Beruflich Dokumente
Kultur Dokumente
TITRE 2.
LE CONTENU DE LA PROTECTION PAR DROIT D’AUTEUR
Dans la leçon précédente nous avons tenté de répondre aux questions : « une protection
pour quoi ? » et « une protection pour qui ? ». Dans les leçons à venir nous tenterons de
répondre à la question suivante : « Quelle protection ? » Dans ce titre 2 nous allons
envisager le contenu de la protection par le droit d’auteur.
Le droit d’auteur possède une nature hybride, il contient des droits qui sont comparables à
ceux de propriété, on les appelle les droits patrimoniaux ou les droits pécuniaires, dans la
mesure où ils peuvent se monnayer. Il comprend aussi un droit de la personnalité qui, lui, est
par nature extrapatrimonial, on l’appelle le droit moral de l’auteur. L’ensemble de ces droits
sont autant de contraintes auxquelles les exploitants ont le devoir de se plier. A côté de ce
régime classique du droit d’auteur, il existe des cas pour lesquels la loi a prévu des
dispositions spéciales. Ces régimes d’exception aménagent le droit d’auteur en présence de
certaines créations ou lorsque les œuvres sont réalisées dans des conditions particulières.
Nous allons commencer par envisager, dans un chapitre premier, le régime de droit commun
du droit d’auteur avant, dans un chapitre second, de nous attarder sur ces régimes
particuliers.
Le droit pour l’auteur d’exploiter ou de faire exploiter son œuvre est rendu possible grâce à
un monopole étendu, mais ces seules prérogatives sont insuffisantes, le créateur bénéficie
d’un pouvoir de négociation restreint en raison de son manque de compétence et de son
poids économique négligeable. La loi prévoit en conséquence un cadre strict pour l’exercice
des droits patrimoniaux. L’exploitation autorisée est celle de l’œuvre et non celle de l’auteur.
Nous allons donc commencer par envisager l’étendue des droits patrimoniaux, dans un
paragraphe premier avant de nous attarder sur les conditions de mise en œuvre de ces
droits.
Commençons donc par envisager les caractères généraux des droits patrimoniaux.
Le monopole de l’auteur s’étend à toute exploitation de l‘œuvre quelle que soit sa
forme. Les droits patrimoniaux sont exclusifs. Ils s’apprécient négativement : l’auteur
a le droit d’interdire, il a la faculté de s’opposer aux atteintes ; mais ils peuvent aussi
être exercés positivement. L’ayant droit a le pouvoir d’utiliser l’œuvre pour son propre
compte ou d’autoriser à un ou plusieurs tiers des exploitations selon sa volonté.
L’exclusivité accordée à l’auteur est d’autant plus réelle qu’ils portent sur la plupart
des usages de la création et qu’ils sont reconnus quasi universellement. Ils sont
d’ailleurs autonomes les uns par rapport aux autres. L’auteur peut déléguer l’exercice
de ses droits. Comme nous l’avons évoqué, ils sont non seulement transmissibles à
cause de mort, mais aussi transmissibles entre vifs. En revanche, l’exclusivité est
limitée dans le temps. Les droits patrimoniaux sont temporaires.
laquelle se trouve le support de la création n’a aucune influence sur le droit d’auteur.
Par extension, le mode d’accès à l’œuvre est sans incidence. La disponibilité d’une
œuvre ne présume pas d’une autorisation d’utilisation à titre personnel ni a fortiori,
d’exploitation de la création. Les réseaux internationaux comme Internet, ne sont pas
les décharges de créations librement appropriables. La gratuité d’accès à une œuvre
de l’esprit ne dispense pas à l’exploitant de respecter les prérogatives de l’auteur.
Les droits patrimoniaux s’imposent aussi dans le cas des œuvres dérivées. La
réalisation d’une œuvre composite mobilise le droit de reproduction de l’œuvre
première. A fortiori, la solution s’applique à son exploitation, l’œuvre absorbée est
une création dans la création. Les droits patrimoniaux mis en œuvre sont doubles. La
mise en œuvre des droits patrimoniaux sur une œuvre seconde met
automatiquement en œuvre les mêmes droits sur l’œuvre première.
Selon les mode d’exploitation des créations, les droits reçoivent une application
cumulative ou distributive. Commençons par envisager précisément le cas du droit de
reproduction avant de nous attarder sur le droit de représentation.
La loi, par l’article L122-3 du CPI définit la reproduction dans son principe. Elle laisse
une totale liberté quant au procédé utilisé et à la forme du support en raison de
l’emploi du terme notamment dans l’énumération des techniques de reproduction. Le
-5-
Le seul fait qu’il y ait reproduction ne suffit pas pour autant à entraîner le paiement
d’une redevance. La reproduction doit être aussi destinée à un usage public. A
contrario, les reproductions réservées à un usages privé, sous certaines conditions
que nous examinerons par la suite avec les limites du droit d’auteur, ne sont pas
soumises au droit de reproduction ; il s’agit de copies privées. Deux éléments
permettent d’apprécier le caractère public de la reproduction. L’aliénation de la chose,
support de l’œuvre et la perception d’un prix. En principe le droit de reproduction est
mis en œuvre à partir du moment où l’un de ces deux éléments est présent. Chacun
d’entre est suffisant mais pas nécessaire.
L’usage public n’est pas douteux quand la reproduction a pour but l’aliénation à titre
onéreux des objets reproduits : cassettes, CD ROM, livres, etc. le commerce de
reproduction fait présumer l’usage public. Dans cette situation il y a en effet transfert
de propriété et paiement d’un prix. Il peut y avoir mise en œuvre du droit de
reproduction malgré la gratuité dont bénéficie le public. De la même façon l’absence
d’aliénation ne fait pas disparaître non plus le caractère public de l’usage. Les
exemplaires reproduits à des fins de location ou de prêt sont soumis à des droits de
reproduction. Il existe même des situations dans lesquelles le droit est mis en œuvre
sans qu’aucun des deux éléments ne se vérifie. Il suffit qu’il y ait usage collectif du
support. C’est le cas par exemple des entreprises qui photocopies des articles de
presse à des fins de diffusion interne.
d’exposition publique d’une œuvre d’art. Elle est alors immédiate car le public est en
contact direct avec l’œuvre. Il existe aussi des cas de représentation indirecte, en
effet celle-ci peut s’effectuer par l’intermédiaire d’un support enregistré. Les
discothèques, les projections cinématographiques mettent en œuvre le droit de
représentation.
Le droit de représentation est mise en œuvre dès que l’utilisateur accède aux œuvres
par l’intermédiaire d’une source distante. Récepteur de télévision, de radio, terminal
télématique de type minitel ou micro-ordinateur relié à Internet. Le public est alors
potentiellement très large. On le voit, la définition très extensive de la télédiffusion
comme procédé de communication au public permet de couvrir la communication des
œuvres par tous les moyens, y compris ceux issus des techniques numériques.
2° Le droit de suite
L’article L122-8 du CPI énonce : « les auteurs d’œuvres graphiques et plastiques ont,
nonobstant toute cession de l’œuvre originale, un droit inaliénable de participation
aux produits de toutes ventes de cette œuvre faite aux enchères publiques ou par
l’intermédiaire d’un commerçant. » L’objectif de cette prérogative est de rétablir une
certaine équité entre les auteurs d’œuvres plastiques dont la principale source de
revenus est la vente de l’exemplaire original, des autres catégories d’auteurs dont les
œuvres sont susceptibles d’être exploitées de multiples façons. En effet, en matière
d’œuvre d’art, le droit de représentation se limite en pratique à l’exposition publique et
la reproduction d’un tableau est assez rare et souvent peu rémunératrice. De surcroît
il est fréquent que l’aliénation initiale, la première vente du support matériel unique de
l’œuvre soit réalisée pour une bouchée de pain alors que l’acquéreur voit la valeur de
revente croître en fonction de l’état du marché et de la cote de l’artiste.
Apparu plus tard que les droits de représentation et de reproduction, puisque son
entrée dans notre législation date de 1920, le droit de suite est d’application
beaucoup plus restreinte. D’abord il limitait aux œuvres artistiques, ensuite il ne
concerne que certaines opérations, enfin il ne constate pas un droit exclusif. L’auteur
ne peut autoriser ou interdire, il ne confère qu’un droit à rémunération.
Envisageons tour à tour ces trois questions. D’abord les œuvres concernées. Le
droit de suite s’applique aux œuvres graphiques et plastiques. Par cette expression il
faut entendre les œuvres d’art au sens strict : peintures, sculptures, dessins,
tapisseries, estampes, etc. Aujourd’hui la doctrine française se refuse à appliquer le
droit de suite au manuscrit d’une œuvre littéraire ou de tout autre contenu bien qu’il
s’agisse d’une œuvre graphique et du support matériel originaire de cette même
œuvre. La question n’est pas purement théorique, en 1987, le manuscrit comportant
la théorie de la relativité de Einstein s’est vendu sept millions de francs, tandis que
l’année suivante, le manuscrit du Procès écrit par Kafka a trouvé preneur à Londres
pour onze millions de francs. Pourtant la solution est logique, l’auteur de l’œuvre
littéraire est d’abord rémunéré par les produits de l’édition de celle-ci. En revanche, la
multiplicité d’exemplaires n’est pas un obstacles, dans les cas des lithographies, des
photographies ou des bronzes, par exemple. Le droit positif requiert simplement que
le modèle ait été conçu par l’artiste et que les exemplaires soient en nombre limité.
C’est ainsi que la Cour de cassation a, en 1986, admis que le droit de suite puisse
porter sur trois œuvres en bronze tirées d’un modèle de Rondin. Et cela après la mort
de l’artiste.
Très critiqué par les exploitants, le droit est en réalité peu appliqué, notamment en
raison de la faiblesse de sa reconnaissance internationale. Il existe pourtant un projet
-8-
Voyons enfin les conséquences pour l’auteur de ce droit de suite. L’auteur, comme
je l’ai précédemment énoncé n’a pas le droit d’autoriser ou d’interdire la vente, il ne
fait que percevoir une rémunération. Le tarif du droit perçu est fixé uniformément et
dès le premier franc à 3 %. Il s’applique à partir du moment où le prix de vente est
supérieur à 100 francs et ce quel qu’ait été la fluctuation du prix entre les ventes
successives. Même si le prix baisse, l’auteur ou ses ayants droit bénéficient de la
rémunération. Comme les autres droits patrimoniaux, le droit de suite est limité dans
le temps. Il ne s’applique que pendant la durée du monopole. Après la mort de
l’auteur, il se transmet aux héritiers de l’auteur même à la seconde génération.
En revanche pour éviter les pressions sur les auteurs aux abois, le législateur a
expressément prévu son inaliénabilité. Cette disposition entraîne trois
conséquences : l’auteur ne peut le léguer, l’auteur ou ses ayants droit ne peuvent le
céder à un tiers, l’auteur ne peut y renoncer au moment de la vente.
En effet, les droits patrimoniaux attribués à l’auteur voient leur nombre se multiplier
avec dans chaque cas le risque de conditions d’accès et de régimes différenciés.
Cette évolution est directement héritée des nouveaux modes d’exploitation des
créations et des législations étrangères. La tendance est aussi marquée par
l’émergence dans notre système juridique du droit de destination.
Malgré les abus qu’il peut entraîner ce droit de destination, au moins dans son
principe est pourtant justifié. Il s’agit de ne pas oublier les intérêts de l’auteur,
notamment face au nouveau mode de diffusion des œuvres, ce qui du point de vue
du droit communautaire, souvent trop sensible aux simples logiques économiques et
industrielles, relègue l’auteur au deuxième rang, et c’est donc un progrès.
Nous avons, dans la leçon précédente défini ce qu’étaient les droits patrimoniaux,
envisageons maintenant dans un paragraphie second la façon dont ils peuvent être
mis en œuvres. Le monopole octroyé à l’auteur l’autorise à exercer lui-même
l’exploitation de sa création puis à en retirer les fruits. Pourtant la prérogative est
rarement employée. Les modes de diffusion des oeuvres requièrent des
compétences, un financement souvent hors de portée des créateurs. Trop occupé
par les tâches de création, l’auteur, le plus souvent passe un contrat avec un
-9-
Mais dans cette relation juridique, il a besoin d’être protégé car l’auteur est souvent
profane en la matière et fréquemment dans une situation de fragilité économique. Le
CPI est donc très protecteur à son encontre, il défend les intérêts de l’auteur et
parfois à tel point, nous le verrons, que l’on peut se demander s’il le considère
comme étant sain d’esprit.
Le transfert des droits est donc une opération licite, nous commencerons par
envisager ce caractère et sa mise en œuvre droit répondre à des critères précis, nous
envisagerons dans un second temps ces différents critères.
La cession, le transfert des droits est une opération licite. L’auteur peut librement
céder ses droits patrimoniaux. Mais dans notre système juridique, la démarche est
rigoureusement encadrée pour préserver le caractère humaniste du droit d’auteur et
éviter une éviction pure et simple du créateur. Les contraintes qui en découlent pour
l’exploitant sont vivement décriées par ces derniers. Sous des prétextes
économiques ils exercent une pression pour condamner le droit d’auteur et amorcer
un rapprochement avec les traditions de copyright tel que le connaissent les États
Unis qui, selon l’expression consacrée ne perd pas une grande différence entre une
symphonie et une paire de baskets.
Quelle que soit l’étendue des droits cédés, le créateur doit donner à l’exploitant les
moyens matériels de mettre en œuvre ses droits. L’auteur est soumis à une
obligation de délivrance d’un support de la création par application de l’article 1604
du Code civil. La délivrance et le transport de la chose vendue en la puissance et
possession de l’acheteur. Cette obligation procède de l’article L132-9, alinéas 1 et 2
du CPI en matière de contrat d’édition. En revanche et sauf disposition contractuelle
contraire, le créateur n’est pas obligé de remettre l’exemplaire original de l’œuvre.
D’ailleurs la cession des droits ne s’accompagne pas obligatoirement du transfert de
propriété du support initial. Fréquent en cas de commande, le transfert du support
initial est au contraire rarement constaté quand l’œuvre est préexistante.
Le transfert des droits patrimoniaux est strictement encadré, il est en effet nécessaire
de défendre l’écrivain ou l’artiste souvent mal renseigné ou insoucieux de ses droits
contre l’habileté praticienne parfois excessive de certains exploitants.
- 10 -
« L’auteur évolue dans un milieu hostile que certains n’hésitent pas à qualifier de
faune marécageuse des arts et des lettres. » Cette expression est de monsieur
Péridier, parlementaire de son état.
1° L’autorisation de cession.
L’exploitant est aussi libre de déterminer la période pendant laquelle l’utilisation non
exclusive de la création est autorisée. En aucun cas ce délai ne peut dépasser celui
des droits exclusifs sur la création. En effet, nul n’est autorisé à accorder plus de
droits qu’il n’en détient. A défaut d’un contrôle possible des utilisations privatives,
l’octroi de l’autorisation pour une durée inférieure au monopole est peu efficace. C’est
pourquoi en l’absence de précisions contractuelles, l’autorisation est présumée
accordée pour tout le temps de la réservation.
Aux termes de l’article L131-2 du CPI, la cession des droits patrimoniaux est
subordonnée à une condition de forme. Elle doit être constatée par écrit, c’est
l’application du principe d’interprétation strict des cessions. L’usage par le législateur
du verbe constater est ambigu. Il mélange des considérations de fond et de forme.
Une décision de la Cour de cassation du 12 avril 1976 est venue trancher le débat.
L’écrit est une règle de preuve, il est requis ad probationem. Son absence ne rend
pas la cession nulle de plein droit. Mais le principe posé demeure très théorique
puisque si en droit commun d’autres modes de preuve sont admis par les articles
1341, 1347 et 1348 du Code civil : commencement de preuve par écrit, témoignage,
présomption etc. ; au contraire, ils sont écartés en droit d’auteur, à l’exception du
serment décisoire et de l’aveu judiciaire. En effet, conformément à l’article 1341 du
Code civil, la preuve testimoniale n’est pas admise lorsqu’un écrit existe. L’existence
d’une cession de droits non expressément prévue par l’acte écrit ne peut être
rapportée autrement. Dans la plupart des cas, le cessionnaire ne pourra donc pas
prouver le transfert de droit, c’est comme si rien ne s’était passé. En conséquence
l’auteur aura toujours gain de cause en cas de litige. C’est une mesure de protection
des auteurs.
- 12 -
La condition n’est énoncée par la loi qu’à propos des contrats d’édition, de
représentation et de production audiovisuelle. Cette restriction n’est pourtant pas
gênante, en effet, l’article L131-3, alinéa 1 du Code de la propriété intellectuelle
énonce « la transmission des droits de l’auteur est subordonnée à la condition que
chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession
et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue,
quant à sa destination, quant au lieu et quant à la durée.
Concernant la durée, tous les cas de figure sont envisageables. Le plus souvent les
droits sont confiés pour la durée du monopole. Quand un terme est fixé, la pratique
s’apparente au louage. L’auteur retrouve tous ses droits à l’échéance.
Dans le silence du contrat, les juges considèrent en général que l’autorisation est
acquise pour toute la durée du monopole. Cette interprétation est critiquable dans le
sens où elle paraît contraire aux principes d’interprétation stricte des droits cédés.
n’est alors plus globale. Cette exigence est difficilement compatible avec la cession
des créations de salariés dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminé.
2° La contrepartie de la cession
Voyons maintenant les différents modes de rémunération. La loi adopte pour principe
la rémunération proportionnelle, mais le paiement à forfait est néanmoins admis dans
les situations précises. Envisageons d’abord la rémunération proportionnelle. Une
participation proportionnelle de l’auteur aux recettes provenant de la vente ou de
l’exploitation de son œuvre est prévue par la loi. L’article L131-4, alinéa 1 du CPI
énonce : « la cession par l’auteur de ses droits sur son œuvre peut être totale ou
partielle, elle doit comporter au profit de l’auteur la participation proportionnelle aux
recettes provenant de la vente ou de l’exploitation. L’auteur ou ses ayants droit
touchent par principe un pourcentage, une cote-part des recettes. La règle est d’ordre
public, seules les dérogations légales sont admises. L’absence de rémunération
proportionnelle est une cause de nullité de la cession. L’auteur ne peut y renoncer.
Cependant la clause écartant la rémunération proportionnelle n’entraîne que la nullité
relative du contrat.
Le taux de la rémunération est fixé de gré à gré et mentionné dans le contrat. Les
exploitants sont libres de l’adapter en fonction de l’assiette. Pour des raisons
psychologiques, l’auteur acceptera plus facilement un taux élevé sur une assiette
réduite dont bien souvent il ignore la base que le contraire. En revanche, l’assiette de
la rémunération est encadrée par la loi. Elle doit correspondre aux recettes provenant
de la vente ou de l’exploitation. L’auteur participe à toutes les recettes générées par
l’exploitation de l’œuvre. L’assiette prend en compte la recette brute et non le profit
dégagé, c’est-à-dire la recette moins tous les frais engagés. L’assiette assise sur le
bénéfice est prohibée, la seule exception au principe concerne l’exploitation par un
procédé inconnu.
Dans le cas d’un contrat de production audiovisuelle, comme dans celui d’un contrat
d’édition, c’est le prix payé par le public ou les produits d’exploitation qui sont retenus.
La diversité des expressions utilisées par la loi pourrait laisser à penser que le
législateur souhaite abandonner la détermination de l’assiette à la volonté des
parties. Il ne semble pas que l’opinion soit partagée par la jurisprudence dominante.
raison tient du bon sens : l’auteur peut contrôler facilement la recette brute. A défaut,
il est à la merci de l’exploitant qui pourra imposer des sommes fantaisistes. En effet,
les coûts à déduire sont variables, très complexes à définir et souvent difficiles à
évaluer. En matière audiovisuelle les tribunaux imposent aussi un contrôle strict sur
l’assiette sale. En revanche les auteurs sont associés aux tractations commerciales
puisque les remises peuvent venir en déduction de leur rémunération.
L’exception connaît ainsi une application plus large pour les ouvrages édités, nous
aurons l’occasion de revenir sur cette disposition.
Les intérêts moraux des auteurs sont protégés par la déclaration universelle des droits de
l’homme en France, le principe provient d’une construction prétorienne jusqu’à sa
consécration par la loi du 11 mars 1957. Le droit moral possède une place prééminente dans
notre système juridique. Il correspond à ne conception idéaliste de la création, miroir de la
personnalité de son auteur, que l’on trouve théoriquement dans la définition de l’originalité.
En effet, le style c’est l’homme, disait Buffon ou Madame Bovary, c’est moi disait Flaubert.
C’est donc au travers de l’œuvre que le public apprendra à connaître l’auteur. C’est grâce à
celui-ci qu’il pourra être jugé de ses qualités et de ses défauts. Dès lors il paraît important
que l’auteur puisse conserver une certaine maîtrise de l’œuvre. Il paraissait fondamental qu’il
puisse en surveiller la carrière. C’est à ce souci que répond la reconnaissance du droit moral
et la reconnaissance de sa prééminence sur les droits patrimoniaux.
Contrairement au droit à l’image, autre droit de la personnalité que nous avons évoqué dans
l’introduction, le droit moral résiste bien à la tentation de patrimonialisation. Malgré les
critiques auxquelles il est exposé, le droit moral revêt des caractères particuliers et véhicule
des prérogatives pour l’auteur mais celles-ci ne sont applicables que sous certaines
conditions. Nous allons donc tour à tour évoquer les caractères du droit moral, les
prérogatives pour l’auteur et les conditions d’application.
erga omnes. C’est un droit unilatéral, absolu et discrétionnaire. L’article L121 du CPI
énonce formellement que le droit moral est attaché à la personne de l’auteur. Il est
perpétuel, inaliénable et imprescriptible. Quatre caractères peuvent donc être déduits
de cette disposition, le caractère de perpétuité, d’inaliénabilité, d’imprescriptibilité et
d’insaisissabilité.
Comme tous les droits de la personne, le droit moral est un droit extrapatrimonial, il
faut corps avec l’auteur. En conséquence il ne peut être cédé par contrat. Seuls les
héritiers peuvent l’exercer après la mort de l’auteur et encore comme je viens de
l’évoquer ne bénéficie-t-il pas de l’intégralité des prérogatives morales de l’auteur.
C’est là une conséquence logique de la nature du droit moral en tant que droit de la
personnalité. Ce droit est fait pour défendre l’auteur à travers l’œuvre, l’auteur ne
peut y renoncer sous peine de commettre une forme de suicide moral.
Tant qu’un auteur ne divulgue pas sa création, elle n’appartient pas à son patrimoine.
Par exemple, les créanciers d’un créateur ne peuvent faire saisir par voie d’huissier
les toiles dans l’atelier de l’artiste. De même un propriétaire d’un local ne peut se
payer des loyers de retard en vendant les sculptures qu’il trouve dans la cave du
locataire. Ce caractère du droit moral exclut aussi la possibilité pour un créancier de
faire jouer l’action oblique ou l’action boolienne. En revanche, les produits de
l’exploitation de l’œuvre sont saisissables.
Commençons donc par envisager les différents pouvoirs accordés à l’auteur, les
prérogatives du droit moral avant de voir quelles sont ces détractions.
Le droit moral comprend quatre attributs distincts mais fondamentalement unis. Les
deux premiers découlent de l’article L121 alinéa 1 du CPI, qui dit : « l’auteur jouit du
droit au respect de son nom, de sa qualité et de son œuvre. » Les autres
prérogatives découlent respectivement de l’article L121-2, alinéa 1 qui énonce :
« l’auteur a seul le droit de divulguer son œuvre sous réserve des dispositions de
l’article L132-24, il détermine le procédé de divulgation et fixe les conditions de celle-
ci. » et de l’article L121-4, alinéa 1 qui énonce : « nonobstant la cession de son droit
d’exploitation, l’auteur, même postérieurement à la publication de son œuvre jouit
d’un droit de repentir ou de retrait vis-à-vis du cessionnaire. Il peut toutefois exercer
ce droit qu’à charge d’indemniser préalablement le cessionnaire du préjudice que ce
repentir ou ce retrait peut lui causer. »
Le mot respect vient du latin respecire qui signifie veiller sur la chose. Selon les
termes mêmes de la loi, le respect de l’auteur porte sur sa paternité à travers la
mention de son nom et de sa qualité, mais il porte surtout sur l’intégrité de sa
création.
Commençons donc par voir le droit de l’auteur à l’intégrité de son œuvre. Le droit
français adopte sur le sujet une position particulièrement stricte. Il se rattache à la
philosophie humaniste qui est à l’origine de notre droit d’auteur. L’œuvre est un
démembrement de la personne de son créateur, toute atteinte à celle-ci est une
atteinte à la personnalité de l’auteur puisque c’est à travers l’œuvre que le public
perçoit l’auteur. Le devoir de respect s’impose au public mais avant tout aux
exploitants. C’est ainsi que les cessionnaires des droits sont tenus à ne pas modifier
l’œuvre. Le CPI le prévoit expressément en matière de contrat d’édition par exemple.
L’atteinte est qualifiée lorsqu’elle modifie l’appréciation du public sur la création. La
conséquence et vérifiée autant lors d’une altération de la forme que d’une
dénaturation de l’esprit de l’œuvre. Commençons donc par voir les cas où il peut y
avoir altération de la forme avant de nous pencher sur l’altération de l’esprit de
l’œuvre.
L’obligation qui pèse sur l’exploitant étant une obligation de résultat, il suffira à
l’auteur de faire constater l’altération pour que la responsabilité de l’exploitant soit
engagée.
2° Le droit de divulgation
premier contact entre l’œuvre et le public toute exploitation est interdite. Aucun droit
patrimonial n’est exercé.
D’aucuns affirment que ces facultés ne s’épuisent pas après la première divulgation.
Un tel débat demeure théorique. La volonté légitime de l’auteur de contrôler les
utilisations postérieures ou secondaires de sa création est toujours respectée. En
effet, tous ces actes mettent en jeu un droit patrimonial. En conséquence, toute forme
d’exploitation requiert l’autorisation de l’auteur.
Le droit de retrait et de repentir est énoncé par la loi à l’article L121-4 du CPI. Il est
justifié par le caractère original de l’œuvre au sens subjectif. Il autorise l’auteur à
concrétiser des regrets d’ordre intellectuel. Il suppose donc que l’œuvre ait été
divulguée et exploitée et que la conception personnelle ou les circonstances
- 22 -
Ce droit s’applique quel que soit le type de contrat qui lie l’auteur à l’exploitant.
Contrat de reproduction, contrat de représentation, etc. En revanche, il n’est pas
opposable au propriétaire du support. Si le support matériel de l’œuvre a été cédée à
un particulier, l’auteur est démuni, l’expropriation n’est pas autorisée. Par ailleurs,
cette prérogative de droit moral n’existe pas en matière de logiciel.
Certains affirment que le droit moral n’est pas essentiel à la cohésion du droit
d’auteur puisqu’il n’est apparu que tardivement. Lancé par les exploitants,
l’accusation trouve un écho mitigé parmi les membres de la doctrine. Les pays de
tradition copyright, appliquent ce raisonnement, ils ignorent le droit moral des auteurs.
Le droit anglo-américain propose une protection générale et uniforme des œuvres de
l’esprit. L’esprit matérialiste est dominant. Il n’est pas concevable que la bonne
marche de l’entreprise soit perturbée par les scrupules de l’auteur.
Cependant, sous la pression des créateurs, les États-Unis ont reconnu un droit moral
pour certaines œuvres graphiques. Dans le milieu audiovisuel américain, l’avancée
vers une protection de l’œuvre personnelle est aussi sensible.
Par ailleurs, le droit moral est absent de la convention universelle de Genève. Elle
n’est pas non plus mentionnée dans l’accord concernant les questions de propriété
intellectuelle dans le cadre de l’organisation mondiale du commerce. Son étendue est
même réduite dans la Convention de Berne. Le droit à la paternité est établi mais le
droit au respect ne défend que les atteintes préjudiciables à l’honneur et à la
réputation de l’auteur. L’application de cette disposition aboutit à un droit moral
objectif contraire à notre conception subjective. De plus, si l’honneur et la réputation
sont proches du respect, ils ne concernent que l’auteur et non l’œuvre en elle-même.
En pratique, la disposition revient à protéger la notoriété de l’auteur et non l’intégrité
de l’œuvre. Elle consacre l’approche du copyright. L’atteinte est supprimée si le nom
de l’auteur apparaît. Le cessionnaire peut alors exploiter l’œuvre sans aucune
retenue. De surcroît, l’atteinte est d’autant plus difficile à rapporter qu’il incombe à
- 23 -
l’auteur de prouver le préjudice qui en résulte, c’est cette conception qui a été retenue
en droit interne pour les œuvres logicielles.
La mise en œuvre du droit moral est assez aisée comme nous allons le voir pour
commencer, mais les moyens visant à atténuer ou à supprimer ses conséquences ne
sont pas négligeables, nous verrons donc par la suite les tempéraments à l’exercice
du droit moral.
De son vivant, seul l’auteur peut s’opposer à une atteinte à son droit moral. Ni le
cessionnaire des droits, ni les sociétés d’auteurs ou les associations de défense ne
peuvent agir. Lié au caractère personnel de ses prérogatives, le principe limite le
risque de patrimonialisation du droit moral. En cas de pluralité d’auteurs, chaque
coauteur bénéficie des attributs du droit moral. Il peut exercer seul une action. Cette
règle s’oppose à celle existant en matière de droit d’exploitation des œuvres de
collaboration. L’atteinte au droit moral s’apprécie au cas par cas. Le caractère
discrétionnaire s’efface devant la balance des intérêts. Il n’est d’ailleurs pas exclu de
moduler l’application en fonction de la qualité de l’auteur.
L’avertissement du public n’est pas une solution pour tolérer le maintien de l’atteinte.
Toutefois, prévenir que la création ne rend qu’une certaine image de l’œuvre freinera
les récriminations de l’auteur. De même, dans le cas où l’atteinte n’est pas retenue, la
mention de la désapprobation de l’auteur peut servir d’équitable palliatif.
Le caractère absolu du droit moral est difficilement compatible avec les contrats qui
sont des actes de prévision économique. Les exploitants cherchent à en atténuer la
portée par des dispositions contractuelles, nous verrons quelles sont ces dispositions.
De leur côté les juges sanctionnent les abus. Nous commencerons par voir comment
les juges sanctionnent ces abus. Il arrive aussi que la loi prenne les devants en
réduisant les prérogatives dans certaines créations que nous étudierons
ultérieurement.
Dans le même ordre d’idée, le droit moral de l’auteur disparaît lorsque la création
devient dangereuse. Une statue qui se délite en menaçant les passants peut être
légitimement détruite.
Dans une autre espèce, le fait de situer dans un film d’action les faits en Sicile et non
en région parisienne, n’a pas été jugé comme étant une altération du roman, dont
l’action se situait originairement au Portugal et à Genève. L’adaptateur jouit donc
d’une certaine liberté, mais cette liberté ne peut être absolue. En matière de logiciel,
le législateur a d’ailleurs reconnu expressément à l’utilisateur, le droit d’adapter le
logiciel pour ses propres besoins.
Voyons pour terminer les cas où l’exercice du droit moral est atténué après la mort de
l’auteur. Comme nous l’avons évoqué, le droit moral est perpétuel. Les héritiers sont
donc investis du droit moral selon les règles ordinaires de la dévolution successorale.
Les dispositions dérogatoires énoncées par le CPI ne traitent que du droit de
divulgation.
Le droit au respect perdure, sa survie peut être aisément organisée dès lors que l’on
envisage l’aspect défensif de ces prérogatives. Il s’agit d’empêcher la mutilation de
l’œuvre ou l’omission du nom ainsi qu’une fausse apposition. La doctrine les présente
généralement comme des prérogatives négatives, c’est-à-dire ne visant qu’à
préserver l’œuvre et au travers de celle-ci son auteur.
- 26 -
Le droit de divulgation perdure aussi mais uniquement dans son exercice positif. Les
ayants droit peuvent décider de porter à la connaissance du public une œuvre
inconnue du vivant de l’auteur. Mais les héritiers du droit moral n’ont pas autant de
prérogatives que l’auteur. Le droit de retrait et de repentir disparaît. Le principe est
logique puisque cette prérogative est trop attachée à la personne de l’auteur pour
être transmise à quiconque. Il existe néanmoins une exception si l’auteur a
expressément prévu et réglementé de son vivant l’exercice de la prérogative.
Après la mort du créateur, l’abus est envisageable s’il est notoire. L’abus notoire sera
évidemment qualifié lorsque les héritiers ne respectent pas une volonté
manifestement exprimée par l’auteur ou qui peut se déduire de son comportement.
- 27 -
Dans une première section nous allons commencer par envisager ces régimes applicables
aux œuvres faisant intervenir plusieurs auteurs et dans une section seconde, nous nous
attarderons sur quelques régimes particuliers dus à des œuvres particulières.
Les droits sur l’œuvre de collaboration sont attribués à la communauté des auteurs, il
en résulte des conséquences sur ces modalités d’exploitation, qu’il s’agisse des droit
patrimoniaux ou du droit moral.
1° L’exploitation de l’ensemble
Néanmoins, pour limiter les risques de litige, les coauteurs sont invités par contrat à
désigner un gérant. Le coauteur d’une œuvre de collaboration qui prend l’initiative
d’agir en justice pour défendre ses droits patrimoniaux est tenu, à peine
d’irrecevabilité, de mettre en cause les autres coauteurs. Mais chaque coauteur peut
exercer les droits propres à assurer le respect de son droit moral sans devoir
associer à cette démarche les autres coauteurs, j’ai déjà évoqué cette question dans
la leçon précédente.
Le loi énonce que les coauteurs recouvrent une liberté d’exploitation sur leur apport
dans la mesure où ce dernier appartient à un genre différent des autres et lorsque la
pratique n’est pas préjudiciable à la communauté des auteurs. Cette disposition ne
s’applique qu’aux participants reconnus comme coauteurs. Pour les participants
écartés de l’indivision, seul le contenu du contrat de cession produit des effets.
Le droit moral est aussi aménagé, même en l’absence de cession, l’exercice du droit
de retrait et de repentir est soumis à l’indemnisation des autres auteurs. Mais la
collaboration ne doit pas servir de prétexte pour limite le droit de divulgation des
coauteurs en cas de conflit dans l’élaboration de la création. Cependant en cas de
différent, les tribunaux exercent leur pouvoir souverain d’appréciation. En pratique,
les juges sont tentés de faire prévaloir l’intérêt général. Les coauteurs pourront alors
modifier la contribution du récalcitrant sous réserve du respect de l’intégrité de
l’œuvre. La collaboration entraînera alors une atténuation, une inflexion mais non
l’abolition du droit moral.
- 29 -
Le droit à la paternité subit le même sort. Il est attaché à l’œuvre d’ensemble et non à
la contribution personnelle de chaque coauteur. En conséquence, l’exploitation
détient une marge de manœuvre plus importante quant à la mise en œuvre de cette
prérogative offerte par le droit moral. Par exemple, il est en droit de regrouper la
mention des noms sous forme de générique.
Les droits patrimoniaux sur l’œuvre créée dans le cadre d’un contrat de production
audiovisuelle sont présumés cédés au producteur. La présomption s’applique au
principe d’une cession mais aussi sur l’étendu de celle-ci. Les droit exclusifs
d’exploitation de l’œuvre audiovisuelle sont confiés au producteur. Sauf disposition
contractuelle contraire, la cession couvre automatiquement le droit de représentation
et de reproduction. La cession en question n’est pas totale, les personnes, comme
les prérogatives concernées rencontrent des limites.
Voyons les protagonistes concernés par la cession. Le transfert présumé des droits
s’effectue entre d’une part les auteurs de la création d’ensemble et d’autre part le
producteur. Quels sont donc ces auteurs présumés cessionnaires ? La présomption
de cession n’atteint que les coauteurs de l’œuvre audiovisuelle, elle ne s’étend pas
aux auteurs des œuvres préexistantes intégrées qui n’auraient pas cette qualité. La
présomption est en quelque sorte une contrepartie à la titularité sur la création
d’ensemble.
B. Le contenu de la cession.
La cession présumée des droits patrimoniaux est exclusive et définitive, elle joue
pour toute la durée du monopole. Elle offre à l’exploitant toutes les prérogatives du
cessionnaire, il a la possibilité d’agir en contrefaçon contre les utilisations illicites.
L’œuvre composite n’a en réalité qu’un seul auteur, il s’agit du créateur de l’œuvre
seconde. Celui-ci jouit de toutes les prérogatives du droit d’auteur. Mais l’œuvre
seconde doit beaucoup à l’œuvre première de telle sorte que les droits du créateur de
l’œuvre première doivent être respectés. Ces obligations concernent tant les droits
patrimoniaux que le droit moral.
L’auteur, puis l’exploitant de l’œuvre seconde sont contraints au respect des droits du
créateur de l’œuvre première. Selon l’article L113-4 du CPI, le monopole sur l’œuvre
composite est exercé sous réserve des droits de l’auteur de l’œuvre préexistante. Les
prérogatives de ce dernier s’exercent en deux temps. Il accorde d’abord une
autorisation pour l’incorporation puis il contrôle le devenir de sa contribution après la
réalisation de l’œuvre composite au titre du droit moral. En principe l’autorisation doit
précéder la création de l’œuvre seconde. Il est entendu que l’exploitation d’une
œuvre composite requiert sauf volonté de l’auteur de l’œuvre incorporée la
rémunération de ce dernier. Celle-ci s’effectue dans les conditions du droit commun.
L’œuvre collective offre au contributeur une situation encore moins enviable que celle
des auteurs salariés spéciaux. En effet, le titulaire de tous les droits d’auteur est la
personne physique ou morale qui divulgue l’œuvre sous son nom. Les auteurs des
différents apports, les contributeurs, n’ont aucun droit sur la création d’ensemble.
2° L’exploitation individuelle
Mais l’exploitation séparée est aussi limitée par la condition d’absence de dommages
pour l’ensemble. En effet, le contributeur peut causer préjudice à la personne morale
détentrice des droits. L’exploitation individuelle est licite dans la mesure où elle n’est
pas concurrente à l’exploitation de l’œuvre collective. La règle posée par le législateur
est identique à celle qui prévaut en matière d’œuvre de collaboration.
Pour prévenir l’exercice de cette liberté qui peut s’avérer dangereux, l’exploitant est
incité à prévoir une disposition expresse qui s’apparentera à une clause de non
concurrence avec toutes les limites jurisprudentielles entourant cette notion. Par voie
de conséquence, la personne bénéficiant de la titularité des droits sur l’œuvre
collective, ne peut, sans autorisation exprimée dans les conditions du droit commun,
exploiter séparément les contributions des auteurs.
Le contributeur, comme on l’a vu, est dépossédé des droits patrimoniaux, il est aussi
dépossédé de son droit moral sur l’œuvre collective d’ensemble. La confusion des
apports, même relative, empêche l’application de ce dernier. L’exploitant est donc
- 32 -
Comme pour toutes les œuvres l’exploitation de l’œuvre audiovisuelle n’est licite que
dans le respect du droit moral et des droits patrimoniaux des auteurs. Envisageons
d’abord les droits patrimoniaux spécifiques à l’œuvre audiovisuelle avant de voir le
droit moral.
Le producteur est contraint de rémunérer les créateurs en proportion du prix payé par
le public lorsque celui-ci paye son accès à une création définie, c’est-à-dire une
création déterminée et individualisable. La présomption de cession, que nous avons
évoquée, n’écarte pas l’application de l’article L131-4 du CPI. Mais en étudiant les
débats parlementaires, on constate que le législateur réservait cette disposition à la
distribution de films en salle, le principe énoncé serait donc à écarter pour les autres
modes d’exploitation.
- 33 -
Autre disposition favorable aux auteurs, comme les éditeurs, le producteur a une
obligation d’exploitation de l’œuvre, mais dans leur cas l’exploitation n‘a pas à être
permanente est suivie dans la mesure où une telle situation n’est pas compatible
avec les usages, notamment cinématographiques. Pourtant avec les cassettes vidéo
et autres DVD, les pratiques d’exploitation sont en train d’évoluer.
Dernier avantage consenti aux auteurs, dans le cas de l’exploitation d’une œuvre
audiovisuelle, chaque nouveau mode d’exploitation génère une rémunération
nouvelle et définie par avance. Chaque nouveau public auquel l’œuvre est
communiqué emporte donc une rémunération supplémentaire. En revanche
l’élargissement des procédés de communication n’entraîne pas l’application de cette
disposition.
La garantie porte sur tout trouble de droit. Il peut s’agir de l’existence d’une cession
antérieure ou ultérieure, de la similitude avec des œuvres d’autres auteurs ou du
même auteur et déjà cédées. La garantie comprend aussi les troubles de fait
émanant de la personne de l’auteur pendant la réalisation de la création ou pendant
la phase d’exploitation. Le contrat doit cependant être précis sur les obligations de
faire régies par le droit commun des obligations.
Le droit moral des coauteurs est régi par une disposition particulière du CPI. Le
législateur impose à l’œuvre audiovisuelle réalisée en exécution d’un contrat de
production un régime de droit moral dual. Les dispositions applicables le sont aussi
aux œuvres radiophoniques. Elles varient entre la période de conception de l’œuvre
- 34 -
Le droit moral des auteurs est gelé pendant la phase d’élaboration. Il en résulte une
paralysie du droit de divulgation. Cette mesure d’exception par rapport au droit
commun du droit d’auteur bénéficie au producteur et à la communauté des coauteurs.
Elle évite de bloquer la création en cours de réalisation et d’empêcher son
exploitation. A défaut les caprices d’un coauteur pourraient ruiner l’entreprise.
Deux interprétations sont possibles de cette disposition. Soit l’on considère que
toutes les prérogatives sont paralysées, sont l’on considère que la retenue ne porte
que sur l’exercice des droits susceptibles de perturber l’achèvement de la création.
La seconde solution accorde au créateur une possible négociation de la version
définitive. Elle lui offre aussi la possibilité d’empêcher toute atteinte sur sa
contribution. C’est cette interprétation que semble retenir la jurisprudence.
Pendant l’exploitation de la création, les auteurs recouvrent leurs droits. Ces derniers
sont cependant atténués. L’exploitant, comme on l’a vu, peut modifier la substance
de la création par addition, suppression, changement d’un élément quelconque.
L’exercice de cette faculté requiert l’accord expresse des auteurs principaux. Cette
mesure dérogatoire revient à une cession du droit au respect par les auteurs
principaux et à une suppression de cet attribut pour les autres auteurs. Mais la
disposition pose des difficultés d’interprétation sur la forme du consentement, sur la
détermination des auteurs dont il est requis et sur la délimitation des atteintes
consenties.
coauteurs peuvent en principe exploiter séparément leur apport dès lors que cette
exploitation ne nuit pas à la carrière de l’œuvre audiovisuelle. Ils ont ainsi un droit de
divulgation personnel.
La copie privée du logiciel est interdite. Les exceptions au droit de reproduction sont
limitées à la copie de sauvegarde. La définition de cette dernière est appréciée
strictement afin d’éviter toute dérive vers la copie privée. L’exception à l’exception est
justifiée par la facilité du piratage et le préjudice qu’il génère pour les ayants droit.
Elle exprime aussi la volonté du législateur de maintenir pour le logiciel un régime
dérogatoire aux autres œuvres.
Comme nous l’avons déjà énoncé, le logiciel réalisé par un salarié appartient à son
employeur. De surcroît, en cas de recours à une cession classique, la rémunération
forfaitaire de l’auteur est toujours possible. Cette mesure est justifiée dans les
rapports entre employeur personne morale. En revanche, elle est difficilement
admissible pour les créateurs personne physique. Elle ne présente pas un caractère
d’ordre public. De plus, comme dans les autres cas de rémunération forfaitaire,
l’action en récision pour lésion est maintenue en faveur du créateur.
L’auteur d’un logiciel est soumis à un droit moral réduit, le législateur a décidé
d’asseoir les prérogatives de celui-ci sur celles énoncées par la Convention de Berne
qui, nous l’avons vu, sont très réduite. L’auteur est protégé simplement contre les
atteintes à son honneur et à sa réputation. De plus, le CPI prévoit qu’en l’absence de
clauses contraires, l’utilisateur a le pouvoir de modifier le logiciel, c’est-à-dire de
l’adapter pour optimiser les utilisations prévues. Cette exception au droit commun du
droit d’auteur est limité par l’usage personnel. Elle ne s’étend pas, bien évidemment,
- 36 -