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Le Flagrant Délit
Mars 2011 Vol. 4 No 5

Tuer sa crédibilité, et sa mère

Gabrielle Fortier-Cofsky
gfort099@uottawa.ca
L’université est synonyme, pour
certains, d’une liberté nouvelle et
de «keg» sans fond. Avoir une ré-
putation de «party animal» peut
être utile pour se trouver des amis
un samedi soir, mais est-ce que
cela peut avoir un impact à plus
long terme? Est-ce que notre répu-
tation à la faculté de droit peut
avoir des conséquences sur notre
future pratique juridique?
Un avocat, surtout en pratique pri-
vée, mais dans le domaine public
également, représente sa propre
marque. Même s’il peut parfois se
cacher derrière un gros nom de bu-
reau, chaque avocat possède des
relations personnelles avec ses
clients. Toute la carrière de l’avocat
repose sur sa crédibilité, qui se
construit dès les premiers pas à
Fauteux.
Une étudiante en droit de l’Univer-
Dossier spécial: Le déclin
de l’empire étudiant
Les étudiants créent un
cours.........................p.3
Quand le cursus universitaire ne
suffit pas
Implication étudiante in- exercer une plus grande diligence.
suffisante?................p.4 Les jeunes avocats savent mainte-
Une chronique de Philippe Coderre
Un manque de culture face-de-livre pour avoir une idée
générale...................p.5 des activités de leurs potentiels
Le constat alarmant des professeurs stagiaires.
et étudiants
Parce que les lendemains du PBH
ne sont pas toujours glorieux
sité de Yale qui semblait avoir tout
pour réussir s’est trouvée face à
des portes closes en appliquant
pour un emploi. En effet, ses em-
ployeurs avaient « googlé » son
nom, et avaient trouvé des médi-
sances à son sujet sur un site de
réseau social juridique. Que ces
propos soient vrais ou non, ils ont
eu un réel préjudice sur ses pers-
pectives d’emploi.
L’importance d’une bonne réputa-
tion dans le milieu juridique ne date
pas d’hier. Cependant, l’accessibi-
lité des possibles sources préjudi-
ciables force les étudiants à
nant où trouver ces possibles infor-
mations, et de plus en plus utilisent
des sources comme google ou
Il mentionne notamment les révi-
sions de notes, et l’attitude face
aux résultats scolaires. Par exem-
ple, un étudiant qui contestera
sans raison ou blâmera le profes-
seur pour des résultats scolaires
décevants sera étiqueté comme
étant immature. Plusieurs profes-
seurs ont été avocats praticiens, et
gardent des contacts avec d’an-
ciens collègues de travail. Lors
d’une course aux stages, il est pos-
sible que certains avocats appel-
lent leurs anciens collègues, leur
demandant leur opinion à propos
des possibles stagiaires. Dans ce
cas, peut-être que cette mauvaise
critique de la part d’un professeur
aura un impact sur notre cabinet de
premier choix.
Même s’il est difficile de quantifier
Notre mystérieux professeur a
l’impact d’une mauvaise réputa-
même personnellement subi les ef-
tion, il est aisé de croire que notre
fets d'actes posés lors de ses
image d’avocat se construit dès
études. En effet, il avait écrit pour
notre passage aux études. D’après
le journal étudiant un texte d’opi-
Sochetra Nget, gestionnaire du dé-
nion assez radical lors du referen-
veloppement professionnel, il se-
dum sur la souveraineté du
rait faux de penser qu’on ne
Québec en 1995. Il croyait cet arti-
reverra pas nos collègues de
cle enfoui à jamais, jusqu’à ce que
classe plus tard. Le droit étant pro-
fession de travail avec le public,
récemment il se soit fait reconnaî-
tre exactement à cause de ce
une bonne image est essentielle. Il
est donc important d’avoir des re-
texte.
lations courtoises, professionnelles
Finalement, ce même professeur a
et respectueuses avec nos col-
mentionné qu’un des étudiants de
lègues, dès l’université.
sa cohorte a également eu de la
difficulté à devenir avocat en raison
Au-delà de nos relations avec les
de certains gestes regrettables. En
autres étudiants, il est important
effet, l’étudiant avait assassiné sa
d’avoir de bonnes relations avec
mère à coups de couteau. Ce pro-
l’administration de la faculté.
fesseur ne recommande donc à
D’après un professeur qui préfère
garder l’anonymat, il est même
personne d’agir ainsi.
plus important d’avoir une bonne
réputation au sein du corps profes-
soral qu’avec les autres étudiants.

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Mars 2011
Nouvelles
La Polygamie : Crime ou Commandement divin?
Gabrielle St-Onge
gston082@uottawa.ca
Controverse, témoignages cho-
quants, questions de valeurs,
d'éthique et de religion : la Cour
Suprême de la Colombie-Britan-
nique examine présentement la
constitutionnalité de l'article 293
du Code criminel interdisant la po-
lygamie en vertu de la liberté de
religion contenue dans la Charte
canadienne des droits et libertés.
Cette histoire a commencé dans
la communauté de Bountiful, un
petit village situé près de la fron-
tière du Montana principalement
peuplé d'adeptes d'une secte de
mormons fondamentalistes. (Fun-
damentalist Church of Jesus
Christ of Latter Day Saints) Le
chef de la secte, Winston Black-
more a été accusé, en janvier
2009, d'avoir épousé 19 femmes
dont certaines avaient moins de
18 ans au moment de l'union. Les
accusations ont été retirées à la
suite de la décision du juge de
Des procureurs prêts à tuer
Camille Pillière
cpill087@uottawa.ca
Dans la province de Québec, le sa-
laire annuel moyen d’un procureur
de la Couronne est de 92 860  $.
Dans le reste du Canada, le salaire
est nettement plus élevé et les chif-
fres montrent le gouffre entre le
Québec et le reste du pays. À Ot-
tawa, un procureur expérimenté a
un salaire qui peut monter jusqu’à
147 241 $ annuellement. Au Qué-
bec, le procureur le plus expéri-
menté gagnera 125 949 $, et ce,
dans des cas qui sont extrême-
ment rares. Pourtant l’emploi reste
le même, avec une charge de tra-
vail semblable, des horaires lourds
et les autres inconvénients que
peut apporter la fonction.
L’association des procureurs aux
poursuites criminelles et pénales
(APPCP) confirme un écart de
38  % avec les autres provinces.
Les procureurs du Québec ont
donc décidé d’aller en grève géné-
rale, le 8 février dernier, pour sou-
ligner leur mécontentement et
mettre la pression sur le gouverne-
ment pour avoir des augmenta-
tions. L’APPCP réclame des
hausses salariales de 40 % ainsi
que l’embauche de 200 procu-
reurs, pour alléger la tâche de tra-
vail. Cette hausse des salaires
Le Flagrant délit
première instance. L'ancien pro-
cureur de la Colombie-Britan-
nique s'est fait reprocher d'avoir
demandé à un troisième procu-
reur spécial de déposer les accu-
sations, alors que les deux
premiers avaient jugé préférable
de ne pas poursuivre.
La province a enfin décidé de por-
ter le jugement en appel pour que
la cour tranche la question une
fois pour toutes. Les principaux
arguments de la Colombie-Britan-
nique sont que la polygamie en-
traîne de profondes inégalités
entre les hommes et les femmes.
Les femmes de la secte seraient
victimes d'oppression se tradui-
sant par le mariage d'adoles-
centes et des grossesses
précoces. À l'appui, des témoi-
gnages de femmes se disant vic-
times d'agressions sexuelles ont
été soumis à la cour. De plus,
l'avocat de la Couronne entend
prouver que cette pratique n'est
pas justifiée dans le cadre d'une
société libre et démocratique.
réduirait l’écart de salaire avec les
autres provinces.
À la suite des négociations, le gou-
vernement du Québec était prêt à
offrir aux procureurs une augmen-
tation de 10 à 12 %, ainsi que l’em-
bauche de 60 procureurs. La loi
spéciale est venue mettre un terme
à la grève et aux négociations avec
une augmentation de 6 % sur cinq
ans. Bref, une hausse en dessous
de l’inflation, qui est nettement in-
suffisante, selon l’Association
des procureurs aux poursuites
criminelles et pénales.
De plus, plusieurs procureurs re-
mettent en question les chiffres du
gouvernement, particulièrement
après que celui-ci ait annoncé un
financement de 200 millions $ pour
la construction d’un amphithéâtre à
Québec. Le 10 février dernier, de
nombreux procureurs ont mani-
festé devant le Colisée de Québec,
pour montrer leur mécontentement
vis-à-vis le gouvernement Charest.
Selon la professeure Marie-Eve
Sylvestre, une augmentation sala-
riale est nécessaire, mais pas de
l’ordre de 40  %. À ses yeux, le
Québec a décidé de mettre ses
priorités à d’autres enjeux sociaux,
comme les garderies à 7 $, et ces
subventions réduisent le pouvoir
d’augmentation des salaires des
Le litige sur la polygamie soulève
un important débat de société.
Certains prétendent que cette
secte ne fait que rendre publique
la pratique de plusieurs milliers de
Canadiens qui ont des relations
extra-conjugales fréquentes ou
des partenaires multiples, sans
pour autant être accusés au crimi-
nel. Le problème se pose aussi
dans l'application concrète de la
loi interdisant la polygamie. Dans
les faits, il est difficile de dissou-
dre les familles de toute une com-
munauté, remettre des centaines
d'enfants à la protection de la jeu-
nesse pour ensuite prétendre que
c'est pour leur bien. La région de
Rocky Montains en Utah et en Ari-
zona fait également face au
même problème depuis plus
d'une centaine d'années. De nos
jours, des dizaines de milliers de
mormons fondamentalistes prati-
quent la polygamie dans ces
États. Après avoir maintes fois es-
sayé de l'enrayer sans succès,
l'Utah se demande aujourd'hui si
employés du gouvernement. Ce
sont des choix sociaux que fait le
gouvernement dis-elle, mais, Mme
Sylvestre demeure d’avis que le
gouvernement doit augmenter le
salaire des procureurs, car il n’est
nettement pas compétitif en com-
paraison à la pratique privée. Il fau-
drait donc mieux garder un certain
niveau pour que la position de pro-
cureur demeure intéressante pour
les avocats.
En deux semaines, la grève a pa-
ralysé le système judiciaire québé-
cois, avec cinq cas d’acquittement
et de nombreux cas reportés.
Pourtant l’espoir était au rendez-
vous. Les négociations conti-
nuaient de se poursuivre entre
Page 2
la polygamie devrait demeurer il-
légale.
D'un autre point de vue, si le gou-
vernement gagne sa cause et
renforce la présente loi sur la po-
lygamie, cela éviterait probable-
ment que la secte de Bountiful
fasse plus d'adeptes. Alors que la
communauté compte aujourd'hui
environ un millier de polygames,
l'important taux de natalité des
femmes de la secte (en moyenne
de six à huit enfants par femme)
pourrait faire en sorte que la po-
pulation mormone fondamenta-
liste augmente à une vitesse
fulgurante. Sommes-nous réelle-
ment en présence d'une situation
qui menace la démocratie et les
droits de la femme? La liberté de
religion constitue-t-elle une justifi-
cation valable pour que la société
canadienne accepte qu'un
homme ait un nombre illimité de
femmes? La fonte des neiges
nous amènera très certainement
une réponse canadienne à la
question de la polygamie.
l’Association des procureurs aux
poursuites criminelles et pénales et
le gouvernement. La dernière ren-
contre s’était terminée sans com-
promis entre les deux parties, mais
la situation semblait s’améliorer
selon la présidente du Conseil du
trésor Michelle Courchesne. « On
a convenu d’entrer dans un blitz de
négociations pour tenter de dé-
nouer l’impasse. On se fait à nou-
veau mutuellement confiance pour
arriver à une entente négociée  »
soulignait le président de l’APCP,
Me Christian Leblanc. Les deux
parties semblaient déterminées à
trouver un terrain d’entente pour
mettre un terme à cette grève. Tout
porte à croire que cette loi spéciale
ne réglera pas le problème.
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Mars 2011
Philippe Côté
Un nouveau venu à Fauteuxjet : « Je suis très heureux de pou-
pcote048@uottawa.ca
Gaz de schiste. Uranium. Sables
bitumineux. Voilà des sujets qui se
retrouvent présentement au centre
de grands enjeux d’actualité au
Canada. Soulevant de plus en plus
les passions tant au niveau média-
tique, politique que social, la globa-
lité de la question sur les
ressources naturelles et énergé-
tiques est également appelée à
être cernée d’un point de vue juri-
dique.
Grâce à l’initiative de l’Association
civiliste du droit de la défense en-
vironnementale (ACDE), il sera
possible pour tous les étudiants de
la section de droit civil de l’univer-
sité d’Ottawa de pouvoir se former
à cette réalité. L’ACDE lance pour
la prochaine session d’été le cours
intitulé Droit des ressources natu-
relles. Le coordonnateur du cours,
Jean-Paul Lacasse, se voit em-
ballé à l’idée de participer à ce pro-
Le nucléaire, une énergie renouvelable?
Chloé D’astous
cdast040@uottawa.ca
L'homme a commencé à faire l’ex-
ploitation de l’énergie nucléaire en
faisant le pari qu’il trouverait une
solution aux déchets radioactifs.
Plus de cinquante ans plus tard, le
problème n’est toujours pas résolu.
Le Canada est l'un des plus grands
producteurs d'énergie nucléaire et
il est lui aussi confronté à cette pro-
blématique. Il y a actuellement un
débat concernant les rebuts nu-
cléaires ontariens que l'on veut ex-
pédier en Suède pour qu'ils soient
retraités. Peut-on permettre que
des déchets si dangereux se dé-
placent sur le fleuve Saint-Laurent
et est-ce que l'enjeu en vaut vrai-
ment la peine?
Plusieurs défenseurs du nucléaire
clament qu’il s’agit d’une énergie
recyclable, mais à quel point l'est-
elle? Le documentaire de la chaine
de télévision française Arte nommé
« Les déchets, le cauchemar du
nucléaire » fait enquête sur le
sujet. Les journalistes ont décou-
vert que les usines de retraitement
sont responsables d’environ 80 %
des rejets radioactifs en Europe.
Bien que le retraitement de carbu-
rant français fournisse de l’uranium
et du plutonium réutilisables, il pro-
duit également 4 % de déchets ul-
Le Flagrant délit
Vie campus
voir aller de l’avant avec un cours
sur les ressources naturelles qui
est un domaine du droit que je va-
lorise beaucoup. J’apprécie d’au-
tant plus que ce cours provienne
d'une initiative étudiante carceci
démontre non seulement un intérêt
pour la question, mais également
une implication sociale, une carac-
téristique importante pour les futurs
juristes ».
Les sujets abordés pendant la ses-
sion toucheront à plusieurs
sphères du domaine environne-
mental. Les étudiants pourront
donc goûter à certaines saveurs in-
téressantes. Au menu, il y aura no-
tamment le développement
durable, le droit minier, le droit de
l’accès à l’eau, le droit sur l’aména-
gement forestier et agricole et le
droit de l’énergie. Également, plu-
sieurs matières entourant l’exploi-
tation des ressources naturelles
seront soulevées comme les ques-
tions de régimes fiscaux et de re-
times extrêmement toxiques
puisqu’ils contiennent 99 % de la
radioactivité initiale du carburant.
Ceux-ci resteront radioactifs pen-
dant plusieurs centaines de milliers
d’années. De plus, avant de pou-
voir être réutilisé dans des cen-
trales nucléaires, l’uranium va
devoir être enrichi, donc il devra
parcourir des milliers de kilomètres
pour être expédié en Russie, seul
endroit qui a les installations né-
cessaires. En fin de compte, 90 %
de l’uranium appauvri au cours du
processus restera en territoire
russe pour y être stocké de façon
plus ou moins sécuritaire. Tout
compte fait, cette méthode n’est
pas très efficace, puisqu’on ne peut
finalement réutiliser que 10 % de
l’uranium du départ au coût d’un
transport dangereux et coûteux.
De plus, un accident se produisant
pendant le transport de ces ma-
tières dangereuses pourrait avoir
des conséquences radiologiques
graves affectant la santé et l’envi-
ronnement. Il faut toutefois noter
que des standards ont été mis en
place par l’Agence internationale
d'énergie atomique (AIEA) en 1961
et constamment mis à jour depuis.
Ces régulations font un large
consensus mondial et prévoient
des mesures telles que la forma-
tion spécifique des employés
devances ainsi que les certifica-
tions environnementales. Il sera
aussi question du cas des popula-
tions autochtones dans ce dossier.
Rarement enseigné dans les au-
tres facultés de droit au Canada, le
cours de Droit des ressources na-
turelles est appelé à être des plus
passionnants. « Ce cours d’été est
une chance exceptionnelle pour les
étudiants d’en apprendre davan-
tage sur l’univers des ressources
naturelles et énergétiques
confronté au domaine juridique »,
explique Nikola Todorovic, un
des maîtres d’œuvre du projet.
Par les temps qui courent, on peut
aisément noter un grand enthou-
siasme de la part de la société
devant les problématiques envi-
ronnementales liées au déve-
loppement des ressources
naturelles au Québec. Indépen-
dance énergétique, coopération
sociale et énergie durable font sou-
vent face à libéralisme écono-
concernés, l’étiquetage clair des
matières dangereuses et l’indica-
tion du niveau de radiation. Les rè-
glementations prévoient aussi une
obligation de s’assurer de la sécu-
rité du transport en faisant préala-
blement passer une batterie de
tests pour garantir la résistance
des paquets au feu, à la pression,
aux impacts, à l’eau, à la chaleur et
au froid. Pourtant, l'AIEA n’a pas le
pouvoir d’imposer l’adoption de ses
standards aux États parties (dont
le Canada), donc le respect de
toutes les procédures de sécurité
relève de la volonté étatique.
Page 3
mique, mondialisation et prospérité
pécuniaire lorsqu’il faut parler d’en-
vironnement et «  d’économie
verte ». Le cours de Droit des res-
sources naturelles propose donc
une base juridique essentielle pour
faire face à cette musique.
Les initiateurs du cours souhaitent
former des juristes qui seront capa-
bles de performer dans le domaine
du droit des ressources naturelles
et de l’énergie, une matière qu'on
retrouve tant chez les grands cabi-
nets d’avocats qu'au sein des mi-
nistères provinciaux et fédéraux.
De plus en plus d'entreprises pri-
vées doivent faire appel à des spé-
cialistes dans le domaine.
Le cours en Droit des ressources
naturelles se déroulera sur la pé-
riode du 2 au 21 mai et vaudra trois
crédits.
En résumé, le retraitement de dé-
chets nucléaires se fait au moyen
d'opérations coûteuses et dange-
reuses causant de la pollution à
cause du transport à grande
échelle nécessaire. Le stockage
des déchets nucléaires est sûre-
ment plus sécuritaire pour l'instant,
bien que l'on puisse se demander
si l'énergie nucléaire, pouvant met-
tre en jeu de milliers de généra-
tions et des milliards de dollars, en
vaut elle-même la peine.
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Mars 2011
Allergiques à l’écriture ou à l’implication sociale?
Philippe Coderre
pbour083@uottawa.ca
Chronique
Il y a à peine un an, le Flagrant délit
atteignait son apogée, livrant à plu-
sieurs reprises des publications
d'une vingtaine de pages. Les de-
mandes de publication d'articles af-
folaient et les étudiants semblaient
très fiers de pouvoir contribuer à
l’essor de leur journal qui rivalisait
ni plus ni moins avec la Rotonde au
chapitre de la qualité et de l’épais-
seur de ses éditions.
Cette année, la nouvelle cohorte
étudiante semble atteinte d'une
passivité incommensurable et in-
justifiable qui s’est soldée par une
sécheresse participative. Si le Fla-
grant peut se targuer de compter
sur quelques fidèles de la première
heure, l'effervescence de l'année
dernière ne remplit plus la moitié
du verre qui lui était dû et constitue
un signe avant-coureur que les
jours de cette revue mensuelle
pourraient tirer à sa fin.
Le faible taux de participation de la
relève étudiante est inquiétant.
Dans l’édition actuelle, presque
tous les collaborateurs, y compris
les membres de la rédaction, sont
en troisième année. Le Flagrant
perdra donc la quasi-totalité de ses
collaborateurs lors de la rentrée
scolaire 2011. Fauteux pourrait dès
lors être démuni d'un journal étu-
diant pour la première fois depuis
des lustres.
« La présence d’un journal étudiant
actif au sein d’une faculté est très
importante », croit le doyen adjoint
et secrétaire, Pierre Thibault. « Le
journal fait état de ce qui se passe
au sein de la faculté et constitue un
outil de communication essentiel
pour les étudiants. »
Écrire un article demande un effort
Le Flagrant délit
Vie campus
intellectuel et rédactionnel qui per-
met à l’étudiant, au final, de laisser
son empreinte dans l’histoire de la
faculté. Le centre des archives de
l’université a conservé des exem-
plaires de journaux datant des an-
nées soixante-dix, un héritage qui
permet de relater la longue histoire
de Fauteux. Il semble que cette
petite contribution soit devenue
trop exigeante pour la nouvelle gé-
nération d’étudiants.
Certains observateurs ont toutefois
constaté que le manque d’engoue-
ment n’est pas propre au Flagrant
mais aussi aux autres instances
étudiantes. L'inertie générale lors
des élections des représentants de
niveau, la difficulté à atteindre le
quorum lors des assemblées géné-
rales de l'ASSO lorsque la pizza
n'est pas fournie, les conférences
données devant des salles vides et
le manque de curiosité générale
qui a contribué à l’annulation de la
journée portes ouvertes chez Sti-
keman témoignent du désintérêt
des étudiants pour tout ce qui em-
piète sur la relation privilégiée
qu’ils entretiennent avec la biblio-
thèque Brian Dickson.
Si les efforts pour atteindre un ren-
dement académique exemplaire
sont louables et valorisés, contri-
buer à la communauté étudiante
constitue un défi différent qui n’est
pas rémunéré d’une façon aussi
tangible qu’une note normative.
« S’impliquer au sein des activités
facultaires permet aux étudiants de
se distinguer d’une autre façon et
de se faire remarquer par le corps
professoral. Les lettres de recom-
mandation sont toujours plus origi-
nales lorsqu’on doit les écrire à un
étudiant que l’on connaît bien,
poursuit M. Thibault. C’est égale-
ment un moyen unique de tisser
entre eux des liens d’amitié qui leur
seront durables ».
Même son de cloche chez la prési-
dente de l’Association étudiante,
Alik Angaladian, qui assure que
son implication parascolaire a
contribué à son développement
personnel.
« Participer à la vie étudiante est
très important », croit-elle. « Cette
participation permet de développer
une certaine discipline, une rigueur
au travail et une capacité d’agir en
équipe. De plus, on finit par acqué-
rir une connaissance plus appro-
fondie de nos forces et de nos
faiblesses en mettant en pratique
nos connaissances personnelles et
académiques. »
Mme Angaladian croit néanmoins
que la participation étudiante est
adéquate cette année d’un point de
vue administratif. « Le taux de par-
ticipation à nos activités est plus
grand que jamais. », confie-t-elle
au Flagrant.
Or, parmi les activités organisées
par l'Association étudiante, il
convient de relever les nombreux
cocktails, le souper étiquette, les
fêtes organisées par les membres
du comité social et la mise sur pied
de la troupe participant aux légen-
daires Law games. Il faut donc ap-
puyer sur la pédale douce en
matière de réjouissance lorsqu’on
considère que ces événements, de
nature purement sociale, pour-
raient même faire sourire Roy Du-
puis. Peu d'êtres humains dans la
vingtaine refuseraient de socialiser
entre deux cours de droit des biens
et de droit des obligations. Si fêter
est un aspect de la vie étudiante
primordial, l’auteur de ses lignes en
étant un grand défenseur, le dé-
vouement parascolaire l’est tout
autant et c’est à ce niveau qu’il y a
un constat d’échec.
« Le budget annuel de l’ASSO re-
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flète le manque d’intérêt pour le bé-
névolat parascolaire », croit Nikola
Todorovic, vice-président du club
en droit de l’environnement et chro-
niqueur régulier au Flagrant. «
7000$ sont accordés à 67 étu-
diants pour les Law games compa-
rativement à 250$ pour les clubs
étudiants. L’ASSO a pour mission
l’intérêt des étudiants et on voit
bien où l’intérêt se trouve. 250$
pour les clubs ne constitue pas une
façon durable de promouvoir l’im-
plication sociale. »
L’excuse primaire d’un étudiant re-
fusant de s’engager socialement
est toujours le manque de temps
immanent aux études en droit.
D’après M. Todorovic, cette chan-
son ne rime tout simplement pas
avec le métier d’avocat. « L’impli-
cation sociale est inhérente à la for-
mation de juriste. Les meilleurs
juristes sont toujours ceux qui ont
été le plus impliqués. », conclut-il.
Si la condition actuelle de la vo-
lonté étudiante est garante de
l’avenir, les prochaines années se-
ront parsemées de petites fêtes
sporadiques, mais d’aucun projet
parascolaire rassembleur. L’effort
des universitaires impliqués s’har-
monise pourtant avec les nom-
breuses recherches accomplies
par leurs professeurs. C’est la
synergie entre le tandem
étudiant/professeur qui donne à
une faculté ses lettres de noblesse.
L’absence d’une de ses compo-
santes ne peut qu’être nuisible au
développement collectif d’une ins-
titution.
En septembre prochain, l'équipe
actuelle du Flagrant devra majori-
tairement laisser sa place. Ce sera
à ceux qui restent de décider si
l’histoire se prolonge ou si le vide
s’éprendra du flambeau. Alors que
les écrits restent, la passivité, elle,
est vite oubliée.
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Mars 2011
Les bébés-avocats du Québec
Philippe Cordisco
pcord080@uottawa.ca
« Professeur! Professeur! Je ne
comprends pas… Vous parlez des
députés de l’Assemblée nationale,
c’est ça? Mais qui élit les députés?
» La question n’est probablement
qu’une anecdote, mais elle a déjà
été posée dans une classe de droit
public fondamental. C’est un peu
comme cette question hors sujet
posée en droit de la famille… ou
encore cette remarque déphasée
en droit de la faillite… Les étu-
diants en droit civil manquent-ils de
culture générale? Est-ce une af-
faire de formation? Ceux qui sor-
tent du Cégep sont-ils prêts à
entrer en droit? Le Flagrant a
fouillé la question.
« On doit se poser la question en
terme d’accès à la profession juri-
dique. Imposer d’obtenir un bacca-
lauréat avant d’étudier le droit,
c’est imposer trois ans de frais sup-
plémentaires aux étudiants », sou-
tient le doyen Grammond. Même
s’il se déclare partisan de l’éduca-
tion, le doyen reste sceptique en ce
qui concerne l’argument de res-
treindre l’accès aux seuls déten-
teurs de baccalauréat. « On espère
toujours que les étudiants soient
plus matures, mais les gens qui
sortent du Cégep deviennent d’ex-
cellents juristes eux aussi. Il n’y a
pas de preuve que ceux qui entrent
en droit avec un diplôme universi-
taire sont meilleurs ».
Le professeur Dumberry pense dif-
féremment. « Même si certains
étudiants extrêmement matures
proviennent du Cégep, je vois que
les meilleurs travaux sont faits par
des étudiants qui se présentent en
mentionnant des études anté-
rieures. Idéalement, plus les étu-
diants sont matures
intellectuellement, mieux c’est ».
La finalité de la Section de droit
civil est remise en question par le
professeur Dumberry, car à son
Le Flagrant Délit
Journal étudiant de la Faculté de droit
Section de droit civil
Rédacteur en chef
Philippe Cordisco
Rédacteurs en chef adjoints
Philippe B. Coderre
Gabrielle Fortier-Cofsky
Le Flagrant délit
Vie campus
avis, il ne s’agit pas seulement
d’être une école de droit. « On de-
vrait peut-être s’offrir le mandat de
créer de meilleures têtes ». Il pré-
conise deux solutions pour amélio-
rer les connaissances générales
des étudiants. Demander l’obten-
tion d’un baccalauréat préalable ou
encore offrir une année universi-
taire de base avec des cours variés
en histoire, politique, sociologie et
philosophie par exemple. « Avec
ces cours qu’on tient pour acquis
en droit, on s’assurerait que les
étudiants connaissent les acteurs
de la société québécoise et non
pas qu’ils sont passés au travers
du système grâce aux notes. La
philosophie, c’est important et ce
n’est pas inutile de voir les grandes
œuvres à la base de notre sys-
tème. Ça ferait en sorte que les
professeurs verraient arriver des
étudiants plus matures. »
Étudiante de troisième année ren-
trée en droit directement du
Cégep, Camille Flipot croit que sor-
tir du barreau à 22 ans est ridicule.
« C’est beaucoup trop jeune. Il y a
une maturité qui vient avec l’âge
pour entreprendre des études en
droit et avoir su, j’aurais aimé faire
un baccalauréat avant, avec la
compréhension de ce que ça de-
mande ». Mme Flipot considère
qu’obliger l’obtention préalable
d’un baccalauréat aiderait les étu-
diants à raffiner leur méthode de
penser le droit. « Quand on sort du
Cégep, on n’est pas habitué à rai-
sonner, à développer sa propre
opinion, mais en droit, ce qu’on ap-
prend est vraiment important pour
la société. Oui la pratique va le
faire, mais les études permettent
d’ouvrir sa façon de voir, car le droit
forme le squelette de la société ».
Les statistiques des trois dernières
années montrent que la majorité
des étudiants de la Section de droit
civil proviennent du Cégep. La co-
horte d’automne 2010 comptait 39
% d’étudiants acceptés en droit
civil ayant complété au moins 30
crédits universitaires. À l’automne
2009, ils étaient seulement 35 %
alors qu’en 2008, la proportion était
de 47 %. Les statistiques de l’ad-
ministration ne permettent pas
d’identifier clairement les étudiants
détenteurs d’un baccalauréat, mais
la moyenne des trois dernières an-
nées établit à 60 % le pourcentage
d’étudiants qui arrivent directement
du Cégep.
Charlotte Chicoine-Wilson est une
autre étudiante de troisième année
acceptée avec un diplôme du
Cégep. À son avis, forcer l’obten-
tion d’un baccalauréat avant d’en-
trer en droit civil n’est pas la bonne
solution, car cette mesure décou-
ragerait bien des candidats. « Je
reconnais que le niveau de
connaissances sociales est bas,
mais le Cégep est censé donner
une certaine base. Si c’est une
question de culture générale, le
problème est peut-être ailleurs.
Est-ce que les gens lisent le journal
le matin? Sont-ils capables de
nommer le premier ministre? Per-
sonnellement, je me sentais prête
à entrer en droit. Même si ce n’est
jamais perdu de faire un baccalau-
réat, je n’aurais pas voulu en faire
un autre. Avoir fait un baccalauréat
dans un autre programme, j’aurais
peut-être fait une maîtrise sans
venir en droit. » Mme Chicoine-Wil-
son aime bien l’idée d’offrir des
cours de mise à niveau pour ceux
qui ne proviennent pas de l’univer-
sité ou n’ont pas fait leur Cégep en
sciences humaines. Elle propose
d’imposer un examen d’entrée
comme en Common Law, mais axé
sur les connaissances générales
de base.
Détenteur d’un baccalauréat en
commerce et de la licence en droit
civil, Daniel Michaud-Shields étu-
die présentement en Common Law
dans le cadre du programme natio-
nal. Il remarque la différence entre
les classes de droit civil majoritai-
rement occupées par des étudiants
du Cégep et celles de Common
Le Flagrant délit est toujours à la recherche de jour-
nalistes, anglophones et francophones, afin d’offrir
aux étudiants et au personnel de la Section un jour-
nal de qualité.
Soyez informés de notre prochaine rencontre en nous
suivant sur Facebook.
flagrant@uottawa.ca
Page 5
Law occupées par des étudiants
qui ont déjà des études universi-
taires. « En moyenne, les étudiants
de Common Law ont eu plus de
chance de voyager et de travailler.
Ils sont capables d’exprimer des
perspectives plus nuancées sur le
monde et le rôle du juriste dans la
société. »
Au final, les positions sont assez
tranchées. Certains croient qu’il
faut imposer des mesures pour
augmenter la qualité du cours es-
tudiantin, alors que d’autres consi-
dèrent que le système qui permet
d’entrer directement du Cégep est
un avantage qui facilite l’accès à la
profession. « À l’âge de 40 ans,
l’avocat qui sortait du Cégep sera-
t-il plus ou moins mature que celui
qui détenait un baccalauréat avant
d’entrer en droit? » demande le
doyen Grammond. « En Common
Law, le baccalauréat est préalable
parce qu’il y a une tradition en
place à laquelle il semble difficile
de déroger. En droit civil, le bacca-
lauréat n’est pas un préalable
comme le sont les mathématiques
en ingénierie » ajoute-t-il.
Patrick Dumberry affirme que sur
une période de dix ans, des me-
sures comme l’obligation de déte-
nir un baccalauréat ou de faire une
année générale de mise à niveau
distingueraient les étudiants d’Ot-
tawa. À ses yeux, ces mesures se-
raient reconnues par l’ensemble de
la profession et l’expérience uni-
versitaire atteindrait son plein po-
tentiel. Le jeune enseignant
reconnaît timidement que d’autres
de ses collègues constatent eux
aussi un certain manque de
connaissances générales chez les
étudiants et qu’il faut agir pour
améliorer la situation. « Demain
matin, la personne qui ira voir un
avocat va vouloir quelqu’un avec
une tête plus globale, plus géné-
rale. Être avocat, ça va au-delà de
maîtriser des articles. »
FlagrantMars2011_Flagrant Décembre 2010 11-02-28 15:37 Page6

Mars 2011 Le Flagrant délit Page 6

PUBLI-REPORTAGE
STIKEMAN ELLIOTT S.E.N.C.R.L., s.r.l.
STIKEMAN ELLIOTT LLP
www.stikeman.com

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FlagrantMars2011_Flagrant Décembre 2010 11-02-28 15:37 Page7
Mars 2011
Les avocats ne savent pas
compter au concours M
Catherine Mayer
cmaye045@uOttawa.ca
Les 18 et 19 février, l’équipe d’Ot-
tawa a fièrement laissé sa marque
lors de la 33e édition du concours
de plaidoirie Pierre-Basile-Mi-
gnault. William Desrochers, Phi-
lippe Larochelle, Catherine Mayer
et Stéphanie Yung-Hing sont ren-
trés au bercail le cœur léger et vic-
torieux
Le concours Mignault est une oc-
casion privilégiée pour les étu-
diants des facultés canadiennes de
droit civil de s’initier à la pratique
dans le domaine juridique. Mis au
défi de porter en appel une déci-
sion fictive de la Cour supérieure,
leur épreuve consiste d’abord à ré-
diger un mémoire convaincant
qu’ils défendent ensuite lors d’une
plaidoirie devant le Tribunal-école.
Cette année, la trame factuelle à
l’origine du jugement de première
instance était le fruit de l’imagina-
tion de l’honorable Jean-Louis
Baudouin, ancien juge de la Cour
d’appel. Les faits mettaient en
scène le destin tragique de Mon-
Le défi de construire un état de droit en Haïti
Charlotte Chicoine-Wilson
cchic041@uottawa.ca
C’est un euphémisme de dire
qu’Haïti a été fortement ébranlée
par le tremblement de terre de jan-
vier 2010. Cette catastrophe natu-
relle n’a épargné personne et le
sort du système de justice n’a été
guère plus brillant que celui du pa-
lais national. Or, dans une situation
de crise comme celle-ci, maintenir
l’état de droit est au moins aussi
important que de subvenir aux be-
soins de base de la population.
Lorsque les violences et l’impunité
s’ajoutent au manque de nourriture
et d’eau potable, c’est la cerise sur
le sundae en matière de crise des
droits humains.
Danielle Saada, responsable de
l’ONU pour la mise en œuvre de la
réforme de la justice en Haïti, a été
invitée par le groupe Avocats sans
frontières de droit civil afin de venir
présenter les tenants et aboutis-
sants de la mission dont elle a été
chargée. Pour les Nations Unies, il
importe d’offrir plus qu’un soutien
Le Flagrant délit
Vie campus
sieur Jean Narache, qui, en raison
de maux de ventre, entre d’ur-
gence à l’Hôpital du Salut public…
et n’en ressort jamais. Les partici-
pants devaient ainsi débattre de la
responsabilité du centre hospitalier,
tant pour sa faute que pour celle de
ses préposés, dont les agisse-
ments étaient à tout le moins dis-
cutables. Laconique et évasif, ce
jugement fictif permit aux étudiants
d’explorer à leur guise les diffé-
rentes avenues de la responsabi-
lité médicale, certaines plus
audacieuses que d’autres. Philippe
Larochelle, étudiant de deuxième
année du tandem appelant, a d’ail-
leurs trouvé cocasse le fait d’être le
seul participant à soulever un argu-
ment de Charte dans ce débat ci-
viliste.
Stress et fébrilité étaient bien en-
tendu au rendez-vous lors de la
ronde éliminatoire. Le banc des
juges vit défiler vingt-quatre plai-
deurs tantôt nerveux, tantôt bé-
gayants, mais toujours déterminés.
Soulignons que les membres des
tandems appelant et intimé de la
Section de droit civil livrèrent leur
meilleure performance sous le re-
Le droit de la perle
logistique sous forme de tentes et
de conteneurs. En ce qui concerne
le système de justice haïtien, il faut
aussi le réformer. En effet, la règle
selon laquelle « tant qu’à recons-
truire, autant bien le faire » ne s’ap-
plique pas seulement aux
bâtiments. Le droit haïtien est
formé en majeure partie de lois
désuètes, fruits de la révolution de
1804 qui a mené à la formation de
la République d’Haïti et à la suc-
cession de régimes autoritaires.
L’ONU a développé un plan de ré-
forme de la justice, dont les pre-
mières mesures consistent en la
modernisation du Code pénal et du
Code de procédure pénale. Cette
réforme a donné lieu à des débats
houleux entre les preux Français,
chevaliers du droit civil et le géant
états-unien, défenseur de la Com-
mon Law devant l’éternel. Pour
finir, ce sont ses voisins latino-
américains qu’Haïti a pris pour mo-
dèles. Entre autres, le Chili, qui
vient de réformer son Code crimi-
nel, l’a inspiré dans le développe-
ment d’un droit hybride. C’est un
croisement entre le droit civil
Page 7
gard encourageant de leurs super-
viseurs, le doyen adjoint Pierre Thi-
bault et Me Marie-Ève Aubry. Fiers
de leur prestation, c’est avec un
nuit sera plus longue que
petit pincement au cœur qu’ils ap-
prévu… »
prirent à la fin de la journée que
Sherbrooke affronterait McGill le
C’est ainsi qu’après seulement
lendemain lors de la ronde finale.
trois heures de sommeil, Philippe
Larochelle et Catherine Mayer se
L’équipe ottavienne passa donc au
retrouvèrent en face du banc de
mode festivité et partit célébrer son
juges de la ronde finale, présidé
accomplissement au centre-ville…
par l’Honorable Louis Lebel.
jusqu’à ce qu’un appel télépho-
Quoique ce dernier ne ménagea
nique inattendu vienne changer le
pas ses interventions, les deux
cours de la soirée. Monsieur Thi-
plaideurs firent fi de leur fatigue et
bault se remémore ainsi ce revire-
défendirent leurs arguments avec
ment rocambolesque  : « Nous
aplomb. Leurs efforts leur valurent
sommes dans le métro, après avoir
le prix du troisième meilleur tan-
dégusté un bon repas au restau-
dem du concours et celui du
rant – comme je le dis quelquefois,
deuxième meilleur plaideur, remis
nous avons mangé dignement…
à Catherine Mayer.
Catherine me passe le téléphone,
il est 23  h  30 et le président du
La 33e édition du concours Mi-
concours Mignault, Alain Roy,
gnault étant maintenant derrière
m’apprend – en se confondant en
nous, il est déjà temps de penser
excuses – qu’il y a eu une erreur
au déroulement de la prochaine
dans le calcul des points et que ce
édition, qui se tiendra justement à
sont les appelants d’Ottawa qui
l’Université d’Ottawa. Avis au co-
s’en vont en finale contre McGill!
mité d’organisation : toujours cal-
Je crois rêver… La communication
culer le pointage des plaideurs cinq
est coupée… Je transmets la
fois plutôt qu’une!
bonne nouvelle à toute l’équipe; la
contnental et la common law à cherche dirigée que les étudiants
l’américaine, le tout à la sauce haï- devraient mener à bien au cours de
tienne. la session. Ils seraient suivis par un
professeur spécialisé dans le do-
La conférence a également été maine de droit touché. Le groupe
l’occasion d’en apprendre plus sur d’ASF offrira également la possibi-
les possibilités d’implication pour lité aux intéressés de faire partie
les étudiants. Le chargé des af- de leur cellule de crise. Celle-ci
faires académiques du groupe devra être prête à répondre aux
d’ASF, Pascal Meilleur-Durand, a questions urgentes d’ASF qui se-
indiqué que si tout se passe bien, raient soulevées par une éven-
deux nouvelles initiatives devraient tuelle catastrophe naturelle,
être offertes dès l’an prochain. La comme dans le cas d’Haïti, ou
première est un programme de re toutes autres situations de crise.
FlagrantMars2011_Flagrant Décembre 2010 11-02-28 15:37 Page8
Mars 2011
Puisque la passion ne suffit pas
Témoignage: le concours L
Raphaëlle L. Mignault
rleve086@uottawa.ca
Chronique
Les 17, 18 et 19 février derniers, la
Faculté de droit de l’université a été
l’hôtesse du concours de plaidoirie
Laskin 2011. Deux tandems de
plaideurs de la Section de droit
civil, Gabrielle Fortier-Cofsky et
Guillaume Laberge, ainsi que Pas-
cal McDougall et Raphaëlle Mi-
gnault, ont affronté d’autres
plaideurs en provenance de 17 uni-
versités canadiennes. Le problème
fictif concernait une poursuite cri-
minelle du commissaire de la
concurrence contre trois sociétés
albertaines productrices d’électri-
cité, accusées de collusion pour
fixation des prix. Ce problème des
plus complexes – probablement le
plus complexe depuis de nom-
breuses années - jumelait des no-
tions de droit constitutionnel et de
droit administratif, en touchant éga-
lement quelque peu au droit de la
concurrence et au droit pénal.
Sous la direction de David Robi-
taille et de Nicolas Lutz, les quatre
étudiants ont pu vivre une expé-
rience haute en émotions, malgré
un retour bredouille à la Section.
Participer à un concours de plaidoi-
rie, c’est un peu comme participer
à une compétition sportive de
grande envergure. Le talent
compte peut-être pour 10 % de la
performance; ce sont les efforts
Puisque la licence ne suffit pas
Jo-Annie Charbonneau
jchar151@uottawa.ca
Après trois années de dur labeur,
plusieurs étudiants se retrouveront
bientôt devant l’inconnu. Quoi
faire? Entrer sur le marché du tra-
vail, poursuivre ses études, faire le
che
(avocat ou notaire) ou encore
voyager. Plusieurs options s’offrent
à eux. En voici quelques-unes pour
en apprendre plus.
Sur le plan scolaire, il faut soulever
deux avenues possibles. Le pro-
gramme national et les études su-
périeures. Le premier choix est tout
désigné pour les personnes qui
voudraient pratiquer hors Québec
ou qui veulent acquérir des
connaissances sur un autre sys-
tème de droit. Ce programme est
désigné spécifiquement pour les
Le Flagrant délit
Vie campus
consacrés et le temps investi, sans
oublier la passion des coachs qui
font la différence. La charge de tra-
vail est immense et les exigences
ne sont pas minces. À plusieurs re-
prises, il m’est arrivé d’avoir hâte
que se termine cette aventure in-
tense qui demande un engage-
ment plus important que tout autre
cours de la licence (la section oc-
troie d’ailleurs six crédits pour ce
concours, ce qui illustre l’implica-
tion attendue).
Au même titre que la vie du sportif
est orientée vers sa compétition à
venir – la nutrition, le sommeil et
les entraînements, tout y passe –,
le plaideur n’a qu’une chose en
tête lorsque le concours approche :
gagner le Laskin. Je me suis d’ail-
leurs toujours demandé comment
un Olympien qui venait de consa-
crer (au minimum) quatre ans de
sa vie à l’entraînement pouvait se
sentir lorsqu’il se fait ravir le po-
dium par un Américain ou un Chi-
nois. Le sentiment est-il semblable
à celui que nous avons ressenti à
l’annonce des résultats, le samedi
19 février dernier? Après avoir
passé près de six mois à travailler
sur un problème, le fait de ne pou-
voir ramener l’une de ces fa-
meuses plaques qui font la fierté
des universités est-il un échec cui-
sant?
Lors du premier round préliminaire,
alors que j’écoutais la fabuleuse
futurs avocats. Il permet aux étu-
diants d’obtenir la double formation
juridique qui est nécessaire au Ca-
nada. Il s’agit également d’un pro-
gramme qui ajoute seulement une
année scolaire de plus à la licence.
On retrouve des équivalents dans
les autres universités du Québec,
mais le programme le plus ancien
se trouve à l’Université d’Ottawa.
En ce qui a trait aux études supé-
rieures, il s’agit d’une voie relative-
ment ouverte. Elle consiste en des
études aux programmes de
deuxième cycle. Il existe différents
programmes offerts aux diplômés
de droit. On retrouve les maîtrises
en traduction juridique, en déve-
loppement international, en
science politique ou encore en
administration publique. Ces
études peuvent se faire au Canada
ou à l’étranger.
plaideuse de McGill convaincre le
banc de trois juges avec brio, la
seule idée qui me traversait l’esprit
était : comment vais-je trouver la
force de me lever pour faire ma
plaidoirie? Mon stress avait alors
dépassé le seuil tolérable et je
n’étais plus totalement certaine
d’avoir la capacité d’assembler des
mots pour former un tout cohérent.
Pourtant, je me suis levée, j’ai dé-
posé mon volumineux cartable sur
le lutrin et dès que j’ai ouvert la
bouche, la panthère qui se logeait
au fond de mon ventre s’est tout de
suite éclipsée. Lorsque le juge m’a
interrompue pour la première fois,
dès cet instant, j’ai su que toutes
ces heures passées à la biblio-
thèque et toutes ces heures pas-
sées à répéter ma plaidoirie
avaient valu la peine. Le sentiment
de fierté que j’ai éprouvé en répon-
dant avec conviction aux questions
des juges était indescriptible.
Sans me prononcer pour l’Olym-
pien qui fait certainement face à
des enjeux plus grands, les senti-
ments de désespoir et de tristesse
que j’appréhendais à la suite d’une
défaite au Laskin n’ont pas été
aussi dévastateurs que je m’y at-
tendais. La frustration et la décep-
tion ont bien sûr plané au-dessus
de la table de droit civil lorsque le
responsable du Concours invitait
l’équipe gagnante, l’Université
McGill, à monter sur la scène. Mais
pour ma part, le sentiment d’avoir
Un autre chemin qui demande
des études supérieures
s’adresse aux étudiants qui veulent
devenir notaires. Pour ceux-ci, afin
d’accéder à la profession, ils doi-
vent faire des études de deuxième
cycle. À l’Université d’Ottawa, il
leur est possible de faire la maîtrise
en droit notarial. Pour les universi-
tés du Québec (Longueuil, Mont-
réal, Laval et Sherbrooke), il faut
appliquer pour un diplôme d’études
notariales. Dans le premier cas, le
programme nécessite trois ses-
sions, alors que dans le deuxième
cas, il s’agit de deux sessions.
Après l’obtention de ce diplôme,
les futurs notaires devront faire un
stage de 32 semaines.
Pour ce qui est des futurs avocats
qui ne poursuivront pas d’études
supérieures et qui décident de
Page 8
livré une excellente performance,
les nouvelles rencontres et la fierté
d’avoir plaidé devant de vrais juges
(de la Cour d’appel fédérale, no-
tamment) ont vite pris le dessus
sur cette déception. Une opinion
que partage également Gabrielle
Fortier-Cosky : « C'est une bonne
pratique pour la profession d'avo-
cat. Ça va arriver de travailler vrai-
ment fort sur un dossier et de ne
pas le gagner! L’important est
d’avoir fait tout le nécessaire,
même si l’orgueil en prend certai-
nement un coup. »
Rares sont les cours qui nous
transforment vraiment en tant
qu’être humain. Ce fut néanmoins
le cas du concours Laskin. Il sem-
ble cliché de dire que l’expérience
vous change, mais faites-moi
confiance, on ne peut en sortir in-
demne. En une fin de semaine, le
stress a côtoyé l’excitation, la dé-
ception a laissé place à la fierté et
la tristesse s’est finalement trans-
formée en exaltation. Laissez-moi
vous dire qu’un tel mélange d’émo-
tions en si peu de temps a de quoi
bouleverser!
Pour les passionnés de droit
constitutionnel et de droit adminis-
tratif, pour ceux qui aiment les défis
(et s’en est tout un!), pour ceux qui
pensent faire du litige plus tard (et
après le Laskin, vous en serez plus
que convaincus), l’expérience vaut
le coup!
prendre la voie professionnelle, ils
doivent appliquer au Barreau du
Québec. Dans ce cas, pour être
admis, il faut avoir un diplôme uni-
versitaire de premier cycle en droit
(LL.L.). Par la suite, dépendam-
ment de l’évaluation diagnostique,
l’étudiant devra faire ou non les
quatre mois de cours préparatoires
en plus de la période d cours offi-
ciels de quatre mois. Par la suite,
l’étudiant devra réussir les diffé-
rentes épreuves écrites que néces-
site le Barreau et finalement faire
un stage d’une durée d’une année.
Il est donc évident que les options
ne manquent pas aux futurs diplô-
més de la licence en droit civil. Ils
n’en restent qu’à eux de décider la
voie qu’ils veulent suivre, avocat,
notaire ou autre.
FlagrantMars2011_Flagrant Décembre 2010 11-02-28 15:37 Page9
Mars 2011
Arts et culture
Du processus judiciaire et autre sentimentalité
Les folies du législateur: Chronique d’humour surréaliste
Charlotte Chicoine-Wilson
cchic041@uottawa.ca
On peut s’habituer à passer Noël
en solitaire. On ferme les rideaux,
on loue des films d’horreur et on
commande de la pizza. Il suffit de
ne pas allumer la radio et éviter
ainsi d’être envahi du sentiment
mièvre que suscite immanquable-
ment les chorales de castras chan-
tant Minuit chrétien en canon.
Cependant arrive février et avec lui
cette journée fatidique que même
les cœurs les plus endurcis trou-
vent désolant de passer en tête-à-
tête avec des mets chinois pour
emporter. Et comme d’être la Lé-
gislatrice ne protège pas du
charme de Cupidon, je m’étais pro-
mis de trouver de la compagnie
pour célébrer le rouge et rose. Mal-
heureusement, ladite compagnie
se fait rare dans les hauteurs de la
Tour législative. Pour être tout à fait
honnête, au matin du 14 février,
j’étais bien près d’avoir perdu es-
poir. C’est donc la tête basse et les
pieds traînants que je descendis
Les belles histoires des pays d’en droit
Nikola Todorovic
ntodo080@uottawa.ca
Nouvelle 5: Le rang cinq
La température dans la forge était
suffocante et l’humeur de Séraphin
y était pour quelque chose. Le vieil
avare n’avait aucune envie de re-
cevoir maintenant le paiement du
capital pour la dette qu’avait
contractée Florent envers lui.
Lorsque le forgeron lui présenta
l’enveloppe, Séraphin lui répondit
«  viande à chien,  ce n’est pas le
capital que je veux, mais les inté-
rêts ». L’avare ne voulait pas don-
ner quittance à son débiteur, parce
qu’il préférait ramasser les intérêts
de 18 % sur le montant de 600 $.
Dire que le Code civil donnait gain
de cause à Séraphin.
En effet, l’article 1561 précise que
le créancier n’est pas tenu de rece-
voir autre chose que ce que lui est
dû. Puisque la créance possède un
terme, Florent est obligé de payer
les intérêts jusqu’à cette date. Sé-
raphin avait tous les droits de refu-
ser l’offre que lui faisait Florent. Le
front plein de sueur, Florent comprit
qu’il ne pouvait se libérer des
griffes de son redoutable créancier.
Une fois de plus, Séraphin avait
Le Flagrant délit
l’escalier en colimaçon menant à la
bibliothèque de la Cour suprême.
Il suffit parfois de s’écarter d’un iota
de la routine pour que le destin se
tordre le bras de lui-même. Arrivée
au pied de l’escalier, j’ai pris à
droite plutôt qu’à gauche comme à
mon habitude. En tournant dans la
première rangée, je me suis retrou-
vée face à face avec un clerc que
je n’avais encore jamais vu ici.
Parce que si cela avait été le cas,
je m’en serais souvenu. À couper
le souffle, c’est tout ce qui me vint
à l’esprit pour qualifier la profon-
deur de ses yeux. Je vous épargne
les détails du ballet auquel nous
nous livrâmes pour finir, d’un
même souffle, par nous inviter à
prendre le café. N’en croyant pas
ma chance, je me dépêchai d’enfi-
ler bottes et manteau.
J’aurais dû m’en douter : il ne faut
jamais se réjouir trop vite. Nous
étions attablés devant nos lattes
depuis moins de cinq minutes que
l’envie de bâiller me tiraillait déjà
les mâchoires. L’azur profond de
dompté un autre de ces conci-
toyens, prenant le montant d’ar-
gent qui lui était dû, Séraphin sortit
de la forge en laissant savoir qu’il
repasserait le mois prochain.
Il prit la direction de la paroisse de
St-Adèle. En ce temps de l’année,
les chemins étaient pratiquement
impraticables à cause de leur mau-
vais état. Néanmoins, Séraphin fai-
sait de la vitesse, parce qu’il avait
d’autres affaires à régler. Arrivé
dans la paroisse, il se présenta à
son immeuble à logement sur le
rang cinq. Il avait loué le logement
à deux draveurs. Théophile et
Jean-Simon travaillaient dans le
camp de bûcherons des McKenzie
sur la rive est de la rivière du Dia-
ble. Les deux colocataires avaient
signé le bail d’une durée d’un an.
Amoureux des Pays d’en Droit,
Théophile s’était marié à la belle
Angélique, un beau brin de fille de
la paroisse qui possédait la maison
léguée par son père. Il y avait em-
ménagé peu de temps après. Pour
ne pas abandonner son fidèle ami,
Théophile laissa une somme d’ar-
gent à Jean-Simon pour le dédom-
mager de son départ, en échange
de quoi ce dernier signait un papier
qui libérait Théophile de toutes
obligations de paiement sur le
mon clerc charmant ne mas-
quait pas bien longtemps l’in-
sipidité de son langage. Déjà
je regardais ailleurs. Le ser-
veur peut-être? Il avait l’air
pas mal. Le gratte-papier ju-
diciaire perçut-il la fuite de
mon intérêt? Je le vis froncer
des sourcils et se lancer dans
une diatribe enflammée sur la
façon dont les juges écrivent
leurs jugements dans l’espoir,
vain, de me regagner. Ce
juge-ci écrivait toujours avec un
Mont Blanc. À la juge Z il fallait tou-
jours un bon trois onces de « thé »
fort avant de commencer. Un autre
ne rédigeait que sous la menace
d’une retraite forcée. L’écriture
d’untel, qui se refusait à taper du
clavier, était tellement illisible que
son clerc était forcé de tout inven-
ter.
Avant qu’il n’aille plus loin dans ces
confidences déplacées, je payai
mon café et me levai. En passant
près de mon valentin d’un instant,
je ne put m’empêcher de lui glisser
à l’oreille : « Il y a un terme pour ce
loyer.
Pour sa part, Jean-Simon connaît
des moments plus difficiles. Blessé
à une jambe lors de la drave sur la
rivière, il est devenu invalide et ne
peut plus travailler. Comble du mal-
heur, il trouve réconfort dans la
boisson, ce qui dilapide très vite le
peu d’argent qu’il avait économisé.
Séraphin prenait en horreur l’ivro-
gnerie, mais ce dont il était le plus
incapable, c’était de supporter les
dettes non payées. Conscient que
Jean-Simon n’est plus apte à payer
le loyer, Séraphin se présente chez
Angélique et Théophile pour lui de-
mander de payer le loyer.
Page 9
qui vient de se passé ici : manque
de professionnalisme. » Non, mais
! Il faut avoir la langue bien pendue
pour aller de-ci de-là, rapportant
les petites habitudes, tout compte
fait inoffensives, des plus hauts
juges du pays ! C’est pour des his-
toires comme celles-là que je tra-
vaille sans assistant : qu’est-ce que
la population penserait du droit si
elle savait que j’ai rédigé le Code
civil en buvant du chai assise en
lotus et le Code criminel en regar-
dant du coin de l’œil tous les épi-
sodes de Virginie?
Théophile sait bien qu’il ne peut
pas demander à Séraphin de faire
la charité à Jean-Simon, car le
créancier a toujours sa phrase uni-
verselle en guise de
réponse « Sainte misère, décidé-
ment vous n’allez jamais rien com-
prendre. Ce n’est pas une question
à savoir si je peux, mais bien si je
veux ». Accablé par l’arrivée de Sé-
raphin, Théophile présente le do-
cument que Jean-Simon lui a
signé, afin de s’exonérer envers
l’avare. Ce document est-il oppo-
sable à Séraphin?
FlagrantMars2011_Flagrant Décembre 2010 11-02-28 15:37 Page10
Mars 2011
Le cerveau en compote
Jo-Annie Charbonneau
jchar151@uottawa.ca
Chronique
Dans le numéro de décembre der-
nier, j’ai abordé le nouveau règle-
ment 48 de la Ligue nationale de
hockey concernant les coups à la
tête. À la suite des derniers événe-
ments, j’ai décidé qu’une récidive
s’imposait.
Le règlement a été adopté pour
éviter les coups illégaux à la tête
au hockey et éviter que des
joueurs soient blessés inutilement.
Cependant, quelques mois sont
déjà passés, et le règlement ne
porte aucun fruit. Alors qu’avant les
joueurs victimes n’étaient pas des
joueurs d’impact, aujourd’hui l’une
des vedettes de la LNH est blessée
et son retour est incertain pour les
séries éliminatoires.
En effet, Sidney Crosby a été
blessé lors de la Classique hiver-
nale de hockey, le 1er janvier der-
nier. Depuis, le joueur étoile est
hors jeu en raison d’une commo-
tion cérébrale. On ne sait toujours
pas s’il effectuera un retour au jeu
cette saison. Le coup qu’il a reçu
!"#$%&"'()$)"*%+,("+()
$$$$(-$'+.,&/
!"#$%&"'$#(
)*%&'+,'"--(
Des créneaux d'avenir
s0RÏVENTIONETRÒGLEMENTDESDIFFÏRENDS
s$ROITETPOLITIQUESDELASANTÏ
s)NTERNATIONALISATIONDUDROIT
s0RATIQUEDUDROITENCONTEXTECHINOIS
s#RIMINALITÏFINANCIÒRE
s%NVIRONNEMENT
s-ÏDIATIONINTERCULTURELLE
s4RANSFERTTECHNOLOGIQUE
19 programmes à Sherbrooke et à Longueuil
Bourses de recherche généreuses
Le Flagrant délit
Sports
n’était peut-être pas illégal (ça
reste à discuter), mais reste qu’il
s’agissait d’un coup porté à la tête.
Son agent, Pat Brisson, a d’ailleurs
fait une sortie remarquée après
cette blessure, demandant à la
LNH de réagir. Récemment, à la
suite d’une bagarre générale entre
les Islanders de New York et les
Penguins de Pittsburgh, c’est
Mario Lemieux qui a demandé du
changement. Mais quel type de
changement peut-on espérer?
Le nombre de blessures à la tête
ne cesse d’augmenter. Au moment
d’écrire ces lignes, 19 blessés sur
122 avaient une blessure à la tête.
Notez que les blessures au cou ou
au dos sont exclues. De ceux-ci,
on note des joueurs d’impact
comme Marc Savard (hors jeu pour
la saison minimum), David Perron
ou encore Matthew Lombardi. En
ce qui concerne les agresseurs,
certains n’ont même pas reçu de
sanction par rapport à leur geste,
ou encore ces dernières étaient in-
signifiantes, soit entre une à quatre
parties de suspension. Si les sanc-
tions sont ridicules, il va de soi que
les agresseurs ne se gêneront pas
pour continuer leurs coups.
!""#$%$&'(#%"-$)"0(&$
1",$2($*3)),.--(4
)#$%(*+#%'5"-$(-63'+(2(-&$
*(+).--37,)%4$
8&%#+%,(#+-.+-/$&'+%'"+3-&$
7()$9,-)$'($)(23,-(4
USherbrooke.ca/droit
Page 10
cas, on ne parle pas de montant
Quelles solutions peuvent être ap- dérisoire de 5000  $, alors que le
portées pour enrayer le problème? joueur en gagne 1 000 000 $. Non,
Des sanctions plus sévères, peut- dans ce cas, il faudrait l’équivalent
être, mais reste que dans toutes si- des dommages punitifs, soient
tuations de droit, l’un des meilleurs pour empêcher le joueur de recom-
moyens de sévir est de toucher au mencer. Également, la LNH devrait
portefeuille des agresseurs, et pénaliser l’équipe à verser un mon-
dans ce cas des équipes. La situa- tant. De ce fait, si le joueur recom-
tion serait la suivante. Un joueur en mence, et que l’équipe doit
frappe un autre illégalement à la débourser des montants de façon
tête. L’arbitre applique le règle- répétitive, elle pourra sévir à l’in-
ment, rigoureusement, et exclu le terne.
joueur pour le reste de la partie. En
plus, le joueur doit débourser un Il est intéressant de comparer la si-
montant pour son geste. Dans ce tuation du hockey à la vie de tous
les jours. Par exemple, une situa-
tion semblable qui se produirait lors
d’une partie amicale sur une glace
extérieure ou encore juste lors
d’une partie dans la ruelle, on peut
se demander si l’accusé s’en tire-
rait aussi bien qu’un joueur de
hockey professionnel. En réalité, la
personne aurait un bien plus gros
problème. Elle s’exposerait entre
autres à des poursuites sous l’arti-
cle 266 du Code criminel, en ce qui
a trait aux voies de fait. Comme il
s’agit d’une infraction criminelle,
c’est que le geste n’est pas toléré
dans la société hors glace. Alors,
pourquoi le tolère-t-on dans le
hockey professionnel? Est-ce par
qu’il s’agit d’un sport, parce que les
joueurs sont payés pour le faire ou
encore parce qu’il s’agit d’un spec-
tacle?
Une chose est sûre, la LNH doit ef-
fectuer un changement drastique.
Elle doit émettre des règlements
stricts qui seront appliqués de la
même façon par les arbitres. Les
joueurs ont aussi leur part de res-
ponsabilité. Ils doivent montrer plus
de respect ou encore trouver des
solutions par eux-mêmes pour
changer leurs habitudes. Il faut ar-
rêter de vendre le hockey comme
un combat de boxe, mais plutôt
comme un sport qui allie vitesse,
exécution, et technique.
FlagrantMars2011_Flagrant Décembre 2010 11-02-28 15:37 Page11
Mars 2011
Philippe Coderre
pbour083@uottawa.ca
Chronique
Le maire de Québec, Régis La-
beaume, et le premier ministre,
Jean Charest, ont finalement dé-
cidé d’y aller de l’avant avec le pro-
jet du nouveau Colisée de Québec,
une décision qui a fait sourciller
bien des observateurs en raison de
l’absence de contributions prove-
nant du secteur privé et de l’incer-
titude quant à la possibilité de se
nantir d’une franchise de la Ligue
nationale de hockey. Or, pour la
première fois depuis des lunes, le
Québec s’est doté d’un projet de
société et cet effort de nos politi-
ciens doit être valorisé par la popu-
lation (lire la chronique « Du pain
et des Jeux » d’octobre 2010).
Il y a bien d’autres villes en Amé-
rique du Nord où la sagesse des
décisions des élus est remise en
question, autant par les écono-
mistes les plus conservateurs que
par ceux qui ont pour maîtresse le
libéralisme économique.
C’est le cas de la ville de Glendale,
en Arizona, épicentre des malheurs
de la Ligue nationale de hockey
dont les secousses se font même
ressentir dans la Belle province.
Glendale est une ville de 207 000
habitants installés en plein désert
dans la région métropolitaine de
Phoenix, la 5e plus grande agglo-
mération des États-Unis. L’idée
d’armer cette région de plusieurs
équipes sportives n’est pas bête si
on se base sur la prémisse que
plus le potentiel économique régio-
nal est élevé, plus les chances de
succès risquent de suivre la même
tangente.
C’est pourquoi Gary Bettman, com-
missaire de la LNH, a décidé en
1996 de faire volte-face aux Jets
de Winnipeg et à leur faible dollar
en transférant l’équipe de hockey
manitobaine dans ce désert urbain.
La formation, devenue les
Coyotes, devait amener un peu de
fraîcheur dans cet endroit où l’ari-
dité fait exploser le mercure. Bien
que le marché soit grand, ceux-ci
entraient directement en compéti-
tion avec les Suns de Phoenix, une
formation parmi les plus victo-
rieuses de l’histoire de la NBA, et
les Cards de l’Arizona, qui bien que
lamentables, ont toujours joui de la
renommée que leur apporte la reli-
gion américaine, la NFL. Bien mal-
chanceux, ils ont vu la région
s’éprendre deux ans plus tard
d’une équipe de baseball, les Dia-
mondbacks, dont les débuts holly-
Le Flagrant délit
Sports
Les Coyotes de Québec
woodiens lui ont conféré l’idolâ-
trie de la population entière.
Bien difficile de vendre un sport
se pratiquant sur une surface
glacée dans un tel contexte.
Quatorze ans plus tard, l’embal-
lage semble démontré que le
pari a été réussi. Les Coyotes
possèdent la 3e meilleure for-
mation de la conférence de
l’Ouest. Leur aréna, flambant
neuf, est parmi les plus somp-
tueux de toute la ligue natio-
nale. La concession est très
prisée par les athlètes qui, entre
deux séances d’entraînement,
peuvent apprivoiser les nom-
breux clubs de golf avoisinant leur
aréna ou bénéficier de leurs pis-
cines chauffées même en plein
mois de janvier.
C’est malheureusement ici que la
belle épopée prend fin. Comme
pour tout nomade aux prises avec
un assèchement buccal, même les
plus belles oasis peuvent parfois
s’avérer être des mirages. Au gui-
chet, aucune équipe n’atteint un
taux d’impopularité aussi élevé que
les Coyotes. Seulement 11 285
spectateurs se présentent en
moyenne au Jobing.com Arena les
jours de matchs pendant qu’à
peine 9000 personnes les regar-
dent à la télé. Depuis leur arrivée
en 1996, cette équipe a perdu 25
millions de dollars annuellement,
ce qui l’a précipitée au bas d’une
falaise insurmontable.
Pour créer un engouement dans la
population, des moyens très origi-
naux ont été mis en place comme
cette idée de donner des billets à
chaque personne qui fait un don de
sang. Ou encore, le jour de la St-
Valentin, on a fait tirer pendant le
match un anneau valant 5000$ afin
d’inciter les cupidons de se monde
à faire croire à leur Valentine qu’il
n’y a rien de plus romantique que
d’assister à un match de hockey.
Peut-être que la prochaine étape
sera de céder des loges à ceux qui
« achèteront américain ».
Devant de tels déboires qui font
paraître les banques d’investisse-
ment américaines comme des
exemples de gestion prudente et
diligente, la formation a dû recourir
à la faillite l’an dernier. En l’ab-
sence d’acheteurs « sérieux »,
c’est la ligue elle-même qui s’est
portée acquéreur de la formation.
Il convient d’insister sur le mot «
sérieux ». Des Canadiens, voyant
très bien qu’une équipe de hockey
ne peut connaître de succès dans
un marché saturé où la neige n’est
présente que dans les téléviseurs
résidentiels, ont tenté d’acheter à
fort prix l’équipe pour la déménager
ensuite au nord de la frontière. Le
commissaire s’est fait un devoir de
bloquer toutes ces tentatives
d’achat.
Avec la montée du dollar canadien
depuis quelques années, le pays
que l’on fuyait autrefois est pour-
tant devenu la coqueluche de tous
les sports professionnels nord-
américains. La NFL s’intéresse à
Toronto, la NBA à Vancouver et la
MLS à toutes les grandes villes ca-
nadiennes. Pourquoi la LNH, qui
représente le circuit où la débâcle
est la plus prononcée, ne croit pas
rentable de ramener le hockey
dans le pays où ce sport fait figure
de religion?
Cette question demeure sans ré-
ponse. Et elle devient encore plus
nébuleuse lorsque même la Ville
de Glendale, l’une des plus endet-
tées aux États-Unis, a décidé il y a
quelques mois d’émettre des obli-
gations afin de trouver le finance-
ment nécessaire au rachat de
l’équipe. Cette acquisition se ferait
par l’entremise d’un investisseur de
Chicago qui recevrait un don de
175 millions de dollars par la Ville
en échange de son achat et de sa
garantie à garder la formation dans
la région de Phoenix. La Ville se re-
paierait via les frais de stationne-
ment, comme si 3000 voitures pour
41 événements annuellement sont
suffisantes pour rembourser un
montant de près d’un cinquième de
milliard.
Cette décision de la Ville est sur-
prenante puisqu’un tel don lui fut
récemment refusé par la Cour su-
prême de l’Arizona. La Constitution
de cet État prévoit en effet très clai-
rement que tout don concédé à des
parties privées est illégal sauf ex-
ceptions (gift clause). Bien que
cette clause fut futile pendant de
nombreuses années, le plus récent
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jugement Turken v. Gordon est
venu émettre des balises dans
ce cas ou la ville de Phoenix of-
frait plusieurs millions à un en-
trepreneur privé qui souhaitait
construire un nouveau centre
d’achat.
Dans cette décision, la Cour
rappelait que pour qu’un don
soit légal, il convient que le pro-
jet dans lequel il est investi soit
important pour le public et que
la valeur du montant offert ne
soit pas disproportionnée avec
ce que la communauté reçoit
en retour. Avec les estrades
vides malgré les succès de
l’équipe sur la patinoire et le projet
de la Ville de se rembourser par les
frais de stationnement, parions que
le peu de cheveux que possèdent
ces juges s’envoleront lorsqu’ils
étudieront en profondeur le dossier
des Coyotes.
Nous nous retrouvons dans une si-
tuation ou des politiciens utilisent
les fonds publics, malgré la me-
nace d’une poursuite judiciaire qui
semble certaine et au prix d’alour-
dir la dette publique, afin de
conserver une équipe anonyme
dans un marché sportif ou c’est
l’été 365 jours par année. C’est
comme si un Canadien, après une
nuit torride passée en compagnie
d’une jolie Cubaine sur les plages
de Varadero, décidait de l’épouser
le lendemain et de lui offrir une
somptueuse résidence dans sa
ville natale, au climat docile, de Yel-
lowknife afin de cimenter ses belles
avances. Il est difficile d’imaginer
cette situation se régler par autre
chose qu’un divorce.
Ainsi, si le maire de Québec est cri-
tiqué pour l’érection du nouvel
aréna sans aucune garantie
qu’une équipe de hockey s’y éta-
blira, parions qu’il a jeté un coup
d’œil à la situation des Coyotes de
Phoenix avant d’avoir donné le feu
vert au projet. Dans le pire des scé-
narios, il ne pourra jamais être
perçu comme un pire gestionnaire
que le maire de Glendale qui s’en-
tête à revamper un projet qui n’a ja-
mais levé.
En ce temps de crise, la LNH
n’aura plus les reins assez solides
pour continuer à vendre des mi-
rages bien longtemps. Elle devra
tôt ou tard se diriger vers les points
d’eau un peu plus au nord qui, bien
que moins paradisiaques, sont
beaucoup plus efficaces pour
éteindre les dossiers les plus
chauds.
FlagrantMars2011_Flagrant Décembre 2010 11-02-28 15:37 Page12

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Me Michèle Denis
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