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2014 | pages 47 à 75
ISBN 9782100711093
Article disponible en ligne à l'adresse :
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https://www.cairn.info/methodes-de-recherche-en-management---page-47.htm
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Résumé
L’objet d’une recherche consiste en la question générale que la recherche s’efforce de
satisfaire, l’objectif que l’on cherche à atteindre. C’est en quelque sorte la réponse à la
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SOMMAIRE
Section 1 Qu’est-ce que l’objet de la recherche ?
Section 2 Les voies de construction de l’objet
Partie 1 ■ Concevoir
L ’objet d’une recherche est la question générale (ou encore la problématique) que
la recherche s’efforce de satisfaire, l’objectif que l’on cherche à atteindre. C’est
en quelque sorte la réponse à la question : « Qu’est-ce que je cherche ? » L’objet
consiste en une question relativement large et générale, qui se distingue des « ques-
tions de recherche » qui sont une expression plus précise et opératoire de la question
générale originale (cf. Royer et Zarlowski, chapitre 6). En ce qu’il implique la for-
mulation d’une question, l’objet de la recherche se distingue également des objets
théoriques (concepts, modèles, théories), méthodologiques (outils de mesure,
échelles, outils de gestion) ou empiriques (faits, événements), qui ne portent pas en
eux une interrogation. Ci-dessous quelques exemples d’objets de recherche.
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
Design de la recherche
Méthodologie de la recherche
Résultats de la recherche
Il n’est en effet pas rare de constater que les concepts contenus dans la problématique
initiale sont insuffisamment ou mal définis lorsque l’on cherche à les opérationnaliser
ou après une lecture plus approfondie de la littérature (cf. l’exemple ci-après).
étudie l’une des actions mentionnées régulièrement : la formation des managers aux RPS.
À ce stade, la problématique devient : quels sont les effets de la régulation identitaire pro-
duite par les formations RPS destinées aux managers ? Lors de sa recherche empirique, il
s’aperçoit que l’analyse ne peut se limiter à la formation car celle-ci est censée produire des
effets dans le quotidien des managers. Il collecte des récits de situations vécues concernant
la gestion des RPS par les managers et la manière dont la formation les a (ou non) aidés à
les gérer. Il retrace ainsi les dynamiques identitaires propres à ces situations (qu’il qualifie
d’épreuves suivant là Danilo Martuccelli). Dans ces analyses, la formation ne représente
plus qu’une des sources de régulation identitaire des managers. Un retour à la littérature
confirme que les données collectées invitent à centrer l’objet de la recherche sur les proces-
sus de construction identitaire. La problématique devient alors : comment, au sein des
organisations, l’identité individuelle se construit-elle dans les situations de travail ? Au
final, dans cette recherche doctorale, la démarche de gestion des RPS ne sera plus qu’un
contexte pour l’élaboration d’un modèle de construction identitaire en situation d’épreuve
(Pezé, 2012).
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Partie 1 ■ Concevoir
Section
1 Qu’est-ce que l’objet de la recherche ?
1 L’objet de recherche
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
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Partie 1 ■ Concevoir
tion, puis d’en montrer le potentiel explicatif et descriptif en regard d’autres notions
connexes (notion d’orientation des acteurs dans les groupes projet, par exemple). L’objet
est ici principalement méthodologique.
3) « Comment augmenter la production dans les ateliers ? » À la lumière de la théorie du
champ, Lewin (1947 a et b) traduit ce problème concret en une problématique ayant trait
aux mécanismes de changement et de résistance au changement : « comment modifier les
niveaux de conduite dans un groupe alors que ceux-ci sont le fait d’une habitude sociale,
force d’attachement à une norme ? » L’objet est à la fois empirique et théorique.
Permettant de…
Pour…
La réalité
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
Non-essentialisme
Interprétativisme
Postmodernisme
Comprendre Mettre en évidence
en profondeur le caractère fictionnel
un phénomène Constructivisme de la connaissance
ingénierique et de l’organisation
Développer un projet
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Objectivisme Relativisme
Réalisme critique
Interroger les faits
pour mettre à jour
© Dunod – Toute reproduction non autorisée est un délit.
Essentialisme
1. Pour une présentation complète de ces perspectives, on se reportera à Allard-Poesi et Perret, chapitre 1..
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Partie 1 ■ Concevoir
1. L’ensemble des notions introduites ici sont définies et illustrées plus avant dans le chapitre 1.
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
Pour…
un consensus fort sur les moyens à mettre en œuvre au sein de l’équipe dirigeante suffit-il
pour atteindre un bon niveau de performance ? Cet objet de recherche émane de la confron-
tation de deux théories contradictoires de la formation de la stratégie : l’approche globale
rationnelle de la planification stratégique, qui suggère que les managers doivent être d’ac-
cord sur certains objectifs à atteindre pour mettre en œuvre une stratégie ; l’approche poli-
tique incrémentale qui conçoit au contraire que les conflits et l’ambiguïté sur les objectifs
stratégiques au sein d’une équipe dirigeante permettent aux managers de les adapter à leurs
contraintes et conditions locales. L’approche incrémentale suggère donc d’éviter les oppo-
sitions sur les objectifs, et de rechercher plutôt l’accord sur les moyens à mettre en œuvre.
Par-delà ces oppositions, Bourgeois remarque qu’aucune étude empirique ne plaide de
1. Cette interrogation des faits ne suppose pas nécessairement la mesure ou l’observation non participante de la
réalité étudiée. Elle peut s’appuyer, comme dans la recherche-action lewinienne ou l’Action Science d’Argyris et al.
(1985), sur le changement délibéré de la réalité sociale étudiée, ce qui permettra d’appréhender, par l’évaluation des
effets des modifications introduites, les interdépendances entre les dimensions du système social.
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Partie 1 ■ Concevoir
façon convaincante en faveur de l’une ou l’autre de ces théories. L’auteur se donne donc
pour objet d’étudier plus avant le lien entre consensus sur les objectifs et/ou les moyens à
mettre en œuvre, et la performance de l’organisation.
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
Développement
d’une compréhension de la réalité
des sujets étudiés
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Partie 1 ■ Concevoir
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
Pour le chercheur constructiviste, toute réalité est construite. Elle est créée par le
chercheur à partir de sa propre expérience, dans le contexte d’action et d’interactions
qui est le sien : observations et phénomènes empiriques sont le produit de l’activité
cognitive des acteurs : ce qu’ils isolent et interprètent à partir de leurs expériences
(von Glaserfeld, 2001). Données, lois ou objets extérieurs n’existent pas
indépendamment de l’activité de connaissance des sujets : ontologie et épistémologie
sont imbriquées (Segal, 1986 ; von Glaserfeld, 2001). La connaissance construite est
une connaissance à la fois contextuelle et relative mais surtout finalisée : elle doit
servir le ou les objectifs contingents que le chercheur s’est fixé(s) ; elle est évaluée
en fonction de ce qu’elle atteint, ou non, ce ou ces objectifs, c’est-à-dire suivant les
critères d’adéquation ou de convenance (Von Glaserfeld, 1988) d’une part, et de
faisabilité d’autre part (Le Moigne, 1995).
Construire son objet, dans cette perspective, c’est élaborer un projet finalisé (Le
Moigne, 1990 ; David, 2000 a et b). Ce projet est issu d’une volonté de transformation
des modes de réponses traditionnelles dans un contexte donné (modes d’action, de
pensée…).
En sciences de gestion, parce que la recherche vise à produire des connaissances
opératoires, utiles et pertinentes pour l’action (actionnables, Chanal et al., 1997), cette
volonté de transformation se traduit souvent par un projet d’élaboration de modèles
(dans les recherches-action ingénieriques notamment, Chanal et al., 1997 ; Claveau et
Tannery, 2002) et/ou d’outils de gestion (dans la recherche-intervention, notamment
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Construction
Élaboration d’un projet d’une représentation instrumentale
du phénomène étudié
et/ou d'un outil de gestion
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Partie 1 ■ Concevoir
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
par exemple) sont ainsi eux-mêmes marqués par un mouvement continu qui nous
échappe en grande partie (Cooper, 1989).
Dans cette perspective, la recherche scientifique, en ce qu’elle s’appuie au moins
en partie sur le langage et les systèmes d’opposition qu’il véhicule, relève moins de
la découverte de l’ordre du monde que de l’écriture de cet ordre. L’enjeu, dès lors,
pour le chercheur, est d’approcher toute forme de représentation avec suspicion, de
renoncer à toute forme d’autor(eur)ité et de mettre à jour la fiction que constitue ce
qui nous apparaît comme ordonné, qu’il s’agisse de l’organisation elle-même ou des
connaissances que nous élaborons sur celle-ci (voir Allard-Poesi et Perret, 2002,
pour une revue ; Linstead, 2009). L’indécidabilité est souvent réécrite, réordonnée
ou forclose par l’exercice du pouvoir. L’analyse des systèmes de représentation (qui
sont fondés sur la construction de différences et donc d’inégalités) est donc à la fois
politique et éthique. L’objet de recherche consiste ainsi à dévoiler les processus
d’écriture du monde et les relations de pouvoir qui les animent en vue d’empêcher
toute clôture définitive du sens (voir figure 2.7).
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Partie 1 ■ Concevoir
Section
2 Les voies de construction de l’objet
1 Les différents points de départ
Le chercheur peut ainsi utiliser différents points de départ pour élaborer son objet :
des concepts, des théories, des modèles théoriques portant sur le phénomène qu’il
souhaite étudier, des outils, des approches méthodologiques, des faits observés au
sein des organisations, une opportunité de terrain, ou encore un thème général
d’intérêt. Il peut aussi croiser ces différents points de départ. Étudier une
problématique classique avec une nouvelle approche méthodologique, appliquer une
théorie à un nouveau phénomène, réinterroger des théories en regard de problèmes
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
Si la plupart des objets de recherche trouvent leur genèse dans des réflexions
théoriques et conceptuelles en sciences de gestion, les outils ou approches
méthodologiques utilisés par la recherche peuvent également constituer des points
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Partie 1 ■ Concevoir
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
Les difficultés des entreprises et les questions des managers peuvent être des
points de départ privilégiés pour la recherche en sciences de gestion (cf. exemple
ci-après). Une problématique construite sur cette base permet d’avoir un ancrage
managérial intéressant.
les jeunes mamans donnent du jus d’orange et de l’huile de foie de morue à leurs
nourrissons afin de lutter contre le rachitisme et favoriser le développement des
enfants ? Comment accroître la production dans les usines (Lewin, 1947 a et b) ? »
La transformation de ce problème initial en objet de recherche emprunte cependant
des chemins variés en fonction de la nature des connaissances et du changement
visés dans l’approche de recherche-action choisie par le chercheur (Allard-Poesi et
Perret, 2003). Par exemple, la recherche-action Lewinienne et l’Action Science
d’Argyris et al. (1985), visent principalement à découvrir la réalité et les mécanismes
potentiellement universels qui y sont à l’œuvre, conformément à l’idéal positiviste.
1. La recherche-action peut se définir comme une méthode de recherche dans laquelle il y a « action délibérée
de transformation de la réalité ». Les recherches associées à cette méthode ont un double objectif : « transformer la
réalité et produire des connaissances concernant ces transformations » (Hugon et Seibel, 1988 : 13).
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Partie 1 ■ Concevoir
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
1.4 Un terrain
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Partie 1 ■ Concevoir
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
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Partie 1 ■ Concevoir
doute une des difficultés majeures à laquelle sera confronté le chercheur lorsqu’il
entamera une recherche.
1. Pour une introduction sur ces différentes traditions en sciences sociales et en management, leurs sources et
différences, on pourra se reporter à Alvesson et Sköldberg, 2009 ; Alvesson et Deetz, 2000.
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
au sein desquels ils prennent place, et le rôle du ou des acteurs impliqués (Alvesson
et Sköldberg, 2000 ; Johnson & Duberley, 2003). Cette réflexivité prendra des formes
variées, en fonction de l’approche critique qu’emprunte le chercheur : Explorer
systématiquement, suivant ici Bourdieu (1997), les catégories implicites sous-tendant
une pensée et des pratiques collectives (dont celles de recherche), pour dévoiler les
mécanismes de reproduction et les rapports de pouvoir dont elles participent
(Golsorkhi et Huault, 2006) ; Analyser les contradictions et conséquences pratiques en
termes d’aliénation ou de prétention à la scientificité des pratiques et discours
dominants pour proposer d’autres formes de pratiques ou discours, suivant ici tout à
la fois la tradition de la critique sociale et le courant postmoderne (Alvesson et
Sköldberg, 2000) ; Ou encore apprécier l’influence de la subjectivité ou de
l’intentionnalité du chercheur dans la construction de l’objet de recherche, suivant là
une démarche constructiviste (Maréchal, 2006b).
Indépendamment de sa sensibilité ainsi, le processus de construction de l’objet de
recherche appelle le chercheur, suivant ici Foucault (in Deleuze, 1986 : 70), à « penser
autrement » que ce que nos pratiques de recherche nous donnent à voir et dire.
Pointant les limites des pratiques du « gap-spotting » dans les articles publiés dans
les grandes revues anglo-saxonnes, Alvesson et Sandberg (2011) suggèrent des
pistes pour aider le chercheur à s’inscrire dans une démarche de problématisation.
article sur l’identité, cependant que de nombreux arguments s’appuient sur des hypo-
thèses implicites que l’on pourrait expliciter.
3. Apprécier les postulats. Alvesson et Sandberg comparent chaque postulat de la littérature
afin d’apprécier leur complexité ou clarté/ambiguïté relative.
4. Développer des postulats différents. Ici, les auteurs proposent de sortir du cadre théorique
initial et de mobiliser des traditions de recherche différentes pour proposer une interpré-
tation renouvelée des phénomènes étudiés. Lorsque la ou les théories initialement mobi-
lisées s’inscrivent dans une tradition de recherche interprétative, le chercheur pourra, par
exemple, mobiliser une lecture poststructuraliste, ou encore critique, dans la tradition de
l’école de Francfort.
5. Identifier le ou les auditoire(s) privilégié(s) des théories et postulats initiaux.
6. Évaluer les nouveaux présupposés générés du point de vue de ces audiences. Sont-ils à
même de générer une conceptualisation ou une théorie qui sera considérée comme utile
ou intéressante (plutôt que triviale) par chacun des auditoires identifiés ?
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Partie 1 ■ Concevoir
Du fait de ces difficultés, la construction de l’objet relève rarement d’une seule des
voies que nous avons présentées, et elle procède souvent par allers et retours. Ainsi,
une problématique générale issue d’une première revue de littérature peut s’avérer
mal posée lors de la phase d’opérationnalisation des concepts sur lesquels elle
s’appuie, ou trop large pour permettre une investigation avec des moyens et
ressources limités. Nous proposons donc de présenter quelques exemples vécus de
processus d’élaboration de l’objet. Ces différents parcours n’ont pas de vocation
exemplaire, mais montrent au contraire la diversité des processus d’élaboration de
l’objet et les difficultés que l’on peut rencontrer.
Un objet peut tout d’abord émerger clairement et assez rapidement après le début
d’une recherche. Comme le montre l’exemple décrit ci-après, croiser deux approches
théoriques (la théorie évolutionniste et la théorie des systèmes dynamiques non
linéaires) pour analyser un phénomène relativement classique (la gestion de
l’innovation), permet de faire émerger un objet de recherche relativement tôt dans le
processus.
Mais si le processus suivi par cette jeune chercheuse semble s’être déroulé sans
grande difficulté, la construction d’un objet de recherche est souvent beaucoup
moins linéaire. De nombreuses recherches commencent ainsi sur des bases
théoriques et méthodologiques encore mal définies. L’exemple suivant retrace le
parcours d’un jeune chercheur qui est parti d’un certain nombre de domaines
d’intérêts : la réalité informelle, les processus de décision, les émotions au sein des
organisations… Ces centres d’intérêts l’amènent à s’interroger sur la pertinence du
concept de rationalité dans les organisations. Il se donne alors l’objet de recherche
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
Comme le montre l’exemple ci-après, ces difficultés peuvent être plus importantes
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Exemple – Un objet issu d’une réflexion théorique et s’inscrivant dans une perspec-
tive constructiviste
« Au tout début de ma thèse, je souhaitais étudier le processus de capitalisation des connais-
sances au sein des organisations. C’est un problème managérial important qui intéresse de
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Partie 1 ■ Concevoir
nombreuses entreprises. Mais je suis vite tombée sur une première impasse : d’une part,
une thèse sur un sujet proche avait déjà été faite, et d’autre part, il me semblait important
d’aborder le problème de la construction de la connaissance avant celui de sa capitalisation.
Durant les trois mois suivant, j’ai donc abordé la littérature avec une nouvelle probléma-
tique. Je souhaitais savoir comment la connaissance se construit collectivement et quelle est
sa dynamique au sein des organisations. C’est un sujet qui n’avait pas vraiment été abordé
au niveau auquel je souhaitais l’étudier, celui des groupes de travail. J’ai survolé une partie
de la littérature existante sur la connaissance dans différents domaines et je me suis orientée
vers un modèle américain de psychologie sociale. Mais je ressentais des difficultés pour
intégrer ces lectures très hétérogènes dans le sens que je souhaitais.
Durant l’été, j’ai trouvé une entreprise intéressée par ma recherche, et j’ai dû commencer à
élaborer activement un premier cadre conceptuel (très sommaire au départ) et à me plonger
dans des considérations d’ordre épistémologique et méthodologique. Toutefois, je ne savais
pas comment observer la construction de la connaissance et je ne savais pas trop quelles
informations collecter. J’avais opté pour une démarche très ethnographique.
Après environ trois mois de terrain, je n’ai ni complètement résolu ces questions d’ordre
méthodologique ni arrêté ma position épistémologique. Je suis en train de procéder à une
première synthèse de mes résultats qui, je l’espère, me permettra d’éclaircir ces points et de
préciser mon objet de recherche. »
Ces trois « histoires » ne sont bien entendu pas comparables, car elles reflètent
différents états d’avancement dans le processus de recherche (recherche achevée
pour le premier exemple ; en cours pour les deux derniers). Toutefois, elles
permettent d’appréhender certaines des difficultés auxquelles le chercheur est
confronté lorsqu’il cherche à élaborer son objet. Outre les difficultés engendrées par
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Construction de l’objet de la recherche ■ Chapitre 2
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