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Une première évaluation de la filière d’extraction des gaz non-conventionnels réalisée par
une équipe scientifique de l’Université de Cornell, aux États-Unis, a mis en évidence que
celle-ci pourrait être aussi néfaste pour le climat que l’extraction et la
combustion du charbon. Certes, le gaz naturel émet moins de CO2 que le charbon lors
de sa combustion. Mais le bilan global, « du puits à la roue », serait quant à lui nettement
moins positif.
L’étude en question était consacrée aux émissions de gaz à effet de serre (GES) issues de
la combustion du gaz naturel, des émissions additionnelles liés aux méthodes de
production ainsi qu’au transport, et enfin aux fuites de méthane qui se produisent lors de
la production, du transport et de l’utilisation du gaz. Elle arrive à un résultat de 33
grammes éqCO2 par million de joules d’énergie pour le gaz non-conventionnel contre 31,9
grammes pour le charbon.
L’actualisation de cette étude montre que les émissions de méthane causées par
l’exploitation des gaz non conventionnels sont supérieures de 30% à celles du à
l’exploitation des gaz conventionnels. De même, l’empreinte climatique des gaz de
schiste est supérieure à celle des gaz ou pétrole conventionnel si l’on regarde sur le très
long terme, et plus encore sur les 20 prochaines années.
L’empreinte des gaz de schiste est supérieure d’au moins 20% à celle du charbon sur un
horizon de 20 ans, et comparable sur une période de 100 ans.
Le rapport conclue sur le fait que substituer le gaz de schiste aux autres énergies fossiles
(pétrole et charbon) n’aura pas les effets escomptés en terme de réduction du
changement climatique.
1
Note de position Réseau Action Climat : http://www.rac-f.org/IMG/pdf/Note_Gds_VF.pdf
La possibilité d’exploiter de nouvelles ressources jusqu'alors délaissées aura forcément
un impact sur la situation énergétique au niveau mondial. Pour le gaz non-
conventionnel, les réserves estimées par l’Agence internationale de l’énergie (AIE)
montrent que les ressources exploitables pourraient être supérieures aux ressources
estimées de gaz conventionnels3. Au regard du niveau de consommation actuel du gaz au
niveau mondial, ces nouvelles réserves feraient plus que doubler la durée de la
consommation (estimée aujourd’hui à environ 60 ans). Quant au pétrole de schiste,
selon l'Institut français des pétroles (IFP), ce seraient 60 à 100 milliards de barils de
pétrole, soit l'équivalent de 70 à 120 années de production du Koweït (un des premiers
producteurs mondiaux d'hydrocarbures), qui dormiraient sous le sol parisien.
Certains arguent du fait que les gaz non-conventionnels permettront, en se substituant à
d’autres énergies fossiles, d’assurer la transition vers une économie peu émettrice
de gaz à effet de serre. Cet argument mérite d’être largement relativisé. Un rapport du
Tyndall Center University of Manchester de janvier 2011 constate ainsi : « il est possible
qu’un certain niveau de substitution se produise (…) mais dans le monde actuel, dans
lequel la demande mondiale en énergie augmente et sans contrainte sérieuse sur les
émissions de gaz à effet de serre, il existe une faible incitation à s’orienter vers des
combustibles peu émetteurs (…). Il est ainsi difficile d’envisager une autre situation
que celle dans laquelle les gaz de schistes sont largement utilisés en supplément des
autres réserves d’énergies fossiles, alourdissant ainsi le problème du changement
climatique »4. Exploiter le gaz naturel non-conventionnel en France aura forcément un
impact au niveau mondial, à savoir la baisse du prix du gaz et, de ce fait, l’augmentation
de sa consommation audelà de nos frontières avec, in fine, une augmentation des
émissions de gaz à effet de serre.
Au niveau mondial, un rapport de l’US National Petroleum Council prévoit, en fonction de
trois scénarios différents de disponibilité des gaz de schistes, que les émissions cumulées
liées à l’utilisation de ces nouvelles réserves seraient de l’ordre de 46 à 183 GtCO 2 entre
2010 et 2050. Et encore, pour chacun de ces scénarios, est-il présumé que seulement 50
% des ressources seront extraites. A titre de comparaison, les émissions de CO2 liées à la
combustion d’énergie dans le monde atteignaient 29 Gt en 20085.
- Le Danemark semble se diriger vers une exploitation future des gaz de schiste, même s’il
est encore en phase d’étude. D’après Bruno Courme, directeur général Europe gaz de
schiste chez Total « Le gouvernement voit le bénéfice de cette production, que ce soit en
termes de budget ou de ressource énergétique, car leur production décline. Localement, il
y aura certainement le même besoin d’explication pour les populations, mais il semble
que le mouvement d’opposition ne sera pas aussi fort qu’en France ». Total aurait déjà
obtenu deux permis d’exploitation au Danemark.
- En Pologne, le Premier ministre Donald Tusk a déclaré fin mars que le gouvernement
était « déterminé à ce que les recherches et l'exploitation du gaz de schiste deviennent un
fait ». 70 permis sont déjà en cours d’exploitation dans le pays, sans législation adaptée ni
prise en compte des aspects environnementaux. Enfin, la Pologne compte bien pousser à
l’exploitation des gaz de schiste du fait de sa future présidence de l’Union Européenne.
- En Allemagne, l’exploitation par Exxon Mobil est déjà d’actualité, une fois de plus sans
législation adaptée et alors que seul l’aspect économique n’est envisagé par les
ministères de l’Environnement et de l’Energie.
• Dans le monde :
2
http://www.terre-finance.fr/La-Lituanie-veut-se-lancer-dans-l-extraction-du-ga-vtptc-
9681.php
3
http://www.lefigaro.fr/societes/2011/04/14/04015-20110414ARTFIG00733-total-va-enfin-
produire-du-gaz-non-conventionnel-en-chine.php
- En Algérie, le groupe pétrolier italien Eni a signé avec le groupe public algérien
Sonatrach un accord visant à mener conjointement l'exploration et le développement
d'hydrocarbures non conventionnels, dont du gaz de schiste4.
- Afrique du Sud : 225 000 ha sont déjà concernés par des permis de recherche et/ou
exploitation et les forages ont d’ores et déjà commencé sur plusieurs sites.
4
http://votreargent.lexpress.fr/bourse/fiches-valeurs/eni-accord-avec-sonatrach-dans-le-
gaz-de-schiste-depeche_156107.html
5
http://mlis.state.md.us/2011rs/billfile/HB0852.htm
6
http://www.njleg.state.nj.us/2010/Bills/A4000/3653_I1.HTM
- Suède : Alors que le Parti social-démocrate vient de prendre position contre l’exploitation
de gaz de schiste, Shell a décidé de se retirer des projets d’exploration qu’il menait dans
plusieurs régions.
- France: Total, Schuepbach Energy, Torreador Energy France, GDF, BMK Petroleum,
Vermilion
- Canada: Canbrian Energy, QUestere Energy, Talisman Energy. A noter aussi un grand
nombre de soutiens au sein du MAGS (Mouvement d’Appui au Gaz de Schiste8).
- Pologne: Exxon Mobil, Chevron, Conoca Philips, Marathon Oil, Total (a acquis une
participation à hauteur de 49% de 2 concessions d’Exxon Mobil), Statoil, Siluvian (détenu
à 60% par Petrolinvest)
7
http://www.timeslive.co.za/local/article1038545.ece/No-confusion-on-
Karoo-fracking http://www.timeslive.co.za/local/article1041963.ece/Anti-
frackers-demand-clarity
http://www.timeslive.co.za/local/article1043068.ece/Shabangu-stops-
fracking
8
http://www.le-mags.org/gaz-de-schiste/index.aspx
6 - ACTIONS EN JUSTICE
Le 17 mai 2011, l’entreprise américaine Chesapeake a été condamnée par les tribunaux de
Pennsylvanie à une amende de plus de un million de dollars, amende la plus lourde jamais imposée à
une compagnie pétrolière dans cet Etat. L’entreprise est condamnée pour avoir contaminée les
réserves en eau de 16 familles à Bradford County (du à des failles d’étanchéité du puits qui a permit
au méthane de s’introduire dans ces réserves), mais également pour les blessures causées à trois
ouvriers suite à l’incendie d’un de ses puits en février9.
Cette première condamnation pourrait ouvrir une porte importante aux recours aux Etats-Unis, ainsi
qu’au Canada, où une action en justice a déjà été lancé il y a moins d’un mois contre l’entreprise
EnCana.
9
http://www.huffingtonpost.com/2011/05/18/chesapeake-energy-gas-drilling-pa-
fine_n_863509.html