2 ans)
peuvent s'observer chez des patients opérés et à faible masse tumorale résiduelle.
8.2.1. Généralités
La thyroïde peut être le siège de lymphomes primitifs essentiellement non
hodgkiniens (LNH) de type B. Ces LNH représentent moins de 5% des lymphomes
malins et environ 2% des cancers thyroïdiens. Les LNH thyroïdiens sont localisés au
corps thyroïde et à la région cervicale et sont à distinguer des localisations
thyroïdiennes de LNH systémiques.
Les LNH thyroïdiens sont associés à des lésions de thyroïdite auto-immune dans
25% des cas; cependant, les thyroïdites chroniques auto-immunes n'évoluent que
rarement vers un LNH thyroïdien (<1% ?).
110
Tableau VII : Classification schématique des lymphomes thyroïdiens
Lymphome thyroïdien
LNH thyroïdien de faible malignité lymphomes folliculaires à petites cellules,
mixtes et à grandes cellules
LNH thyroïdien de malignité intermédiaire lymphome diffus à grandes cellules
LNH thyroïdien de haute malignité lymphome diffus à grandes cellules,
immunoblastique
lymphome du MALT
8.2.3. Diagnostic
Les LNH thyroïdiens surviennent en général après 60 ans ou chez l'adulte jeune,
avec une prédominance féminine (3 à 7/1). Ils se manifestent par une
augmentation importante et parfois douloureuse du volume thyroïdien, en quelques
mois, diffuse ou pseudo-nodulaire, responsable de signes compressifs. Les
adénopathies cervicales sont présentes dans 20% des cas.
La scintigraphie montre des plages très hétérogènes voire afixantes, souvent de
grande taille et alors responsables d'une hypothyroïdie par infiltration-destruction,
ou plus précocement un ou des nodules froids. L'échographie montre des plages
très hypoéchogènes, mal limitées. Les anticorps antithyroïdiens sont positifs une
fois sur deux. La cytoponction fait le diagnostic dans 75% des cas. L'immuno-
histochimie anti-antigène commun leucocytaire (LCA) est souvent positive.
8.2.4. Traitement
Les formes intra-thyroïdiennes sont de bon pronostic (80% à 5 ans), quel que soit
le type histologique. En cas d'extension (extra-capsulaire, ganglionnaire ou à
distance), la survie est d'autant meilleure que le grade est bas (la malignité est
faible): Survie à 5 ans: Haut Grade (15%), Grade Intermédiaire (75%), Bas Grade
(>90%).
8.2.4.1.Formes localisées:
thyroïdectomie totale ± radiothérapie complémentaire (40 Gy).
8.2.4.2.Formes diffusées:
LNH de haut grade: thyroïdectomie, puis polychimiothérapie, 3 cures de CHEP
(cyclophosphamide, eldisine, prednisolone ± adriamycine), puis radiothérapie.
LNH de bas grade: thyroïdectomie, puis radiothérapie, puis chimiothérapie
LNH de type MALT: thyroïdectomie, chimiothérapie.
111
(NEM pour néoplasies endocriniennes multiples). Sa fréquence, bien que sous-
estimée, reste basse: 5 à 10% des cancers thyroïdiens.
8.3.2. Diagnostic
8.3.2.1.Clinique.
La forme sporadique
Atteint plus souvent la femme, vers la cinquantaine. Elle ne sera affirmée que si
l'enquête familiale reste négative et que si l'histologie ne montre qu'une tumeur
unilatérale, sans hyperplasie des cellules C.
Les formes familiales (il existe un autre cas index familial)
Doivent être dépistées avant 15 ans. L'identification de mutations germinales du
gène ret, présentes dans les NEM et le CMT familial, a transformé la recherche des
cas familiaux. Les mutations sont présentes dans près de 90% des CMT familiaux
et >95% des NEM2A. Elles sont autosomiques dominantes à forte pénétrance.
112
coliques néphrétiques, asthénie, myalgies etc...
On distingue les NEM 2a (90%) réalisant le syndrome de Sipple (CMT +
phéochromocytome + hyperparathyroïdie) et les NEM 2b (CMT +
phéochromocytome + ganglioneuromatose et habitus évoquant le syndrome de
Marfan).
Dans les NEM2a, le phéochromocytome est souvent bilatéral, parfois ectopique,
rarement malin; il peut être totalement asymptomatique et succède souvent à la
découverte du CMT.
Dans les formes 2b rares, il existe une hyperplasie non fonctionnelle des plexus
nerveux, pouvant occasionner un syndrome occlusif chez l'enfant (pseudo-
Hirschprung). Chez l'adulte, il participe au syndrome de Gorlin, qui associe le
phéochromocytome à un syndrome dysmorphique: grosses lèvres, éversement des
paupières, morphologie rappelant le syndrome de Marfan - aspect allongé des
membres, amyotrophie - des neuromes multiples bien visibles sur les lèvres, la
langue et les paupières et une neuromatose oculaire se manifestant par un
épaississement des fibres cornéennes, visible à la lampe à fente.
8.3.2.3.Diagnostic biologique
TCT :
Le dosage de la TCT est toujours élevé en cas de CMT clinique. Le taux basal
normal est toujours <10 pg/ml. Les FN de l'élévation de la TCT sont l'insuffisance
rénale, la thyroïdite chronique et d'autres cancers TCT sécrétants.
Test à la pentagastrine.
La réponse à la pentagastrine montre un pic < 30 ng/ml, à l'état normal. Un pic >
100 est très évocateur de CMT.
Dans le cadre d'une enquête familiale, un pic > 50 est évocateur. Chaque fois que
les test est > 30 pg/ml, il faut opérer si une mutation ret est mise en évidence.
Le dosage de l'antigène carcino embryonnaire :
A une valeur essentiellement pronostique et est utilisé dans la surveillance.
8.3.2.4.Bilan d'extension
du CMT :
Radio de thorax,
113
Echographie cervicale (adénopathies)
TDM pré chirurgical.
D'une Néoplasie Endocrinienne Multiple (NEM) :
Phéochromocytome (la recherche du phéochromocytome est obligatoire
avant la chirurgie du CMT, car il existe un risque anesthésique) : HTA,
échographie surrénalienne, dosage des métanéphrines urinaires. Le bilan des
formes familiales et associées aux NEM bénéficie d'une scintigraphie à la
mIBG-123I (métaiodo-benzylguanidine).
hyperparathyroïdie: calcémie, phosphorémie, PTH, calciurie des 24 h.
Enquête familiale et conséquence thérapeutique Elle s'impose à chaque nouveau
diagnostic affirmé (anatomopathologie). Elle comporte :
une fiche où figure l'état civil du patient, qui sera gardée de façon anonyme
après attribution d'un N° de cas et de famille par le GETC (inscrire le patient
au fichier national des CMT, ou contacter le Groupe d'Études des Tumeurs à
Calcitonine)
une enquête proprement dite, incluant:
la recherche de signes compatibles avec une NEM dans la famille
un arbre généalogique
pour tous les apparentés du 1 degré: un examen clinique, un dosage des
métanéphrines si le sujet appartient à une famille NEM identifiée, un
examen à la lampe à fente.
Surtout, il convient de rechercher une mutation de ret dans l'ADN
lymphocytaire.
Si une mutation germinale (ret + dans les lymphocytes) est retrouvée, il
faut procéder à une thyroïdectomie totale avec curage ganglionnaire qui
guérira d'emblée la maladie. En cas de refus chirurgical, on peut accepter
un suivi initial tant que le test PG demeure < 0 ( pic < 30 pg/ml). Au delà
il est impératif d'opérer.
Si la mutation n'est pas retrouvée, la chance de développer un CMT est
celle des cas sporadiques.
8.3.3. Traitement
8.3.3.1.Phase précoce :.
Le traitement du CMT repose sur la thyroïdectomie totale, par un chirurgien très
entraîné, avec curage extensif cervical (cellulolymphadénectomie) du compartiment
central et prétrachéal, des ganglions jugulo-carotidiens moyens bilatéraux, des
ganglions cervicaux latéraux bilatéralement (sauf si cas sporadique et tumeur < 20
mm et autres GGL <0 en extemporané). Le curage médiastinal peut être indiqué
d'emblée ou secondairement si la TCT reste élevée..
Si le diagnostic est suspecté en per-opératoire (extemporané d'un nodule, d'un
ganglion), il faut prélever TCT et ACE, qui se normalisent respectivement en 24
heures et 2 mois après exérèse.
Si la chirurgie est impossible d'emblée, on peut tenter une radiothérapie première
de réduction.
114
Confirmée par un test à la pentagastrine négatif à 2 mois (on ne fait pas le test si
la TCT est élevée de base).
Faire à un an puis tous les deux ans: examen clinique, thorax, TCT de base ou test
Pg et dosage de l'ACE (± recherche des associations dans le cadre des NEM).
L'exérèse est insuffisante
Soit il persiste des adénopathies, du tissu néoplasique accessible à la chirurgie: il
faut réopérer et réévaluer la situation en dosant la TCT. L'exérèse peut être
impossible localement: il faut alors irradier, 50 à 60 Gy maximum en surdosage
local.L'élévation de la TCT signe une reprise évolutive qu'il faut localiser et traiter.
La localisation peut être aidée par des scintigraphies à la mIBG-123I, à la
somatostatine-111In (octréoscan) ou par immunoscintigraphie anti-ACE. Le
traitement des métastases fait appel à la chirurgie, la radiothérapie et parfois la
chimiothérapie.
8.3.3.3.Pronostic.
Il est globalement de 60% à 10 ans et de 40% à 20 ans. En présence de plusieurs
facteurs de mauvais PC, la survie est de 10 à 25%, à 10 ans.
Les facteurs de mauvais pronostic sont:
âge > 45 ans
tumeur > 40 mm
sexe masculin
adénopathies palpables et métastases
invasion vasculaire
chirurgie incomplète attestée par un taux de TCT élevé après l'intervention
(ou d'ACE).
8.4.1.NEM IIa.
Dans la NEM IIa, qui a une transmission autosomique dominante, le CMT est le
signe le plus souvent révélateur, suivi des signes du phéochromocytome;
l'hyperparathyroïdie est tardive. La NEM2a est liée à une mutation du gène ret
permettant une identification des sujets à risque par analyse de l'ADN
lymphocytaire. Le cancer ne se manifeste qu' exceptionnellement dans la petite
enfance.
Le phéochromocytome est d'installation progressive, succédant à une hyperplasie
115
et habituellement bénin. La recherche d'un phéochromocytome [ dosage des
catécholamines et de dérivés urinaires méthoxylés], doit être systématique avant la
chirurgie de tout CMT, en raison du risque anesthésique. En cas de
phéochromocytome sécrétant, il faut réaliser une scintigraphie à la mIBG, une IRM
des surrénales.
L'hyperparathyroïdie survient en général tardivement et correspond souvent à une
hyperplasie. Son diagnostic repose sur le dosage couplé calcium ionisé + dosage de
la parathormone (PTH 1-84).
Les sujets porteurs de la mutation ret doivent bénéficier d'une thyroïdectomie
prophylactique. Celle ci s'impose chaque fois que le test à la pentagastrine montre
une stimulation > 30 pg/ml.
8.4.2.NEMIIb.
Caractérisé en pratique par l'absence d'hyperparathyroïdie, elle est de pronostic
plus réservé car le CMT est d'apparition précoce. Le phéochromocytome est
souvent bilatéral. Cliniquement il existe un syndrome dysmorphique avec
notamment des neuromes au niveau des lèvres et de la langue et une atteinte des
plexus nerveux réalisant un syndrome analogue à la maladie de Hirshprung (sub-
occlusion).
Le traitement est la thyroïdectomie totale prophylactique dès le diagnostic, quel que
soit l'âge. Le phéochromocytome doit être recherché avant la chirurgie puis tous les
ans, car il a une survenue habituelle plus tardive.
116
NEM type IIa Cancer médullaire de la thyroïde 100%
Hyperparathyroïdie 50%
(syndrome de Sipple) Phéochromocytome 50%
NEM type IIb Cancer médullaire de la thyroïde 90%
Neuromes muqueux multiples 100%
Phéochromocytome 45%
Syndrome dysmorphique : hyper- trophie >65%
des nerfs cornéens, pseudo Marfan...
117
[ 5 à 25 ng/l].
A. TSH : 0.01 µU/ml, FT4 : 25 pM/l, TG : 0,1 ng/l
B. TSH : 0.5 µU/ml, FT3 : 8 picomoles/l, TG: 6 ng/l
C. TSH : 0.05 µU/ml, FT4 : 20 picomoles/l, TG: 22 ng/l
D. TSH : 10 µU/ml, FT4 : 8 picomoles/l, FT3 : 4 picomoles/l, TG : 46 ng/l
E. TSH : 0,5 µU/ml, FT4 : 17 picomoles/l, TG : 0,1 ng/l
5. Dans le bilan de surveillance d'un patient opéré d'un épithélioma thyroïdien
différencié de souche vésiculaire et traité par l'iode 131, quels éléments sont
évocateurs d'une rechute ou d'une récidive ?
A. L'apparition d'une adénopathie jugulo-carotidienne
B. Une lésion ostéocondensante de la voûte crânienne
C. Une élévation régulière de la Thyroglobuline
D. L'apparition d'une hypoparathyroïdie
E. Une fixation pulmonaire diffuse constatée à l'occasion d'une scintigraphie
à l'iode 131
6. Parmi les éléments suivants, lesquels doivent faire rechercher un cancer
médullaire de la thyroïde?
A. Un taux élevé de Thyrocalcitonine
B. Une histoire de diarrhée motrice chez un patient ayant un nodule
thyroïdien
C. Un antécédent personnel de phéochromocytome
D. Un taux élevé de Thyroglobuline
E. Un antécédent familial de cancer médullaire de la thyroïde
118
HYPERCORTISOLISME (n° 341)
Anne-Claire Bouthillier-Voisin
Service d'Endocrinologie - Diabétologie - Médecine Interne
Hôpital Boucicaut
119
Abréviations
Composé F:cortisol
ACTH:hormone adrénocorticotrope
CRH:corticoliberine (corticotropin releasing hormone)
HTA:hypertension artérielle
FLU: cortisol libre urinaire
DXM:dexaméthasone
IRMA:"immunoradiometric assay"
Composé S:II désoxycortisol
CS:corticostérone
LVP:lysine vasopressine
Points importants
C’est une hypersécrétion non freinable de cortisol, ACTH dépendante ou
indépendante.
La cause la plus fréquente : maladie de Cushing (adénome à ACTH).
La hantise : le corticosurrénalome.
Affirmer le diagnostic de syndrome de Cushing nécessite la perte du cycle
nycthéméral du cortisol, le dosage du cortisol libre urinaire (augmenté), un test
de freinage faible à la DXM négatif.
Le dosage de l’ACTH, les tests dynamiques (freinage fort à la DXM et test à la
métopirone) et l’imagerie permettent de diagnostiquer les trois grandes
étiologies : adénome à ACTH, tumeur surrénalienne et sécrétion ectopique
d’ACTH.
La localisation de la sécrétion ectopique est souvent difficile.
Le traitement dépend de l’étiologie : adénomectomie transphénoïdale pour la
maladie de Cushing, surrénalectomie unilatérale en cas de tumeur et éxérèse de
la tumeur sécrétant l’ACTH en cas de sécrétion ectopique.
La surveillance doit être à vie.
1. Physiopathologie
Les symptômes s'expliquent par les activités métaboliques multiples du cortisol
1.1. Sur les glucides :
l’action anabolique glucidique du cortisol est dominante expliquant le nom de
glucocorticoïdes.
Néoglucogénèse accrue :
Le cortisol augmente la production hépatique de glucose à partir des acides aminés
120
périphériques (provenant des muscles essentiellement.
Glycogénogénèse augmentée :
Le cortisol augmente les réserves hépatiques en glycogène.
Insulino-résistance induite :
Le cortisol diminue la captation musculaire et adipeuse du glucose et induit un état
d’insulino-résistance probablement par des mécanismes post-récepteurs. Le cortisol
a donc par tous ces effets une action hyperglycémiante.
121
2. Etiologie
122
2.3. Pseudo-syndrome de Cushing
Pose un problème de diagnostic différentiel. Ce sont :
les dépressions sévères (80% ont une anomalie de la sécrétion du cortisol)
l'alcoolisme chronique.
Le mécanisme impliqué n'est pas clair mais l'ensemble régresse avec le sevrage. Un
test discriminatif futur pourrait être le freinage faible associé à une injection de CRH
(1µg/Kg) avec une fiabilité proche de 100% (Cushing vrai F > 38nmol/l 15' post
CRH).
Le tableau I récapitule les étiologies des élévations du cortisol non dues à un
syndrome de Cushing.
3. Diagnostic clinique
L’hypercortisolisme chronique est une maladie catabolique touchant pratiquement
tous les organes, mortelle sans traitement en quelques années. Le début est
généralement insidieux sauf dans les formes malignes.
A la phase d’état, le tableau clinique associe :
123
3.5. Troubles psychiques :
Présents dans la moitié des cas avec insomnie précoce, dépression ou au contraire
accès maniaque et délirant.
3.8. Rechercher :
une mélanodermie témoin d'une forte élévation de l'ACTH, en faveur d'une
sécrétion ectopique
des signes tumoraux hypophysaires
des symptômes d'hyperaldostéronisme avec HTA, oedèmes, hypokaliémie,
peuvent s'observer en cas d'hypersécrétion de minéralocorticoïdes (cortico-
surrénalome) ou dans les sécrétions majeures de cortisol avec un effet
minéralo-corticoïde.
une prédominance d'hyperandrogénie évoque un corticosurrénalome
Hypertriglycéridémie
4. Diagnostic de certitude
Schématiquement on doit confirmer l’hypercortisolisme non freinable puis en
rechercher l’étiologie. L’imagerie performante actuelle a dans ce domaine beaucoup
modifié la stratégie diagnostique et la place des différents dosages dynamiques
(freinage fort, métopirone, CRH). En effet, la découverte d’une tumeur
surrénalienne ou hypophysaire dans un contexte d’hypercortisolisme confirmé
évoque très fortement l’origine du syndrome.
124
cycle nycthéméral. Celui-ci peut être réalisé en mesurant la cortisolémie à 8H00,
12H00, 16H00, 20H00, 24H00. Valeurs normales à 8H00 = 100 à 200ng/ml,
grande valeur diagnostique du cortisol à 16H00 supérieur à 100ng/ml.
On peut mesurer également le cortisol salivaire dont le taux est inférieur à 30% du
cortisol plasmatique (valeur dans les hypercorticismes intermittents).
freinage minute à la dexaméthasone (DXM).
Administrer à minuit 1mg de dexaméthasone et doser le cortisol à 8H00.
Normalement, il est inférieur à 50ng/ml. Un freinage minute négatif doit être
confirmé par un freinage standard.
Freinage standard.
0,5mg de dexaméthasone toutes les 6H00 pendant deux jours : le freinage est
positif quand le FLU est inférieur à 10µg/jour. Négatif, il affirme le syndrome de
Cushing.
Attention aux dépressions sévères qui peuvent s'accompagner d'un freinage faible
négatif.
125
dans les sécrétions ectopiques. Malheureusement, il existe beaucoup de
chevauchement dans les valeurs d'ACTH entre ces deux groupes.
Prélèvements veineux dans les sinus pétreux inférieurs :
Réservée à des cas difficiles de localisation de la sécrétion d'ACTH. Ce test se
discute quand l'imagerie hypophysaire est normale et/ou que la biologie ne permet
pas de différencie la maladie
Figure3
5. Principes du Traitement
126
La préparation médicale par OP’DDD est souvent nécessaire.
Le taux de guérison est d'environ 80% si le microadénome a été visualisé, mais
seulement 58% dans la chirurgie à l'aveugle. Des rechutes à moyen terme sont
possibles.
Une hormonothérapie substitutive est nécessaire jusqu'à reprise du fonctionnement
normal de l'axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (6 à 12 mois).
Pour les macroadénomes, le taux de succès ne serait que de 50 à 70%.
5.2.1. Adénome :
Traitement par surrénalectomie unilatérale, parfois précédée d'un traitement par les
anticortisoliques de synthèse.
En postopératoire, traitement substitutif nécessaire avec évaluation de la fonction
127
hypophyso-surrénalienne avant l'arrêt du traitement.
5.2.2. Corticosurrénalome :
L'exérèse sera la plus large possible.
L'OP'DDD est indiqué en cas d'exérèse incomplète ou de métastases : il agit par
son action anticortisolique et anti tumorale (certains le prescrivent
systématiquement pendant 12 à 24 mois en cas de tumeur volumineuse ou à
sécrétion mixte).
Des polychimiothérapies sont à l'étude, les dérivés du cisplatine semblent
prometteurs en association au VP16.
Seules 35% des tumeurs répondent et il n’est pas certain que le pronostic soit
amélioré par l'OP'DDD.
6.Conclusion
Surveillance à vie de ces patients, régulièrement, à cause des risques de récidive
surtout en cas de maladie de Cushing (25% 10 ans après la guérison).
Les facteurs prédictifs de rechute seraient : âge initial < 25 ans, sevérité initiale
clinique et ACTH > 20 pg/ml 1-2 mois après l'intervention.
Mais surveillance également à cause des risques d'insuffisance surrénalienne aiguë
à l'occasion d'un stress.
La Figure 4 page suivante, récapitule l’arbre décisionnel devant une suspicion de
syndrome de Cushing.
Références bibliographiques
Treatment, and retreatment, of Cushing’s disease R.D. Utiger. NEJM. 1997, 336,
215-217
La maladie de Cushing - Un défi de taille. A. Lacroix. La Presse Médicale. 1997, 26,
4-6.
Le Livre de l’interne en Endocrinologie. J. Lubetzki. Flammarion, Paris
IRM dans la maladie de Cushing - prédiction des résultats opératoires. Z.Barrou et
al. La Presse Médicale, 1997, 26, 7-11.
The long term out-come of pituitary irradiation after unsuccessful transsphénoïdal
surgery in Cushing’s disease. J. Estrada et al. NEJM. 1997, 336, 172-177
Figure 4
128
Questions à choix multiples
1 - Les syndromes de Cushing avec hyperplasie bilatérale des surrénales sont :
A - Les cancers surrénaliens.
B - Les Cushing paranéoplasiques.
C - Les adénomes à ACTH.
D - Les adénomes surrénaliens.
E - Les syndromes de Cushing secondaires à un traitement prolongé par les
corticoïdes.
2 - Dans le syndrome de Cushing par adénome surrénalien on note :
A - Cortisol bas et ACTH élevée.
B - Cortisol bas et ACTH basse.
C - cortisol libre urinaire élevé.
D - Un test de freination à la DXM négatif.
E - Un cortisol élevé avec ACTH basse.
3 - Dans la maladie de Cushing :
A - Une HTA modérée est habituelle.
B - Une note d’hypertrichose est fréquente.
C - Le cortisol élevé à 8 H suffit à affirmer le diagnostic.
D - La métopirone est en général impavide.
E - Le traitement est toujours médical.
129
HYPERTENSION ARTERIELLE D’ORIGINE
ENDOCRINIENNE DE L'ADULTE (n° 123)
Anne-Claire Bouthillier-Voisin
Service d'Endocrinologie - Diabétologie - Médecine Interne
Hôpital Boucicaut
Abréviations
HTA : hypertension artérielle
ACTH : adrénocorticotropic hormone
CS : corticostérone (composé B)
DOC : desoxycorticosterone
IEC : inhibiteur de l’enzyme de conversion
IRM : imagerie par résonance magnétique nucléaire
DXM : dexaméthasone
KT : cathétérisme
130
HPLC : chromatographie liquide haute performance
IMAO : inhibiteurs de la mono-amine-oxydase
Points importants
HTA et hypokaliémie doit évoquer un hyperaldostéronisme primaire ou
syndrome de Conn.
Le dosage de l'aldostérone (haute) et de la rénine (basse) confirme le diagnostic.
Principale étiologie : adénome de Conn dont le diagnostic différentiel
avecl'hyperplasie est difficile si l'imagerie est normale.
En Première intention : scanner surrénalien.
Traitement : médical de l'hyperplasie bilatérale des surrénales (anti-aldostérone) et
chirurgical de l'adénome de Conn.
Le diagnostic clinique de Phéochromocytome est difficile et doit être évoqué
devant certaines manifestations (triade) associées à une HTA sévère et
parOxystique.
Le diagnostic biologique repose sur le dosage des métanéphrines urinaires.
au carcinome médullaire de la thyroïde (NEM II).
Traitement chirurgical, après préparation Localisation par le scanner surrénalien
et/ou la scintigraphie à la MIBG.
Connaître l'association médicale, par une équipe anesthésique et chirurgicale
entraînée.
131
1.2. Diagnostic clinique
Il se pose devant toute hypertension artérielle associée à une hypokaliémie (avec
kaliurèse inadaptée c’est à dire conservée ; 88 % des cas d'hyper-aldostéronisme
primaire s'accompagnent d'hypokaliémie) :.
L'HTA est constante, en générale modérée.
La kaliémie est inférieure à 3,6 mmol/l avec une kaliurèse supérieure à 25 mmol/24
h.
Il existe une hypomagnésémie.
Une hypokaliémie profonde et symptomatique se rencontre souvent en cas de
traitement par un diurétique (faiblesse musculaire, crampes, accès
tétaniformes, polyuro-polydipsie, nycturie, voire troubles du rythme cardiaque).
Fig. 1
Fig. 2
Le dosage de la kaliémie doit être correctement effectué, en arrêtant les
médicaments pouvant la modifier (diurétiques, IEC, qui seront arrêtés au moins 15
jours avant, ainsi que la spironolactone qui devra être arrêtée 6 semaines avant le
dosage). Les seuls antihypertenseurs autorisés sont les inhibiteurs calciques.
Enfin, le régime doit être normosodé avec une natriurèse supérieure à 100
mmol/jour (dans 20 % des cas l'hypokaliémie est révélée par un apport sodé).
Dans ces conditions, l'association HTA, hypokaliémie et kaliurèse supérieure à 30
mmol/jour est fortement suspecte.
1.3.Diagnostic de certitude
Les dosages d'aldostérone et de rénine doivent être effectués à distance de la prise
de tout traitement anti-hypertenseur (1 mois d'arrêt pour les diurétiques, 2
semaines pour les IEC, 6 semaines pour les spironolactones).
Le régime devra être normosodé et l'hypokaliémie aura été compensée (celle-ci
freine l'aldostérone).
Il existe alors une hyperaldostéronémie, le matin à jeûn, en position couchée
(normale : 30 - 140 pg/ml), associée à une rénine active plasmatique abaissée
(dosage radio-immunologique direct, normale : 10 - 25 pg/ml couché ; 50 pg/ml
debout).
L'aldostérone > 150 pg/ml et la rénine < 10 pg/ml affirment le diagnostic.
L'orthostatisme ne stimule pas ou peu la rénine active.
On peut également doser la tétra-hydroaldostérone urinaire et l'aldostéronurie libre
(hydrolysable à pH1) qui sont retrouvées également augmentées.
132
générale normale.
L'IRM :
N'est pas supérieure au scanner dans cette indication et dans 80 % des cas, la
tomodensitométrie localise l'adénome de Conn.
Attention : coïncidence hyperaldostéronisme primaire et incidentalome surrénalien.
Les tests dynamiques sont proposés en seconde intention.
L'épreuve de charge en sel :
(2l de sérum physiologique en 4H00) est contre-indiquée chez l'insuffisant
cardiaque et en cas d'HTA sévère.
En cas d'hyperplasie, on observe une diminution de la sécrétion d'aldostérone, mais
dans les adénomes de Conn, il n'y a pas de freinage de l'aldostérone.
Le test au Captopril :
Un inhibiteur de l’enzyme de conversion, au cours duquel en théorie, l'hyper-
aldostéronisme persiste dans l'adénome de Conn, à la différence de l'hyperplasie.
Le dosage de la 18-hydroxycorticostérone :
Ce précurseur secrété seulement par la zone glomérulée, serait très élevée chez un
patient porteur d'un adénome et moins (inférieur à 100 µg/dl) en cas d'hyperplasie.
Le dosage de l'aldostérone en orthostatisme prolongé :
Pendant 4H00 avec déambulation, au cours duquel en théorie, l'aldostérone
diminue dans l'adénome de Conn du fait du rythme circadien parallèle à celui de
l’AC
TH et augmente ou reste stable dans l'hyperplasie.
L'ensemble de ces tests (récapitulé dans le Tableau 1) montre bien la difficulté
diagnostique souvent rencontrée dans les hyperaldostéronismes.
ADENOME HYPERPLASIE
Charge en sel pas de freinage aldo ¬
Test au captopril pas de freinage aldo ¬
18 OH CS > 100 µg/dl < 100 µg/dl
Adlostérone debout prolongé aldo ¬ aldo ou stable
133
une seule surrénale (adénome de Conn), il existe un gradient de concentrations et
le rapport aldostérone/cortisol est >5 du côté de l’adénome.
Cet examen est le seul qui permette le diagnostic lorsque l'imagerie est normale et
les tests biologiques discordants (fiabilité diagnostique 95 %).
134
1.6. Traitement
2.1. Physiopathologie
Les phéochromocytomes sont des tumeurs rares, dérivées du neuro-ectoderme,
ayant une grande affinité pour les sels de chrome qui colorent ses cellules en noir.
Ces tumeurs sécrètent des catécholamines, adrénaline et noradrénaline (leur
synthèse est rappelée sur la Fig. 4 page suivante). Elles se développent dans 85 à
90% des cas au niveau de la médullo-surrénale, de façon parfois bilatérale (10 à
15% des cas), mais dans environ 10% des cas ils sont ectopiques et peuvent se
trouver entre le trou occipital et le canal inguinal.
Ils siègent alors surtout au niveau de l'abdomen (bifurcation aortique, organe de
Zuckerkandl, parois de la vessie) ou au niveau du cordon spermatique, beaucoup
plus rarement au niveau thoracique (médiastin) ou cervical (carotide, glomus).
Ils représentent 0,2-0,4 % des HTA.
La gravité de ces tumeurs tient au risque de mort subite par troubles du rythme
liés à un paroxysme sécrétoire, ou à celui de crises hypertensives majeures, plus
rarement du fait de leur malignité (10% des cas).
C'est dire l'importance de leur diagnostic précoce, d'autant qu'elles peuvent
bénéficier d'un traitement chirurgical curatif. Se pose également le problème de
leur diagnostic devant tout incidentalome, avant biopsie ou geste chirurgical.
Enfin, le phéochromocytome peut être isolé ou s'intégrer dans une
polyadénomatose de type néoplasie endocrinienne multiple (NEM de type II).
135
2.2. Manifestations cliniques
Cette crise paroxystique peut être provoquée par une émotion, une mobilisation
diaphragmatique, une prise médicamenteuse, une induction anesthésique.
Lors d'une telle poussée tensionnelle peut survenir un accident tel infarctus du
myocarde, troubles du rythme cardiaque, accident vasculaire cérébral, insuffisance
cardiaque, mort subite.
136
2.3.2. Dosage des catécholamines urinaires
Il faut savoir que les PHEOK extra-surrénaliens ne sécrètent que de la
noradrénaline plus ou moins dopamine alors que les PHEOK surrénaliens peuvent
également sécréter de l'adrénaline.
Le dosage du VMA ou acide vanyl mandélique est peu satisfaisant en raison du
nombre important de faux négatifs et faux positifs (25 % de FN et de 5 à 30 % de
FP).
Les dosages urinaires des dérivés méthoxylés des catécholamines sont les examens
les plus contributifs.
Il faut exiger le dosage des métanéphrines urinaires (somme de la métadrénaline et
normétadrénaline) par HPLC.
Des métanéphrines urinaires > 1,6 mg/j affirment le diagnostic.
Il est d'excellente sensibilité et spécificité (95 à 100 %) et permet d'éliminer
pratiquement toutes les interférences médicamenteuses (sauf les catécholamines
exogènes).
Le dosage doit se faire sur les urines de 24H00 et il est impératif d'interrompre les
médicaments anti-hypertenseurs (bêta bloqueurs, alpha bloqueurs,centraux et
IMAO) au moins 8 jours avant les dosages.
Enfin, il faut savoir répéter les dosages en cas de négativité et les répéter les jours
de crises.
Le dosage des catécholamines libres urinaires par HPLC présente les mêmes
avantages.
137
Il est utilisé de première intention. Il permet de localiser le PHEOK dans environ
90% des cas.
L'IRM :
Il donne les mêmes renseignements anatomiques que le scanner, tout en offrant
une bonne spéficité tissulaire. On observe en particulier en T2 un hypersignal très
évocateur, ce qui permet en cas de tumeur surrénalienne, de distinguer les PHEOK
des autres tumeurs.
L'IRM peut être par ailleurs effectuée chez la femme enceinte.
La scintigraphie à la MIBG (méta-iodo-benzyl-guanidyl) :
Elle est pratiquée en deuxième intention. Elle permet de localiser une tumeur de
toute petite taille et a surtout une excellente valeur dans les PHEOK ectopiques
(sensibilité 90 %, spécificité proche de 100 %).
Elle est systématique dans les formes familiales, dans les formes malignes à la
recherche de métastases, et pour certains, en cas d'incidentalome.
Exceptionnellement, on sera amené à effectuer un dosage étagé des
catécholamines au niveau de la veine cave inférieure à la recherche d'un gradient
de concentration.
2.6. Traitement
Il n'est que chirurgical, après préparation médicale utilisant alpha bloqueurs suivis
de bêta bloqueurs (lorsqu'une tachycardie apparaît) ou pour d'autres, les alpha
bêtabloqueurs (labetalol) voire les inhibiteurs calciques.
Il faudra également corriger l'hypovolémie (régime riche en sel, voire remplissage).
L'intervention bénéficiera d'une équipe chirurgicale et anesthésique appropriée du
fait des risques de poussées tensionnelles, de collapsus et de troubles du rythme
pendant l'intervention. Les acoups tensionnels peropératoires peuvent être
contrôlés par le nitroprussiate de soude, les alpha bloqueurs ou alpha
bêtabloqueurs.
La TA se normalise en 8 jours.
En cas de récidive (20%) des cas, qui sont le fait des PHEOK multiples ou malins, le
traitement peu bénéfier de doses thérapeutiques de MIBG.
138
Enfin, dans les formes malignes définies par une extension tumorale au tissu
adjacent ou par des métastases (cellules chromaffines dans un tissu où elles sont
normalement absentes), le traitement chirurgical (résection la plus large possible)
131
sera associé à une polychimiothérapie ou à la MIBG-I thérapeutique. L'alpha-
méthylparatyrosine peut être utilisée (inhibiteur de synthèse) mais a de nombreux
effets indésirables. Le PHEOK malin est dominé par sa lente évolution et l’existence
131
de rémissions significatives sous I -MIBG.
Une surveillance clinique et biologique attentive est nécessaire dans les années qui
suivent l'intervention.
Références bibliographiques
Traitement du phéochromocytome. R. MORNEX. Rev-Franç-Endocrinol-clin-1991,
32, 4-5. p 537-541.
Endocrine hypertension-J.C-MELBY-JCEM 1989-Vol 69-n°4- p 697-703.
Interêt de la scintigraphie dans les HTA d’origine surrénalienne- H. KOLESNIKOV-
GAUTHIER et COLL - Act-med-int-HTA - déc 96 - n°10 - p231-240
Phéochromocytoma : diagnosis, localization and management - E. BRAVO,
GIFFORD RW. NEJM-1984-311-p 1298-1303.
Le phéochromocytome : stratégie diagnostique. PF-PLOUIN et COLL - Rev-Franç-
Endocrinol-Clin - 1990 - 31 - p 367-369.
Difficultés diagnostiques dans l’hyper-aldostéronisme primaire. Interêt de l’imagerie
et de la biologie surrénalienne. A.TABARIN et COLL. Médecine Nucléaire. 1993. 17 :
224-233.
139
4. Le phéochromocytome :
A. Est une tumeur de la corticosurrénale.
B. Doit être évoqué devant la triade céphalées, hypertension, sueurs.
C. Se diagnostique par le dosage des catécholamines urinaires.
D. Peut être localisé par un scanner abdominal.
E. Le traitement est rarement chirurgical.
140
CLASSIFICATION PHYSIOPATHOLOGIQUE DES
DIABETES (n°330-331)
J. Timsit
Service d'Immunologie Clinique - Diabétologie - Médecine Interne, Hôpital Necker
141
glycémie à jeun ≥ 1,40 g/L (7,8 mM)
glycémie 2 h après ingestion de 75 g de glucose (HGPO) ≥ 2 g/L (11 mM)
Ces critères peuvent paraître arbitraires: ils étaient fondés sur des notions
épidémiologiques (distribution bimodale de la glycémie dans certaines populations à
forte prévalence de diabète) et pronostiques: augmentation du risque de
macroangiopathie chez les "intolérants au glucose", de macro- et de
microangiopathie chez les "diabétiques", risque d'évolution de l'intolérance au
glucose vers le diabète.
G à jeun G au temps 2 h
G < 1,1 g/L (6,1 mM) G < 1,4 g/L (7,8mM)
normal
anomalie de la tolérance Hyperglycémie modérée à "intolérance au glucose
142
au glucose jeun 1,4 ≤ G < 2 g/L
1,1 ≤ G < 1,26 g/L
diabète G ≥ 1,26 g/L (7 mM) G ≥ 2 g/L (11mm)
143
phosphatase) et anti-insuline. La physiopathologie du diabète autoimmun et ses
conséquences en terme de dépistage familial et de prévention de la maladie sont
détaillées dans le chapitre "Diabète insulino-dépendant de l'enfant" écrit par Jean-
Jacques Robert. Dans de rares cas (5 à 10%) la recherche des marqueurs
d'autoimmunité est négative et il a été proposé d'individualiser cette forme de
diabète sous le terme de "diabète de type 1 non autoimmun"... La physiopathologie
de cette forme de diabète n'est pas connue.
Contrairement à une idée reçue le diabète de type 1 n'est pas une affection
exclusivement pédiatrique: dans 50% des cas, le diagnostic est porté chez un sujet
de plus de 20 ans et le début clinique peut s'observer à tout âge (de quelques mois
à plus de 80 ans). Contrairement à une autre idée reçue, le diabète de type 1 n'a
pas toujours une présentation clinique brutale, par le classique "syndrome
cardinal": schématiquement, plus le début est tardif, plus l'évolution vers
l'insulinodépendance stricte est lente. Il est banal de retrouver une glycémie élevée
ou la notion d'une glycosurie un an auparavant chez un jeune adulte chez qui on
vient de porter le diagnostic de type 1 à l'occasion d'une décompensation
métabolique aigüe. De même 5 à 10% des patients initialement étiquetés "non
insulino-dépendants" ont en fait un diabète de type 1 lent ("slow type 1" des anglo-
saxons) authentifié par la présence d'anticorps anti-cellules d'îlots et évoluant en
un délai moyen de 5 ans vers l'insulinodépendance. Cela justifie à mon sens la
recherche systématique de marqueurs d'autoimmunité (test simple et peu coûteux)
chez tout nouveau diabétique. Cela évite des errances thérapeutiques chez un
patient dont l'insulinosécrétion s'épuise peu à peu et chez qui les "anti-diabétiques
oraux" sont de moins en moins efficaces...
144
semble discutable. La physiopathologie de ce diabète fait intervenir peut-être une
diminution de l'insulinosécrétion liée à la surcharge ferrique des îlots, mais surtout
l'insulinorésistance hépatique, particulièrement marquée lorsque l'hémochromatose
est compliquée d'une cirrhose. De façon plus générale, les hépatites aigües et la
cirrhose sont des situations dans lesquelles il existe une insulinorésistance qui
explique la fréquence du diabète (cf infra).
145
élévation du seuil glycémique à partir duquel la cellule ß sécrète de l'insuline,
donc d'une hyperglycémie chronique.
gène HNF 1 α, facteur de trancription dont les mutations sont associées, par des
mécanismes encore inconnus, à un défaut de production de l'insuline.
gène HNF 4 α, facteur impliqué dans la transcription du précédent...
gène HNF 1 ß, formant un complexe avec HNF 1 α...
gène IPF 1, facteur de transcription impliqué dans la différenciation des cellules
ß.
Il reste encore des MODY (environ 20%) dont le gène responsable n'est pas
identifié...
2.3.1.Epidemiologie
Le diabète de type 2 (anciennement "diabète non insulino-dépendant") est de très
loin le plus fréquent des diabètes (environ 85% des cas). Sa prévalence est très
élevée, environ 2 à 10% selon la population étudiée, augmente régulièrement et
atteint dans certaines populations des chiffres énormes (50% de la population
adulte chez les Indiens PIMA).
Il peut sembler paradoxal de n'envisager ce diabète qu'après tous les autres. En
fait nous ne disposons pas actuellement de marqueur sensible et spécifique pour
porter ce diagnostic: c'est donc un diagnostic par défaut (même si c'est un
146
diagnostic très fréquent), qui est évoqué sur des caractéristiques phénotypiques et
sur l'absence d'autre cause identifiable.
L'existence d'une susceptibilité génétique au diabète de type 2 est par exemple
attestée par un taux de concordance plus élevé entre jumeaux monozygotes
qu'entre jumeaux dizygotes. De même le risque dans la fratrie d'un sujet
diabétique de type 2 est 10 fois supérieur à celui de la population générale (donc de
l'ordre de 20% en France). En dehors des cas rares de diabète monogénique il est
probable que cette susceptibilité repose sur la conjonction, chez un même individu,
de mutations ou de polymorphismes de plusieurs gènes dont l'expression dépend
également de facteurs d'environnement
Le diabète de type 2 survient le plus souvent chez un adulte d'âge moyen. Son
caractère peu symptomatique explique que la moitié des cas sont méconnus
(résultats d'enquêtes de dépistage systématique), un retard diagnostique et
thérapeutique de plusieurs années et la fréquence des complications lors du
diagnostic. La majorité des diabétiques de type 2 ont un excès pondéral, de
répartition androïde et souvent d'autres anomalies regroupées sous le terme de
"syndrome X" ou syndrome pluri-métabolique: hypertension artérielle,
augmentation du LDL cholestérol ou baisse du HDL-cholestérol,
hypertriglycéridémie, tous facteurs de risque vasculaire expliquant la fréquence des
accidents cardio-vasculaires chez ces sujets.
Peuvent donc être considérés comme facteurs de risque du diabète de type 2:
l'ethnie
l'existence d'antécédents familiaux
la mise au monde d'un enfant de poids de naissance supérieur à 4 kg
Un antécédent personnel de diabète gestationnel
l'âge
l'existence d'une surcharge pondérale, surtout androïde
la sédentarité
Et toutes les situations favorisant une insulinorésistance.
C'est dans ces situations en priorité qu'il faut s'attaquer au problème de la
prévention et du diagnostic précoce du diabète de type 2.
147
(essentiellement par augmentation de la néoglucogénèse), diminution du captage,
du stockage et de l'utilisation du glucose dans le muscle; de plus la libération
d'acides gras par le tissu adipeux (où la lipolyse est moins bien freinée par
l'insuline) contribuerait à une moins bonne utilisation du glucose dans le muscle.
Mais l'insulinorésistance ne suffit pas à expliquer la survenue d'un diabète: à un
stade tout initial les futurs diabétiques de type 2 ont un hyperinsulinisme qui leur
suffit à maintenir une tolérance au glucose normale.
Les anomalies de la production d’insuline
Des anomalies de la production d'insuline sont donc nécessaires pour que survienne
le diabète: abolition du pic précoce d'insulinosécrétion en réponse au glucose (qui
correspond normalement à l'exocytose des granules de sécrétion pré-formés),
anomalies de la pulsatilité de la sécrétion d'insuline, augmentation du pourcentage
de sécrétion de la pro-insuline, moins bio-active que l'insuline (suggérant une
anomalie de la maturation finale de l'insuline). A ces anomalies qualitatives
s'ajoutent des anomalies quantitatives. Lorsque l'hyperglycémie est modérée les
quantités d'insuline produites sont augmentées (c'est ce qui a fait dire que les
diabétiques de type 2 ont un hyperinsulinisme): en fait elles ne le sont pas assez
(puisque le sujet est en hyperglycémie), il y a donc une carence relative de
l'insulinosécrétion. Quand l'hyperglycémie est franche on observe une carence
"absolue" de l'insulinosécrétion qui devient inférieure à celle mesurée chez le sujet
"normal". Les causes de ces anomalies de production de l'insuline ne sont pas
connues, sauf dans le cas particulier des diabètes de type MODY (cf 2.4): il peut
s'agir d'un phénomène "organique" (vieillissement prématuré de la cellule ß par
exemple) ou d'une anomalie fonctionnelle, potentiellement réversible de
glucotoxicité ou de lipotoxicité.
En effet, viennent s'ajouter à ces anomalies qu'on pourrait dire "constitutives" des
anomalies fonctionnelles, conséquences directes du déséquilibre du diabète et
responsables d'un véritable cercle vicieux: de façon schématique l'hyperglycémie
tend à aggraver le défaut de production d'insuline c'est ce qu'on appelle la
"glucotoxicité", l'augmentation des acides gras et des triglycérides aussi
("lipotoxicité"). L'insulinorésistance est également majorée. Les mécanismes
hypothétiques de ces phénomènes ne seront pas envisagés ici mais ces notions ont
deux conséquences pratiques majeures:
L'hyperglycémie du diabétique de type 2 ne tend pas à s'améliorer
spontanément (au contraire)
tout moyen thérapeutique (régime strict, activité physique, traitement par des
comprimés ou insulinothérapie transitoire) qui permet d'abaisser la glycémie est
susceptible d'améliorer, au moins en partie, l'insulinosécrétion endogène et la
sensibilité à l'insuline.
148
chez le premier, relative chez le second.
Est donc "insulino-dépendant" :
Chez le diabétique de type 1
Un patient dont le pancréas ne produit plus du tout d'insuline, en pratique
essentiellement les diabétiques de type 1 lorsque la maladie auto-immune a détruit
la quasi-totalité des cellules ß. Mais comme cette destruction est progressive,
même dans le diabète de type 1 il peut exister une phase de plusieurs mois, voire
années ("type 1 lent"), pendant laquelle le patient n'est que modérément
hyperglycémique et ne requiert pas, du moins pour sa survie, une insulinothérapie.
L'histoire naturelle du diabète de type 1, bien étudiée dans le cadre des études de
dépistage familial (cf le cours de JJ Robert), dessine une séquence au cours de
laquelle l'insulinosécrétion est normale, pour autant qu'on puisse en juger, pendant
plusieurs années alors que les marqueurs d'auto-immunité sont présents, puis
s'altère de façon discrète (perte du pic précoce d'insulinosécrétion), puis plus
sévèrement avec pour conséquence une hyperglycémie modeste, puis de façon
profonde au stade de diabète clinique. Ce n'est cependant en moyenne que 5 ans
après le diagnostic de diabète que l'insulinosécrétion devient réellement nulle. Le
même type de situation peut s'observer dans d'autres diabètes avec perte
progressive de la masse des cellules ß, comme par exemple au cours des diabètes
"pancréatiques".
Chez le diabétique de type 2
A l'inverse, dans de nombreuses situations, les diabétiques de type 2 peuvent avoir
besoin d'un traitement par l'insuline.
Ce besoin peut être transitoire, par exemple :
au cours de la grossesse chez une patiente dont le diabète n'est pas
parfaitement contrôlé par le seul régime,
dans la période encadrant une intervention chirurgicale: on n'aime pas
utiliser les "anti-diabétiques" oraux dans une situation potentielle
d'instabilité hémodynamique, ou métabolique, ou à risque d'insuffisance
rénale,
en situation de stress (infarctus du myocarde, sepsis ...etc.) pour les
raisons citées plus haut et parce que, du fait de l'insulinorésitance accrue,
le traitement habituel ne suffit plus à contrôler l'hyperglycémie,
au cours d'un traitement hyperglycémiant, en premier lieu une
corticothérapie,
lorsqu'une complication du diabète justifie l'obtention d'un excellent
contrôle glycémique: mal perforant plantaire infecté, neuropathie aiguë
douloureuse.
Dans ces situations l'insuline sera administrée pour une période de quelques jours à
quelques mois, puis sera relayée par le traitement oral. Il est important de bien
expliquer cette possibilité de "retour en arrière" aux patients qui sont souvent
convaincus que lorsqu'on commence une insulinothérapie on ne peut plus
l'interrompre.
Dans d'autres cas le traitement par l'insuline sera a priori définitif:
dans toutes les situations où les "anti-diabétiques oraux" sont (ou
deviennent) contre-indiqués: insuffisance rénale, insuffisance hépatique, âge
physiologique avancé, et, pour les biguanides, sujet à risque d'hypoxie
tissulaire (risque accru d'acidose lactique).
mais surtout, chez de très nombreux patients, tout simplement parce qu'un
traitement oral bien conduit ne suffit pas, ou ne suffit plus, à contrôler
149
l'hyperglycémie. On prescrit donc de l'insuline parce qu'on n'a pas d'autre
recours thérapeutique: c'est ce que certains appellent "insulino-requérance"
ou (pire) "insulino-nécessitance". Cette notion est évidemment subjective:
elle dépend autant de la décision du médecin (de commencer
l'insulinothérapie) que des caractéristiques du patient. Elle est aussi fonction
de l'objectif glycémique fixé pour chaque patient. Elle est potentiellement
évolutive: l'insuline peut par exemple être interrompue chez un patient
ayant un diabète de type 2 à l'occasion d'une perte de poids, de l'arrêt ou de
la diminution d'une corticothérapie ...etc. Elle le sera encore plus avec
l'arrivée des nouveaux traitements du diabète de type 2. N'est donc pas
"insulino-dépendant" tout patient traité par l'insuline...
Deux conséquences pratiques résument ces notions:
on peut très bien "mettre à l'insuline" un patient qui en a transitoirement
besoin, et l'interrompre ultérieurement sans dommage.
il est à l'inverse dangereux d'interrompre, même brièvement,
l'insulinothérapie d'un diabétique authentiquement insulino-dépendant: une
acidocétose peut survenir en quelques heures, particulièrement au cours de
la grossesse ou en situation de stress. Un diabétique de type 1 a besoin
d'insuline en permanence, même à jeun (et même après une
hypoglycémie)...
Références Bibliographiques
Les Diabètes. Comprendre pour traiter. A Grimaldi, C Sachon, F Bosquet.
Editions Médicales Internationales. Techniques et documentation Lavoisier.
1993.
Diabète de type 2: numéro hors série n° 2 d'Octobre 1997, de la revue
Médecine Thérapeutique et en particulier l'article de Jean Girard, pages 33-47.
150
COMPLICATIONS CHRONIQUES DU DIABETE
(N° 330 - 331)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation
Hôpital Laennec
Introduction
Le diabète épargne beaucoup d'organes qui n'ont pas de lésions secondaires à la
maladie (cerveau, foie, poumons... cheveux, oreilles !). Mais la diffusion du
système vasculaire fait que beaucoup d'organes sont néanmoins menacées et
atteints.
La chronologie de survenue, l'évolution, la sémiologie des atteintes sont parfois un
peu différentes dans le DID et le DNID mais en pratique on peut dire que les deux
diabètes ont les mêmes complications.
Les lésions des petits vaisseaux et des capillaires conduisent à l'atteinte micro-
angiopathique : rétinopathie et néphropathie diabétiques auxquelles est rattachée
le plus souvent la neuropathie diabétique, périphérique et autonome. Ces atteintes
sont détaillées dans les chapitres suivants : elles ont des caractéristiques très
spécifiques. Elles sont très dépendantes du degré de l'hyperglycémie.
L'atteinte des grosses artères (membres inférieurs, vaisseaux du cou, coronaires)
par l'artériosclérose et les plaques d'athérome est responsable de la macro-
angiopathie ; elle représente la principale cause de mortalité des diabétiques.
Celle-ci n'a pratiquement pas de caractéristique spécifique liée au diabète, elle ne
sera donc pas traitée dans le polycopié.Le diabète est cependant un facteur de
risque majeur et indépendant pour sa survenue, bien que son évolution ne semble
pas ou peu liée à l'équilibre glycémique. Sa physiopathologie au cours du diabète
n'est pas claire, une des hypothèses en vogue accuse l'hyperinsulinisme, présent au
niveau périphérique (hyperinsulinisme endogène dans le DNID, exogène dans le
DID), de favoriser la croissance des plaques d'athérome.
Quoi qu'il en soit, la lutte acharnée contre les autres facteurs de risque vasculaires,
le dépistage régulier des atteintes artèrielles par l'interrogatoire et l'examen
clinique font partie intégrante de la prise en charge du diabète (la place des
explorations paracliniques dans le dépistage systématique reste à préciser). Le
traitement des atteintes artèrielles, quel qu'en soit le territoire, est identique chez
le diabétique et le non-diabétique. En aucun cas il ne faut refuser, sous prétexte du
diabète, le bénéfice d'explorations ou de thérapeutiques proposées à des sujets
non-diabétiques du même âge.
Les complications spécifiques du diabète (microangiopathiques) ne se développent
pas sans diabète et leur intensité est corrélée au degré de l'hyperglycémie. Cela va
sans dire mais n'a été prouvé que très récemment en raison :
de bizarreries apparentes
de difficultés méthodologiques.
Au niveau des bizarreries, certains patients semblent être en partie épargnés,
quelles que soient leurs "fautes", l'importance de leur déséquilibre, alors que le
destin d'autres semble être l'évolution quasi inéluctable vers les complications,
151
quelle que soit la qualité de leur équilibre glycémique. Ceci est actuellement
expliqué, jusqu'à preuve du contraire, par une susceptibilité génétique associée au
diabète, exposant ou protégeant (en partie) des complications. L'emploi
systématique des outils de la biologie moléculaire permettra d'identifier certains
gènes ou association de gènes exposant ou prévenant (en partie) les complications.
Notons que :
les publications formelles sont souvent rapidement contredites par une autre
publication,
les gènes incriminés peuvent être de simples marqueurs (ce qui permettrait
déjà d'identifier les patients à risque), mais parfois permettent de mieux
comprendre la pathogénie, ouvrant la voie à un (lointain) traitement,
le niveau et la durée de l'hyperglycémie sont des facteurs indispensables à
l'évolution des lésions et quels que soient les gènes, la prévalence et la
gravité des complications microangiopathiques est essentiellement liée à
l'ancienneté du diabète. Seule l'incidence de l'atteinte rénale diminue
considérablement après 30 ans de diabète.
D'autres facteurs de risque, notamment l'hypertension artérielle, influencent
considérablement les complications et leur évolution.
Alors que le rôle de l'hyperglycémie dans la survenue des complications était
fortement soupçonné depuis 30 ans, l'étude prouvant l'utilité d'un bon contrôle
glycémique n'a été réalisée que très récemment en Amérique du Nord. Cette étude
multicentrique (le D.C.C.T.) a inclus près de 1500 patients répartis en 2 sous-
groupes : pour moitié moins de 5 ans de diabète et pas d'atteinte rétinienne, pour
moitié un diabète de 5 à 10 années avec rétinopathie débutante. Ces 1500 patients
ont été randomisés en deux groupes thérapeutiques :
Traitement dit "conventionnel" avec 2 injections/jour, autosurveillance légère
et suivi diabétique espacé.
Traitement "intensif", recherche des glycémies normales à l'aide de 3 à 4
injections par jour, une autosurveillance et un suivi diabétologique intensif.
Dans le groupe "traitement conventionnel", après 7 ans 1/2 de suivi, la glycémie
moyenne est de 2,31 g/l et l'HbA1C à 8,5 % (N < 6,5 %) et dans le groupe
"intensif", les résultats bien meilleurs respectivement à 1,55 g/l et 7,2 % (avec
quelques hypoglycémies supplémentaires).
L'impact du bon équilibre sur les complications est spectaculaire : Dans le groupe
"traitement intensif" : près de la moitié de rétinopathies sévères en moins, et les
nouveaux cas de rétinopathie ont diminué d'un tiers. Pour le rein, 1/3 de
microalbuminurie et 1/2 de macroalbuminurie en moins. Près de 2/3 de
neuropathies cliniques en moins. (Pas de différence statistiques pour la macro-
angiopathie, mais une tendance à la diminution dans le groupe intensif).
Il est exceptionnel qu'une étude de ce type donne des résultats si nets et quelles
que soient les interprétations, retouches, contestations possibles, la conclusion est
formelle : un contrôle strict de la glycémie permet de ralentir ou d'éviter la
survenue des complications du diabète.
A défaut d'avoir installé et réalisé l'étude, la diabétologie européenne avait depuis
longtemps institué une stratégie de prise en charge thérapeutique globale,
recherchant le meilleur équilibre glycémique possible quand cela était réalisable,
associée au traitement efficace de l'HTA, la prise en charge de l'hyperlipémie et
l'éviction du tabac (voir chapitre traitement). Cette thérapeutique inclut de façon
explicite la surveillance régulière du patient (fond d'oeil, ECG, créatinine...).
Les progrès et la qualité des enquêtes épidémiologiques et thérapeutiques, les
percées scientifiques notamment pathogéniques ont abouti à la vérification de cette
152
évidence : mieux les malades sont soignés par eux mêmes et l'équipe médicale,
mieux ils se portent!
153
RETINOPATHIE DIABETIQUE (n° 219 - 330 -
331)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation
Hôpital Laennec
Points importants
Cette complication redoutée a bénéficié des immenses progrès de la
diabétologie et de l’ophtalmologie.
L’ancienneté et l’importance de l’hyperglycémie sont les 2 principaux facteurs de
risques de rétinopathie diabétique.
La rétinopathie débutante (microanévrisme) finit pas atteindre l’immense
majorité des diabétiques mais elle est sans aucune gravité à ce stade.
La rétinopathie ischémique qui fait le lit de la prolifération est elle plus
redoutable.
La rétinopathie oedémateuse est la principale cause de cécité chez les
diabétiques.
Il y a une corrélation absolue entre l’atteinte rétinienne, son évolution et le taux
d’HbA1c.
Laser et vitrectomie ont révolutionné la prise en charge de la rétinopathie
154
diabétique.
L’examen ophtalmologique complet « fond d’oeil » est indispensable tous les ans.
L’angiographie est pratiquée tous les 5 ans ou plus souvent en cas de lésion et/ou
de traitement. Il faut la demander d’emblée dans le type 2 dont la date de début
est rarement connue avec précision.
La cécité est, à juste titre, une des complications les plus redoutée par les
diabétiques et les diabétologues. Pourtant son incidence est actuellement minime.
La diminution importante du nombre de cécités liées au diabète est principalement
le résultat d'une lutte acharnée de la part des médecins et des patients et tout
relâchement pourrait remettre en cause ce résultat.
1. Epidémiologie
155
2.1. Stade initial : Rétinopathie débutante
La première lésion est le microanévrisme capillaire. Il est très spécifique de la
rétinopathie diabétique. Il se présente sous la forme d'un petit point, à la limite de
la visibilité, rouge au fond d'oeil, fluorescent en angiographie.
A un stade déjà un peu plus évolué, il peut s'associer des phénomènes liés à
l'augmentation de la perméabilité capillaire :
Micro-hémorragies, rondes ou en flammèche.
Exsudats de lipides et glycoprotéines (exsudats jaunes, durs).
A ce stade l'acuité visuelle est toujours normale. Seul l'examen ophtalmologique
permet de dépister ces lésions.
156
2.4. Rétinopathie oedémateuse
Il s'agit de l'oedème maculaire, cause principale de cécité chez le diabétique. Cet
oedème maculaire peut apparaître à tous les stades décrits précédemment (sauf
microanévrismes isolés), car il est la conséquence de l'hyperperméabilité capillaire
lorsqu'elle est proche de la macula. Très sensible à l'équilibre glycémique, il est
peut-être plus fréquent dans le DNID. Il se manifeste par une baisse de l'acuité
visuelle progressive, mais qui peut être majeure. Il est mieux visualisé à
l'angiographie qu'au fond d'oeil. Lorsqu'il persiste plusieurs mois, il s'organise en
logettes (oedème maculaire cystoïde) et devient alors irréversible.
3. Traitement
Il n'y a pas de traitement curatif de la rétinopathie diabétique, mais un traitement
physiologique préventif. En l'absence de traitement préventif, la photocoagulation
laser ne peut qu'arrêter transitoirement l'évolution des lésions, mais ne peut pas
faire régresser la rétinopathie. Il est capital que les patients soient informés de
cela. C'est néanmoins un remarquable traitement symptomatique.
Le maintien d'un bon équilibre glycémique et tensionnel est donc primordial. Mais
quand un patient est en phase d'abandon de sa thérapeutique, la dernière chose à
laquelle il doit renoncer est probablement la surveillance et le traitement
ophtalmologique.
157
vision nocturne est assurée par la périphérie rétinienne).
3.2. La chirurgie
La vitrectomie permet de rétablir la transparence des milieux intra-oculaires après
hémorragie du vitré, si celle-ci ne se résorbe pas spontanément. Elle est parfois
indispensable pour pouvoir réaliser le traitement par laser. Elle risque
malheureusement d'aggraver l'oedème maculaire.
La cryo-application est une technique en cours d'évaluation, qui pourrait être une
alternative à la photocoagulation dans les rétinopathies proliférantes. Elle est utile
pour le traitement du glaucome néo-vasculaire.
L'énucléation est parfois nécessaire lorsque l'oeil est perdu mais qu'il existe une
hypertonie oculaire non contrôlable médicalement, qui peut parfois être à l'origine
de douleurs atroces.
Référence bibliographique :
Glycaemic control and development of retinopathy in type 2 Diabetes Mellitus :
A longitudinal Study P.-J Guillausseau, Diabetic Medecine, 1998; 15 : 151-155
158
B. Dépend de l’ancienneté du diabète
C. Dépend de l’hyperglycémie
D. Atteint la majorité des diabétiques
2. L’examen ophtalmologique
A. N’est indispensable qu’en cas de symptôme
B. Peut-être limité à l’examen du fond d’oeil
C. S’accompagne d’une angiographie systématique
D. Etudie surtout la périphérie de la rétine.
3. En cas de rétinopathie ischémique sévère
A. L’acuité visuelle est le plus souvent normale
B. L’acuité visuelle est le plus souvent anormale
C. Il y a un risque de prolifération
D. Le traitement laser n’est pas indiqué.
159
NEUROPATHIES DIABÉTIQUES (n° 221 - 330 -
331)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation,
Hôpital Laennec
160
« normales » peuvent prévenir la complication.
La neuropathie diabétique est une des complications les plus fréquentes du diabète,
mais elle est souvent négligée par les médecins. En effet, elle ne donne que
rarement des conséquences graves (maux perforants, douleurs), et aucun
traitement n'est réellement efficace.
1. Physiopathologie
L'ancienneté et l'importance de l'hyperglycémie sont les principaux facteurs de
risque d'apparition d'une neuropathie diabétique. Le mécanisme exact par lequel
l'hyperglycémie entraîne une neuropathie est encore discuté. Deux hypothèses sont
principalement proposées :
L'activation de la voie des polyols : l'excès de glucose intracellulaire est réduit
en sorbitol sous l'effet de l'aldose réductase. Le sorbitol est ensuite transformé
en fructose. Ces sucres exercent un pouvoir osmotique responsable de la
souffrance cellulaire. Ce phénomène pourrait être à l'origine de la
démyélinisation des fibres nerveuses atteintes par le diabète.
L'hypothèse vasculaire : la démyélinisation et la dégénérescence axonale ne
seraient que la conséquence de l'atteinte des capillaires (microangiopathie
diabétique), comme au niveau rénal et rétinien. Dans le cas des atteintes
neurologiques focales (mononévrites) de solides arguments, notamment
histologiques, plaident en faveur d'un mécanisme vasculaire. Cette hypothèse
attache plus formellement la neuropathie diabétique aux complications micro-
angiopahtiques.
L'approfondissement des mécanismes physiopathologiques est fondamental, car
il guidera la mise au point de thérapeutiques quasiment absentes actuellement.
2. Polynévrites
C'est la forme la plus fréquente de neuropathie diabétique. Sa fréquence atteint
presque 100 % dans les séries utilisant un critère "raffiné" (électrophysiologie,
histologie). mais seulement 10 % si on recherche une plainte fonctionnelle patente.
161
Elle survient parfois précocement dans l'évolution du diabète, et évolue
spontanément vers la disparition des douleurs et l'anesthésie en quelques mois… ou
années. Cette forme est rare mais désespérante.
Le diagnostic est essentiellement clinique. L'EMG n'a d'intérêt qu'en cas de doute
(en particulier si une compression est suspectée) : il n'y pas de parallélisme entre
l'atteinte clinique et électrique. L'anomalie principale à l'EMG est le ralentissement
de la vitesse de conduction nerveuse (signe de démyélinisation) alors que l'atteinte
est plus souvent axonale au début. Aucun examen complémentaire n'est nécessaire
dans les formes typiques, sauf pour un éventuel diagnostic différentiel (polynévrites
toxiques, carentielles, para-néoplasiques…).
2.2. Traitement
Peu de traitement sont efficaces. Ils ne sont actuellement entrepris qu'en cas de
symptômes fonctionnels gênants (dysesthésie et surtout hyperesthésie), car on ne
possède rien d'efficace en cas d'hypoesthésie. On propose la normalisation
glycémique (qui limiterait au moins l'extension des lésions), les antalgiques
classiques, les tricycliques, le Rivotril, le Tegretol. Les traitements les plus
prometteurs, physiopathologiques, n'ont pour l'instant pas prouvé leur efficacité
(inhibiteur de l'aldose réductase).
3. Mononévrites
C'est l'atteinte brutale, d'un tronc nerveux (exceptionnellement plusieurs en même
temps). Il est indispensable d'éliminer une autre cause (vasculaire, tumorale),
avant d'attribuer l'atteinte au diabète.
Tous les troncs nerveux peuvent être touchés, mais les manifestations les plus
fréquentes sont les cruralgies et les paralysies oculomotrices (III extrinsèque, IV).
Aucun traitement n'est nécessaire, l'évolution se fait spontanément vers la
régression, le plus souvent complète, en quelques semaines, quand l'artériole
occluse se réperméabilise.
4. Neuropathie autonome
L'atteinte du système nerveux autonome est plus rare et survient en général chez
des patients ayant un long passé de diabète multicompliqué, et souffrant le plus
souvent de polynévrite évoluée.
162
4.2. Neuropathie digestive
Gastroparésie
C'est un retard à la vidange gastrique, qui se fait de façon irrégulière et
imprévisible. Elle peut être totalement asymptomatique. Elle contribue parfois à
l'instabilité de l'équilibre glycémique. Elle peut se manifester par des sensations
dyspepsiques peu spécifiques, mais aussi par des éructations fétides (fermentation
des aliments), un clapotement gastrique à jeun, le vomissement d'aliments anciens
non digérés. Des poussées aiguës avec intolérance digestive complète sont
possibles, favorisées par les poussées hyperglycémiques.
Le diagnostic peut être fait à la fibroscopie gastrique qui montre une stase
gastrique, voire un bézoard. L'examen de référence est le transit gastrique
isotopique qui est beaucoup plus sensible.
Le traitement repose sur le fractionnement de l'alimentation, et sur les stimulants
de la motricité gastrique : Motilium, Prepulsid, Erythromycine, neuroleptiques type
Haloperidol.
Diarrhée motrice
Rare, difficile à traiter et très invalidante pour le patient (selles nocturnes). Essayer
les ralentisseurs du transit, le Catapressan. Toujours suspecter une pullulation
microbienne (les antibiotiques intestinaux améliorent les symptômes dans un grand
nombre de cas).
4.3. Vésicoparésie
Rare, et souvent peu symptomatique. Se manifeste par une dysurie, parfois
intermittente, des épisodes de rétention urinaire, la sensation de mal vider sa
vessie, la disparition de la sensibilité douloureuse signalant que la vessie est
remplie.
Elle est source de résidu post-mictionnel, stase, infections, voire reflux.
Le diagnostic nécessite une débimétrie, la recherche d'un résidu post-mictionnel par
échographie, une cystomanométrie et éventuellement une urétrocystographie.
Le traitement repose sur la résection endoscopique du col vésical, la rééducation
vésicale, parfois l'auto-sondage, les médicaments agissant pharmacologiquement
sur le système nerveux autonome, sont ici comme dans les autres atteintes
neurovégétatives du diabète peu efficaces car il existe une véritable dénervation
locale.
163
5. Conclusion
La neuropathie diabétique reste une atteinte dont s'occupe plus le neurologue que
le diabétologue. Au deuxième plan des revendications des patients ou des
urgences, son caractère peu symptomatique et non vital ne doit pas cacher que les
formes hyperalgiques (insupportables) et autonomes extrêmes (confinant le malade
au lit) sont rares mais épouvantables et sans aucune thérapeutique réelle
actuellement. Les malades qui sont atteints errent de spécialiste en spécialiste, si
bien qu'on finit par ne plus les voir ce qui ne signifie nullement qu'ils sont guéris.
Référence Bibliographique
Occurrence, predictors, and clinical significance of autonomic neuropathy in NIDDM
Ten-year follow-up frome the diagnosis. Jari P., Diabetes, Vol 45, March 1996, 308-
315
164
NEPHROPATHIE DIABETIQUE(n° 330 - 331)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation, Hôpital Laennec
1. Histoire naturelle
Le dosage radioimmunologique de l'albumine a permis de détecter des valeurs de
quelques milligrammes dans les urines des 24h. La valeur maximale de la micro-
albuminurie, 300 mg/24h, a été définie tout à fait arbitrairement par la limite de
détection d'une bandelette urinaire disponible commercialement, l'Albustix qui
165
devient positive au delà de 300 mg. La limite inférieure, 30 mg, a été définie
statistiquement en fonction de la fréquence des chiffres observés chez des gens
normaux. On dit qu'il y a une micro-albuminurie pour des chiffres compris entre 30
et 300 mg/24h. La popularité de ce dosage vient du fait qu'on a voulu lui attribuer
une valeur magique de prédiction de la néphropathie diabétique. L'immense
majorité des patients ayant un dosage dans cette "fourchette" deviendraient
fatalement insuffisants rénaux. Cette vue pessimiste a largement été contredite par
les études ultérieures. La micro-albuminurie ne fait rien d'autre que de traduire un
début d'atteinte rénale (au même titre que les micro-anévrismes traduisent un
début d'atteinte rétinienne). De très nombreux facteurs peuvent influencer
favorablement ou défavorablement l'évolution "prédite".
Au delà de 300 mg il y a une albuminurie détectable par des dosages plus
classiques, les taux pouvant atteindre plusieurs grammes/24h. Le syndrome
néphrotique vrai, avec hypo-albuminémie, est rare mais possible dans la
néphropathie diabétique.
Parallèlement à la fuite grandissante de l'albumine, il existe des anomalies de la
filtration glomérulaire. Les premières anomalies décrites sont fonctionnelles, donc
réversibles, dominées par une hyperfiltration glomérulaire (clairance de créatinine à
150 ml/min). Cette hyperfiltration s'accompagne d'une néphromégalie. En
histologie, les glomérules sont de grande taille. Le mécanisme précis de cette
hyperfiltration n'est pas connu ; il est néanmoins spécifique de l'hyperglycémie, qui
est donc directement ou indirectement responsable. Dans l'évolution défavorable de
l'atteinte rénale, il y a ensuite un déclin de la filtration glomérulaire pouvant
conduire à l'insuffisance rénale dite terminale nécessitant des procédés de
substitution (dialyse ou greffe).
Décrire l'histoire naturelle de la néphropathie diabétique de cette façon : micro-
albuminurie faisant le lit d'une macro-albuminurie, puis d'un syndrome
néphrotique, hyperfiltration faisant place à un déclin de la filtration glomérulaire et
conduisant à l'insuffisance rénale terminale, peut laisser penser qu'il s'agit d'une
évolution stéréotypée et fatale. En fait, l'immense majorité des diabétiques n'aura
aucune de ces anomalies, comme l'illustre de façon convaincante quelques données
épidémiologiques.
2. Épidémiologie
Environ 20 à 30 % seulement des diabétiques de type I ont une micro ou une
macro-albuminurie. Les 2/3 ne présenteront donc jamais aucune atteinte rénale. Il
n'y a jamais d'albuminurie présente à un taux pathologique chez les diabétiques
avant environ une dizaine d'années d'évolution. Après 2 à 3 décennies, le risque
d'avoir une atteinte rénale s'effondre. Si les données épidémiologiques sont justes,
il s'agit de la seule complication du diabète dont la fréquence n'augmente pas avec
la durée de celui-ci. La situation est donc très favorable au niveau individuel. Elle
l'est également au niveau de toute la population. Décade après décade (1940 à
1990) dans le type I, il y a de moins en moins de patients atteints. Ces données
optimistes et bien réelles sont confirmées par les données de la dialyse. Pour les
diabétiques de type I, environ 500 patients sur les 150.000 diabétiques
insulinodépendants, sont dialysés en France, soit 3 ‰. La politique de santé
française fait que la totalité des patients atteints sont pris en charge et on ne peut
pas penser que ce chiffre soit sous-estimé et qu'il meurt des patients faute de prise
en charge. Ce pourcentage est même en diminution.
En ce qui concerne les 1 500 000 diabétiques de type II, 500 aussi sont en dialyse.
Il y a quelques années, il n'y en avait aucun. La fréquence est en augmentation.
Rappelons qu'il existe environ 20 000 dialysés en France, dont 5 % de diabétiques
tous types confondus.
166
3. Causes de la néphropathie diabétique
La théorie métabolique rend l'hyperglycémie responsable. Cette hyperglycémie peut
être responsable directement en glyquant certains résidus protéiques. Elle peut être
responsable indirectement en transformant enzymatiquement le glucose en
substances potentiellement toxiques (cycle du sorbitol où le glucose se transforme
sous l'action itérative de différentes aldoses réductases). Une théorie biochimique,
dépendante elle aussi de l'hyperglycémie, rend responsable des anomalies
morphologiques de la membrane basale, non seulement les ramifications glucosées
locales, mais aussi la disparition de certains radicaux soufrés.
Dans la théorie hémodynamique, c'est l'hyperfiltration glomérulaire qui est
responsable de l'auto-entretien des lésions. Initialement, cette hyperfiltration a été
décrite dans un modèle expérimental animal, le rat Wistar modérément
hyperglycémique. Chez cet animal, les mesures directes sur le néphron permettent
de voir dans l'intimité du glomérule ce qui se passe. Tout ceci n'est possible que
très indirectement chez l'homme. Dans d'autres situations d'hyperfiltration comme
la grossesse ou le rein unique, on ne voit jamais de lésion de type diabétique :
l'hyperglycémie associée est donc nécessaire.
La dernière théorie est génétique. La néphropathie diabétique serait (en partie)
héréditaire (il faut expliquer pourquoi 20 à 30 % seulement des diabétiques de
type I ont une atteinte rénale). Certains gènes seraient favorisants, d'autres
protecteurs de l'atteinte. On trouverait plus d'hypertendus dans les ascendants des
diabétiques développant une néphropathie.
Privilégier une des théories, voire en retenir une de façon exclusive a des
conséquences nombreuses. Les stratégies thérapeutiques sont très différentes
selon que l'on pense que le métabolisme ou l'hémodynamique est responsable.
Accorder la prépondérance aux gênes peut rendre très philosophe sur la
"responsabilité personnelle" du patient dans les atteintes rénales. Est-ce sa "faute"
ou est-ce son "destin" : dans ce dernier cas, bien se traiter ne servirait pas ou peu.
En tout cas, les données récentes d'une vaste enquête prospective (DCCT, Diabetes
Control Complication Trial) visant à comparer les complications en cas d'excellent
contrôle glycémique ou de moins bon contrôle sont claires. Dans toutes les
circonstances, le très bon contrôle prévient ou ralentit les atteintes micro-
angiopathiques rénales (et aussi oculaires et neuropathiques) de plusieurs dizaines
de %. Il n'y a donc aucun doute : il est nécessaire d'avoir un très bon contrôle
glycémique pour prévenir et freiner l'évolution de l'atteinte rénale.
4. Diagnostic différentiel
Diverses études prospectives ont montré que 10 % des atteintes rénales chez les
diabétiques de type I et près de 50 % chez les diabétiques de type II étaient liées à
une atteinte indépendante du diabète (parfois des lésions diabétiques sont en plus
associées). Toutes les causes habituelles de glomérulopathie peuvent être
rencontrées et surtout les néphropathies vasculaires à type de néphro-
angiosclérose. La nécessité d'un diagnostic précis est théoriquement indispensable,
car le pronostic des atteintes rénales est différent selon la cause et il peut exister
des thérapeutiques spécifiques. Alors qu'il ne viendrait à personne l'idée de suivre
un diabétique sans étude régulière de son fond d'oeil, la plus part des spécialistes
renoncent, même en cas de doute, à faire une ponction biopsie rénale, jugée trop
invasive. Ce qui est vrai. Il n'empêche que l'on se prive d'un élément important
d'évaluation de la maladie. La mise au point de la ponction biopsie rénale par voie
transveineuse, moins dangereuse mais moins répandue que la voie transcutanée
n'a pas permis de résoudre définitivement le problème. Rappelons que les lésions
histologiques très évocatrices de diabète sont un épaississement de la membrane
basale conduisant à une glomérulo-sclérose généralisée. Quand cette glomérulo-
167
sclérose est nodulaire, il s'agit du syndrome de Kimmelstiel-Wilson du nom des
auteurs qui ont décrit cette anomalie.
5. Evolutivité
En 1980, en cas d'insuffisance rénale avancée (clairance < 30 ml/min) la perte de
filtration glomérulaire était de l'ordre de 1 ml/min/mois soit 12 ml en 1 an,
conduisant donc à l'insuffisance rénale terminale en moins de 2 ans. En 1995, la
perte est dix fois moins importante, de 0,1 ml/min/mois sans point de non retour :
il n'est jamais trop tard pour bien faire pour tenter de ralentir une insuffisance
rénale, même très avancée.
6. Pourquoi ?
Ceci a été obtenu grâce à la mise en route de programmes thérapeutiques évalués,
visant à obtenir un contrôle glycémique et tensionnel parfait. Les moyens d'obtenir
un bon contrôle glycémique sont exposés dans le chapitre concernant le traitement
du diabète. Le très bon contrôle de l'hyperglycémie, dans le cadre de l'étude DCCT,
a permis la réduction du développement ou de l'apparition d'une micro-albuminurie
dans 35 % des cas et d'une albuminurie dans 50 % des cas.
Il y a plusieurs décennies, une étude anatomo-pathologique a objectivé le rôle
protecteur d'une tension basse au niveau du rein. Chez une patiente décédée, il
existait une sténose unilatérale de l'artère rénale. Cette patiente était diabétique et
hypertendue. Le rein "protégé" de l'hypertension par la sténose était indemne de
néphropathie diabétique. Ce travail, vérifié expérimentalement chez l'animal, puis
longtemps après sur une série plus longue de patients, a été à la base de la
stratégie cherchant à obtenir les tensions les plus basses possibles chez le
diabétique.
Pour des soucis de classement épidémiologique, l'OMS considère comme
hypertendu un patient ayant une tension supérieure ou égale à 160/95 Hg. La
totalité des études entreprises chez les diabétiques, et à ce jour sans aucune
exception, a montré qu'une tension diastolique supérieure à 90 Hg laisse évoluer
très rapidement l'atteinte rénale. C'est donc un chiffre inférieur qu'il faut obtenir.
Dès qu'un tel chiffre est atteint, il faut donc traiter et même avant, pour certains
dès que la tension diastolique augmente d'au moins 5 mm de Hg en 1 an.
Ce traitement doit être "énergique" et 50 % des patients nécessitent une tri-
thérapie à "doses plafonds".
Le maniement des médicaments hypotenseurs chez le sujet non diabétique, et plus
encore chez le diabétique, est délicat. Les patients se préoccupent surtout des
effets secondaires fonctionnels (hypotension orthostatique, oedème des membres
inférieurs) et les médecins des effets secondaires organiques ou métaboliques
(hyperkaliémie sous épargneur potassique ou inhibiteur de l'enzyme de
conversion). Il faut donc choisir le "moins mauvais" médicament et les associations
logiques.
7. Questions subsidiaires
Une intervention "non glycémique" peut-elle prévenir la néphropathie diabétique ?
Dans l'hyperfiltration, la pression oncotique des protéines est un des facteurs
pouvant augmenter l'hyperpression dans le glomérule. Un régime pauvre en
protides pourrait réduire cette pression. Mais il s'agit d'une prévention, il faudrait
faire ce régime dès le début du diabète, alors qu'il faut déjà faire face à une somme
168
impressionnante de contraintes diététiques et thérapeutiques. Il est illusoire de
penser qu'un patient puisse suivre à vie un régime hypoprotidique. Si un rôle
protecteur existe, il est probablement très faible et très inférieur à l'effet néfaste de
quelques mmoles de trop de glycémie ou quelques millimètres de trop de tension
artérielle. Quand l'atteinte rénale est patente, l'immense majorité des patients a
une appétence faible pour les protides qui sont automatiquement diminués. Il est
raisonnable de suggérer un régime normo-protidique (1g/kg/jour) et sûrement pas
un régime hyperprotidique à tous les stades de la maladie diabétique.
Dans le même cadre, les inhibiteurs de l'enzyme de conversion (IEC) revendiquent
une action spécifique sur la pression intra glomérulaire en levant la vaso-
constriction de l'artériole efférente du glomérule. Les IEC pourraient prévenir la
néphropathie diabétique indépendamment de leur rôle hypotenseur. Il y a environ
autant de protocoles cliniques pour démontrer cela que l'inverse. Si l'on croit à
cette théorie, cela revient à prescrire des IEC dès le début du diabète chez un sujet
normo-tendu. Actuellement, la plupart des diabétologues et des diabétiques s'y
refusent. Les IEC sont certainement un très bon médicament anti-hypertenseur,
avec une très bonne tolérance fonctionnelle. Ce ne sont nullement les hypotenseurs
électifs chez le diabétique, mais ils peuvent rivaliser avec les grandes classes
validées (diurétiques, ß-bloqueurs, inhibiteurs calciques). C'est un médicament à
risque en cas d'atteinte rénale, car ils se comportent comme un épargneur
potassique avec un risque d'hyperkaliémie aiguë.
Référence bibliographique
Risk of End-stage renal disease in Diabetes Mellitus.
Fréderick L., JAMA, 1997 Vol 278, n° 23, 17 Décembre, p 2069-2074
169
B. Est le marqueur d’une évolution inéluctable vers l’insuffisance rénale
terminale
C. Est le meilleur paramètre de surveillance de la filtration glomérulaire.
D. Est le reflet d’une atteinte vasculaire globale.
2. Pour freiner l’évolution d’une insuffisance rénale sévère chez un diabétique
A. Améliorer la glycémie n’est plus utile à ce stade
B. Il faut surtout normaliser la tension systolique
C. L’objectif tensionnel diastolique est vers 90 mm de Hg.
170
DIABETE INSULINO-DEPENDANT DE L'ENFANT
(n° 330)
Jean-Jacques ROBERT
Service d'Endocrinologie-Diabétologie, Hôpital Necker
Abréviations
DID : Diabète insulino-dépendant
IDDM: Insulin-dependant diabetes mellitus
171
ICA: Islet cell antibodies (Anticorps anti-ilôts de Langerhans)
1. Introduction
Les particularités cliniques du diabète de l'enfant ont depuis longtemps fait
apparaitre, plus clairement que chez l'adulte, que le diabète sucré est un syndrome
aux étiologies et mécanismes pathogéniques variés. La classification internationale
des diabètes, qui date de 1979, fait perdre au diabète infantile une partie de sa
spécificité, le terme "diabète insulino-dépendant" (DID) remplaçant celui de
"diabète juvénile", l'âge de début n'ayant pas de signification physiopathologique
précise. Cependant, le DID pose, chez l'enfant, des problèmes particuliers de
diagnostic, de traitement et de surveillance.
Le diabète de l’enfant est une maladie fréquente, posant un problème de santé
publique. En France, selon une enquête récente (1988-90), l'incidence annuelle est
d'environ 7 pour 100.000 sujets de moins de 20 ans. La fréquence varie d'un pays
à l'autre, avec un accroissement du Sud au Nord de l'Europe. Il existe par ailleurs
une augmentation du nombre de cas, en particulier ceux qui sont diagnostiqués au
cours des premières années de vie, au cours des dernières décennies.
2. Physiopathologie - Etiopathogénie
Pour que le DID se développe, il faut une prédisposition génétique, liée
principalement à des antigènes HLA, et un facteur déclenchant, d’environnement,
qui engendre des processus auto-immuns détruisant sélectivement les cellules ß
172
des îlots de Langerhans.
2.1. Génétique
Les études de jumeaux identiques montrent que les facteurs génétiques ne
représentent pas plus de 50 % de déterminisme du DID. Ce n'est pas la maladie
qui est transmise, mais une susceptibilité à la maladie.
Ce terrain est en grande partie déterminé par des gênes du complexe HLA
(chromosome 6). La plus grande susceptibilité est liée aux antigènes HLA DR3 et
DR4, qui sont présents chez plus de 90 % des DID contre 50 % des sujets témoins.
Inversement, les antigènes DR2 et DR5 sont protecteurs. Le risque est
particulièrement élevé pour les hétérozygotes DR3/DR4, ce qui suggère que la
susceptibilité dépend d'une complémentarité entre les deux gênes. L'antigène DR
n'est pas directement impliqué, mais un locus voisin, DQ, l'association avec DR
résultant d'un déséquilibre de liaison entre les loci DQ et DR. Par exemple,
l'haplotype DR4 peut être associé à deux haplotypes, DQ7 et DQ8, mais 90% des
DR4 DID sont DQ8. Les gènes de susceptibilité ont, dans la plupart des cas, deux
séquences nucléotidiques particulières, DQ béta 57 aspartate négatif et DQ alpha
52 arginine positif, leur combinaison conférant la susceptibilité au DID. Le rôle des
molécules HLA semble lié à leur fonction de site de liaison des antigènes qu'elles
présentent ensuite aux lymphocytes T pour déclencher la réponse immune. La
présence de certains acides aminés peut déterminer la spécificité de la molécule DQ
à présenter un auto-antigène pancréatique.
La prédisposition génétique au DID dépend aussi d'autres gènes, encore mal
connus chez l'homme. Des associations ont été décrites avec le gène de l'insuline
(chromosome 11p) et avec des marqueurs polymorphes sur les chromosomes 15q
(IDDM3), 11q (IDDM4), 6q (IDDM5) et 2q (IDDM6). L'effet de ces gènes est
modéré et on ignore comment ils interagissent avec les gènes HLA pour déterminer
la susceptibilité au DID.
173
dirigés contre la sérumalbumine ou la ß-lactoglobuline bovines. L'immunisation
contre ces protéines pourrait déclencher des réactions auto-immunes avec des
peptides de surface des cellules ß ayant des homologies de structure.
2.3. Auto-immunité
La nature auto-immune de la destruction des cellules ß est établie sur une série
d'arguments: l'infiltration lymphocytaire des ilôts de Langerhans (insulite) ; la
possibilité de transmettre le DID par les lymphocytes d'animaux malades ;
l'association fréquente du DID à des maladies auto-immunes ; l'existence
d'anticorps anti-cellules d'ilôts au moment du diagnostic de DID et leur forte valeur
prédictive du DID chez les apparentés de patients DID ; l'efficacité des
thérapeutiques immunosuppressives dans les diabètes expérimentaux et humains.
On ne connait pas le ou les antigène(s) cible(s) de l'agression immunitaire. Les
anticorps anti-cellules d'îlots (ICA), très souvent détectés au moment du diagnostic,
sont secondaires à l'agression immunitaire des îlots. D’autres anticorps, anti-
insuline, anti-GAD (acide glutamique décarboxylase), anti-IA2, sont décelés avant
tout traitement par l'insuline, surtout les jeunes enfants. Leur rôle dans la
destruction de la cellule ß reste à préciser. Le rôle des macrophages et des
lymphocytes T a été démontré, mais les mécanismes de rupture de tolérance vis-à-
vis d'un autoantigène restent en grande partie méconnus.
3. Diagnostic
174
le tableau clinique étant essentiellement une deshydratation aigüe, particulière par
l'absence de symptomes gastro-intestinaux et la conservation habituelle de la
diurèse.
Le nouveau-né :
L'hyperglycémie des premiers jours de vie a la particularité d'être dans certains cas
transitoire. Aucun critère -à part un contexte familial de DID- ne permet , au
départ, de prévoir si l'insulinothérapie va être arrêtée dans les semaines ou
quelques mois qui suivent, ou si elle est définitive.
4. Evolution
175
font partie du quotidien du patient DID. Elles sont volontiers sans manifestations
cliniques, dépistées par la surveillance quotidienne. Elle sont le plus souvent légères
(paleurs, sueurs, tremblements, faim, vision trouble ou double, troubles du
caractère ou du comportement …) mais peuvent aller jusqu'au coma. Les
convulsions nocturnes des jeunes enfants sont particulièrement angoissantes pour
les parents et doivent absolument être évitées.
L'acido-cétose
Souvent présente au moment du diagnostic, est un évènement rare en cours
d'évolution en dehors de grosses erreurs, souvent volontaires, de traitement.
5. Principes du traitement
Le traitement du diabète sucré consiste à remplacer l'insuline que le pancréas ne
produit plus.
176
L'insuline est administrée selon un rythme précis correspondant aux variations des
besoins sur le nycthémère. Les dose d'insuline sont décidées par le patient d'après
les résultats de l'auto-surveillance.
La diététique complète le traitement hormonal substitutif. Son objectif est
d'assurer un bon équilibre nutritionnel et un apport alimentaire régulier, en horaires
et en quantité, pour limiter les variations glycémiques.
Enfin, le traitement prend en compte l'activité physique, qui a des effets bénéfiques
sur l'action de l'insuline mais fait varier les besoins en insuline.
5.1. Insulinothérapie
Insulines et schémas thérapeutiques :
L'insuline est extraite du pancréas de porc ou produite par génie génétique.
Solubilisée, cette insuline a -par voie sous-cutanée-une action intense de 6 heures
(rapide). Par adjonction de Protamine ou de zinc, on obtient des insulines d'action
plus faible mais prolongée : insulines intermédiaire (plus de 12 heures) ou retard
(environ 24 heures).
L'insuline doit être administrée en quantité faible la nuit, en quantité plus
importante à chaque repas. L'injection d'insuline rapide 30 minutes avant chaque
repas (avec des stylos injecteurs) et d'une insuline d'action prolongée (ou la pompe
d'insuline) pour la nuit couvrent au mieux ces besoins. Cependant, beaucoup
d'enfants font une injection d'un mélange rapide-intermédiaire le matin et le soir.
La dose d'insuline habituellement nécessaire chez l'enfant est d'environ 1 Unité/kg.
L'insuline est injectée en sous-cutané profond, dans le ventre ou les bras le jour,
dans les cuisses ou les fesses le soir, en variant le point d'injection dans une même
zone, en dehors des lipodystrophies et en dehors d'une zone activité physique.
Surveillance et carnet de traitement
La surveillance doit couvrir les 4 périodes de la journée, chacune dépendant de
l'action d'une insuline. Elle comprend :
les signes physiques : ceux d'hyperglycémie doivent rester exceptionnels,
alors que les petites hypoglycémies sont inévitables et un repère
fondamental pour l'adaptation des doses ;
la glycémie, de plus en plus simple, rapide et acceptable ; précise mais
ponctuelle.;
la glycosurie, évaluation indirecte de la glycémie, mais non invasive et
permet de surveiller une longue période et de rechercher simultanément la
cétonurie.
Le carnet de traitement, essentiel pour l'adaptation des doses d'insuline, est
souvent mal utilisé : les enfants ne savent pas le lire et les il est souvent faux. Les
mémoires des analyseurs glycémiques devraient aider à résoudre une partie de ces
problèmes.
Adaptation des doses l'insuline
Les doses d'insuline sont adaptées par le patient avant chaque injection, en
fonction des observations consignées dans le carnet de traitement. Selon les
résultats obtenus la veille ou les jours précédents, la dose est répétée ou corrigée
(adaptation rétrospective). On tient aussi compte de la glycémie mesurée avant
l'injection (adaptation compensatoire) et de l'activité physique prévue (adaptation
anticipatoire). Pour être aisément applicables par les enfants, les règles
d'adaptation doivent être d'une grande simplicité.
177
On fait Si les résultats sont
La même dose Bons
Un peu élevés
Trop élevés un seul jour
Plus Trops élevés plusieurs jours de suite
Moins Trops bas (Hypoglycémie)
5.2. Alimentation
La diététique complète le traitement hormonal substitutif. Son objectif est d'assurer
un bon équilibre nutritionnel et un apport alimentaire régulier, en quantité et en
horaires, pour limiter les variations glycémiques.
L'alimentation équilibrée est celle que l'on souhaiterait pour tous les enfants, en
particulier sans excès de graisses et sans insuffisances en glucides et calcium. Les
repas doivent donc être variés. Le premier rôle de la diététicienne est de corriger
les plus importantes erreurs nutritionnelles.
Le rythme de l'alimentation est adapté au schéma thérapeutique. En plus des trois
repas principaux, les collations de la matinée et du coucher ont surtout comme rôle
de prévenir les hypoglycémies au moment où la digestion des glucides se termine
alors que l'activité de l'insuline, essentiellement la rapide, est encore très forte. Par
contre, l'action de l'insuline en fin d'après-midi, toujours faible, s'accommode mal
du goûter.
Le rythme des repas doit être régulier : à heures aussi fixes que possible; 30
minutes après les injections d'insuline. Un repas ne doit jamais être sauté. Entre les
repas, il ne faut pas grignoter.
L'importance des repas doit être régulière d'un jour à l'autre. Chaque repas doit
contenir un aliment glucidique.
Les produits sucrés doivent être consommés avec une extrême modération, très
occasionnellement, et uniquement pendant les repas. Les boissons sucrées sont à
proscrire. Il est préférable d'habituer l'enfant à des saveurs non sucrées que lui
recommander l'emploi des édulcorants.
En cas d'exercice physique, il est toujours préférable de diminuer la dose d'insuline.
La prise d'aliments énergétiques supplémentaires n'est justifiée que lorsqu'on n'a
pas pu anticiper l'exercice, ou lorsque l'on effectue un exercice intense de longue
durée.
5.3. Exercice
L'exercice physique est un élément essentiel du bien-être des patients DID. Les
changements de rythme qu'ils provoquent sont cependant souvent source de
difficultés d'adaptation des doses. En pratique, il faut diminuer la dose d'insuline si
l'on vient de faire un exercice ou si l'on peut prévoir d'en faire un. Un supplément
alimentaire doit être pris si un exercice n'a pas été prévu ou s'il est suffisamment
prolongé et intense.
178
la pratique du traitement s'acquièrent progressivement lors des consultations, de
séminaires de formation ou de séjours de vacances pour enfants diabétiques.
L'intervention d'infirmières spécialisées à domicile s'avère souvent utile. Pour avoir
un rôle actif dans cette prise en charge, le médecin-traitant peut participer à des
stages de formation pratique. L'adhésion des familles à une Association (Aide aux
Jeunes Diabétiques) est essentielle pour l'entretien des connaissances pratiques et
l'accès à une information de qualité.
Suivi médical :
La surveillance médicale du DID doit être assurée tous les 2-3 mois, plus si
nécessaire. La consultation a pour but de surveiller la croissance et l'état clinique,
d'évaluer l'équilibre glycémique par l'examen du carnet de traitement et le dosage
de l'hémoglobine glycosylée, et de faire progresser l'enfant et ses parents dans la
pratique du traitement.
L'hémoglobine glyquée (HbA1C) est un critère objectif de l'équilibre glycémique.
Dosable en micro-prélèvement, elle reflète l'équilibre glycémique moyen des deux
derniers mois. On peut aussi doser la fructosamine, qui reflète l'équilibre
glycémique d'environ deux semaines.
Un bilan de santé plus complet est à faire chaque année. Il est l'occasion de
renouveler les entretiens diététique et psychologique et de rechercher des
altérations lipidiques et des lésions rénales (microalbuminurie) oculaires (fond
d'oeil, angiographie) ou nerveuses (conduction nerveuse) débutantes.
Suivi psychologique :
La prise en charge du diabète est souvent compliquée par une mauvaise
compliance au traitement (analyses, carnet de traitement et adaptation des doses
d'insuline), due au caractère très contraignant du traitement. Les troubles du
comportement alimentaire sont également fréquents. L'enfant diabétique a un
risque élevé de développer des complications psychologiques. La recherche des
enfants à risque et d'approches psychologiques adaptées sont aussi importantes
que l'insulinothérapie et la diététique.
6. Dépistage et prévention
L'origine auto-immune du DID ayant été établie, des essais de traitements
immuno-suppresseurs ont été conduits, pour tenter de freiner la destruction des
cellules ß restant encore au moment du diagnostic. Chez l'homme, les résultats les
plus intéressants ont été obtenus avec la Ciclosporine A : un plus grand nombre de
patients a présenté une rémission qu'avec un placebo, mais le pourcentage et la
durée des rémissions sont restées limitées. Divers essais sont en cours ou en
préparation, mais aucune étude contrôlée n'a actuellement permis d'obtenir des
résultats équivalents à ceux de la ciclosporine. Les thérapeutiques
immunosuppressives sont efficaces, chez l'animal, lorsqu'elles sont mises en œuvre
suffisamment tôt. Elles doivent donc être appliquées chez l’homme avant
l’apparition des signes cliniques. C'est l'objectif du dépistage.
Le dépistage peut être pratiqué dans les fratries de patients DID. Leur risque global
est de l'ordre de 5 %, mais les sujets HLA DR3,4 et/ou qui ont deux haplotypes en
commun avec le sujet diabétique ont un risque de 10-20 %. Le risque est presque
nul chez les frères et soeurs HLA-différents du sujet DID. L'absence d’anticorps n'a
pas la même valeur d'exclusion puisqu’ils peuvent être absents chez des nouveaux
DID. Le DID survient chez environ 1 % des sujets ICA négatifs, 3-5 % des sujets
ayant des taux plus faibles d'ICA et plus de 50 % des sujets ayant plusieurs
anticorps à taux élevés. En pratique, le risque dans les fratries est évalué par les
marqueurs génétiques et immunologiques, et par la mesure de la tolérance au
glucose (hyperglycémie provoquée orale) et de la sécrétion d'insuline
179
(hyperglycémie provoquée intra-veineuse).
La valeur prédictive des facteurs de risque génétiques et immunologiques est peu
connue chez les parents et les enfants de sujets DID, ainsi que dans les populations
non apparentées à des patients DID. Le dépistage y est donc peu pratiqué.
Références Bibliographiques
Czernichow P, Dorchy H, Diabétologie pédiatrique. Doin Editeur, Paris 1989.
Kinmonth AL, Magrath G, Reckless JPD and the Nutrition Subcommittee of the
Professional Adivsory Committee of the British Diabetic Association. Dietary
recommendations for children and adolescents with diabetes. Diabetic medicine
1989, 6 : 537-547.
National Diabetes Data Group, Classification and diagnosis of DIabetes Mellitus
and other categories of glucose intolerance. Diabetes, 1979, 28 : 1039-1057.
Skyler JS, Skyler DL, Seigler DE, O'Sullivan MJ. Algorithms for adjustment of insulin
dosage by patients who monitor blood glucose. Diabetes Care 1981, 4 : 311-318.
180
TRAITEMENT DU DIABETE SUCRÉ (n° 330 -
331 - 332)
181
psycho-socio-culturelle. Des glycémies « normales » (grossesses, complication
microangiopathique) sont finalement moins souvent nécessaires que des
« bonnes » glycémies (long passé de diabète de type 1 sans complication).
Le fractionnement de l’insuline techniquement et psychologiquement lourd,
chercher à mimer au mieux la sécrétion physiologique d’insuline.
Toutes les insulines se valent, seul le maniement compte.
La découverte de l’impact de l’éducation a été aussi importante sur la mortalité du
diabétique de type 1 que la découverte de l’insuline.
Les complications de l’hypoglycémie sont essentiellement d’ordre psychologique.
Les modifications comportementales (planification alimentaire, exercice physique
significatif) sont plus importantes et prioritaires dans la prise en charge du
diabète de type 2, bien avant les médicaments.
La très rare acidose lactique est la seule complication préoccupante des
biguanides. Les hypoglycémies sous sulfamides sont rarement graves mais
fréquentes.
1. Objectifs du traitement
182
1.2. Autres objectifs :
Le traitement du diabète ne peut se limiter à la seule lutte contre l'hyperglycémie :
le risque de complication macro-vasculaire dépend peu de l'équilibre glycémique.
2.1. Diététique
La diététique du diabète a trois objectifs
limiter l'hyperglycémie, mais aussi éviter les hypoglycémies,
permettre une réduction pondérale si nécessaire,
diminuer le risque d'athérome
Le "régime diabétique" correspond en fait à l'alimentation équilibrée que tout sujet
devrait suivre : Apports caloriques assurés essentiellement par les glucides
complexes (50 % des calories totales, ce qui revient le plus souvent à augmenter la
proportion de féculents dans l'alimentation). Apports lipidiques limités à 35% des
calories totales, répartis par tiers en acides gras saturés, poly-insaturés et mono-
insaturés. Alimentation riche en fibres.
Aucun aliment n'est interdit. L'opposition entre sucres rapides" et sucres lents" est
en partie obsolète : fibres et lipides ralentissent l'absorption des glucides,
permettant ainsi la consommation d'un dessert sucré en fin de repas. En revanche
un glucide complexe (pain blanc par exemple) pris isolément est aussi
hyperglycémiant que le saccharose.
La répartition des glucides est particulièrement importante chez les patients traités
par sulfamides et surtout par insuline : les trois repas doivent apporter une
quantité minimale de glucides, équivalente d'un jour à l'autre. Afin de pouvoir
varier leur alimentation les patients doivent connaître et utiliser les notions
d'équivalence glucidiques (Tableau II). Les collations ne sont pas systématiques.
Elles sont parfois utiles chez le diabétique noninsulinotraité pour aider au suivi d'un
régime hypocalorique. Chez le diabétique insulinotraité leur introduction se discute
au cas par cas : elles sont utiles s'il existe une tendance hypoglycérnique en fin de
matinée, d'après midi, ou en début de nuit.
183
5 % : Lait, yaourts, légumes verts, tomates.
10 % : Artichauts, betteraves, carotte, celeri, navets, petits-pois, salsifis.
15 % : Fruits (sauf banane et raisin)
20 % : Pommes de terre, pâtes et riz cuits, légumes secs cuits, banane, raisin.
55 % : Pain.
75 % : Biscottes.
100 g de pain (1/2 baguette) = 6 biscottes
40 g de pain = 100 g de pommes de terre (2 pommes de terre de la taille d'un
oeuf)
1 biscotte = 15 g de pain
100 g de lait = 2 petits suisses = 1 yaourt
100 g de pommes de terre cultes = 100 g de riz cuit = 100 g de semoule cuite =
100 g de légumes secs cuits = 100 g de pâtes cuites.
100 g de légumes à 5 % = 50 g de légumes à 10 %
100 g de fruits à 15 % = 1/2 banane = 80 g de raisin
2.3.1.Biguanides
Il n'existe plus en France que la Metformine
Glucophage Retard (663 mg de Metformine base)
Glucophage (390 mg de Metformine base)
Stagid (280 mg de Metformine base)
Glucinan (205 mg de Metformine base)
Elle n'est pas métabolisée, ne se lie pas aux protéines plasmatiques et est
rapidement excrétée par le rein. Sa demi-vie est de 1,5 à 4,5 heures chez un sujet
normal.
Mode d'action :
La Metformine diminue peut-être modestement l'absorption intestinale du glucose.
Fait fondamental, elle ne modifie pas l'insulinosécrétion. La molécule agit
essentiellement en diminuant la néo-glucogénèse hépatique. Elle augmenterait la
sensibilité à l'insuline.
184
Effets indésirables
Troubles digestifs (5 à 20 %) douleurs abdominales, diarrhées, vomissements, goût
métallique. Le plus souvent ces troubles surviennent au début du traitement et
disparaissent après les premières semaines. Ils peuvent apparaître en cours de
traitement ; dans cette circonstance, il faut suspecter de principe une pathologie
digestive associée. Ils sont réduits par une posologie progressive et une prise en fin
de repas. Toutefois malgré de telles précautions, certains patients demeurent
intolérants.
L'acidose lactique : cette complication gravissime est exceptionnelle avec la
metformine : 1 cas pour 4000 années-patients en France. Dans tous les cas
recensés, un non-respect des contre-indications est retrouvé.
Les biguanides ne donnent jamais d'hypoglycémies sauf associés à l'alcool.
Contre-indications absolues
Insuffisance rénale, même modérée car elle entraîne l'accumulation du produit
actif.
Age avancé (70 ans ou plus d'âge physiologique), car il s'accompagne toujours
d'une réduction de la filtration glomérulaire.
Insuffisance hépatocellulaire, qui est par elle même une cause d'augmentation des
lactates (diminution de la consommation par atteinte de la néoglucogenèse).
Insuffisance respiratoire, insuffisance cardiaque décompensée, insuffisance
coronaire instable, ischémie aiguë ou subaiguë d'un membre, à l'origine d'une
hyperproduction de lactates par augmentation du métabolisme anaérobie.Grossesse
et lactation.
Contre-indications relatives, à apprécier au cas par cas :
Cirrhose sans insuffisance hépatocellulaire.
Alcoolisme chronique.
Patients à risque d'insuffisance respiratoire aigu (asthme sévère ... ).
Insuffisance cardiaque bien compensée.
Angor stable.
Artériopathie des membres inférieurs, sans ischémie aiguë.
Associations à utiliser avec prudence :
Diurétiques, inhibiteurs de l'enzyme de conversion, AINS, aminosides, susceptibles
de provoquer une insuffisance rénale aiguë.
Précautions d'emploi :
Arrêt systématique 48 heures avant injection d'iode (UIV, scanner, artériographie)
ou intervention chirurgicale. Attendre 2 jours pour reprendre le traitement.
Arrêt systématique dans toute situation pouvant se compliquer de choc,
déshydratation ou insuffisance rénale : sepsis, pathologie digestive aiguë, angor
instable...
Ces précautions d'emploi doivent être connues des patients, que l'on informera
aussi des signes prémonitoires de l'acidose lactique : crampes musculaires,
douleurs abdominales et troubles digestifs, asthénie intense.
185
Leur demi-vie est très variable en fonction des molécules, de 6 à 40 heures
(tableau III). Cette demi-vie est inférieure à la durée de l'effet hypoglycémiant. La
cinétique est fortement influencée par l'insuffisance rénale et/ou hépatique.
Mode d'action
Ils agissent par stimulation de la sécrétion d'insuline.
Effets indésirables
L'effet indésirable principal est le risque d'hypoglycémies.
Les hypoglycémies peu sévères sont fréquentes et sont un obstacle à
l'amaigrissement (fringales, resucrage). Les hypoglycémies sévères sont plus
rares, menaçant les patients âgés et/ou polymédiqués, mal informé, en cas de
jeûne glucidique, de prise d'alcool, ou d'insuffisance rénale. Une hypoglycémie
sévère prolongée peut s'accompagner de séquelles neurologiques graves, voire de
décès...
D'autres effets indésirables sont décrits et sont rares ou exceptionnels : Rashs en
début de traitement, taxidermie, flush après ingestion d'alcool (chlorpropamide),
leucopénie, thrombopénie, cytolyse, ictère, hyponatrémie de dilution par
potentialisation de l'ADH (chlorpropamide).
95 8 R 70 % <5
Glibornuride (Glutril)
93 12 R70% <1
Gliclazide (Diamicron)
Glipizide(Glibénèse,
Miinicliab) 92-96 3- 7 R90% <2
Contre-indications
Insuffisance rénale, insuffisance hépatique, grossesse, lactation.
Interactions médicamenteuses:
186
L'effet hypoglycémiant des sulfamides hypoglycémiants peut être majoré :
Essentiellement par le miconazole.
Par la prise d'autres médicaments ayant une forte affinité pour les protéines
de transport (sulfamides diurétiques et antibactériens).
Par une réduction de l'élimination rénale ou hépatique induite par les
salicylés, la phénylbutazone, le probénécide, l'allopurinol et le clofibrate.
Par l'ingestion aiguë d'alcool, de cimétidine, cyclophosphamide.
A l'inverse, il peut être entravé par :
Les diurétiques thiazidiques, les glucocorticoïdes, les bétamimétiques, les
inducteurs enzymatiques.
Les sulfamides hypoglycémiants augmentent l'activité anticoagulante des
coumariniques.
Précautions d'emploi :
Avertir les patients du risque hypoglycémique en cas de repas insuffisant (la prise
d'un sulfamide doit toujours être suivie de l'absorption de glucides), d'exercice
physique inhabituel, d'absorption d'alcool à jeun, d'automédication par salicylés.
2.3.3. Insuline
L'insuline est une hormone polypeptidique, obtenue soit par extraction à partir de
pancréas de porc ou de boeuf, soit par génie génétique (insulines "humaines").
Outre son effet hypoglycémiant, l'insuline à une action anabolisante (antilipolytique
et antiprotéolytique).
L'insuline n'est active que par voie parentérale. La voie souscutanée est la plus
utilisée, mais les voies intraveineuses et intramusculaires sont aussi utilisables,
exclusivement pour les insulines "ordinaires".
L'insuline est commercialisée aux concentrations de 40 U/mI pour l'injection à l'aide
de seringues, ou 100 U/ml pour l'injection au stylo injecteur ou à la pompe à
insuline. Outre de l'insuline, ces préparations contiennent des antiseptiques et
stabilisateurs, et éventuellement du zinc et/ou de la prolamine pour prolonger son
action en ralentissant sa résorption sous-cutanée.
Trois firmes fabriquent des insulines comparables, que l'on classe selon leur durée
d'action (tableau IV).
187
Tableau IV : Principales insulines
Effets secondaires
Ils sont pratiquement absents, l'insuline étant une hormone naturelle, dont seule la
voie d'administration est nonphysiologique :
Lipodystrophies : il s'agit de modifications de la graisse sous cutanée
(hypertrophies ou atrophies) apparaissant au niveau des sites d'injection. Elles
modifient la résorption de l'insuline. Elles sont plus fréquentes avec les insulines
animales.
Allergies : exceptionnelles, il s'agit en fait d'allergies aux constituants des
solutions d'insuline (prolamine, produits stabilisants, antiseptiques ...). Avec les
insulines animales peuvent apparaître des anticorps anti-insuline, sans
conséquence clinique.
Prise de poids : conséquence de l'effet anabolisant de l'insuline. Cette prise de
poids n'est pas inéluctable. Cependant, en l'absence de mesure diététique, la
tendance spontanée des patients insulinotraités est de revenir à leur poids
maximal antérieur.
Hypoglycémies : ce n'est pas un effet indésirable de l'insuline (c'est même le
but recherché !), mais la conséquence inévitable d'un bon équilibre glycémique.
Conservation
188
L'insuline est conservée à 4°C, mais les flacons entamés doivent être conservés à
température ambiante (pour une durée d'un mois maximum). Elle ne doit jamais
être congelée, ni exposée aux grosses chaleurs (voiture en plein soleil).
Administration
L'injection sous cutanée est simple (document 1). L'emploi d'alcool pour désinfecter
la peau est déconseillé car elle favorise l'apparition de lipodystrophies. Le point
d'injection doit être différent tout les jours (l'injection répétée au même point
provoque l'apparition de lipodystrophies), mais la zone d'injection ne doit pas être
changée trop fréquemment, car la cinétique de résorption de l'insuline varie d'un
site d'injection à l'autre.
L'injection doit habituellement être faite 10 à 20 minutes avant un repas. Le
respect des horaires d'injection et de repas contribue à l'obtention d'un bon
équilibre glycémique.
L'INJECTION D'INSULINE
Conservation :
Les réserves d'insuline se conservent au réfrigérateur.
Les flacons entamés sont gardés à température ambiante.
Seul le gel et les fortes chaleurs (40°C ou plus) détruisent l'insuline.
Horaire :
L'injection se fait habituellement 1/4 d'heure avant le repas.
Préparez le matériel nécessaire.Vérifiez la date de péremption sur le
flacon.
Lavez-vous les mains
Pour les insulines"retard" (troubles) Roulez le flacon entre les deux
mains.
Désinfectez le bouchon du flacon
Piquez droit à travers le bouchon du flacon
Retournez le flacon et aspirez un peu plus que la quantité d'insuline
désirée
Tapotez sur la seringue pour faire monter les bulles d'air
En poussant sur le piston, chassez les bulles puis ajustez la dose
d'insuline.
Pour éviter que le piston ne remonte tout seul quandvous aspirez
l'insuline: Injectez de temps en temps une seringue d'air dans le flacon.
Tendez la peau entre le pouce faites un gros pli entre le pouceet
l'index).Piquez droit.
Vous pouvez injecter l'insuline dans ces zones:et l'index (dans les zones
maigres,
Poussez à fond le piston pour injecter l'insuline.
Les seringues neservent qu'une fois: jetez-la après usage.
N'oubliez pas denoter la dose d'insuline sur votre carnet.
Utilisez les toutes, mais sans en changer trop souvent, par exemple :
Pendant un mois faites l'injection le matin dans le ventre, le soir dans les
cuisses.Le mois suivant : dans les bras lematin, dans les fesses le soir.
189
Par contre, à l'intérieur d'une zone, il ne faut jamais piquer deux jours de
suite au même point, mais utiliser toute la zone, en décalant chaque jour
le point d'injection de 2 cm environ.
Si vous sentez que sous la peau lagraisse fait des bosses (ou des creux),
(lipodystrophies), changez de zone bd'injection et parlez-en à votre
diabétologue
Posologie
Il n'y a pas de dose standard pour l'insuline, la posologie est déterminée de
manière pragmatique, en fonction de l'efficacité des injections précédentes. En
moyenne les besoins d'un diabétique insulinodépendant sont de 0,5 U/kg/jr. Dans
certains cas il existe une insulino-résistance (surpoids, infection, prise de
corticoïdes ...) qui explique une augmentation des besoins jusqu'à 1 U/kg/jr, voire
plus. L'utilisation de doses supérieures est nécessaire dans les situations d'urgence
métabolique. Il n'y a pas de dose maximum toxique : les doses d'insulines peuvent
être augmentées tant qu'il n'y a pas d'hypoglycémie.
Principaux schémas insuliniques
Une multitude de schémas sont possibles pour l'administration d'insuline, les plus
fréquemment utilisés sont représentés sur la Figure 1.
Quel que soit le schéma employé il est nécessaire d'assurer un débit de base
(assuré par une injection d'insuline lente ou deux injections d'insuline semi-lente),
auquel sera éventuellement ajouté des bolus d'insuline rapide pour éviter les
hyperglycémies post-prandiales. En effet chez le sujet normal, l'insulinémie n'est
jamais nulle, même après plusieurs heures de jeûne. Chez le diabétique
insulinodépendant la sécrétion d'insuline endogène est quasi-nulle et ne suffit
même pas à assurer ce débit de base sans lequel une hyperglycémie survient à
jeun.
Les schémas les plus complexes sont généralement ceux permettant d'obtenir le
meilleur équilibre glycérnique tout en permettant une plus grande souplesse
d'horaires, d'alimentation et d'activité physique. Les schémas les plus simples ne
permettent pas d'obtenir d'aussi bons résultats et obligent à une vie plus régulière.
L'utilisation de pompe portable délivrant de l'insuline par voie sous-cutanée à débit
variable permet de s'approcher d'une sécrétion d'insuline physiologique.
Cependant elles sont beaucoup plus contraignantes que les injections multiples
pour des résultats peu supérieurs et sont donc plus rarement utilisées.
Adaptation des doses
Chez un même sujet les besoins en insuline varient fréquemment de quelques
unités sans raison apparente. Ils sont parfois brutalement divisés par 2 en cas
d'activité physique intense, ou multipliés par 2 ou plus en cas de maladie
intercurrente, de prise de corticoïde, de stress aigu.
Pour obtenir un équilibre glycémique correct il est donc nécessaire d'adapter les
doses d'insuline.
Cette adaptation est basée essentiellement sur les résultats glycémiques obtenus
dans les jours précédents, mais doit aussi tenir compte des événements prévisibles
dans la période à venir.
A titre d'exemple la Figure 2 indique la méthode à suivre pour adapter l'insuline
dans un schéma à deux injections d'insuline semi-lente. Pour les schémas plus
complexes, le raisonnement reste identique, mais nécessite de connaître la durée
190
d'action de chaque insuline utilisée.
3. Stratégies thérapeutiques
3.1.1. Diététique
Il s'agit de l'intervention principale dans la prise en charge du diabétique non
insulinodépendant. Il est indispensable de réduire le surpoids pour réduire
l'insulinorésistance, améliorer l'insulinosécrétion et baisser les glycémies. Dans un
premier temps, les apports caloriques seront réduits d'environ 30% par rapport aux
données recueillies par l'interrogatoire alimentaire.
191
antidiabétique oral à un diabétique qu'on verrait pour la première fois sans avoir
tenté le plus sincèrement possible de mettre en place une planification alimentaire
efficace.
Biguanides
En France il s'agit fréquemment du traitement institué en première intention en cas
de surpoids et d'efficacité insuffisante des mesures hygiéno-diététiques.
La forme retard est souvent préférée à la forme simple. La posologie maximale est
2 cp de Glucophage retard.
Sulfamides hypoglycémiants
Ils sont prescrits quand les objectifs glycémiques ne sont pas atteints avec la
planification alimentaire et les biguanides, ces derniers étant maintenus ou non. Ils
sont parfois utilisés en première intention, chez le diabétique non-
insulinodépendant sans surpoids, ou en cas de contre-indication aux sulfamides.
La posologie maximale est de 3 comprimés par jour (avant chaque repas). Il est
possible de prescrire 4 comprimés par jour, mais cela augmente peu l'effet
hypoglycémiant.
192
l'insulinothérapie.
Normoglycémie absolue : 0,7 à 1 g/l avant repas ; ≤ 1,2 g/l après repas
3 ou 4 injections/jr (rapide et retard) ; diététique très rigoureuse
HGT : 6 à 7 tous les jours ; adaptation : 1 à 2 jours ;
3 à 5 hypo/semaine
Consultation au minimum 1/mois
Objectif transitoire (≤1 an) pour passer un "cap" critique
Normoglycémie : 0,8 à 1 g/1 avant repas ; ≤ 1,4 g/1 après repas
2, 3 ou 4 injections/jr (rapide et retard) ; diététique rigoureuse
HGT = 3 à 4/jr ; adaptation : 2 à 4 jours
2 à 4 hypo/semaine, 1 coma/an
Consultation : de 1/mois à 1/trimestre
Objectif à maintenir pendant de longues années : compromissions et périodes de
laisser-aller inévitables
Glycémies "correctes" : 1 à 1,4 g/1 avant repas ; 1 à 1,8 g/1 après repas
2 injections/jr (retard ± rapide) ; conseils diététiques
HGT = 2 à 3/jr ; adaptation : 1 semaine ;
≈ 1 hypo/semaine, 0 coma hypo
Consultation : de 1/trimestre à 1/6 mois
Sécurité (pas de complication métabolique aiguë) :1,3 g à 2,5 g/l
193
1 à 2 injections/jr (retard) ; pas de "régime" ;
HGT ≈ 1/jr ; doses "fixes" ; aucune hypoglycémie
Consultation de 1/mois à 1/trimestre
4. Education
L'éducation fait partie intégrante du traitement du diabète. Elle à un triple but :
éviter les complications aiguës, améliorer l'équilibre glycémique, et favoriser
l'adhésion au traitement.
En raison de la grande diversité des diabétiques et du diabète, les objectifs de
l'éducation ne peuvent être les mêmes pour tous. L'identification des ces buts
nécessite de prendre en compte la dimension sociale, culturelle et psychologique
des patients.
Cependant un objectif minimum peut être défini : prévenir les complications aiguës.
Tous les diabétiques devraient connaître les signes cliniques de l'hyperglycémie.
Les DID devraient savoir reconnaître une cétose et connaître son caractère
inquiétant. Les diabétiques traités par sulfamides ou insuline devraient savoir
reconnaître et traiter une hypoglycémie (toujours avoir du sucre sur soi), ceux
traités par biguanides devraient connaître leurs précautions d'emploi et les signes
prémonitoires de l'acidose lactique. Tous les diabétiques devraient apprendre à ne
194
pas négliger les plaies, même minimes, des pieds.
L'éducation des DNID doit surtout porter sur la diététique et la réduction des autres
facteurs de risque vasculaire. Les interactions avec les sulfamides hypo-
glycémiants, les situations susceptibles de déséquilibrer le diabète devraient être
connues.
Les diabétiques insulinotraités doivent apprendre la technique d'injection, et les
principes d'adaptation des doses (dans la vie normale et dans des circonstances
particulières comme le sport, les voyages ...). Ils doivent connaître les
circonstances à l'origine d'hypoglycémies (document 3). Leur entourage doit
apprendre à reconnaître et à traiter (glucagon) les hypoglycémies. lis doivent
connaître la conduite à tenir en cas de cétose (document 4) ou de vomissements.
L'éducation diététique doit leur permettre de diversifier leur alimentation sans
préjudice pour leur équilibre glycémique.
DID et DNID devraient savoir pratiquer une autosurveillance glycémique et urinaire.
Celle-ci est indispensable (plusieurs fois par jour) aux diabétiques insulinotraités,
pour leur permettre d'adapter les doses d'insuline. Elle est souhaitable (quelques
fois par semaine) chez les diabétiques non-insulinotraités comme lisécurité's pour
éviter les complications métaboliques aiguës, mais aussi pour augmenter leur
motivation et pour apprécier l'équilibre glycémique.
Concernant l'autosurveillance glycémique, aucun horaire n'est plus important que
les autres : il est donc important qu'une variation judicieuse des horaires de
contrôles permette de documenter aussi bien les glycémies pré- que post-
prandiales.
Les femmes diabétiques devraient recevoir une information sur la contraception et
la grossesse.
Une information simple, objective, mais non angoissante, doit être donnée sur la
physiologie du diabète et les complications.
5.1. L'hypoglycémie.
QU'EST-CE QU'UNE HYPOGLYCÉMIE ?
Une hypoglycémie est une baisse excessive (=hypo) du taux de sucre dans le sang
(=glycémie), en dessous de 0,60 g/l.
COMMENT RECONNAITRE L'HYPOGLYCEMIE ?
Vous pouvez savoir que vous êtes en hypoglycémie parce que vous avez 1, 2 ou 3
des signes suivants (rarement plus, généralement toujours les mêmes), classés du
plus fréquent au moins fréquent:
Sueurs
Tremblements
Faim
Troubles de la vue
Fatigue soudaine
Nervosité
195
Vertiges
Sentiment de fonctionner au ralenti
Sentiment de bien-être ou de mal-être
Imprécision des gestes
Froid
Sentiment de perdre connaissance
Coeur qui s'accélère ou qui bat fort
Votre entourage peut reconnaître que vous êtes en hypoglycémie parce que
vous avez un ou plusieurs des signes suivants:
Pâleur
Sueurs
Troubles de la parole
Comportement bizarre, colère sans raison
Tremblements
Regard vide
Angoisse
Etat semblable à l'ivresse
QUE FAIRE SI VOUS AVEZ CES SIGNES ?
Agir rapidement, mais sans précipitation et sans affolement:
Si votre matériel d'auto-surveillance est à proximité : vérifier la glycémie (on
peut aussi le faire juste après avoir mangé les sucres)
Manger 3 morceaux de sucre
Puis, si le repas suivant est loin, manger un féculent (Pain, biscotte,
croissant,gâteau sec ... ), Il faut 5 à 10 minutes pour que le sucre agisse,
alors n'engloutissez pas une boite de sucre en 2 minutes !Quand le malaise à
disparu, il faut réfléchir pour trouver sa cause.
QUELLES SONT LES CAUSES DES HYPOGLYCEMIES ?
Il y a 3 causes principales aux hypoglycémies:
Repas non pris après l'injection d'insuline, ou insuffisant en glucides, ou
collation oubliée.
Exercice physique. (Si vous prévoyez un exercice physique important il faut
manger plus avant et après, et/ou baisser l'insuline avant).
Trop d'insuline. Il faudra alors baisser l'insuline correspondante à l'heure de
l'hypoglycérnie.
Autre cause d'hypoglycémie à connaître : la consommation d'alcool à jeun.
UNE HYPOGLYCEMIE EST-CE QUE C'EST GRAVE ?
NON : Même si l'hypoglycémie est profonde, que vous soyez seul, et que
vous tombiez dans le coma, le foie fabrique du sucre : vous vous réveillerez
spontanément après quelques heures et avec un bon mal de crâne. Les
hypoglycémies, même fréquentes, n'abîment pas le cerveau.
MAIS : L'hypoglycémie peut rendre dangereuses certaines situations : si
vous conduisez, si vous êtes en haut d'une grande échelle, si vous pratiquez
certains sports... Alors prenez vos précautions !
196
ET LE COMA?
Il peut arriver si vous n'avez pas senti venir l'hypoglycémie, ou si vous avez trop
tardé pour la corriger, que vous perdiez connaissance.
Il faudra alors que quelqu'un vous fasse une injection de glucagon. Ce geste n'est
pas réservé au médecin. Il est toujours sans danger.
Le glucagon se conserve dans le réfrigérateur. Il s'injecte en intramusculaire (dans
la fesse) ou comme l'insuline en sous-cutané. Il agit en 10 à 15 minutes, mais
parfois une deuxième injection est nécessaire. Après avoir été réveillé par le
glucagon il faudra manger des féculents et rechercher la cause de l'hypoglycémie.
APRES L'HYPOGLYCEMIE...
La glycémie peut être élevée (et il peut y avoir un peu d'acétone dans les urines il
ne faut pas en tenir compte).
AYEZ TOUJOURS DES SUCRES SUR VOUS, AU TRAVAIL, DANS VOTRE
VOITURE....
L'hypoglycémie n'est pas grave, seulement désagréable.
Un bon équilibre du diabète s'accompagne souvent de quelques hypoglycémies.
197
D'abord en surveillant régulièrement son diabète :
Par la mesure de la glycémie
Par le contrôle des urines: 1 fois par jour d'habitude, plus souvent dans les
situations précédentes ou si la glycémie est supérieure à 2,5 g.
Plus tard, parce que les signes suivants apparaissent :
Soif intense, urines abondantes
Fatigue anormale, amaigrissement rapide
Nausées, mal au ventre
6.Surveillance du traitement
6.1. A court terme
Il faut fréquemment vérifier que l'objectif glycémique est atteint, par
l'autosurveillance glycémique, mais aussi par la mesure au laboratoire des
198
glycémies à jeun et post-prandiales. Le dosage de l'hémoglobine glycosylée permet
d'apprécier objectivement l'équilibre glycémique des 2 derniers mois. Cependant
sa fiabilité dépend beaucoup de la méthode de dosage utilisée, et n'est pas toujours
bonne en pratique de ville. Le dosage des fructosamines est plus facile à réaliser,
mais est de moindre intérêt, car il reflète seulement l'équilibre glycémique des 2
dernières semaines.
7. Annexes
Annexe I : Comment débuter une insulinothérapie en situation d'urgence
La mise en route d'une insulinothérapie est une situation à laquelle un interne est
souvent confronté. Rien n'est plus simple, et pourtant cela est rarement bien fait,
par méconnaissance du mode d'action de l'insuline.
Quelles sont les situations nécessitant en urgence le début d'une insulinothérapie ?
Quel que soit le chiffre, une hyperglycémie isolée ne mettra jamais en danger la vie
d'un patient dans les heures, ni même dans les jours qui viennent. Seule la
présence d'une acétonurie > ++ (encore faut-il penser à la chercher), et/ou d'une
déshydratation liée à l'hyperglycémie imposent le début rapide d'une
insulinothérapie.
En réanimation, ou avant une anesthésie, il peut être nécessaire de mettre en route
une insulinothérapie chez un patient jusqu'alors non-insulinotraité. Quel est
l'objectif glycérnique ?
Dans la plus part des situations d'urgence un objectif glycérnique "de sécurité" (1,0
g/1 à 2,5 g/1) est suffisant et acceptable pour au moins quelques jours.
Quelle voie choisir ?
Si le patient peut s'alimenter normalement, la voie sous-cutanée est la voie de
choix.
A chaque fois que l'alimentation est impossible ou difficile, la voie veineuse au
pousse-seringue électrique est la plus maniable.
Quel protocole ?
Il est indispensable d'associer un "débit de base" d'insuline dont le but est de
prévenir l'élévation de la glycémie, à des bolus dont le but est de corriger
rapidement les hyperglycémies. Si la glycémie est normale il ne faut pas arrêter
l'insuline, mais au
199
Seringues à insuline 0,5, 1 ou 2 ml (Microfines + ®) ou Aiguilles pour stylo
(Microfines + ®)
Glucagon : 2 ampoules en réserve (en cas d'acétone) 2 Seringues 5 ml + 2 aiguilles
IM (pour glucagon)
Bandelettes pour glycémie capillaire (selon le lecteur, si pas de lecteur : SM test
20-800®), Bandelettes pour surveillance urinaire (Ketodiastix® ou KetoDiabur®)
Lancettes pour autopiqueur (Microfines +®)
Éventuellement autopiqueur (Glucolet®), Stylo à insuline, lecteur de glycémie
NB 1 : Toujours prescrire un peu plus d'insuline que nécessaire (en cas de perte ou
casse de flacons).
NB 2 : L'insuline et les seringues sont en vente libre en pharmacie. L'ordonnance
n'est utile que pour le remboursement.
NB 3 : Si le patient utilise un stylo, toujours prescrire des flacons et seringues à
garder en réserve au cas où le stylo tombe en panne.
Référence bibliographique :
United kingdom prospective diabetes study 24 : A 6-year, randomized, controlled
trial comparing sulfonylurea, insulin and metformin therapy in patients with newly
diagnosed type 2 diabetes that could not be controlled with diet therapy.
American College of Physicians 1998, 165-175.
200
LE BILAN ANNUEL DE SURVEILLANCE DU
DIABETIQUE (n° 330 - 331)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation, Hôpital Laennec
La rencontre régulière du diabétique avec son médecin est avant tout l’occasion
d’une discussion sur le vécu du patient, ses principales difficultés et tout autant ses
réussites et ses joies. Elle comprend aussi des aspects « techniques » qui peuvent
schématiquement se répartir en 4 chapitres.
Faire le bilan des complications
Vérifier que les objectifs thérapeutiques sont atteints
Prendre éventuellement de nouvelles décisions
Contribuer au dépistage et à la prévention du risque métabolique familial.
1. Les complications
Souvent voire toujours associées, il faut à chaque fois toutes les rechercher
d’autant qu’elles sont longtemps asymptomatiques.
Ce bilan peut être réalisé en plusieurs fois. L’interrogatoire cherchera des signes
fonctionnels en règle absents. L’examen clinique complet sera lui aussi longtemps
normal en dehors du poids à vérifier régulièrement.
201
24 h et l’examen cytobactériologique des urines. Le ionogramme sanguin est
demandé si le patient prend des médicaments pouvant agir sur les électrolytes
(diurétiques épargneurs potassiques ou non, IEC, inhibiteur des récepteurs de
l’angiotensine II). Le ionogramme urinaire peut-être demandé pour vérifier
l’observance au régime désodé quand cette prescription existe.
Le bilan neurologique repose uniquement sur l’interrogatoire (paresthésies des
membres inférieurs) et l’examen clinique (sensibilité superficielle et profonde,
ROT), il ne faut pratiquer ni vitesse de conduction nerveuse, ni
électromyogramme même si l’examen neurologique est anormal.
202
dosage « confirmatoire » ne remplace pas l’analyse régulière des données cliniques
et biologiques (auto-surveillance glycémique).
Les objectifs thérapeutiques concernent aussi le poids et la tension artérielle. La
quasi hypernormalisation (130/70) de cette dernière est presque toujours
indispensable devant des lésions micro-angiopathiques évolutives, en particulier
rénales. Il faut vérifier régulièrement que l’on est ni au delà, ni au dessous des
objectifs, qui peuvent par ailleurs changer en fonction de l’évolution de la maladie.
3. Les décisions
Elles concernent notamment :
L’adaptation voire un changement thérapeutique si les objectifs ne sont pas
atteints.
La nécessité de respecter un minimum de règles diététiques (réduction des
apports en sucres simples et lipides, favoriser les sucres lents) et
l’encouragement à pratiquer une activité physique significative doivent être
systématiquement rappelés et même notés sur l’ordonnance ,comme l’arrêt du
tabac si le problème se pose.
C’est également le moment de demander au patient la liste de tous les
médicaments qu’il prend parfois sans avoir pensé à en parler.
C’est aussi l’occasion d’insister sur l’observance du traitement notamment anti-
hypertenseur que près de la moitié des français abandonnent en raison d’effets
secondaires ou parce qu’ils se croient guéris. Or, les explications simples
augmentent de façon significative l’observance.
L’orientation vers un spécialiste devant des complications qui deviennent
parlantes est nécessaire : cardiologue, néphrologue par exemple dès que la
créatininémie est vers 200 µmol/l, chirurgien vasculaire , neurologue, etc... Au
nombre de spécialistes peut s’ajouter le diabétologue (consultation spécialisée,
hôpital de jour, hôpital de semaine) si le patient n’est pas déjà suivi avec la
collaboration de ce type de structure.
203
URGENCES METABOLIQUES CHEZ LE
DIABETIQUE
TROUBLES DE LA CONSCIENCE CHEZ LE
DIABETIQUE(n° 332)
Anne-Claire Voisin-Bouthillier
Service d'Endocrinologie - Diabétologie - Médecine Interne, Hôpital Boucicaut
1.ACIDOCETOSE
Les points importants sont résumés sur le Tableau I.
1.1. Physiopathologie
Elle résulte d'une carence profonde en Insuline associée à une insulinorésistance
par augmentation des hormones de contre régulation.
Il en résulte :
une HYPERGLYCEMIE (par absence de transport cellulaire du glucose et glyco-
génolyse, néoglucogénèse accrues)
d'où :
hyperosmolalité extra-cellulaire, déshydratation intra-cellulaire et fuite de
K+
glycosurie, diurèse osmotique
deshydratation extra-cellulaire, insuffisance rénale fonctionnelle qui aggrave
l'hyperglycémie (cf Tabl. II).
une CETOSE (l'Insuline inhibe la triglycéride lipase adipocytaire)
d'où :
libération d'acides gras libres et ß oxydation hépatique (cf Fig. 1)
cétogénèse hépatique
cétonurie, perte de Na+ et K+
acidose, hyperventilation secondaire réactionnelle
voire collapsus, dépression respiratoire
204
d'insuline).
ACIDOSE METABOLIQUE
hyperproduction d'acide ß-hydroxybutyrique et d'acide acétique.
HYPERGLYCEMIE
glycogénolyse ;
hyperproduction endogène du glucose (néoglucogénèse) ;
diminution de la pénétration cellulaire.
DESHYDRATATION GLOBALE (75ml/kg) 10 - 15% poids, 60% IC
polyurie osmotique ;
vomissements
205
PERTE DE SODIUM (10mEq/kg)
élimination de corps cétoniques dans les urines ;
diurèse osmotique ;
vomissements (souvent)
PERTE DE POTASSIUM (5mEq/kg)
Secteur intra-cellulaire Æ secteur extra-cellulaire
glycogénolyse ;
protéolyse ;
hyper-osmolarité extra-cellulaire ;
acidose
Secteur extra-cellulaire Æ urines.
polyurie osmotique ;
corps cétoniques urinaires ;
hyperaldostéronisme secondaire. et pertes digestives
HYPERURICEMIE par diminution d'excrétion rénale
Fig. 1 DEVENIR DES ACIDES GRAS LIBRES A LONGUE CHAINE DANS LE FOIE
1.3. Clinique
Rarement, l'acido-cétose révèle le diabète de type 1 (et ne devrait plus se voir).
Dans 85% des cas elle se rencontre chez le DID, mais dans 15 % des cas chez le
DNID.
206
une hyperleucocytose est fréquente en dehors de toute infection.
1.4. Biologie
Les gaz du sang chiffrent l'acidose (pH <7,3), avec des bicarbonates plasmatiques
<20 mM/l et un trou anionique >16. Au ionogramme sanguin, la natrémie est
variable, la kaliémie est variable mais la DEPLETION POTASSIQUE est CONSTANTE.
L'ECG recherche des signes d'hypokaliémie, signes d'ischémie ou d'infarctus.
Par ailleurs, on recherche une augmentation de l'urée et créat (insuf. rénale
fonctionnelle), de l'Ht et des protides (déshydratation extra-cellulaire). Peuvent être
augmentés de façon non spécifiques : les CPK, transaminases, l'amylasémie.
Liste - contrôle de ce qu'il faut faire devant une acidocétose diabétique :
vérification de la glycosurie et cétonurie
observation écrite à l'admission : conscience, pouls, TA, fréquence respiratoire,
poids.
Pose d'une voie veineuse.
Examens sanguins indispensables immédiatement : glycémie,
gazométrie,ionogramme sanguin (Na+, K+), NFS, protides.
Electrocardiogramme
Mesure de la diurèse horaire, sonde vésicale si altération de la conscience.
Vidange de l'estomac par sonde gastrique.
Radiographie du thorax et de l'abdomen.
Examens bactériologiques : ECBU, hémocultures.
Etablissement d'une feuille de surveillance horaire.
Traiter avant les résultats biologiques.
1.6. Traitement
INSULINOTHERAPIE
à la pompe intra-veineuse ; (SE) de préférence
ou en bolus horaire intra-veineux (10 à 15 Unités/heure)
Lors de la disparition de la cétose, on passe aux injections sous-cutanées toutes les
3-4 heures, en fonction de la glycémie capillaire (après avoir fait une dernière
injection intra-veineuse en même temps que l'injection sous-cutanée pour éviter
tout hiatus). Puis on passe à 2 intermédiaires (NPH)/jour tout en faisant quelques
207
suppléments de rapide pour éviter les pics hyperglycémiques. La baisse de la
glycémie voire les hypoglycémies sont signes d'une mauvaise réanimation (signes
d'insuffisance d'apport glucosé) et ne doivent jamais entrainer une baisse de
l'insulinothérapie.
REHYDRATATION HYDRO-ELECTROLYTIQUE
1 litre en une heure ;
1 litre en deux heures ;
1 litre en trois heures ;
1 litre toutes les 4 heures.
On commence par :
500 cc maximum de bicarbonates iso-osmotiques à 14 °/°° en cas d'acido-
cétose sévère (pH < 7) ou menaçante ;
puis 1 à2 litres de sérum physiologique à 9°/°°
puis du glucosé isotonique avec 4 g de NaCl et 4 g de KCl par litre (en
fonction de la rapidité de la baisse de la glycémie).
Le potassium est en général apporté dès que la kaliémie est "apparemment"
normale (c'est parfois dès le début, rarement plus tard que 3 à 6 l), après contrôle
du ionogramme sanguin et de l'ECG, et en surveillant la diurèse. La dose de
potassium est adaptée en fonction des ionogrammes sanguins toutes les 4 heures.
On ne doit pas, en général, dépasser 2g KCl en une heure. On passe au G 5 %,
voire G 10 % dès que la glycémie devient inférieure à 2 g/l.
SI BESOIN, ANTIBIOTHERAPIE APRES HEMOCULTURES ET PRELEVEMENTS
LOCAUX
Si infection grave ou si terrain débilité, amoxycilline + acide clavulanique
(AUGMENTIN®), en attendant l'isolement du germe permettant une antibiothérapie
spécifique.
La posologie des antibiotiques doit être adaptée en tenant compte de l'insuffisance
rénale fonctionnelle habituelle.
NURSING +++ (cf Tableau II)
HBPM A DOSES PREVENTIVES
LA SURVEILLANCE DU COMA ACIDO-CETOSIQUE REPOSE SUR :
toutes les heures: conscience, fréquence respiratoire, pouls, tension
artérielle, diurèse éventuellement température, cétonurie, glycémie capillaire
toutes les 4 heures : ionogramme sanguin, glycémie, réserve alcaline, ECG.
TRAITEMENT DE LA CAUSE ++
< 5 % de MORTALITE
Matelas anti-escarre
208
Observation écrite à l'admission (fréquence respiratoire, pli cutané, tension
artérielle, pouls, conscience, pesée sur lit-balance)
Vérification de la glycosurie et de la cétonurie
Pose d'un cathéter transcutané.
Si diurèse spontanée impossible, sonde vésicale ; mesure de la diurèse horaire.
Examens sanguins usuels à l'admission plus de préférence sur sang artériel :
ionogramme avec bicarbonate et pH.
Electrocardiogramme initial.
Retrait des prothèses dentaires.
Vidange de l'estomac par sonde gastrique (mais non aspiration gastrique
continue).
Etablissement de la feuille de surveillance, horaire, clinique et biologique,
notamment glycosurie et cétonurie.
Electrocardiogramme vers la 4ème heure (surveillance de la kaliémie).
Examens sanguins entre la 4ème ou 6ème heure.
Hémocultures si le patient est fébrile.
L’Acidocetose :
L'acidocétose persiste heureusement rarement comme circonstance de découverte
du diabète sucré. Elle a quasiment disparu des complications menaçant le
diabétique avéré. Cela est dû à l'enseignement intensif dont bénéficient les patients
qui peuvent enrayer eux-mêmes toute décompensation débutante.
Le traitement de l'acidocétose est donc avant tout préventif
La situation suivante doit être connue de tous les diabétiques.et de tous les
étudiants en médecine
Conduite à tenir devant la présence simultanée de sucre et d'acétone dans les
urines.
Vérifier cette présence (la cétonurie peut avoir disparu)
Faire un supplément d'insuline rapide SC par exemple de 5 unités d'insuline
par croix d'acétone.
Manger le plus normalement possible pour éviter que l'action
hypoglycémiante (négativation de la glycosurie) soit plus rapide que l'action
anti-lipolytique (disparition de l'acétone).
Vérifier 2,3 heures après les urines. Il y a guérison, quelle que soit la
glycosurie, si l'acétone a disparu. Il faut faire un deuxième supplément,
quelle que soit la glycosurie si l'acétone persiste (cf Fig. 2).
Il faut continuer à manger (surtout si la glycosurie a baissé plus vite que
l'acétonurie). On peut faire jusqu'à 3 ou 4 suppléments sans inquiétude.
Parallèlement, impérativement rechercher une cause à cette
décompensation. S'il s'agit d'un maladie intercurrente préoccupante
(infection profonde) il faut débuter les suppléments, mais seul le traitement
de l'infection pourra définitivement apporter la guérison. S'il s'agit de
négligences thérapeutiques accumulées depuis plusieurs semaines avec un
209
retard pris dans l'insulino-thérapie, 1 ou 2 suppléments seront suffisants
pour rétablir l'équilibre.
L'HOSPITALISATION s'impose si la cause qu'il faut rechercher est suceptible
d'être grave, si l'alimentation est impossible (vomissements) ou si
l'acétonurie persiste après les injections d'insuline rapide.
Fig. 2
2.LES HYPOGLYCEMIES
L'effet secondaire principal de l'insulinothérapie est l'hypoglycémie. Dans les
enquêtes sur les revendications des patients, cette hantise arrive au premier plan
alors que les injections, tant redoutées au début de la maladie se placent loin
derrière. Or, sauf circonstance très exceptionnelle, l'hypoglycémie n'est jamais
grave au sens médical. Elle peut être génante psychologiquement ou socialement.
Les lésions cérébrales si craintes par les patients n'ont jamais été mises vraiment
en évidence. La plupart des enquêtes avec étude des fonctions cognitives ne
montrent pas de différences significatives chez les patients faisant des
hypoglycémies par rapport à ceux n'en faisant pas. Le diabétologue doit
constamment rappeler cela aux patients. En effet, l'hyperglycémie qui elle est
complètement asymptomatique ne fait pas peur du tout au patient et pourtant...
Le contrôle strict du diabète on l'a vu expose au discret "sur-risque"
d'hypoglycémie. Le patient doit donc parfaitement en connaître les signes. Le
tableau suivant est un rappel des signes cliniques d'hypoglycémie classés en
symptômes ß-adrénergiques et symptômes liés à la glucopénie cérébrale. Il est
suivi d'une présentation par ordre de fréquence décroissante des symptômes
ressentis par le patient, puis ceux reconnus par l'entourage, très utiles quand le
malade ne s'aperçoit pas qu'il est en hypoglycémie.
Signes de neuroglycopénie
asthénie brusque,
ralentissement intellectuel, troubles de concentrations,
210
troubles de la vue troubles de l’humeur plus souvent à
type de tristesse, de mélancolie ou
(diplopie, perte de la vision des
d’angoisse que de jovialité ou
couleurs, perte de la vision de
d’euphorie,
profondeur du champ, ou au contraire
éloignement des objets, points brillants troubles du comportement voire
devant les yeux, flou visuel...), agitation, violence (agressivité,
égarement, attitudes bizarres..),
paresthésie des extrémités et/ou mouvement anormaux (succion,
grimaces)
péri-buccales,
confusion
troubles de la parole,
coma brutal, hypertonique,
trouble de l’équilibre, incoordination
convulsions, trismus, convulsions, Babinski.
211
2.2. Etiologies
Toute hypoglycémie a une cause qu'il faut absolument retrouver. En effet, c'est la
cause qu'il faut traiter et il ne faut pas automatiquement baisser la dose d'insuline
correspondante. L'immense majorité des hypoglycémies sont liées défaut d'apport
calorique ou a un exercice physique inhabituellement important ou les deux. Toutes
les autres causes sont rares (erreur d'insuline, dose, concentration, lipodystrophies,
prise d'alcool, baisse des besoins en insuline). Les hypoglycémies devraient donc
pouvoir être facilement évitées dans leur ensemble.
2.3. Traitement
A défaut d'avoir pu être prévenue une hypoglycémie doit être traitée. Chaque
diabétique découvre rapidement le sucre d'absorption rapide qui lui convient le
mieux. Cela reste très souvent le classique morceau de sucre qui est le plus
efficace à défaut d'être le plus agréable.
L'entourage d'un diabétique doit systématiquement connaître le maniement du
Glucagon. Il faut surtout motiver cet entourage pour qu'il n'ait pas peur de
pratiquer cette injection. Cette dernière n'est jamais dangereuse, même si le coma
présenté par le patient n'est pas une hypoglycémie. En effet, dans toute les autres
causes de coma qu'il s'agisse d'un traumatisme ou d'un accident vasculaire, le
Glucagon endogène est déjà très élevé et ce n'est pas l'adjonction d'une dose suppl
mentaire qui changera quoi que ce soit. Tout diabétique insulinodépendant trouvé
dans le coma doit donc bénéficier d'une injection de Glucagon. En cas
d'hypoglycémie, le patient se réveille en 5 10 min.
2.4. Prévention
L'éducation des diabétiques est primordiale dans la prévention avec une attention
particulière sur l'adaptation des doses d'insuline et la manipulation des collations
(Tableaux VII, VIII).
212
Prendre des collations toutes les 1/2 heures environ.
Après l'activité, diminuer les doses d'insuline en se rappelant que l'effet
hypoglycémiant de l'exercice musculaire dure 12 à 24 heures
Contrôler la glycémie au coucher et prendre une collation (si glycémie <1,2 -
1,4 g/l)
Le risque d’hypoglycémie nocturne serait corrélé à la valeur de la glycémie de 22 H
mais en réalité souvent imprévisible.
Tableau IX
213
3. COMA HYPEROSMOLAIRE
Ce coma métabolique représente 5 à 10 % des comas métaboliques des
diabétiques. C'est l'un des plus graves survenant le plus souvent chez les malades
âgés. Il entraîne le décès du patient dans 20 à 40 % des cas, en raison des
complications infectieuses ou thromboemboliques, mais aussi de la survenue d'un
oedème cérébral ou collapsu cardio-vasculaire, induit par un traitement inapproprié.
3.1. Définition
Le coma hyperosmolaire se caractérise par une déshydratation massive.
Les malades sont habituellement comateux ou très somnolents.
Ce syndrome se définit par une glycémie égale ou supérieure à 6 g/l (33mmol/l),
une osmolarité plasmatique supérieure à 350 mosm/l, un pH supérieur ou égal à
7.20 à 7.30, une concentration de bicarbonates plasmatiques supérieure ou
15mmol/l, sans cétonémie significative.
3.2. Physiopathologie
214
Tout facteur de déshydratation : diarrhée, vomissements, infection avec
syndrome infectieux bronchopulmonaire essentiellement, brûlures étendues
Une mauvaise accessibilité aux boissons est dans tous les cas un facteur
déclenchant nécessaire (par exemple : un patient perfusé insuffisamment et
"incapable" de boire) : trouble neurologique
Un défaut de surveillance de la diurèse, du bilan hydrique, de la glycémie
capillaire, du ionogramme sanguin (patient hospitalisé)
Les causes associées sont fréquentes
Un traitement inapproprié comme une prescription de diurétiques, de corticoïdes
est souvent un facteur précipitant.
215
(mmol/l) + 13) X 2 + glycémie (mmol/l).
Une hyperglycémie majeure sans acidose métabolique associée. La glycémie est
supérieure à 8 g/l (44 mmol/l).
Il n'existe pas d'acidose métabolique franche avec un pH sanguin à la limite
inférieure de la normale.
La natrémie peut être normale ou la natrémie mesurée, souvent proche de la
normale, ne reflète pas le stock sodé. Il faut calculer la natrémie corrigée selon
la formule de Katz (la natrémie mesurée doit être corrigée de 1.6 mmol/l pour
chaque gramme par litre de glucose).
Exemple : Glycémie à 11 g/l et Natrémie mesurée 144 mmol/l
Natrémie corrigée = 144 + (11 X 1.6) = 144 + 17.6 = 161.6 mmol/l
La kaliémie peut être normale, élevée ou basse mais dans tous les cas, il existe
une déplétion potassique (ECG+++)
Les bicarbonates sont normaux ou bas mais > à 15 mmol/l
Une insuffisance rénale, fonctionnelle ou organique est habituelle avec une
élévation modérée de la créatinémie plasmatique, de l'hématocrite et de la
protidémie.
On peut observer une augmentation des CPK et amylase.
Les prélèvements (hemocultures, ECBU, NFS) recherchent une infection.
3.6. Pronostic
Le coma hyperosmolaire reste l'une des complications métaboliques aigües les plus
redoutables chez les diabétiques. Le pourcentage de mortalité est actuellement de
40 % avec environ 50 % des décès qui surviennent dans les trois premiers jours.
La sévérité de ce coma métabolique souligne l'importance des mesures préventives
et du diagnostic précoce permettant un traitement adapté.
3.7. Complications
Hypotension et collapsus, oedème cérébral, déplétion potassique, infections,
thromboses artérielles et veineuses, troubles du rythme cardiaque, obstructions
canaliculaires (atelectasies, stomatites, parotidites, kératite voire pancréatite),
rhabdomyolyse, hémoglobinurie, tubulopathie aigüe anurique, séquelles
encéphaliques et psychiques.
20 % de mortalité.
3.8. Traitement
216
Réhydratation
10 à 12 litres /jour : Elle est nécessaire pour rétablir une volémie normale,
pour la perfusion correcte des tissus et pour améliorer la fonction rénale.
1 litre en 1/2 heure
1 litre en 2 heures
puis 1 litre toutes les trois heures
Sérum physiologique à 9 %0 pour les trois premiers litres. Glucosé à 2.5 % ou
sérum physiologique à 4.5 % ultérieurement. Si hypotension : substituts du
plasma.
G5 % quand glycémie atteint 2.5 g/l. Ne pas avoir peur du Glucosé dans le coma
hyperosmolaire, la décroissance trop rapide de l'hyperglycémie augmente le risque
d'oedème cérébral.
Chlorure de potassium, en général à partir du 3ème litre de perfusion, en fonction
du ionogramme sanguin (sauf si oligo-anurie).
Insulinothérapie
5 à 10 Unités/heure jusqu'à glycémie environ 2.50 g/l, puis 3 ou 4 UI/heure ou
passage SC toutes les 3 ou 4 heures. Puis rapidement 2 NPH/jour.
HBPM à dose préventive
Nursing"
Humidification bronchique - aspiration pharyngée - soins de la cavité buccale.
Protection des conjonctives : collyre antiseptique, sérum physiologique. Matelas
alternating
Recherche et traitement du facteur déclenchant (antibiotiques après les
prélèvements)
Surveillance
Toutes les heures : conscience, pouls, TA, diurèse, glycémie capillaire
Toutes les 4 heures : ionogramme sanguin, ECG, glycémie, osmolalité
Traitement préventif ++
Education de tous les diabétiques surtout les DNID âgés, peu hyperglycémiques,
liste de conseils d'hydratation en particulier si fièvre ou temps chaud.
217
4.1. Définition
Le coma par acidose lactique se définit par un tableau clinique et métabolique
d'acidose sévère associée une hyperlactatémie.
Il existe une baisse du pH sanguin inférieur à 7.25 en rapport avec une
accumulation plasmatique de lactates artériels supérieure à 6mmol/l.
218
metformine actuellement comercialisés en France sont :Glucophage retard*,
Glucophage*, Glucinan*, Stagid*Les Biguanides bloquent la néoglucogénèse à
partir du lactate avec non utilisation du lactate par le foie et augmentation de la
concentration plasmatique des lactates.Le facteur déclenchant est souvent en
relation avec une hypoperfusion tissulaire (choc, anémie sévère, sepsis,
tumeurs) associée une hypersécrétion de catécholamines dont les causes les
plus fréquentes sont :
Insuffisance cardiaque
Insuffisance respiratoire
Insuffisance rénale qui aggrave l'acidose métabolique et favorise l'accumulation
de Biguanides dans le sang.
nsuffisance hépatique qui entraîne un blocage de la néoglucogénèse avec
diminution de la clairance hépatique du lactate et un défaut d'épuration du
Biguanide
Facteur associé à rechercher : intoxication alcoolique aigüe responsable aussi
d'acidose lactique.
4.4.Tableau Clinique
Les signes peuvent apparaître soit progressivement avec un syndrome douloureux
surtout musculaire, soit brutalement avec d'emblée un tableau d'acidose sévère
associant :
Adynamie
Hypothemie
Deshydratation
Syndrome douloureux
Crampes et douleurs musculaires
douleurs abdominales
douleurs sternothoraciques
Signes neurologiques
agitation anxieuse
obnubilation voire coma
Signes cardio-vasculaires
hypotension artérielle
pincement de la différentielle
au maximum collapsus cardio-vasculaire
troubles du rythme cardique (dissociation auriculoventriculaire, rythme nodal)
Signes respiratoires
hyperpnée pouvant faire évoquer la dyspnée de Kussmaul mais il ne s'y associe
pas d'odeur acétonique de l'haleine.
Pas de déshydratation
Oligo-anurie précoce.
219
4.5. Tableau Biologique
Hyperglycémie constante mais modérée (entre 2.5 et 3.5 g/l) sans glycosurie
majeure
Acidose constante et majeure avec un pH < 7.10Cette acidose est métabolique
comme en témoigne l'abaissement des bicarbonates qui sont inférieurs à 10
mmol/litre.L'hyperkaliémie est par contre inconstante.
Augmentation du trou anionique.L'acide lactique occupe la place des
bicarbonates qui sont diminués/Les anions sont alors très inférieurs aux
cations.Le trou anionique est en général supérieur à 16 mmol/l (N< 5)
Lactatémie augmentée, entre 2 et 5 mmol/l (le taux de lactate normal est de
0.6 à 1 mmol/l)
Pas d'acétonurie.
4.7. Traitement
220
plus qu'il existe une insuffisance cardiaque et/ou rénale.
L'alcalinisation par THAM (trisaminol) permet une économie dans la charge
osmolaire extracellulaire.
L'épuration extrarénale permet une alcalinisation sans surcharge volémique
et l'élimination des lactates et biguanides (partiellement)
LUTTE CONTRE L'ANOXIE
Oxygénation des tissus avec une ventilation correcte.
Normalisation de la pression artérielle avec un remplissage vasculaire si
besoin, utilisation de drogues vasodilatatrices (nitroprussiate de sodium),
voire de la dobutamine en cas de bas débit cardiaque.
Maintien de la diurèse dans des valeurs normales en utilisant s'il le faut du
furosémide d'autant plus que l'on a fait appel aux bicarbonates de sodium.
AUTRES MESURES THERAPEUTIQUES
Soins de tout patient comateux : Nursing +++
Anticoagulant HBPM préventif
Insulinothérapie à faibles doses à discuter en fontion de l' équilibre
glycémique (l'insuline favorise la glycolyse aérobie)
SURVEILLANCE
Etat hémodynamique
Etat de conscience
Gazométrie artérielle
Lactatémie
Bicarbonates et ionogramme sanguin, glycémie
Créatinémie
L'acidose lactique chez le diabétique doit rester une complication d'exception et son
traitement est avant tout préventif reposant sur le respect strict des contre-
indications des Biguanides.
Le Tableau XI récapitule les points principaux des quatre comas diabétiques.
POINTS IMPORTANTS
HYPOGLYCEMIE ACIDOCETOSE HYPEROSMOLAIRE ACIDOSE
LACTIQUE
DID ou DNID DID DNID Douleurs Clinique
brutal ++, troubles
début insidieux, sujet âgé,
neuroglycopénie, digestifs,
symptômes S. cardinal, début progressif, polypnée,
adrénergiques déshydratation oligoanurie,
troubles
collapsus
digestifs
polypnée.
221
< 0,50 g/l > 2,50 g/l > 8 g/l 2,5 - 3,5 g/l Glycémie
+++ +++ +/- Glycosurie
+++ +/- 0 Cétonurie
222
A.La deshydratation est modérée
B.L'acétonurie est souvent massive
C.Le traitement de la cause est essentiel ainsi que la prévention
D.La natrémie peut être très augmentée
E.L'hyperglycémie est modeste
4.Melle A. DID, traitée par deux injections rapides matin, midi et une semi-lente le
soir, s'inscrit à un cours de gymnastique le mercredi après-midi. Vous lui conseillez
ce jour là :
A.d'augmenter son insuline rapide de midi
B.De prendre un déjeuner consistant et d'emmener des collations
C. De diminuer l'insuline du soir
D.De contrôler sa glycémie capillaire avant l'effort physique, ainsi que le soir et
au coucher
E.De moins manger le soir au diner
223
DIABETE et GROSSESSE (n° 165)
Jean-Jacques Altman
Diabétologie - Nutrition - Transplantation, Hôpital Laennec
Points importants
La prise en charge préconceptionnelle est l’élément clé de la réussite d’une
grossesse chez la diabétique.
Elle comporte deux aspects
L’obtention de glycémie parfaite avant la fécondation.
Le bilan et la prise en charge des éventuelles complications
Il persiste un risque de malformations foetales supérieur à celui des femmes
non diabétiques.
La macrosomie, reflet direct de l’hyperglycémie maternelle peut et doit
disparaître.
Le risque maternel est très faible : aggravation transitoire des rétinopathies,
plus forte prévalence d’HTA.
Il faut rechercher un diabète gestationnel essentiellement chez les femmes
obèses, et/ou ayant des antécédents familiaux de DNID, et/ou ayant mis au
monde un enfant macrosome, et/ou ayant eu des anomalies glycémiques
transitoires.
Il est possible dans l’immense majorité des cas d’aboutir à un accouchement à
terme, par les voies naturelles d’un enfant en parfaite santé et sa mère aussi.
224
Introduction
Les diabétologues préconisent une préparation des grossesses chez les femmes
diabétiques, afin de réunir les conditions métaboliques optimales dès la
fécondation, et dans certains cas pour traiter avant la grossesse une complication
menaçante. La notion de "préconception" prend toute sa signification en
diabétologie. En effet, le contrôle rigoureux du diabète réduit considérablement le
risque de malformation foetale attribuable à l'hyperglycémie, ainsi que la fréquence
des avortements spontanés. Parallèlement la contraception n'est pas ici seulement
un droit, mais aussi une nécessité.
1. Les risques
225
grossesse. Le même phénomène existe chez la diabétique, mais c'est la patiente
qui devra elle-même augmenter les doses pour couvrir les besoins en insuline. La
survenue d'une acido-cétose, conséquence de fautes grossières, souvent fatale
chez le foetus, est devenue rarissime.
L'hypertension artérielle n'est pas une complication spécifique de la grossesse chez
la diabétique, mais elle est beaucoup plus fréquente dans cette population : près de
25 %. L'hypertension peut être chronique, antérieure à la grossesse ou induite par
celle-ci, apparaissant après la 20ème semaine. Cette hypertension peut faire le lit
d'une toxémie menaçant foetus et mère. La prise en charge thérapeutique
notamment médicamenteuse de l'hypertension artérielle gravidique ne bénéficie
pas d'un consensus absolu. Il n'est pas formellement démontré qu'un bon contrôle
glycémique réduise le risque de voir apparaître une hypertension artérielle
gravidique, mais ce contrôle est nécessaire par ailleurs. Il parait logique de vouloir
pendant une grossesse obtenir un bon contrôle tensionel, puisque c'est ce qu'on
désire obtenir de toute façon pour les diabétiques en dehors des grossesses.
La grossesse n'aggrave pas le cours évolutif global de la fonction rénale qui
retourne en cas de modification au niveau antérieur à la grossesse. L'hyperfiltration
initiale de l'état gravidique peut s'accompagner d'une amélioration des fonctions
rénales mesurées par la clairance de la créatinine. Mais en fin de grossesse, la
protéinurie si elle est présente peut se majorer et les fonctions rénales se détériorer
(en l'absence d'insuffisance rénale préalable). En cas d'insuffisance rénale patente
préexistant à la grossesse, par exemple une créatininémie supérieure à 200 µmol/l,
les chances d'avoir un enfant vivant ne sont actuellement que d'environ 50 %,
même si des raretés ont été décrites comme des grossesses à terme chez des
patientes dialysées… Il est prudent d'annoncer au minimum le pronostic foetal à
une diabétique avec insuffisance rénale et plus encore associée à une hypertension,
qui souhaiterait à tout prix un enfant.
L'insuffisance coronarienne préexistante à la grossesse, heureusement
exceptionnelle, est source d'environ 50 % de décès des mères pendant la grossesse
et est probablement la seule contre indication formelle et pour le moment définitive
à la grossesse.
Le risque rétinien de la grossesse est décrit plus spécifiquement dans le paragraphe
suivant.
226
2. Modalité de prise en charge
2.1. Diabétologique
Le cas le plus simple mais le plus rare est la prise en charge de la diabétique
insulinodépendante connue (1000 à 2000 grossesses par an pour 5 à 700.000
naissances chaque année en France).
La préconception, corollaire d'une contraception efficace, est parfaitement définie
dans ses objectifs, mais ils ne sont pas toujours atteints. La préconception
comporte 2 volets, le dépistage et le traitement éventuel des complications liées au
diabète (rein, yeux, infections urinaires, tension artérielle…) et l'obtention d'un
contrôle glycémique parfait passant quasi obligatoirement par des injections
multiples d'insuline (en règle 3 injections d'insuline rapide pré-prandiales et 2 bases
d'insuline intermédiaire matin et soir). Six contrôles glycémiques quotidiens et de
temps en temps un 7ème, nocturne, sont requis. Les carnets d'autosurveillance
sont analysés avec minutie et l'hémoglobine glycosylée A1c est déterminée tous les
2 mois. Les motivations des futures mamans sont tellement fortes que cet objectif
de perfection peut-être atteint quand la patiente a été confiée à un centre
expérimenté. Trop souvent, cet excellent équilibre n'est obtenu qu'après la
fécondation, ce qui reste très favorable pour limiter le risque de macrosomie, mais
est trop tardif pour la prévention des complications foetales. Pendant la grossesse,
la consultation diabétologique est idéalement bimensuelle. Le dosage de
l'acétonurie, de l'uricémie, l'albuminurie, et l'ECBU sont répétés mensuellement. La
surveillance ophtalmologique est trimestrielle, ou plus, en cas de problèmes. Dans
ce dernier cas, la surveillance est également intensifiée dans les mois qui suivent
l'accouchement pour vérifier le retour à l'état antérieur.
Il existe beaucoup plus de grossesses chez les diabétiques non
insulinodépendantes, car cette pathologie est environ 10 fois plus fréquente que
l'autre type de diabète. Ces patientes sont moins prises en charge que les autres
dans les centres spécialisés. Elles ont également moins fait l'objet d'études
épidémiologiques rigoureuses. Les risques foetaux, maternels, et diabétologiques,
sont peu différents de ceux du diabète de type I. Il est donc tout aussi important
chez ces patientes de normaliser les glycémies avant la conception et tout au long
de la grossesse. Les anti-diabétiques oraux sont plus inefficaces (rappelons que
l'insulinosécrétion doit doubler chez la femme enceinte) que dangereux. Un régime
hypocalorique (mais pas inférieur à 1700 Calories) peut normaliser une
hyperglycémie chronique modérée. Dans un très grand nombre de cas, ceci ne peut
être obtenu qu'avec une insulinothérapie intensifiée et l'insulinorésistance liée à la
grossesse et au surpoids peut conduire à l'emploi de doses extrêmement
importantes d'insuline.
Continuer à s'occuper du pronostic maternel après l'accouchement est une priorité
médicale pour les diabétologues, malheureusement, parmi le pourcentage déjà
faible de femmes diabétiques non insulinodépendantes enceintes bénéficiant d'une
prise en charge spécialisée pendant la grossesse, celles qui continuent à être
suivies par une équipe diabétologique expérimentée sont encore plus réduites.
Le diabète réellement "gestationnel" ne survient que pendant la grossesse,
n'existait pas avant et disparaît après celle-ci. Dans ces conditions, le risque de
malformations n'existe pas si les glycémies étaient normales en début de
grossesse. Le plus souvent, il s'agit d'un diabète non insulinodépendant méconnu
ou oublié que l'on diagnostique, hélas, trop tardivement après plusieurs semaines
de grossesse, quand l'organogenèse est déjà terminée. La prise en charge, même si
elle est tardive, est alors du même type que celle décrite précédemment. La non
obtention de glycémies normales conduit en règle à l'insulinothérapie. Il est
évidemment nécessaire d'individualiser cette stratégie. Une glycémie à 1,20 g par
litre, découverte au dernier mois avec des glycémies préalablement normales,
227
même si elle persiste après un régime, ne déclenchera probablement pas une
insulinothérapie, contrairement au même chiffre découvert après un mois de
grossesse chez une patiente ayant des antécédents obstétricaux à type
d'avortements ou de fausse-couches répétées.
La question principale qui se pose ici est certainement de définir qui doit bénéficier
de mesures (répétées) de la glycémie au cours de la grossesse, en sachant que si
idéalement la réponse devrait être : tout le monde, il est irréaliste de pouvoir le
faire sur le plan pratique et/ou économique. Il est nécessaire de doser la glycémie à
jeun et environ 1h30 à 2h après un repas à la première consultation et au delà de
la 26ème SA chez toutes les femmes obèses, les femmes ayant des antécédents
familiaux de diabète, des antécédents d'enfants de poids de naissance élevés pour
le terme, des antécédents d'anomalies glycémiques détectées sous pilule
oestroprogestative, sous corticothérapie et plus encore à l'occasion d'une
grossesse antérieure. La détection d'une glycosurie chez une femme n'ayant pas de
diabète connu, doit immédiatement faire pratiquer des glycémies, même si le
diagnostic le plus probable est un abaissement physiologique du seuil rénal. En cas
d'antécédents de mort in-utéro inexpliquée, de malformations majeures et
d'avortements précoces répétés, le bilan glycémique est indispensable et ce
d'autant plus que l'âge est élevé.
2.2. Obstétricale.
En dehors d'antécédents gynéco-obstétricaux indépendants du diabète, il n'est pas
nécessaire pour l'obstétricien de voir immédiatement une diabétique enceinte. Un
suivi mensuel est ensuite indispensable. Une première échographie sera pratiquée
entre la 8ème et la 12ème semaine d'aménorrhée pour dater avec précision le
terme. Une anomalie foetale éventuelle est systématiquement recherchée par un
échographiste expérimenté vers la 20ème semaine. Une dernière échographie est
pratiquée en fin de grossesse pour tenter notamment de déterminer le poids du
bébé qui reste difficile à apprécier. L'hydramnios est plus fréquent chez la
diabétique, de causes diverses, comme le déséquilibre du diabète. Il ne nécessite
pas de traitement particulier. Les autres préoccupations obstétricales comme
l'accouchement prématuré menaçant sont plus complexes chez la diabétique en
raison de l'effet hyperglycémiant des ß-mimétiques (cétose, puis acidose
nécessitant des doses d'insuline très importantes). Les modalités de la naissance
relèvent de services spécialisés. Le but de l'obstétrique moderne chez la diabétique
est d'aboutir à un accouchement à terme, par les voies naturelles, d'un enfant en
parfaite santé. Ce but est de plus en plus fréquemment atteint dans les centres
spécialisés comportant une collaboration entre l'obstétricien, le néo-natalogiste et le
diabétologue.
Conclusion
La natalité chez le DID est actuellement en France supérieure à 2 enfants/femme
donc plus importante que chez la femme non diabétique (inférieure à 2).
Bien encadrée (préconception, suivi médical, obstétrical et néonatologique) elle se
déroule parfaitement. C'est dans cette population que sont obtenus les meilleurs
contrôles glycémiques.
La prise en charge est beaucoup moins codifiée, moins efficace car moins réalisée
dans le cadre du DNID, situation pourtant beaucoup plus fréquente. La détection
des anomalies glycémiques pendant la grossesse et la prise en charges des
patientes très exposées au risque de DNID sont des domaines ou tout reste à faire.
Globalement les progrès et les résultats obtenus dans le domaine des grossesses
diabétiques sont parmi les acquis les plus brillants de la diabétologie moderne.
228
Référence bibliographique
Diabète et grossesse. J.J. ALTMAN
Mises à jour en Gynécologie et Obstétrique, Michel Tournaire ed.,
Diffusion Vigot-Paris, 1988 : 227-260.
229
OBESITE DE L’ADULTE (n° 250 - 333)
Nathalie Rich
Diabétologie - Nutrition - Transplantation, Hôpital Laennec
230
7.6. Les troubles trophiques
7.7. Les complications opératoires et post-opératoires
7.8. Obésité et grossesse
7.9. Obésité et cancers
7.10 Complications psychologiques.
8. Examen clinique
8.1. Interrogatoire
8.2. L’examen clinique.
9. Examens paracliniques
9.1. Examens systématiques
9.2. Autres examens.
9.3. La synthèse
10. Traitement
10.1. La diététique.
10.2. L’exercice physique.
10.3. Les médicaments.
10.4. Prise en charge psychologique
10.5. Les groupes d’obèses : Weight Watchers, TOPS, Silhouette
10.6. Les cures
10.7. La chirurgie
Références bibliographiques :
QUESTIONS A CHOIX MULTIPLES
Abréviations
BMI : body mass index
DEXA: Dual Energy X-ray Absorptiometry
IMC : indice de masse corporelle
MG : masse grasse
MM : masse maigre
MR : métabolisme de repos
PIT : poids idéal théorique
SAS : Syndrome d’apnée du sommeil
Points importants
A comprendre :
obésité commune = maladie multifactorielle
obésité androïde = exposée à des complications métaboliques et cardiovasculaires
231
La prise en charge thérapeutique de l’obésité doit tenir compte
de ses complications et du contexte psychologique voire psychiatrique
La réduction pondérale doit être lentement progressive (rebond)
A retenir :
obésité = excès de masse grasse
IMC, rapport T/H, Syndrome X, Syndrome d’apnée du sommeil
Valeur calorique des nutriments et apports qualitatifs idéaux
Bilan énergétique et composantes de la dépense énergétique
1. Introduction
L’obésité est une maladie de prévalence croissante et source de nombreuses
complications. Elle est de diagnostic le plus souvent évident, mais nécessite d’être
quantifiée. Son traitement qui repose en premier lieu sur la modification des
habitudes alimentaires et souvent sur la restriction alimentaire se solde souvent par
des échecs.
2. Définitions
2.1. L’obésité.
Elle est définie stricto sensu par un excès de masse grasse (MG) corporelle.
Pourcentage de MG corporelle (%)
Homme Femme
Sujet normal 10 à 15% 20 à 25%
Obésité > 15-20% > 25-30%
232
Mass Index (BMI) pour les Anglo-Saxons. Sa mesure est aisée (balance et toise) et
reproductible, et sa corrélation avec la MG corporelle est bonne (de l’ordre de 0,8).
IMC
surcharge pondérale > 25 kg/m2 chez l’homme
> 27 kg/m2 chez la femme
obésité > 30 kg/m2
obésité morbide ou massive > 40 kg/m2
233
précise par la réalisation d’une coupe scannographique en L4. Elle permet de
différencier le tissu adipeux sous-cutané abdominal du tissu adipeux viscéral
(rétropéritonéal, mésentérique et omental) mais cette méthode de mesure reste du
domaine de la recherche.
2.6. Remarques
Ces définitions de l’obésité ne servent que de base de référence. Elles sont fondées
sur la notion de risque lié au surpoids. Toutefois, elles ne tiennent pas compte
d’autres éléments qui jouent un rôle pronostic très important tels que l’âge de
survenue et l’ancienneté de l’obésité qu’il faudra préciser.
3. Rappels physiologiques
234
3.2. La théorie du pondérostat.
Chez l’homme bien portant, il existe une homéostasie pondérale qui permet le
maintien du poids mais surtout des réserves énergétiques (constituées par la MG)
relativement stables. Elle implique un ajustement réciproque spontané de la prise
alimentaire et des dépenses énergétiques par des processus complexes encore mal
élucidés (neuro-hormonaux, métaboliques et comportementaux) de manière à ce
que le bilan énergétique soit nul.
Toutefois, cet état d’équilibre varie d’un sujet à l’autre. En effet, les individus sont
inégaux face à la nourriture et à la dépense d’énergie (facteurs génétiques). En
outre, le poids auquel s’ajuste un sujet varie au cours de la vie, notamment sous
l’influence de l’âge et du statut hormonal gonadique.
La prise de poids et l’obésité résultent d’un bilan énergétique positif (excès des
entrées et/ou insuffisance des dépenses).
La perte de poids résulte d’un bilan énergétique négatif (apports alimentaires
faibles et/ou augmentation des dépenses).
Il a été récemment mis en évidence une nouvelle hormone : la protéine Ob ou
leptine (du grec leptos = mince) qui serait impliquée dans l’homéostasie de la
composition corporelle. Il s’agit d’une protéine codée par le gène ob et sécrétée
spécifiquement par les adipocytes matures de manière proportionnelle à la quantité
de masse adipocytaire. Son site d’action serait le système nerveux central et plus
particulièrement l’hypothalamus où sont exprimés ses récepteurs spécifiques
(protéine Ob-R, codée par le gène db) pour contrôler la prise alimentaire
(diminution) et la dépense énergétique (augmentation).
Les taux plasmatiques de leptine sont bien plus élevés chez les sujets obèses que
chez les sujets normopondérés et sont hautement corrélés à la quantité de MG
corporelle. Cette augmentation de la leptinémie chez les sujets obèses semble
dépendre d’une majoration de sa forme libre circulante et résulter d’une résistance
à la leptine, secondaire à un transport saturable de l’hormone libre circulante à
travers la barrière hémato-encéphalique. De telles données qui expliqueraient la
coexistence obésité-leptinémie élevée ne sont encore que des hypothèses.
235
européenne âgée de 20 à 75 ans et à 26% environ dans la population américaine
appartenant à la même tranche d’âge.
Les facteurs influençant la prévalence de l’obésité habituellement reconnus sont :
L’âge : l’incidence de l’obésité croît avec l’âge
Le sexe : l’obésité a une prédominance féminine
La génération : elle est plus fréquente de nos jours qu’au début du siècle.
L’éthnie : elle est plus fréquente chez les Indiens Pima d’Amérique, aux Philippines,
certains pays d’Afrique Noire.
Le niveau social et culturel : l’obésité est plus fréquente dans les classes
défavorisées des pays industrialisés et dans les classes les plus riches des pays en
voie de développement.
236
dépréciation et de dépression.
Les prises alimentaires nocturnes (“ night eating syndrom ” des Anglo-Saxons) :
Les sujets se réveillent et se lèvent pour manger sur un mode compulsif ou
boulimique.
237
5.5. Les facteurs psychologiques.
Des événements psychologiques peuvent altérer le système neuro-endocrinien de
régulation du poids (agression, dérèglement immunologique, tensions
psychologiques).
En outre, des désordres psychologiques peuvent conduire à l’obésité par le biais
d’une modification du comportement alimentaire. La prise alimentaire est alors
motivée par des besoins émotionnels et psychoaffectifs et non physiologiques.
Ainsi, l’angoisse ou la dépression peuvent provoquer des compulsions alimentaires.
Il peut exister un auto-aggravation de l’obésité liée à des conflits internes ou une
perturbation de la vie relationnelle en rapport avec une intolérance de la société vis
à vis de l’obésité. Intervient alors la notion de bénéfices secondaires
238
déficit intellectuel (anomalie du chromosome 15 dans 50% des cas), syndromes de
Lawrence-Moon, Biedel-Bardet et plus récemment identifiées : les mutations de la
leptine ou de son récepteur.
239
Ces anomalies métaboliques sont l’apanage de l’obésité androïde. Certaines d’entre
elles font partie intégrante du syndrome plurimétabolique de
Vague-Reaven ou syndrome X
Syndrome X : hypertriglycéridémie, augmentation des VLDL, augmentation du LDL-
cholestérol, diminution du HDL-cholestérol, hyperinsulinémie, intolérance au
glucose, augmentation des chiffres tensionnels.
Ces anomalies métaboliques jouent un rôle important dans l’apparition de maladies
cardiovasculaires (HTA, insuffisance coronarienne) et d’un diabète de type 2.
240
Troubles de la statique vertébrale responsables de dorsalgies, lombalgies,
radiculalgies.
Nécrose ischémique de la tête fémorale
Tendinites, talalgie plantaire.
Ces complications mécaniques, sources de sédentarité et d’impotence, contribuent
à aggraver l’obésité en limitant les possibilités d’exercice physique.
8. Examen clinique
8.1. Interrogatoire
241
Il doit être cerné car il peut s’agir d’une demande personnelle motivée, mais aussi
d’une demande favorisée par l’entourage du patient ou par un collègue pour prise
en charge primaire et/ou bilan et/ou dans le cadre d’une complication.
Ces données conditionnent les chances de succès mais aussi le mode de prise en
charge thérapeutique.
242
supra).
9. Examens paracliniques
9.1.1. Biologiques
Un dosage de la glycémie à jeun, du cholestérol total, des triglycérides et de
l’uricémie devra être demandé à titre systématique.
9.3. La synthèse
L’analyse des données de l’interrogatoire, de l’examen clinique et du bilan
paraclinique permet d’orienter l’objectif thérapeutique tout en prenant en
considération les souhaits et objectifs de chaque individu.
Chaque individu a en effet sa définition personnelle du poids souhaitable. Elle
dépend de nombreux critères subjectifs : se sentir plus à l’aise, améliorer son
apparence physique, rester en bonne santé, améliorer ses capacités physiques ou
son état de santé.
243
Ils sont à définir en accord avec le patient :
Stabilisation pondérale ou réduction pondérale.
Prise en charge préventive et curative des complications
Prise en charge d’un TCA plutôt que du surpoids.
Prise en charge psychologique ou psychiatrique
10. Traitement
10.1. La diététique.
Elle repose sur les données de l’interrogatoire alimentaire et doit respecter les
habitudes alimentaires et goûts des patients (tolérer les collations s’il y a une
tendance au grignotage).
244
(athérogènes) et privilégier les graisses poly-insaturées (poissons, huiles de
tournesol, de pépin de raisin) ou mono-insaturées (huile d’olive), indiquer les
aliments contenant des “ graisses cachées ” (viandes rouges, charcuteries,
fromages, aliments frits). Boissons non caloriques abondantes (eau, tisanes, thé,
café, voire boissons light). Utilisation d’édulcorants. Privilégier les sucres complexes
(effet satiétogène important) et les fibres alimentaires (elles retardent l’absorption
intestinale des sucres simples).
Ne jamais sauter de repas (favorise le grignotage).
REMARQUEZ QUE LE REGIME IDEAL EST CELUI PRESCRIT AUX SUJETS
DIABETIQUES.
UN REGIME SANS SEL NE FAIT PAS MAIGRIR, IL N’AGIT QUE SUR LA RETENTION
HYDRO-SODEE
10.1.4. Objectifs.
Stabilisation pondérale initiale si le patient est en phase pondérale dynamique
ascendante. Réduction pondérale ensuite, et lentement progressive : perte d’au
maximum 2 kg/mois.
Une perte rapide et massive de poids induit, par des phénomènes d’adaptation
métabolique, une résistance ultérieure aux régimes et
un effet rebond dès la reprise d’une alimentation normale.
L’objectif pondéral est à fixer en accord avec le patient et dépend du contexte
psychologique et des complications associées à l’obésité.
245
Ils ont une action dopaminergique et bêta-adrénergique, ils sont anorexigènes.
Les effets indésirables sont : insomnie, tachycardie, euphorie, anxiété, psychose et
risque de dépendance.
Les hormones thyroïdiennes.
Elles ont un effet thermogénique en créant un état pathologique d’hyperthyroïdie.
Les conséquences cardiaques sont non négligeables.
10.7. La chirurgie
La lipectomie.
Il s’agit surtout d’une excision de la peau excédentaire à visée purement plastique.
Elle n’est indiquée qu’à l’issue d’une réduction pondérale massive et acquise depuis
plusieurs mois (régions lombosacrées, fessières, brachiales, abdominales).
La liposuccion.
Permet la réduction des excès adipeux localisés. Là aussi, elle n’est indiquée qu’à
l’issue d’une réduction pondérale massive et acquise depuis plusieurs mois.
Les courts-circuits intestinaux.
Ils créent une malabsorption intestinale. Ils induisent de nombreuses complications
aiguës et chroniques, aussi ont-ils été abandonnés.
Les gastroplasties.
Il s’agit d’une réduction du volume gastrique qui limite la prise alimentaire. Son
indication est souvent limitée par le contexte psychique ou psychiatrique.
246
Références bibliographiques :
Les obésités. A. Basdevant, M. Le Barzic, B. Guy-Grand. 1993. Edité par PIL,
France.
Comportement alimentaire : du normal au pathologique. A. Basdevant, M. Le
Barzic, B. Guy-Grand. 1990. Edité par PIL, France.
Leptine et composition corporelle : analyse d’une population de sujets obèses.
N. Rich, Thèse de Doctorat en Médecine,1997.
247
D. Le stress
7. La prescription d’un régime bien équilibré doit comporter :
A. Une restriction sodée
B. Une supplémentation vitaminique dans tous les cas
C. 50% des apports caloriques habituels estimés lors de l’interrogatoire
alimentaire
D. Elle ne doit pas être inférieure à 1200 Cal/j en ambulatoire
8. Quelles sont les données sur les nutriments suivants qui sont fausses ?
A. Un gramme d’alcool apporte 7 Cal
B. Il y a des graisses cachées dans l’alcool
C. Les sucres simples sont plus caloriques que les sucres complexes
D. La ration protidique conseillée est de 15% par jour
9. Les complications de l’obésité sont :
A. L’hypersension artérielle
B. Le diabète de type 1
C. L’intertrigo
D. Le syndrome X chez les obèses gynoïdes
10. L’obésité
A. Est de moins en moins fréquente dans les pays industrialisés
B. Est souvent secondaire à une endocrinopathie
C. Contre-indique toute grossesse
D. Est le plus souvent hyperplasique chez l’enfant
11. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont fausses ?
A. Dans la compulsion alimentaire il existe une notion de choix des aliments
B. L’accès boulimique se solde toujours par des vomissements
C. Une tumeur intra-cranienne peut être responsable d’obésité
D. Les diurétiques facilitent l’amaigrissement.
12. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont vraies ?
A. Les neuroleptiques favorisent la prise pondérale
B. Le syndrome de Cushing induit une redistribution des graisses
C. L’hyperthyroïdie induit une prise pondérale
D. La thermogénèse fait partie intégrante du métabolisme de repos.
13. Les définitions suivantes sont vraies :
A. L’obésité massive correspond à un IMC > 40 kg/m2
B. L’obésité correspond à un pourcentage de MG > 25-30% chez la femme
C. La surcharge pondérale correspond à un IMC > 27 kg/m2 chez l’homme
D. On parle de répartition gynoïde des graisses lorsque le rapport T/H > 0,8
14. L’obésité est plus fréquente :
A. Chez les Indiens Pima d’Amérique
248
B. Chez les femmes ménopausées
C. Chez les sujets ayant une hyperréactivité hormonale au stress
D. Chez les sujets qui ont été obèses dans l’enfance
15. Il faut rechercher chez le sujet obèse androïde :
A. Une maladie coronarienne
B. Une dyslipidémie
C. Un diabète
D. Un syndrome d’apnée du sommeil
16. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont fausses ?
A. L’obésité gynoïde est moins à risque que l’obésité androïde
B. La répartition androïde des graisses n’est à risque que chez les sujets obèses
C. L’hyperphagie prandiale est un trouble du comportement alimentaire
D. Le tabagisme induit une augmentation des dépenses énergétiques
249
OBESITE DE L'ENFANT (n° 250 - 333)
Raja BRAUNER
Service d'Endocrinologie et Croissance
Faculté et Hopital Necker-Enfants Malades
Abréviations
BMI : body mass index
T4: thyroxine
TSH: thyroid stimulating hormone
250
Le surpoids est défini par un excès de tissu adipeux. Pour la quantifier, on utilise
des courbes de référence comparant le poids à la taille. On parle de surpoids
lorsque le poids se situe au-dessus de +2 déviations standards par rapport à la
moyenne du poids pour la taille. Le niveau de l'excès pondéral est mieux compris
par l'enfant et par sa famille lorsqu'il est exprimé en kg. L'inconvénient de cette
méthode est qu'elle ne tient pas compte de l'âge de l'enfant. Or la corpulence varie
avec l'âge. L'indice de masse corporelle (BMI", poids/taille2) ou indice de Quetelet
est considéré comme un bon indicateur de la masse grasse.
1. Etiologies
Dans l'immense majorité des cas, il s'agit d'un surpoids "simple", c'est-à-dire non
lié à une pathologie. Cependant, certains surpoids sont secondaires à une
pathologie ou font partie d'un syndrome. Dans ces cas, la courbe de croissance
staturale et l'examen clinique montrent le plus souvent des anomalies.
1.1.2. Hypercorticisme
Les éléments cliniques en faveur d'un hypercorticisme sont : douleurs dorsales,
hypertension artérielle, distribution facio-tronculaire de la surcharge pondérale, et
vergetures pourpres.Il est recherché par la mesure de la cortisolurie des 24 heures
(norme <50 µg) au besoin complété par un cycle du cortisol.
251
1.4. Surpoids "simple"
La vitesse de croissance staturale est normale ou supérieure à la norme pour l'âge.
L'examen clinique précise la distribution du surpoids, la présence de vergetures et
la tension artérielle. Des anomalies biologiques sont décrites en association avec les
surpoids importants: hyperinsulinisme, augmentation du taux plasmatique d'acides
gras. Ces anomalies disparaissent lorsque le poids redevient normal et leur
recherche systématique n'est pas nécessaire chez l'enfant.
Le rôle relatif dans la constitution du surpoids des facteurs génétiques et d'un
apport alimentaire trop élevé est discuté. Il est en effet difficile de préciser ce qui
revient aux habitudes alimentaires familiales et au facteur génétique. Un des modes
d'intervention de celui-ci dans la constitution du surpoids serait : dans certaines
familles, la consommation énergétique pour la croissance et pour l'entretien serait
diminuée. L'existence d'animaux génétiquement obèses est en faveur du facteur
génétique. Cependant l'excès d'apport alimentaire est à considérer comme le
facteur essentiel sur les éléments suivants : 1) la mesure des ingesta chez les
enfants ayant un surpoids montre qu'ils sont supérieurs à la norme pour l'âge, 2) la
réduction de l'apport alimentaire entraîne une réduction pondérale, 3) un impact
diététique sur l'enfant et sur sa famille est possible, si on considère que l'excès
alimentaire joue un rôle prépondérant par rapport au facteur génétique. De plus,
les enfants ayant un surpoids ont souvent une inactivité relative et, semble-t-il, une
diminution de leur consommation énergétique lorsqu'ils sont actifs.
2. Complications
Les complications du surpoids "simple" sont rares chez l'enfant : hypertension
artérielle, gène cardio-vasculaire et gène respiratoire. Les deux risques sont : 1) les
mauvaises habitudes alimentaires qui conduisent à un surpoids à l'âge adulte, 2) la
mauvaise tolérance psychologique du surpoids. Les moqueries des camarades
conduisent à un repli de l'enfant sur lui-même. Le malaise du corps conduit à une
réduction de l'activité sportive et des activités de groupe.
3. Traitement
Les drogues, en particulier les anorexigènes, ne sont pas utilisées chez l'enfant. Un
soutien psychologique peut être bénéfique: 1) par la résolution d'un problème
responsable de la polyphagie; 2) il peut permettre une acceptation du régime et
une meilleure prise de conscience de l'image du corps. Une prise en charge en
groupe, avec des discussions diététiques, peut être efficace. Encourager l'enfant à
pratiquer le sport qui lui fait plaisir constitue aussi une bonne aide.
L'élément essentiel du traitement est la modification des habitudes alimentaires.
Ses principes sont : 1) réduction de l'apport calorique avec régime écrit et prise en
charge diététique, 2) réduction de la consommation des sucres et des graisses et
suppression des grignotages, 3) repas réguliers et en particulier nécessité d'un petit
déjeûner.
4. Conclusion
Le surpoids de l'enfant est le plus souvent lié à un excès d'apport alimentaire. Il est
très rarement lié à une anomalie endocrinienne mais celle-ci doit être reconnue car
elle nécessite un traitement spécifique. Le maintien d'une vitesse de croissance
staturale normale est contre une pathologie. Le traitement consiste en une prise en
charge diététique, au besoin complétée par une prise en charge psychologique.
Cas clinique - Surpoids de l'enfant
252
M..., âgé de 12 ans est adressé par son médecin traitant pour une prise de poids
rapide, associé à un ralentissement de la vitesse de croissance en taille. En effet,
dans les deux dernières années il a grossi de 15 kg et il a grandi seulement de 4
cm. Parallèlement il se plaint de douleurs dorsales importantes.
Il n'a pas d'antécédent pathologique personnel ou familial notable.
A l'examen clinique, on trouve une surcharge pondérale diffuse, des vergetures
pourpres et une maxima tensionnelle élevée à 150 mm de Hg.
253
ANOREXIE MENTALE (n° 250 - 334)
Philippe Touraine
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker
Points importants
L'anorexie mentale survient le plus fréquemment à l'adolescence et concerne
avant tout les jeunes filles.
Il s'agit d'un trouble du comportement alimentaire multi-factoriel, survenant sur
une personnalité psychiquement prédisposée.
L'amaigrissement et l'aménorrhée constituent les deux stigmates majeurs de ce
tableau.
Le pronostic vital peut être mis en jeu imposant une prise en charge spécialisée.
Le suivi à long terme avec psychothérapie de soutien est nécessaire.
254
1. Diagnostic
1.1.L'anamnèse
permet le plus souvent de reconstituer l'histoire de l'anorexie. Très souvent les
premiers signes apparaissent entre 13 et 18 ans, chez des jeunes filles qui
n'avaient aucun problème apparent. Cependant, le début peut être plus précoce,
voire plus tardif au cours de la vie adulte. La recherche de facteurs déclenchants
est fondamentale : auto-restriction alimentaire en raison d'un constat personnel de
surpoids, parfois favorisée par des remarques de l'entourage; rupture affective,
deuil, expérience sexuelle traumatisante.
1.2.Le terrain
joue aussi un rôle fondamental, à la fois de la patiente et de sa famille.
La jeune fille
Elle est le plus souvent hyperactive guidée par un désir de performance et
montrant des signes d'indifférence à la fatigue, au froid, au sommeil. Tous les
prétextes sont bons pour "dépenser" des calories. Cette hyperactivité motrice se
double d'une hyperactivité intellectuelle, ces jeunes filles étant très
classiquement de "bonnes élèves", motivées par la performance intellectuelle. Cet
investissement professionnel et physique leur permet souvent de ne pas se
confronter aux problèmes inhérents à l'adolescence (découverte d'une féminité,
d'une relation affective). En ce sens, l'indifférence affichée de ces jeunes femmes à
toute expérience sexuelle est parlante. Néanmoins, derrière cette apparente
capacité à assumer, se cache le plus souvent une profonde absence de confiance en
soi, une anxiété voire un syndrome dépressif qu'il conviendra d'apprécier
initialement afin que la prise en charge thérapeutique soit la plus complète et
multidisciplinaire. La relation à la nourriture, mélange de fascination et de rejet est
aussi très ambiguë. Il n'est pas rare que ces jeunes femmes décrivent leur intérêt
pour la cuisine, leurs connaissances de la valeur calorique des aliments, leur plaisir
à préparer des repas pour des amis ou la famille tout en prenant soin de rejeter
leur "consommation" alimentaire pour contrôler leur poids. Ce double
comportement pathologique -relation à la nourriture et hyperactivité- s'associe à
une perception de leur corps qui est tout autant pathologique. L'anorexique ne sera
jamais satisfaite de son corps, qui sera toujours trop gros, voire difforme et
justifiant par là même la poursuite des conduites pathologiques précitées.
L'attitude de l'entourage familial
C’est un élément clé à prendre en compte aussi. En effet, très souvent l'anorexie ne
fait que cristalliser des conflits relationnels existant entre l'anorexique et sa famille,
qui en retour réagit initialement avec passion, ce qui ne fait qu'aggraver la
situation. Très souvent, l'image décrite de la famille est celle où le père est absent
mais surtout en retrait par rapport à la personnalité de la mère qui reporte sur ses
enfants ses fantasmes de réussite auxquels elle a dû elle-même renoncer pour
élever ses enfants, sans pour autant donner l'image d'une réussite de féminité
sexuelle. Il faudra d'emblée chercher à déculpabiliser l'entourage pour leur
permettre une acceptation progressive que le problème de leur fille n'est pas
organique et qu'il nécessitera une mobilisation collective familiale probablement sur
une très longue période.
Enfin, des facteurs socio-culturels
Ils sont sans doute importants comme facteurs déclenchants - l'idéal social du
corps féminin parfait, l'exaltation de la performance professionnelle - en sont
autant d'exemples.
255
1.3.Examen clinique
Trois symptômes dominent donc classiquement le tableau d'anorexie mentale.
L'anorexie
Elle est donc en réalité une conduite volontaire de restriction alimentaire. Les
jeunes filles nient le plus souvent ce comportement initialement mais une fois la
relation de confiance établie avec leur médecin, le reconnaissent volontiers. La peur
de grossir motive cette anorexie et justifie à leurs yeux la consommation
d'anorexigènes voire pour certaines la pratique de "vidange" grâce aux
vomissements provoqués, l'utilisation de laxatifs. Celle de diurétiques est par contre
plus rare, associée plus à une perte d'eau que de poids.
L'amaigrissement
Il peut être spectaculaire mais là encore l'attitude initiale de la patiente est à la
dénégation. Le pannicule adipeux fond révélant une personne squelettique, au
visage émacié. On note une amyotrophie musculaire constante; la peau est sèche,
recouverte parfois d'un fin duvet (lanugo); les ongles sont striés et cassants. On
notera une acrocyanose des extrémités, une hypothermie, parfois une
parotidomégalie témoin de la carence nutritionnelle. La tension artérielle est basse,
associée à une bradycardie, souvent responsables de malaises voire de syncopes.
L'aménorrhée
Elle est constante dans ce contexte, fonctionnelle et donc réversible. Son diagnostic
clinique est confirmé par l'absence de réponse à trois tests séquentiels aux
progestatifs 10 jours par mois, l'absence de menstruations signant la carence
oestrogénique.
2.1. Hormonales
L'aménorrhée est marquée par un profil associant des taux bas de
gonadotrophines, FSH et LH, avec des taux plasmatiques d'estradiol effondrés (<
20 pg/ml). Lors de la récupération, on assiste à une reprise de la pulsatilité de la
GnRH marquée par des taux de FSH supérieurs à ceux de LH.
D'autre part, on note un profil d'hypothyroïdie fonctionnelle avec surtout une T3
basse.
Une résistance à l'hormone de croissance est fréquente, expliquant pourquoi les
taux de GH urinaire sont souvent hauts.
Enfin, on retrouve un hypercortisolisme d'entraînement secondaire au stress induit
par la carence nutritionnelle, avec un FLU de 24 heures haut, mais freinable.
2.2. Métaboliques
Il faut avant tout rechercher des signes de déshydratation avec une élévation de
l'urée sanguine; on notera l'existence éventuelle d'une alcalose hypokaliémique,
témoin des pertes digestives en potassium (vomissements, utilisation des laxatifs);
l'hypercholestérolémie est fréquente, témoin plutôt de l'hypométabolisme
communément observé chez ces patientes et reflet de l'hypothyroïdie
précédemment décrite.
256
3. Prise en charge thérapeutique
3.1. Immédiate
L'urgence peut parfois être vitale lorsque des signes cliniques ou biologiques
témoignent d'une profonde dénutrition et déshydratation. La patiente doit être
hospitalisée, avec monitoring ECG, surtout s'il existe une hypokaliémie.
3.4. Évolution
Elle est difficile à systématiser; néanmoins, la longueur de la prise en charge
explique la fréquence des rechutes. L'anorexie reste une pathologie grave dès lors
que le pronostic vital peut être mis en jeu (5% de décès dans certaines études),
que ce soit par cachexie mais aussi par décompensation d'un syndrome dépressif
sous-jacent avec suicide.
Il ne faut cependant pas sous-estimer que près de 70% des anorexiques récupèrent
tant sur le plan du poids que de l'aménorrhée, mais peu d'entre elles parviennent à
se dégager de leur vision pathologique de leur corps.
257
C. S'associe toujours à des troubles du cycle menstruel
D. Peut mettre en jeu le pronostic vital
E. Doit être traitée dès le début par anti dépresseurs
2. Donnez les réponses exactes concernant l'anorexie mentale
A. Une hyperthyroïdie fonctionnelle explique en partie l'amaigrissement
B. L'hypercholestérolémie doit être traitée par des fibrates
C. Un taux de FSH supérieur à celui de la LH signe souvent une reprise de
fonctionnement de l'axe gonadotrope
D. Un traitement oestrogénique doit être systématiquement entrepris
E. L'hypokaliémie est liée le plus souvent aux pertes digestives
258
SYNDROME POLYURO-POLYDIPSIQUE
Raja BRAUNER
Service d'Endocrinologie et Croissance, Hopital Necker-Enfants Malades
SYNDROME POLYURO-POLYDIPSIQUE
Abréviations
Les points les plus importants
1. Hormone antidiurétique et régulation de l'eau
1.1. Hormone antidiurétique
1.2. Régulation de l'eau
2. Expression clinique
2.1. Nouveau-né et nourrisson
2.2. Enfant et adulte
3. Diagnostic
3.1. Diagnostic de trouble de concentration des urines
3.2. Diagnostic de pitresso-sensibilité
4. Etiologies et traitement
4.2. DI rénaux ou pitresso-résistants
5. Conduite pratique devant une polyuro-polydipsie
Cas clinique - SYNDROME POLYURO-POLYDIPSIQUE
Questions à choix multiples
Abréviations
AVP: arginine vasopressine
DDAVP: 1-déamino-8-D-arginine
DI: diabète insipide
Osm : osmolalité
259
La polyuro-polydipsie peut être de type insipide ou être secondaire à une glycosurie
dans le cadre d'un diabète sucré. L'absence de sucre dans les urines exclut un
diabète sucré à l'origine de la polyurie. Nous n'envisagerons ici que le diabète
insipide.
2. Expression clinique
260
Les signes associés dépendent de l'étiologie du DI : signes d'hypertension
intracranienne ou troubles visuels secondaires à certaines tumeurs, ralentissement
de la vitesse de croissance staturale en cas d'insuffisance anté-hypophysaire
associée à l'insuffisance post-hypophysaire, signes généraux d'une histiocytose ou
d'une sarcoidose, signes rénaux dans certains DI rénaux.
3. Diagnostic
L'absence de sucre dans les urines exclut un diabète sucré à l'origine de la polyurie.
La mesure de la diurèse spontanée des 24 h confirme la polyurie et évalue son
importance. La diurèse quotidienne normale dépend de la quantité d'eau absorbée.
Elle est <0,5 litre avant l'âge de 1 an puis augmente jusqu'autour de 1,5-2 litres.
L'objectif des examens est 1) de montrer qu'il y a un trouble de concentration des
urines, 2) de savoir s'il est sensible à l'AVP.
261
capacité à concentrer les urines qui est normale dans la polydipsie primaire.
Cependant, une polyurie prolongée peut perturber la capacité des reins à
concentrer les urines. Une épreuve de restriction hydrique par paliers permet alors
le diagnostic. Les étiologies de la polydipsie primaire sont : 1) polydipsie
psychogène ou potomanie, 2) polydipsie induite par un apport liquidien trop élevé
dès le jeune âge, 3) certaines tumeurs, en particulier des germinomes, qui altèrent
le fonctionnement du centre de la soif.
4. Etiologies et traitement
4.1. DI centraux ou pitresso-sensibles
4.1.1. Etiologies (Tableau II)
Le diagnostic étiologique est le principal problème posé par les DI centraux. En
effet, rapporter un DI à une étiologie est facile lorsqu'il survient après une
intervention chirurgicale sur la région hypothalamo-hypophysaire, après un
traumatisme cranien ou chez un patient ayant une histiocytose connue. Lorsqu'il
parait isolé, un examen neuro-radiologique et une évaluation de la fonction anté-
hypophysaire sont faits de manière systématique.
Tableau II. Etiologies du diabète insipide
Central ou pitresso-sensible
post-chirurgie de la région hypothalamo-hypophysaire, en particulier
craniopharyngiome
tumeurs (30% des DI centraux) en particulier germinome du plancher du
3e ventricule et craniopharyngiome
histiocytose
sarcoidose
séquelles de traumatisme ou de méningite
familial
Rénal ou pitresso-résistant
Isolé, appelé néphrogénique
associé à d'autres signes d'atteintes rénales
uropathies
malformations
néphronophtise
tubulopathie proximale dans le cadre d'un syndrome de Toni-Debré-
Fanconi primitif ou secondaire (en particulier à la cystinose)
acidose tubulaire distale
syndrome de Bartter
hypercalciurie idiopathique.
262
d'anomalie, le DI peut être soit idiopathique, soit secondaire à une histiocytose ou à
une tumeur non encore visible. Le diagnostic de DI idiopathique doit rester un
diagnostic d'exclusion. En effet, une tumeur du plancher du 3e ventricule, type
germinome, peut devenir visible seulement plusieurs mois, voire années, après le
début du DI.
4.1.2. Traitement
Ses objectifs sont : supprimer les levers nocturnes, permettre une scolarité et une
vie normale. Il est basé sur le DDAVP (Minirin®) en administration par cathéter
nasal (100 µg/ml), en spray nasal ou en comprimés (1 cp à 0,1 et 0,2 mg). C'est
un traitement efficace, simple, sans effet secondaire. La plupart des patients sont
équilibrés par 2 administrations quotidiennes.
4.2.1. Etiologies
DI isolé
Il est appelé néphrogénique. Il se transmet le plus souvent selon le mode récessif,
lié au sexe avec une pénétrance variable chez les filles. Les garçons ont donc
souvent une forme plus sévère que les filles. Les premiers symptomes apparaissent
très souvent dès les premiers jours de vie et chez certains lors de l'arrêt de
l'allaitement maternel lorsque la charge osmotique s'accroit brutalement.
DI associé à d'autres signes d'atteinte rénale
L'atteinte peut porter seulement sur le tubule (troubles de concentration des urines
et hydro-électrolytique) ou sur le tubule et le glomérule (créatininémie et azotémie
augmentées, présence de protéinurie et/ou d'hématurie).
4.2.2. Traitement
Régime pauvre en résidus osmotiques (hyposodé, limité en potassium et en
protides) ; chez le nourrisson, le lait maternel est l'aliment de choix ;
Supplémentation hydrique, pouvant chez le nourrisson nécessiter un gavage
gastrique à débit constant ;
Diurétiques thiazidiques ;
Inhibiteurs de la synthèse des prostaglandines, en particulier l'Indométhacine.
263
mesuré en fin de restriction hydrique permet de les différencier (bas ou normal
si central, et élevé si rénal)
diagnostic entre DI (polyurie primaire) et potomanie (polydipsie primaire);
l'épreuve de restriction hydrique par paliers permet en principe de les
distinguer. En cas de doute, un examen neuroradiologique permet d'exclure une
tumeur hypothalamo-hypophysaire
la possibilité d'une tumeur intracranienne non visible au premier examen
neuroradiologique ; il est donc nécessaire de répéter cet examen si la recherche
étiologique est négative
264
A. Administration d'antiprostaglandine
B. Administration d'hormone antidiurétique
C. Difficile à équilibrer
D. Nécessité de nombreuses administrations quotidiennes
E. Le plus souvent, il s'agit d'un traitement de courte durée
265
ADENOMES HYPOPHYSAIRES (n° 344)
Philippe Touraine,
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker
Abréviations
GHRH Growth Hormone Releasing Hormone
IGF-1 Insulin-like Growth Factor 1
GH Growth Hormone
TRH Thyrotropin Releasing Hormone
HGPO Hyperglycémie provoquée par voie orale
GnRH Gonadotropin Releasing Hormone (identique à LHR H)
Points importants
La prise en charge diagnostique et thérapeutique des adénomes hypophysaires
dépend à la fois de la taille de l'adénome et de la sécrétion hormonale associée.
Les adénomes à prolactine sont les plus fréquents (cf chapitre propre)
Les adénomes à GH sont diagnostiqués grâce à des signes cliniques très
caractéristiques.
Les adénomes à TSH sont exceptionnels; les adénomes gonadotropes sont le plus
266
souvent non sécrétants.
Un microadénome hypophysaire ne s'accompagne pas d'insuffisancehypophysaire,
ni de compression chiasmatique.
Un macroadénome hypophysaire doit toujours faire rechercher à la fois des signes
de compression chiasmatique et d'insuffisance hypophysaire associée.
Le traitement d'un adénome hypophysaire sera avant tout chirurgical. Il pourra être
médical en cas de microadénome à prolactine ;
il sera toujours médical de première intention en cas de macro-adénome à
prolactine. L'abstention thérapeutique pourra être
parfois préconisée en cas de microadénome non sécrétant.
267
1.1. Rappel physiologique
268
diabète. Enfin, l'existence de lithiases urinaires n'est pas rare, liées à
l'hypercalciurie fréquemment observée.
Les signes liés au retentissement hypophysaire
Signes d'hypogonadisme : baisse de la libido, impuissance, dépilation chez un
homme; troubles du cycle menstruel chez la femme; ostéoporose dans les deux
sexes.
Signes d'insuffisance thyréotrope : constipation, frilosité, asthénie, perte de
cheveux, prise de poids.
Signes d'insuffisance corticotrope : asthénie, dépigmentation de la peau,
hypoglycémie.
Enfin, il faut savoir que tout patient acromégale présente un risque plus élevé de
développer un cancer ou des polypes du colon, ainsi que certaines formes de
leucémie.
1.5. Traitement
C'est avant tout un traitement chirurgical avec exérèse sélective par voie trans-
269
sphénoidale de l'adénome. Dans les cas d'exérèse incomplète ou impossible, on
peut discuter deux alternatives : la radiothérapie externe qui est efficace au prix
souvent de l'obtention d'une insuffisance anté-hypophysaire à long terme. L'autre
alternative repose sur l'utilisation de dérivés de la somatostatine, traitement
médical efficace notamment sur les signes cliniques commme les sueurs, dont
l'efficacité anti-tumorale est souvent plus tardive que celle anti-hormonale. Ce
traitement injectable en IM est effectué tous les 10 à 15 jours et peut entraîner des
effets secondaires à type de diarrhée notamment. Son prix élevé reste aussi un
obstacle à son utilisation, tandis que la bromocriptine se révèle le plus souvent sans
grande efficacité.
270
4. Adénomes corticotropes (cf. chapitre Hypercorticisme)
5. Insuffisance hypophysaire
Dans la pratique c'est la recherche de l'insuffisance corticotrope qui est importante
même si dans la pratique les décompensations surrénaliennes sont exceptionnelles
dans la mesure où il n'existe pas d'atteinte de la fonction minéralocorticoïde. Sur le
plan clinique, on note l'absence de mélanodermie, une asthénie, une perte de
poids, des malaises avec une tendance à l'hypoglycémie assez souvent révélatrice.
Le déficit gonadotrope
Il est à l'origine d'un tableau d’hypogonadisme avec, suivant l'âge de survenue du
processus tumoral, un retard pubertaire, une aménorrhée primo-secondaire, des
signes d'hypoestrogénie chez la femme avec une baisse de la libido, une
dyspareunie (douleurs au moment des rapports sexuels), des bouffées de chaleur,
une impuissance chez l'homme et une ostéoporose dans les deux cas.
Un traitement substitutif à base d'oestrogènes et de progestérone chez la femme et
d'androgènes chez l'homme sont à prescrire avec une surveillance de ces
traitements sur le volume tumoral.
Le déficit thyréotrope
Est marqué par les signes d'hypothyroidie, à savoir une prise de poids, une apathie,
une asthénie, une frilosité, une constipation. Le bilan retrouve alors une TSH
normale ou basse avec des hormones périphériques thyroidiennes basses.
Le traitement consiste en la prescription de Levothyrox, l'équilibre se faisant non
pas sur la TSH plasmatique mais sur les taux plasmatiques de FT4 et FT3.
Le déficit somatotrope
Est quasi constant dans les insuffisances hypophysaires, mais ne justifiant pas
actuellement le traitement par GH recombinante.
Références bibliographiques
Traité de Médecine de la Reproduction, 3ème édition. Touraine, Schaison et
Mauvais-Jarvis. Edité par Flammarion/Médecine-Sciences, 1997.
Williams Textbook of Endocrinology, 9th edition. Wilson, Foster, Kronenberg and
Larsen. Edited by Saunders, 1998.
271
B. S'associe toujours à une sécrétion excessive d'une hormone hypophysaire
C. Est souvent révélé par un diabète insipide
D. Evolue le plus souvent vers un macroadénome hypophysaire
E. Peut ne pas être opéré de première intention
3. En cas d'insuffisance hypophysaire, donnez les propositions exactes
A. L'insuffisance somatotrope est quasi-constante
B. L'insuffisance thyréotrope est marquée par une TSH haute et une T4
basse
C. L'insuffisance corticotrope est marquée par une tendance à l'hypoglycémie
associée à une mélanodermie.
D. Le test au synacthène ordinaire sur le cortisol est un bon test de
débrouillage.
E. Une ostéoporose peut être observée chez ces patients
272
LES HYPERPROLACTINEMIES
Philippe Touraine
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker
LES HYPERPROLACTINEMIES
Abréviations
Points importants
1. Rappel physiologique
2. Etiologies des hyperprolactinémies
3. Les conséquences d’une hyperprolactinémie
3.1. Risques liés à la tumeur
3.2.Risques liés à l’hypersécrétion de prolactine
4. Manifestations cliniques de l’hyperprolactinémie
5. Bilan à effectuer
6. Traitement des hyperprolactinémies
6.1. Lors d'hyperprolactinémie iatrogène
6.2. En cas de découverte d'un adénome à prolactine
6.3. Chez l’homme
6.4. Hyperprolactinémie et grossesse
Références Bibliographiques
Questions à choix multiples
Abréviations
TRH : Thyrotropin Releasing Hormone
TSH : Thyroid Stimulating Hormone
GH : Growth Hormone
Points importants
Les hyperprolactinémies représentent 20% des causes des troubles du cycle
menstruel.
La pratique d'une imagerie hypophysaire (scanner, IRM) permet d'individualiser
les causes adénomateuses qui s'opposent aux causes iatrogéniques, les plus
fréquentes.
Pour les microadénomes, le traitement sera soit médicamenteux, soit chirurgical
tandis qu'en cas de macroadénome à prolactine, le traitement sera, de première
intention, exclusivement médical.
273
Il n'y a souvent pas de contre-indication à une grossesse au cours des
hyperprolactinémies, sauf quelques cas de macroadénomes envahissants.
Les hyperprolactinémies ont pris une importance considérable ces dix dernières
années en raison de leur fréquence puisqu’on peut considérer que 20% des
anovulations d'origine hypothalamo-hypophysaire sont liées à une
hyperprolactinémie, et aussi compte-tenu de ses possibilités thérapeutiques.
1. Rappel physiologique
La prolactine est synthétisée et sécrétée par les cellules lactotropes de l'hypophyse.
Elle a la particularité d'être sous le contrôle inhibiteur dominant exercé par la
dopamine hypothalamique, ce qui explique d'emblée la fréquence des
hyperprolactinémies iatrogènes. Tout un ensemble de facteurs centraux et
périphériques participent néanmoins à la régulation de sa synthèse ; ainsi la TRH,
outre son action stimulatrice sur la libération de TSH par l'hypophyse, augmente
aussi celle de la prolactine.
Il n’existe pas à proprement parler de rétrocontrôle périphérique, comme pour les
autres hormones synthétisées par l'hypophyse, mais il faut noter le rôle stimulateur
bien démontré aujourd'hui des estrogènes sur la synthèse et la sécrétion de
prolactine et sur la prolifération des cellules lactotropes. Enfin, les hormones
thyroïdiennes exercent un contrôle freinateur sur la sécrétion de prolactine,
notamment par l'intermédiaire d'une stimulation de la dopamine.
Le seul rôle actuellement bien démontré de la prolactine sur le plan physiologique
est celui observé au cours de la lactation avec un effet inducteur sur la synthèse
des protéines du lait.
α-méthylDOPA (Aldomet®)
Amphétamines
Cimétidine (Tagamet®)
Dérivés opiacés
IMAO
Phénothiazines
Halopéridol (Haldol®)
274
Métoclopramide (Primperan®), Domperidone (Motilium®)
Sulpiride (Dogmatil®)
Grossesse
Stress
Sommeil
Tumeurs hypophysaires :
Prolactinome
Acromégalie
Maladie de Cushing
Adénomes mixtes sécrétant la PRL et la GH ou l'ACTH
Syndrome de section de tige
Granulomatoses
Histiocytose, sarcoïdose, tuberculose de la tige pituitaire
Adénomes non sécrétants
Chirurgie, traumatisme crânien
Radiothérapie hypothalamique
Hypothyroïdie
Insuffisance rénale
275
3. Les conséquences d’une hyperprolactinémie
Il faut distinguer les risques liés à l’adénome et ceux liés à l’hypersécrétion de
prolactine.
276
baisse de la libido, une impuissance, mais il est fréquent que des signes témoins
d'une tumeur hypophysaire à type de céphalées ou de baisse de l'acuité visuelle
soient l'occasion de découvrir l'hyperprolactinémie.
5. Bilan à effectuer
Le dosage plasmatique de la prolactine doit être demandé devant chacun des
signes cliniques évoqués. Ce dosage doit être effectué le matin à jeûn, si possible
dix minutes après la pose du cathéter, le "stress" pouvant être parfois responsable
d'augmentation de la prolactine. On ne peut parler de pathologie de la prolactine
chez la femme tant que la prolactine est inférieure à 20 ng/ml, et chez l'homme à
15 ng/ml. Néanmoins, devant tout chiffre considéré comme limite, un deuxième
dosage peut souvent être utile, infirmant ou confirmant l'impression première.
Le test à la TRH, avec notamment deux prélèvements de base aux temps -15 et 0,
reste un élément diagnostic de valeur puisqu'il permet d'une part de confirmer le
diagnostic d'hyperprolactinémie et d’autre part de vérifier son caractère stimulable
ou non. Une réponse négative avec taux de prolactine bloqué sous TRH est en
faveur du caractère "autonome" de la sécrétion et donc de son origine
adénomateuse rendant le test à la TRH plus informatif que le scanner dans les
microadénomes de très petite taille qui ne peuvent être visualisés. En revanche, les
hyperprolactinémies médicamenteuses s'accompagnent le plus souvent d'une
réponse conservée de la prolactine lors du test.
Le scanner centré sur l'hypophyse est à pratiquer devant toute hyperprolactinémie.
C'est l'examen indispensable puisqu'il permet, grâce à sa grande sensibilité, de
diagnostiquer même des petits adénomes ; il est incontestable qu'il a bouleversé
l'approche diagnostique et thérapeutique des hyperprolactinémies en permettant le
diagnostic d'adénomes non visualisables auparavant et en aidant le neuro-
chirurgien dans sa chirurgie d'exérèse. L'IRM est, dans le cas des adénomes à
prolactine, un examen radiologique à demander seulement en seconde intention
(essentiellement du fait de son coût), soit en cas de diagnostic douteux, soit pour
préciser l'extension d'un macroadénome envahissant avant une intervention
chirurgicale. Enfin, la radiographie de la selle turcique qui ne visualise pas
l’adénome mais seulement son retentissement osseux n'a actuellement plus de
grand intérêt diagnostic puisque l'effondrement du plancher sellaire, témoin d'un
volumineux adénome, est bien visible au scanner. Par contre, elle peut révéler des
signes évocateurs de pathologies aussi responsables d'une hyperprolactinémie
comme la présence de calcifications lors d'un crâniopharyngiome, mais qui sont
elles aussi visibles au scanner.
277
régulariser les cycles chez la femme. Toutefois, il n'y a pas eu d'étude à ce jour
permettant d'apprécier l'effet d'un agoniste dopaminergique sur les manifestations
cliniques d'ordre psychiatrique. Dans la mesure où les molécules utilisées
aujourd'hui n'ont pas d'action sélective, on peut comprendre la réserve de certains
psychiatres à voir leurs patients traiter au long cours par la bromocriptine.
278
de nausées, vomissements, impression vertigineuse sont décrits en début de
traitement. Plus récemment a été commercialisé le quinagolide (Norprolac,
comprimés à 75 et 150 mg) qui présente l'avantage de n'être pris qu'en une seule
prise quotidienne et souvent mieux toléré que le Parlodel.
L'efficacité thérapeutique sera établie :
cliniquement devant surtout le retour des cycles et éventuellement des
ovulations sur les courbes de température, voire la survenue d'une
grossesse.
biologiquement par un contrôle régulier de la prolactinémie, vérifiant sa
normalisation et permettant une adaptation de la posologie.
radiologiquement : un scanner de contrôle à 6 et 12 mois montrera parfois
une diminution de taille de l'adénome, correspondant à l'effet antitumoral de
la bromocriptine.
En l'absence d'efficacité clinique et/ou biologique, on peut progressivement
augmenter la dose de Parlodel. Rarement des doses de 30 mg seront nécessaires à
une normalisation du taux de la prolactine et au rétablissement des cycles. Au delà,
on parlera de "résistance à la bromocriptine".
L'abstention thérapeutique
De préférence assortie à un traitement progestatif chez la femme est possible
lorsque :
- l'adénome est petit
- qu'il n'existe pas de désir de grossesse
- qu'il s'agit d'une femme de 40 ans ou plus, avec un adénome peu évolutif.
En l'absence de désir de contraception, le traitement est administré 10 jours par
cycle (du 16ème au 25ème jour du cycle) ou 20 jours par cycle d'un progestatif en
cas de besoin de contraception. L'administration séquentielle d'un progestatif
permet alors :
- de contrebalancer l'hyperestrogénie relative (taux d'estradiol notable,
absence de progestérone) qui accompagne une hyperprolactinémie modérée
(prolactine inférieure à 100 ng/ml)
- d'entraîner des menstruations régulières à l'arrêt
- à moyen terme, il a été montré que les progestatifs norstéroïdes tendent à
diminuer la sécrétion de prolactine probablement par leur effet
antiestrogénique au niveau des cellules lactotropes.
279
chirurgicale est formelle.
Le traitement complémentaire de l’insuffisance gonadotrope s’impose le plus
souvent. En effet, à moins d’une correction parfaite des taux de prolactine sous
bromocriptine, il persiste un hypogonadisme clinique et biologique (testostérone
≤ 2 ng/ml) qui impose l’adjonction d’un traitement par androgènes, soit sous
forme d’énanthate de testostérone injectable (Androtardyl®), soit sous forme
de gel de Dihydrotestostérone, par voie percutanée (Andractim®).
Références Bibliographiques
Bricaire C., Kerlan V., Kuttenn F., Mauvais-Jarvis P. La grossesse : une modalité
de guérison des adénomes à prolactine? Presse Méd. 1988 ; 17 : 2117-2119.
Klibanski A., Biller B. M., Rosenthal D. I., Schoenfeld D.A., Saxe V. Effects of
prolactin and estrogen deficiency in amenorrheic bone loss. J. Clin. Endocrinol.
Metab. 1988 ; 67 : 124-29.
Klibanski A., Greenspan S.L. Increase in bone mass after treatment of
hyperprolactinemic amenorrhea. N. Engl. J. Med. 1984 ; 315 : 542-6.
Molitch M.E. Pregnancy and the hyperprolactinemic woman. N. Engl. J. Med.
1985 ; 312 : 1364-70.
Sauder S. E., Frager M., Case G.D., Kelch R.P., Marshall J.C., Abnormal patterns
of pulsatile luteinizing hormone secretion in women with hyperprolactinemia and
amenorrhea: responses to Bromocriptine. J. Clin. Endocrinol. Metab. 1984 ; 59 :
941-8.
Schlechte J., Dolan K., Sherman B., Chapler F., Luciano A. The natural history of
untreated hyperprolactinemia: a prospective analysis. J. Clin. Endocrinol. Metab.
1989 ; 68 : 412-8.
Serri O., Rasio E., Beauregard H., Hardy J., Somma M. Recurrence of
hyperprolactinemia after selective transsphenoidal adenomectomy in women
with prolactinoma. N. Engl. J. Med. 1983 ; 309 : 280-3.
Sisam D.A., Sheehan J.P., Sheeler L.R. The natural history of untreated
microprolactinomas. Fertil. Steril. 1987 ; 48 : 67-71.
280
Touraine P. et Kuttenn F. - Faut-il traiter toutes les hyperprolactinémies? La Rev. du Prat.
1993, 213, 20-27.
281
LES AMENORRHEES (n° 18)
Philippe Touraine
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker
Abréviations
FSH : Follicle Stimulating Hormone
LH :Luteotropic Hormone
GnRH :Gonadotropin Releasing Hormone
Points importants
L'aménorrhée secondaire témoigne d'une rupture de la cyclicité
menstruelle.Celle-ci met en jeu un ensemble de structures anatomiques, de
l'hypothalamus à l'utérus, dont chacune est fondamentale pour permettre
l'obtention de menstruations cycliques régulières.
L'examen clinique aidé de quelques dosages hormonaux suffit alors pour
comprendre la base physiopathologique de l'aménorrhée et permettre la
thérapeutique la plus adéquate.
Il faut toujours penser à la grossesse en 1ère intention devant toute
aménorrhée secondaire.
Les dosages plasmatiques d’estradiol et de FSH sont avec celui de la prolactine à
faire dans un premier temps. Un estradiol et une FSH bas orienteront vers une
282
origine hypothalamo-hypophy-saire de l’aménorrhée tandis qu’un taux haut de
FSH signera l’existence d’une insuffisance ovarienne.
Enfin, la pratique dans certains cas - notamment d'une aménorrhée primaire
avec retard pubertaire- d’un scanner ou d'une IRM centré(e) sur la selle turcique
constitue un examen complémentaire précieux à la recherche d’une tumeur
hypothalamo-hypophysaire.L'aménorrhée se définit comme l'absence prolongée
de règles. On distingue classiquement
l'aménorrhée primaire chez la jeune fille de 17 ans ou plus qui n'a jamais eu ses
règles
l'aménorrhée secondaire chez la femme n'ayant pas eu ses règles depuis au
moins trois mois.
Grâce à un interrogatoire bien mené, à l'examen clinique et à la pratique de
certains examens complémentaires, le diagnostic étiologique pourra être posé et le
traitement adéquat proposé à la patiente.
1. Rappel physiologique
La survenue des menstruations implique l'intégrité de l'axe gonadotrope (système
nerveux central, hypothalamus, hypophyse, ovaires) et du tractus génital (utérus,
vagin). Toute perturbation à l'un de ces niveaux peut être à l'origine d'une
aménorrhée.
La menstruation est une hémorragie utérine correspondant à l'élimination de
l'endomètre nécrosé qui se produit
soit ≤14 jours après l'ovulation, en absence de fécondation et de nidation; elle
survient après la chute brutale des taux d'estradiol et de progestérone
soit en cas d'anovulation, lors des fluctuations du taux d'oestrogènes,
aboutissant à une hémorragie de privation qui survient de façon anarchique.Les
sécrétions des hormones ovariennes, estradiol et progestérone sont sous la
dépendance des gonadotrophines hypophysaires, FSH et LH, elles-mêmes sous
le contrôle d'une neurohormone hypothalamique, la GnRH encore appelée
classiquement LH-RH. La sécrétion de la GnRH a la particularité d'être pulsatile,
la libération pulsatile de GnRH variant en fréquence et en amplitude tout le long
du cycle menstruel, sous les influences stimulatrices ou inhibitrices de certains
facteurs hormonaux ou neuroendocriniens. Des variations de l’amplitude et de la
fréquence de la libération pulsatile de GnRH dépendent les modifications du
rapport de sécrétion FSH/LH. Il est enfin important de noter que deux
mécanismes principaux conditionnent l'intégrité du cycle menstruel :
le pic préovulatoire d'estradiol qui va permettre d'augmenter la sensibilité des
cellules gonadotropes de l'hypophyse à la GnRH et être à l'origine du pic
ovulatoire de LH à mi-cycle
la lutéolyse automatique du corps jaune au 14ème jour qui s'accompagne de la
suppression du rétrocontrôle négatif de la progestérone au niveau de
l'hypothalamus, aboutissant au redémarrage de la sécrétion pulsatile de la
GnRH. A partir de ce bref rappel physiologique, on conçoit mieux que toute
perturbation d'un maillon de cette chaîne puisse entraîner une aménorrhée.
283
les antécédents médicaux (maladie chronique), chirurgicaux et les traitements
suivis par la jeune fille.
les antécédents familiaux avec la notion de puberté tardive dans la famille
l'évolution de la courbe staturale et pondérale de la patiente
le mode de vie et l'environnement social et familial
l'existence de douleurs pelviennes, de galactorrhée, de céphalées et de troubles
visuels.
L'examen physique, sera avant tout centré sur la recherche de signes pubertaires
et appréciera outre le développement des caractères sexuels secondaires (pilosité
pubienne et axillaire, développement mammaire), l'existence d'une galactorrhée ou
de signes d'hyperandrogénie clinique.
On distingue deux grands groupes d'étiologies aux aménorrhées primaires en
fonction de leur association ou non à un impubérisme.
284
2.1.2. Le déficit gonadotrope isolé.
Il réalise un hypogonadisme hypogonadotrophique. Un adénome hypophysaire peut
être à l’origine d’un tel tableau mais il s’agit le plus souvent du Syndrome de De
Morsier, rare, qui associe à l'hypogonadisme une anosmie. Outre l'anosmie
retrouvée dans ce syndrome, un trait fréquemment retrouvé chez ces jeunes filles
est l'existence d'une grande taille qui s'explique du fait de l'absence de soudure des
cartilages de conjugaison.
Le bilan hormonal pratiqué retrouve des taux de gonadotrophines effondrées (FSH
et LH inférieures à 2 mUI/ml) ainsi que ceux d'estradiol (< 20 pg/ml). Le test à la
LH-RH retrouve le plus souvent une réponse nulle, du fait à la fois d'une absence
prolongée de stimulation hypophysaire par la GnRH et d'une absence
d’imprégnation des cellules gonadotropes par les oestrogènes.
Le traitement sera donc exclusivement à visée substitutive en oestrogènes et
progestérone. Là encore, le traitement débutera par la prescription d'oestrogènes
en continu pour permettre le développement mammaire. Lors de la survenue de
règles sous traitement oestrogénique seul, la prescription d'oestrogènes et de
progestatifs en traitement séquentiel est à proposer. Il est toujours plus
souhaitable d'utiliser dans un tel contexte des oestrogènes et de la progestérone
naturels plutôt qu'un traitement oestroprogestatif antigonadotrope pour éviter de
masquer un éventuel retard pubertaire, dont le diagnostic différentiel avec le déficit
gonadotrope isolé peut être souvent difficile. Ultérieurement, en cas de désir de
grossesse, l’utilisation de la pompe à GnRH, qui reproduit physiologiquement la
libération pulsatile de GnRH, permet l’obtention de grossesse. Le principe consiste
en la pose d’un cathéter en intra-veineux, la libération de GnRH se faisant toutes
les 90 minutes. Les résultats sont dans l’ensemble très bons.
2.1.3.Dysgénésie gonadique
L'impubérisme s'accompagne parfois d'anomalies du morphotype qui permettent
d'évoquer alors d'emblée ce diagnostic : c'est le cas du syndrome de Turner, qui
associe :
- une petite taille,
- un impubérisme,
- des dysmorphies,à un caryotype XO.
L'impubérisme est total avec des organes génitaux de type infantile (vulve, vagin).
Le syndrome dysmorphique associe classiquement un cou palmé, une implantation
basse des cheveux, des naevi cutanés, un cubitus valgus, un raccourcissement du
4ème métacarpien.
A ce syndrome dysmorphique s'associe un nanisme aboutissant à une taille
définitive le plus souvent inférieure à 1,50 m.
Le diagnostic repose sur l'existence d'un profil hormonal d'hypogonadisme
hypergonadotrophique avec un estradiol effondré et des gonadotrophines élevées
(> 50 mUI/l). L'absence de corpuscule de Barr à l’examen du sexe chromatinien
permet de confirmer le diagnostic avant d'avoir le résultat du caryotype de type 46
XO.
Il n'est pas nécessaire alors de pratiquer une coelioscopie qui retrouverait un aspect
de bandelettes ovariennes sans présence de cellules germinales sur le prélèvement
biopsique.
Le traitement substitutif oestroprogestatif sera à entreprendre comme pour les
autres causes, d'abord oestrogénique puis séquentiel, mais ne devra être débuté
qu'une fois la croissance achevée pour éviter une soudure précoce des cartilages de
285
conjugaison. Le traitement spécifique par la GH recombinante est de plus en plus
proposé sans qu’on sache si en définitive, la taille finale est supérieure à ce qu’elle
aurait été, sans traitement. Enfin le problème de la stérilité, bien sûr définitive, sera
progressivement abordé, le seul recours étant celui du don d'ovocytes.
286
Syndrome de Rokitansky Kuster
L’absence d’utérus s'intègre le plus souvent dans le cadre du Syndrome de
Rokitansky- Kuster associant une absence congénitale à la fois d'utérus (évoqué
par l’échographie pelvienne, confirmé par la coelioscopie) et de vagin. Le traitement
chirurgical visera à la reconstruction d'une cavité vaginale pour permettre une vie
sexuelle.
287
oestroprogestative normodosée qui permettra un freinage optimal de l'axe
gonadotrope.
On pourra surtout si le tableau d'hyperandrogénie est majeur, proposer un
traitement associant l'acétate de cyprotérone à un oestrogène, l'acétate de
cyprotérone présentant une action antiandrogénique majeure en plus d'une forte
action antigonadotrope.
En cas de désir de grossesse, un traitement par citrate de clomiphène est le
traitement de choix, donnant le plus souvent de bons résultats.
3. Aménorrhées secondaires
Il faut toujours garder présent à l'esprit que la grossesse constitue la cause la plus
fréquente d'aménorrhée secondaire. L’examen clinique à la recherche d’un gros
utérus, d’un col violacé et la confirmation de la grossesse par un seul dosage de
bhCG permet souvent d'éviter la multiplication de bilans inutiles.
288
3.1.“Aménorrhées épiphénomènes”
L'aménorrhée peut en effet survenir dans le cadre de maladies générales
(insuffisance rénale, cardiopathie, hépatopathie) et n'être donc qu'un
épiphénomène dont la régression est souvent liée à l'amélioration de la pathologie
sous-jacente.
Outre ces pathologies générales, il faut savoir que nombre de pathologies
endocriniennes peuvent s'accompagner d'une aménorrhée qui, là encore,
régressera avec la correction de la pathologie sous-jacente. Ainsi, il en va :
des pathologies thyroïdiennes
des pathologies surrénaliennes, au cours de la maladie d'Addison mais surtout
dans les tableaux d'hypercorticisme où l'aménorrhée constitue un des premiers
signes.
289
oestrogénodépendants.
290
3.4.2. Causes non tumorales
Outre l'aménorrhée secondaire à une adénomectomie hypophysaire entraînant une
insuffisance gonadotrope, il faut retenir l'insuffisance gonadotrope liée à une
nécrose hypophysaire, dans le cadre du syndrome de Sheehan.
On retrouve toujours d'après l'interrogatoire l'existence d'un accouchement très
hémorragique mais aussi suite à tout autre traumatisme à l'origine d'une nécrose
ischémique.
Dans sa forme globale, le tableau est celui d'une aménorrhée secondaire débutant
avec l'absence de retour de couches lors du post-partum, d'une absence de montée
laiteuse et d'un tableau plus général de panhypopituitarisme.
Les dosages hormonaux des hormones périphériques ainsi que les tests de
stimulation hypophysaire confirmeront le diagnostic.
Le traitement sera avant tout substitutif des diverses fonctions antéhypophysaires
et en ce qui concerne l'axe gonadotrope, associera un oestrogène du 1er au 25ème
jour du mois et un progestatif les 10 ou 12 derniers jours du traitement
oestrogénique.
Les autres causes non tumorales sont plus rares. Elles sont décrites comme
hypophysaires, mais elles peuvent aussi atteindre la tige pituitaire et la base
hypothalamique :
traumatique (section de la tige)
chirurgicale : après exérèse d'adénome hypophysaire
infectieuse : arachnoïdite, séquelles de méningite
infiltration de la base : sarcoïdose, réticulose X...
291
muqueuse, favoriser un confort physique et psychique et prévenir la
déminéralisation osseuse.
Une fenêtre thérapeutique tous les six mois est souhaitable pour permettre
d'observer une éventuelle reprise de la fonction gonadotrope. Dans ce cas, et
pendant une période intermédiaire, on note une réponse préférentielle de la FSH
sur la LH au cours du test à la LH-RH. Le passage au seul traitement progestatif 10
jours par mois s'impose alors.
En cas de désir de grossesse, tout dépend du stade de déficit gonadotrope. En
phase de récupération, un traitement par citrate de Clomiphène peut être proposé.
En cas d'insuffisance gonadotrope globale persistante, un traitement par
administration pulsatile de LH-RH à l'aide d'une pompe portable peut être proposé,
avec obtention de résultats tout à fait remarquables.
Références bibliographiques
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France) Endocrinologie 10027 C20, 1991 : 8 pages
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gonadotropin-releasing hormone (GnRH) secretion in men and women. Recent
Prog. Horm. Res., 1988 ; 41 : 473-531
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de la reproduction. P. Mauvais-Jarvis, R; Sitruk-Ware (eds) 2e ed. Flammarion
Médecine-Science ed., Paris, 1988 : pp. 1-16
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in hypothalamic amenorrhea. Hum. Reprod., 1988 : 3 : 473-477
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L’hirsutisme, Monographie. Flammarion Médecine-Science ed., Paris, 1988 : pp.
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KUTTENN F., RIGAUD C., WRIGHT F. MAUVAIS-JARVIS P. Treatment of
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France), Thérapeutique, 25219 A 10, 1992 : 10 p.
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gonadotropin secretion in women with hypothalamic amenorrhea : evidence that
reduced frequency of GnRH secretion in the mechanism of persistent
anovulation. J. Clin. Endocrinol. Metab., 1983 ; 51 : 851-858
SITRUK-WARE R., VARIN C., CLAIR F., MAUGIS E.L., FERMANIAN J., MAUVAIS-
JARVIS P.In vivo effects of progestins on prolactin secretion. J. Clin. Endocrinol.
Metab., 1983 ; 50 : 575-578
Q.C.M. AMENORRHEE
1. Dans le cadre du bilan d'une aménorrhée secondaire, quels sont les examens
nécessaires à votre orientation diagnostique :
A.Prolactine
B.Estradiol
C. Progestérone
D.FSH
E. Hormone de Croissance (GH)
2. L'origine ovarienne d'une aménorrhée peut-être suggérée par :
A.Des tests séquentiels aux progestatifs négatifs
B.Une FSH élevée
C.L'existence d'une galactorrhée
D.Un scanner hypophysaire normal
E. Un test à la LH-RH négatif
3. Le tableau d'Ovaires Polykystiques (OPK) peut associer :
A.Des signes d'hyperandrogénie
B.Une insulinorésistance
C.Des tests séquentiels aux progestatifs négatifs
D.Des follicules immatures
E.Des taux de progestérone le plus souvent normaux.
293
MENOPAUSE (n° 154)
Catherine Deneux
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker
Abréviations
THS : traitement hormonal substitutif
AT III : antithrombine III
ATCD : antécédents
CI : contre-iondications
Points importants
* Ne pas confondre :
- la Pré-Ménopause, tant que persiste une secrétion d'estradiol, qui se
traduit par anovulation, dysovulation, cycles irréguliers, signes d'hyperestrogénie
relative
- la Ménopause : il n'y a plus de secrétion d'estradiol. Le taux de FSH est
haut. Le test à la progestérone est négatif (= pas de règles).
* Importance de la prise en charge de la préménopause : nécessité de corriger le
déficit en progestérone et l’hyperestrogénie relative par l’administration de
progestatifs 10 jours/mois, du 16ème au 25ème jour du cycle.
* En l’absence de traitement hormonal, la ménopause confirmée est responsable de
signes de privation oestrogénique :
- à court terme : bouffées de chaleur, asthénie, humeur dépressive, signes
génito-urinaires de carence estrogénique
- à plus long terme : augmentation du risque d’ostéoporose, augmentation
du risque cardio-vasculaire
294
* Le traitement consiste en l'administration d'estradiol et de progestérone.
* L’association d’un progestatif au traitement estrogénique est indispensable afin
d’éviter le risque de développement d’un cancer endométrial.
* Les seules contre-indications formelles du THS sont les ATCD de cancer
estrogeno-dépendant (sein, endomètre).
* Ne pas faire d’amalgame entre contraception estroprogestative et traitement
hormonal substitutif de ménopause estroprogestatif : contre-indications et effets
secondaires différents (du fait de molécules, doses, et voies d’administration
différentes).
En particulier, les ATCD cardio-vasculaires artériels et les désordres
métaboliques ne contre-indiquent pas le THS de ménopause.
1. Définitions
La ménopause se définit éthymologiquement comme la cessation des
règles. Elle est liée au vieillissement de l’ovaire et à l’épuisement du capital
folliculaire (la diminution progressive du capital folliculaire ovarien débute durant la
vie foetale et se poursuit dans l’enfance et tout au long de la vie génitale),
induisant une insuffisance estrogénique.
La ménopause naturelle survient, en France, en moyenne entre 50 et 55
ans. La ménopause est dite “ précoce ” si elle survient avant l’âge de 40 ans. Elle
peut être induite par des causes évidentes : castration chirurgicale, radiothérapie,
chimiothérapie, maladies virales (ovarite ourlienne) ou spontanée. Une ménopause
précoce spontanée impose un bilan étiologique comportant un caryotype (mosaïque
turnérienne méconnue) et la recherche d’anticorps anti-ovaires (causes auto-
immunes). On retrouvera parfois des antécédents familiaux identiques.
La ménopause proprement dite est précédée d’une période de transition : la
“ préménopause ” (périménopause pour les anglo-saxons), de durée variable, qui
est caractérisée par l’installation progressive d’irrégularités menstruelles.
1.1. Préménopause
Cette période correspond à la diminution progressive de la fonction exocrine
de l’ovaire, avec raréfaction puis disparition des ovulations, alors que la fonction
endocrine persiste de façon incomplète et dissociée. Sur le plan clinique, cela se
traduit par l’installation d’irrégularités menstruelles avec cycles dysovulatoires. Sur
le plan hormonal, il en résulte un déficit en progestérone contrastant avec une
sécrétion d’estradiol normale voire élevée; on parle alors d’hyperestrogénie
relative.
295
2. Deuxième phase dite de corps jaune inadéquat :
Elle est caractérisée par la raréfaction des follicules et par l’inefficacité croissante de
la FSH à parvenir à une maturation folliculaire cyclique normale. L’élévation de la
FSH s’accentue, et du fait de cette hyperstimulation, l’hyperestrogénie est
fréquente (estradiol plasmatique > 200 pg/ml). Les ovulations deviennent tardives
et de qualité médiocre, avec formation d’un corps jaune de mauvaise qualité. La
phase lutéale est raccourcie à 10 - 12 jours et la concentration plasmatique de
progestérone est constamment diminuée.
Ce déséquilibre estroprogestatif favorise oedème et hyperplasie au niveau des
tissus cibles, en particulier le sein et l’endomètre. Ceci se traduit
par des manifestations fonctionnelles : syndrôme prémenstruel, mastodynies
et par le développement de lésions tissulaires : mastopathie bénigne,
hyperplasie endométriale, fibromyomes utérins.
3. Troisième phase dite phase anovulatoire :
Elle correspond à l’épuisement du stock folliculaire. Les ovulations ont disparu mais
les concentrations d’estradiol sont variables et parfois encore hautes.
La FSH plasmatique s’élève encore pour approcher des taux observés après la
ménopause. La LH commence à s’élever.
Les cycles sont longs avec hémorragies de privation irrégulières.
296
1.1.2. Traitement
En pratique, au cours de la première phase de la préménopause, ancun traitement
n’est nécessaire.
Par contre, il est souhaitable qu’un traitement séquentiel par des progestatifs
soit instauré dès qu’apparait une insuffisance lutéale :
- ce traitement est administré du 16ème au 25ème jour du cycle,
c’est à dire durant la phase lutéale théorique.
- il permet de régulariser les cycles, mais surtout de prévenir les
conséquences tissulaires du déséquilibre estroprogestatif.
- choix du type de progestatif (cf. tableau 2): il dépend de la
symptomatologie clinique de chaque femme et de l’existence éventuelle de lésions
mammaires ou utérines.
1.2. Ménopause
La ménopause correspond à l’arrêt définitif du fonctionnement ovarien, avec une
aménorrhée irréversible. Celle-ci est confirmée en pratique par un test aux
progestatifs negatif (c’est à dire par l’absence de règles après prise d’un progestatif
pendant 10 jours), 3 cycles consécutivement.
La concentration sérique d’estradiol est effondrée (< 20 pg/ml). Les concentrations
plasmatiques des gonadotrophines FSH et LH sont élevées.
297
manifestations vasomotrices avec sensation de chaleur et crises
sudorales, à prédominance nocturne.
surtout pendant les 2 premières années après l’installation de la ménopause ;
parfois pendant 10 ans.
Troubles psychiques :
asthénie
irritabilité, anxiété, troubles du sommeil, syndrôme dépressif
baisse de la libido
Troubles génito-urinaires :
Aprés plusieurs mois de carence estrogénique, apparait une atrophie du tractus
génital, et des troubles de la statique pelvienne. Les muqueuses génitales sont
pâles et atrophiques lors de l’examen au spéculum. Signes fonctionnels :
sensation de sécheresse vaginale, dyspareunie
incontinence urinaire
A long terme :
Ostéoporose :
La carence estrogénique induit une perte osseuse accélérée qui s’ajoute à la perte
osseuse physiologique liée au vieillissement. Elle est maximale les premières
années qui suivent la ménopause. Chez les femmes dont la minéralisation était
faible ou dont la vitesse de déminéralisation est rapide, elle peut aboutir à une
ostéopénie sévère. Elle intéresse l’os cortical (poignet, fémur) et surtout l’os
trabéculaire (vertèbres).
Les mécanismes d’action des estrogènes sur l’os sont encore mal connus : ils ont
une puissante action inhibitrice de la résorption osseuse, et auraient également une
action directe sur la formation osseuse.
Cette perte osseuse explique l’incidence accrue chez les femmes âgées des
fractures-tassements vertébraux, et des fractures du poignet et du col du fémur.
Pathologies cardio-vasculaires :
L’incidence des maladies cardio-vasculaires chez les femmes en période d’activité
génitale est inférieure à celle observée chez les hommes du même âge. De plus,
diverses études épidémiologiques suggèrent une augmentation du risque
coronarien associée à la ménopause.
Les estrogènes endogènes exerceraient donc un effet protecteur vis à vis du risque
vasculaire artériel. Deux mécanismes pourraient concourir à cette action protectrice
: d’une part un effet direct des estrogènes sur les parois vasculaires, démontré
chez l’animal ; d’autre part, un effet bénéfique sur le profil lipidique.
1.2.2. Traitement
Le traitement hormonal substitutif (THS) ne doit être instauré
qu’après confirmation de la ménopause :
- soit biologiquement par la constatation d’une concentration plasmatique
d’estradiol effondrée associée à des taux de gonadotrophines élevés, notamment
chez les femmes hystérectomisées.
- soit cliniquement par la négativité de 3 tests aux progestatifs consécutifs,
éventuellement associés à des bouffées de chaleur.
298
Les bénéfices attendus du THS sont :
- à court terme: disparition des signes fonctionnels gênant la qualité
de vie des patientes : bouffées de chaleur, troubles de l’humeur, manifestations
génito-urinaires.
- à long terme : . prévention de la perte osseuse
. rôle potentiellement bénéfique sur
la morbimortalité cardio-vasculaire et
l’incidence de la maladie d’Alzheimer
Principes :
a. Respecter les contre-indications de l’estrogénothérapie :
- liées à leur pouvoir mitogène :
CI absolues : ATCD personnels de cancer du sein et de l’endomètre
CI relatives : ATCD personnels de mastopathie bénigne, de fibromes utérins
ATCD familiaux de cancer du sein : à évaluer au cas par cas
- liées aux effets vasculaires et métaboliques :
Elles concernent - les estrogènes de synthèse : non indiqués dans le THS de
ménopause
- de façon relative : les estrogènes naturels ou conjugués
équins, administrés par voie orale; l’effet de premier passage hépatique aurait des
conséquences défavorables sur les paramètres de la coagulation.
En cas d’antécédents cardio-vasculaires, d’HTA, ou de troubles métaboliques
glucido-lipidiques, on choisira donc une estrogénothérapie extradigestive
(transdermique ou percutanée).
Les antécédents thrombo-emboliques veineux contre-indiquent la voie
orale ; l’utilisation de la voie extradigestive est possible en l’absence d’anomalie
constititionnelle de la coagulation ; l’indication est à discuter au cas par cas en
fonction du rapport bénéfice-risque.
299
de gel.
. par voie orale : estradiol micronisé, valérate d’estradiol, estrogènes
conjugués équins.
. rappel : l’ethinyl-estradiol, composante estrogénique des pilules
estro-progestatives, n’est pas utilisé dans l’indication du THS.
Traitement adaptable :
Afin de moduler le type de molécule et la dose utilisée en fonction de
l’efficacité et la tolérance de chaque patiente.
Dans ce cadre, les associations combinées estro-progestatives “ prêtes-à-
l’emploi ” disponibles en France seulement sous forme orale, présentent
l’inconvénient de ne pas pouvoir être adaptées en fonction des effets observés.
En pratique :
a. Bilan préthérapeutique à la recherche des contre-indications :
- Interrogatoire :
. ATCD personnels : pathologies mammaires et utérines, pathologies cardio-
vasculaires et thrombo-emboliques, troubles métaboliques (dyslipidémie,
hyperglycémie)
. ATCD familiaux : cancer du sein, accidents thrombo-emboliques.
- Examen clinique :
. général : poids, prise de la TA, état veineux des membres inférieurs.
. gynécologique : palpation mammaire, toucher vaginal appréciant la taille
de l’utérus, réalisation de frottis cervico-vaginaux.
- Examens complémentaires :
. mammographie, prescrite systématiquement.
. recherche de troubles métaboliques : glycémie à jeûn, cholestérolémie
totale, triglycéridémie.
. en cas d’ATCD thrombo-emboliques veineux presonnels ou familiaux : bilan
d’hémostase à la recherche d’un déficit en AT III, Protéine C, Protéine S, ou d’une
300
résistance à la protéine C activée ou d'une mutation du facteur II..
. le progestatif :
. la progestérone naturelle (ou un dérivé) est choisie en première
intention, en l’absence de facteur mammaire (mastodynies, ATCD de mastopathie
bénigne), ou endométrial (ATCD d’hyperplasie endométriale, de fibrome).
. dans ces dernières situations, on préférera des progestatifs plus
puissants, le plus souvent les dérivés pregnanes ou norpregnanes; rarement, les
dérivés norstéroides en raison de leur effets secondaires métaboliques.
- Exemple d’ordonnance :
OESTROGEL : une réglette par jour du 1er au 25ème jour du mois, à
appliquer sur l'abdomen.
UTROGESTAN : 2 capsules par jour du 14ème au 25ème jour du mois
c. Surveillance du traitement :
- Examen clinique : tous les 3 mois pendant les 6 premiers mois,
puis tous les 6 mois.
. Interrogatoire :
recherche de signes de surdosage : mastodynies, sensation de gonflement;
de sous-dosage : bouffées de chaleur, sécheresse vaginale.
Examen : poids, TA, examen mammaire et pelvien.
301
- Mammographie : tous les 2 ans en l’absence de signes d’appel
(RMO).
- Surveillance métabolique (glucido-lipidique): à 6 mois puis
tous les 2 ans.
- En cas de saignement survenant en dehors de la fenêtre
thérapeutique dans le schéma séquentiel, ou lors du traitement continu, il convient
de rechercher une cause endométriale organique : biopsie d’endomètre,
échographie, et surtout hystéroscopie.
Le THS peut être débuté quel que soit le délai après l’installation de la
ménopause. Sa durée n’est pas limitée sauf en cas de survenue d’une pathologie
mammaire ou utérine imposant son arrêt.
302
Norstéroïdes Lynestrenol Orgamétril 2 cps : 10 mg
(dérivés de la 19-
nortestostérone) Acétate de Primolut-nor 1 cp : 10 mg
noréthistérone
Systen Patch 50 µg
"percutanés"
Gel :
303
Oestrogènes 17ß-estradiol Estreva Cp 1,5 mg
naturels par
voie orale Estrofem Cp 1 - 2 mg
Oromone Cp 2 mg
Provames Cp 1 - 2 mg
Valérate Progynova Cp 1 - 2 mg
d'estradiol
(1) la dose indiquée est celle administrée par 24 h. mais l'application du patch se
fait 2 fois/semaine.
J1 J14 J25
|————————————————————| Oestrogène
|—————————| Progestatif
|————————————————————| Oestrogène
|————————————————————| Progestatif
J1 J31
|————————————————————————| Oestrogène
304
Tableau IV : Critères d’appréciation de la tolérance clinique des estrogènes
Signes de sous-dosage :
Persistance ou réapparition des bouffées de chaleur
Asthénie
Céphalées
Frilosité
Manque de tonus, état dépressif
Douleurs articulaires
Troubles urinaires
Sécheresse vaginale
Signes de surdosage
Mastodynies
Prise de poids
Ballonnement abdominal
Jambes lourdes
Nervosité, irritabilité, insomnie
Références bibliographiques :
1. Bricaire C, Sitruk-Ware R. Péri et post-ménopause . In : P. Mauvais-Jarvis, G.
Schaison, Ph Touraine. Médecine de la reproduction. 3ème édition. Eds Médecine –
Sciences Flammarion. Paris 1997 : :402-421.
305
Les mastodynies, fréquentes au cours de cette période, sont la conséquence de
l’hypoestrogénie.
Aucun traitement hormonal n’est souhaitable au cours de cette phase.
L’administration séquentielle d’un progestatif peut permettre de régulariser les
cycles.
La survenue d’une grossesse est possible au cours de cette période.
2. La ménopause :
Est liée au vieillissement hypothalamo-hypophysaire entrainant un défaut de
stimulation des ovaires.
Est dite précoce si elle survient avant 40 ans.
S’associe à une perte osseuse accélérée, du fait essentiellement de la carence
en progestérone.
Peut être affirmée devant l’absence de règles spontanées depuis 3 mois chez
une femme de 50 ans.
Peut s’accompagner de modifications de l’humeur.
3. Parmi les propositions suivantes, lesquelles sont des contre-indications au
traitement hormonal de la ménopause :
Hypercholestérolémie familiale
Hypertension artérielle
Antécédent personnel de cancer du sein
Coronaropathie
Ostéoporose
4. En cas de mastodynies lors d’un traitement hormonal de la ménopause, il
convient de :
Diminuer la dose quotidienne de progestatif
Diminuer la dose quotidienne d’estrogène
Diminuer la durée de prise d’estrogène
Associer un diurétique
Arrêter le traitement
5. Au cours de la surveillance d’un traitement hormonal de ménopause:
Il convient de réaliser une ostéodensitométrie tous les ans.
Les frottis cervico-vaginaux ne sont plus utiles au-delà de 50 ans.
En cas de traitement séquentiel, la survenue de saignements pendant la fenêtre
thérapeutique doit faire pratiquer une hystéroscopie.
Une hyperlipidémie doit être recherchée après 6 mois de traitement;
Une mammographie doit être régulièrement réalisée, même en l’absence de
signe d’appel clinique.
306
CONTRACEPTION (n° 155)
Catherine Deneux
Service d'Endocrinologie - Maladies Métaboliques - Médecine de la Reproduction,
Hôpital Necker
Abréviations
EP Estroprogestatif
NO monoxyde d'azote
OE estrogène
Points Importants
Effet contraceptif des contraceptions hormonales :
-estroprogestatifs : inhibition gonadotrope réalisée par le progestatif
307
essentiellement par l’éthinyl-estradiol pour les pilules normodosées
-macroprogestatifs : inhibition gonadotrope
microprogestatifs : action locale sur la glaire, la motilité tubaire, la nidation.
Recherche de contre-indications aux différents modes de contraception:
interrogatoire : antécédents personnels et familiaux
examen clinique : poids, TA, état veineux, palpation mammaire, examen
gynecologique
examens biologiques : glycémie, bilan lipidique
bilan de coagulation en cas d’antécédents thromboemboliques personnels ou
familiaux
Schématiquement, choix d’une contraception en fonction
du terrain :
Jeune fille : minipilule estroprogestative
-Femme non nullipare < 35-40 ans : minipilule estroprogestative ou stérilet
Au delà de 35-40 ans : macroprogestatifs ou stérilet (sauf si nullipare)
En cas de contre-indications métaboliques (diabète, dyslipémie, HTA, tabac) :
< 35-40 ans : microprogestatifs
au delà : macroprogestatifs
1. Contraception hormonale
1.1.1.Estroprogestatifs (EP) :
Un peu moins de 30% des femmes françaises en période d'activité génitale utilisent
la pilule classique.
Composition des EP.
l'ethinyl-estradiol est actuellement le seul estrogène de synthèse à être
utilisé,
il est employé pour son pouvoir antigonadotrope, complet à 100 µg/24 h,
modéré ou négligeable à 30 µg/24 h.
les progestatifs sont dérivés du groupe des norstéroïdes en raison du fort
pouvoir antigonadotrope de ces produits. Leur action contraceptive s'exerce
à plusieurs niveaux : antigonadotropes, ils ont également une action
périphérique s'opposant à la nidation par atrophie de l'endomètre, ils rendent
la glaire impropre à la pénétration des spermatozoïdes et diminuent la
308
mobilité tubaire.
Classification des pilules (Tableau I)
En fonction du contenu en estrogène, on distingue :
les pilules macrodosées > 50 µg d'éthinyl estradiol,
les pilules normodosées : 50 µg,
les pilules minidosées : < 50 µg.
En fonction du mode d'administration des estrogènes et des progestatifs :
pilules combinées (ou monophasiques) où la composition des comprimés est
fixe au cours du cycle ;
pilules biphasiques où 2 types de comprimés de composition différente
existent au cours du cycle ;
pilules triphasiques comportant 3 types de comprimés ;
pilules séquentielles où l'éthinyl-estradiol est administré seul 7 à 14 jours
puis en association avec un progestatif.
En fonction du contenu relatif en estrogène et en progestatif :
Il existe des produits a) à prédominance estrogénique = "climat" estrogénique, b) à
prédo-minance progestative : pilule progestative dominante, et c) des pilules
équilibrées. Il est tout à fait essentiel de bien connaître la composition des pilules
afin d'en indiquer correctement l'emploi.
.Association aux dérivés récents (dits "de 3ème génération") des norstéroïdes.
Dans le but de diminuer les effets secondaires des associations estroprogestatives,
en partie imputés au pouvoir androgénique des norstéroïdes, les laboratoires
pharmaceutiques ont mis au point des molécules dérivées des norstéroïdes mais qui
seraient moins androgéniques que les molécules connues auparavant. Il s'agit du
désogestrel, du gestodène et du norgestimate. Ces produits sont dérivés du
norgestrel et lui sont toujours comparés dans les études pharmacologiques ; or, ce
gonane est le plus androgénique de tous les progestatifs. Certains de ces produits
conservent en fait un certain pouvoir androgénique. De plus, les associations ainsi
générées avec l'éthinyl-estradiol paraissent privilégier la potentialité estrogénique
ce qui peut en limiter la tolérance au niveau des tissus-cibles. Une augmentation
des accidents thromboemboliques a par ailleurs été rapportée.
Mode d'administration
Les pilules normodosées sont débutées au 5° jour du cycle, poursuivies 21 jours et
interrompues 7 jours, période pendant laquelle surviennent les métrorragies de
privation. Les pilules minidosées sont débutées au 1er jour du premier cycle de
traitement en raison de leur efficacité plus faible.
Effets secondaires des estroprogestatifs
309
plus importante que n'importe quel type de contraception, ceci n'était plus vrai pour
la contraception orale après 40 ans.
Si la diminution du contenu des estrogènes de 100 µg à 50 µg a permis de réduire
le nombre d'accidents cardiovasculaires, la preuve du bénéfice théorique obtenu par
le passage de 50 à 40, 30, et maintenant 20 µg n'est pas encore réellement
apportée.
15-24 - 0 0 -
+ 10.5 0
25 - 34 - 4.4 2.7 1.6
+ 14.2 4.2 3.4
35 - 44 - 21.5 6.4 3.3
+ 63.4 15.2 4.2
> 45 - 52.4 11.4 4.6
+ 206.7 27.9 7.4
310
Tableau III : Différences des risques vasculaires en contraception et traitement
de la ménopause. * OE = estrogènes
Coagulation :
Le risque thromboembolique existe dès les premiers mois de prescription
d'estroprogestatifs et ne peut être prévu par des tests de coagulation.
Les estrogènes de synthèses sont responsables d'une hyper-coagulabilité en
rapport avec une synthèse accrue de facteurs de la coagulation et d'une diminution
des anticoagulants naturels (antithrombine III), action située au niveau hépatique.
Cette action persiste avec les pilules minidosées.
L'effet des progestatifs norstéroïdes reste mal étudié. Il ne fait cependant pas de
doute qu'à fortes doses ils aient une potentialité thromboembolique. A faibles doses
(microprogestatifs) seul le lynestrenol modifie l'antithrombine III.
Tension artérielle :
L'élévation des pressions systolique et diastolique est pratiquement constante sous
estroprogestatifs (95 p. cent des femmes) ce qui constitue en soi un facteur de
risque vasculaire. Cinq pour cent environ des femmes deviennent hypertendues.
L'existence d'antécédents familiaux d'HTA prédispose tout particulièrement à ce
risque. Les estrogènes de synthèse induisent une rétention hydrosodée ; ils
stimulent la synthèse d'angio-tensinogène (substrat de la rénine) au niveau
hépatique et modifient les constantes cinétiques de la réaction rénine. Les
progestatifs ont certainement aussi une responsabilité dans le risque hypertensif,
variable avec les molécules et encore mal étudié. L'effet positif de la baisse du
contenu en estrogènes en dessous de 50 µg ne paraît pas être aussi net sur les
chiffres de pression artérielle que celui obtenu par le passage de 100 à 50 µg.
Métabolisme lipidique :
Les estrogènes de synthèse administrés per os sont responsables d'une synthèse
accrue des VLDL et donc d'une élévation des triglycérides plasmatiques de l'ordre
de 20 à 80 p. cent par rapport au taux initial. Dans 80 p. cent des cas, les chiffres
normaux ne sont pas dépassés. Les progestatifs norstéroïdes sont capables, s'ils
sont très androgéniques (c'est le cas du norgestrel) d'abaisser les triglycérides. La
résultante de l'effet sur les triglycérides dépend de la potentialité relative de la
pilule employée.
Les estrogènes de synthèse élèvent en parallèle le HDL-cholestérol par baisse de
son épuration hépatique. Les progestatifs norstéroïdes ont un effet inverse corrélé
au pouvoir androgénique. La résultante est là encore fonction de la nature de
l'association progestative : plus une pilule est estrogénique, plus elle élève le HDL-
C, mais cette élévation est associée toujours à une élévation parallèle des
triglycérides. Peut-on raisonnablement considérer que la seule optimisation du
311
rapport HDL/LDL, quel que soit son mécanisme, est corrélée à une amélioration du
risque cardiovasculaire ?
L'effet sur le métabolisme des lipides n'est pas significativement différent à 50 µg
et 30 ou 40 µg d'éthinyl estradiol. On a même montré que 20 µg d'éthinyl-estradiol
administrés isolément peuvent être responsables d'une élévation des triglycérides.
Métabolisme hydrocarboné :
Les estroprogestatifs altèrent la tolérance aux hydrates de carbone. Le rôle des
estrogènes de synthèse paraît majeur mais le mécanisme exact de leur action reste
incomplètement élucidé (insulinorésistance, stimulation de la glucogénèse
hépatique...).
Les progestatifs (norstéroïdes) ont une action anabolisante plus ou moins marquée.
Quoi qu'il en soit, l'association estroprogestative est diabétogène et l'existence d'un
diabète représente une contre-indication à la prescription d'estroprogestatifs, quelle
que soit la formule ou la composition des estroprogestatifs, l'intolérance
hydrocarbonée persistant avec les pilules minidosées, et celles contenant un
progestatif dit "de 3ème génération".
Action sur le poids :
Une prise de poids peut survenir sous estroprogestatifs, plusieurs facteurs sont
impliqués : rétention hydrosodée, effets anabolisants des progestatifs, stimulation
de l'appétit par les estroprogestatifs. Devant une prise de poids exagérée, il faut
rechercher un diabète ou une hyperlipidémie.
En résumé les estroprogestatifs élèvent les triglycérides, la TA, modifient la crase
sanguine, le métabolisme glucidique. Les effets se conjuguent pour accroître le
risque vasculaire, d'autant qu'il existe une potentialisation des différents facteurs :
si le risque de faire un infarctus du myocarde est de 1 en l'absence de tout facteur
de risque, il est multiplié par 4 s'il y a un facteur, par 10 s'il y en a deux, par 78 à
170 s'il y en a trois ou plus.
1.1.3.RISQUE CELLULAIRE.
Estrogènes et progestatifs ont un effet antagoniste sur les tissus cibles (sein,
endomètre). Les estrogènes stimulent la croissance et la multiplication cellulaires,
la progestérone s'oppose à leur action et transforme les tissus prolifératifs en tissus
secrétoires. Toute hyperestrogénie absolue (taux nul de progestérone) ou relative
(rapport estrogène/progestatif supérieur à 1) favorise l'apparition de dystrophies
bénignes ou malignes du sein et de l'endomètre. Ainsi :
le risque de cancer de l'endomètre est accru chez les femmes jeunes sous
contraception séquentielle fortement dosée en estrogènes prescrite de manière
prolongée ;
2) le risque de cancer du sein est augmenté de 7 à 11 fois chez les femmes
sous contraceptifs oraux ayant une mastopathie bénigne préexistante ou
apparue au cours de la prise d'estroprogestatifs ;
3) le risque de mastopathie bénigne est inversement proportionnel au taux de
progestatif, à dose estrogénique égale ; 4) en revanche, une contraception orale
équilibrée protège contre la survenue de dystrophie en supprimant une
sécrétion inadéquate de gonadotrophines, responsable de dysovulation et donc
d'hyper-estrogénie relative.
C'est dire qu'il ne faut pas prescrire de contraception orale chez les femmes ayant
des antécédents personnels de mastopathie bénigne, de cancer du sein ou de
l'endomètre. La notion de cancer hormonodépendant dans la famille proche incite
également à la prudence.
312
Jusqu'au début des années 80, les études épidémiologiques portant sur
l'aggravation éventuelle du risque de cancer du sein sous contraceptifs oraux,
étaient rassurantes, montrant un effet neutre voire protecteur des contraceptifs
oraux. Des études plus récentes pondèrent cependant un peu cet optimisme : elles
montrent de manière assez concluante qu'il existerait une majoration du risque
chez les femmes ayant utilisé la pilule à un âge précoce, avant la première
grossesse menée à terme et pendant une durée prolongée (> 8 ans). Cependant le
nombre de femmes ayant un cancer du sein et appartenant à ces groupes est
encore très restreint, compte tenu de la latence prolongée de sa survenue, rendant
à l'heure actuelle impossible une mise en cause majeure de la pilule. De plus, la
variété des types de pilules utilisées rend aléatoire une analyse du risque en
fonction de leur composition. Les exigences épidémiologiques nécessitent
d'attendre la fin du siècle pour savoir si réellement la pilule constitue un facteur
certain d'aggravation du risque de cancer du sein, et compte-tenu des bénéfices
globaux apportés par ce type de contraception il ne saurait s'agir, dans l'état actuel
des connaissances, d'en déconseiller l'emploi, sous couvert du respect des contre-
indications.
Sous mini-pilule, on s'attachera tout particulièrement à dépister la survenue de
dystrophies bénignes (mastodynie, syndrome prémenstruel, kyste fonctionnel de
l'ovaire). Leur action antigonadotrope étant souvent incomplète, une sécrétion
endogène d'estrogène notable peut persister (responsable d'une hyperestrogénie
relative). Il semble que les préparations triphasiques, mises au point dans le but de
diminuer les spottings soient plus souvent responsables de dystrophies ovariennes.
On manque encore d'informations sur le retentissement des nouvelles classes de
mini pilules comportant des progestatifs dits de "3ème génération".
Les cancers malpighiens ne sont pas hormonodépendants. La présence de dysplasie
du col ou d'antécédents de cancer malpighiens ne représente pas une contre-
indication à l'emploi des estroprogestatifs. La fréquence du cancer du col n'est pas
modifiée par la pilule et les consultations nécessaires au renouvellement des
ordonnances permettent d'en pratiquer le dépistage précoce.
1.1.4.RISQUE HEPATIQUE.
Estrogènes de synthèse et progestatifs peuvent être responsables de cholestase ou
de son équivalent le prurigo (tout comme la grossesse), d'élévation modérée des
transaminases (rôle du radical alkyl en C17 nécessaire à leur action par voie orale
en ralentissant leur métabolisme hépatique).
Au décours d'une hépatite virale, il est conseillé d'attendre un mois après la
normalisation des transaminases pour prescrire un estro- progestatif. En revanche
les hépatopathies persistantes contre-indiquent la prise d'estroprogestatifs.
La péliose et les tumeurs hépatiques (adénomes, hamartomes, hyperplasie
nodulaire) sont peu fréquentes. Le risque d'adénome augmente après 7 ans
d'utilisation de la contraception orale. Les décès (estimés à 16 p. cent dans une
série de 70 cas) se font par rupture et hémorragie.
L'augmentation de la fréquence de la lithiase biliaire cholestérolique est dûe à la
modification de la composition de la bile par les estrogènes de synthèse (diminution
des acides biliaires et augmentation du cholestérol).
AMENORRHEES "'POST-PILULES" ET PROLACTINE.
313
un freinage trop prolongé de l'axe hypothalamo- hypophysaire, ne paraît pas
souhaitable (risque élevé de grossesses pendant la "fenêtre", la nécessité d'un
autre type de contraception n'étant pas toujours bien comprise - effet nocif du
freinage prolongé non prouvé). En revanche, un dosage occasionnel de prolactine
peut permettre de dépister une hyperprolactinémie latente.
L'aménorrhée peut être normoprolactinémique : il s'agit souvent d'une aménorrhée
"psychogène" dont la cause est confondue avec celle qui a provoqué l'abandon de
la contraception.
Dans tous les cas, un bilan endocrinien complet doit être pratiqué avant de
prescrire à nouveau un traitement hormonal.
1.1.5.COMPLICATIONS DERMATOLOGIQUES.
Chloasma, herpès gestationnis, acné, séborrhée et hirsutisme sont directement en
rapport avec la nature hormonale de la prescription. Le lupus érythémateux
disséminé, la porphyrie cutanée sont favorisés par l'administration d'estrogènes ; la
survenue de toxidermie, d'érythème noueux est possible.
- Indications, contre-indications (voir Tableau IV).
- Prescription et surveillance.
Lors de la première consultation, un examen clinique et un bilan biologique
dépistent les contre-indications : 1) par l'interrogatoire : les antécédents
personnels ou familiaux s'opposant au traitement (notamment les accidents
vasculaires précoces familiaux qui semblent exposer au risque d'accidents
vasculaires sous pilule) ; 2) par l'examen clinique : HTA, obésité, mastopathies
bénignes ou malignes ; 3) par la biologie : bilan lipidique (cholestérol, triglycérides
à jeun), glycémie à jeun et post- prandiale. On répète ce bilan à trois mois, à six
mois, puis tous les ans.
Aucun test de l'hémostase ne permet de prévoir un risque thromboembolique. S'il
existe une pathologie familiale de thrombose, un dosage d'antithrombine III, de
Protéine C, de Protéine S, une recherche de Résistance à la Protéine C activée
(mutation Leyden du facteur V) et une recherche de la mutation du Facteur II,
permettent de dépister un déficit congénital.
Des frottis de dépistage sont pratiqués une fois par an.
En cours de traitement, on s'attache à dépister : survenue de mastodynie,
mastopathies bénignes, kyste fonctionnel de l'ovaire, ce qui doit faire modifier la
thérapeutique.
Le choix de l'estroprogestatif de première intention reste discuté : la majorité des
auteurs conseillent une prescription de minipilule en raison de la réduction
théorique du risque vasculaire parallèle à la réduction du contenu en stéroîdes de
synthèse. Si tel est le cas, il est tout à fait important de dépister un effet
antigonadotrope incomplet, inconvénient majeur de ces produits. Il ne faut alors
pas hésiter à faire appel à une pilule plus fortement dosée.
314
Tableau IV
AUTRES -
Affections hépatiques sévères ou
récentes
Lupus
Porphyries
1.1.2. Progestatifs :
les progestatifs utilisés en contraception appartiennent à deux classes. Celle des
norstéroïdes (macro ou microdosés) et celle des prégnanes et de leurs dérivés, les
norpregnanes, employés seulement à fortes doses.
315
1.1.2.1.Norstéroïdes :
Ces progestatifs sont dérivés de la normethyltestostérone par suppression d'un
groupe methyl en C19.
Propriétés :
Ils sont caractérisés par un certain nombre de propriétés souvent différentes de
celle de la progestérone naturelle :
propriétés communes et passant par le récepteur de la progestérone
ce sont d'excellent antiestrogènes :
ils diminuent la quantité de récepteur de l'estradiol, et ils stimulent
l'activité de l'enzyme 17ß-hydroxystéroïde déshydrogénase,
ils s'opposent à la prolifération endométriale, atrophiant l'endomètre
aux fortes doses. Ils s'opposent aussi à l'effet des estrogènes au
niveau mammaire, freinant la prolifération épithéliale et l'oedème
induit par les estrogènes.
Ce sont de puissants antigonadotropes, à fortes doses, propriété
exploitée pour la contraception.
En revanche, ils sont dépourvus de certaines actions de la
progestérone :
ils se lient comme elle au récepteur des androgènes mais contrairement à
la progestérone qui a un pouvoir antiandrogènique, ils peuvent avoir un
certain degré d'effet androgénique (chez - 15 % des sujets).
Ils peuvent avoir une action de rétention hydrosodée par synthèse accrue
d'angiotensinogène au niveau hépatique, contrairement à la progestérone
qui est antiminéralocorticoïde.
Mode de prescription
. Progestatifs macrodosés :
Administrés à la dose de 10 mg/jour du 10° au 25° jour du cycle si les cycles sont
de 26 jours ou plus et du 5° au 25° jour en cas de cycles courts. Ils sont très
efficaces.
Ils sont particulièrement indiqués lorsqu'existe une maladie estrogéno-dépendante
= mastopathie, hyperplasie endométriale, fibrome, tumeur hypophysaire.
Leur emploi est limité par leur retentissement métabolique et vasculaire =
susceptible d'interférer avec le métabolisme glucidique, lipidique, la pression
artérielle, le poids, et non dénués de risques thromboemboliques. Leur emploi est
restreint aux patientes dépourvues de pathologie vasculaire et métabolique.
- Progestatifs microdosés (Tableau V)
Ils sont prescrits à très faibles doses, en continu et doivent être pris à heure fixe.
Ils ne sont efficaces qu'après le premier mois d'utilisation.
A ces doses ils respectent théoriquement l'ovulation, leur action étant uniquement
périphérique et triple : - coagulation de la glaire, qui la rend imperméable aux
spermatozoïdes, - atrophie de l'endomètre qui devient défavorable à la nidation, -
ralentissement du transit tubaire de l'ovule.
En fait, dans un cas sur deux, la dose est suffisante pour exercer un effet
antigonadotrope partiel : le pic de LH est écrêté et des dystrophies ovariennes sont
ainsi induites, en limitant l'emploi. Les antécédents de kystes ovariens fonctionnels
constituent donc une contre-indication. De plus, leur mode d'action rend compte de
leur efficacité limitée.
316
A ces doses en revanche, il n'existe aucun retentissement vasculaire ni
métabolique, ce qui en a fait la contraception de choix de la femme à haut risque.
Effets secondaires : leur efficacité reste incomplète, surtout si sont associés des
médicaments pouvant diminuer l'absorption digestive (antibiotiques) ou accélérant
leur dégradation hépatique (inducteurs enzymatiques). Dans de tels cas, il faut
utiliser un autre mode de contraception tant que dure le traitement.
Les spottings et l'aménorrhée sont fréquents,
ils favorisent la survenue de grossesses extra-utérines,
l'apparition de kystes fonctionnels de l'ovaire et/ou d'intolérance mammaire doit
en faire interrompre l'administration.
Tableau V
1.1.2.2.Pregnanes :
Ce sont des progestatifs dérivés de la 17-hydroxyprogestérone. Les principaux
employés sont l'acétate de chlormadinone et l'acétate de cyprotérone.
Ils sont doués de propriétés proches de la progestérone : pouvoir
progestomimétique sur l'endomètre, activité antiestrogène (plus modeste que celle
des norstéroïdes), activité antigonadotrope qui nécessite des doses plus élevées
que celles employées pour les norstéroïdes. Ils n'ont pratiquement pas d'activité
androgène. L'acétate de cyprotérone, qui en fait partie, est un puissant
antiandrogène.
Leur mode d'action contraceptive est exercé par leur pouvoir antigonadotrope joint
aux actions périphériques des progestatifs. Cependant, ils ne sont pas équivalents :
l'acétate de chlormadinone est employé à la dose de 10 mg par jour en 2 prises
obligatoires en raison de la demi-vie relativement courte, en continu ou du 5°
au 25° jour chez les femmes ayant une fertilité réduite. A ces doses, l'effet
freinateur sur l'ovaire peut être incomplet, variable selon les patientes. Il est
souvent responsable de spottings parfois gênants.
L'acétate de cyprotérone est employé à la dose de 50 mg par jour en une prise
(un comprimé). A cette posologie, c'est un puissant antigonadotrope dont l'effet
met cependant 2 mois à être total. Il s'administre du 5° au 25° jour du premier
cycle, arrêt 7 jours, reprise 21 jours etc... En raison de l'hypoestrogénie induite,
on associe une administration d'estradiol percutané dans un but uniquement
substitutif. Son indication privilégiée est le traitement de l'hirsutisme et de
l'acné sévères.
Ces produits sont dénués de tout retentissement métabolique et vasculaire. Ils
peuvent donc être appelés à remplacer les microprogestatifs dans la contraception
de la femme à risque. Signalons l'intérêt de l'Androcur® (sans estrogénothérapie
associée) chez les femmes lupiques, constituant la seule contraception totalement
efficace proposée dans cette pathologie.
317
1.1.2.3.Norpregnanes :
ces progestatifs sont dérivés des pregnanes par perte d'un radical methyl en C19.
Ces produits sont d'emploi récent dans la contraception. Ceux utilisés dans cette
indication sont l'acétate de nomegestrol et la surgestone. Administrés du 5° au 25°
jours du cycle, ils exercent leur effet contraceptif au niveau central et périphérique.
On manque encore de recul pour affirmer leur efficacité contraceptive qui paraît
meilleure pour l'acétate de nomegestrol que pour la surgestone aux doses utilisées.
On manque également encore d'informations concernant leur tolérance métabolique
et vasculaire bien que les premières études tendent à montrer leur innocuité.
Leur principal inconvénient est la survenue fréquente de troubles des règles :
spotting, aménorrhée.
Il est possible qu'ils constituent dans l'avenir une alternative pour la contraception
chez les patientes à risque métabolique et à fertilité diminuée.
1.2.Contraception parentérale
Dans le but de diminuer les effets secondaires des contraceptifs oraux en rapport
notamment avec l'effet de premier passage hépatique, des tentatives sont
conduites pour administrer les produits par voie extradigestive.
Les molécules administrées sont presque toujours des progestatifs norstéroïdes
en particulier le norgestrel.
Administration par anneaux vaginaux : ce sont des anneaux de silastic
composés d'un réservoir contenant du norgestrel seul ou associé à de l'estradiol.
Le produit est absorbé par voie vaginale et diffuse dans l'organisme.
L'administration extra-digestive permet la bonne tolérance métabolique.
L'anneau est placé dans le vagin 3 semaines et retiré la 4° pour permettre les
métrorragies de privation. Les effets secondaires sont surtout locaux.
318
retirée n'importe quand. Les spottings sont fréquents la première année et
diminuent après.
Administration IM de copolymères contenant du norgestrel. Elle permet
d'assurer une contraception pendant 3 à 6 mois sans effets secondaires
systémiques. Elle reste peu employée.
L'acétate de médroxyprogestérone est utilisé sous forme injectable retard
(dépo-) depuis longtemps. Il est en principe actif 3 mois après une injection de
500 mg. Dans les jours suivant l'injection le taux plasmatique est élevé mais
décroît au cours du temps et l'effet antigonadotrope devient incomplet en fin de
période d'efficacité.
Ce produit, aux doses fortes employées, bien qu'appartenant au groupe des
pregnanes, est susceptible de modifier les fractions lipidiques (baisse du HDL-C) et
de comporter un risque thromboembolique. Certains imputent cet effet à une
liaison de la molécule au récepteur des androgènes, d'autres à une liaison
relativement importante au récepteur des glucocorticoïdes.
319
2. Contraception mécanique
2.1.1.Types
Il en existe diffrents modèles.
Stérilets au cuivre :
Gravigarde, Gyne-T 200 et 380, ML Cu 250 et 375, Nova T Schering, Ombrelle 250,
T au cuivre Schering, T Cuivre-argent Schering. L'adjonction de cuivre permet
d'augmenter l'effet contraceptif, de diminuer la taille du stérilet et d'en améliorer la
tolérance. A changer tous les deux ans.
Stérilet à la progestérone :
2.1.4.Inconvénients et accidents
GROSSESSE
Si une grossesse intra-utérine survient, il est recommandé d'enlever le dispositif
intra-utérin. Cette attitude est justifiée par l'augmentation du risque d'avortement
septique et de septicémie si le stérilet est laissé en place.
Le taux de fausses couches spontanées avec stérilet en place est élevé (55 p. cent)
; si le dispositif intra-utérin est retiré, il atteint 20 à 30 p. cent.
GROSSESSE EXTRA-UTERINE
Sa fréquence est d'environ 5 p. cent : une grossesse sur 20 est ectopique (pour
une fréquence de 1/300 grossesses dans la population normale). Si le stérilet
diminue la fréquence de la grossesse intra-utérine, il est sans action sur la
320
grossesse extra-utérine et le risque relatif de celle-ci est donc accru.
321
considère que la grande majorité des échecs provient d'une mauvaise utilisation du
dispositif.
Les contre-indications sont 1) locales : prolapsus utérin important, cystocèle ou
rectocèle importants, rétroversion ou antéversion utérines sévères, déchirures
périnéales, fistules recto ou vésico-vaginales, le post-partum immédiat ; 2) d'ordre
psychologique : aversion manifeste à la méthode, incapacité d'apprendre son
utilisation correcte.
Les incidents sont rares : irritation ou allergie au caoutchouc ou aux spermicides (le
changement de marque permet de trouver une solution).
Spermicides
Leur utilisation isolée est insuffisante, leur efficacité étant inférieure à celle du
diaphragme.
Les spermicides sont des substances placées dans le vagin sous forme d'ovules, de
crème, de gel. Ils agissent en modifiant le pH vaginal et/ou en provoquant une
destruction des spermatozoïdes. Leur efficacité est extrêmement variable.
Actuellement, on dispose surtout de dérivés du chlorure de benzalkonium. Pour ces
derniers, les unidoses ou la crème semblent plus efficaces que les ovules ; leur
durée d'action est de 10 heures, et 4 heures. Les premiers peuvent être mis en
position debout, les derniers doivent être mis en position allongée, la femme
observant cette position au moins dix minutes avant le rapport. Il ne doit pas être
fait de toilette vaginale avant ni pendant plusieurs heures après le rapport. Une
toilette vulvaire est possible. Un intérêt supplémentaire des spermicides est leur
propriété antiseptique jouant un rôle certain dans la prévention des maladies
vénériennes.
4. Stérilisation tubaire
L'efficacité de la stérilisation tubaire est totale. Les techniques employées
actuellement tendent à permettre une certaine réversibilité de l'acte. Certaines
322
peuvent être pratiquées par voie coelioscopique. L'électrocoa-gulation et la
thermocoagulation font place aux méthodes mécaniques par clips ou agrafes
permettant une reperméabilisation plus aisée. L'hospitalisation est de courte durée
(quelques heures à 24 heures).
S'il existe des contre-indications à la coelioscopie (laparotomie antérieure,
affections cardiorespiratoires, obésité), d'autres voies d'abord sont possibles
(minilaparotomie, culdotomie postérieure).
Cette intervention ne peut être pratiquée qu'avec l'accord écrit des deux membres
du couple. Les succès des interventions de déstérilisation sont estimés à 30 p. cent.
5.Contraception masculine
5.1. Préservatifs
Les préservatifs dont on dispose actuellement ont une efficacité assez satisfaisante
(indice de Pearl : 3 à 5 p. cent). Les échecs tiennent, semble-t-il, aux erreurs
d'utilisation. Le préservatif doit être placé avant toute pénétration et changé avant
tout nouveau contact. Ils constituent une prévention efficace de la transmission des
maladies vénériennes. Certains sont lubrifiés, d'autres enduits de spermicides, ce
qui renforce leur efficacité.
5.3. Vasectomie
L'efficacité de la vasectomie est excellente. Les accidents et incidents sont
pratiquement inexistants. La réversibilité est fonction de la technique employée
pour la stérilisation, du délai entre celle-ci et la demande de déstérilisation. Elle
peut atteindre 70 p. cent.
5.4. Gossypol
Extrait du coton, le gossypol inhibe la mobilité des spermatozoïdes. En
expérimentation en Chine, des dérivés moins toxiques sont à l'étude :
l'inconvénient majeure de ce produit est la réversibilité inconstante de son action.
Des tubulopathies avec perte de potassium ont été rapportées. Le principe de ce
produit ou de ses dérivés serait cependant idéal : actif sélectivement (et
réversiblement) sur la spermatogenèse, il respecte la fonction endocrine du
testicule.
En conclusion
Aucune contraception n'est actuellement idéale ; chaque patiente constitue un cas
particulier et il faut bien connaître les méthodes à proposer afin de trouver la
solution la mieux adaptée et ne pas hésiter à en varier au cours du temps.
323
Références bibliographiques
1. Basdevant A, De Lignières B, Conard J. Contraception hormonale féminine. In :
P. Mauvais-Jarvis, G. Schaison, Ph Touraine, eds. Médecine de la Reproduction.
3ème édition. Ed Médecine–Sciences, Flammarion. Paris 1997 : 517-527.
2. Duranteau L, Lorgerot-Lebrun H. Contraception hormonale chez la femme.
Médecine Thérapeutique 1996 ; 2 : 453-470.
3. Spira A, Plu-Bureau G. Contraceptifs oraux remboursés et non remboursés :
analyse critique. Eds INSERM Paris 1993.
324
C. Pilule estroprogestative normodosée
D. Macroprogestatif
E. Préservatifs
325
DYSLIPIDEMIES
Sophie VIDAL-JESSEL
Dyslipidémies
Liste des abréviations
INTRODUCTION
PHYSIOPATHOLOGIE
1.1 Les lipides
1.2 Les lipoprotéines
1.3 Le métabolisme des lipoprotéines
CLASSIFICATION
2.1 Les dyslipidémies primitives
2.2 Les dyslipidémies secondaires
3 CLINIQUE
3.1 Les signes cliniques
3.2 Les signes biologiques
4 Le traitement
4.1 Les moyens thérapeutiques
4.2 Les indications
326
RET Ration énergétique totale
TG Triglycérides
VLDL Very low density lipoprotein
INTRODUCTION
Sous le terme de dyslipidémie sont regroupées plusieurs pathologies qui ont comme
point commun, l'augmentation de certains lipides sanguins. Elles peuvent être
d'origine génétique, ou environnementale, mais le plus souvent multifactorielles.
Elles sont importantes à connaître, à dépister, et à traiter car certaines peuvent
exposer à des accidents aigus. Mais surtout, elles peuvent comme
l'hypercholestérolémie, être un facteur de risque cardio-vasculaire majeur qu'il faut
s'efforcer de corriger à tout prix.
Après un rappel de la physiopathologie, seront abordés : la classification, les signes
cliniques et la prise en charge thérapeutique des dyslipidémies.
PHYSIOPATHOLOGIE
COOH
CH3
Acide gras saturé
COOH
CH3
AG monoinsaturé
COOH
CH3
AG polyinsaturé
Lorsque l'AG ne contient pas de double liaison, on parle d'AG saturé ; s'il a une
double liaison, on le dit monoinsaturé ; enfin, s'il a plusieurs doubles liaisons on
parle d'AG polyinsaturé.
On appelle AG essentiels, les acides gras indispensables à l'organisme et que celui
ci n'est pas capable de synthétiser.
327
Les acides gras sont une source d’énergie pour les muscles.
1.1.2. Le cholestérol
Le cholestérol total est la somme du cholestérol libre et du cholestérol estérifié.
La molécule du cholestérol est une chaîne aromatique qui se présente ainsi :
CH3
CH3
CH3
CH3
CH3
3
OH
H H
H C OH H C AG
H C OH H C AG
H C OH H C AG
H H
Molécule de Molécule de
glycérol triglicérides
328
appelle « apoprotéines ». Le complexe « apoprotéine + lipide » constitue une
« lipoprotéine ». Les lipoprotéines répondent toutes à la même structure générale :
un noyau central constitué de cholestérol estérifié et de triglycérides ainsi qu’une
couronne périphérique composée d'apoprotéine, de cholestérol libre et de
phospholipides.
Apoprotéine
CE
Phospholipide
TG
Cholestérol
libre
329
du CHOL (transfert du CHOL des tissus périphérique au foie).
Rémnant
CM FOIE
Tube digestif
Apo CII
Apo CII
LPL
TG CM
Tissus Adipeux
E E AGL
B48 B48
Muscle
330
E B100 E B100 E
B100 LPL
Lipase hépatique
Apo CII
Recepteur ApoBE TG
Tissus
Muscle
Adipeux
FOIE
B100 E B100 E
IDL LDL
LH
Tissus
périph
Après fixation au récepteur, la lipoprotéine est internalisée, puis hydrolysée par les
enzymes lysosomiales, libérant ainsi du cholestérol libre. Cette libération entraîne :
un rétrocontrôle négatif sur la synthèse et la mobilisation des récepteurs du LDL ;
une activation de l'Acyl CoA cholestérol acyl transférase qui permet le stockage du
CHOL dans la cellule sous forme estérifiée ;
un rétrocontrôle négatif sur l'activité de l'HMG CoA réductase, enzyme-clé de la
synthèse du CHOL.
En cas de déficit ou de saturation des récepteurs LDL, l'épuration du CHOL ne peut
avoir lieu. Cela se traduit par une augmentation du CHOL total. Après avoir
séjourné plus longtemps dans le plasma, celui ci est épuré par les récepteurs
"scavenger" des macrophages. Il est internalisé, puis dégradé par le macrophage
en CHOL libre. Le CHOL libre y est ensuite estérifié, puis stocké. Le macrophage
prend alors l'aspect d'une cellule spumeuse qui va se déposer dans les parois
artérielles et former les stries lipidiques correspondant aux premières lésions
d'athérosclérose.
331
LDL
Récepteurs
CL
a
LDL b
c
AA CE
1 2 3 4
332
II CLASSIFICATION
Il faut distinguer les hyperlipidémies primitives des secondaires. Ces dernières
doivent systématiquement être éliminées. En effet, la prise en charge de la maladie
primitive permet dans la majorité des cas de normaliser le bilan lipidique. Pour ce
qui est des dyslipidémies primitives, la classification retenue est la classification
internationale de Frederickson.
Classification Anomalie des Fréquence
lipoprotéines
internationale
Type I chylomicrons <1%
Type IIa LDL 40 %
Type IIb LDL + VLDL 30 %
Type III IDL + VLDL <1 %
Type 4 VLDL 30 %
Type V Chylomicrons + VLDL <1 %
333
un CHOL normal ou légèrement augmenté ;
une sensibilité à l'alimentation ;
pas de migration en électrophorèses.
Cette dyslipidémie n'est pas athérogène.
334
une migration en électrophorèses entre les bandes pré-β et β
Cette dyslipidémie est athérogène.
2.2.1 La grossesse
On observe, une augmentation de 50% du cholestérol total et des triglycérides qui
sont multipliés par 3 (tableau de dyslipidémie de type IIb).
Ceci est du à l'augmentation des œstrogènes.
Le bilan lipidique est donc ininterprétable durant la grossesse et doit donc être
recontrôlé en post partum. En aucun cas, il ne faut envisager de traiter une
335
dyslipidémie durant la grossesse.
2.2.2 Le diabète
Les anomalies lipidiques sont très fréquentes au cours du diabète, en particulier au
cours du diabète de type 2. L’hypertriglycéridémie réalisant alors un tableau de
dyslipidémie de type 4 ou de type IIb, est l’anomalie rencontrée le plus
fréquemment. Elle existe dans le diabète de type 1, en cas de déséquilibre
important. Il existe alors une insulinocarence qui diminue l'action de la lipoprotéine
lipase entraînant une augmentation des CM et des VLDL par défaut d'élimination.
L'hypertriglycéridémie peut être très importante, supérieure à 10 g/l, et expose
alors au risque de pancréatite aiguë. Un traitement par insuline, normalisant les
glycémies, permet un retour rapide en quelques jours à la normale.
Dans le diabète de type 2, l'hypertriglycéridémie est liée à deux mécanismes.
L'insulinopénie relative entraîne une diminution de l'action de la lipoprotéine lipase.
L'insulinorésistance entraîne une augmentation de la lipolyse. Des acides gras libres
sont libérés, favorisant ainsi la synthèse de TG. Il existe une augmentation des
VLDL riches en triglycérides et en cholestérol. Ces anomalies sont athérogènes.
L'augmentation des VLDL entraîne par le biais des protéines de transfert et en
particulier la CETP, une baisse du HDL cholestérol, qui est à lui seul un facteur
d'athérogénécité.
2.2.3 L'hypothyroïdie
Le déficit en hormones thyroïdiennes a comme conséquence, une diminution de la
synthèse et du catabolisme du CHOL. Ceci entraîne une augmentation du CHOL
portant sur le LDL. Il existe aussi une augmentation des triglycérides par le biais
d'une diminution de l'action de la lipoprotéine lipase et de la lipase hépatique. Il
existe donc un tableau de dyslipidémie de type IIa ou IIb.
2.2.4 La cholestase
Au cours des cholestases hépatiques est observé, une augmentation du cholestérol
total réalisant ainsi une dyslipidémie de type IIa, et une augmentation des
phospholipides.
336
De nombreux traitements entraînent des modifications du bilan lipidique. Pour
certains traitements, comme les rétinoïdes, un bilan lipidique préalable est
nécessaire avant toute prescription. De même la surveillance lipidique régulière est
nécessaire et la survenue d'anomalies, peut amener à modifier le traitement.
Les corticoïdes entraînent des anomalies lipidiques, identiques à celles rencontrés
dans le syndrome de Cushing.
Les œstrogènes (Pilule contraceptives....) diminuent l'activité de la lipoprotéine
lipase, et augmentent ainsi les TG. Ils augmentent aussi le HDL.
Certains traitements antihypertenseurs modifie le bilan lipidique. Les diurétiques,
en particulier les thiazidiques, augmentent le VLDL, modifiant ainsi le CHOL total et
surtout les TG. Les béta-bloquants inhibent la lipoprotéine lipase et augmentant
ainsi les TG; le CHOL est peu modifié.
Les rétinoïdes entraînent une dyslipidémie de type IIb.
3 CLINIQUE
337
3.1.2.4 Les xanthomatoses éruptives
Il s'agit d'éruptions cutanées de survenue aiguë, faites de petites papules
jaunâtres, qui peuvent siéger sur tout le corps, mais prédominant au niveau de
l'abdomen et du dos. Elle s'observent au cours des augmentations brutales des
triglycérides et donc dans les dyslipidémies de type IIb, 4, V et I.
4 Le traitement
4.1.1 La diététique
338
Le « régime » est le premier acte thérapeutique. Si la correction de l’hyperlipidémie
n’est pas obtenue avec les règles diététiques, on pourra prescrire un traitement
médicamenteux. Cependant les hyperlipidémies familiales génétiques tel que le
type IIa répondent souvent mal aux règles diététiques. En effet on obtient
seulement une baisse de 20% du cholestérol total initial, ce qui est généralement
insuffisant pour normaliser les anomalies lipidiques initiales.
Le régime doit être adapté à chaque patient et doit tenir compte de ses habitudes
alimentaires. Lorsqu’il existe un surpoids, il convient d’essayer de le réduire. En
effet, une réduction de quelques kilos permet d’améliorer les paramètres lipidiques.
L’apport total en graisse ne doit pas excéder 30 à 35%.
339
maladies cardiovasculaires. Néanmoins, le pouvoir hypocholestérolémiant des fibres
n’a pas été démontré.
4.1.2.3 Questran
Il s'agit d'une résine échangeuse d'ions.
Elle diminue le CHOL total et le LDL. Elle ne baisse pas les TG, et parfois les
augmente. Elle n'a pas d'action sur le HDL.
Elle est mal tolérée sur le plan digestif (constipation opiniâtre), et gène l'absorption
d'acide folique, des vitamines hydrosolubles et des autres traitements qu'il faut
alors prendre à distance (1h30) de la prise de Questran.
340
4.2 Les indications
Selon les recommandations de l'ANAES, elles tiennent compte de
de l'existence de facteur de risque cardiovasculaire associé (FDRCV)
des antécédents personnels d'accidents coronariens (prévention primaire ou
secondaire).
Les valeurs d'interventions et les valeurs cibles à obtenir tiennent compte de
l'ensemble de ces données. Elles sont résumées dans le tableau 1.
Les indications des traitements médicamenteux sont discutés en fonction du type
de dyslipidémie et sont résumées dans le tableau 2.
341
Traitement diététique Traitement médicamenteux
instauration valeur cible à obtenir instauration valeur cible à obtenir
342
Diététique Statines Fibrates Questran AG ω3
Type IIa + Oui ++ en 1ère intention Si échec Statine , en Si échec Statine , en Non
association association
343
4.2.1 Traitement de la dyslipidémie de type I
Il repose essentiellement sur la diététique. Il faut avant tout limiter au maximum
l’apport alimentaire en graisse. On peut utiliser les AG à chaînes moyennes. Il
n’existe pas de traitement médicamenteux.
344