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Evolution du contrepoint (partie I) : de


l’organum au motet médiéval.
dans Dossiers musicologiques

Point contre point, "punctus contra punctum", c’est tout l’art d’écrire une note (un point sur la portée) en
face d’une autre note. Contrairement à la musique orientale, qui développe avec un suprême raffinement
la ligne monodique, l’Occident, à partir du IXe siècle, explore un univers sonore qui superpose plusieurs
lignes mélodiques simultanément. Art exigeant, il demande au compositeur une maîtrise consommée dans
le cheminement mélodique, l’indépendance des parties, le contrôle de leurs contrastes et
complémentarités. En retraçant son évolution, nous avons voulu que ce dossier donne sens aux études que
vous entreprenez aujourd’hui, élèves de Polyphonies, que vous puissiez les replacer dans leur contexte à
la fois historique et musicologique. Comprendre l’apport du contrepoint dans la musique occidentale,
situer ses enjeux, et par là-même les raisons de l’étudier encore, nous paraît important. Ce dossier, s’il
parvient à vous y aider, aura rempli sa fonction. Lire l’article

SOMMAIRE DES DOSSIERS

partie I : de l’organum au motet médiéval


partie II : de de l’isorythmie au canon.
partie III : L’école franco-flamande et l’émergence du sentiment harmonique

Précisons d’abord notre conception du contrepoint. Il existe en effet certains amalgames entre contrepoint
et techniques d’imitations, dont l’enseignement, nommés plus ou moins péjorativement « contrepoint
scolastique », « fugue d’école » etc, s’est avéré excessivement complexe et figé. Ceci a abouti à
considérer bien souvent le contrepoint comme une technique sclérosante et désuette. Certains parlent de
« déclin » du contrepoint au bénéfice d’une conception verticale salvatrice de l’écriture musicale,
conquise depuis la Renaissance. Mais bien après la Renaissance, l’écriture contrapuntique à donné encore
d’incalculables chefs-d’œuvres, de Mozart à Ligeti, en passant par Malher, Britten ou Ferneyhough... Pour
le comprendre, nous suivrons la technique contrapuntique dans son évolution, et glanerons les meilleurs
témoignages de sa présence dans la musique du IXème siècle jusqu’à nos jours.

I LA MONODIE
Avant d’étudier l’écriture de plusieurs lignes mélodiques, attardons nous sur la monodie (musique
constituée d’une seule ligne mélodique).

Le plain-chant nous livre d’admirables monodies de la liturgie chrétienne d’occident. La beauté de ces
lignes, parvenue jusqu’à nous par l’héritage du chant grégorien, émeut toujours. Brièvement, le plain-
chant désigne une musique qui se chante à l’unisson : « Cantus planus », c’est à dire « chant uni » en latin.
Il se chante « a capella », c’est à dire sans accompagnement ; il est non-mesuré et suit le rythme du souffle
humain. Issu des modes grecs, il relève aussi des psaumes judaïques et du chant romain ancien.

Le chant suit la respiration. Pas de mesure, pas de rythme qui ébranle le corps ;
seulement le déroulement d’une mélodie, qui parle à l’âme de perfection divine.

Cette écriture modale, bien qu’elle soit monodique, est déjà savamment structurée sur
Chant grégorien huit modes (ou « tons ecclesiastiques). Dans cet exemple de chant grégorien, l’aspect
« Ave Maris cadentiel est très net. (« cadere », « chute » en latin), « Le mode indique la chute de la
Stella » teneur (dominante à partir du XVIIe siècle) sur la finale (tonique ; donc en quinte),
après qu’elle s’est tendue dans sa direction ; autrement dit, le cheminement de tout ce
qui vit d’un point de départ central vers l’extérieur, puis retour au centre, constitue le fondement de toute
création musicale. » nous explique Jean Robert.

Il s’agit là de chants antérieurs au IXème siècle, date à laquelle on fait


communément commencer l’histoire de la polyphonie, c’est à dire à l’utilisation
simultanée de plusieurs voix. Mais il très délicat de dater les débuts de cette
pratique, car les témoignages parvenus jusqu’à nous se raréfient au fur et à mesure
que l’on remonte les siècles, l’écriture elle-même faisant défaut. « Rien ne permet
d’affirmer que la pratique de la polyphonie soit apparue pour la première fois au
IXe siècle... sans que rien ne puisse donner la certitude du contraire. Cependant,
l’observation de polyphonies primitives chez les peuples d’Afrique ou d’Océanie,
et même chez les paysans de certaines régions d’Europe (où le folklore n’a pas été
contaminé par l’industrie musicale), suggère l’hypothèse que c’est depuis très
longtemps une pratique populaire spontanée, consciente ou non. [...] Cette
particularité polyphonique de la musique africaine est pour nous d’un immense
intérêt. Elle suggère l’hypothèse de pratiques polyphoniques « sauvages » ayant précédé dans différentes
civilisations, le développement d’une musique savante monodique. [...] Le chant encourage le lyrisme
individuel, donc la variation, la différence dans la communauté. On glisse très facilement de la
ressemblance (principe de l’octave ou unisson) à la différence (principe de la polyphonie). Inversement, il
faut un apport d’information et d’énergie souvent considérable, pour transformer une différence en
ressemblance. D’autre part, les différences naturelles de tessitures vocales ou instrumentales rendent
souvent la ressemblance impossible » (Roland de Candé, « Histoire universelle de la musique » Seuil
1978).

Nous retiendrons de cette époque du haut moyen-âge, un procédé musical d’importance, car il est à
l’origine d’un merveilleux enrichissement du répertoire et a même contribué de façon importante au
développement ultérieure de la musique occidentale : l’invention des « tropes » placés sur les mélodies
grégoriennes. On avait alors eu idée de placer des poèmes mnémotechniques sur les longues vocalises de
plain-chant, à raison d’une syllabe par note, pour aider les chanteurs à se rappeler leurs mélodies. Ces
tropes n’étaient utilisés par les chanteurs que lors de leurs entrainements. Ils devaient restés sous-entendus
dans l’interprétation définitive. Mais le procédé connait un tel succès qu’il est rapidement élargit. Non
seulement on en vient à développer la mélodie pour y faire mieux contenir le texte, mais on fini même par
intercaler des séquences entières au plain-chant. Certains y voient l’origine de la forme motet ou « petits
mots », du XIIIème siècle, forme contrapuntique par excellence, comme nous le verrons plus bas.

II Le mouvement parallèles des voix.


A partir du IXème siècle, la polyphonie savante occidentale se développe avec l’invention de l’organum.

Il ajoute au plain-chant une seconde voix parallèle. C’est le premier accompagnement au sens moderne du
terme. Ce genre se généralise autour du XIe et XIIe, dans la tradition gréco-latine dont le clergé est
l’héritier. Il comporte deux parties.

La « vox principalis » est la voix principale. Elle repose sur un fragment de mélodie grégorienne et est
placée en haut, du moins, au cours des premiers siècles.

La « vox organalis » est la voix organale, ajoutée à la voix principale pour la soutenir et l’enrichir.

Les deux parties sont séparées soigneusement. Consonances parfaites et parallèles obligées : quarte ou
quinte et octave justes exclusivement. Parce que le système pythagoricien définit l’unisson, la quarte, la
quinte et l’octave mathématiquement justes et harmonieuses, les Anciens du haut moyen-Age considèrent
les autres intervalles (secondes, tierces) comme dissonants. Et donc proscrits (cf cédérom1, cours 1 et 2).
Toutefois, pour garantir l’impression de consonance au début et à la fin, il est d’usage de partir de

l’unisson et d’y retourner pour conclure.

Conjointement, apparait également le bourdon. Comme la grosse cloche au son grave, la voix du bourdon
vibre toujours sur la même note basse, et forment un accord continu avec la mélodie du plain-chant.

Kyrie de la messe de Noël tel que pratiqué par les chantres de Notre-Dame de Paris au milieu du XIIe
siècle.Chacune de trois phrases (Kyrie eleison, Christe eleison, Kyrie eleison) est d’abord chantée par le
soliste dans la tradition monodique du plain-chant. Elle est reprise en ajoutant la technique du bourdon,
puis est finalement chantée une troisième fois en ajoutant une voix organale.

Mais cette musique n’est pas encore vraiment polyphonique : le terme de « diaphonique » (harmonie
élémentaire doublant la voix principale à la quarte, quinte ou à l’octave) est plus juste, car elle induit la
nuance qu’il n’y a pas deux voix, mais une seule voix doublée. En effet, ces deux mélodies, chantées
simultanément, n’ont aucun caractère autonome. Le son prend de l’ampleur certainement, mais la
structure musicale reste subordonnée à la similitude de voix... Idem pour les orgues médiévaux, dont les
tirettes permettaient déjà depuis un certain temps de multiplier les voix (deux, trois voire quatre) le jeu de
tuyaux accordés à la quarte, quinte ou octave. Dans le fameux orgue de Winchester (vers 980), il y en
avait dix !

III Le mouvement contraire

Dès le début du XIème, un procédé va faire éclore véritablement la polyphonie ; il s’agit du déchant.
Guido d’Arezzo, le mentionne dans son traîté « Micrologus » : la seconde voix qu’on place maintenant
au-dessus du plain chant, évolue avec lui en mouvements cette fois-ci contraires. Quand une voix monte,
l’autre descend. Grande innovation ! elle constitue véritablement la naissance du contrepoint, en cela
qu’elle permettra aux voix de gagner progressivement leur autonomie, de développer leur cheminement
distinct, et faire surgir progressivement la dimension verticale de l’écriture. La musique se structure
maintenant « note contre note ». Le dessin des deux mélodies est très significatif.
Un peu plus tard, la voix principale réalise le thème grégorien, mais en valeurs longues cette fois, pour
permettre à la voix haute de se développer. Le « déchanteur » dit-on, improvise. Il « chante sur le livre »,
c’est-à-dire qu’il a devant lui la ligne de plain-chant sur laquelle il brode la seconde voix à la lecture. Il ne
s’agit plus d’un simple ornement ; les deux voix doivent véritablement cheminer ensemble.

Ainsi est né le concept même de composition. Cela mérite d’être noté : de la polyphonie découle le
nécessaire développement de l’écriture, à commencer par la notation. Ce développement est la
caractéristique fondamentale de toute la musique occidentale. Le concept d’œuvre emerge lentement,
même si la « vox principalis » est toujours une mélodie préexistante. La « vox organalis » l’étoffe en
contrepoint. L’école de St Martial de Limoges, berceau de la plupart des innovations du moyen-âge,
ajoute avec bonheur deux notes contre une, puis trois, puis quatre... vous connaissez cet art savant, élève
de Polyphonies de niveau 2 !!

IV Multiplication des voix

Tournons-nous vers l’Angleterre. On y verra un pays que la situation géographique éloigne des régions
méditerranéennes, et par conséquent de l’influence des traditions gréco-latines. Or autour du XIIème,
c’est bien là qu’apparaissent deux procédés qui sont particuliers à l’Angleterre et qu’elle doit avoir hérité
de la libre invention populaire :

Le gymel (gemellum), comme son nom l’indique, est un chant à deux voix dont la seconde accompagne
à la tierce inférieure ou supérieure le thème donné par la première. Les deux voix doivent conclure en se
rejoignant à l’unisson par mouvement contraire. C’est en quelque sorte le pendant de l’organum, mais
constitué d’intervalles considérés comme dissonnants. Ce procédé du gymel semble être à l’origine de
l’introduction des tierces et des sixtes dans la polyphonie occidentale.

Gymel

Le faux-bourdon désigne un procédé d’improvisation consistant en l’adjonction de deux voix parallèles


à la mélodie principale, la partie supérieure étant située une quarte au-dessus, et la basse une tierce au-
dessous. C’est un gymel avec une voix ajoutée en quelque sorte.
Faux-bourdon anglais (vers 1300)

« Ce que nous appelons « l’avènement de la polyphonie » n’a peut-être été que la notation et l’adaptation
systématique à la musique savante occidentale de pratiques populaires assez courantes. [...] L’évènement
remarquable n’est peut-être pas l’existence du fait polyphonique, mais son adaptation systématique à la
musique savante, par suite du déclin de la tradition grégorienne. Une pratique populaire simple serait
ainsi devenue une méthode d’enrichissement puis de composition de plus en plus complexe. C’est la
« pensée polyphonique » qui constituera la singularité de la musique occidentale lorsque, à partir du
XIIIe, la composition de mélodies originales simultanées fera d’une dimension verticale insolite l’un des
principe essentiel de la création musicale. A l’idée fausse de naissance de la polyphonie, on pourrait
substituer celle « d’avènement du contrepoint », technique savante. » (Roland de Candé,Ibid)

Les durées, elles aussi, évoluent. Si la voix principale réalise la mélodie


en valeurs longues, les valeurs courtes de la la voix organale forment de
véritables guirlandes de vocalises, et raffinent ses mélismes (dessin
mélodique de plusieurs notes ornant une des syllabes).. Voilà des
ornements qui enrichissent considérablement la mélodie. On nomme
joliment ce procédé d’organum fleuri. Il peut quelques fois y avoir
jusqu’à 20 notes de mélisme pour une seule note au chant principal !
Celui-ci est nommé maintenant cantus firmus , chant « ferme », ou
encore teneur (d’où vient notre ténor : originellement la voix « qui
tient »). Il se trouve placé à la position intermédiaire, selon la belle et
subtile "contenance angloise ".

Le caractère modal ainsi que l’absence de


tempérament dans les mélismes, est très justement
rendu. Le bourdon devient véritablement une ligne,
une voix basse. On notera aussi la curieuse cadence : une seconde, dissonance
parfaite, résolue sur l’unisson. Exemple sonore
de plain-chant
A plusieurs notes contre une, que développe l’organum fleuri, on développe maintenant avec organum
deux voix : c’est le « duplum ». On ajoute ensuite une autre voix : c’est le « triplum ». fleuri de Leonin,
Et parfois une quatrième : c’est le « quadruplum ». L’art de l’organum devient Organum sur
extraordinairement complexe, qui développe deux voix à 2 notes contre une, puis trois « Alleluia Pascha
notes et plus contre une, puis trois voix à 2 notes contre une, 3 notes et plus contre Nostrum »
une... pour atteindre quatre voix à quatre notes et plus contre une ! C’est notre niveau
III, élèves de Polyphonies, dont vous connaissez l’exigeante complexité, mais qui vous assure, tout
comme au moyen-âge, la pleine maitrise d’une vraie pensée polyphonique, et garantit votre expertise de
compositeur d’aujourd’hui !

V La polyphonie mesurée

Evidemment, atteint ce stade de développement musical, il faut bien commencer à mesurer et à noter. La
durée, la hauteur, rien ne peut plus être laissé à la libre convenance de chaque interprète. On invente le
"tactus", battue primitive : pour chaque note on frappe le pupitre du doigt ou de la main. Apparait la
notation carrée à la fin du XIIème siècle, et on adopte la portée à 4 lignes qui précise la hauteur des notes.

"Remplacer la durée indéterminée des mélismes du plain-chant par des polyphonies au temps mesuré,
c’est introduire, dans le temple de Dieu, le temps du marchand. Voilà pourquoi les cisterciens, les
dominicains ont rejeté de leurs offices avec énergie les polyphonies mesurées." (Françoise Ferrand,
« l’Histoire de la Musique Occidentale », Fayard, 1985).

Au rythme spontané du corps, ses pulsions, au souffle humain qui donnait vie à la musique depuis le
plain-chant, on substitue la métrique. "La notation rythmique a été de tout temps une simplification
schématique, dont les créateurs d’aujourd’hui ressentent encore l’insuffisance" nous confesse Roland de
Candé (ibid). En effet, l’aspect "tension-détente" de la musique, tel que nous l’abordons dans nos tout
premiers cours, et avec lui le "posé-levé", s’effacent devant le tactus. Et c’est pourquoi cette notion de
"posé-levé" est aujourd’hui plus difficilement perceptible ; notre héritage musical depuis l’avènement de
la musique mesurée l’ayant étouffé. Et pourtant "La mesure n’est qu’une notation commode du temps que
met la Tension ou la Détente à vivre. Il ne s’agit pas de confondre le rythme-pulsion avec la métrique. la
Tension-Détente est la définition même de toute la vie sur Terre." nous explique Jean Robert.

Les intervalles de tierces et de sixtes sont progressivement tolérés dans la musique liturgique, mais avec
moult résistance de la part du clergé, et moyennant d’être toujours résolues immédiatement sur des
consonances. On parle maintenant de « consonances parfaites » pour l’unisson et l’octave, de
« consonances moyennes » pour la quinte et la quarte, et de « consonances imparfaites » pour les tierces.
Restent des « dissonances parfaites » la seconde, le triton (trois tons), la septième. Et « dissonance
imparfaite » la sixte.

Organum « Viderunt Omnes » de Pérotin

Dans ce quadrupla, on peut observer un étonnant canon à la quinte entre le duplum et le triplum,
extension d’un procédé employé par Pérotin et ses successeurs immédiats ; l’interversion des voix.

Avec le développement de la polyphonie, deux formes musicales se précisent :

Le « conduit » accompagne les déplacements des prêtres pendant l’office, et doit combler ces temps
morts. On y place un texte, très souvent emprunté à l’actualité ; sujet d’ordre moral ou même politique.
N’ayant aucune fonction liturgique, le conduit utilise plus librement les intervalles proscrits, et d’une
certaine manière les fait entrer dans les oreilles ecclésiales. Toutes les voix (en général deux ou trois) sont
écrites ensemble, contrairement à l’organum qui imposait jusqu’ici la présence d’une mélodie préexistante
en plain-chant. Le compositeur pense complètement et polyphoniquement son œuvre. A partir de 1240
environ, on trouve même dans les conduits des exemples de contrepoint renversable. Des noms
apparaissent ; Léonin, Pérotin, premiers véritables compositeurs. Des noms ? En fait, les diminutifs de
leurs prénoms présumés, Léon et Pierre, les font émerger de l’anonymat artistique jusque-là de règle.

Plus encore, le développement du motet est significatif. Comme on l’a souligné au début de cet article,
on peut en expliquer l’origine par le vieux procédé des « tropes », technique grégorienne apparue vers le
IXème siècle, véritables compositions de style syllabique. Ce procédé se généralisant, on a pris l’habitude
de chanter les mots du trope. Ces « petits mots », « motetus », placés ensuite sur les déchants lorsqu’ils
comportaient un texte, gagnent toutes les voix. On débaptise même le duplum pour le nommer motetus à
son tour. Toujours de caractère religieux, le motet utilise bientôt une pluralité de textes sur les différentes
voix. Et même parfois différentes langues... Adam de la Halle utilise trois sortes de teneurs pour ses
motets, insérant au duplum des cellules de ses propres rondeaux ou de ceux de compositeurs comme
Guillaume d’Amiens ou des refrains anonymes. Françoise Ferrand (Ibid) cite le motet X où la teneur est
en français, le duplum reprend le début d’un de ses rondeaux et le triplum une prière à la Vierge en latin.
Les textes des différentes voix n’ont même parfois qu’un lointain rapport entre eux, et on juxtapose
joyeusement prières et textes profanes, latin et langue vulgaire. Le ténor liturgique se voit limité à
quelques notes, de valeurs longues, et les voix supérieures s’en affranchissent complètement. Le motet se
sécularise ainsi.

Au XIIIe siècle, le contrepoint s’enrichit. Les voix s’approchent, se frottent, se croisent, se séparent, se
répondent. Les mélodies se déroulent savamment et horizontalement, la verticalité se devine seulement.
Le procédé d’interversion des voix est employé plus largement. Chaque voix chante le fragment
mélodique que sa voisine vient d’achever ; l’imitation apparait. Si chaque cadence doit faire entendre une
consonance parfaite (quarte, quinte ou octave), les rencontres de notes entre les cadences ne sont pas
encore soumises à des règles particulières, et des rythmes aux contours heurtés se superposent souvent de
manière inattendue.

Exemples de motets et conduits du XIIIe à 3 et 4 voix Les voix sont devenues complètement autonomes :
leur cheminement est construit pour chacune d’elles, bien que les relations entre elles soient encore
rudimentaires.

Une des grandes innovations de l’Ecole de Notre-Dame c’est d’introduire depuis la fin du
siècle précédent, la mesure du temps dans la composition musicale. Au plain-chant
monodique s’oppose maintenant le cantus mensurabilis (chant mesuré) avec la notation
proportionnelle. De nouvelles figures de notes apparaissent, représentant des durées
relatives, des « proportions constantes ». Cette nouvelle notation nous a permis de
recueillir assez fidèlement les œuvres de cette époque. Quand au rythme, il fonctionne
depuis le XIème de manière assez complexe en « modes rythmiques » (modus = mesure), formés de
mesure semblables, analogues au « pieds » de la poésie. Jean de Garlande (v.1190- ap. 1252) dans « De
musica mensurabili positio » les synthétise en six modes rythmiques, fondés sur le rapport de la brève et
de la longue (la longue vaut deux brèves).

« Le principe de la notation proportionnelle représente le plus grand progrès de l’écriture symbolique


depuis l’adoption du principe distématique (assimilation de l’acuité d’un son à une hauteur). Il n’y aura
pas de plus grand progrès avant la découverte de l’enregistrement sonore, qui peut être considéré comme
une notation analogique, c’est à dire sans « logos » intermédiaire. Stimulés par le besoin de conserver la
musique, de la faire surgir inchangée quand on le désire, les progrès de la notation excèdent maintenant
les exigences de l’aide-mémoire : la « composition » dispose désormais d’un système abstrait cohérent,
outil fécond susceptible d’inspirer des structures nouvelles, et de faire progresser les techniques vocales et
instrumentales. » Roland de Candé (ibid)

SOMMAIRE DES DOSSIERS

partie I : de l’organum au motet médiéval


partie II : de de l’isorythmie au canon.
partie III : L’école franco-flamande et l’émergence du sentiment harmonique
Liens utiles
Exemples sonores très représentatifs de l’évolution de la polyphonie, de l’organum parralèle jusqu’aux
messes à 4 voix. Page en néerlandais :

http://www2.hku.nl/%7ealmuge/hfdst2.1.html

Sources
L’expression musicale de l’Occident médiéval

http://www.collegeahuntsic.qc.ca/pagesdept/hist_geo/Atelier/Parcours/Muse/sommaire.html

Évolution de l’expression musicale occidentale du Moyen-Âge à nos jours :

http://www.spirit-science.fr/doc_musique/polyphonie.html

LE XIIIè siècle et L’ARS ANTIQUA :

http://www.ramifications.be/Musique_Sacree/polyphonie.htm

Joëlle KUCZYNSKI
article publié le mardi 5 février 2008 et lu 53441 fois.
Responsable administration de l’école à distance POLYPHONIES. Conception et réalisation des supports
formation. Responsable rédaction du Mensuel. Chanteuse.
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