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vol. 26 - n°2 | 2010
Numéro ouvert
Maurizio Ambrosini
Édition électronique
URL : http://journals.openedition.org/remi/5113
DOI : 10.4000/remi.5113
ISSN : 1777-5418
Éditeur
Université de Poitiers
Édition imprimée
Date de publication : 1 septembre 2010
Pagination : 7-32
ISBN : 978-2-911627-55-2
ISSN : 0765-0752
Référence électronique
Maurizio Ambrosini, « Migrants dans l’ombre. Causes, dynamiques, politiques de l’immigration
irrégulière », Revue européenne des migrations internationales [En ligne], vol. 26 - n°2 | 2010, mis en ligne
le 01 septembre 2013, consulté le 08 janvier 2020. URL : http://journals.openedition.org/remi/5113 ;
DOI : 10.4000/remi.5113
© Université de Poitiers
Revue Européenne des Migrations Internationales, 2010 (26) 2 pp. 7-32 7
Maurizio AMBROSINI*1
Une autre estimation faisant référence aux seules entrées irrégulières dès l’année
2000 fait état, pour l’Europe, d’un volume compris entre 400 000 et 600 000 cas par an
en grande partie entrés sur le territoire par les frontières orientales par l’intermédiaire des
professional smugglers (Jandl, 2007) dont le rôle est de plus en plus important. Cependant,
la majorité des migrants en situation irrégulière ne traverse pas les frontières de façon
illégale et se compose plutôt d’overstayers entrés de façon régulière, souvent avec des
visas touristiques (De Haas, 2007).
* Docente di sociologia dei processi migratori, Dipartimento di Studi sociali e politici, Universita’
degli studi di Milano, via Conservatorio, 720122 Milano ; maurizio.ambrosini@unimi.it 1
8 Maurizio AMBROSINI
différences entre les lois sur l’immigration et sur le travail conduisent à leur tour à diffé-
rentes formes d’irrégularité entre les étrangers qui sont présents sur le territoire (Icmpd,
2009).
La distinction entre les vieux pays de l’Union, dont les citoyens jouissent d’une
pleine liberté de mouvement et d’accès au marché du travail ; les nouveaux pays, dont
les citoyens ont aujourd’hui un statut plus favorable, mais rencontrent encore des restric-
tions quant à l’emploi ; les pays développés extérieurs à l’Union, mais qui sont membres
de l’Ocde ; enin, ceux que l’on appelle les « pays tiers », les pays en réalité classiiés
comme pauvres, sont une autre source de complexité qui nous renvoie au concept de
« stratiication civique » proposé par Morris (2002). Les immigrés étrangers sont de plus
en plus différenciés du point de vue juridique et donc des droits dont ils peuvent jouir. Les
immigrés, résidents de longue durée, jouissent d’un statut plus sûr et de plus de droits par
rapport à ceux qui sont arrivés récemment, qui à leur tour sont en meilleure situation que
celle des immigrés admis comme travailleurs saisonniers. À la base de la hiérarchie, on
trouve les immigrés dont le séjour entre en conlit avec les normes des sociétés de desti-
nation et qui échouent donc dans une situation d’irrégularité. La même amélioration de la
condition juridique et de la dotation de droits des immigrés autorisés au séjour a conduit à
un écart entre leur statut et celui des immigrés sans papiers (Sciortino, 2010).
Les immigrés en situation irrégulière sont donc ceux qui, par leurs déplacements,
installations, insertions dans le marché du travail, rentrent en opposition avec la réglemen-
tation de la mobilité humaine instituée par les États, elle-même hiérarchiquement diffé-
renciée selon les pays d’origine des candidats à l’entrée. L’action politico-normative a un
rôle décisif dans la constitution et dans la modiication des catégories d’encadrement des
migrants, dans la restriction ou l’élargissement de leurs possibilités d’obtenir ou de garder
un statut de légalité, dans la déinition des opportunités de sortie de la situation inconfor-
table d’irrégulier. Il faut donc être conscient de la luidité et de la réversibilité des déini-
tions : le statut de résident légal peut être obtenu ou perdu de plusieurs façons, et l’irrégu-
larité de la condition juridique n’est pas une donnée de nature ou une marque indélébile :
« la migration régulière facilite la migration irrégulière à travers le fonctionne-
ment des réseaux migratoires [voir infra, n.d.r.], souvent, l’entrée régulière précède
le séjour irrégulier et nombre de migrants actuellement réguliers ont été irréguliers
dans une phase de leur migration ou de leur séjour. Par conséquent, les migrants
réguliers et les migrants irréguliers tendent souvent à se déplacer vers les mêmes
destinations » (De Haas, 2007 : 3).
2 Financé par l’Union européenne à hauteur de 42 millions d’euros le système Frontex, promulgué
en 2005 pour coordonner la vigilance sur les frontières extérieures à l’Union, a produit en 2007,
163 903 rejets aux frontières européennes, dont la majeure partie en Grèce (73 000 cas aux fron-
tières terrestres) ; suivent l’Espagne (27 900), puis l’Italie (21 650), engagées surtout dans le
contrôle de l’immigration africaine.
deux pôles extrêmes du marché du travail (travailleurs hautement qualiiés d’un côté et
travailleurs saisonniers de l’autre), suivant l’exemple allemand. Plus que le respect effectif
des exigences des systèmes économiques, le but inavoué de ces propositions semble être
de canaliser les ouvertures éventuelles vers les types de migrants socialement et politique-
ment les mieux acceptés : les professionals qui ont des hauts revenus et les travailleurs
admis avec des contrats de courte durée et destinés à retourner, sitôt celui-ci terminé, dans
leur pays d’origine.
Aux États-Unis, une estimation du Pex Hispanic Center estime que 7 millions
d’immigrés en condition irrégulière occupent un emploi, constituant 5 % du total de la
force de travail du pays, avec des pointes de 29 % parmi les réparateurs de toits, de 25 %
parmi les ouvriers du bâtiment, de 24 % parmi les travailleurs agricoles (Luconi et Pretelli,
2008).
Concernant les tendances du marché, les gouvernements qui proclament une lutte
sans répit à l’immigration non autorisée montrent ensuite une attitude pour le moins ambi-
valente par rapport au contrôle de l’économie souterraine. Toujours aux États-Unis, après
le 11 septembre 2001, les législateurs se sont rendus compte que le marché du travail était
hors de contrôle au regard du nombre très réduit d’entrepreneurs frappés par des sanctions
à cause de l’emploi de travailleurs étrangers non autorisés. Il ne s’en est pas suivi d’actions
particulièrement incisives. Une mesure qui imposait aux employeurs de licencier, dans
un délai de trois mois, les travailleurs qui avaient été embauchés grâce à des numéros de
sécurité sociale qui ne correspondaient pas aux données en la possession du Department of
Homeland Security, a été déclarée illégitime par un juge qui a considéré sans fondement la
base de données de la Social Security Administration, en raison du nombre élevé d’erreurs.
Dans l’Union européenne, les pays méditerranéens, par le passé lieux d’émi-
gration, ont montré avec une évidence particulière au cours des quinze, vingt dernières
années leur incapacité à satisfaire à leurs propres besoins de main-d’œuvre en puisant
exclusivement dans les bassins nationaux de force de travail respectifs. Plusieurs aspects
de leur organisation socio-économique ont alimenté une importante demande de travail
immigré : des systèmes productifs qui mélangent des éléments traditionnels à des éléments
innovants ; l’importance de secteurs à haute intensité de travail comme l’agriculture médi-
terranéenne, le bâtiment, l’hôtellerie ; des facteurs de modernisation sociale comme la
Une publication de l’Ocde (2000) repérait une série de secteurs dans lesquels
on enregistrait les plus grandes concentrations de travailleurs étrangers en condition
irrégulière : l’agriculture, l’industrie manufacturière, le bâtiment et les travaux publics
et certaines branches des services comme l’industrie touristique. Des caractéristiques
comme les marges de proits réduits, la concurrence élevée, les luctuations saisonnières
de la demande rapprochent ces secteurs. Les entreprises, généralement petites, visent à
réduire les coûts du travail et à obtenir la plus grande lexibilité, sous la forme surtout de
haute intensité de travail pour des périodes brèves.
Ainsi que pour l’économie souterraine en général, on peut en outre repérer des
facteurs plus précis qui favorisent la persistance de rapports de travail non codiiés : un
lieu de travail peu déini, variable ou dificile à contrôler (comme les terrains agricoles, les
chantiers du bâtiment, les entreprises de nettoyage, etc.) ; la présence d’employeurs peu
structurés et peu formalisés (petites activités familiales, unités domestiques, travailleurs
indépendants, etc.) ; un intérêt du consommateur pour la réduction des coûts du service
acheté, en fermant les yeux sur la facturation des prestations ; une convergence d’inté-
rêts entre l’employeur et le travailleur pour maintenir le rapport de travail dans le cadre
informel, fait qui est particulièrement évident dans le cas de travailleurs ne possédant pas
d’autorisations régulières.
- Le besoin d’assistance, surtout envers les personnes âgées naît souvent à l’improviste,
il ne peut donc pas attendre les longues procédures des autorisations à l’entrée ou des
« décrets-lux » italiens.
- Le travail en cohabitation, surtout dans l’assistance aux personnes âgées non autonomes,
est épuisant et très dificile à tenir dans la durée ; une fois qu’ils ont obtenu la régulari-
sation, tant attendue, nombre de travailleurs changent d’emploi et cherchent des situa-
tions moins contraignantes et la possibilité d’avoir une vie privée. Il s’ensuit un besoin
permanent d’immigrés nouvellement arrivés et disponibles pour ce type de travail, et donc
de fait des immigrés sans papiers.
Un autre cas qui fait régulièrement l’objet d’articles de presse est celui de l’ex-
ploitation des immigrés travaillant aux récoltes de fruits et légumes dans l’agriculture
intensive. Ce phénomène est bien connu et toléré par les différentes autorités dans plusieurs
régions d’Europe. Nombre d’acteurs en proitent : des propriétaires agricoles aux intermé-
diaires et aux réseaux commerciaux jusqu’aux acheteurs. Ces derniers peuvent acheter des
produits à des prix inférieurs à ceux qu’ils devraient payer si le travail de récolte s’était
déroulé en observant toutes les règles de la légalité.
Au moins sur une courte durée donc, le recours au travail d’immigrés sans
droits et de toute façon contents d’avoir trouvé du travail est une bonne affaire pour de
vastes secteurs de l’économie. C’est pour cela que, en référence à la conceptualisation de
Brochmann (1998), les gouvernements investissent surtout dans les contrôles extérieurs,
prenant comme cible directement les immigrés au moment du passage des frontières. De
loin moins incisifs se révèlent être, au contraire, les contrôles sur les territoires nationaux,
plus dificiles à organiser, mais aussi susceptibles de frapper les intérêts des employeurs
autochtones, capables de faire pression sur les gouvernements. Bien plus, il s’agirait en
Comme nous l’avons montré plus haut, les intérêts en jeu permettent de
comprendre le recours et la tolérance au travail des immigrés en condition irrégulière,
mais ce n’est pas le seul aspect du phénomène.
Une réglementation plus stricte des passages des frontières fait apparaître des
conséquences inattendues : les immigrés sans papiers, ou entrés avec des visas touristiques
ont tendance à rester sur le territoire. Ils n’osent pas retourner dans leur pays d’origine de
peur de ne pas pouvoir traverser la frontière une deuxième fois. C’est seulement lorsqu’ils
parviennent à obtenir un statut de résident légal que, paradoxalement, ils entreprennent de
rentrer dans leur pays d’origine retrouver leur famille.
L’augmentation des coûts de l’immigration non autorisée œuvre dans la même direction :
pour payer les passeurs ou d’autres acteurs ayant favorisé l’entrée sur le territoire, les migrants ont
besoin de rester et de travailler plus longtemps, quelles que soient les conditions (Sciortino, 2010).
Une autre série de considérations naît de la constatation que les États ne sont pas
des organismes monolithiques, mais qu’ils rassemblent des secteurs qui doivent satisfaire
des objectifs différents et qui opèrent selon des logiques et des procédures partiellement
autonomes, engendrant une fragmentation des compétences à l’intérieur des appareils
étatiques (Van Amersfoort, 1996).
3 Dans le cas des pèlerinages vers les lieux de culte, très signiicatif pour l’Italie, mais aussi pour
d’autres pays de tradition catholique, comme la France ou le Portugal, les autorités religieuses
exercent des pressions pour rendre plus aisées les entrées en provenance de pays tiers.
d’agents de police aux frontières (de 9 000 avant le 11 septembre 2001, ils sont aujourd’hui
13 000 et l’on prévoit de porter leur nombre à 18 000) entraîne d’autres coûts à la charge
du gouvernement fédéral.
En Italie, le séjour non autorisé, qualiié de crime, l’arrestation pour ceux qui
désobéissent à l’ordre d’expulsion, le prolongement de deux à six mois du temps maximal
de rétention dans les Centres d’Identiication et d’Expulsion, tout cela, accompagné d’une
rhétorique publique prônant une lutte sans répit vis-à-vis de l’immigration non autorisée
se heurte à une donnée : dans le pays, seules 1 160 places sont disponibles aux immigrés
destinés à être expulsés, bien que le Gouvernement ait transféré la quasi-totalité des
ressources destinée au fond pour l’intégration des immigrés au volet de la répression de
l’immigration irrégulière. Qui plus est, les communautés locales s’insurgent lorsqu’on
annonce la nouvelle de l’installation de nouveaux CIE et l’ouverture de nouvelles struc-
tures est souvent bloquée.
Il s’ensuit que les retours forcés (qui résultent de la somme entre expulsion et
réadmissions) ont été en 2008 inférieurs à 18 000, soit moins de 3 % du nombre estimé
des séjournants en condition irrégulière. Il faut ajouter aussi que l’eficacité des mesures
diminue dans le temps, ainsi, le pourcentage des rapatriements des personnes frappées par
des mesures d’éloignement est descendu de 56,8 % en 2004 à 34,3 % en 2008. Parmi les
personnes retenues dans les CIE, le taux d’expulsion est descendu à 41 %, par rapport au
taux déjà modeste de 46,8 % des trois années précédentes (Caritas-Migrantes, 2009).
LA CONTRAINTE LIBÉRALE
Nous rencontrons ici un autre facteur qui a un rôle important dans la limitation de
l’eficacité des normes de protection des frontières et qui défend les migrants en condition
irrégulière soit contre des procédures trop radicales de recherche et de repérage, soit contre
des dispositions hâtives d’éloignement du territoire national. Ce sont les garanties que les
4 Selon les données fournies par l’agence de presse « Redattore sociale », le 7 janvier 2009.
demandeurs d’asile se retrouvent ainsi des années durant dans une zone loue et indéter-
minée : interdits de travailler oficiellement et destinés au rapatriement, souvent ils s’insè-
rent de différentes façons dans l’économie souterraine.
Ces acteurs ont joué un rôle actif dans plusieurs pays, principalement sur deux
terrains. Le premier est proprement politique et consiste dans la promotion de mesures
législatives en faveur des immigrés en situation irrégulière, comme les lois de régularisa-
tion. Le second consiste à offrir des services qui permettent aux sans-papiers de trouver
une protection sociale minimale, d’améliorer leurs conditions de vie et d’attendre la possi-
bilité de se mettre en règle : des repas chauds, des soins médicaux, des cours de langue,
etc. Les services de consultation, qui aident les immigrés à accéder à la régularisation
et qui parfois aussi sont organisés en guichets spécialisés, relient les deux versants en
préparant la documentation nécessaire.
5 À Milan, l’administration locale a promulgué une mesure qui excluait les enfants des écoles mater-
nelles. L’Association « Avvocati per niente » a soutenu un recours en justice et a obtenu le retrait
de la mesure.
Parmi les acteurs sociaux impliqués dans la défense des sans-papiers, un rôle de
premier plan revient aux syndicats de travailleurs, d’autant plus remarquable quand on
considère que dans le passé dans plusieurs pays d’Europe septentrionale, et aujourd’hui
encore aux États-Unis, les syndicats ont tenté de freiner l’arrivée de nouveaux immigrés,
craignant un affaiblissement de la force contractuelle des travailleurs nationaux. Il s’agit
sans doute d’un choix idéel, cohérent avec l’image de promoteurs de niveaux de justice
sociale plus élevés, mais des intérêts concrets entrent aussi en jeu. Il s’agit de conquérir
de nouveaux adhérents et plus généralement de lutter contre le travail au noir qui est une
menace pour les entreprises en règle et pour les emplois. Rendre visible les immigrés
irréguliers et leur travail dans l’économie souterraine permet aux syndicats de mieux les
protéger, tout en répondant aux intérêts des travailleurs nationaux.
En réalité, les migrants jouent un rôle actif dans l’alimentation des lux migra-
toires et dans le rapport entre demande et offre de travail, éventuellement aussi dans
le marché du travail informel, grâce à leurs réseaux de relations sociales. La solidarité
familiale et ethnique a aussi une importance majeure.
6 En Italie, en 2009, a eu lieu un long bras de fer entre le gouvernement, qui voulait inclure dans
le « paquet sécurité » une règle qui aurait obligé le personnel sanitaire des services publics à
signaler aux autorités la présence d’immigrés sans-papiers. Un entretien accordé par un chirurgien
connu, président de l’association des médecins catholiques de Milan, a fait la couverture du plus
important magazine national d’information politique, « L’Espresso ». Le titre entre guillemets
afirmait : « Nous ne le ferons jamais ». À la suite de quoi, le gouvernement a dû retirer son projet.
par les pays d’accueil, ont cherché des voies alternatives pour trouver du travail dans les
économies avancées, soutenus en cela par les réseaux de relations qui les lient aux migrants
arrivés avant eux et installés de façon stable. Certains d’entre eux sont interceptés et arrêtés
au cours du voyage ; d’autres deviennent la proie de circuits déviants et d’organisations
criminelles prêtes à exploiter leur position de faiblesse, d’autres encore arrivent à s’insérer
dans les interstices de l’économie souterraine ou dans des commerces informels, où ils
attendent la possibilité tant souhaitée de sortir à découvert et de régulariser leur situation.
Vasta (2008) a montré dans une recherche, concernant le cas britannique, les pratiques
d’achat et de vente ou encore le prêt de documents géré dans les réseaux familiaux. Les
immigrés tentent ainsi de contourner les restrictions imposées par les gouvernements des
pays d’accueil ; à travers les réseaux sociaux se manifeste l’agency des migrants au regard
des contraintes imposées à la mobilité humaine. En ce sens, les réseaux sociaux peuvent
devenir au moins partiellement indépendants des conditions économiques et politiques
qui les ont initialement favorisés et renforcés (Massey et Espinosa, 1997). En d’autres
termes, après les premières installations qui se sont faites sans rencontrer trop d’entraves,
alors qu’il y avait une demande de bras, les arrivées se poursuivent sous d’autres formes
et grâce aux têtes de pont que sont devenues les membres de la famille et les compatriotes
déjà établis.
Plus souvent, l’action des réseaux migratoires en tant que dispositifs micro-
sociaux favorisant la rencontre entre la demande et l’offre de travail est proitable au
recrutement et au fonctionnement de certains segments des marchés du travail. Cet aspect
est particulièrement important dans le cas de l’immigration irrégulière, exclue par déi-
nition des circuits de placement institutionnels. L’entrepreneur du bâtiment, qui cherche
une main-d’œuvre lexible et à bas coût, l’entreprise de nettoyage, qui doit remplacer un
employé, et la famille qui a besoin d’une personne pour assister une personne âgée, vont
se tourner vers des immigrés déjà connus, parce qu’ils travaillent dans le même milieu
ou parce qu’ils sont migrants de longue date et possèdent une bonne réputation, ain de
trouver des travailleurs dont ils ont besoin. Les migrants en quête de travail, à leur tour,
s’adressent à leurs proches déjà insérés dans la société d’accueil ou à d’autres compa-
triotes pour trouver un emploi. Dans ces processus, la frontière entre ce qui est régulier et
irrégulier est ignorée et constamment franchie. Naissent aussi des igures spécialisées de
broker (courtiers) du marché du travail immigré, des intermédiaires entre des compatriotes
en quête d’emploi et des employeurs potentiels (Ambrosini, 2008a).
Des cas d’aide solidaire, d’échange économique, mais aussi d’exploitation sont
également assez fréquents, là où les réseaux migratoires se révèlent particulièrement
actifs économiquement, c’est le cas notamment des économies ethniques (Light et Gold,
2000) ou des « économies de bazar » (Peraldi, 2002), dont la formation est liée au travail
indépendant et au développement de circuits commerciaux transfrontaliers (Ambrosini,
2008c).
d’autres encore − sous l’étiquette de « traite des êtres humains », ne résiste pas à une
analyse plus rigoureuse. Souvent, les migrants cherchent le soutien de ces opérateurs et
payent leurs services une fois le voyage terminé. Il est vrai cependant que les frontières
entre smuggling et traficking, entre la simple aide au passage de la frontière et l’exploi-
tation de migrants maintenus dans un état de sujétion, entre le libre choix, la coercition
ou la tromperie sont souvent labiles, surtout quand il y a dette économique ou intérêt à
prolonger le contrôle sur les personnes transportées (comme dans le cas de jeunes femmes
pour le marché de la prostitution). Les voyages ont tendance, en outre, à devenir de plus
en plus longs, sinueux et dangereux en utilisant différents moyens : bateaux de différentes
tailles, camions, autobus, taxis, voitures particulières, traversées à pied ou à la nage. Les
témoignages recueillis font état soit d’itinéraires auto-organisés et assez improvisés, avec
le risque de rester coincés dans des lieux intermédiaires du trajet (Brachet, 2009 ; Criado,
2009), soit de voyages organisés par des réseaux de passeurs professionnels (Lagomarsino
et Ramirez, 2009) soit encore d’agences et de professionnels qui procurent légalement
des attestations de citoyenneté, des visas et d’autres documents pour franchir les fron-
tières. Alors que les agences de contrôle renforcent la surveillance, construisent des murs,
ferment des passages, les migrants et les opérateurs de « l’économie du passage » (Wihtol
de Wenden, 2009) cherchent d’autres routes et développent de nouvelles tactiques grâce
aux connaissances acquises, pour échapper à la surveillance des frontières (Petrillo et
Queirolo Palmas, 2009).
Malgré les déclarations et les promesses de fermeté à l’adresse des immigrés non
autorisés, les gouvernements sont devant un dilemme : tolérer la présence d’une popula-
tion qui n’est pas formellement acceptée, mais qui est en réalité insérée sur le marché du
travail et installée parfois depuis plusieurs années ou rééquilibrer le volume de la popu-
lation étrangère autorisée au séjour par rapport à celui de la population résidant sur le
territoire. En outre, l’écart entre les immigrés autorisés et non autorisés a tendance à se
reproduire en l’espace de quelques années, ce qui nécessite de nouvelles mesures.
Selon la même source, sur vingt-sept États membres de l’Union européenne cinq
n’ont pas de politique de régularisation dont trois sont des nouveaux membres de l’Union,
peu concernés par les migrations. Au cours de la dernière décennie, l’Italie, l’Espagne et
la Grèce se sont engagées dans de grandes campagnes de régularisation. D’autres pays, en
particulier en Europe du Nord, se sont engagés dans la voie de la régularisation au cas par
cas, pour résoudre la situation des demandeurs d’asile dont la demande a été rejetée, ou
celle des étrangers non expulsables. Si l’on peut distinguer des États davantage disposés
à la régularisation pour des raisons humanitaires (le Benelux et les pays scandinaves), des
États réticents à la régularisation (la France et le Royaume-Uni) et des États qui s’oppo-
sent aux régularisations (l’Autriche et l’Allemagne), reste que la ligne de démarcation
entre immigration légale et immigration non autorisée n’est pas aussi nette et infranchis-
sable qu’on le prétend. Une estimation prudente des personnes concernées par une régu-
larisation dans l’Europe des vingt-sept varie de 5 à 6 millions, dont la moitié en Italie
(1,2 million8), en Espagne (1 million) et la Grèce (0,4 million9). Mais différentes procé-
dures de légalisation ont aussi été mises en œuvre par les pays d’Europe du Centre-Nord,
y compris par ceux qui sont les plus hostiles idéologiquement à l’idée même de régulari-
sation des immigrés non autorisés.
Du point de vue des migrants, cela signiie que la condition d’irrégulier est consi-
dérée comme temporaire et l’obtention d’un statut légal comme un objectif à atteindre.
Quel que soit le degré réel de protection juridique et sociale dont il jouit dans les premières
phases d’installation, bénéiciant des ressources de l’économie souterraine, de la solida-
rité ethnique et des aides émanant du réseau de solidarité bénévole, il est possible pour
un immigré de survivre et d’attendre une régularisation qui lui permettra d’accéder à
8 Dans le cas italien, il faut ajouter 300 000 demandes présentées dans le cadre du « processus
d’émersion » de septembre 2009 concernant les travailleurs du secteur domestique et de l’assis-
tance. Il faut aussi remarquer que les deux dernières grandes vagues de régularisations ont été
mises en pratique par des gouvernements de centre-droite, protagonistes de bruyantes campagnes
politiques contre l’immigration étiquetée de « clandestine ».
9 Les données grecques donnent un chiffre moindre que le chiffre réel. Les données italiennes,
aussi, sont en réalité supérieures, surtout si l’on considère que les « décrets-lux » annuels qui,
en théorie, devraient faire entrer légalement de nouveaux immigrants pour des raisons de travail,
servent principalement à régulariser la situation de travailleurs déjà présents sur le territoire
national, employés de façon informelle dans les familles et les entreprises.
10 Les données ont été récoltées par des enquêtes directes de type quantitatif : il est par conséquent
possible qu’une partie des répondants n’ait pas voulu révéler leurs expériences précédentes de
séjour irrégulier.
la résidence légale. La majeure partie des immigrés résidant en Italie et dans d’autres
nouveaux pays d’immigration a connu ce type de « carrière » : à une entrée réalisée
souvent selon une voie légale, en général avec un visa de touriste, succède une période
plus ou moins longue de séjour irrégulier et de travail au « noir » avant le moment de
la régularisation et la possibilité d’accéder au marché du travail régulier. Dans le cas de
la Grèce, Glytsos (2005) a identiié une sorte de parcours type du migrant qui passe de
« l’état d’illégalité » à celui de « l’amnistie temporaire », puis atteint la « légalisation sous
condition » qui conduit au bout d’une dizaine d’années, à une « légalité sans condition ».
La condition d’immigré légal est cependant à son tour réversible, d’autant plus
dans un contexte de resserrement des réglementations. Après l’obtention du permis de
séjour, le migrant peut perdre son travail, ou être employé au noir par un patron qui veut
réaliser des économies sur les impôts et les cotisations. Le statut de résident régulier
est donc fragile et révocable (Reyneri, 1998 ; Calavita, 2005). Dans le cas de l’Italie,
cependant, il a été montré que jusqu’à un passé récent les immigrés qui ont eu recours
pour la deuxième fois à une procédure de régularisation n’étaient pas nombreux (Barbagli,
Colombo et Sciortino, 2004). Malgré le pessimisme largement répandu sur la question,
les immigrés qui ont eu accès à un statut légal ont généralement réussi à le garder. Cela
pourrait s’avérer moins vrai dans l’avenir sous l’effet conjugué de deux facteurs : la crise
économique et la dificulté à garder ou à retrouver un emploi régulier et le durcissement
des critères liés au statut de résident légal. Reste que le migrant, qui perd son emploi
et éventuellement son permis de séjour, ne rentre que rarement dans son pays d’origine
comme l’a montré l’échec de la tentative espagnole d’encourager le retour des immigrés,
échec qui rappelle ceux des gouvernements d’Europe Centrale et du Nord à l’époque de
la crise pétrolière de 1974.
CONCLUSIONS
L’analyse que nous avons développée a montré que les différentes situations des
immigrés ne correspondent pas entièrement aux conditions normatives imposées par les
gouvernements des pays récepteurs en matière d’attribution du statut de résident légal. La
notion d’immigration irrégulière, issue de l’interaction entre la mobilité à travers les fron-
tières nationales des personnes qui ont des citoyennetés « faibles » et le contrôle des fron-
11 Au cours de la dernière vague de régularisation, un immigrant (cas non isolé) qui avait perdu son
travail au cours de la longue procédure d’examen et qui en avait retrouvé un a connu un traitement
différent d’une province à l’autre : le nouvel emploi a été accepté par certaines préfectures, tandis
qu’il a été refusé par d’autres.
tières, mis en place par les États, apparaît comme complexe, variable selon les périodes et
les pays et mal déinie.
12 Rea (2010) saisit bien l’opposition entre les deux premières approches. J’en ai retenu différents
points de vue pour les confronter.
La ligne d’interprétation adoptée dans cet article a cherché à combiner les apports
les plus solides de ces trois approches, en suggérant qu’une explication adéquate d’un
phénomène social complexe comme celui de l’immigration irrégulière doit relier le niveau
macro au niveau micro, les intérêts économiques et les perspectives culturelles, le point de
vue des acteurs et celui des observateurs, la rhétorique publique et le fonctionnement réel
des institutions politiques et des machines bureaucratiques. Enin, il me semble nécessaire
d’extraire de la rélexion un certain nombre d’éléments pour aborder le nœud d’une régu-
lation politique plus réaliste des mouvements migratoires.
Nous ne nous trouvons pas dans une période propice au courage politique sur un
terrain si sensible. Néanmoins, si l’on veut éviter le recours aux régularisations a poste-
riori, ou au moins les limiter, les possibilités ne manquent pas. Elles comprennent de plus
amples opportunités légales d’entrée et de travail, la lexibilité et le pragmatisme sur le
plan de la conversion de titres de séjour, au moins dans le domaine domestique et celui
de l’assistance13, l’attention aux cas particuliers et aux raisons du séjour irrégulier, ainsi
qu’une répression plus sévère des formes les plus dérangeantes de l’économie souterraine
et d’exploitation du travail des immigrés en situation irrégulière.
13 Il est dificile et discutable, au niveau politique et social, de traiter les familles comme des
employeurs normaux. L’exigence d’aide à la maison peut surgir à l’improviste, surtout dans le
cas de personnes âgées et fragiles, et demander une relation de coniance qui s’établit, en règle
générale, par la connaissance directe (Ambrosini, 2008b). Le secteur ne se prête donc guère à des
prévisions en termes de quotas d’entrée. En Italie, au cours des dernières années, les juges ont
acquitté les citoyens accusés de favoriser l’immigration illégale, qui avaient embauché au noir
des collaboratrices familiales et des assistants à domicile de personnes âgées, sans permis de
séjour. La jurisprudence a établi qu’embaucher une seule personne pour des nécessités domes-
tiques n’était pas un crime ; le crime se présente lorsque les embauches touchent deux ou plusieurs
personnes. Les magistrats ont donc voulu prendre en compte la différence entre une entreprise qui
œuvre sur le marché et une famille qui a recours au travail extérieur pour les soins aux personnes.
Il faut ajouter, en outre, que la majorité de ces familles sont disposées à régulariser la situation
des personnes immigrées, embauchées de façon irrégulière quand la loi leur en offre l’occasion.
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The article aims to answer three questions: 1) What the irregular immigra-
tion is and how is it deined? 2) Why does it persist, reproduce itself and is it so dificult to
eradicate? 3) Why are regularization measures so recurrent and do they seem to be inevitable?
In EU-27, in the last ten years, around 5 and 6 millions of migrants have been regularized.
At the same time, the article aims to show, from a theoretical point of view, the necessity to combine
several factors in order to explain adequately the phenomenon: structural factors, mainly the
economic ones; individual factors, in relation with the agency of the direct protagonists, migrants
and their networks; social factors, related to the social (and political) construction of the irregular
migration issue in the welcome countries context.
Migrantes en la sombra.
Causas, dinámicas, políticas de la inmigración irregular
Maurizio AMBROSINI