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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 1.

INTRODUCTION GENERALE

DEFINITION

Le dictionnaire nous donne les définitions suivantes du mot "intermédiaire" :


9 pour l'adjectif : qualifie un élément qui, étant entre deux termes, assure une
relation entre eux;
9 pour le substantif : personne qui assure une liaison, qui met en relation deux
groupes.
En ce qui concerne le terme "financier", le dictionnaire propose "relatif aux
ressources pécuniaires".
On peut donc dire que l'intermédiaire financier est une personne ou un
organisme qui met en relation des fournisseurs et des utilisateurs de fonds. Ces
derniers peuvent globalement se classer selon trois catégories d’agents
économiques : les ménages, les entreprises et l’Etat.

ETAT

ENTREPRISES MÉNAGES

INTERMÉDIAIRES
FINANCIERS

MARCHÉS
FINANCIERS

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MENAGES

Le secteur des ménages est dans son ensemble généralement en surplus financier.
Ce secteur présente donc une capacité de financement et peut mettre ce surplus
de ressources financières à la disposition des deux autres secteurs économiques.
On peut formuler une équation de base d'un système pour une période donnée :

REVENUS + ADJONCTION EXCEPTIONNELLE DE RESSOURCES


(HERITAGE, DECOUVERTE D'UN TRESOR, ... C'EST-A-DIRE TOUTE VARIATION BRUSQUE DU CAPITAL INITIAL)
=
CONSOMMATION + REDUCTIONS EXCEPTIONNELLES DE RESSOURCES (PERTES, DONATIONS, ...)
+ EPARGNE.

En négligeant les facteurs exceptionnels, l'épargne est un terme d'équilibrage


obtenu par soustraction :

S=Y-C1

Ainsi, l'épargne est égale à l'excédent des revenus sur la consommation, mais
il existe une ambiguïté dans le choix du terme, puisque l'épargne peut tout aussi
bien être négative (c'est-à-dire une désépargne) dès lors qu'il y a eu au cours de la
période sous revue un excédent de la consommation sur les revenus.
Dans la vie, il existe des cycles où les situations de surplus et de déficit alternent :
9 très jeune : en déficit ;
9 25 à 35 ans : constitution d'une certaine épargne volontaire (logement, p.ex.)
ou forcée (cotisations pour pensions p.ex.) ;
9 35 à 65 ans : l'épargne se constitue de la manière la plus évidente (surtout
pour les revenus les plus élevés) ;
9 après 65 ans : désépargne : on utilise tout ou partie des réserves accumulées.
Il existe diverses affectations possibles de l'épargne :
9 la thésaurisation;
9 l'investissement en biens matériels (à des fins de production, d'usage ou de
conservation) ou immatériels (éducation, formation, brevets, logiciels, fonds
de commerce);
9 les placements financiers ou emplois financiers.
Les emplois financiers permettent à ceux qui épargnent de transférer des
ressources à ceux qui désépargnent. C’est globalement, rappelons-le, le cas pour le
secteur des ménages.

1 S = Savings, Y = Income, C = Consumption

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Trois possibilités d’investissement s’offrent typiquement aux ménages :


9 un investissement en actifs réels, comme par exemple l’immobilier, l’art, etc ;
9 un dépôt dans un établissement de crédit ;
9 un investissement en actifs financiers.
Nous approfondirons plus particulièrement les deux derniers points dans la suite
du cours.

ENTREPRISES

Le secteur des entreprises est en général globalement en déficit financier.


Les entreprises ont besoin de fonds pour pouvoir financer leurs investissements.
Ces fonds peuvent bien sûr provenir de l’entreprise même et être prélevés des fruits
de son exploitation industrielle ou commerciale, mais le secteur des entreprises
dans son ensemble fait également et massivement appel au financement externe. A
cet égard, les entreprises peuvent soit se financer par dettes, soit par fonds
propres.
Dans le premier cas, deux alternatives se présentent généralement. L’entreprise
peut soit décider de s’endetter en souscrivant un crédit au niveau d’un
établissement de crédit, soit s’endetter directement sur les marchés financiers en
faisant appel publiquement à l’épargne : elle émettra alors ce qu’on appelle des
obligations.
Dans le second cas, l’entreprise fera appel au capital d’investisseurs intéressés et
émettra des actions. Ce cas se présente lors de la constitution de la société et
lorsque l’entreprise veut par après renforcer ses fonds propres.
Dans une certaine mesure, l’efficience avec laquelle les fonds sont transférés des
secteurs en surplus vers les secteurs en déficit influence le potentiel de croissance
d’une économie. Par ailleurs, il est également intéressant de remarquer que la
structure financière globale des entreprises varie selon les pays, et selon que l’on
se situe en Europe ou aux Etats-Unis. Alors qu’en Europe, il est traditionnellement
davantage fait appel au crédit bancaire, aux Etats-Unis, les entreprises, à travers les
marchés des actions et des obligations, font davantage appel aux marchés
financiers.

ETAT

L’Etat a presque toujours été en déficit et présenté un besoin de financement


pour financer une partie de ses dépenses publiques (celles qui ne sont pas couvertes
par les revenus des taxes). Les pouvoirs publics modernes ont recours à deux
grands types de financement. Le premier type de financement, le plus

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communément utilisé, est l’émission de bons du Trésor, l’emprunt obligataire2. Le


deuxième type de financement est le recours au crédit bancaire, formule nettement
moins sollicitée. Une forme de financement illusoire et même dangereuse est la
vente de concessions, d’actifs de l’Etat, de modernes privilèges, forts coûteux pour
l’Etat et rentables pour certains partenaires privés.

LES INTERMÉDIAIRES FINANCIERS

NAISSANCE : BESOIN OU NÉCESSITÉ ?

Dans un système économique, les échanges ont pour but de maximiser la


satisfaction des individus. Dans quelle mesure les intermédiaires financiers
contribuent-ils à cette satisfaction ?
Quand on considère le système le plus simple qui est celui du troc, on constate que
son efficience est limitée. Il y a souvent difficulté à trouver dans un tel système
une bonne équivalence entre offre et demande de deux individus quelconques.
L’utilisation du crédit en complément du troc permet des échanges non-
simultanés et accroît grandement l’efficience du système. La combinaison du troc
et du crédit donne d’excellents résultats tant que le degré de spécialisation de
l’économie reste faible.
La spécialisation de la production entraîne l'apparition de lieux d'échanges, c'est-
à-dire de marchés où un certain nombre d'individus "intermédiaires" jouent un
rôle spécialisé pour l'échange de chaque type de biens, rôle qui est inductif
d'efficience.
Il y a donc passage d'un système à efficience limitée vers des systèmes à efficience
plus élevée.

EFFICIENCE OPÉRATIONNELLE ET EFFICIENCE ALLOCATIVE,


RÉDUCTION DES PROBLÈMES D’ASYMÉTRIE INFORMATIONNELLE

Les intermédiaires financiers réduisent les nombreux problèmes d’asymétrie


informationnelle entre agents économiques en surplus et en déficit, tels ceux qui
surgissent par exemple ente un investisseur en surplus et une entreprise en déficit
qui souhaiterait réaliser un projet d’investissement. L’efficience avec laquelle les
fonds sont transférés des secteurs en surplus vers les secteurs en déficit influence le
potentiel de croissance d’une économie. Le secteur des intermédiaires financiers
joue à cet égard un rôle prépondérant.

2 Nous étudierons de manière plus détaillée cet aspect dans la partie du cours consacrée aux
obligations et aux marchés financiers.

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L'existence d'intermédiaires financiers se justifie globalement par le fait qu'ils


augmentent l'efficience d'un système économique de deux manières :
9 l'efficience opérationnelle : Il s’agit des économies réalisées dans les
ressources limitées des participants au système en ce qui concerne le temps et
les coûts, grâce à l'existence de techniques, de marchés et d'informations
appropriées. Il s'agit d'une mesure en termes absolus.
9 l'efficience allocative : Il s'agit d'une mesure, en termes relatifs, du degré
d'exploitation des gains potentiels effectivement réalisés par le système
d'échanges. L'efficience allocative est maximale quand il n'existe plus de
gains marginaux non exploités.

UN RÔLE ESSENTIEL DANS LE TRAITEMENT DES DÉSÉQUILIBRES


FINANCIERS

Si on reprend la définition d'un intermédiaire financier, on peut dire qu'il s'agit


d'un agent économique qui joue un rôle essentiel dans ces transferts de l'épargne,
dans le traitement des déséquilibres financiers.
9 des différences en volume entre les besoins des épargnants et des
désépargnants (p. ex. financement du tunnel sous la Manche);
9 des différences de localisation des offres et des demandes (p. ex. recyclage
des pétrodollars dans les pays sous-développés);
9 des différences entre les disponibilités et les besoins en devises des agents
économiques (p. ex. emprunts d'état finançant une balance commerciale
déficitaire);
9 des différences dans les échéances : ceux qui requièrent les fonds en ont
besoin pour une période qui ne concorde pas nécessairement avec celle pour
laquelle les bailleurs sont disposés à s'en priver (p. ex. financement de
constructions d'habitation par l'épargne des ménages).
A noter qu'un bon système d'épargne sera lui-même générateur d'épargne par le fait
même de l'attrait qu'il offre.
L'organisation de la collecte et la redistribution de fonds est la fonction de base
du système, qui doit assurer l'adéquation entre les volumes, les échéances et les
devises requis par les bailleurs et les utilisateurs de fonds géographiquement épars.
Parmi les demandeurs de fonds, on distingue entre :
9 ceux qui en ont besoin à titre permanent (dont la restitution mettrait en
danger l'objectif qu'ils financent : il s'agit de leur fournir des capitaux à
risque, restituables seulement au moment de la liquidation de l'entreprise à
laquelle ils sont affectés) ;
9 ceux qui en ont besoin à titre temporaire (il s'agit alors de leur fournir
toute la gamme des prêts allant des obligations à long terme aux simples
avances de caisse).

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DES FLUX MONETAIRES

L'apparition de la monnaie facilite les échanges et favorise la spécialisation. Elle


renforce ainsi l'efficience du système : il devient possible d'échanger un bien
particulier (harpons, colliers, pierres à trou, or, argent, cigarettes en temps de
guerre ...) ou signe conventionnel (pièce métallique frappée, papier imprimé)
quelconque accepté par les participants au système - la monnaie - contre les divers
éléments à échanger et il suffit de savoir combien de signes monétaires sont
nécessaires pour acheter la marchandise ou le service souhaités.

TROIS ROLES DE LA MONNAIE

9 Moyen de paiement : La monnaie est avant tout un moyen de paiement,


accepté en principe par tous les agents économiques de la zone monétaire.
9 Etalon de mesure : La monnaie, en tant qu'étalon de mesure (ou « unité de
compte ») relative des choses, permet de :
ƒ mesurer des coûts;
ƒ mesurer des revenus;
ƒ mesurer le pouvoir d'achat.
ƒ tenir une comptabilité;
ƒ évaluer un patrimoine;
9 Réservoir de valeur : La monnaie est également un réservoir de valeur et
devient un actif en soi. A ce titre, elle a un certain nombre de
caractéristiques :
ƒ coût de conservation peu élevé;
ƒ liquidité parfaite;
ƒ sécurité à l'égard des dettes exprimées en monnaie, c'est-à-dire un
pouvoir libératoire : si on doit 100 F et que l'on possède 100 F, on peut
à coup sûr libérer sa dette;
ƒ insécurité par rapport au pouvoir d'achat, notamment en période
d'inflation;
ƒ pas de rentabilité en soi.

LA MONNAIE FACILITE ET SECURISE L’EPARGNE

Elément important, la monnaie permet de différer dans le temps la satisfaction de


certains besoins dont on peut prévoir l'apparition à un certain moment ou dont on
préfère étaler l'assouvissement : cette postposition - ou épargne monétaire - est
donc un facteur d'optimisation des satisfactions.

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LES MONNAIES DOMINANTES – LES MONNAIES PARALLELES

Il arrive que diverses monnaies soient utilisées dans un espace économique. On


parle alors de monnaies parallèles. Lorsque diverses monnaies sont utilisées au
sein d’un espace économique, ou entre divers espaces économiques interconnectés,
il est usuel qu’une monnaie soit dominante, et serve de « monnaie des monnaies »,
c’est-à-dire de pivot par rapport auquel les autres sont mesurées et échangées. Au
cours du 20ème siècle, la Livre Sterling et l’or avant la 2ème guerre, le dollar U.S.
ensuite, ont joué ce rôle dans le commerce mondial et les marchés financiers.

LE SEIGNEURIAGE

Le fait de pouvoir émettre une monnaie représente la capacité à créer une valeur
d’échange.
De tout temps, les institutions émettant la monnaie ont compris l'avantage
économique que l'on peut en tirer. Un kilo d'or vaut un kilo d'or, mais si une
institution peut au départ d'un kilo d'or fabriquer 1.000 pièces, contenant chacune 1
gramme d'or et deux grammes de plomb, et dont la valeur monétaire est de 3
grammes d'or, cette institution a en terme économique pu gagner l'équivalent de 2
kilos d'or.
Au cours du moyen âge, l'institution qui pouvait faire cela était généralement liée au
Roi, au seigneur. C'est la raison pour laquelle les économistes l'on appelée, dans
diverses langues : le "Seigneuriage". Dès lors que le seigneur "noircit" ou "allège"
exagérément sa monnaie (c'est-à-dire y ajoute trop de plomb), la confiance dans la
valeur de cette monnaie diminue, les prix augmentent et l'inflation apparaît.
Quoiqu'en aient pensé certains économistes classiques, on s'est aperçu que le
problème n'est en fait pas tellement lié au contenu en or ou en argent de la
monnaie, mais à la quantité de monnaie par rapport aux besoins de l'économie.
Les problèmes de gestion optimale de masse monétaire et de l'impact de celle-ci sur
la stabilité des prix sont donc très anciens.
L'utilisation de papier comme support monétaire est une étape logique vers
l'abstraction monétaire. Malgré son apparition très ancienne (probablement le
10ème siècle en Chine), la monnaie papier ne s'est imposée que difficilement,
entre le 17ème et le 20ème siècle. Elle s'est imposée sous forme de billet de
banque, gérée par des banques (centrales ou pas), à une convergence entre
l'évolution de la monnaie "allégée" et l'évolution des instruments de crédit
développés par les banques depuis le moyen âge. La rigueur de gestion fut une
condition nécessaire du succès du billet de banque ; au départ au les effets
bancaires au porteur étaient émis en contrepartie de marchandise ou de stock
monétaire. Ce n'est que dans la mesure où les quantités émises restaient
"raisonnables" que la confiance dans le papier monnaie a pu s'établir et se
maintenir.
Chaque Etat souverain, souvent via sa Banque Centrale, bénéficie de seigneuriage.
Les Etats-Unis, émetteurs de la monnaie des monnaies mondiale, en tirent un

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seigneuriage considérable. Ce seigneuriage est un avantage au sens économique, qui


peut induire des comportements abusifs de la part de ceux qui en bénéficient.

MONNAIE, INTERMEDIATION FINANCIERE ET


INTERVENTION DES POUVOIRS PUBLICS

La monnaie, les moyens financiers véhiculés par les intermédiaires financiers ne


touchent pas seulement à l'intérêt privé des individus et des entreprises mais
également au bien général de la société, d'où l'intervention des pouvoirs publics
qui se manifeste dans des aspects aussi variés que la détermination de la quantité
de monnaie en circulation ou l'instauration de cadres institutionnels dans
lesquels le système doit fonctionner.
A leur tour, les caractéristiques du système monétaire et du cadre légal vont
conditionner l'efficience de l'économie. Les mécanismes d'intervention publique
dans le système, dont les intermédiaires financiers sont les instruments,
comprennent :
9 la régulation du stock monétaire (politique de taux d'intérêt, d'open market);
9 la gestion des réserves de change et l'encadrement des mouvements de
capitaux;
9 la génération du cadre de fonctionnement capable d'assurer une protection
adéquate des parties aux opérations financières, notamment celles qui sont
les plus faibles (législation sur la protection de l'épargne, la protection des
débiteurs dans les ventes à tempérament, l'organisation des marchés
financiers, par exemple).
Le degré d'intervention publique a connu des fluctuations dans le temps.
Ainsi, la crise financière des années 30 a provoqué une vague mondiale de
régulations nationales, entraînant souvent la spécialisation obligatoire de certains
types d'intermédiaires financiers. Depuis les années 60, en raison de distorsions et
d'inefficacités induites par ces règlements, il s'est manifesté une tendance inverse à
l'assouplissement réglementaire, avec une certaine tendance à la déspécialisation
(banalisation) des intermédiaires. Pratiquées à des rythmes différents selon les pays
et les tendances de leurs gouvernants, ces dérégulations se heurtent ces derniers
temps à la nécessité de réaliser diverses harmonisations internationales en même
temps que d'aucuns estiment qu'elles sont allées trop loin dans le démantèlement de
garde-fous indispensables - d'où une tendance actuelle à une certaine "re-
régulation", parallèle à la dérégulation qui se poursuit de manière sélective.

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LES TAUX D’INTERET∗

Depuis que la monnaie existe, elle sert entre autres à calculer la rémunération des
délais de paiement et des prêts. Diverses formes de participations aux bénéfices de
l’emprunteur existent, mais la forme qui s’est imposée pour rémunérer le prêt d’un
montant connu pour une durée connue, est le taux d’intérêt en principe fixé au
départ.
Chez les Grecs et les Romains, les taux d’intérêt semblent avoir été exprimés au
début en unités monétaires : une drachme par mine (de cent drachmes) par mois,
une once par livre, etc.… Notons que un centième par mois représente environ
12 % par an, et semble avoir été un maximum légal fréquemment appliqué. Il
semblerait qu’à la fin de l’Empire, le pourcentage était généralisé.
L’antiquité connaît donc l’intérêt, et distingue l’intérêt normal de l’usure. La
morale chrétienne a interdit très longtemps le prêt à intérêt, en s’appuyant sur une
interprétation arbitraire de l’Evangile. L’Islam aussi a été – et est toujours – hostile
au prêt à intérêt, mais il est favorable depuis plus longtemps au profit marchand,
qui était lui aussi mal vu dans la morale chrétienne ancienne, jusqu’au 13ème-14ème
siècle. Depuis le 16ème siècle et surtout le 17ème et les succès économiques des pays
protestants, le profit marchand et le prêt à intérêt se sont banalisés dans la
chrétienté. La notion d’usure a cependant toujours été présente, pour combattre
les taux d’intérêt excessifs.
Le taux d’intérêt, sauf mention différente, est exprimé sur base annuelle, un prêt
de 100 à 6 % durant 3 mois rapporte 1,5.
Sauf mention contraire, l’intérêt est payé à la fin de la période ; si la période est de
plus d’un an, il est payé en principe au moins une fois l’an.
Variantes :
9 l’intérêt peut être payé anticipativement.
9 l’intérêt peut être payé avec une périodicité plus courte, mensuellement, etc.
Cela aussi en accroît le coût réel.
9 l’intérêt peut être capitalisé sur une période différente du paiement. Un
intérêt capitalisé mensuellement et payé annuellement (ce qui signifie que
tous les mois, l’intérêt échu est calculé et ajouté au capital sur lequel est
calculé l’intérêt du mois suivant) à un coût réel équivalent à un intérêt payé
mensuellement. Un intérêt capitalisé annuellement et payé après cinq ans a
un coût réel équivalent à un intérêt payé annuellement pendant cinq ans.
D’autres subtilités et variantes sur les taux d’intérêt apparaîtront au fil de la matière.
Notons qu’on parle aussi de taux nominal et de taux réel en économie pour
intégrer la perte de pouvoir d’achat due à l’inflation (voir ci-dessous)

∗ voir aussi lectures : Bessis chapitre 7 et T.P.

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Le rendement d’un investissement financier peut être différent de son taux


d’intérêt, si son prix est différent de sa valeur nominale. Un instrument d’une
valeur nominale de 100, porteur d’un intérêt de 6 %, aura un rendement
approximatif de 7 %, s’il peut être acheté à 99, et à une durée de 1 an. Les termes
de rendement et de taux d’intérêt sont parfois utilisés indifféremment, ce qui est
peut être ambigu.

LES COMPOSANTES DU TAUX D’INTERET

Le prêt vient d’une épargne. Celui qui épargne renonce à une consommation
immédiate afin de s’assurer une consommation future. La rémunération du prêt est
le taux d’intérêt, qui se compose de diverses parties :
9 une partie destinée à rémunérer le risque de crédit, ou risque de déconfiture
de l’emprunteur. Elle s’appelle marge (en anglais « spread ») par rapport au
taux d’un prêt sans risque, par exemple à l’Etat, pour une durée identique.
Ce taux sans risque est appelé référence ou « benchmark ».
9 une partie destinée à couvrir l’inflation attendue, qui représentera une perte
de pouvoir d’achat
9 une partie destinée à couvrir le risque de fluctuation de l’inflation ou des taux
d’intérêt en général, que l’on peut appeler prime de risque, et qui croît avec
le temps.
9 le taux net de cette anticipation est le taux réel.
L’inflation attendue ou anticipée se mesure difficilement, mais l’inflation présente
en est souvent une bonne approximation. Sur plusieurs siècles, le taux réel sans
risque en Europe est de l’ordre de 2,5 à 3,5 %.
Les économistes utilisent aussi un concept de taux d’actualisation social, afin de
mesurer la valeur présente ou valeur actuelle de bénéfices futurs pour la société.
Ceci, dans le cadre par exemple d’investissements publics. Le taux d’actualisation
social se calcule sur base du taux de marché. On peut en déduire une partie
représentant les bénéfices sociaux (ou « externalités ») que produisent les
investissements pour la société dans son ensemble, entre autre via l’effet
multiplicateur. On en déduit aussi une partie représentant le risque de spoliation
(par confiscation, défaut de paiement de l’Etat, hyperinflation) que peut ressentir
un individu, mais pas la société dans son ensemble. La fiscalité introduit aussi une
distorsion des taux de marché, qu’il convient de corriger.
On peut aussi déduire une partie qui représente pour les individus le risque de mort
prématurée, à nouveau inexistant pour la société. Cette partie peut être faible si les
individus attribuent au fait de laisser un héritage à leurs enfants une valeur
équivalente à leur propre consommation.
Le résultat net est appelé le taux d’actualisation sociale, c’est un taux d’intérêt qui
peut être inférieur, voire très inférieur au taux d’intérêt de marché.
Cette notion de taux d’actualisation social permet de justifier en termes
économiques mesurables des investissements publics ayant un rendement faible
pour le secteur privé, ainsi que des subsides en intérêt donnés par les pouvoirs

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publics au secteur privé pour l’aider à financer ses investissements. Nous y


reviendrons.
La monnaie et le taux d’intérêt sont les unités normatives de base des transactions
financières. Ils n’ont pas de réalité absolue, mais l’étude des opérations financières
doit permettre d’en conceptualiser l’essence ; la pratique permet, à condition d’une
certaine maîtrise conceptuelle, de découvrir une partie importante de leurs nuances,
dont la quantité est infinie.

LA COURBE DES TAUX D’INTERETS

Les taux d’intérêts sont différents selon la durée. Le diagramme des taux par des
échéances allant de 1 jour à une période longue (allant jusqu’à 10 ou 30 ans)
s’appelle la courbe des taux d’intérêts (« yield curve »).

3 FORMES D’INTERMEDIAIRES FINANCIERS ET LES


REGULATEURS DE LA PUISSANCE PUBLIQUE

LES INTERMEDIAIRES FINANCIERS STRICTO SENSU

Ce sont ceux qui s'interposent d'une manière effective et durable entre les
bailleurs et les utilisateurs de fonds : par exemple une banque de dépôt qui reçoit le
dépôt d'un épargnant et affecte les fonds à un crédit industriel; le déposant n'a de
relations qu'avec la banque et non avec l'industriel - c'est le banquier qui court le
risque de l'industriel ; ces intermédiaires canalisent les flux d’épargne à travers leur
bilan ; nous les appellerons aussi les intermédiaires institutionnels.

LES INTERMEDIAIRES FINANCIERS LATO SENSU

Ils englobent également les banques d'affaires, et courtiers. Les intermédiaires lato
sensu interviennent d'une manière temporaire et transactionnelle, par exemple
une société de bourse qui procure des actions d'une entreprise à un investisseur;
une fois la transaction achevée, l'intermédiaire ne joue plus de rôle, l'investisseur
exerçant ses droits à l'encontre de l'entreprise ; ces intermédiaires facilitent le
fonctionnement des marchés, nous les appellerons aussi intermédiaires de
marché.

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LES INTERMEDIAIRES FINANCIERS "AUTRES"

Ils offrent des possibilités de transformation d'actifs, à des fins telles que la
collecte de fonds d'épargne (les organismes de placement collectif en valeurs
mobilières, OPCVM), la gestion des retraites (Fonds de Pension), la titrisation
(Spécial Purpose Company, Société d'Investissement en Créances,…). Il s’agit
d’ « entreprises incomplètes », ayant la personnalité juridique, mais dont l’activité
est très circonscrite, et généralement gérée par un tiers.
Ces derniers temps, les règlements introduits par les autorités de même que la
créativité des intermédiaires ont suscité un accroissement de l’utilisation de
mécanismes destinés à gérer des flux financiers hors du bilan des intermédiaires
financiers, mais dans des cadres délimités. En particulier, la nécessité de renforcer
par des fonds propres la couverture des risques croissants assumés par les
intermédiaires pousse à cette "désintermédiation".
On mentionnera aussi les intervenants régulateurs de la puissance publique :

LES REGULATEURS MONETAIRES OU ECONOMIQUES

Par le truchement d'organes gouvernementaux ou d'organismes plus strictement


monétaires (BNB, BCE, ...)3, ils manient les instruments d'accélération ou de
freinage de création monétaire (freinage par la hausse des taux d'intérêts, le
contingentement des crédits, l'assèchement des liquidités dans le marché, ...;
accélération par l'assouplissement de la politique de taux et d'encadrement des
crédits, la possibilité de faire des amortissements accélérés, les subventions en
intérêt et en capital, ...).
D’autres régulateurs sont responsables du bon fonctionnement des marchés,
doivent entre autres s’assurer que la concurrence est suffisante. La concurrence
peut peser sur la rentabilité, et n’a pas toujours été encouragée dans le secteur,
surtout par les autorités prudentielles, qui veulent éviter les risques de faillites dans
le système financier, que la concurrence peut accroître.

LES REGULATEURS PRUDENTIELS

Ils assurent le bon fonctionnement et la sécurité des circuits financiers (règlements


et contrôles prudentiels par la Commission Bancaire et Financière, la Commission
de la Bourse, l'Office de Contrôle des Assurances, la Banque Nationale dans
certaines de ses attributions : à l'étranger, les banques centrales jouent souvent dans
ce domaine un rôle plus marqué qu'en Belgique).

3 B.N.B. : Banque Nationale de Belgique; BCE , Banque Centrale Européenne.

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LES MARCHES FINANCIERS

L’efficience avec laquelle les fonds sont transférés des secteurs en surplus vers les
secteurs en déficit influence le potentiel de croissance d’une économie. Le rôle des
intermédiaires de marché est important et croissant, y compris pour les
intermédiaires institutionnels.
Nous en présentons dès le début du cours les instruments de base.

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CHAPITRE 2.

MARCHES FINANCIERS

OBLIGATIONS

DEFINITION ET INTRODUCTION

Une obligation est un titre de créance, négociable ou non, que le porteur de


l’obligation détient sur l’emprunteur et qui oblige ce dernier, qu’on appelle
émetteur, à payer un intérêt et à rembourser le capital selon certaines modalités
précisées contractuellement.
Les informations figurant nécessairement sur l’obligation sont : l’identité de
l’émetteur (débiteur), la déclaration de l’émetteur disant qu’il doit une certaine
somme au porteur de ce titre, la valeur nominale de l’obligation, la durée de
l’emprunt, l’année d’émission, le taux d’intérêt nominal, la date de remboursement
(s’il y en a une), la date de paiement du coupon (s’il y en a un), le numéro de
l’obligation, le montant total de l’emprunt obligataire. Doivent également figurer
dans le contrat toutes les modalités particulières prévues.
Les obligations peuvent être émises au pair, au-dessus ou au-dessous du pair.
Lorsqu’une obligation est émise au pair, le souscripteur paie 100% de la valeur
nominale4. Lorsqu’une obligation est émise au-dessus du pair, le souscripteur paie
un montant plus élevé que la valeur nominale. Lorsqu’une obligation est émise au-
dessous du pair, le souscripteur paie un montant moins élevé que la valeur
nominale. La cotation des obligations s’exprime en pourcentages de la valeur
nominale5. Le prix auquel un investisseur pourra acheter ou vendre une obligation
sera égal à cette dernière valeur.
Les principaux éléments qui caractérisent une obligation, sur lesquels un
investisseur fondera son choix et qui lui permettront de calculer le rendement de
son obligation, sont les suivants :
9 l’identité, la qualité et la solvabilité de l’émetteur de l’obligation
9 le prix d’émission ou, sur le marché secondaire, le cours de bourse
9 le taux d’intérêt

4 Ainsi, par exemple, si une obligation a une valeur nominale de 1000€ et son prix d’émission
est de 95%, le souscripteur ne paiera que 950€.
5 Nous vous invitons à consulter la cotation des obligations dans un quotidien économique.

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9 le mode d’amortissement
9 la durée de vie ou échéance.
D’autres informations, tels la devise, le taux de rendement ou encore la duration
sont tout aussi importantes.

IDENTITE, QUALITE ET SOLVABILITE DE L’EMETTEUR

IDENTITE

On distingue traditionnellement divers types d’obligations selon l’identité de


l’émetteur :

• LES POUVOIRS PUBLICS

On y retrouve les Etats, les pouvoirs locaux (régionaux, provinciaux, communaux),


les institutions internationales, comme l’Union Européenne, la Banque mondiale, la
BEI, …
Ces émetteurs bénéficient généralement d’une bonne réputation en termes de
solvabilité. Ils représentent généralement le concept d’emprunteur sans risque, et le
rendement de leur papier est assimilé au taux d’intérêt sans risque.

• LES ENTREPRISES : OBLIGATIONS CORPORATE

Cette deuxième catégorie reprend les emprunteurs du secteur privé.

• LES EMPRUNTEURS DE PAYS EMERGENTS

On met dans cette catégorie les émetteurs de pays situés en dehors du groupe dit
OCDE, qui présentent des risques de défaut de paiement élevés6, mais offrent des
rendements élevés aussi.

QUALITE ET SOLVABILITE

La qualité et la solvabilité des émetteurs est une caractéristique fondamentale d’une


obligation, étant donné qu’elles conditionnent le risque de défaut de paiement
d’une obligation. Le rating7 qui est attribué à une émission obligataire est un
indicateur qui mesure la qualité et la solvabilité de l’émetteur. Les ratings les plus
connus sont ceux des firmes américaines Moody’s et Standard&Poor’s.
Les obligations classées AAA, AA, et même A ne poseront en principe aucun
problème de remboursement, alors que les obligations classées C et D présentent
un niveau élevé de risque.

6 Voir par exemple l’exemple recent du cas de l’Argentine.


7 Lectures : Bessis, Risk Management in Banking, chapters 7&8.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Ces ratings peuvent bien sûr évoluer et l’émetteur peut ainsi se voir « upgrader » ou
« downgrader » par une agence de rating.

VALEUR NOMINALE, TAUX D’INTERET DE L’OBLIGATION ET COUTS

La valeur nominale et l e taux d’intérêt déterminent la valeur du coupon.


En matière de taux d'intérêt, on s'est montré inventif. Plusieurs formules existent :

INTERETS FIXES

Par exemple 6 % annuels sur 8 ans.

INTERETS « CHARNIERE » :

Par exemple 5 % pendant 4 ans, et ensuite 5,5 % après 4 ans (ceci si on estime lors
de l'émission que le public s'attend à une hausse des taux à long terme); ou encore 5
% pendant 4 ans, et ensuite 4,5 % pendant les 4 années suivantes (ceci si on estime
que le public s'attend à une baisse des taux à long terme).
Pour ces deux formules, le taux est déterminé au moment de l’émission.

TAUX VARIABLES ET SOUMIS A REVISION :

On distingue les « floating rate notes » (FRN) et les « variable rate notes ». (VRN)
Dans le cas des FRN, l’intérêt est payé tous les x mois et révisé en fonction de
l’évolution d’un taux de référence (par exemple, LIBOR ou EURIBOR, taux des
émissions de certificats de trésorerie, ...). Le taux d’intérêt de l’obligation est égal à
ce taux de référence auquel s’ajoute un spread de x points de base qui reste
identique durant toute la période. Dans le cas des VRN, à la fois le taux et le spread
sont variables.
De même que les taux peuvent varier, l'époque de paiement des intérêts peut varier
d’une obligation à l’autre. Typiquement, on distingue : intérêts annuels, semestriels
et intérêts capitalisés à l'échéance ("zero bonds").

COUT POUR L’EMETTEUR

Remarquons par ailleurs que le coût pour l’émetteur est triple :

• CHARGES FINANCIERES

Il s’agit du coût résultant des charges financières en faveur du porteur (intérêts et


primes éventuelles à l'émission ou au remboursement)et qui constitue la majeure
partie du coût de financement (voir supra) ;

• COMMISSIONS

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Il s’agit des commissions payées aux intermédiaires (commissions de lancement,


frais du service ultérieur de l'emprunt - c'est-à-dire les commissions sur le paiement
des coupons, du remboursement en principal), ainsi que, le cas échéant, les taxes si
l'émetteur les prend en charge.

• FRAIS ACCESSOIRES

Impression des titres, publicité donnée à l'opération (affiches, tracts, insertion dans
la presse, prospectus, voyages, etc)

LE MODE D’AMORTISSEMENT

Le mode d’amortissement d’une obligation, de même que son taux d’intérêt et sa


valeur nominale, est une donnée fondamentale pour l’investisseur, car elle lui
permettra de mieux percevoir la séquence des cash flows et de calculer le
rendement de son obligation.
De nombreuses modalités de remboursement existent sur le marché . Toutefois,
on peut distinguer8 classiquement :

LES OBLIGATIONS AVEC REMBOURSEMENT INTEGRAL A L’ECHEANCE (« BALLOON


REPAYMENT »)

L’investisseur perçoit régulièrement son coupon et se voit rembourser à


l’échéance le capital. Presque toutes les obligations ont une durée de vie comprise
entre 1 et 30 ans, bien que ces dernières années, certaines obligations
perpétuelles soient parfois émises.

LES OBLIGATIONS A COUPON NUL OU « ZERO BOND »

Aucun coupon n’est payé entre la souscription et l’échéance. A l’échéance,


l’investisseur récupère sa mise de départ plus les intérêts capitalisés tout au long
de la durée de l’emprunt.

LES OBLIGATIONS A REMBOURSEMENT ANTICIPE

Ce sont des obligations pour lesquelles le débiteur se réserve le droit de


rembourser avant l’échéance. Cette clause s’avère très pratique pour le débiteur
lorsque les taux d’intérêt baissent et qu’il a la possibilité de réemprunter à un coût
plus faible. L’investisseur doit en tenir compte dans le calcul de son rendement.

8 Cette énumération ne se veut pas exhaustive.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES OBLIGATIONS A REMBOURSEMENT INTERMEDIAIRE

• REMBOURSEMENT PAR TIRAGE

Le remboursement de la somme empruntée respecte un plan d’amortissement.


Chaque année, le débiteur rembourse une certaine somme. Un tirage au sort
désigne les numéros des obligations qui seront remboursées cette année-là.
Pour que le débiteur puisse satisfaire à des obligations de remboursement
intermédiaire, il est aussi possible de constituer un fond d’amortissement
(« sinking fund » ou « purchase fund ») auquel le débiteur doit affecter une part de
ses revenus. Ce fond servira à assurer le remboursement du capital. Ce
remboursement s’effectue alors par rachat :

• RACHAT

Cette technique permet au débiteur de racheter les obligations en Bourse. Dans le


cas d’un purchase fund, il y est obligé si le cours de l’obligation est tombé au-
dessous du pair (parce que les taux d’intérêt ont monté, ou que le risque crédit de
l’emprunteur s’est détérioré), mais n’a pas l’obligation de le faire si le cours est au-
dessus du pair. Dans le cas d’un sinking fund, il doit dans ce dernier cas
rembourser sur tirage.

• LES OBLIGATIONS AVEC OPTION PUT


Lorsque c’est le porteur qui peut demander le remboursement anticipé, on dit que
l’obligation comporte un put. Il pourra se faire rembourser son obligation.

LE CHOIX DE LA DEVISE

Les taux d’intérêts sont différents dans chaque devise. Ils dépendent des
caractéristiques sociales, économiques, monétaires, de la zone monétaire en
question.

LES MARCHES DES OBLIGATIONS

Le marché primaire porte sur les nouvelles émissions alors que le marché
secondaire porte sur les obligations émises précédemment.
Sur un marché national, on retrouve des obligations émises dans la monnaie du
pays de l’emprunteur. Le marché international porte sur les obligations étrangères
et sur les euro-obligations. Une obligation dite étrangère est émise par un
emprunteur étranger dans au pays où est émis l’emprunt. Une euro-obligation peut
être émise dans une monnaie qui n’est pas celle de l’emprunteur et dans plusieurs
pays simultanément ; elle est émise hors de toute juridiction spécifique.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

RENDEMENT

Le rendement de l’investissement dans une obligation ne doit pas être confondu


avec le coupon (ou taux d’intérêt nominal de l’obligation lorsque le rendement est
exprimé en pourcentages), qui, lui, généralement reste fixe. Le rendement d’une
obligation peut être inférieur ou supérieur au taux d’intérêt facial de l’obligation, en
fonction du cours de l’obligation.
L’évolution des taux d’intérêt a une influence sur la valeur d’une obligation. La
relation entre le prix (ou cours) d’une obligation et les taux d’intérêt est
négative. Dans une période baisse des taux d’intérêt, les cours des obligations
montent. Ils baissent si les taux d’intérêt sont en hausse. Et l’anticipation des agents
économiques sur l’évolution des taux d’intérêt se reflète dans les cours des
obligations.
Les calculs de rendement peuvent s'effectuer de deux manières :
9 un taux de rendement courant ou immédiat
9 un taux de rendement actuariel

TAUX DE RENDEMENT COURANT

C'est un rendement (incomplet) qui est calculé en divisant le montant total des
intérêts versés annuellement (coupon) par le cours de l’obligation. Il s’agit là d’un
rendement brut. Pour calculer le rendement net en Belgique, il faut soustraire le
précompte mobilier de 15% sur le coupon.

TAUX DE RENDEMENT ACTUARIEL

C'est le taux de rendement pour les souscripteurs ou pour les acheteurs en bourse
calculé à partir de tous les éléments caractéristiques de l'emprunt représenté par
l'obligation.
Parmi les caractéristiques nécessaires au calcul9 de ce rendement, citons :
9 le prix d'émission (à l'origine) ou le cours (en cours de vie de l'emprunt)
9 le taux d'intérêt nominal (fixe ou variable) et la périodicité de son paiement
9 le prix de remboursement
9 les modalités d'amortissement et la durée de vie
Le taux de rendement actuariel correspond au taux d'actualisation vérifiant l'égalité
entre montant investi et somme actualisée des montants que recevront les
acquéreurs de l'obligation, sous quelque forme que ce soit (intérêts,
remboursements en capital,...). Il s'exprime le plus souvent en un pourcentage
annualisé.

9 Nous vous renvoyons aux séances d’exercice pour des exemples de calcul de rendement.

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Le taux actuariel est exprimé en fonction de la durée finale ou moyenne (au cas où
il y a des remboursements partiels avant terme).

FORMES PARTICULIERES D’OBLIGATIONS

OBLIGATIONS AVEC PARTICIPATION AU BENEFICE

Le porteur a droit, d’une part, à un intérêt fixe, et d’autre part, à une partie des
bénéfices, et en cas de liquidation, à une partie des réserves. Comme le porteur a
droit à un bonus sous forme de bénéfices, le taux d’intérêt fixe est généralement
inférieur à celui d’une obligation ordinaire.

OBLIGATION INDEXEE

L’intérêt et/ou le principal sont liés à un indice représentatif par exemple de


l’évolution du pouvoir d’achat. Le taux d’intérêt nominal est révisé quand l’indice
de référence varie. Cette indexation peut être calculée sur l’or (emprunt Pinay,
emprunt Giscard), sur un panier de monnaies, sur l’indice des prix de détail, etc.

OBLIGATION ZERO COUPON

Les obligations « zero-bond » ne paient aucun coupon mais les intérêts sont
capitalisés jusqu’à l’échéance, le capital de départ et les intérêts étant versés à
échéance.

OBLIGATION CONVERTIBLE

Les obligations convertibles sont émises par des entreprises. Tout au long de la
période de conversion, qui est limitée, cette obligation peut (mais ne doit pas) être
convertie en une action de cette entreprise. Les obligations convertibles sont
généralement moins rémunératrices que les obligations ordinaires.
Les conditions de conversion sont fixées au moment de l’émission et le
souscripteur doit y être très attentif. On appelle prix de conversion le prix à payer
pour les actions et on appelle prime de conversion la différence entre le prix de
conversion et le cours de l’action. Cette prime est presque toujours positive lors de
l’émission, signifiant qu’il faut que le cours de l’action sous-jacente doit monter
pour que la conversion devienne intéressante.

« OBLIGATION CONVERTIBLE INVERSE »

L’émetteur a le choix entre rembourser le porteur en argent ou en actions (définies


au moment de l’émission). Il s’agit généralement de titre à court terme avec un
rendement élevé, qui ne sont pas de vraies obligations, et représente plutôt une

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

forme de put sur actions. Ce type d’instrument induit en erreur les épargnants, et
est en fait proche de l’escroquerie.

OBLIGATION AVEC WARRANT

L’obligation avec warrant possède en réalité deux instruments financiers :


l’obligation et le warrant. Ce dernier donne le droit d’acquérir l’action sous-jacente
à n prix convenu. L’obligation est un titre ordinaire de créance, généralement avec
un faible coupon.
Il y a dès l’émission une double cotation de l’obligation : on distingue le cours
d’une obligation ex-warrant (après détachement du warrant) et celui d’une
obligation cum-warrant (avant détachement du warrant). La différence entre
l’obligation convertible et l’obligation avec warrant est que cette dernière continue à
exister après conversion du warrant en action. Il y a aussi cotation du warrant.
L’avantage de l’obligation avec warrant et de l’obligation convertible est qu’elles
offrent au porteur les avantages d’un rendement fixe avec ceux d’une possible
augmentation du cours de l’action.

OBLIGATION A DOUBLE DEVISE OU « DUAL CURRENCY »

L’emprunteur a le droit de rembourser le porteur dans l’une ou l’autre monnaie de


son choix, à un cours de change convenu au moment de l’émission. Le calcul du
rendement de l’obligation pour le porteur devient difficile car ce dernier ne sait pas
comment le cours de change va évoluer. La contrepartie de ce risque élevé est un
coupon élevé. Il existe d’autres modalités telles que coupon et principal payables
dans des devises différentes, etc.…

OBLIGATION GOUVERNEMENTALE

Il s’agit d’emprunts qui sont garantis par le gouvernement. On y retrouve les Fonds
d’Etat ainsi que les instruments de dettes d’autres organismes publics tels que les
provinces, les communes, la SNCB, etc.

OBLIGATION LINEAIRE (OLO)

Les « Obligations Linéaires – Lineaire Obligaties » forment une catégorie des Fonds
d’Etat. Ces titres sont émis régulièrement, avec le même taux d’intérêt nominal et la
même échéance, mais à un prix de souscription différent qui varie en fonction de
l’évolution des taux d’intérêt.
Ce sont presque uniquement les investisseurs institutionnels qui peuvent souscrire
des OLO. Les OLO ne sont pas matérialisées. Elles n’existent que sous la forme
dématérialisée dans un registre tenu par la Banque Nationale de Belgique.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

FISCALITE

La fiscalité joue un rôle déterminant dans le rendement des obligations et donc


dans leur appréciation par le marché et leur diffusion.
L'introduction en Belgique, en 1962, du précompte mobilier pour des titres
largement diffusés de manière anonyme dans le public, a obligé l'Etat à émettre ses
nouveaux emprunts à des taux faciaux plus élevés pour que le souscripteur privé
(personne physique) accepte de souscrire ces titres, notamment en regard des autres
possibilités de placements sur le marché international dont les conditions n'avaient
pas varié. Du fait de ces taux faciaux supérieurs, les établissements financiers
(sociétés chez qui le précompte était imputable sur l’impôt à payer) jouissaient d'un
rendement structurellement supérieur, ce qui représente une rente.
La persistance du précompte, l'élévation de son taux au fil du temps (15 % en 1962,
puis 20 % en 1966 et enfin 25 % en 198310) et l'internationalisation croissante des
instruments financiers a provoqué une érosion constante de l'affection du grand
public pour les fonds d'état belges. La part essentielle de ceux-ci s'est trouvée dès
lors logée auprès des intermédiaires financiers, soit par structure obligatoire
(compagnies d'assurance, p. ex.), soit en raison d'une pénurie d'opérations
alternatives (baisse de la demande des crédits du secteur privé à la fin des années 70
et au début des années 80).
Avec l'apparition des SICAV, après la tentative avortée (proposition Scrivener)
d'instaurer en 1989 un précompte mobilier harmonisé dans l'Union Européenne (il
fallait un vote unanime en la matière), et au vu de l'abrogation par l'Allemagne,
cette même année 1989, du précompte de 10 % introduit à peine quelques mois
plus tôt dans ce pays, la Belgique a, au début de 1990, pris le parti de réduire de 25
% à 10 %11 le précompte sur intérêts de créances (donc en ce compris les fonds
d'Etat).
Par cette réduction, ainsi que par la facilitation de la récupération du précompte par
les non-résidents, et compte tenu d'un rendement réel élevé - le taux d'intérêt étant
largement supérieur à celui de l'inflation - le Ministre des Finances visait à retrouver
auprès de son ancien public belge et d'un nouveau public étranger une base plus
large de souscription à ses emprunts. Il comptait de ce fait sur une baisse,
bénéfique à long terme, de ses taux d'intérêts, compensant la réduction de recettes
fiscales à court terme due à la baisse du précompte lui-même.
Depuis 1999, la totalité des instruments financiers traités dans la zone Euro, et
donc en Belgique, l'est uniquement en Euro. Les rendements se sont donc
harmonisés.

10 Mais avec en contrepartie l'abrogation, dans le chef des personnes physiques, de la


globalisation des revenus mobiliers et des revenus professionnels en rendant le précompte
libératoire - partiellement d'abord et totalement ensuite.
11 Reporté à 13,39 % dans le Plan Global du gouvernement De Haene en 1994, puis à 15 %
début 1996.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Traditionnellement, les emprunts d'Etat allemands (appelés "Bunds") se traitent


avec le rendement le plus faible, les emprunts d'Etat belges de type OLO donnant
un rendement de quelques centimes de pour-cent (le centime de pour-cent est
appelé point de base) supérieur. La fiscalité est largement harmonisée dans l'Union
Européenne pour les institutionnels (ce qui a permis cette convergence des
rendements) alors que la fiscalité de l'épargne des particuliers, malgré des progrès
dans l'intention d'harmonisation au début 2001, reste fort disparate.

ACTIONS

DEFINITION ET INTRODUCTION

Les actions12 sont des titres négociables attribués aux souscripteurs du capital
d’une société en contrepartie de leur apport, conférant aux actionnaires une série
de droits, tels le droit de vote en assemblée générale, le droit à la répartition des
bénéfices et le droit au partage de l’avoir social.
Les actions peuvent être au porteur, nominatives ou dématérialisées.
On compte également des catégories particulières d’actions. Notons à titre
d’exemple les actions privilégiées, les actions de jouissance ou encore les actions
sans droit de vote.
L’actionnaire court un plus grand risque que les tiers à l’entreprise. Il met son
capital à la disposition de l’entreprise pour qu’elle finance ses activités. Si cette
dernière tombe en faillite, l’actionnaire ne sera remboursé qu’en dernier lieu, après
que l’entreprise a désintéressé tous ses autres créanciers.

EMISSION D’ACTIONS

Des nouvelles actions peuvent être émises lors de la constitution d’une nouvelle
société, lors de l’introduction en bourse d’une société anciennement constituée, ou
encore en cours de route, lorsqu’une société souhaite renforcer ses fonds propres
(elle procède alors à une augmentation de capital).
Une émission publique d’actions nécessite la rédaction d’un prospectus dans
lequel la société présente certaines informations légalement requises. Il appartient
ensuite à la Commission Bancaire et Financière d’accepter ou non cette émission
d’actions et d’approuver le prospectus. Dans le cas d’une augmentation de capital,
le prospectus doit nécessairement mentionner les éléments suivants : le montant
de l’augmentation de capital, le prix d’émission, les dates de souscription et de
paiement, un bilan et un compte de résultats et une prévision de l’évolution des
bénéfices.

12 Nous vous renvoyons au cours de droit commercial.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

DIVIDENDE

Chaque année, un dividende peut être versé à l’actionnaire. Ce dividende est soit
distribué à partir des bénéfices réellement réalisés durant l’année écoulée, soit
puisé à partir des réserves. Ce dividende est généralement versé en argent, mais il
se peut que l’actionnaire puisse choisir entre un paiement du dividende en argent
ou alors un paiement du dividende sous forme de nouvelles actions. Il se peut
également que l’entreprise ne verse aucun dividende. Tel est souvent le cas par
exemple pour des entreprises jeunes à caractère technologique, ayant des
perspectives de développement importantes.

EVALUATION DES ACTIONS13

Le Dividend Discount Model (DDM) et le Free Cash Flow Model (FCFM) sont
deux modèles qui permettent d’évaluer la valeur d’une entreprise et celle de ses
actions.
Bien que ces modèles soient largement utilisés, force est de constater qu’il est très
difficile , même pour des entreprises caractérisées par la stabilité de leurs activités
et par une croissance stable de leur dividende, de prévoir l’évolution de l’activité, du
chiffre d’affaires, des bénéfices, etc. Cet exercice est encore plus difficile pour les
entreprises qu’on qualifie « high growth ».
En ce qui concerne l’approche par cash-flows, il ne faut pas perdre de vue le
traitement des amortissements par l’entreprise, en particulier les variations brusques
d’amortissement, suite à une variation des investissements, un événement
particulier, ou encore un changement dans la comptabilisation de ces derniers.
Le rendement est le rapport entre le dividende et le cours de l’action. Si le cours
baisse et pas le dividende, le rendement augmente. En principe, le rendement des
actions est inférieur à celui des titres à revenus fixes. Ce désavantage est compensé
par la possibilité de gains en capital dans l’investissement en actions. Il ne faut donc
pas confondre rendement et return, qui inclut en plus du dividende, le gain (ou la
perte) en capital.
Le Price-Earnings Ratio (P/E) ou rapport cours/bénéfices est le rapport entre le
cours de l’action et le bénéfice net par action. Dans le bénéfice, on ne tient
généralement pas compte des éléments exceptionnels (charges et produits). Le P/E
indique combien de fois le marché valorise les bénéfices d’une société et encore à
combien il anticipe la valeur actuelle de la croissance. Plus le P/E est faible, plus
l’action est intéressante. Encore faut-il comparer cet indicateur avec le P/E de
l’ensemble du secteur de l’entreprise et avec celui de la Bourse du pays dans lequel
price price price
on investit. Les valorisations par ou ou procèdent de la
Ebit Ebitda cash− flow
même logique, mais accroissent les risques de désinformation.

13 Nous vous renvoyons au cours de théorie financière.

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LA VALEUR COMPTABLE ET LA VALEUR INTRINSEQUE

La valeur comptable d’une action est égal au rapport entre les fonds propres
d’une entreprise et le nombre d’actions. La valeur intrinsèque d’une action est la
valeur réelle estimée de l’action dans l’hypothèse où l’entreprise réaliserait tous ses
actifs. Bien que le calcul de la valeur intrinsèque soit difficile, il peut s’avérer très
utile lorsqu’il s’agit groupes qui possèdent plusieurs participations faciles à évaluer.
La valeur intrinsèque permet à l’actionnaire de calculer l’argent qu’il toucherait
après liquidation.

RATIOS FINANCIERS14

Il s’agit essentiellement des ratios de liquidité, de solvabilité et de rentabilité. Ces


ratios donnent de précieuses indications sur la situation de l’entreprise. Il faut
idéalement les comparer par rapport aux ratios des années précédentes et à ceux
des entreprises appartenant à un même secteur d’activité.

PRODUITS DERIVES

Il s’agit de contrats dans lesquels le porteur a soit l’obligation, soit le droit d’acheter
ou vendre un actif financier à une date future. Le prix de ces contrats est dérivé du
prix des actifs sous-jacents, de celui d’un indice financer ou encore d’un taux
d’intérêt. C’est d’ailleurs pour cela qu’on appelle ces produits des produits dérivés.

LES WARRANTS

DEFINITION ET INTRODUCTION

Un warrant est un titre négociable, proche des contrats d’options (les termes
warrants et options sont parfois utilisés l’un pour l’autre), coté en bourse, qui
donne à son détenteur le droit, mais non l'obligation, d'acheter (dans le cas d'un
call warrant) ou de vendre (dans le cas d'un put warrant) un actif sous-jacent à un
prix fixé d'avance (le prix d'exercice) jusqu'à une date donnée (la date
d'échéance). Le warrant est émis par une société (financière ou non) clairement
identifiée, et peut être assimilé à un titre.
Bien que les premiers warrants soient apparus au début du 20e siècle aux Etats-
Unis, ils étaient réservés aux investisseurs institutionnels et aux initiés. C’est dans
les années 1980’s qu’ils ont réussi à attirer l’attention du grand public grâce à sa

14 Nous vous renvoyons aux cours de finance et de comptabilité.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

mise de fonds limitée, son effet de levier important et au nombre croissant


d’émissions et d’émetteurs.
La durée de vie du warrant s'arrête à la date d’échéance. La valeur du warrant est
ensuite nulle. Tout produit financier peut faire l’objet d’un warrant : une action, une
obligation, une devise, un indice boursier, une matière première, etc.
Les call warrants permettent de profiter d’une hausse du cours du sous-jacent
alors que les put warrants permettent de bénéficier d’une baisse de cours.
On distingue, comme les options, soit un type américain, où l’exercice peut se faire
à tout moment jusqu’à l’échéance ; soit un type européen, où l’exercice se fera
uniquement à l’échéance. Le premier type est de loin le plus fréquent
La parité est le nombre de warrants à acquérir pour un actif sous-jacent.
La quotité est la quantité minimale de warrants qu’il faut négocier.
Dans le cadre des warrants sur actions, l’exercice du droit d’achat par le détenteur
donne lieu à une émission de nouvelles actions par l’entreprise concernée. Cette
dernière augmente alors son capital dès que le droit est exercé. Ce dernier élément
est un élément majeur de différenciation entre les warrants et les options sur
actions. En effet, quand une option est exercée, il n’y a pas d’augmentation de
capital.

PRIX DES WARRANTS

Pour obtenir ce droit, l'acheteur paie un certain prix. Le cours du warrant se


compose de deux éléments : la valeur intrinsèque et la valeur d’attente.

• VALEUR INTRINSEQUE
Pour un call warrant, la valeur intrinsèque est la différence positive entre le cours
de la valeur sous-jacente et le prix d’exercice du warrant. On parle alors d’un call
warrant « in-the-money ». Cette valeur intrinsèque est nulle si le cours est inférieur
au prix d’exercice, auquel cas on parle de warrant « out-of-the-money ».
Pour un put warrant, la valeur intrinsèque est la différence positive entre le prix
d’exercice du warrant et le cours de l’action. On parle alors d’un put warrant « in-
the-money ». Cette valeur intrinsèque est nulle si le cours est supérieur au prix
d’exercice, auquel cas on parle de warrant « out-of-the-money ».
Si la valeur intrinsèque du warrant est nulle, le cours du warrant ne se compose que
de la valeur d’attente.

• VALEUR D’ATTENTE (TIME VALUE)


Cette valeur est influencée par le temps restant avant la date d’échéance du
warrant. En effet, plus la période de temps avant l’échéance est grande, plus grande
est la probabilité que le cours du sous-jacent évolue dans le sens voulu.
La valeur d’attente est également influencée par la volatilité, exprimée par l’écart
type historique des cours de l’actif sous-jacent. En effet, plus cette dispersion

- 26 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

autour de la moyenne est élevée, plus grande est la probabilité que le cours de l’actif
sous-jacent évolue au niveau souhaité.
On paie ainsi dans cette valeur d’attente une sorte de prime qui valorise la
possibilité restante d’appréciation de la valeur intrinsèque.
Par le biais de certaines formules (voir Black & Scholes, etc…), il est possible de
calculer la valeur théorique du warrant. Toutefois, de grands écarts s’observent
entre les cours théoriques et les cours tels qu’ils sont observés tous les jours. Il faut
à cet effet tenir compte d’un facteur supplémentaire : la loi de l’offre et de la
demande.

UTILITE DES WARRANTS

• INSTRUMENT DE COUVERTURE
Les investisseurs peuvent couvrir leurs positions en actions en achetant des
warrants put. Des warrants call leur permettent d’accroître leur position en actions
avec un risque réduit en montant. Les warrants (et options) permettent de gérer
ainsi le risque sur action, sur devises, sur taux d’intérêt, etc…

• EFFET DE LEVIER IMPORTANT


Le prix d’un warrant est nettement inférieur à celui de l’actif sous-jacent mais le
cours du warrant varie en termes relatifs beaucoup plus que l’actif sous-jacent.
Ainsi, que la variation soit positive ou négative, le cours du warrant amplifie ces
mouvements dans le sens identique de la variation du cours du sous-jacent.

• INSTRUMENT DE DIVERSIFICATION DU PORTEFEUILLE

DIFFERENCES ENTRE WARRANTS ET OPTIONS

Les warrants sont des instruments financiers et négociés en tant que tels comme
des actions. Les warrants sont émis par des sociétés ou des intermédiaires
financiers, souvent dans le cadre d’un financement.
Les options sont des contrats créés et négociés sur le marché des options. Il faut
nécessairement ouvrir un compte spécifique pour négocier des options.
Les options qui sont des contrats qui peuvent être standardisés pour un sous-
jacent déterminé, en termes d’échéance, de prix d’exercice, de taille du contrat, etc.
Une bourse d’options est généralement la contrepartie, et elle assure aussi la
standardisation des contrats. Par contre, les caractéristiques des warrants sont
librement choisies par les sociétés ou des banques émettrices. On peut ainsi trouver
pour un même sous-jacent une série de warrants aux spécificités diverses, rendant
par ailleurs la comparaison entre prix des warrants plus difficile.
Les warrants sont émis sur une gamme de sous-jacents plus grande que celle des
options.

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Le warrant peut être émis isolément ou lié au sous-jacent15 tandis que l’option n’est
émise qu’isolément.

LES OPTIONS

Tout ce qui a été dit au sujet des warrants est valable pour les options, à l’exception
bien sûr des différences entre les deux produits qui ont été relevées.
Rappelons également que la notion d’option est beaucoup plus large et n’est pas
uniquement liée aux marchés financiers. Les options sont avant tout des contrats
entre deux parties et sont beaucoup utilisés en dehors des marchés financiers dans
la vie de tous les jours. Ainsi, pas uniquement les produits financiers (une action,
une obligation, une devise, un indice boursier, une matière première, etc.) peuvent
faire l’objet d’une option. Ces contrats octroient de manière générale un droit à
l’une partie alors que l’autre partie accepte une obligation.

LES « FUTURES »

DEFINITION ET INTRODUCTION

Un future est un contrat à terme conclu entre deux parties et ayant pour objet
l’achat ou la vente d’un actif sous-jacent à une date et un prix déterminés. On
parle de « futur » lorsque ce contrat à terme est représenté par un titre négociable.

FONCTIONNEMENT

Le prix d’un future ne représente qu’une partie de la valeur effective du contrat. La


liquidation (settlement) se fait sur base quotidienne par le paiement de la
différence entre le prix de transaction du jour précédent et celui du jour même. A
cet effet, les deux parties du contrat de future doivent déposer une garantie
(« margin »). Quand celle-ci est épuisée, on procède à un « margin call » :
l’acheteur ou le vendeur doit apurer son compte.
L’investissement en future est très risqué. Il est très apprécié par les gestionnaires
de fonds spéculatifs comme les hedge funds. Le marché des futures est très
développé aux Etats-Unis. On peut ainsi y négocier des indices boursiers, des
obligations, des devises, des céréales, du bétail, etc.

DIFFERENCE ESSENTIELLE ENTRE FUTURES ET OPTIONS

Une transaction sur options porte sur un droit d’acheter ou de vendre, alors
qu’une transaction sur futures porte directement sur une obligation d’acheter ou
vendre à terme la valeur sous-jacente. Cet aspect est très important et signifie que le

15 Voir les obligations « cum-warrant ».

- 28 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

profil de risque des futures est plus élevé que celui des options, étant donné que
peu importe l’évolution du cours du sous-jacent, la transaction a lieu. Et doit être
soit entourée par une opération inverse, soit liquidée.

UTILITE

Les contrats de futures sont utilisés en matière financière surtout sur les devises, et
sur les taux d’intérêt. Ils côtoient d’autres transactions, à terme réalisées dans des
marchés interbancaires, les Forward Rate Agreements, swaps, forward swaps, etc…

- 29 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 3.

QUELQUES PRINCIPES GENERAUX ET PARAMETRES


CARACTERISANT LES OPERATIONS DES
INTERMEDIAIRES FINANCIERS

Dans cette partie du cours, seront passés en revue divers éléments caractéristiques
des opérations traitées par les intermédiaires financiers.

EMPLOIS DE FONDS, CREDITS ET OPERATIONS "ACTIVES" EN


TOUT GENRE

L'UTILISATEUR DU FINANCEMENT

L'intermédiaire financier doit évidemment savoir à qui il confie ses fonds; aussi,
avant de permettre à l'utilisateur de disposer des fonds, l'intermédiaire financier va
tenter de le caractériser suivant des critères individuels et collectifs :

CRITERES INDIVIDUELS

• IDENTITE
Il s'agira du nom pour la personne physique et de la dénomination sociale pour
les personnes morales.
REMARQUES :
Le ou les noms qui apparaissent ne sont pas toujours ceux de la véritable
contrepartie de l'intermédiaire financier : cas des prête-nom, des sociétés écrans, et
l'intermédiaire cherchera à s'informer des propriétaires économiques ("beneficial
owners") des comptes au travers desquels s'effectuent les transactions.
Il peut y avoir pluralité d'utilisateurs pour une même opération : se pose alors la
question de la nature de leurs engagements respectifs à l'égard de leur participation
dans l'opération : solidarité et indivisibilité éventuelles de leurs obligations à l'égard
de l'intermédiaire financier.

• ETAT-CIVIL
Pour les personnes morales, il s'agira de préciser la forme juridique.

• AGE

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Pour les personnes morales, il s'agira évidemment de la date de fondation, voire


de la date de fondation de la firme ou des personnes morales dont elle est elle-
même issue par voie de fusion, apport ou autrement.

• NATIONALITE
Pour les personnes morales, il s'agit de préciser le pays selon les lois duquel elles
ont été constituées.

• DOMICILE / RESIDENCE
Ils peuvent se situer dans un pays différent de celui de la nationalité. Cet élément
interviendra en particulier pour déterminer le régime de change ou fiscal de
l'utilisateur de fonds. Dans le cas de personnes morales, il s'agira du siège social
(et du siège administratif s'il en est distinct).

• PROFESSION / OBJET SOCIAL


Outre l'intérêt intrinsèque de connaître la finalité et le domaine d'activité des
utilisateurs de fonds, pour ce qui concerne les personnes morales, il se pose la
question de savoir si l'opération envisagée entre dans le cadre de leur objet, faute de
quoi la validité de cette opération pourrait être mise en cause.

• CAPACITE JURIDIQUE
Celle-ci variera selon qu'il s'agit d'une personne physique ou morale.

• POUVOIRS DE REPRESENTATION
Un des points importants sera de vérifier si les personnes qui se présentent à
l'intermédiaire financier au nom de l'utilisateur engagent valablement celui-ci.

RISQUE DU FINANCEMENT

Le risque intrinsèque de solvabilité et de liquidité de l'utilisateur des fonds sera


considéré à partir d'éléments différents, historiques et aussi, si possible,
prospectifs :

• ENTREPRISES
Pour ce qui concerne les entreprises, ce sera d'abord par l'analyse de ses états
financiers (bilan, comptes d'exploitation, budgets, projections) mais aussi par
l'étude de la qualité et la continuité du management, de son organisation, de ses
produits (gammes, mix), de ses marchés et de son réseau commercial, de son
potentiel technique (technologie, obsolescence de l'appareil pour l'évaluation
desquelles les intermédiaires doivent souvent faire appel à des experts extérieurs),
du risque social (la qualité des relations syndicales et de la communication dans
l'entreprise), et du risque juridique (litiges en cours ou potentiels);

• POUVOIRS PUBLICS

- 31 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Pour ce qui concerne les pouvoirs publics, ce sera par l'analyse de leurs budgets et
comptes, de leur stabilité politique, de leurs réserves de change et balance
extérieure de paiements s'il s'agit d'Etats, etc.

• PARTICULIERS
Pour ce qui concerne le particulier, ce sera par l'analyse de ses activités et revenus
professionnels, sa situation patrimoniale, sociale et familiale, son état de santé,
etc.
D'autre part, le paramètre risque sera abordé de manière différente s'il s'agit d'un
investissement en capital, d'une avance à long terme ou d'un crédit à court terme.
Enfin, on fera une distinction en fonction du titre financier que l'on utilisera : un
effet de commerce présente moins de risque qu'une simple créance en compte.

• GARANTIES

Celui qui emprunte est tenu de payer intérêt et principal aux dates convenues. Le
prêteur sceptique quant à sa capacité de remplir cet engagement peut exiger des
cautions ou des sûretés en garantie. Parfois aussi l’emprunteur le proposera
d’initiative, sachant que le financement qu’il recherche en sera plus aisé et moins
onéreux (cas évident de l’emprunt hypothécaire par un particulier).

L’OBJECTIF DU FINANCEMENT

L'intermédiaire cernera ensuite le type de besoins de l'utilisateur. Il peut s'agir :


9 d'un financement de consommation, voire d'une perte : ce type de
financement est considéré par l’intermédiaire avec prudence, voir méfiance.
9 d'un financement d'investissement, de stock, de créances; qu'il s'agisse
d'immeubles, d'outillages, d'immobilisés incorporels, de matières premières,
d'encours de fabrication, de produits finis ou de créances, ceux-ci se
retrouveront à l'actif du bilan de l'utilisateur;
9 d'un financement d'encaisse : cela peut paraître paradoxal, mais c'est une
pratique courante dans les pays anglo-saxons qui découle du mode particulier
de comptabilisation dans le chef des intermédiaires financiers. Dans ce
système anglo-saxon, l'intermédiaire financier met l'emprunteur en débit dans
un compte avance et en crédit dans un compte d'encaisse disponible dont il
exige qu'un minimum reste inutilisé ("compensating balance" voir plus loin,
description d’un crédit de caisse). En Europe continentale, cette pratique est
rarement utilisée, si ce n'est - mais alors de la volonté du client - lorsqu'en fin
d'un exercice comptable une entreprise désire augmenter la liquidité
apparente de son bilan ("window dressing");
9 d'un financement de structure : plutôt que de financer une opération unique,
ou certaines opérations individualisables successives, l'intermédiaire financier
peut parfaitement financer des besoins généraux d'une entreprise : c'est ce
qui se passe pour les crédits de fonds de roulement.

- 32 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

L’analyse du besoin de financement et de la capacité de l’emprunteur à rembourser


sont indispensables, quelle que soit la nature et la solidité des garanties offertes

LE TEMPS DANS LE FINANCEMENT

OBJET ET SUJET

Le temps est facteur d'incertitudes, donc de risques; aussi, le temps d'un


financement sera-t-il conditionné par :
9 son objet : le délai de prélèvement et la durée de remboursement du
financement varieront en fonction du type de besoins (besoins passagers ou
permanents, ponctuels ou récurrents) et de la nature et de la durée
économique de l'objet financé.
9 son sujet : limitation éventuelle de la durée d'existence d'une société (de
venture capital par exemple), âge et santé d'une personne physique.

SORTIE DE L’OPERATION

Dans la détermination du terme, l'intermédiaire financier se préoccupera de la


"sortie" de l'opération, c'est-à-dire ce grâce à quoi le remboursement pourra avoir
lieu : ce remboursement peut provenir de l'encaissement d'une créance, de la
revente d'un bien dont les coûts de fabrication ont été financés, du cash flow
généré par un équipement productif financé, de la conclusion d'un nouveau prêt,
de la liquidation ou de la réduction d'activités de l'entreprise.
Si l'opération n'est pas économiquement self-liquidating, elle peut nécessiter des
flux tiers pour que le remboursement puisse avoir lieu (exemple : financement
d'une première communion par les revenus professionnels futurs des parents).

ECHEANCE

L'échéance ("maturity") d'un financement peut être déterminée ou aléatoire (p. ex.
créances par rapport aux parts d'associés).

• ALEATOIRE
L'échéance ("maturity") d'un financement peut être déterminée ou aléatoire (p. ex.
créances par rapport aux parts d'associés).

• DETERMINEE
Si elle est déterminée, elle peut être fixe ou variable; citons à titre d'exemple :
9 un remboursement en une seule fois au bout de dix ans ("bullet repayment");
9 un remboursement annuel sur dix ans par dixièmes du montant total à
rembourser;

- 33 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 un remboursement à trois mois à moins de reconduction de commun accord


des parties pour de nouvelles périodes trimestrielles successives;
9 un remboursement sur préavis d'un mois.

• CLAUSES DE REMBOURSEMENT ANTICIPE


Il existe fréquemment dans les contrats d'ouverture de crédit une clause de
"remboursement anticipé", c'est-à-dire avant l'échéance du terme convenu
("prepayment clause").
EXEMPLES :
9 Le contrat peut prévoir que le remboursement pourra être imposé par le
prêteur au débiteur avant l'échéance convenue au cas où le débiteur ne
respecterait pas ses engagements, au cas où il laisserait protester sa signature,
en cas de dégradation de sa situation financière, etc.
9 Inversement, le contrat pourra prévoir que le débiteur aura la faculté de
rembourser anticipativement son créancier, soit à tout moment moyennant
généralement le paiement d'indemnités, soit en cas de survenance d'un
événement tel que des impôts nouveaux frappant les revenus d'intérêts,
impôts dont la charge aurait incombé conventionnellement au débiteur ("tax
clause")
A remarquer que des événements particuliers peuvent influencer l'exigibilité : la
faillite rend les créances exigibles; à l'inverse, la demande de concordat suspend les
recours des créanciers jusqu'à son homologation ou rejet éventuels.

NATURE ET FORME DU TITRE FINANCIER

Le titre financier résulte d'un contrat (d'association, de prêt, de transport, de vente


à crédit, ...), fréquemment assorti d'un support matériel qui soit confère par lui-
même les droits de créance ou de propriété auxquels ce support se réfère (lettre de
crédit, effets de commerce, obligations, actions ...), soit fournit simplement
l'indication de l'existence de ces droits (extraits de compte, certificats
représentatifs d'actions ou de parts, lettres de voiture, factures, ...).
Un titre peut être nominatif, à ordre ou au porteur.

REMUNERATION OU PRIX DU FINANCEMENT

L'intermédiaire financier établira sa rémunération en fonction de divers facteurs :


9 le coût des ressources au moyen desquelles il assure le financement,
9 le degré de risque encouru selon la qualité du débiteur et la nature de la
transaction,
9 les frais effectifs ou probables occasionnés par la conclusion et le
fonctionnement de l'opération jusqu'à son terme,
9 la marge de profit qu'il souhaite se réserver, et les tarifs pratiqués par la
concurrence pour une opération similaire,

- 34 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 les limites réglementaires imposées par les autorités.


Cette rémunération a généralement pour partie principale une ou plusieurs sommes
calculées en fonction du temps d'utilisation des fonds à courir jusqu'au terme du
financement, souvent complétées par des rémunérations ponctuelles, sans compter
l'indemnisation forfaitaire ou sur justificatifs de certains débours exposés par
l'intermédiaire financier et les éventuelles pénalités en cas de non-respect des
clauses par le débiteur.

REMUNERATION CALCULEE EN FONCTION DU TEMPS D’UTILISATION DES


FONDS :LES INTERETS

• TAUX FIXES
Aucune variation du taux n'a lieu pendant toute la période considérée. C'est le cas
des avances et dépôts à terme fixe et de certains types d'obligations.
Un peu d’histoire …
En Belgique, depuis la guerre, la SNCI16, pour ses crédits d'investissements, et les
organismes de prêts hypothécaires déterminaient habituellement des taux fixes
pour toute la durée (longue) de leurs financements. En 1972 pour la SNCI et depuis
le début des années 90 pour les banques et les organismes hypothécaires, il y a eu
un revirement sous l'empire de la plus grande volatilité des taux : ces organismes
privilégiaient les prêts qui provoquent une faculté de revoir le taux à dates fixes (par
exemple tous les cinq ans = "révision quinquennale"), de manière à assurer une
meilleure adéquation entre le coût de leurs ressources et les revenus de leur
remploi. Cette pratique laisse l'utilisateur des fonds dans l'incertitude du taux,
puisqu'il n'en connaît pas le niveau jusqu'à son expiration finale, même si la
référence par rapport à laquelle le nouveau taux sera fixé est déterminée à l'avance.
Cette question est d'une très grande importance : pour ne pas avoir assuré une
concordance suffisante entre la structure de rémunération de leurs actifs et passifs -
taux fixes sur actifs longs, taux variables sur passifs plus courts en moyenne - les
Savings and Loan Associations aux Etats-Unis (S & L), c'est-à-dire les caisses
d'épargne et d'hypothèques, sont après augmentation tendancielle des taux sur très
longue période arrivées, au début des années 1980, à un étranglement de leur
rentabilité. La chute de celle-ci, aggravée encore par des prises de risques
inconsidérées pour tenter de la rétablir, a provoqué chez nombre d'entre elles une
décapitalisation progressive, voire l'insolvabilité. L'insuffisance de fonds propres
du secteur a, au début des années 90, été évaluée à quelque 500 milliards de dollars
et a dû être comblée par les autorités - c'est-à-dire le contribuable.
Depuis la fin des années 80, le développement du marché des swaps d’intérêt a
permis aux banques de se refinancer à de bonnes conditions sur toutes les

16SNCI : Société Nationale de Crédit à l'Industrie, absorbée par la CGER Banque en 1995, elle-
même absorbée par Fortis en 1997.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

échéances et la plupart des grandes devises, et les emprunteurs obtiennent auprès


des banques des financements à taux fixe de longue durée.

• TAUX VARIABLES
Par extension de ce qui vient d'être dit pour les crédits à long terme, où certaines
échéances intermédiaires peuvent avoir été fixées pour une éventuelle révision
du taux, se sont installés depuis les années 1970 des crédits appelés "roll-over"
c'est-à-dire consentis pour des périodes à court terme successives de 1, 3, 6 ou 12
mois, dans le cadre d'une période de renouvellement globale garantie qui peut
atteindre plusieurs années. A chaque échéance intercalaire, le taux est revu, et
fixé sur base du niveau, au moment de cette échéance intercalaire, d'un taux de
référence prédéterminé, qui est souvent le "LIBOR" (London Interbank Offered
Rate), lequel sera majoré d'une marge convenue, qui peut varier de presque rien
(1/8, voir 1/16 de %) pour les meilleurs emprunteurs, à 1 ou plusieurs pourcents
pour des emprunteurs plus risqués, des financements de projet, etc.
Mais le cas extrême de la variabilité est celui où le bailleur de fonds a la faculté de
décréter, à tout moment ou périodiquement, une variation du taux par rapport à
une référence qu’il fixe lui-même: crédit de caisse, taux de base, etc. (voir plus loin)

• REMUNERATIONS ALEATOIRES ET FORMULES MIXTES


Les taux fixes ou variables décrits plus haut ont comme caractéristique d'être
prédéterminés, ou déterminés par rapport à une référence.
Il n'en va pas de même pour certains types de rémunérations qui sont aléatoires, car
décrétées en fonction de circonstances imprévisibles : c'est le cas de dividendes
sur actions de sociétés, dépendant du niveau des bénéfices et des décisions de
répartition par l'organe compétent (assemblée générale pour les sociétés anonymes
en Belgique).
Il existe également des formules mixtes entre les rémunérations aléatoires et les
taux prédéterminés : on peut citer les obligations participatives, ou encore les
actions privilégiées, où un pourcentage fixe initial est prévu sur le bénéfice
distribué, majoré d'un pourcentage sur le surplus éventuel dans lequel les actions
ordinaires auront normalement une part prépondérante.

REMUNERATION CALCULEE INDEPENDAMMENT DU TEMPS D’UTILISATION DES


FONDS : LES COMMISSIONS

Diverses commissions sont appliquées par les intermédiaires financiers sur leurs
prestations qui ne sont pas fonction de l'utilisation de ces concours dans le temps.
Par exemple, les intermédiaires prélèvent : des commissions d'ouverture de crédit,
des commissions sur plus haut découvert, des commissions sur émissions
d'obligations ou d'actions ...
Ces commissions peuvent être prélevées en une seule fois (commission "flat") en
début ou en fin de période, ou encore peuvent être prélevées périodiquement
(commissions récurrentes). L'utilisateur des fonds doit calculer le coût effectif de
ces commissions en les rapportant au montant des fonds réellement utilisés.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

EXEMPLES
9 Soit une commission d'ouverture de crédit annuelle de 1 %, appliquée quel
que soit le degré d'utilisation du crédit, qui sera par hypothèse une ligne de
100 millions à 6 %.
ƒ Si on utilise les 100 millions dans leur intégralité pendant toute la
période, on paiera d'une part 6 millions d'intérêt et d'autre part 1
million de commission, soit 7 millions au total ou 7 % par rapport aux
100 millions utilisés.
ƒ Si on n'utilise que 50 millions de la ligne octroyée, on paiera 3 millions
d'intérêt plus 1 million de commission, c'est-à-dire 4 millions au total
ou 8 % par rapport aux 50 millions effectivement utilisés.
ƒ A la limite, si le crédit n'est pas utilisé du tout, le taux sera "infini";
cette appréciation qui confine à l'absurde doit être mise en perspective :
la commission peut être vue comme la prime d'assurance payée pour la
disponibilité du crédit, et être prise en considération en dehors du taux
lui-même.
9 Variante du cas précédent : la commission d’engagement, qui n’est due que
sur le montant non utilisé de la ligne de crédit. Soit une émission
d'obligations de 10 milliards à 6%, avec une commission d'émission
prélevée à l'origine ("front end") de 1 %. Le coût de l'emprunt sera de 6 %
à calculer sur un produit net de 99 % du nominal, soit 9,9 milliards, ce qui
donne un coût réel actualisé de l'ordre de 6,15 %, si les obligations sont à
10 ans, de l’ordre de 6,25 % si elles sont à 5 ans.

INDEMNISATION DES DEBOURS A ENCOURIR

Il peut être stipulé que les frais "objectifs" ("out of pocket expenses") occasionnés
par l'opération pourront être facturés en sus, forfaitairement ou sur justification :
frais d'enregistrement, de signification, de communications, d'impression de
prospectus, de traduction, d'ouverture de dossier, d'assurance, d'expertises
comptables ou industrielles, de consultations juridiques ou fiscales, ...

FACTEURS DE DISTORSION SUR LE COUT REEL

Pour pouvoir comparer les taux de différents types de financement, il faut les
ramener à une même base de calcul. Nous avons déjà vu dans l’introduction que
l’époque de prélèvement des taux d’intérêt a un impact important sur le taux réel.
Premièrement, pour ce qui concerne l’époque de prélèvement des intérêts, la base
annuelle à terme échu est généralement adoptée.
EXEMPLE
9 Soit un prêt d’un an de BEF 100 à 6 %, intérêts prélevés en fin de période « à
terme échu » : à l’échéance on touche 6 %.
9 soit un prêt d’un an de BEF 100 à 6 %, intérêts prélevés en début de période
(« anticipativement ») : cela revient en fait à prêter 94 et à récupérer 100 à

- 37 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

l’échéance ; dans ce cas-ci le taux ramené à un taux annuel fin de période est
( )
plus élevé : 6 = 6,38% réel. Dans ce cas, un taux nominal de 6 %
94
correspond à un taux réel de 6,38 %.
Deuxièmement, un autre facteur de distorsion est le suivant : la pratique en usage
sur certains marchés de calculer le nombre de jours d'intérêts par rapport à une
année conventionnelle de 360 jours au lieu de l'année réelle de 365 jours.
EXEMPLE
9 soit un prêt de BEF 100 à 6 %, intérêts prélevés en fin de période sur base
365
d'une année de 365 jours : à l'échéance on touche : 100 ( 1 + 0,06 x )
365
= 106 ou 6% réel
9 soit un prêt de BEF 100 à 6 %, intérêts prélevés en fin de période sur base
365
d'une année de 360 jours : à l'échéance on touche : 100 ( 1 + 0,06 x )
360
= 106,083 ou 6,083% réel

FISCALITE

La fiscalité peut modifier sensiblement le coût d'un financement (si elle est
supportée par l'utilisateur) ou le revenu d'un placement (si elle est supportée par le
bailleur) car le régime fiscal varie selon le mode de financement.
L'intérêt d'une créance est payé sur le bénéfice brut de l'entreprise avant son
imposition (car c'est une charge déductible). Il est parfois prélevé un précompte
(en anglais « witholding tax »), que le débiteur doit retenir au profit de ses autorités
fiscales17.
Le régime fiscal ne dépend pas seulement de la nature de la distribution mais de
la nature et de la localisation des intervenants. On fera notamment la distinction
entre les personnes physiques, les personnes morales commerciales, les
personnes morales non commerciales, etc. Entre les résidents du pays de la
distribution et les non-résidents de ce pays, et encore des régimes seront-ils
différents selon qu'il y a ou non des conventions préventives de double
imposition entre les pays en cause.
Ceci fait parfois apparaître des distorsions.

17 La personnalité de l'attributaire (société ou personne physique) jouera un rôle en cette


matière qui a au cours des dernières années subi en Belgique des changements importants -
introduction de la notion du précompte libératoire pour les personnes physiques, baisse du
niveau du précompte mobilier de 25 % à 10 % puis remontée à 15 % pour les revenus de
créances.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

RECOLTE DE FONDS, DEPOTS, OPERATIONS « PASSIVES » EN


TOUT GENRE

L'examen de la structure des dépôts d'une banque est essentiel pour juger de la
solvabilité, et du potentiel de rentabilité d'une banque. Parmi ces dépôts, les
comptes à vue occupent une place importante, car ils constituent la spécificité des
banques de dépôt ou banques commerciales.
Le stock monétaire strict est aujourd'hui constitué d'une par des billets de
banque, et d'autre part des dépôts à vue (aussi appelés comptes à vue ou comptes
courants) ouverts dans des banques (les chèques au porteur tirés sur des comptes à
vue en sont une forme tangible).

LES DEPOTS BON MARCHE

Aujourd'hui, les dépôts à vue des banques commerciales sont une source de
seigneuriage. Leur montant n'est jamais certain ni définitif, mais à tout le moins ils
peuvent être considérés comme un dépôt quasi gratuit, dans la mesure où la
grande masse des comptes à vue n'est pas rémunérée. Les comptes à vue ouverts
par des particuliers présentent l'avantage supplémentaire d'offrir une grande
stabilité globale : les montants déposés dans chaque compte individuel peuvent
grandement fluctuer d'un jour à l'autre, mais la masse globale en est stable.
Dans leur gestion, les banques cherchent à maximiser leurs dépôts les moins
onéreux, et les plus stables. Les comptes à vue de particuliers entrent bien sûr dans
cette catégorie. D'autres activités, parfois très administratives et peu connues
peuvent être génératrices de ces dépôts faiblement rémunérés, que l'on appelle
aussi du "float" : le service financier de titres au porteur ; les chèques de voyage,
chèques cadeau, chèques repas, etc. ; les comptes bloqués de toute nature.
La perception de date de valeur sur transferts entre également dans cette
catégorie. D'autres sociétés, financières ou pas, peuvent recevoir des placement et
dépôts temporaires, mais le dépôt à vue est une caractéristique spécifiquement
bancaire.
Bien entendu, certaines activités génératrices de "float", et en particulier les dépôts
à vue, occasionnent également pour les banques des opérations fastidieuses, tels
que transferts, chèques, extraits de compte. Mais au cours des dernières années elles
accroissent la tarification sur ces opérations, sans remettre en cause le principe de
la rémunération faible ou nulle sur compte courant.
Pour chacune de leurs activités de dépôt (dépôt à vue, dépôt d'épargne, dépôt à
terme, bons de caisse, …) les banques doivent gérer au mieux les coûts, le volume
et la stabilité de ce volume, en fonction des catégories de déposants, des
rémunérations, des coûts administratifs qu'ils génèrent, etc.
Etant donné que les banques participent à une responsabilité et un privilège
important des pouvoirs publics qu'est l'émission de monnaie (et le seigneuriage qui

- 39 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

en découle), il est normal qu'elles soient soumises à des contrôles particuliers, afin
que cette responsabilité soit exercée d'une façon qui respecte l'intérêt général.

UNE ANTIQUE PRATIQUE ANGLO-SAXONNE : LES COMPENSATING BALANCES


Dans les pays anglo-saxons, un système particulier est utilisé pour la
comptabilisation des crédits de caisse (décrit plus loin), qui a une incidence sur la
rémunération réelle de ceux-ci.
On y crée un compte d'avances qui est débité de la totalité du montant de
l'ouverture du crédit, lequel montant est simultanément transféré au crédit d'un
compte courant au nom du bénéficiaire de crédit. C'est ce compte courant qui est
ensuite utilisé par le bénéficiaire du crédit pour ses besoins de paiement, étant
entendu que ce compte ne peut jamais devenir débiteur; au contraire, le bénéficiaire
doit maintenir un montant minimum au crédit de ce compte (= "compensating
balance"), le plancher du solde créditeur étant généralement fixé à 10 % à 15 % de
la ligne d'avance.
Dans ce système, il n'y a pas de compensation entre les soldes du compte avances
et du compte courant; le bénéficiaire paie donc l'intérêt sur toute la ligne du crédit,
quel que soit le degré d'utilisation du compte créditeur.
Prenons un exemple : soit 6 % le taux d'intérêt convenu; soit également fixé à
13 % le minimum à maintenir en compte créditeur par rapport au montant de la
ligne accordée; si le crédit est utilisé à sa capacité maximum pendant toute la
période (87 % de la ligne accordée), le taux effectif sera non de 6/100, mais de
6/87, soit 6,9 %.
Ce système anglo-saxon est plus avantageux pour les banques, puisque l'intérêt
est calculé sur la totalité de la ligne, et que celle-ci ne peut être utilisée par le client
dans son intégralité, la banque bénéficiant à tout le moins du remploi du solde
minimum à conserver en compte courant (13 % dans l'exemple).
Néanmoins, sous l'effet de la concurrence, ce système tend à disparaître au profit
du système européen - du moins pour les clients les plus importants instruits par
leur expérience internationale - car ce dernier système est plus avantageux pour le
bénéficiaire du crédit.
Ce système est très caractéristique de la volonté des banques d'accroître leurs
dépôts à vue.

CARACTERISTIQUES DU DEPOSANT

Si la connaissance de l'identité des débiteurs d'un intermédiaire financier est


essentielle, celle de ses déposants ou bailleurs de fonds peut l'être aussi.
A cet égard, il y aura des mesures particulières dans les cas où le titre confère
l'anonymat à son détenteur : actions, obligations ou certificats de dépôts au porteur

- 40 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

(ou au nom d'un "nominee"18) - sans parler du billet de banque, lui aussi au porteur
par essence.
On notera que la propension à l'anonymat varie d'un pays à l'autre. La Belgique
affectionne les titres au porteur, alors que les pays anglo-saxons privilégient la
nominativité (encore que le dispositif du titulaire "nominee" puisse y jouer écran
en cas de besoin). L'Etat belge appuie ce système d'anonymat (quoique la loi sur la
"transparence" du 2 mars 1989 prévoyant la déclaration de participations de plus de
5 % dans les sociétés belges cotées constitue entorse relative à cet usage).
L'ouverture de comptes "à numéro" "ou anonyme" ne signifie pas que
l'établissement financier ignore qui est sa contrepartie : il s'agit simplement d'un
dispositif par lequel le titulaire ne s'identifie sous son identité véritable que vis-à-vis
de la haute direction de la banque, le restant des cadres et employés n'ayant pas à la
connaître, pour éviter d'éventuelles indiscrétions.
L'intermédiaire vérifiera la capacité juridique du titulaire du compte. Les modes
de représentation peuvent être conventionnels (pouvoirs dévolus aux représentants
d'associations ou de sociétés), ou prévus par la loi (par exemple pour les
incapables).
Il peut y avoir unicité ou pluralité du propriétaire du titre financier : par exemple
dans le cas de l'ouverture d'un compte joint (multiplicité volontaire), ou en cas de
succession (multiplicité dérivant de dispositions légales).
En matière d'opérations passives, la notion de notoriété intervient aussi. Cette
question a acquis depuis ces dernières années une importance particulière dans le
cadre de la lutte contre la grande criminalité (blanchiment d'argent provenant du
terrorisme, du trafic de drogue, d'enlèvements, ...) : outre les devoirs
déontologiques des organismes financiers quant au fait de savoir avec qui ils
traitent, des règlements prévoient les précautions concrètes à prendre dans
l'ouverture et le suivi des comptes de la clientèle, et dans la collaboration à apporter
aux instances judiciaires. Cela ne va cependant pas sans poser des questions
délicates en matière d'éthique et de respect de la vie privée.
Les caractéristiques collectives de certains groupes de déposants de même nature
(médecins, notaires, investisseurs institutionnels, étrangers, ...) peuvent importer,
dans la mesure où elles influencent les méthodes de marketing à employer pour la
collecte de fonds ou encore les traitements à appliquer à ces bailleurs (conditions de
rémunération, fiscalité).

OBJECTIFS DU DEPOSANT

Les objectifs du déposant varient selon sa nature, son domaine d'activité, son
stade dans le cycle de vie, ses obligations et ses autres éléments de patrimoine.

18 Personne ou société dont la fonction est de figurer dans les registres de l'émetteur du titre
nominatif pour compte du propriétaire réel.

- 41 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Ces éléments conduiront le déposant à choisir pour son épargne le type


d'affectation le plus approprié, depuis le simple dépôt d'encaisses courantes
jusqu'à l'investissement à long terme en passant par le placement temporaire de
ressources en attente d'emploi.
L'intermédiaire doit aider le déposant à déterminer ses objectifs financiers et
ensuite offrir un dispositif de placement adapté à la situation propre de ce dernier,
en mettant au point des modalités de sécurité, de liquidité et de rentabilité
correspondant à ses besoins.

FACTEUR TEMPS

Les termes peuvent être nuls (à vue), fixes (1 jour, 6 mois, 10 ans), assortis d'un
préavis (48 heures, 3 mois) ou encore indéterminés (capital à risque) ou infinis
(rentes perpétuelles). Les taux d'intérêts offerts pour chaque terme peuvent être
très différents, en fonction des conditions de marché, des règlements spécifiques et
de la concurrence.
Ici aussi, les équilibres entre opérations actives et passives seront importants : au-
delà du degré de transformation financière volontairement accepté, des opérations
de couverture (swaps, futures sur taux d'intérêt, ...) y pourvoiront.

NATURE ET FORME DES TITRES FINANCIERS EMIS PAR LES


INTERMEDIAIRES FINANCIERS

Il s'agit d'obligations (convertibles ou non), de bons de caisse, de carnets et livrets


d'épargne, de dépôts de toute nature, et, de façon plutôt exceptionnelle d'actions de
l'intermédiaire financier lui-même.

REMUNERATION

Selon la nature et forme des dépôts, il s'agira d'intérêts avec ou sans incitants
spéciaux (primes de fidélité ou d'accroissement, coupons donnant droit au tirage de
lots, etc.). Si la collecte d'épargne est réalisée au moyen de titres, ceux-ci payent un
intérêt dans le cas d'obligations et un dividende dans le cas d'actions.
L'intermédiaire financier attribue parfois une partie de la rémunération totale à un
agent collecteur (guichetier ou agent extérieur).
Pour fixer les rémunérations de ses différentes catégories de ressources,
l'intermédiaire financier tient compte des taux de marché, des taux de remploi,
des contraintes réglementaires, du coût de couverture éventuelle d'un risque
de change, du risque provenant de la transformation d'échéances, du régime fiscal
applicable et de la structure de ses frais.

- 42 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

FISCALITE

La fiscalité affecte les rémunérations des ressources comme elle affecte celles des
remplois.
Certains revenus d'épargne ont été exonérés d'impôts (exemple : carnets d'épargne
jusqu'à 1500 €.- par an de revenus).
L'intermédiaire joue également un rôle comme agent collecteur pour le fisc.
En Belgique, l'intermédiaire financier prélève le précompte mobilier sur les
revenus qu'il alloue (normalement de 15 ou 25 % sur les dividendes d'actions et 15
% sur les intérêts de créances à revenus fixes pour les résidents fiscaux belges); il
en versera le produit au fisc.
Par ailleurs, depuis 1975, la Commission Bancaire et Financière, qui n'avait
aucun pouvoir en ce domaine, peut intervenir auprès des établissements de crédit
si elle remarque des mécanismes particuliers ayant pour but ou pour effet de
favoriser la fraude fiscale. Son intervention peut aller de la simple admonestation
jusqu'à la radiation de l'établissement financier. Par mécanisme particulier, on
entend une procédure non-habituelle, qui par son usage répété, arrive à déjouer les
dispositions en matière fiscale. « Un exemple devenu célèbre concerne les
opérations dites back-to-back » par lesquelles des déposants peuvent effectuer un
dépôt dans un pays offrant un régime fiscal avantageux, et se voir prêter un
montant correspondant dans un autre pays, où ils ont intérêt à payer des charges
financières pour réduire leur base taxable.
De tels écarts de conduite n'ont évidemment rien de commun avec les efforts
parfaitement légitimes des intermédiaires financiers dans la recherche de la voie la
moins imposée dans l'attribution des revenus financiers de leurs clients. C'est ce
qui a notamment suscité depuis le milieu des années 80 l'efflorescence des SICAV19
de droit étranger dont la commercialisation est permise en Belgique.
Dans le cadre d'un régime fiscal local favorable, ces SICAV encaissent leurs
revenus et réalisent leurs plus-values pratiquement sans impôt. Dans les SICAV
dites de "capitalisation", ces revenus et plus-values ne sont pas distribués mais
mis en réserve, s'incorporant ainsi - brut pour net - à leurs fonds propres.
L'investisseur belge personne physique (ou ASBL) qui désire néanmoins toucher le
revenu de son investissement en SICAV réalisera plutôt sur celles-ci une plus-value
- non taxée en droit belge. Vu l'exode de capitaux due à l'attrait de cette formule, la
loi du 22 décembre 1989 a permis la création en Belgique de SICAV assorties du
même type d'avantage fiscal. En revanche, pour les actionnaires sociétés
commerciales, cette même loi a exclu du bénéfice du régime des revenus
définitivement taxés les revenus provenant de SICAV étrangères dites de
"distribution" (qui distribuent effectivement leurs plus-values et revenus sous

19 Société d'Investissement à Capital Variable, une forme d'OPCVM très populaire en France,
Belgique et Luxembourg.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

forme de dividendes) dans la mesure où le régime indigène de ces SICAV les


exonère d'impôts (leurs propres revenus n'y sont effectivement pas "déjà taxés").
L'objectif a été atteint, de nombreuses sociétés belges abandonnant leurs
placements en SICAV ; certaines autres filières de sociétés à faible taxation ont été
mises en place en Belgique. Les sociétés belges disposant d'un "Centre de
coordination" ont aussi pu continuer à lui confier ce rôle de transformation fiscale,
jusqu'ici en toute légalité.
Les SICAV de capitalisation permettent toujours à des particuliers d'éluder
facilement toute taxation et tout précompte mobilier, dans des pays comme la
Belgique qui ne taxe pas les plus-values.

RISQUE

Le principal risque de l'intermédiaire financier du côté des ressources réside dans


l'imprévisibilité du retrait de dépôts ou du non-renouvellement des avances
mises à sa disposition par ses bailleurs de fonds.
Les modalités de retrait ou de remboursement sont contractuellement prévues :
retraits à vue, avec préavis ou à terme fixe. Parfois un retrait anticipé est toléré,
moyennant certaines pénalités (cas des comptes à terme bancaires). D'autre part les
instruments à long terme (actions, obligations et bons de caisse des intermédiaires
financiers) sont généralement cessibles et peuvent avoir un certain marché, même
lorsqu'ils ne sont pas cotés.

CONDITIONS ANNEXES

Sous réserve des dispositions légales s'attachant à chaque type de titres financiers et
de dépôts, les relations générales entre bailleurs de fonds et intermédiaires
financiers sont habituellement régies par un contrat d'adhésion, c'est-à-dire que
c'est une des deux parties (l'intermédiaire financier) qui fixe unilatéralement ses
conditions auxquelles l'autre adhère.
Pour les comptes de dépôt, ces contrats prennent ainsi la forme de "règlements";
souvent ils prévoient l'unicité des comptes, c'est-à-dire la faculté pour
l'intermédiaire (banque) de compenser entre eux les différents comptes débiteurs et
créditeurs ouverts dans leur établissement par le même titulaire20.
Le caractère unilatéral des règlements de même que le rapport de force inégal
qui peut exister entre un établissement financier et sa clientèle (surtout si elle est de
type "grand public") peut conduire le législateur - le cas échéant sous la pression
d’associations de consommateurs - à appliquer aux intermédiaires financiers
certaines mesures en vigueur dans d'autres secteurs économiques en matière de
bonnes pratiques commerciales (affichage de prix, ...) et de clauses abusives.

20 Une telle compensation n'est cependant légalement applicable que s'il s'agit de compenser des
créances certaines et liquides.

- 44 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Dans la même optique, en matière de litiges, on peut instaurer des mécanismes


d'arbitrage ou d'amiable composition (système de l'ombudsman) pour éviter au
premier stade la procédure ordinaire mais lourde et coûteuse de soumission aux
tribunaux.
Pour les obligations, c'est un contrat préétabli ("indenture") qui contient les
dispositions auxquelles adhèrent les obligataires, reprises le cas échéant dans un
prospectus. Pour les actions, ce seront les statuts de la société auxquels les
parties se rapporteront.

- 45 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES OPERATIONS ACTIVES DES


INTERMEDIAIRES FINANCIERS

- 46 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 4.

LES OPERATIONS DE CREDIT

INTRODUCTION

Selon les cas, les établissements de crédit proposent différents types de crédit, p. ex.
pour le financement d'infrastructures publiques ou d'investissements industriels,
d'achat ou de construction d'immeubles pour les particuliers, de campagnes
agricoles, de fabrication de produits, de délais de paiement accordés par les firmes à
leurs clients, de consommation privée ou publique, de paiement anticipatif
d'impôts, de besoins généraux de fonds de roulement. Tous ces types de crédit
sont liés à des financements, et d’un point de vue technique sont appelés crédits
par décaissement. Il est aussi d’autres formes de crédits qui ne sont pas, ou pas
nécessairement liés à des financements, mais ont pour effet de faciliter des
opération en tout genre, entre autres la liquidation d’opérations commerciales, la
construction, etc…
En fin de compte, l'usage du crédit déterminera ses formes d'utilisation mais il est
plus commode de commencer l'exposé par une description des techniques pour
voir ensuite leur application.
Nous constaterons que les formes de crédit sont nées et ont évolué en fonction des
besoins d'individus et de marchands d'abord, et d'industriels beaucoup plus tard.
Le souci des banquiers est demeuré :
9 s'assurer que le crédit n'est pas détourné de son objectif, et surtout s’assurer
que l’emprunteur pourra, sauf imprévu, rembourser intérêt et principal aux
dates prévues
9 obtenir des garanties (sûretés et caution), pour ne pas être à la merci du
moindre imprévu, ou de l’indélicatesse de l’emprunteur
9 se ménager une capacité de mobiliser (refinancer), sa créance
9 faire correspondre la durée et la forme de rémunération des financements
qu'il octroie et celles de ses propres sources de financement

TYPES DE CREDIT SELON LEUR FORME

L'intermédiaire financier offre deux grandes catégories de techniques :

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CREDITS PAR DECAISSEMENTS CREDITS PAR SIGNATURE


9 Crédit de caisse 9 Crédit de garantie
9 Crédit d’avance. 9 Crédit documentaire
9 Crédit d’escompte
ƒ Billets à ordre
ƒ Traites commerciales
ƒ Warrants
ƒ Factures
Crédit d’acceptation

CREDITS PAR DECAISSEMENT

Les différentes formes de crédit abordées ci-après visent à apporter des


financements aux entreprises.

AVANCE (OU CREDIT) DE CAISSE ("OVERDRAFT FACILITY")

L’avance – ou crédit - de caisse n'est pas représenté par un instrument particulier :


elle résulte d'un contrat qui est généralement écrit, mais qui peut n'être qu'oral.
Cette forme de crédit consiste à permettre à l'utilisateur de devenir débiteur dans
les livres de l'établissement de crédit pour un laps de temps déterminé ou non, et ce
dans le cadre d'un plafond déterminé.
L'utilisation d'un crédit de caisse se fait en général en compte courant21.

• VOLUME :
Le montant utilisé est variable au jour le jour dans le cadre d'une limite bien cernée.
Les limites des crédits de caisse peuvent être fixées aussi bien à de très faibles
niveaux qu’à des niveaux très élevés.

• DUREE :
Sauf pour des opérations tout à fait déterminées, l'échéance ou le préavis
conventionnel sont en pratique rarement inférieurs à un mois ou supérieurs à un
an ; le crédit se proroge fréquemment par des renouvellements successifs de durées
trimestrielles. Des des clauses dites d'accélération peuvent cependant permettre au
bailleur de raccourcir l'échéance, voire de mettre fin à son crédit et de rendre les

21 Compte courant : convention par laquelle deux personnes en relation continue d'affaires
conviennent d'inscrire et de compenser en un seul compte leurs créances et dettes réciproques
successives, dont en fin de compte seul le solde sera exigible.

- 48 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

sommes dues immédiatement exigibles en cas d'événements indiquant que le crédit


du client est ébranlé (publication de protêt, détérioration de ses ratios financiers,
etc.).

• REMUNERATION :
Celle-ci est fonction du temps et du montant prélevé

+C

Plus fort
Limite découvert
Dépassement
-D

Cette rémunération est composée de divers éléments : intérêts et commissions.


L'intérêt est calculé jour par jour sur le solde que présente le compte à la suite de
toutes les opérations inscrites au cours de chaque journée.Le taux est fluctuant; il
pourrait théoriquement varier tous les jours mais en pratique il n'est revu que
périodiquement en fonction suite à des de décisions de l'établissement de crédit.
En Belgique, la fixation des taux d'intérêts se fait dans chaque banque en fonction
de ses appréciation des facteurs économiques et monétaires ambiants, de la
structure et du coût de ses ressources et de ses exigences en matière de marge brute
d'intermédiation. Il y a un taux de base ("prime rate"), c'est-à-dire le taux fixé par la
banque pour ses meilleurs clients. A ce taux de base s'ajoute, pour les autres
clients, une majoration de 1/4% à 2% selon le risque et l'intérêt commercial qu'ils
présentent pour la banque.
Le système de concertation souple qui existait entre établissements de crédit au sein
de l' A.B.B.22 pour une fixation individuelle assez homogène des taux de base a été
abandonné en 1991, à la suite d'une interprétation plus stricte des principes du
Traité de Rome en matière de concurrence. De même, aux Etats-Unis, toute
concertation entre banques est interdite, car elle serait également perçue comme
une cartellisation aux yeux des lois anti-trusts.
Mais on constate dans les faits un grand parallélisme dans la fluctuation des taux de
base de chaque établissement. Il est, en ce moment23 de l'ordre de 6,5 % l'an dans
les grands établissements de crédit belges pour les crédits de caisse en euros.

22 A.B.B. : Association Belge des Banques (groupement professionnel des établissements de


crédit en Belgique).
23 décembre 2002

- 49 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

En dehors de l'intérêt, les banques prélèvent des commissions, qui peuvent être de
divers types :
9 commission d'ouverture de crédit qui est perçue proportionnellement au
montant de la limite autorisée. Il s'agit d'une sorte de prime d'assurance que
paie le client pour la promesse de disponibilité du crédit pendant la période
pour laquelle il a été octroyé;
9 commission sur le plus haut découvert; à la fin d'une période généralement
trimestrielle, le banquier verra quel aura été le solde débiteur le plus élevé
présenté par le compte et calculera sa commission en fonction de ce seul
solde quel qu'ait été l'usage fait du crédit pendant le restant de la période;
9 commission sur dépassement; il s'agit d'une pénalité prélevée lorsque le client
dépasse la limite qui lui a été impartie, et dans la mesure où le dépassement
est autorisé. De telles autorisations son généralement très temporaires et
doivent être dûment motivées.
9 commission d’engagement, prélevée sur la partie non-utilisée du crédit; il s'agit ici
de nouveau d'une sorte de prime d'assurance, qui rémunère l'établissement de
crédit du risque qu'il a consenti à prendre et qui ne serait pas rémunéré par
un intérêt évidemment non perçu dès lors que le crédit ne serait pas utilisé.
En pratique, la rémunération de l'établissement est prélevée comme suit : le dernier
jour d'une période convenue (généralement le trimestre calendrier, quelle que soit
l'échéance du crédit lui-même) on impute le montant des intérêts et commissions
au compte de l'utilisateur. Le montant payé sera lui-même porteur d'intérêts à partir
du début de la période suivante puisqu'il s'ajoute dès cet instant au montant
débiteur du compte de l'utilisateur.
Il s'agit en fait d'un intérêt qui se compose périodiquement.
Exemple d'un schéma de décompte trimestriel :
Intérêt : 6 % l'an du montant journalier utilisé
+ 1/4 % flat de la ligne accordée (commission d'ouverture de crédit)
+ 1/2 % flat sur les dépassements (commission de dépassement).

• ROLE DU CREDIT DE CAISSE :


Ce type de crédit répond évidemment aux besoins fluctuants de trésorerie
journalière des ménages et des entreprises : faire face aux pointes de dépenses par
rapport aux recettes.

• CARACTERISTIQUES POUR L'UTILISATEUR :


Il s'agit d'un crédit souple puisque son utilisation s'adapte exactement aux besoins
effectifs en fonction des fluctuations instantanées de trésorerie, mais c'est un crédit
cher car le bailleur exigera une rémunération d'autant plus élevée qu'il doit faire face
à des variations imprévues dans ses entrées et sorties de fonds; pour l'utilisateur
toujours, ce crédit a l'inconvénient d'être incertain dans son coût, puisque les taux
varient dans le temps selon la seule détermination du bailleur sans que l'utilisateur
puisse les connaître d'avance.

- 50 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

• CARACTERISTIQUES POUR LE BANQUIER :


Il s'agit des crédits dont la gestion est la plus difficile car les besoins de son client
sont imprévisibles; le crédit de caisse peut être assorti d’une garantie spécifique telle
que hypothèque, gages sur marchandises ou fonds de commerce, ou à tout le moins
un mandat (ou promesse) de garantie (voir à ce sujet le chapitre 3 du présent titre).
Un inconvénient spécifique du crédit de caisse provient de ce que le bailleur n'a
aucun contrôle quant à l'utilisation des fonds. En effet, le crédit s'utilise en compte
courant au gré de l'utilisateur, qui peut par exemple détourner un crédit de fonds de
roulement à des fins d'investissement dans lequel cas il ne lui restera plus de
ressources pour faire face à ses besoins de trésorerie courants ; le crédit deviendra
donc "gelé"24 . En raison de l'imprévisibilité de la gestion de trésorerie de
l'emprunteur, et du risque inhérent à ce type de crédit, le bailleur demandera une
rémunération élevée.
Notons enfin que pour l'établissement de crédit, la mobilisation d'un crédit de
caisse est difficile; en effet, le crédit de caisse ne s'appuie pas sur un instrument
mobilisable mais sur une simple convention entre parties; aussi, celle-ci stipule-t-
elle parfois que le bénéficiaire s'oblige à souscrire à la demande du bailleur de crédit
un billet à ordre en représentation du montant du crédit de caisse utilisé. Ce billet à
ordre pourra être, lui, éventuellement mobilisé.

AVANCES A TERME FIXE ("STRAIGHT LOANS")

• DEFINITION :
Il s'agit d'un prêt d'argent, pour un montant déterminé, pour une période
déterminée, dans une devise déterminée. C'est une forme qui est donc plus rigide
que le crédit de caisse. Il se présente comme une inscription en un compte d'avance
d'un montant défini; du fait de la détermination du montant et de l'échéance, cette
forme de crédit se prête plus facilement que le crédit de caisse à sa représentation
sous forme d'un billet à ordre et dès lors à la mobilisation.

• VOLUME :
Cette forme de crédit est généralement utilisée pour des montants relativement
importants.

• DUREE :
Les avances à terme fixe sont consenties pour des durées allant de quelques jours
(par exemple pour combler des écarts de trésorerie) jusqu'à plusieurs années
(crédits d'investissement industriel).

• COUT :

24 Pour éviter ou à tout le moins contrôler ce phénomène, l'établissement de crédit stipulera p.


ex. que le compte courant devra redevenir créditeur au moins une fois par an ou par trimestre.

- 51 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Le taux est en principe un taux fixe convenu au départ, ou un taux variable. Dans
ce dernier cas, on prend généralement pour référence le taux interbancaire du
moment du prélèvement ou du renouvellement, constaté sur écran. A ce taux, le
bailleur de crédit ajoutera une marge convenue (généralement de 1/4 % à 2 %).
Dans les opérations en devises, les taux les plus communément utilisés comme
référence sont ceux du marché interbancaire de Londres : c'est le LIBOR (London
Inter-bank Offered Rate) en dollars. En Euro on parle de Euribor.

• USAGE :
Les avances à terme fixe sont destinées à rencontrer des besoins de financement
prévisibles; elles se font généralement pour des besoins importants.

L'ESCOMPTE

• REMARQUE LIMINAIRE : LES EFFETS DE COMMERCE


Il y a plusieurs catégories d'effets de commerce : le billet à ordre ou promesse
("promissory note"), la lettre de change25 ou traite commerciale ("bill of
exchange" ou "trade bill"), le warrant-cédule.
En Belgique, la législation actuelle concernant les effets de commerce date de 1955,
prise en vertu d'un désir d'harmonisation internationale visant à favoriser la sécurité
juridique des instruments usuels de financement commercial.
Les effets de commerce sont des titres de créance, facilement transmissibles et
négociables; ils constituent des instruments de crédit par excellence.
Les effets de commerce ont les caractéristiques principales suivantes :
9 forme : Il s'agit d'un titre écrit, établi entre un débiteur et son créancier;
9 transmissibilité : par simple endos du créancier à un nouveau porteur et
ainsi de suite en cascade. Ce mode de transmission est plus aisé que celui du
droit commun pour la transmission d'une créance (information du débiteur
cédé), tout en étant juridiquement opposable aux tiers (c'est-à-dire que la
transmission de créances par voie d'endos d'un effet de commerce ne peut
être contestée ni par le débiteur, ni par d'autres tiers intéressés);
9 notion de provision : il doit exister une raison (ex. fourniture de biens, prêt
d'argent) pour laquelle le débiteur a quelque chose à payer au créancier; le
porteur de l'effet aura le cas échéant un privilège sur cette provision. Si un
effet est créé sans que cette provision existe, on parle d'un effet sans cause,
d'une traite de complaisance ou plus familièrement d'une traite "en l'air". On
appelle "traites de cavalerie", en raison de leur chevauchement aux échéances,
les effets créés successivement en chaîne, chacun juste avant le terme du
précédent pour s'y substituer dans le but de proroger le crédit illicitement
obtenu;

25 voir particulièrement lecture sur lettre de change

- 52 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 instrument abstrait : quelle que soit la raison ayant donné naissance à


l'émission de l'effet, le porteur (sauf dans certains cas lorsqu'il est le créancier
d'origine) n'a pas à se préoccuper de cette cause : il peut poursuivre le
débiteur du seul fait de l'existence de l'effet. Il en résulte la non-opposabilité,
au porteur de l'effet, des exceptions soulevée par le débiteur du chef de la
dette sous-jacente : le débiteur doit payer l'effet, même si p. ex. la livraison
des marchandises recouverte par l'émission de l'effet de commerce n'est pas
conforme. Le débiteur devra dans ce cas se retourner en une action distincte
vis-à-vis de son créancier d'origine;
9 sanction : l'effet de commerce, dès lors qu’il a été souscrit ou accepté par le
débiteur, (voir ci-après) est protestable, c'est-à-dire qu'en cas de non-
paiement, il peut être demandé la constatation officielle de carence à un
huissier. En Belgique, le 10 du mois suivant cette constatation, il y aura
affichage du non-paiement au tribunal de commerce et publication au
"Moniteur du Commerce" (périodique privé), sauf preuve fournie à l'huissier
du paiement qui aurait été fait dans l'entretemps. La publicité donnée au
protêt porte gravement atteinte au crédit du débiteur qui dès lors ne
s'exposera à cette "marque d'infamie" qu'en dernière extrémité. Ce dispositif
confère une plus grande sécurité aux créances représentées par des effets de
commerce;
9 procédure accélérée de recouvrement : sur base de l'effet protesté, le
porteur peut obtenir rapidement de la justice l'exécution de son débiteur : le
débiteur cambiaire ne peut obtenir du tribunal les termes et délais que celui-ci
aurait été autorisé à accorder à un débiteur malheureux et de bonne foi;
9 solidarité : le porteur peut se retourner contre n'importe lequel des
signataires qui le précèdent dans la suite des bénéficiaire et porteurs
successifs de l'effet pour autant que le protêt et les notifications aux divers
endosseurs aient été faits dans les délais prévus par la loi; c'est ce qui s'appelle
le recours cambiaire;
9 domiciliation : le paiement de l'effet à l'échéance a lieu au domicile réel du
débiteur ou, plus fréquemment, au domicile conventionnel stipulé sur l'effet.
Il s'agit généralement d'un organisme financier où le débiteur entretient un
compte.

• NOTION D'ESCOMPTE
Tout d'abord, on appelle "escompte" l'opération par laquelle une personne achète à
une autre une créance à terme et remet au cédant au comptant un montant
inférieur au montant qui sera encaissé à l'échéance.
On appelle également "escompte" le coût de l'opération qui vient d'être décrite,
c'est-à-dire la différence entre le montant nominal de la créance et le montant payé
au comptant pour son acquisition; si on ramène l'escompte (dans cette deuxième
acception) au montant nominal de l'effet, compte tenu de la durée restant à courir

- 53 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

jusqu'à l'échéance, on parlera du taux d'escompte de l'opération26 . Ce taux est le


pourcentage annuel équivalent à l'escompte.
L'escompte est généralement pratiqué par les établissements de crédit qui achètent
les billets à ordre ou traites commerciales de leurs clients. Si ensuite les
établissements de crédit ont eux-mêmes besoin de liquidités, ils peuvent à leur tour
réescompter ces mêmes effets auprès d'un organisme mobilisateur (Banque
Centrale, institutions publiques ou privées spécialisées).

• LE BILLET A ORDRE OU PROMESSE


Définition :
Ecrit par lequel une personne, le souscripteur, promet de payer une certaine
somme à une certaine échéance à une autre personne, le bénéficiaire, ou à l'ordre de
ce dernier.
Le bénéficiaire peut être cité nommément ou non (cas du billet au porteur).
Usage :
Le billet à ordre est généralement créé en représentation d'une dette financière et
non d'une dette commerciale : crédits d'investissement, prêts, représentation d'une
avance à terme fixe ou d'un crédit de caisse mobilisable.
En escomptant un billet à ordre, l'intermédiaire financier accorde en fait une avance
à terme fixe, assorti des avantages et des inconvénients propres aux avances à terme
fixe, mais assorti également de tous les avantages de sécurité et de transmissibilité
facile de l'effet de commerce; son inconvénient réside dans le fait de devoir
manipuler du papier, surtout lorsque celui-ci est de faible import et, pour le
débiteur, les sanctions lourdes en cas de difficultés de paiement à l'échéance.
Aux Etats-Unis, de nombreuses sociétés industrielles, commerciales et financières
de standing suffisant, voire des sociétés et agences gouvernementales étrangères,
émettent à répétition des billets à ordre d'une durée maximum de 9 mois comme
source de financement de leurs opérations.
Des courtiers placent ces billets à ordre (appelés "commercial paper" malgré leur
caractère financier) dans le marché monétaire, principalement auprès d'investisseurs
institutionnels, court-circuitant de la sorte le système bancaire (forme du
phénomène de "titrisation", remontant d'ailleurs pour les Etats-Unis à la fin du
XIXe siècle). Ce système est depuis quelques années en usage en Europe ("Billets
de trésorerie" de sociétés en France et en Belgique), les effets étant parfois placés
dans le marché international ("Euro-commercial paper").
Durée :
Du plus court terme (papier commercial) à plusieurs années (crédit
d'investissement). L'échéance du billet à ordre peut être prorogée de l'accord des

26 Cette notion d'escompte "financier" se distingue en outre de l'escompte "commercial" qui est
le rabais accordé par un fournisseur à son client pour le paiement comptant - ou du moins très
rapide - d'une facture.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

parties; on établit à cet effet un nouveau document appelé "allonge" dont c'est la
seule fonction.
Coût :
De même ordre que celui d'une avance à terme fixe avec en principe une légère
réduction du fait de la plus grande sécurité et de la possibilité de mobilisation
offertes par l'instrument.

• LA TRAITE COMMERCIALE OU LETTRE DE CHANGE


Définition :
Ecrit par lequel un créancier (tireur) donne ordre à son débiteur (tiré) de payer une
somme à lui-même ou une autre personne (tiers bénéficiaire), ou à l'ordre de cette
dernière (endossataire - porteur).
Si le tiré contresigne la traite pour accord, il l'"accepte" et s'engage ferme à payer à
l'échéance; sinon il n'est pas soumis aux rigueurs des sanctions prévues (affichage et
publication du protêt) ni à la procédure accélérée de recouvrement.
Le paiement de l'effet peut être garanti par un tiers : cette garantie, appelée "aval",
est donnée sur l'effet ou par acte séparé. Le garant se nomme "avaliste", "avaliseur"
ou encore plus simplement "aval". La loi prévoit que, sans autre indication, l'aval
est réputé donné pour compte du tireur (sous-entendu : en faveur du porteur) - ce
qui empêche alors le tireur de s'en prévaloir lui-même si le tiré fait défaut.
Les personnes parties à une traite commerciale sont donc :
9 obligatoirement au minimum le tireur - souvent un fournisseur en
marchandises - et le tiré (éventuellement "accepteur") - souvent un client
d'une transaction commerciale;
9 facultativement un tiers bénéficiaire, les endossataires successifs, et l'aval.
Technique du crédit :
Un établissement de crédit interviendra lorsque le porteur, ayant besoin de
liquidités, lui demande d'escompter la traite. (Il se peut aussi que la traite soit remise
par le porteur à un de ses propres créanciers en paiement d'une dette).
Dans ce cas, l'établissement de crédit fera l'avance du montant nominal dont il
retient l'escompte, ainsi qu'un montant destiné à le compenser de divers frais,
comme par exemple les frais de recouvrement (voir plus loin).
Comme pour le billet à ordre, la manipulation de lettres de change coûte cher, tant
à l'entrée qu'à la sortie : le recouvrement se fait au "domicile" indiqué, c'est-à-dire à
l'adresse même du débiteur ou plus fréquemment auprès d'un tiers convenu,
généralement le banquier du débiteur.
Usage :
La lettre de change s'emploie essentiellement pour la représentation de créances
commerciales couvrant des biens ou services livrés avec délai de paiement. Elle est
généralement un instrument de courte durée (120 jours de manière courante) mais
peut parfois aller jusqu'à plusieurs années pour des fournitures d'exportation ou de
biens d'équipement.

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Dans le cas où les délais sont longs, il est parfois créé des traites spéciales d'intérêt à
charge du destinataire des fournitures, qui accompagnent la ou les traite(s) en
principal, et qui pourront faire l'objet d'escompte tout comme la ou les traite(s) en
principal.

ESCOMPTE CEDANT VS ESCOMPTE FOURNISSEUR

Les banquiers distinguent entre ces deux formes d'escompte selon que leur propre client est
le fournisseur ou le destinataire de la marchandise dont la vente a donné lieu à la création
de la traite à escompter.

ESCOMPTE CEDANT, EGALEMENT APPELE ESCOMPTE CLIENT

Technique :
Le fournisseur (F) de marchandises a une convention avec son banquier (BF) par laquelle
ce dernier consent à lui escompter des traites tirées sur ses clients (C) en marchandises :
9 (1) à la livraison de la marchandise, le fournisseur (F) tire une traite sur
son client (C) et généralement la lui présente pour acceptation;
9 (2) le client (C) rend la traite acceptée au fournisseur (F);
9 (3) le fournisseur (F) présente la traite à l'escompte chez son banquier
(BF) en cas de besoin de trésorerie;
9 (4) après avoir escompté cette traite, le banquier (BF), s'il garde l'effet
jusqu'à l'échéance, le présente alors au paiement auprès du client (C);
Remarque : si le client (C) ne paie pas à l'échéance, le banquier (BF) fait protester l'effet
et se retourne contre le fournisseur (F) (recours cambiaire).
Usage :
Cas classique où, disposant d'un crédit d'escompte chez son banquier, le fournisseur de la
marchandise accorde à son propre client des délais de paiement contre acceptation d'une
traite.

Tirage(1)
F C
Acceptation (2)

Escompte (3)
Encaissemement (4)

BF

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ESCOMPTE FOURNISSEUR

Technique :
C'est le client (acheteur) de la transaction commerciale qui a une convention avec son
banquier (BC), par laquelle ce banquier se déclare disposé à escompter au fournisseur de
la marchandise (avec qui ce banquier n'a pas - en principe - de relations permanentes) la
traite que le fournisseur tirera sur son client; cette convention prévoit que les frais
d'escompte décomptés par le banquier seront mis à charge du client.
9 (1) le client accepte d'office une traite qu'il remet à son fournisseur en
représentation des délais de paiement accordés au moment de la
vente;
9 (2) le fournisseur signe cette traite en tant que tireur et présente cette
traite au banquier du client (BC);
9 (3) le banquier escompte cette traite, en remettant au fournisseur le
montant nominal (intégral) de la traite, et porte simultanément les frais
d'escompte (agios) en compte à son client;
9 (4) à l'échéance, le banquier débite son propre client, pourvu qu'il y ait
provision en compte;
Remarque : si le compte n'est pas provisionné, le banquier conserve toujours son recours
cambiaire contre le fournisseur; ce dernier n'est donc pas dégagé de son risque même s'il
s'est adressé au banquier de son client.

Acceptation (1)
F C
Tirage (2)

Encaissement (4)

Escompte (3)

BC

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Usage :
Lorsque le fournisseur dans une transaction commerciale veut disposer immédiatement du
produit de sa vente, mais a priori refuse de recevoir une traite en paiement car :
9 - il n'accorde pas de confiance suffisante à son client ;
9 - il ne dispose pas de ligne chez son banquier;
9 - il ne veut pas supporter de charges financières;
9 - l'escompte n'est pas en usage dans la branche considérée,
tandis que son client veut malgré tout obtenir des délais de paiement, ce client peut proposer
au fournisseur de recourir à l'escompte fournisseur auprès de son banquier (celui du client).

En conclusion, dans l'escompte client, le fournisseur remet l'effet à son propre banquier alors
que dans l'escompte fournisseur, il le remet au banquier du client; dans le premier cas, le
prélèvement des agios se fait à charge du fournisseur; dans le second cas, le prélèvement des
agios se fait à charge du client.
Dans les deux cas, toutes choses étant égales d'ailleurs, le montant de la traite est identique,
la rémunération du banquier est identique et le risque de celui-ci est, du moins à première
vue, identique. Toutefois, il faut remarquer que dans le premier cas, le banquier (BF)
réclamera en premier lieu le paiement (et le cas échéant fera dresser protêt) au client-tiré qui
lui est tiers, alors que dans le deuxième cas, le banquier (BC) doit d'abord s'adresser à son
propre client et le protester (ce qui ne manquera pas de mettre ce dernier dans l'embarras,
voire éventuellement en faillite) avant de pouvoir se retourner contre le fournisseur qui lui est
tiers. Il est arrivé que de tels fournisseurs accusent les banquiers escompteurs de les avoir
abusés, du fait que ces banquiers ont accordé un crédit d'escompte fournisseur à leurs propres
clients alors que ces banquiers auraient dû être au courant de la situation financière difficile
de ces derniers.
En principe donc, la distinction entre escompte cédant et escompte fournisseurs devrait se
répercuter sur les coûts, et il devrait y avoir une prime en faveur de l'escompte cédant : en
pratique, les coûts sont généralement équivalents dans les deux cas, mais ceci tient sans doute
au fait que seules des entreprises d'une plus grande surface financière se voient accorder des
crédits d'escompte fournisseur par leur banquier.
En effet, l'évolution de la jurisprudence tend à accroître la responsabilité des banquiers
donneurs de crédits, qui se montrent dès lors plus réticents que par le passé à octroyer les
crédits d'escompte fournisseurs, certains ayant été jusqu'à supprimer les crédits déjà accordés.

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Coût d'une opération d'escompte


On appelle "agios" l'ensemble des prélèvements du banquier au titre d'une
opération d'escompte; ils comprennent :
9 le montant de l'intérêt : c'est la partie principale des agios, auxquels s'ajoutent
éventuellement :
9 une commission de bordereau, couvrant les frais fixes : vérification de ce que
l'effet est dûment signé, accepté, libellé, etc.;
9 une redevance d'escompte forfaitaire;
9 les frais d'encaissement pour présentation de l'effet au domicile du tiré, protêt
en cas de non-paiement, etc.
Le coût du traitement est élevé : c'est l'envers de la médaille de la plus grande
sécurité que cet instrument offre. Par conséquent, cette technique est peu utilisée
pour de petits effets dont le coût de manipulation serait en dehors de toute
proportion avec sa valeur nominale; c'est donc pour les décourager que les
banquiers imposent non seulement une commission de bordereau, mais encore une
redevance fixe par effet.
Pour chaque effet, le taux d'escompte est fixé par les établissements de crédit lors
de l'escompte effectif en fonction des circonstances du moment.
En Belgique, avant 1972, ce taux était directement rattaché au taux officiel
d'escompte fixé périodiquement par la Banque Nationale de Belgique (auquel on
ajoutait une marge), puisque les banques pouvaient à tout moment, en cas de
besoin de trésorerie, y réescompter27 leur portefeuille de traites à concurrence d'un
quota déterminé.
Les établissements de crédit fixent leur taux de base pour l'escompte de la même
manière que pour le taux de base du crédit de caisse en tenant compte de différents
paramètres ambiants : taux du marché interbancaire, taux de réescompte de la
Banque Centrale Européenne, taux des certificats de trésorerie à court terme.
A noter que, d'une manière générale (sauf pour les effets de faible montant),
l'escompte sera moins cher qu'un crédit de caisse.
Les raisons du moindre coût des opérations d'escompte tiennent à ce que :
9 l'échéance et le montant sont fixés et prévisibles;
9 il y a plusieurs signatures contre chacune desquelles le porteur peut se
retourner, ce qui diminue le risque;
9 l'opération de base ayant donné lieu au tirage est mentionnée sur l'effet (pour
qu'il soit admis au réescompte de la Banque Nationale de Belgique) et accroît
sa crédibilité;

27 Réescompter veut dire ici escompter à son tour; à distinguer du réescompte comptable qui est
une opération par laquelle, lors d'une clôture d'écritures, on reporte sur une période ultérieure la
fraction des intérêts enregistrés au cours de la période clôturée mais qui n'y a pas trait.

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9 il y a un privilège sur la provision (marchandises de l'opération commerciale


sous-jacente si elle est identifiable, non fongible, et encore en possession du
tiré);
9 la traite est facilement mobilisable (cf. infra).
Réescomptabilité :
Comme on l'a vu, une banque peut réescompter les traites qu'elle a acquises si elle a
elle-même besoin de trésorerie et ce auprès de la Banque Nationale de Belgique
Le réescompte peut être fait à titre définitif; dans ce cas l'organisme qui prend les
effets au réescompte les présentera aux tirés à leur échéance. Le réescompte peut
également être fait à échéance conventionnelle; on parle alors de remise d'effets "en
pension", ce qui veut dire que l'institution qui remet ses effets au réescompte
s'engage au même moment à les racheter ("repurchase" ou « repo’s ») à une date
convenue, avant l'échéance réelle des effets; elle les présentera donc elle-même aux
tirés lors de cette échéance réelle.
Pour être "bancable" (admis au réescompte à la Banque Nationale), il faut entre
autres que l'effet présente les caractéristiques suivantes :
9 recouvrir une transaction commerciale courante ou un crédit
d'investissement;
9 avoir trois signatures au moins (tireur, tiré, et un tiers endossataire :
généralement l'établissement financier);
9 ne pas avoir été créé plus de 90 jours après la date de la facture qui lui donne
naissance;
9 ne pas avoir plus de 12 mois à courir (mais le réescompte ne peut se faire
pour plus de 120 jours);
9 ne pas avoir fait l'objet d'une renonciation de protêt.
REMARQUE :
Jusqu'à la fin des années 60, la Banque Nationale de Belgique avait un système
compliqué de critères de réescomptabilité, en discriminant les effets par secteur
économique et selon le niveau du circuit commercial (fabricant, grossiste,
détaillant). Elle fixait ainsi de cas en cas les durées maximum que pouvaient
présenter des effets de telle ou telle catégorie. Ce système a été abandonné ce qui a
beaucoup simplifié le traitement des effets.
L'escompte de traites commerciales était très répandu en Belgique après la dernière
guerre. Depuis vingt ans, il s'est fortement réduit. D'une part, la Banque Nationale
de Belgique a pratiqué après 1972 une politique délibérée de taux de réescompte et
d'avances pénalisateurs par rapport au marché afin d'inciter les banques à se rendre
moins tributaires du "prêteur en dernier ressort". D'autre part, la technique des
avances à terme fixe plus économique (pas de papier coûteux à manipuler, ni de
droit de timbre proportionnel28) s'est progressivement substituée aux effets de

28 Supprimé en janvier 1991.

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commerce même si ceux-ci collent de plus près à la réalité économique et sont


juridiquement plus sûrs.
Pour l'avenir, la promotion d'un retour de l'usage de la traite est envisagé : on a
supprimé le droit de timbre (dont l'assiette était réduite au point de ne plus guère
rapporter au Trésor) et on étudie la possibilité de dématérialiser l'instrument ou du
moins de limiter sa circulation physique afin de réduire les frais de manipulation
(soit par instauration de la "traite électronique" pour autant que les problèmes
juridiques - exercice des recours - et de sécurité - vérification des signatures -
puissent être convenablement résolus, soit par l'instauration d'un dépositaire obligé
des traites en circulation qui se chargerait de toute l'administration du système
(escompte, réescompte, recouvrement, protêt, etc.) au moyen d'une procédure
simplifiée, diminuant donc les frais de manipulation).
Remise en gage d'une traite
Au lieu d'être remise à l'escompte, une traite peut être remise au banquier (ou à un
tiers quelconque), en gage d'un autre engagement du remettant.
Pour mettre en gage la créance commerciale représentée par la traite, il suffit au
porteur de l'endosser à son propre créancier, avec la mention "endos à titre de
gage", ou "endos à titre de nantissement", ou encore "endos à titre pignoratif".
L'endos à titre de gage, tout comme l'endos à titre translatif de propriété
(escompte), est opposable aux tiers sans autre formalité.

• LE WARRANT-CEDULE
Définition :
Il s'agit d'un titre double, dont une partie (la cédule) confère à son porteur la
propriété d'une marchandise et l'autre (le warrant) un droit de gage sur cette même
marchandise. A ce titre double, est associé un billet à ordre, qui sert d'instrument de
crédit. Théoriquement, ces différents titres peuvent être séparés et l'étaient
effectivement à l'origine de la technique; en pratique ils restent réunis.
REMARQUE :
pour qu'un gage sur marchandises soit valable, le propriétaire de la marchandise ne
peut la conserver; il doit s'en déposséder entre les mains du créancier gagiste ou
d'un tiers convenu, afin de ne pas, par sa détention, donner aux tiers une
impression de plus grande surface financière qu'il n'en a en réalité.
Dans la pratique, c'est le tiers détenteur, qui a reçu du propriétaire les marchandises
en dépôt, qui lui délivre les formulaires du warrant-cédule. Ce propriétaire des
marchandises endosse ensuite la promesse et le warrant (il remet en fait également
la cédule) au créancier gagiste - qui les conserve pendant la durée du crédit; si ce
dernier est payé à l'échéance, il restituera le warrant-cédule au propriétaire ou à celui
qui lui aura été désigné, aux fins de les présenter à l'entrepositaire qui délivrera la
marchandise contre la seule présentation de ces documents.
A noter que la dépossession des marchandises se fait fréquemment sur place chez
le propriétaire même des marchandises, qui donne alors en location une partie,
isolée et identifiée, de ses propres locaux à la société d'entreposage; celle-ci devient
responsable de la conservation desdites marchandises et de leur restitution contre la

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

remise du warrant-cédule (ou contre un laisser-suivre délivré par le créancier gagiste


dans le cas d'une mise en gage ordinaire).
Le warrant-cédule a sur la mise en gage ordinaire de marchandises l'avantage de ne
pas requérir les formalités habituelles en matière de transmission et de libération du
gage (pas de laisser-suivre à établir).
Usage :
Relativement restreint; s'emploie surtout pour des matières premières et des
marchandises fongibles de grande consommation : par exemple : grain, sucre,
briques, boîtes de conserve, ...
Durée :
Inférieure ou égale à un an.
Coût :
Il se situe entre celui d'un escompte d'une traite commerciale (qui représente une
créance résultant d'une marchandise déjà vendue) et celui du crédit de caisse (où
aucune référence n'existe à l'égard d'une transaction commerciale).
Réescomptabilité :
La Banque Nationale de Belgique fixe la durée maximum qu'elle admettra pour le
réescompte d'un warrant selon la nature des marchandises qu'il recouvre; de même
la Banque Nationale de Belgique détermine la valeur du gage en fixant le prix
unitaire de la marchandise warrantée (p. ex. au kilo) pour lequel elle accepte le
warrant au réescompte. A cet égard, les banques s'alignent généralement sur les
critères de la Banque Nationale de Belgique.

• LA FACTURE
La facture n'est pas, contrairement à l'effet de commerce, un instrument de crédit
par nature; c'est un simple document commercial établi lors d'une livraison de biens
ou de services dans lequel un fournisseur indique à son client la nature, la quantité
et le prix des marchandises vendues ou des services prestés.
En Belgique, à l'issue de la Grande Guerre qui avait largement entamé l'économie
du pays, une loi de relance fut votée le 25 octobre 1919. Destinée à favoriser
l'accès au crédit des classes moyennes (petit commerce, artisans, ...), elle permet,
dans certaines conditions, d'utiliser la facture comme instrument de crédit dans le
chef du vendeur en autorisant de déléguer le bénéfice de la créance résultant d'une
vente commerciale par l'endossement de la facture. La délégation de créance est
valable (opposable aux tiers) à partir du moment où un certain nombre de
conditions particulières sont respectées :
9 la facture doit avoir une échéance fixe;
9 la délégation ne peut être faite qu'en faveur d'organismes agréés à cette fin
par le Ministère des Affaires Economiques (établissements financiers qui en
ont fait la demande; les établissements de crédit agréés par la Commission
Bancaire et Financière sont d'office réputés agréés par le Ministère des
Affaires Economiques).

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9 le banquier endossataire doit transmettre l'original de la facture à son


destinataire; le banquier y joindra une lettre spécifiant qu'il a acquis la créance
conformément à la loi et avertissant le débiteur de la facture qu'il ne peut se
libérer valablement qu'entre les mains du banquier, faute de quoi le débiteur
s'exposerait à payer celle-ci une deuxième fois (ceci au cas où il aurait payé
son fournisseur par d'autres voies, et que ce dernier ne serait plus en mesure
de dédommager le banquier).
La question se pose de savoir si la loi belge peut s'appliquer au destinataire d'une
facture, situé à l'étranger. Si, en cas de faillite de l'émetteur belge de la facture, ses
créanciers doivent obligatoirement reconnaître la validité de la cession au banquier,
il y a par contre un risque certain que le destinataire étranger ne reconnaisse pas la
validité des dispositions belges, et estime s'être libéré valablement s'il a effectué le
paiement par une autre voie qu'entre les mains du banquier cessionnaire. Ce danger
n'existe pas dans le cas d'une créance cédée sous forme d'endos d'un effet de
commerce accepté, pour lequel il existe une législation uniforme dans la plupart des
pays.
Avantages de l'escompte de facture :
9 s'utilise comme instrument de crédit là où la traite n'est pas d'usage, ou
encore là où le fournisseur estime qu'il perdrait son client s'il lui imposait
l'acceptation d'une traite;
9 la formule est plus sûre pour le banquier qu'un simple crédit de caisse, car il
existe à tout le moins présomption qu'il y a livraison de marchandises, que
cette marchandise est conforme, et que le client paiera entre ses mains.
Inconvénients :
9 par rapport à un effet de commerce, la facture offre moins de protection car
elle n'est pas protestable, le débiteur peut opposer au porteur les exceptions
(malfaçons) et il n'y a pas de privilège éventuel sur la provision;
9 l'administration est coûteuse (formalités à respecter, suivi des rentrées);
9 risque particulier si le débiteur de la facture est étranger;
9 le destinataire de la facture, informé par le banquier, peut inférer que son
fournisseur est tributaire de son banquier en matière de crédit, quoique ceci
ne soit évidemment pas anormal.
Remarques :
Tout comme pour les effets de commerce, les banques peuvent acquérir une
facture à titre de propriété, ou se les faire remettre à titre de gage en couverture
d'autres engagements.
Par ailleurs, les banques n'escompteront souvent les factures que pour une partie de
leur valeur (70 % à 90 % de leur montant), car la sécurité offerte est moins grande
que pour les effets de commerce; ou encore les banques exigeront qu'une partie du
produit de l'escompte ne soit pas remise à la disposition du client, mais soit versée
dans un compte de provision indisponible en garantie des impayés éventuels qui
pourraient se révéler ultérieurement pour certaines factures.
A noter que l'endos de factures a rendu possible le développement du factoring en
Belgique. Un "factor" est une personne ou un organisme qui garantit à un

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commerçant le paiement d'un lot convenu de factures. Par extension le "factor",


assumant lui-même la récupération des factures en cause, en fera la plupart du
temps l'avance au commerçant. Aussi, est-il logique pour le factor de se les faire
endosser à titre de sûreté self-liquidating de l'opération.

CREDITS PAR SIGNATURE

CREDITS PAR GARANTIE

Les crédits dits par garantie, par caution, ou par aval (ce dernier vocable étant
surtout utilisé pour une garantie de bonne fin d'un effet de commerce), sont les
crédits par signature par excellence.

• DEFINITION :
Il s'agit d'une promesse faite par un établissement de crédit (émetteur) de
dédommager un tiers (bénéficiaire) des conséquences éventuelles d'une défaillance
dans l'accomplissement d'une obligation future de celui pour compte de qui le
crédit est donné.
A noter que la personne à qui le crédit est accordé est celle qui en demande
l'ouverture (donneur d'ordre), et qui est généralement la même que celle dont
l'obligation est garantie - mais pas nécessairement.

• BUT :
Rendre certaines opérations possibles à celui pour compte de qui le crédit est
donné.
Cela peut par exemple :
9 lui donner accès à des sources de fonds tierces;
9 lui permettre de réaliser des opérations de commerce nationales ou
internationales;
9 lui permettre de faire face à des exigences de diverses administrations
publiques.
Le risque garanti découle parfois de dispositions juridiques complexes - ou floues -
fixées aux termes de négociations entre tiers au garant sur lesquelles ce dernier n'a
que peu d'emprise, ce qui peut être source de difficultés en cas de litiges.

• MONTANT :
Pour les raisons qui viennent d'être évoquées, il n'est pas toujours aisé de définir le
montant de l'obligation garantie; le garant sera avisé de prévoir si possible un
plafond absolu tant en principal qu'en intérêts, frais et accessoires, au-delà duquel il
ne pourra être appelé à s'exécuter.

• DUREE :
De même, il est souvent difficile voire impossible de déterminer à quel moment
l'engagement du débiteur principal ou de son garant prendra fin effectivement.

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Encore une fois, le garant sera avisé, pour éviter d'être tenu indéfiniment,
d'indiquer s'il le peut un terme à la validité de sa garantie.
Reste encore à savoir à partir de quand l'exécution de la caution peut être exigée par
le bénéficiaire.
A un extrême, la garantie peut être appelable à première demande et sans bénéfice
de discussion. Dans ce cas le garant doit s'exécuter dès lors que le bénéficiaire
l'exige dans les formes qui ont été prévues à l'acte. Cela constitue un avantage pour
le bénéficiaire qui, au cas où il en appelle à la garantie, dispose d'un instrument
efficace ; le garant se retournera immédiatement contre le client garantis, pour lui
demander remboursement du montant versé.
A l'autre extrême, la garantie peut n'être exécutable que d'un commun accord entre
donneur d'ordre et bénéficiaire, ou après obtention d'un jugement qui ne serait pas
susceptible d'être remis en cause - "coulé en force de chose jugée". Dans ce cas le
garant doit, à défaut de résolution amiable, attendre la décision judiciaire définitive
sur l'éventuel différend entre donneur d'ordre et bénéficiaire. Ici la situation du
garant est plus délicate, car l'incertitude peut se prolonger quant au fait de savoir si
le client garanti s'oppose de manière fondée à l'appel du bénéficiaire à la garantie et
sa situation peut se détériorer dans l'intervalle.

• COUT :
Les commissions sont souvent calculées "flat", c'est-à-dire indépendamment de leur
durée qui n'est pas toujours connue d'avance. Si cette durée se prolonge, on peut
compter de nouvelles commissions à intervalles périodiques. Pour en déterminer le
coût dans une forme comparable à celle des autres types de crédit, il faut tenter de
ramener le taux de commission à la durée effective probable.
Ceci dit, car seul le risque pur doit être rémunéré, la trésorerie de l'intermédiaire
financier n'étant pas sollicitée dès lors qu'il ne fournit que sa signature (du moins
jusqu'à l'éventuelle exécution de la garantie).
En général, le coût effectif sera de l'ordre de 0,5 % à 2 % l'an, selon la nature et la
qualité du risque.

• QUELQUES TYPES DE GARANTIES BANCAIRES :


aval sur effet de commerce :
Engagement de régler l'effet s'il est impayé à l'échéance; une banque avalisera les
effets tirés sur tel de ses clients pour donner confiance au fournisseur de celui-ci.
caution administrative :
Engagement de la banque de payer à la place de son client si celui-ci ne respecte
pas ses obligations envers une administration publique. De telles cautions sont
données envers l'Administration des Douanes pour couvrir les droits de douane ou
d'accises sur les marchandises achetées par des importateurs, en faveur de
l'Administration des Postes pour garantir les redevances de machines à timbrer par
leurs utilisateurs, en faveur de l'Administration de l'Enregistrement pour garantir le
règlement de droits d'enregistrement dus par les marchands de biens et promoteurs
immobiliers sur leurs transactions, etc ...

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caution judiciaire :
Garantie du paiement de l'objet d'un litige par celui qui se voit condamné en
première instance, mais qui a interjeté appel.
EXEMPLE :
Versement provisionnel réclamé à un employeur qui a été condamné au paiement
d'une indemnité de licenciement à un employé qui a gagné en première instance; si
l'employeur désire interjeter appel, il fera délivrer une caution par son banquier et
s'évitera de faire un dépôt en espèces.
caution en matière de marché public ou privé :
Il y a trois stades dans le processus:
9 au moment de la remise d'une offre par un soumissionnaire : le maître de
l'ouvrage désire s'assurer que le soumissionnaire ne se désistera pas s'il se voit
attribuer le marché et sera capable de le réaliser; un établissement de crédit
sera donc amené à émettre une "garantie de soumission" ("bid bond" en
anglais) comme quoi le candidat adjudicataire lèvera effectivement le marché
s'il lui est attribué; si l'adjudicataire se désiste, l'indemnité de dédit garantie
sera un certain pourcentage (souvent 5 %) de la valeur du marché;
9 pendant la période de fabrication, une fois que le marché a été adjugé :
lorsque l'adjudicataire reçoit une avance sur la commande, le maître
d'ouvrage demandera fréquemment une "garantie de remboursement", c'est-
à-dire une assurance que si le marché n'est pas exécuté, l'acompte lui sera bel
et bien restitué ("repayment bond"); le montant de la garantie portera sur
l'intégralité de l'acompte reçu;
9 à l'achèvement, c'est-à-dire au moment de la livraison : l'adjudicataire aura été
invité à fournir une "garantie de bonne exécution", couvrant la livraison
conforme et le bon fonctionnement de la fourniture ("performance bond");
le montant de la garantie sera d'un certain pourcentage (souvent de l'ordre
de 10 %) du marché.
garantie locative :
A concurrence d'une certaine somme, l'établissement de crédit s'engage envers le
bailleur d'un bien immobilier à l'indemniser en cas de défaut de son locataire de
payer les loyers et de manière plus générale de remplir les obligations qui lui
incombent aux termes du bail, par exemple le remboursement des frais de
réparation au moment de l'évacuation des lieux.
garantie donnée pour un crédit d'investissement :
Certains établissements de crédit qui ne disposent pas de ressources à des termes
suffisamment éloignés, sont néanmoins disposés à garantir le remboursement de
crédits à long terme accordés à leurs clients par d'autres organismes spécialisés dans
ce type de financement, Banque Européenne d’investissement, etc.).
garantie donnée par des maisons mères pour compte de leurs filiales aux banquiers du pays où ces
filiales sont établies, leur donnant ainsi accès aux crédits locaux.

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CREDITS DOCUMENTAIRES

• DEFINITION :
Il s'agit d'un engagement du banquier d'un importateur de marchandises
promettant à un exportateur que celui-ci sera payé par le banquier dans la mesure
où l'exportateur aura remis à ce banquier, dans un délai déterminé, divers
documents relatifs à l'expédition de la marchandise, documents dont le nombre et
la nature ont été dûment spécifiés par l'importateur.
Cet engagement est repris dans ce que l'on appelle la "lettre de crédit" (L/C)
documentaire ("documentary letter of credit").
Les principaux documents que peut réclamer l'importateur comprennent :
9 les factures commerciales;
9 les documents de transport : le connaissement maritime ("Bill of lading"
B/L) (qui n'est pas seulement titre de transport mais donne aussi le droit à la
délivrance de la marchandise et de ce fait peut être mis en gage), la lettre de
voiture terrestre ou aérienne (qui ne donne pas droit à la délivrance de la
marchandise);
9 les documents de preuve quantitative : liste de colisage, liste de pesage,
éventuellement certifiées par des organismes de vérification indépendants;
9 les documents de preuve qualitative : certificats d'inspection, certificats
d'analyse, certificats d'origine;
9 les documents d'assurance : certificats de polices couvrant la disparition ou la
détérioration de la marchandise.

• PROTAGONISTES :
En général quatre au minimum.
9 l'importateur (donneur d'ordre)
9 le banquier (l'émetteur)
9 l'exportateur (le bénéficiaire)
9 le transporteur (qui fournit le document principal).

• BUT :
Résoudre le problème de la méfiance réciproque d'un importateur et d'un
exportateur qui se connaissent mal, ou se connaissent sans se faire une confiance
suffisante, mais qui ont néanmoins le désir de conclure une vente internationale29.

• IDEE DE BASE :

29Rien n'empêche d'utiliser, le cas échéant, la même technique pour une vente conclue dans un
marché intérieur

- 67 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 du point de vue de l'importateur qui désire recevoir la marchandise


commandée : le banquier n'aura l'autorisation de payer l'exportateur que
lorsqu'il aura reçu de celui-ci les documents jugés par l'importateur comme
présomption suffisante de l'expédition conforme de la marchandise
commandée;
9 du point de vue de l'exportateur qui désire être payé : le banquier lui fournit,
par sa signature, la garantie qu'il sera payé s'il fournit les documents stipulés.

• TECHNIQUE :
9 l'importateur demande à son banquier d'ouvrir un crédit en spécifiant le
montant, les documents requis, et la date limite (validité) pour leur
présentation;
9 le banquier incorpore ces données dans une lettre de crédit qu'il envoie à
l'exportateur;
9 au moment de l'embarquement de la marchandise, le titre de transport -
document principal - est établi par le transporteur et remis à l'exportateur;
9 tandis que la marchandise fait route, l'exportateur envoie ce document et les
autres qui auraient été spécifiés au banquier qui a ouvert le crédit;
9 à réception, le banquier vérifie la conformité du (des) document(s) avec les
spécifications de l'importateur figurant à la lettre de crédit;
9 s'il(s) est(sont) conforme(s) et que le délai de présentation n'est pas expiré, le
banquier paie l'exportateur et débite l'importateur;
9 le banquier remet le(s) document(s) à l'importateur, qui prend possession de
la marchandise, à son arrivée, en remettant le titre de transport au
transporteur.
Le banquier encourt une responsabilité importante vis-à-vis de son donneur
d'ordre : celle de ne payer l'exportateur que si les documents reçus de ce dernier
sont strictement conformes aux spécifications de l'importateur, et ceci à la virgule
près. S'il n'y a pas conformité absolue entre les documents et les instructions
initiales, le banquier se couvre en payant l'exportateur "sous réserve" (s'il y a
discordances mineures), ou bien il interrogera son donneur d'ordre avant de payer
(s'il y a des discordances majeures). A remarquer que cette conformité "aveugle"
s'applique aux documents eux-mêmes, et ne concerne pas la conformité de la
marchandise proprement dite.

• TYPES DE CREDITS DOCUMENTAIRES (QUI PEUVENT ETRE COMBINES ENTRE


EUX) :

Crédit irrévocable :
Le banquier s'engage irrévocablement à payer si, avant la date extrême spécifiée
(date de validité), le bénéficiaire lui a remis les documents conformes. A contrario,
les crédits révocables peuvent être dénoncés avant la présentation des documents -
comme on s'en doute, de tels crédits sont très peu usités.

- 68 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Crédit provisionné :
En ouvrant le crédit, le banquier fait confiance à la capacité de l'importateur de
payer lors de la présentation des documents donnant lieu au paiement à
l'exportateur. Si cette confiance est mitigée, le banquier exigera dès l'ouverture du
crédit le versement par l'importateur d'une provision (totale ou partielle).
Crédit documentaire réalisable par acceptation :
Si l’exportateur accorde à son client importateur un délai de paiement après
livraison, le banquier - au lieu de s'engager à payer le bénéficiaire cash à l'arrivée des
documents - peut s'engager à accepter à ce moment une traite tirée sur lui par
l’exportateur à un certain délai de date.
Crédit confirmé :
Si le bénéficiaire n’a pas confiance dans le banquier du donneur d'ordre, il peut
demander que ce dernier fasse garantir son engagement (de payer contre remise des
documents) par un banquier plus notoire, établi dans le pays de l’exportateur ou
encore dans une place reconnue (Londres p. ex.). Le deuxième banquier
"confirme" ainsi le crédit ouvert par le premier.
Crédit notifié :
Le banquier qui ouvre le crédit peut demander à un banquier correspondant dans le
pays du bénéficiaire de transmettre à ce dernier la lettre de crédit sans y attacher sa
confirmation. On dira que ce deuxième banquier "notifie" le crédit au bénéficiaire;
il ne jouerait dès lors que le rôle de boîte aux lettres, s'il ne se montrait également
(ce qui est souvent le cas) prêt à "négocier" les documents (les payer pour compte
du premier banquier), après en avoir vérifié la conformité; il ne peut toutefois y être
contraint puisqu'il n'a pas "confirmé" ledit crédit.
Crédit transférable :
L'exportateur bénéficiaire peut se substituer un autre bénéficiaire. Ce type de crédit
s'utilise lorsque l'exportateur est un intermédiaire qui a acheté à un fournisseur
l'objet à livrer. Lorsque le fournisseur expédie la marchandise, l'exportateur
intermédiaire substituera généralement ses propres documents aux documents
d'origine de son fournisseur.

• DUREE
Le crédit documentaire couvre en principe le temps nécessaire à réaliser la livraison
prévue au contrat de vente sous-jacent, qui peut aller de quelques semaines à
plusieurs mois, voire années, dans le cas de contrats importants et échelonnés. En
cas de besoin, le crédit pourra être prorogé si le bénéficiaire a subi des retards, et
que le donneur d'ordre et le banquier émetteur sont tous deux d'accord d'octroyer
une extension de validité.
Les nécessités du commerce exigent une grande rapidité dans le traitement des
documents : le banquier ne dispose que de peu de temps pour leur vérification, car
l'importateur en a besoin pour lever la marchandise qui peut déjà être arrivée, et
dont l'immobilisation peut lui être portée en compte par le transporteur.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

• COUT :
Le banquier décomptera à son client :
9 une commission d'ouverture de crédit (de l'ordre de 0,1 % à 0,125 % par
trimestre);
9 une commission de confirmation, le cas échéant (de même ordre que la
commission d'ouverture);
9 une commission de paiement (au moment de la réalisation du crédit);
9 une commission d'acceptation (si tel est le mode de réalisation du crédit).
9 les frais annexes, qui peuvent être importants en termes relatifs : frais
d'envois recommandés internationaux, frais de télécommunications, frais de
modifications éventuelles.

• REGLEMENT DE LITIGES
Comme on s'en rend compte, le domaine d'application des crédits documentaires
entre parties de nationalités différentes est varié et complexe. Pour assurer la
sécurité juridique des transactions, la Chambre de Commerce Internationale -
organisme de droit privé - a édicté des "Règles et Usances Uniformes applicables
aux crédits documentaires", auxquelles la plupart des opérateurs conviennent
d'adhérer; ces règles et usances sont périodiquement mises à jour en fonction de
l'expérience, et constituent donc un cadre de référence précieux pour le règlement
des litiges.

CREDITS D'ACCEPTATION

C'est une forme de crédit ressortissant à la fois au crédit par signature (par nature, à
l'origine), et au crédit par décaissement (accessoirement, et par extension).

DEFINITION :

Crédit par lequel le banquier s'engage, dans une limite déterminée, à accepter d'abord
et à négocier ensuite des traites que son client tirera sur lui.
Acceptation signifie aussi bien le fait d'apposer sa signature sur la traite que la traite
acceptée elle-même.

Pour d’autres informations relatives au crédit d’acceptation,


voir en annexe A.

- 70 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

GARANTIES DONT SONT ASSORTIES LES OPERATIONS DE


CREDIT

Lorsqu’un intermédiaire financier accorde un crédit à un client, et accepte donc un


risque sur ce client, il doit veiller au caractère raisonnable de l’opération qui
nécessite son intervention. Dans le cas d’un crédit par décaissement, le client
sera-t-il en mesure de rembourser ? L’utilisation du crédit finance-t-elle une
opération saine ? Dans le cas d’un crédit par signature, le client sera-t-il en
mesure d’honorer ses engagements ? Est-il en mesure de supporter un imprévu
dans l’exécution ?
Le client s’engage à tenir son banquier indemne dans le crédit qui lui est consenti :
il s’engage à rembourser un financement, ainsi qu’à dédommager le banquier des
sommes que celui-ci a dû verser si sa garantie a été appelée. En appui de cet
engagement du client, le banquier peut ne rien exiger, on parle alors de crédit de
notoriété. Le banquier peut aussi exiger de bénéficier lui-même de garanties
fournies par le client.
On distingue entre :
9 garanties réelles : recours sur un bien, on parle aussi de sûretés.
9 garanties personnelles : recours contre une personne, physique ou morale, on
parle aussi de caution.
Entre les garanties réelles bien définies (hypothèque, gage sur marchandises) et les
cautions, il existe toute une série de délégations de droits et de créances dont le
classement en tant que garanties réelles ou personnelles est moins aisé.

GARANTIES REELLES GARANTIES PERSONNELLES

Hypothèque sur immeubles


Cautions
Gage sur marchandises
Lettres de soutien
Gage sur fonds de commerce
Lettres d’intention
Gage sur titres

Délégation de créances et délégation de droits

REMARQUE
On dira aussi, dans le cadre de cette section, un mot des engagements de faire et de
ne pas faire , qui ne sont pas à proprement parler des garanties.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES ENGAGEMENTS OU PROMESSES DE GAGE

ENGAGEMENT DE GARANTIE PRIS EN FAVEUR DU CREANCIER :

Pour épargner les frais d'une hypothèque ou d’un gage au bénéficiaire du crédit qui
présente d'autres éléments de solvabilité jugés suffisants pour le moment, mais
pour se prémunir quand même contre des revers futurs toujours possibles,
l'établissement de crédit peut ne pas exiger une garantie au départ mais se réserver
de la prendre ultérieurement.
Il demandera alors au débiteur un engagement d'hypothéquer ou de gager à
première demande.
Quant à l’engagement d’hypothéquer, il devra être appuyé par un mandat
authentique d'hypothéquer l'immeuble pour que l’intervention du débiteur ne soit
plus nécessaire. Ce mandat est un acte passé par devant notaire qui, remis au
créancier, permet à ce dernier de faire prendre par lui-même l'hypothèque à tout
moment. Pour la prise de gage non-hypothécaire, un tel mandat n’est pas
nécessaire.
Le créancier se prévaudra par la suite de la promesse d’hypothèque ou de gage si un
événement survient qui lui fait douter de la capacité du débiteur de rembourser sa
dette. A noter que si le créancier prend la garantie, mais que celle-ci s'avère
ultérieurement avoir été transcrite dans les six mois et dix jours précédant la date de
déclaration d'une faillite éventuelle du débiteur, le curateur de ladite faillite pourra
ne pas prendre en considération la garantie mais au contraire l'annuler, du fait
qu'elle aurait été prise effectivement dans la "période suspecte".
A remarquer enfin que si le débiteur (par oubli ou par mauvaise foi) a concédé
hypothèque sur le même bien à un autre créancier (ou l'a même vendu) avant que le
mandataire ait exécuté son mandat, le bénéficiaire du mandat ne peut contester le
rang de l'hypothèque prise par l'autre créancier (ou la vente).
Le mandat d'hypothèque ou de gage coûte au départ moins cher que l'hypothèque
ou de gage proprement dit : il lui est appliqué un droit fixe réduit et non un droit
proportionnel.

ENGAGEMENT DE NE PAS ALIENER NI HYPOTHEQUER (DAVANTAGE) UN BIEN EN


FAVEUR DE TIERS :

L'idée est d'obliger le débiteur à conserver le bien non grevé (davantage) dans son
patrimoine tant que le crédit est en vigueur. Il s'agit ici d'une simple "clause
négative" (en anglais : « negative pledge »); si le débiteur ne tient pas parole, c'est-à-
dire s'il aliène ultérieurement son bien ou le grève d'une hypothèque en faveur d'un
autre créancier, le bailleur de crédit n'a aucun moyen juridique de faire annuler la
vente ou l'hypothèque le jour où il s'en aperçoit.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES GARANTIES REELLES

GARANTIES IMMOBILIERES

Hypothèque sur immeuble (30): l'hypothèque requiert un acte authentique, c'est-à-


dire passé par devant notaire et ensuite transcrit au Bureau des Hypothèques.
Avant de passer l'acte, le notaire doit faire des recherches préalables sur l'origine de
propriété, sur les inscriptions déjà existantes, sur les dettes éventuelles envers le fisc
qui a un privilège occulte. Il faut donc rémunérer la responsabilité et le travail
administratif du notaire (il y a un barême dégressif) et payer les droits
d'enregistrement (1 %).
Dans la pratique, le prêt sur hypothèque se fait le plus souvent à concurrence d'une
certaine fraction de la valeur vénale du bien. Dans le crédit hypothécaire
proprement dit (voir plus loin) les prêts en premier rang s’accordent souvent à
concurrence de 60 % à 80 % de cette valeur. Les prêts sur hypothèques
complémentaires sont plus risqués et coûtent dès lors plus cher.

GAGE SUR MARCHANDISES

Pour mettre en gage une marchandise, son propriétaire doit s'en dessaisir entre les
mains du créancier ou d'un tiers convenu (souvent un entrepositaire professionnel)
et passer avec le créancier gagiste un acte établissant le gage, qui peut être sous
seing privé.
La loi prévoit la dépossession pour éviter que des tiers ne croient, par la
constatation de la présence d'une marchandise chez le débiteur, que la solvabilité de
celui-ci est plus grande qu'elle ne l'est en réalité.
Pour éviter des déplacements coûteux de marchandises, celles-ci peuvent être
conservées dans des locaux du propriétaire, à charge alors pour celui-ci d'isoler ces
locaux et de les louer au tiers convenu qui doit y apposer des pancartes indiquant
qu'ils lui sont loués.
Notons encore le cas de marchandises flottantes qui se trouvent entre les mains de
transporteurs et mises en gage au profit des établissements de crédit qui
interviennent dans le commerce international : cette mise en gage s'effectue par
l'endos du connaissement maritime en faveur du banquier qui a ouvert un crédit
documentaire.

(30)En Belgique, une hypothèque porte sur des biens immeubles : terrains, bâtiments et leurs
prolongements (biens immeubles par destination, c’est-à-dire matériel utile à l’exploitation
du fonds ou incorporé à l’immeuble tel qu’ascenseurs, cabines à haute tension, etc.), ainsi
que sur des bateaux ou des avions.

- 73 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

GAGE SUR FONDS DE COMMERCE

Pour remédier à la difficulté de prendre garantie sur divers éléments d'actifs d'une
entreprise qui peuvent pourtant servir d'assiette à une opération de crédit (par
exemple le matériel roulant) et pour simplifier les procédures ordinaires plus
lourdes de mise en gage des autres éléments du patrimoine d'une entreprise, le
législateur belge a par la loi du 25 octobre 1919 institué le gage sur fonds de
commerce. Ainsi, ce gage ne requiert pas la dépossession des biens normalement
exigée pour des gages sur biens meubles, ni la signification aux débiteurs pour la
cession de créances.
Pour assurer la publicité nécessaire à la mise en gage sur fonds de commerce, en
même temps que pour lui donner date certaine, l'acte doit être soumis à la formalité
de l'enregistrement et transcrit au Bureau des Hypothèques. Les droits
d'enregistrement sont de 0,5 % du montant de l'inscription. A noter que l'acte lui-
même ne doit pas être passé sous forme authentique, un acte sous seing privé est
suffisant.
Selon la définition du droit belge, le gage sur fonds de commerce peut couvrir
l'ensemble des éléments suivants : l'enseigne, les marques et brevets, le droit au bail,
la moitié des stocks, les créances, le matériel - en fait tout l’actif sauf les immeubles
et la moitié du stock. Pour ce qui concerne le matériel qui serait immeuble par
destination, il y a risque de concurrence avec une hypothèque qui aurait été prise
sur l'immeuble comprenant ce même matériel : dans ce cas, c'est la première
inscription qui prime l'autre.
Seuls peuvent prendre un gage sur fonds de commerce les organismes agréés par le
Ministère des Affaires Economiques (intermédiaires financiers qui en font la
demande; les établissement de crédit agréés par la Commission Bancaire et
Financière sont automatiquement agréés en matière de gage sur fonds de
commerce).
Le gage sur fonds de commerce est une garantie plus aléatoire que l'hypothèque,
car les éléments du fonds de commerce - qui restent entre les mains de l'entreprise -
sont soumis à des fluctuations constantes au gré des opérations de cette entreprise.
Le créancier gagiste ne peut pas exiger que l'on revienne ultérieurement sur les
cessions des éléments du fonds de commerce qui ont été faites à des acquéreurs de
bonne foi.

CLAUSE DE RESERVE DE PROPRIETE

Une banque peut se faire céder le droit de propriété qu'un vendeur se réserverait
sur un bien vendu.
En Belgique, contrairement à ce qui se passe dans d'autres pays
("Eigentumsvorbehalt" en Allemagne, p.ex.), le droit de propriété que le cédant
d'un bien se réserve sur celui-ci jusqu'à l'accomplissement des obligations de son
débiteur n'a d'effets qu'entre parties (et encore, des restrictions existent notamment
dans le cadre de la loi sur le crédit à la consommation, voir plus loin). La réserve

- 74 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

sur ce droit n'est donc pas opposable aux tiers, en cas de saisie ou de faillite en
particulier.
L'inscription d'une clause de réserve de propriété dans un contrat peut dès lors se
révéler assez illusoire, notamment vis-à-vis d'une personne qui aliénerait de
mauvaise foi le bien acheté.

GAGE SUR TITRES

Pour mettre des actions ou obligations en gage, il suffit également d'un acte sous
seing privé; comme pour la mise en gage de marchandises, la formalité de
l'enregistrement n'est pas requise sauf en matière civile pour en assurer
l'opposabilité aux tiers.
Pour ce qui est des titres au porteur, la dépossession se fait soit entre les mains du
créancier (établissement de crédit), soit d'un tiers convenu (établissement de crédit
tiers).
Pour ce qui est des titres nominatifs, la mise en gage doit être notifiée à la société
émettrice des titres, et doit être mentionnée dans le registre de ses actionnaires.

GAGE SUR CREANCES

On a déjà parlé de certaines formes de mise en gage de créances commerciales par


endossement à titre pignoratif de traites ou de factures ou encore dans le cadre de
la mise en gage du fonds de commerce.
Hormis ces cas, la mise en gage de créances postulait jusqu'en 1994 le respect d'un
formalisme assez lourd (art. 1690 du code civil). Il fallait que la délégation de la
créance au profit du créancier gagiste soit signifiée par huissier au débiteur (ou
reprise dans un acte notarié) et dûment enregistrée pour être opposable aux tiers.
Ce formalisme lourd était, en Belgique, un frein à la titrisation de créances (création
d'un titre cessible représentatif d'un lot de créances en portefeuille). Une
modification législative spécifique de 1994 y a remédié. Aujourd'hui, toute créance
peut être cédée par simple notification au débiteur ou par reconnaissance de celui-
ci; une telle cession est opposable aux tiers sans autre formalité.
On peut aller jusqu'à mettre en gage des créances futures, mais elles doivent être
déterminées ou déterminables : ce sera le cas d'une délégation de loyers à naître
d'un contrat de bail existant.

DELEGATION DU BENEFICE DE POLICES D'ASSURANCE

Le débiteur peut offrir à son bailleur de crédit la délégation du bénéfice de polices


d'assurance sur ses biens (assurance-vol et incendie), sur ses créances (assurance-
crédit, police Ducroire) ou sur sa vie (assurance-décès, vie ou mixte). Cette
délégation s'opère par un avenant à la police signé conjointement par le débiteur, le
créancier et la compagnie d'assurance.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Si le risque se réalise, c'est l'établissement de crédit qui touche l'indemnité


d'assurance à concurrence de sa créance. Le surplus est évidemment versé au(x)
bénéficiaire(s) originel(s).

AUTRES GARANTIES

CAUTION

C'est la garantie personnelle par laquelle un tiers au débiteur s'engage envers le


créancier (ici l'établissement de crédit) à l'indemniser si le débiteur ne satisfait pas à
ses obligations.
Une garantie peut être stipulée solidaire dans lequel cas le bénéficiaire a le droit
d'appeler le garant à l'indemniser de la défaillance du débiteur principal dans
l'accomplissement de son obligation, dès que celui-ci se trouve en défaut, et ce dans
les mêmes conditions que lui. D'autre part, une garantie peut être stipulée
indivisible, dans lequel cas les héritiers ou ayants-droit qui auraient accepté une
quote-part de la succession du garant ne pourraient pas se prévaloir de la faculté de
répartir entre eux selon cette quote-part l'engagement pris par le garant, chacun
d'eux étant tenu pour le tout.
En matière civile, la solidarité et l'indivisibilité ne se présument pas : elles doivent
être expressément mentionnées dans l'acte de garantie. Lorsque la garantie est
solidaire, elle emporte automatiquement pour le garant renonciation au bénéfice de
discussion et de division.
La caution peut être donnée par les actionnaires (personnes physiques ou maison-
mère) ou encore par les administrateurs ou par les pouvoirs publics (Etat ou
régions) pour les crédits accordés à une entreprise, par des membres de la famille
ou des amis pour les crédits accordés à des particuliers; par des banques ou des
compagnies d'assurance pour les crédits accordés par d'autres établissements de
crédit à leurs clients.
En dehors des limitations que tout garant s'imposera normalement à lui-même
quant aux risques qu'il est disposé à assumer sur autrui, il y a une limite pratique
aux cautions qu'une société-mère émettra en faveur de ses filiales, car ces cautions
sont inscrites dans les comptes d'ordre repris en annexe des comptes annuels; si ses
engagements par caution sont trop importants, la société-mère en verra sa propre
capacité de crédit limitée, notamment de la part de ses banquiers.
Remarque importante : en Belgique, une société ne peut donner sa garantie que si
cette garantie entre dans le cadre de son objet social ou qu'elle y a un intérêt
légitime (par exemple lorsqu'une maison-mère donne sa caution pour couvrir des
crédits accordés à sa filiale).

LETTRE DE SOUTIEN

Pour éviter l'écueil de voir leur capacité de crédit limitée, les maisons-mères ont eu
au fil du temps une tendance à proposer comme "garantie", à la place de leur

- 76 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

caution en bonne et due forme, des lettres dites de soutien ou de patronage,


appelées également lettres d'intention ("letter of intent") ou lettres de réconfort
("comfort letter"); il y est généralement exprimé l'intention de la maison-mère de
soutenir sa filiale, voire d'en rester actionnaire, tant que le crédit accordé à cette
dernière restera en vigueur; ces lettres ne comportent pas d'engagement de payer le
créancier à la place du débiteur en cas de défaillance de celui-ci. N'étant ainsi pas
une caution à strictement parler, les effets de telles lettres de soutien sont souvent
plus moraux que juridiques; de tels "engagements" ne doivent dès lors pas figurer
dans les comptes d'ordre de la société qui les émet. Une forme plus édulcorée
encore de lettre de soutien est la lettre de déclaration de connaissance ("letter of
awareness"), par laquelle la maison-mère reconnaît simplement qu'elle est au
courant du crédit accordé à une filiale qu'elle a intérêt à voir respecter ses
engagements.

ENGAGEMENT DE FAIRE, DE NE PAS FAIRE

Les établissements de crédit assortissent fréquemment leurs ouvertures de crédit de


diverses clauses par lesquelles les débiteurs s'engagent :
9 soit à faire certaines choses : prendre des assurances sur des immeubles ou
des marchandises, conserver des ratios minima de structure bilantaire, fournir
leurs rapports annuels, laisser contrôler la comptabilité, etc ...
9 soit à ne pas faire certaines choses ("clause négative" - "negative pledge") : ne
pas contracter de nouveaux emprunts sans autorisation du créancier, ne pas
fusionner avec d'autres sociétés sans la même autorisation, ne pas vendre
certains éléments de l'actif, ne pas conférer de garanties à d'autres créanciers
à moins d'en faire profiter, à parité de rang, le bailleur de crédit (clause dite
"pari passu"), etc ...
Il ne s'agit pas en l'occurence de garanties proprement dites, mais d'engagements
dont on ne doit toutefois sous-estimer l'importance, car la sanction pour le débiteur
qui y contrevient est généralement la faculté pour le créancier de mettre
immédiatement fin au crédit; en souscrivant à ces engagements, le débiteur restreint
donc considérablement sa liberté.

TYPES DE CREDIT SELON LEUR USAGE

En cette section, seront passés en revue certains types de crédit et les garanties qui
y sont associées, face aux différentes catégories de besoins des entreprises et des
particuliers.
Divers besoins des entreprises peuvent être rencontrés par :
9 les crédits d'investissement (p. ex. financements de construction d'immeubles
ou d'acquisition de matériel);

- 77 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 les crédits pour le financement à la grande exportation (p. ex. fourniture par
un ensemblier d'usines clé sur porte à l'étranger);
9 les crédits de campagne (p. ex. crédits saisonniers, de récoltes);
9 les crédits de fonds de roulement.
Divers besoins des particuliers peuvent être rencontrés par :

9 les crédits hypothécaires (financements de logements);


9 les crédits d'installation professionnels (p. ex. pour les professions libérales);
9 les crédits à la consommation (pour des biens durables comme pour des
services éphémères ainsi que pour le financement de fonds de roulement).
Pour chaque type de crédit, on tâchera de déterminer les principaux paramètres tels
qu'ils ont été examinés dans la deuxième partie du cours ci-avant. Pour rappel ces
paramètres étaient, en ordre principal :
9 l'objet : si beaucoup de crédits qui viennent d'être mentionnés ont pour objet
des biens déterminés, les crédits de fonds de roulement financent des besoins
généraux des entreprises et des particuliers;
9 la fonction temps;
9 la sortie de l'opération (ce par quoi le crédit sera remboursé);
9 la forme et les instruments;
9 le coût;
9 les garanties associées au crédit envisagé.

CREDITS FINANÇANT LES BESOINS DES ENTREPRISES

LES CREDITS D'INVESTISSEMENT

• OBJET :
L'objet d'un crédit d'investissement est le plus souvent parfaitement déterminé : par
exemple financer l'achat d'un terrain, la construction ou l'aménagement d'une usine,
et ce en comprenant les intérêts intercalaires et autres frais à exposer avant la mise
en exploitation de l'investissement; l'acquisition de matériel et parfois les études
associées (brevets, programmes informatiques); il arrive aussi que le crédit
d'investissement finance la reconstitution du fonds de roulement entamé par des
investissements déjà réalisés et en exploitation au moment de l'accord du crédit.

• VOLUME :
Les montants des crédits d'investissement sont souvent élevés, ce qui les conduit
fréquemment à être consortialisés entre plusieurs partenaires pour réduire leurs
risques individuels.

• TEMPS :

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

La durée d'un crédit d'investissement peut aller du moyen terme au long terme : elle
s'étend généralement sur une période de deux ans à quinze ans, avec une
prépondérance allant vers la période de sept à douze ans. L'échéance finale sera
fonction de la durée économique du bien, qu'elle ne peut en principe excéder.
Un plan de prélèvement sera élaboré tout comme un plan de remboursement.
Généralement, au plan de prélèvement sera lié le problème du maintien du taux
d'intérêt fixé à l'origine; en effet, lorsque l'entreprise dispose d'un crédit long terme,
elle ne souhaitera procéder au prélèvement qu'au fur et à mesure des besoins
effectifs pour minimiser les charges financières.
Deux techniques peuvent être suivies :
9 prélever le tout en une fois, et placer ce qui ne doit pas être affecté tout de
suite à des échéances échelonnées pour rencontrer les besoins réels; mais
d'une part le taux de replacement est fréquemment inférieur au taux
d'emprunt à long terme et d'autre part l'établissement de crédit répugne à
donner à l'entreprise la disposition de fonds non affectés à leur véritable
objet : l'établissement de crédit imposera dès lors fréquemment que pour
prélever, l'entreprise doit justifier de cette affectation par la production de
factures à payer relatives à l'investissement projeté;
9 prélever le crédit en deux ou plusieurs fois, au fur et à mesure des besoins
réels; dans ce dernier cas, si le programme de prélèvement est étalé,
l'établissement de crédit peut rendre le taux de chaque tranche égal à celui en
vigueur au moment effectif du prélèvement, ce qui rend évidemment le coût
variable, surtout en période de volatilité des taux d'intérêt; souvent ceci ne
rencontre pas les préférences de l'investisseur qui souhaite la plupart du
temps disposer d'un taux fixe sur lequel sont basées ses projections
financières; des techniques de "hedging" (couverture) par des futures sur taux
d'intérêt peuvent être utilisées pour y parer.
Pour le plan de remboursement, diverses formules sont utilisées :
9 remboursement intégral en une seule fois à la fin de l'opération : "bullet
repayment".
9 remboursements partiels périodiques égaux ou inégaux :
9 remboursements de capital constants avec paiement d'intérêts décroissants
sur le solde restant dû;
9 remboursements par annuités (capital + intérêts) constantes;
9 remboursements ad-hoc irréguliers; si on reporte un remboursement
substantiel à l'échéance finale, on parle d'un "balloon repayment".
REMARQUE :
L'entreprise demande parfois une "franchise", c'est-à-dire un délai de grâce avant
de commencer à rembourser le principal (le délai de franchise est souvent de 2 ou 3
ans après prélèvement complet).
EXEMPLE : SYSTEME CLASSIQUE :
Soit un prélèvement sur deux ans, puis dix remboursements égaux après deux ans
de franchise.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Prélève- Franchise Remboursement


ment

• SORTIE DU CREDIT :
Les fonds destinés au remboursement proviendront généralement du cash flow
produit par l'activité générée par l'investissement financé; dans d'autres cas, il
pourra s'agir de la réalisation d'autres éléments d'actifs (vente d'usines désaffectées,
liquidation de titres en portefeuille).

• INSTRUMENTS :
Les instruments généralement utilisés en matière de crédits d'investissement sont :
9 le billet à ordre (surtout pour les financements octroyés par les établissements
de crédit);
9 les obligations (surtout pour les financements octroyés par les investisseurs
institutionnels).
Les principales différences entre billets à ordre et obligations sont :
9 le billet à ordre est un effet de commerce endossable et protestable;
9 l'obligation est un titre de créance, cessible par simple tradition si elle est au
porteur (éventuellement négociable en bourse), et régie par des règles
particulières, notamment en cas de renégociation ou de défaillance de
l'emprunteur : régime d'assemblée d'obligataires.
Mais on peut aussi accorder des crédits d'investissement par de simples avances en
compte, étayées uniquement par une convention d'ouverture de crédit; il s'agira
d'avances soit à taux fixe jusqu'à l'échéance finale, soit à taux révisibles à intervalles
périodiques (roll-over).

• COUT :
Le coût d'un crédit d'investissement est composé d'éléments standards.
Intérêts :
Les intérêts peuvent être fixes ou variables.
Si le taux est variable, il est révisé en fonction de taux interbancaires de durée
correspondante, le taux de référence dit IRS (Interest Rate Swap), ou Euribor.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Aux termes de cette clause, après la période convenue, trois cas peuvent se
produire :
9 les taux ont baissé : on rajuste le taux vers le bas;
9 les taux sont restés inchangés (moins de 0,25 % de variation) : aucun
ajustement n'est apporté;
9 les taux ont haussé : on rajuste le taux vers le haut.
Coûts accessoires :
Outre les intérêts, viennent s'ajouter divers éléments, parfois non négligeables :
9 coût de prise des garanties (hypothèque, gage sur fonds de commerce);
9 commissions d'ouverture de crédit ou de réservation : il s'agit d'une
commission prélevée le cas échéant sur la partie non encore utilisée du crédit.
9 pénalité en cas de remboursements anticipés : le débiteur peut avoir la faculté
de rembourser son crédit avant les échéances prévues si le cash flow de
l'entreprise le permet; il doit alors payer une pénalité dite "prime de
remboursement" ou "prime de réemploi"; celle-ci est généralement calculée
en fonction de la durée restant à courir, et de la différence entre le taux
contractuel et les taux de marché à ce moment. Elle peut aussi être
forfaitaire. Dans le cas de crédit à taux variable, il est d’usage que le
remboursement anticipé soit possible, sans pénalité, aux dates de révision de
taux.
9 coût des expertises comptables et industrielles préalables et périodiques
éventuelles.

• FISCALITE :
En principe il n'y a pas d'impôts particuliers à payer sur les crédits à long terme, dès
lors qu'ils sont accordés par des intermédiaires financiers professionnels. On
prévoit parfois, mais alors surtout dans les crédits internationaux, que si des taxes
particulières nouvelles sont mises à charge de l'emprunteur au cours de la vie de
l'emprunt, que ce soit sur le principal ou sur les intérêts, le débiteur aura la faculté
de rembourser par anticipation sans pénalité.

• GARANTIES :
Les crédits d'investissement étant des crédits à long terme, dont le risque augmente
avec la durée totale, ils sont fréquemment assortis de garanties réelles : hypothèque
sur terrains et immeubles, gage sur fonds de commerce, gage sur d'autres biens
réels (marchandises), nantissement de titres.
En matière de garanties personnelles, on demandera éventuellement la caution de
certains actionnaires ou administrateurs; si le crédit doit être accordé à la filiale
d'une autre entreprise, ce sera donc la caution de la maison-mère (ou
éventuellement une lettre de soutien) qui sera demandée.
Ces crédits constituent aussi un champ d'application fertile pour les clauses
négatives.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

• ATTITUDE DES POUVOIRS PUBLICS VIS-A-VIS DES CREDITS


D'INVESTISSEMENT :

L'investissement conditionnant souvent la reprise ou le maintien de l'activité


économique et partant le bien-être social, il n'est pas étonnant de voir dans les
financements s'y rapportant un champ d'action des pouvoirs publics. Ceux-ci
agiront principalement au travers des trois derniers paramètres cités : le coût en
intérêt, la fiscalité et les garanties. Le subside en intérêt est particulièrement justifié
lorsque le taux d’actualisation social est significativement inférieur au taux de
marché.

De plus amples détails sur la politique d’encouragement des crédits


d’investissements en Belgique sont fournis en annexe B.

LES CREDITS A LA GRANDE EXPORTATION

• OBJET :
L'objet est généralement déterminé : par exemple financer la fourniture d'une usine
clés sur porte, l'exécution d'un contrat de livraison de biens d'équipement, etc.
Se pose la question de savoir ce qu'est la "grande exportation" - de moins en moins
on considère les fournitures intracommunautaires européennes comme de la
grande exportation, d'autant que les directives européennes tendent à empêcher la
subsidiation directe ou indirecte dans les échanges intérieurs de l'Union.

• TEMPS :
La durée peut varier de 1 à 15 ans; une durée de 5 ans est fort courante; la durée
effective sera fonction :
9 des délais d'études, du plan de fabrication et des délais de livraison;
9 des délais de paiement accordés à l'acheteur;
9 de certains arrangements officiels nationaux ou internationaux (possibilité
d'obtention d'une police Ducroire, existence d'une convention de
financement d'Etat à Etat ou de la Banque Mondiale).

• SORTIE DE L'OPERATION :
Le remboursement est assuré par l'encaissement des créances sur l'acheteur, qui
sont la plupart du temps soit rachetées par le prêteur, soit prises en nantissement
des crédits qu'il accorde.

• INSTRUMENTS :
9 traite commerciale
9 billet à ordre
9 acceptation bancaire (dans ce cas, l'établissement de crédit se fera remettre en
gage - s'il y en a - les traites commerciales tirées sur l'acheteur par endos
pignoratif);

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9 crédit en compte (roll-over), qui peut être libellé en devises, si l'opération ne


l'est pas dans la monnaie locale de l'exportateur.

• COUT :
En Belgique, les opérations à la grande exportation sont refinancées dans le chef
des établissements de crédit en bénéficiant de l'intervention de l'Etat par le
truchement d'un organisme appelé Finexpo(1), dépendant des Ministères des
Finances et du Commerce Extérieur.
Dans d'autres pays, des banques spécialisées privées (merchant banks) ou publiques
(ex. Banque Française du Commerce Extérieur, Eximbank) fournissent
l'infrastructure au financement des opérations à la grande exportation.

• GARANTIE :
Comme garantie spécifique à l'opération financée, l'établissement de crédit prend
généralement en gage la créance sur l'acheteur, objet du financement, ainsi que les
polices d'assurance couvrant la même créance à savoir généralement une police
d'assurance- crédit pour le risque commercial (défaillance de l'acheteur) et une
police ducroire pour le risque politique (empêchement par les autorités du pays de
l'acheteur de fournir les devises ou de permettre le transfert).
En Belgique c'est l'Office National du Ducroire (O.N.D.), organisme public
bénéficiant de la garantie de l'Etat qui assure le risque politique; jusque récemment
il a également eu des conventions de partage (et de réassurance) du marché de
l'assurance-crédit avec la Compagnie Belge d'Assurance-Crédit (COBAC), laissant à
celle-ci et à la Compagnie des Assurances-Crédit de Namur (sociétés de droit privé)
leur domination traditionnelle en matière de couverture des risques commerciaux
sur l'Europe. En 1993, la situation a évolué, l'O.N.D. prenant à coté de son
homologue français, la S.F.A.C., une participation significative dans le capital de la
COBAC, estompant, ici aussi, les frontières entre organismes publics et sociétés
privées.

• MONTAGE :
Etant donné qu'il s'agit fréquemment de financer des montants élevés, le cas
échéant en devises étrangères, pour de longues durées, dans des cadres contractuels
internationaux complexes, avec à l'occasion l'appui ou l'intervention d'organisations
gouvernementales et intergouvernementales, ces opérations doivent être taillées sur
mesure pour en circonscrire les risques dans des conditions de coût acceptables.
C'est souvent de la qualité du montage financier que dépend la réalisation du projet
par rapport aux projets concurrents. Ils font donc l'objet d'équipes spécialisées en
"project financing", qui intègrent diverses techniques, pour apporter des solutions
appropriées aux exigences multiples et souvent difficiles à concilier des problèmes
soulevés. Une fois mis au point, les financements de tels projets peuvent être

(1) Finexpo ne peut intervenir en faveur d'exportations à destination de pays de l'Union


Européenne, sous peine d'y créer des distorsions de concurrence prohibées par le Traité de
Rome.

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proposés en partage par consortialisation à des partenaires multiples pour en


répartir les risques.

CREDITS DE CAMPAGNE

• OBJET :
L'objet n'est en principe pas individualisé, mais global : il s'agit par exemple de
financer une campagne agricole (financement de la récolte et éventuellement de sa
transformation); une campagne de vente de collection d'habillement; ...

• DUREE :
Généralement il y a des cycles périodiques, exemples : campagne sucrière une fois
par an; campagne de vente d'articles de mode deux fois par an.

• SORTIE :
Elle est généralement assurée in fine par la vente des marchandises produites, alors
que le crédit s'accorde en principe avant de connaître les destinataires de ces
marchandises.

• INSTRUMENTS :
9 warrant : pour la période de stockage;
9 traite commerciale ou acceptation bancaire : pour la période de délai de
paiement accordé à l'acheteur;
9 avance à terme fixe;
9 crédit de caisse.

• COUT :
Il dépend de l'instrument utilisé; il s'articulera la plupart du temps sur les taux
d'intérêt à court terme.

• GARANTIES :
Nantissement de marchandises (warrants), cession de créances, délégation du
bénéfice de polices d'assurance, gage sur fonds de commerce.
Remarques :
9 les modalités choisies (instruments, durée, garanties) dépendront des
caractéristiques et usages en vigueur selon les secteurs d'activités;
9 l'établissement de crédit refusera parfois d'accorder son concours pour la
campagne suivante, si le crédit de campagne précédent n'a pas été remboursé
ou à tout le moins n'a pas été ramené à un niveau jugé acceptable en fonction
des caractéristiques du secteur.

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CREDITS DE FONDS DE ROULEMENT

• OBJET :
Indéterminé : en fait c'est un ensemble d'éléments de l'actif à court terme (stock de
matières premières, encours de fabrication, produits finis, créances sur débiteurs,
...) qui est à financer.

• DUREE :
La durée est la plupart du temps indéfinie; le crédit est assez permanent, et
fonctionne comme un accordéon pour absorber les soufflets de trésorerie du
débiteur. Aussi l'établissement de crédit veille-t-il à ce que le crédit ne soit pas gelé
(c'est-à-dire utilisé à plein en permanence), ce qui serait contre nature. A cette fin,
il peut exiger que l'utilisation du crédit passe par un étiage (par exemple le point
zéro) selon une périodicité convenue (une ou plusieurs fois par an).
La nature particulière de ce type de crédits détermine l'échéance : en règle générale,
on prévoit une échéance variable par notification d'un préavis (de 1 à 3 mois), ou
encore une échéance fixe relativement proche (de 3 mois par exemple), mais
assortie d'une convention de renouvellements successifs de commun accord.

• SORTIE :
Elle est assurée par les recettes générales de l'entreprise (produit des ventes).

• INSTRUMENTS :
Traites commerciales, acceptations bancaires, factures, warrants, ou crédits en
compte purs et simples; très souvent des crédits "mixtes" sont accordés, c'est-à-dire
qu'ils prévoient la possibilité de recours aux différents types d'instruments, le cas
échéant des sous-limites étant imposées pour les formes les plus risquées, c'est-à-
dire les acceptations bancaires et surtout le crédit de caisse.

• COUT :
En fonction des instruments et du terme.

• GARANTIES :
C'est la structure financière de l'entreprise qui sera le premier élément de sécurité de
ce type de crédit; en cas de besoin, tous les éléments du fonds de roulement (actifs
circulants) peuvent servir de garantie spécifique, c'est-à-dire surtout le stock et les
créances; le gage sur fonds de commerce fournira une couverture mobile globale
sur les créances et la moitié du stock; parfois, une hypothèque ou un mandat
d'hypothéquer sera pris par l'établissement de crédit, si les éléments précédents ne
sont pas considérés comme suffisants, ou à leur défaut il sera demandé la garantie
d'actionnaires ou encore de l'Etat, de la Région ou du Fonds de Garantie.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CREDITS FINANÇANT LES BESOINS DES PARTICULIERS

LE CREDIT HYPOTHECAIRE

• INTRODUCTION
Le crédit hypothécaire, comme son nom l'indique, concerne les crédits qui sont
fondés sur le gage immobilier selon la technique séculaire de l'hypothèque qui
remonte à l'Ancien Régime. Dans le droit belge, la loi hypothécaire date de 1851.
Cette forme de crédit est pratiquée par des organismes spécialisés (caisses
hypothécaires et caisses d'épargne) qui dans de nombreux pays prennent une forme
mutualiste ou coopérative (building societies, savings & loan associations,
Raiffeisenkassen), mais aussi par des compagnies d'assurance et des banques; en
Belgique, les I.P.C. ( C.G.E.R., O.C.C.H.) étaient également actives dans ce
domaine.
Pendant la grande crise des années '30, le crédit hypothécaire a fait l'objet de
législations particulières, notamment dans l'optique de la protection des débiteurs,
préoccupation miroir de la protection des épargnants.
En Belgique, c'était l'arrêté royal n° 225 du 7 janvier 1936, qui visait tous les prêts à
intérêt et ouvertures de crédits garantis par une hypothèque, à l'exception des
crédits ou des ouvertures de crédit bancaires lorsque la garantie hypothécaire est
"accessoire". Cette exception était floue et a suscité certaines interprétations
divergentes. La garantie hypothécaire devait porter sur des immeubles, bâtis ou
non, situés en Belgique; elle pouvait porter également sur des bateaux, et - depuis
1991 - sur des avions, immatriculés en Belgique.
Cet arrêté a subsisté sans grande modification pendant un demi-siècle. Néanmoins,
la volatilité des taux d'intérêt qui s'est développée dans les années '70
s'accommodait mal du régime de taux fixes qui semblait se déduire du texte, et le
changement du contexte international a fait pressentir une augmentation de la
concurrence, en particulier par la perspective du libre établissement des organismes
financiers de l’Union Européenne, la reconnaissance mutuelle des produits
financiers des états membres et la liberté de circulation des capitaux. Ces facteurs
ont suscité des pressions en vue de modifier le régime belge.
L'aboutissement en a été la loi du 4 août 1992. Celle-ci ne recouvre pas
entièrement les crédits couverts par l'ancien arrêté; elle saisit tous les crédits ou
reprises de créances garantis par hypothèque, ou assortis de mandats ou promesses
d'hypothèque, portant sur des immeubles (bâtis ou non), accordés aux personnes
physiques résidant habituellement en Belgique pour leurs besoins exclusivement
privés. Ne sont donc pas repris ni les immeubles à usage professionnel - même
partiellement - ni les bateaux ou avions, mais peuvent aussi entrer en considération
des immeubles situés à l'étranger.
L’arrêté de 1936 continue à régir les anciens contrats conclus sous son empire.

• TECHNIQUE

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

On distingue plusieurs types de crédits hypothécaires selon le mode d'affectation


des remboursements.
crédit par amortissement :
Le débiteur rembourse par versements périodiques - constants ou non -
obligatoires et dont la quote-part en capital (amortissement) s'impute directement
sur ce capital. Le solde à couvrir se réduit ainsi progressivement. Il est souvent
d'usage de coupler cette opération à la souscription d'une police d'assurance décès
de solde restant dû qui viendra donc éteindre celui-ci si l'emprunteur décède avant
l'échéance finale.
crédit par reconstitution :
Au lieu d'imputer sur le capital restant dû les remboursements périodiques y
afférents, on les inscrit au crédit d'un compte distinct du compte débiteur. Le
compte débiteur se capitalise au taux nominal débiteur jusqu'à l'échéance finale.
Les soldes du compte créditeur sont capitalisés à un taux inférieur. A l'échéance
finale, on compense les deux comptes. Cette technique aboutit à ce que le taux réel
de l'opération soit supérieur au taux débiteur apparent et risque d'induire
l'emprunteur en erreur. Pour assurer la bonne information de l'emprunteur, la loi
prévoit que les crédits par reconstitution doivent se présenter en deux volets, l'acte
constitutif du prêt proprement dit et le contrat adjoint qui décrit avec clarté le
mode de reconstitution et le taux actuariel effectif global qui en résulte. La
technique de la reconstitution s'emploie également dans le cadre d'une souscription
d'une police d'assurance mixte vie-décès, à telle enseigne que le prêt sera remboursé
soit à l'échéance du contrat, soit au décès de l'emprunteur si celui-ci pré-décède.
crédit par remboursement :
Il s'agit du crédit hypothécaire dont les remboursements en capital sont purement
volontaires de la part de l'emprunteur à des échéances indéfinies.
La loi ne permet au prêteur d'imposer des assurances que pour couvrir la
préservation du bien (incendie,...), le solde restant dû ou le cautionnement de
l’opération, mais encore l'emprunteur doit-il avoir le libre choix de la compagnie
d'assurance (principe de l'interdiction de la vente liée). Les assurances dont
question doivent alors faire l'objet d'un contrat dit "annexé".

• PROTECTION DES DEBITEURS


La loi prévoit que les opérateurs doivent obtenir une inscription administrative
auprès de l'Office de Contrôle des Assurances (O.C.A.).
Quant aux opérations, la loi en précise le déroulement obligatoire :
9 au stade de la publicité générale destinée à attirer le candidat-débiteur, un
arrêté royal en définit les caractéristiques pour éviter des mentions abusives;
9 au stade des démarches individualisées, le prêteur doit fournir un
prospectus suffisant ainsi qu’un tarif des taux d’intérêt, y compris toutes les
réductions et modifications de taux éventuelles et leurs conditions d’octroi
afin de permettre au candidat emprunteur de se forger un premier jugement.
Les mentions obligatoires du prospectus sont également précisées par arrêté

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

royal et, si des frais d’expertise ou de dossier sont exigés à ce stade, le


candidat doit remplir et signer une demande écrite sur un formulaire qui
mentionne ces frais. En outre, les frais d’expertise ne seront dus que si
l’expertise été réalisée et si le demandeur du crédit en a reçu copie. Il en est
de même en ce qui concerne les frais de dossier, ils ne sont dus qu’après
communication de l’offre écrite par le prêteur.
9 enfin, le prêteur doit sur cette base rédiger une offre écrite contenant toutes
les conditions du contrat, c'est-à-dire mentionnant le nom des parties, la
nature et le montant de l'opération, les garanties réelles et personnelles, le
taux réel auquel elle est conclue, l'ensemble des coûts associés et le mode de
remboursement tant en principal qu'en intérêt (adjonction le cas échéant d'un
tableau d'amortissement). Cette offre doit, en outre, préciser sa durée de
validité.
Ce n'est que lorsque ces formalités sont remplies qu'on peut passer à la conclusion
définitive, par acte authentique (notarié), structuré le cas échéant en contrat
principal, contrat adjoint et contrat annexé, comme on l'a vu.
La loi limite les coûts à charge de l'emprunteur :
9 les intérêts : ceux-ci peuvent être fixes pour toute la durée, ou variables
(mais pas plus d'une fois par an) en fonction d’un indice de référence autorisé
spécifiquement par arrêté royal. La variation doit alors se faire tant à la
hausse qu'à la baisse et à l'intérieur d'une fourchette de pourcentages de taux
initial à préciser dans l'acte. Enfin, il est interdit au prêteur de réclamer un
fractionnement des paiements non signalé dans l'acte, qui résulterait en fait
en une augmentation subreptice du taux.
9 les frais : seuls peuvent être portés en compte les frais inhérents à l'opération
(droits d'enregistrement, rémunération du notaire, ...), les frais d'expertise, et
les frais de dossier. Tous les autres frais sont à supporter par le prêteur dans
sa marge d'intérêts (par exemple, la commission d'apport d'un intermédiaire
entre prêteur et emprunteur).
9 le capital : il ne peut faire l'objet d'une indexation, sauf pour les prêts stipulés
sans intérêt (prêts accordés par des parents, amis ou organismes
philanthropiques).
En outre, la loi interdit de subordonner l’octroi d’un crédit à la souscription
9 de valeurs mobilières par l'emprunteur (sauf pour les organisations
mutualistes constituées sous forme de coopératives : la souscription de parts
de coopérateur peut alors accompagner le crédit, mais à concurrence de 2 %
maximum de celui-ci);
9 de lettre de change ou billets à ordre;
9 d'autres assurances que celles évoquées plus haut.
Le prêteur ne peut non plus imposer des modifications unilatérales des droits et
obligations de son débiteur, notamment en matière de remboursement anticipés -
sauf pour fait extérieur au prêteur (par exemple la disparition du gage par
dégradation (incendie,...)). En revanche, l'emprunteur aura la possibilité de
rembourser le prêteur à tout moment (moyennant une indemnité plafonnée à 3

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

mois d’intérêts pour les prêts régis par la loi du 4 août 1992) en totalité, ou au
moins une fois par an pour des fractions qui ne seront pas inférieures à 10 % du
montant emprunté.
La loi impose d'autre part au prêteur d'avertir le débiteur de retards de paiement de
plus de trois mois ainsi que des conséquences de ce retard (penalités éventuelles)
ceci pour éviter l'enlisement du débiteur dans une situation inextricable.
L'inobservance de cette obligation entraîne pour le prêteur la perte des intérêts
afférents à l'échéance tardive et la prolongation automatique gratuite de cette
échéance pendant 6 mois.
Enfin, le juge peut accorder au débiteur (ou à sa caution) des délais de paiement au
cas où sa situation se serait aggravée et peut mettre à charge du prêteur tout ou
partie des frais supplémentaires qui résultent de ces reports.

• CENTRALE DES RISQUES


Une Centrale des Risques est instituée auprès de la Banque Nationale de Belgique,
selon des modalités fixées par arrêté royal. Il s'agit d'une centrale négative, c'est-
à-dire qui impose aux prêteurs de ne renseigner que les crédits connaissant des
défauts de paiement (et non tous les crédits accordés). Après consultation de la
Banque Nationale et de la Commission sur la Vie Privée, un arrêté royal fixe les
modalités de fonctionnement de la centrale de même que les limitations d'accès aux
renseignements qu'elle contient, l'obligation de supprimer les mentions périmées et
le droit de l'emprunteur à la rectification d'indications erronées. Retenons qu’en
matière de crédit hypothécaire, il y a enregistrement lorsqu’une somme due n’a pas
été payée soit 3 mois après son échéance, soit un mois après l’envoi par le prêteur
d’un avertissement (lettre recommandée). Lors de l’octroi d’un crédit hypothécaire,
le prêteur doit consulter la Centrale dans les deux mois précédent la conclusion du
contrat. Cette consultation est néanmoins facultative et cela contrairement au
crédit à la consommation.
A partir du 1er juin 2003 (loi d’août 2001 et arrêtés royaux d’application), la
Centrale des Crédits aux Particuliers deviendra également une Centrale positive.
La mise en place de pareille Centrale était réclamée depuis plusieurs années par les
milieux de défense des consommateurs et des personnes surendettées.
Par l’enregistrement de l’ensemble des contrats en cours, le contrôle permet au
dispensateur de crédit, lors de l’examen de la demande d’emprunt, de mieux
estimer la solvabilité de l’emprunteur en ayant une information plus complète et
fiable sur son niveau d’endettement.
La consultation de la Centrale (fichiers positif et négatif) préalablement à l’octroi
d’un crédit aura un caractère obligatoire.
La responsabilité éventuelle du prêteur s’en trouvera accrue.

• SANCTIONS
En cas de contravention à ses dispositions impératives, la loi prévoit contre le
prêteur diverses sanctions civiles (pertes de droits à l'égard du débiteur),
administratives (perte de l'inscription) et pénales (amendes, emprisonnement).

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

• PRINCIPALES AUTRES CARACTERISTIQUES DU CREDIT :


Durée :
Le crédit hypothécaire est en principe long et peut facilement atteindre 15 à 20 ans,
voire davantage - d'ailleurs la récente loi a étendu à cette fin la durée maximale de
validité de l'inscription hypothécaire de 15 à 30 ans.
Sortie :
Le crédit se remboursera normalement par le cash flow du particulier, à savoir ses
revenus professionnels ou mobiliers, un héritage ou une donation, ou encore la
revente d'autres actifs (par exemple l'immeuble occupé pendant l'acquisition ou la
construction d'un nouveau logement).
Instrument :
C'est l'acte notarié (la “grosse”) qui forme la base instrumentale du crédit
hypothécaire. Celui-ci était classiquement incessible en Belgique, contrairement à
d'autres pays qui connaissent le système de la "grosse à ordre" ou l'obligation
hypothécaire au porteur (France, Suisse,...). Le système belge requérait donc, lors
de chaque transmission d'un crédit, des formalités lourdes rendant onéreuses les
opérations de fusion entre organismes hypothécaires et pratiquement impossibles
les opérations de titrisation. Aussi la loi du 4 août 1992 s'est spécifiquement
adressée par un chapitre spécial à ces préoccupations en vue d'adapter le régime
aux nécessités du temps.
Coût :
Comme dit plus haut, les établissements de crédit hypothécaire ont longtemps
pratiqué le système des taux fixes pendant toute la durée du crédit, soit par usage,
soit pour des raisons de contrainte légale. La volatilité des taux d'intérêt, surtout à
partir de la fin des années 60, a conduit à une volonté de réduire le "mismatching"
entre échéances d'actifs et de passifs. Les contraintes de l'ancien arrêté royal belge
ont été contournées par l'introduction de techniques de dénonciations périodiques
(quinquennales, voire triennales ou même de durée moindre), ceci à moins d'une
reconduction de l'opération à un nouveau taux qui conviendrait au prêteur et à
l'emprunteur.
Ce procédé de révision de taux, controversé en droit belge, est maintenant
remplacé par le régime autorisé de taux variables à l'instar de ce qui se pratique à
l'étranger, quoique dans des limites plus étroites.
Aujourd'hui31, le client a donc un choix entre un taux fixe (à 20 ans), de l'ordre de
6 % qui comporte une prime de risque et est donc onéreux pour l'emprunteur, et
un taux variable qui peut s'établir - au départ - à seulement 4,1 % l'an (révision
annuelle) moyennant certaines contraintes (domiciliation du salaire par exemple).
Entre ces extrêmes, une formule assez répandue est le taux révisable tous les 5 ans
qui pour le premier quinquennat se situe aux alentours de 4,9 % l’an.

31 décembre 2002, quotité d’intervention faible

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Garantie :
Par définition même, il s'agit de l'hypothèque, du mandat ou de la promesse
d'hypothéquer; les frais notariaux et les droits d'enregistrement qui peuvent s'y
appliquer devront être amortis sur une période suffisamment longue pour les
justifier. Pour le surplus, les garanties porteront sur des assurances-décès ou
mixtes, ainsi que des polices incendie, dégâts des eaux,...

LE CREDIT A LA CONSOMMATION

• INTRODUCTION :
Le terme "crédit à la consommation" regroupe aujourd'hui un ensemble
d'opérations qui antérieurement n'étaient pas nécessairement identifiées au
financement de biens de consommation et de services. En effet, en définissant le
consommateur extensivement comme toute personne physique lorsqu'elle n'agit
pas à titre professionnel, la définition réglementaire européenne a saisi, dans
certaines limites de montants et certaines conditions de forme, la plupart des
opérations privées des particuliers : l'acquisition d'immeubles (à l'exception du
crédit hypothécaire) et le placement en valeurs mobilières aussi bien que l'achat de
biens meubles (de la voiture au fer à repasser) et de services (comme les voyages,
les études ou les réceptions de mariage), ou encore les débits en compte financier
résultant d'un paiement quelconque.
Le crédit dit à la consommation couvre donc, dans le chef des personnes
physiques :
9 les ventes à tempérament : c'est-à-dire tout crédit qui emporte la vente de biens
ou la prestation de services, à rembourser par des versements périodiques;
9 les prêts à tempérament : c'est-à-dire tous les autres crédits à rembourser par
versements périodiques;
9 le crédit-bail : c'est-à-dire la location d'un bien meuble corporel, dont il est
explicitement ou implicitement prévu qu'il peut être acquis à terme par le
paiement d'une soulte (généralement faible);
9 l'ouverture de crédit : c'est-à-dire la mise à disposition de fonds ou de moyens de
paiement (éventuellement par l'utilisation de cartes), sans plan précis de
remboursement, en ce sens que le moment du remboursement est laissé au
gré du débiteur (sans préjudice d'une échéance finale) : c'est le cas des crédits
de caisse, par exemple.
La raison de cette définition extensive du crédit à la consommation tient à l'histoire
- variée - des différentes formes sous lesquelles il se présente. La plupart d'entre
elles ont connu leur développement dans les pays à niveau de vie élevé.
C'est le cas des crédits à tempérament aux USA dès avant la deuxième guerre
mondiale, et en Europe après celle-ci, dans la prospérité retrouvée des années 50.
Cela explique la genèse de la législation belge de 1957, 1965 et 1970 en cette
matière.
Les crédits à tempérament ont été pratiqués pour compte propre ou comme
intermédiaire (courtier) par des organismes très variés, depuis les établissements de

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crédit classiques jusqu'à des sociétés - très nombreuses et de toutes tailles - dont
c'était la principale occupation, voire jusqu'à des officines tenues par des
particuliers indépendants, en passant par les entreprises de distribution des biens et
services financiers.
Accroissant le pouvoir d'achat des populations, les crédits à tempérament exercent
un effet stimulant sur la demande des biens et des services. Leur promotion et leur
freinage par voie réglementaire ont donc pu être poursuivis en fonction de la
conjoncture par les autorités chargées de l'orientation économique.
D'autre part, ces crédits s'adressent au public en général, dans l'ensemble mal
préparé à en comprendre les aspects parfois fort techniques et sibyllins et, a
fortiori, à en négocier les modalités avec des opérateurs plus puissants, animés du
désir d'accroître leur chiffre d'affaires parfois de manière très agressive et tentatrice.
Ce déséquilibre des forces en présence a conduit à des situations difficilement
acceptables : surendettement d'économiquement faibles inaptes à apprécier leur
capacité de remboursement et les conséquences d'éventuels défauts de paiement;
poursuite draconienne de débiteurs défaillants par des prêteurs cherchant à réduire
leurs pertes; impossibilité de recours ultérieur au crédit par des débiteurs fichés
comme mauvais payeurs, quelles qu'en soient les circonstances.
Le législateur n'est donc pas seulement intervenu pour orienter les aspects
conjoncturels de ces opérations, mais aussi, et très énergiquement, pour protéger le
consommateur contre les nombreux abus et tentations dont il peut devenir la
victime.
Les crédits liés à l'usage de cartes ont connu une évolution à la fois plus récente et
différente, d'autant que leur utilisation s'appuie sur des techniques de plus en plus
sophistiquées (surtout depuis l'avènement de l'informatique télématisée) et donc
moins accessibles à un grand nombre d'opérateurs.
Ce sont essentiellement les établissements financiers et de grande distribution qui,
au cours du dernier quart de siècle, ont répandu l'usage des cartes. De nature
variée, il importe de commencer par leur description.
Cartes de paiement ou cartes de débit (Mister Cash, Bancontact) :
Le phénomène de crédit automatique s'est étendu aux cartes de paiement, délivrées
par les établissements financiers à certains de leurs clients titulaires de compte et
qui permettent à ceux-ci soit de retirer de l'argent auprès de guichets automatiques
("automated teller machines" = ATM) reliés aux ordinateurs comptables de leurs
établissements financiers, soit de faire des paiements à des commerçants dont les
points de vente ("points of sale" = POS) sont reliés aux mêmes ordinateurs, et ce
dans la limite de la provision (solde créditeur, pouvant s'augmenter de la ligne de
crédit éventuellement associée à l'émission de la carte de paiement).
Les avantages liés au développement des cartes de paiement sont les suivants :
9 réduction des attentes et des manipulations aux guichets des établissements
financiers;
9 possibilité d'accès au compte en dehors des heures d'ouverture au public des
établissements financiers.

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9 réduction des coûts élevés tenant aux longs circuits d'encaissement de


chèques, surtout si l'on considère le prix de la main d’œuvre;
Les difficultés sont les suivantes :
9 si plusieurs systèmes coexistent, ils peuvent être incompatibles entre eux
(interconnections impossibles en raison de leur conception et de leurs
logiciels différents) (en Belgique, il y a actuellement intégration complète
entre des systèmes initialement concurrents (Bancontact, Mister Cash));
9 l'infrastructure et le fonctionnement coûtent cher; il faut déterminer des
critères de répartition des coûts (informatique, télécommunications) entre les
établissements financiers membres des réseaux, mais aussi leur répercussion
sur les clients et les points de vente, ce qui ne manque pas de soulever des
controverses;
9 l'établissement de preuves en cas de mauvais fonctionnement (abus) peut être
difficile;
9 la distorsion éventuelle de concurrence entre commerçants : ceux qui sont
reliés aux systèmes ont un avantage sur ceux qui ne le sont pas;
9 la difficulté de bien faire entrevoir au bénéficiaire du crédit les conséquences
de l'usage qu'il en fait.
Cartes de crédit (American Express, Diner's Club, Visa, Mastercard, etc.) : .
Elles ne doivent pas être confondues avec les cartes de paiement ou de débit. Elles
sont émises par certaines organisations en faveur de personnes qui n'y
entretiennent pas de compte courant bancaire. Lorsque le titulaire d'une carte doit
faire un paiement, il signe une reconnaissance envers le bénéficiaire de ce paiement;
la carte exhibée en même temps assure le bénéficiaire du remboursement de la
somme par l'émetteur de la carte (sous déduction d'une commission en faveur de ce
dernier); à charge pour l'émetteur de récupérer ensuite la somme auprès du titulaire
de la carte. A de telles cartes sont assignées des limites de dépenses mensuelles (par
multiples de 1250 €, voire davantage), et, ipso facto, une ligne virtuelle de crédit.
Les cartes de crédit et de paiement combinés (Euro Card),
Elles sont émises par des établissements bancaires à des titulaires choisis de
comptes courants dans leurs livres, et constituent l'aboutissement du processus.
Conscients des risques financiers et des conséquences négatives sur leur image que
l'usage inconsidéré de cartes pouvaient entraîner pour eux, les établissements
promoteurs de ces cartes en Belgique ont, dans les années 80, décidé de se
concerter pour s'imposer des règles d'autodiscipline. L'objectif était d'éviter que le
débiteur ne succombe à la tentation de s'installer, par facilité ou ignorance, dans
une position débitrice chronique auprès de son établissement financier. Cette auto-
réglementation visait aussi à prévenir l'imposition de contraintes par voie législative
qui auraient pu rendre moins commode et plus onéreux le fonctionnement des
systèmes de cartes.
Néanmoins, des mesures différentes avaient été prises à l'étranger à l'égard de ces
opérations et des autres formes de crédit offertes au public. Avec la perspective de
l'unification européenne et le développement de transactions transfrontalières,
l'Union Européenne s'est saisie de la question, en vue de la création d'un cadre

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général minimum régissant l'ensemble des opérations ayant pour dénominateur


commun la mise à la disposition des personnes physiques de fonds ou autres
moyens de paiement, assortis de délais de remboursement, à des fins non
professionnelles.

• LA REGLEMENTATION
L'évolution décrite plus haut a conduit l'Union Européenne à promulguer sa
Recommandation du 17 novembre 1988 et sa Directive du 22 décembre 1986,
complétée par celle du 22 février 1990, en matière de crédit à la consommation,
dont les dispositions ont dû être incorporées dans les législations des états
membres avant le 1er janvier 1993.
En septembre 2002, la Commission Européenne a adopté une proposition de
nouvelle directive sur le crédit à la consommation. Les nouvelles règles
communautaires en cette matière sont étendues aux formes modernes du crédit à la
consommation. Les prêts au logement restent exclus du champ d’application de la
direction proposée ; ceux-ci ont fait l’objet d’une recommandation récente de la
Commission ainsi que d’un code de conduite européen. Les emprunteurs
bénéficieront d’une transparence accrue sur les produits (coûts, clauses et
conditions) et pourront comparer plus facilement les offres de crédit sur base
transfrontalière. Les prêteurs bénéficieront de meilleures possibilités d’évaluer les
risques débiteurs, mais seront par contre tenus de s’informer sur leurs clients, avant
d’accorder un crédit. Les consommateurs auront également le droit de se rétracter
dans un délai de 14 jours, sans frais et sans justification.
Les directives actuellement en vigueur visent la vente et le prêt à tempérament, le
crédit-bail et les crédits en compte courant liés à l'utilisation de cartes avec certaines
extensions aux crédits en compte-courant, même non liés à l'usage d'une carte.
Elles laissent de côté diverses opérations :
9 les crédits hypothécaires (régis par d'autres dispositions);
9 les locations de biens non destinés à être vendus à terme au locataire à faible
prix résiduel;
9 les crédits sans rémunération ni frais à charge des bénéficiaires (tels que
dispensés par des organisations caritatives) ou encore lorsque leur
rémunération est inférieure aux conditions du marché et que ces crédits ne
sont pas offerts au public (par ex. prêts avantageux accordés par une
entreprise aux membres de son personnel);
9 les crédits inférieurs à 200 € ("de minimis non curat praetor");
9 les crédits supérieurs à 20.000 € (les parties aux transactions importantes sont
censées savoir ce qu'elles font sans avoir à être protégées spécialement);
9 les crédits de durée inférieure ou égale à 3 mois;
9 les crédits de durée inférieure ou égale à 12 mois ne comportant pas plus de 4
paiements échelonnés;
9 les crédits conclus par acte authentique (devant notaire ou juge habilité).
La protection des consommateurs a été poursuivie selon divers axes à respecter par
les législations des états membres :

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9 réglementation des bailleurs de fonds et des intermédiaires (accès à la


profession, surveillance et règlement des litiges);
9 information du consommateur, par des dispositions contraignantes en
matière de publicité et des mentions obligatoires dans les contrats; ces
dispositions portent essentiellement sur les précisions à fournir quant aux :
ƒ parties à l'acte;
ƒ paramètres du crédit : montants, plafonds, périodicité des
remboursements et intérêts, durée totale, coût global du crédit et toutes
ses composantes : intérêts (taux à calculer selon une formule actuarielle
imposée), frais, assurance éventuelle, pénalités;
ƒ garanties éventuelles32 ;
ƒ délais de réflexion éventuels;
ƒ modalités de changement éventuel des termes du contrat (taux d'intérêt
par exemple, là où c'est légalement autorisé).
Il faut remarquer que si, pour les opérations à tempérament, les calculs a
priori du taux annuel effectif global sont relativement aisés, il n'en va pas
de même pour les crédits en compte-courant : comment déterminer au
préalable un taux exact alors qu'il y a des frais fixes et variables à appliquer
à des utilisations incertaines quant aux montants et que le taux de l'intérêt
est lui-même variable dans le temps ? La directive impose alors une
estimation "la plus réaliste possible" ou l'indication de la méthode de
calcul;
9 établissement d'un décompte équitable, sans enrichissement injustifié du
prêteur, si celui-ci est amené à reprendre le bien financé en cas de défaillance
du débiteur et information dès le départ des conditions gouvernant
l'éventualité d'une telle reprise;
9 faculté pour le débiteur de se libérer anticipativement de sa dette, avec droit
corrélatif à une réduction équitable des charges de celle-ci;
9 faculté pour le débiteur d'opposer au prêteur (ou à son cessionnaire en cas de
mobilisation de la créance) les exceptions dont ce débiteur pourrait se
prévaloir envers son fournisseur d'origine (malfaçons par exemple) ou vis-à-
vis du prêteur lui-même;
9 protection du consommateur s'il est recouru à des effets de commerce en
représentation de la créance.
La directive européenne permet à chaque état membre de rendre plus sévère le
dispositif minimum commun s'il le souhaite.
La Belgique s'est très largement prévalue de cette faculté en adoptant la loi du 12 juin
1991 modifiée à plusieurs reprises, pour la dernière fois le 10 août 2001 et assortie

32 Ces crédits peuvent en effet être assortis de garanties (aval, nantissement de titres, etc.) selon
la nature et le montant du crédit ainsi que l'état de fortune, le niveau des revenus et la notoriété
des bénéficiaires du crédit ou de leurs garants.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

d'une foule d'arrêtés d'exécution33. Ce dispositif remplace les anciennes lois sur les
opérations à tempérament en reprenant d'ailleurs plusieurs de leurs dispositions,
tout en les renforçant et en y introduisant de nombreuses et importantes
adjonctions.
C'est ainsi que la législation belge :
9 étend la notion européenne de crédit à la consommation :
ƒ en faisant sauter le plafond de 20.000 €, (à l'exception des crédits
accordés par acte authentique - assez rares, sauf pour les crédits
hypothécaires de toutes façons exclus);
ƒ en ne liant pas les ouvertures de crédit visées à l'usage d'une carte;
ƒ en faisant sauter le délai inférieur de 3 mois pour les ouvertures de
crédit en compte-courant supérieures à 1.250 euros.
Ainsi donc, la toute grande majorité des crédits en compte-courant est saisie
par la nouvelle législation.
9 interdit purement et simplement l'usage du billet à ordre et de la traite (de
même que le chèque remis "en garantie") - cela réduit la facilité de
mobilisation des ventes à tempérament (qui se faisait précédemment par
endos des effets créés pour les représenter);
9 ajoute un volet important sur l'obligation du prêteur de s'informer sur les
candidats emprunteurs, notamment en imposant la consultation de la
Centrale des Risques tenue par la Banque Nationale de Belgique, tout en
veillant au respect de la vie privée du débiteur (tentative de conciliation de
préoccupations antagonistes);
9 prévoit un cadre draconien de dépistage et de sanctions civiles et pénales
pour les manquements des prêteurs, des autres intermédiaires de crédit ainsi
que des teneurs de fichiers contenant des données personnelles sur les
débiteurs.
Quelques éléments de la loi belge doivent être mentionnés ici.
L'accès à la profession
Les prêteurs pratiquant les crédits à la consommation doivent être agréés par le
Ministère des Affaires Economiques. A cette fin, ils introduisent un dossier
indiquant qu'ils s'engagent à :
9 maintenir un actif net minimum de 50.000 euros (seuil assez bas qui tient
compte des indépendants actifs dans ce domaine), pouvant être augmenté à 5
millions, voire 50 millions selon la nature des activités exercées.
9 tenir une comptabilité
9 transmettre des statistiques et autres renseignements à définir par le
Ministère,

33Un projet de loi modifiant la loi du 16 juin 1991 a été approuvé par la Chambre fin décembre
2002. Le Sénat ne s’est pas encore prononcé sur le texte. Il devrait le faire au plus tard au début
du mois de mars 2003. La nouvelle loi entrera en vigueur le 1er janvier 2004.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 fournir au Ministère tous renseignements concernant les taux d’intérêt


appliqués et les frais éventuels réclamés, y compris les données financières et
économiques se rapportant aux opérations effectuées,
9 permettre aux agents du Ministère de prendre connaissance des contrats et
documents y afférents, que ces agents jugent nécessaires à l'accomplissement
de leur mission.
(Les établissements de crédit publics et privés soumis au contrôle de la
Commission Bancaire et Financière sont réputés satisfaire à ces critères).
Les intermédiaires de crédit34 (et les prêteurs qui cèdent immédiatement leurs contrats à
un autre prêteur) doivent demander leur inscription au Ministère des Affaires
Economiques. Leur dossier sera plus léger que pour les demandeurs d'agrément.
L'agrément ou l'inscription sera refusée ou retirée à certaines catégories de
personnes (déclarées en faillite, condamnées pour des infractions à diverses lois
économiques, financières et comptables,...).
L'approche et l'information des consommateurs
Le contenu de la publicité des prêteurs à tempérament est étroitement réglementé
(indication obligatoire du taux annuel effectif global ("TAEG") calculé selon la
formule officielle ou illustré d'exemples représentatifs, interdiction de parler de
"crédit gratuit",...).
Le démarchage du consommateur à domicile (même par téléphone) n'est pas permis à
moins d'une demande écrite préalable de ce dernier, ni sur les lieux du travail, ni au
domicile d'un autre consommateur, ni à l'occasion d'un voyage commercial
organisé (sauf si le but en a été clairement indiqué avant le départ).
Il est fait obligation au prêteur de s'informer sur l'emprunteur, et corrélativement à
l'emprunteur de donner au prêteur les renseignements complets et exacts
nécessaires à ce dernier (mais sans pouvoir porter sur les races, religion, opinions
politiques ou affiliations syndicales de l'emprunteur). Le prêteur doit donner à
l’emprunteur toute information nécessaire sur le contrat de crédit envisagé et doit
rechercher le type de crédit le mieux adapté la situation personnelle de celui-ci.
Sur base des renseignements communiqués par l’emprunteur, et après consultation
de divers fichiers (Centrale des Crédits aux Particuliers de la Banque Nationale de
Belgique, Mutuelle d’Information sur le Risque de l’Union Professionnelle du
Crédit), le prêteur doit procéder à un examen de solvabilité afin de déterminer si
l’emprunteur est à même de rembourser le crédit.
Le prêteur doit opposer son refus à l'opération s'il ressort de ces renseignements que
l'emprunteur ne pourra vraisemblablement pas faire face à ses obligations. Si le
crédit est refusé, les seuls frais facturables au candidat emprunteur sont ceux de la
consultation de la centrale officielle de la Banque Nationale.

34 Les intermédiaires de crédit comprennent notamment les agents délégués qui agissent
exclusivement au nom et pour compte d'un prêteur déterminé et les courtiers qui interviennent
habituellement dans le cadre d'activités professionnelles pour faciliter la conclusion de contrats
offerts par un ou plusieurs prêteurs.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Une offre écrite doit être remise gratuitement à l'emprunteur, et restera valable
pendant quinze jours, (sauf pour la vente à tempérament et le crédit-bail, ainsi que -
pour le taux - en cas d'ouverture de crédit).
L’offre doit, en outre, être accompagnée d’un tableau d’amortissement (sauf pour
les ouvertures de crédit) mentionnant la description de chaque remboursement en
capital et en intérêts, ainsi que le solde restant dû après chaque paiement.
L'offre - dont la contre signature par le consommateur formera contrat - doit, pour
la bonne information du consommateur, comporter les mentions suivantes :
9 identification des intervenants : le prêteur et son n° d'agrément, le débiteur,
la caution (le cas échéant), l'intermédiaire (le cas échéant) et son n°
d'inscription ,
9 le montant,
9 le TAEG ou en cas d'impossibilité des exemples de calcul,
9 les conditions de prélèvement, d'utilisation et de remboursement,
9 le bien financé (le cas échéant),
9 les sûretés éventuelles,
9 la date de consultation du fichier de la Banque Nationale de Belgique,
9 les autres fichiers éventuellement consultés,
9 la faculté éventuelle pour le prêteur de céder le contrat ou de subroger un
tiers dans ses droits,
9 la faculté (sauf pour la vente à tempérament et le crédit-bail) accordée
obligatoirement à l'emprunteur de renoncer au crédit pendant sept jours
après signature du contrat,
9 la durée de validité de l'offre,
9 la mention, en gras,"ne signez jamais un contrat non rempli", à l'endroit de la
signature qui devra être précédée de la mention manuscrite "lu et approuvé pour
... euros à crédit",
9 l'interdiction de l'usage d'effets de commerce et de chèques de garantie,
9 l'interdiction d'antidater le contrat par rapport à la remise de l'offre,
9 l'interdiction de la réclamation de frais non convenus spécifiquement, sauf les
pénalités prévues en cas d'inexécution,
9 toute autre clause que le Roi pourra ultérieurement imposer à certaines
catégories de contrats.
Une fois le contrat conclu, l’emprunteur (sauf pour la vente à tempérament et le
crédit-bail) dispose d’un délai de réflexion de 7 jours ouvrables, pour renoncer au
crédit au moyen d’une lettre recommandée envoyée au prêteur.
Ce délai de réflexion est applicable dans deux hypothèses :
9 Lorsque l’offre est signée par l’emprunteur le même jour que celui à dater
duquel elle est valable, et

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9 Lorsque la signature du contrat a lieu en présence des deux parties en


dehors de l’entreprise du prêteur, de l’intermédiaire (par exemple la signature
au domicile du prêteur ou dans le cadre d’un salon).
A ces obligations s'en ajoutent d'autres, spécifiques :
9 aux ventes à tempérament :
ƒ il faut un acompte minimum de 15%. Le Roi peut majorer ce
minimum (en fonction de considérations conjoncturelles),
ƒ la vente n'est parfaite que si l'acompte est payé,
ƒ la clause éventuelle de réserve de propriété ne pourra trouver à
s'appliquer, lorsque 40% du principal a été remboursé, qu'avec l'accord
du débiteur ou du Tribunal,
ƒ les mentions obligatoires de l'offre se complètent du prix au comptant,
du prix total à tempérament, du montant de l'acompte, du total des
montants échelonnés et des nombre, montant et périodicités des
remboursements, du coût total du crédit, de la faculté et des modalités
de remboursement anticipé;
9 aux opérations de crédit-bail :
ƒ les mêmes mentions obligatoires que pour les ventes à tempérament,
mutatis mutandis,
ƒ l'indication du montant nécessaire à lever l'option d'achat ou à
transférer la propriété pour éteindre le crédit en fin de bail;
9 aux prêts à tempérament : les mentions obligatoires se complètent par
ƒ le montant nominal du prêt,
ƒ le coût total,
ƒ les nombre, montant et périodicité des paiements,
ƒ la date du premier remboursement,
ƒ la faculté de remboursement anticipé,
9 aux ouvertures de crédit : les mentions obligatoires se complètent par
ƒ l'indication distincte du taux débiteur et des frais éventuels récurrents
et non récurrents,
ƒ la faculté que le prêteur se réserverait de modifier le taux,
ƒ s'il y a usage d'une carte, les règles applicables en cas de perte, vol ou
usage abusif et la quotité du risque éventuellement à charge de
l'emprunteur,
ƒ la faculté de résiliation réciproque moyennant préavis de trois mois, dès
que la durée du crédit excède un an ou que le taux varie de plus de
25% par rapport au taux initial.
Une fois par mois ainsi que préalablement à tout changement de taux, un relevé de
compte doit être envoyé par le prêteur au débiteur mentionnant les sommes
prélevées, les paiements effectués et les intérêts et frais dus.

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La limitation des conséquences du contrat pour le consommateur


La dénonciation anticipée du crédit par le prêteur disposant de renseignements
nouveaux laissant présumer que le débiteur ne pourra remplir ses engagements ne
peut être faite qu'avec un préavis de sept jours par lettre recommandée.
Les risques liés à l'usage abusif de cartes volées ou perdues ne peuvent être mis à charge du
débiteur qu'à concurrence de plafonds (relativement bas) fixés par le Roi, et ce
jusqu'à notification du vol ou de la perte; les autres risques d'usage abusif, y
compris la contrefaçon, sont à charge de l'émetteur de la carte.
Le TAEG maximum doit être fixé tous les six mois au moins par le Ministre de
Affaires Economiques (dans le cadre de sa politique conjoncturelle) en fonction du
type, du montant et de la durée du crédit35; si le TAEG n'est pas déterminable
comme tel (cas des ouvertures de crédit), c'est le taux débiteur maximum et les frais
récurrents et non récurrents maximums qui sont fixés.
Une faculté de remboursement anticipé est donnée à l'emprunteur, qui sera indemnisé
d'au moins 75% des intérêts et frais restant à courir.
La cession du contrat, lorsqu'elle a été prévue, ne peut se faire qu'à des organisations
financières agréées, avec notification au débiteur cédé par lettre recommandée.
L'exigibilité immédiate du solde restant dû ne peut être mise en oeuvre qu'après non
paiement d'au moins deux échéances ou 20 % du montant du contrat, et ce un
mois au moins après mise en demeure par lettre recommandée restée sans suite.
Les contrats liés aux crédits (assurance par exemple) sont interdits à moins que leur
coût ne soit compris dans le coût total stipulé au contrat.
Les rémunérations des débiteurs mineurs ne peuvent être saisies ou cédées dans le cadre
d'un crédit à la consommation, et les travailleurs ne peuvent faire l'objet de mesures
disciplinaires de leur employeur en cas de défaillance dans leurs obligations
résultant de ce type de crédit.
Des facilités de paiement peuvent être accordées par le Tribunal aux débiteurs dont la
situation s'est aggravée et tout ou partie du coût supplémentaire en résultant peut
être mis à charge du prêteur. Les mêmes facilités peuvent être accordées aux
cautions.
Autres intervenants éventuels
Les cautions éventuelles doivent recevoir copie préalable du contrat, être informées
de sa conclusion, de toute modification ultérieure, des retards qui peuvent entraîner
l'exigibilité immédiate du solde dû ainsi que des facilités de paiement
éventuellement accordées au débiteur. Les cautions ne peuvent être actionnées que
dans les mêmes délais que les débiteurs eux-mêmes.
Les intermédiaires de crédit doivent informer l'emprunteur de leurs qualité et pouvoirs.
Les courtiers doivent communiquer aux prêteurs sollicités toutes les demandes de

35 Actuellement, le TAEG maximum autorisé varie entre 13 % pour les crédits de plus de
10.000,00 €,- ayant une durée de plus de 4 ans, jusqu'à 25,5 % pour les petits crédits de moins de
500,00 €,- ayant une durée de 1 an maximum.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

crédit introduites dans les derniers quinze jours. Les intermédiaires ne peuvent
recevoir de rémunération que du prêteur, et encore le paiement de 50 % au moins
de cette rémunération doit-il être étalé sur la durée du crédit.
Les teneurs des fichiers répertoriant les consommateurs et leurs opérations de crédit
sont également étroitement réglementés en vue du respect de la vie privée. Ils ne
peuvent traiter des données personnelles que si celles-ci sont pertinentes,
appropriées et non excessives pour apprécier la situation de consommateurs. Ces
données sont limitées à l'identité du débiteur, le montant et la durée du crédit, la
périodicité des paiements et les retards et facilités de paiements éventuels. S'y
ajoute, mais seulement au bénéfice du teneur de fichier et du consommateur,
l'identification du prêteur (sauf en cas de retard). Le Roi peut autoriser l'inclusion
de certaines condamnations pénales si le consommateur en est préalablement
informé par écrit.
Les teneurs de fichiers et leur mode de fonctionnement doivent être autorisés par le
Roi. Les contenus des fichiers ne peuvent être communiqués qu'aux personnes et
organismes prêteurs, assureurs et de tutelle prévus; ils ne peuvent servir qu'à
octroyer et gérer les crédits et moyens de paiements visés et doivent être effacés
lorsque leur conservation n'est plus prescrite ou ne se justifie plus.
Les consommateurs sont informés de leur inclusion dans les fichiers dont ils
peuvent vérifier la teneur en ce qui les concerne, et faire rectifier ou supprimer les
mentions non pertinentes ou inexactes ou dont le délai de conservation est expiré.
Un fichier central est tenu par la Banque Nationale de Belgique : il ne concerne
actuellement que les débiteurs en défaut de paiement sur leurs contrats de crédit
(centrale dite négative). Le Roi pourra après trois ans (1994) imposer d'étendre la
centrale à tous les crédits en cours (centrale positive). Ce fichier doit être consulté
par tout prêteur avant l'offre, la conclusion ou la modification d'un contrat.
A partir du 1er juin 2003, tous les contrats en cours devront être enregistrés ; la
centrale deviendra également une centrale positive (voyez supra)
Contrôle et sanctions
Une Commission de la Protection de la Vie Privée a été instituée comme instance de
contrôle du dispositif gouvernant les fichiers de consommateurs; elle pourra être
complétée par un Comité de Surveillance dont l'objectif est de faire respecter la loi, de
fournir des recommandations, et d'aider à résoudre les litiges, voire de les trancher.
D'autre part, les agents de l'inspection du Ministère des Affaires Economiques sont désignés
pour rechercher et constater les infractions à la loi sur le crédit à la consommation.
Ils ont de larges pouvoirs d'investigation et de perquisition, tant dans les bureaux
des prêteurs et des intermédiaires de crédit, qu'à domicile. Ils peuvent consulter et
prendre copie des documents et pièces nécessaires à leurs enquêtes. Ils donnent
aux contrevenants des avertissements, leur proposent des transactions ou
transmettent leur dossier au Parquet.
Les sanctions civiles sont lourdes.
Pour le prêteur, elles peuvent - selon la nature de l'infraction - comporter
l'annulation du contrat, ou la réduction des obligations de l'emprunteur au prix du
comptant ou au montant prêté à l'origine (sans charges financières donc) tout en lui

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

maintenant le bénéfice du terme. Elles peuvent aussi prévoir le remboursement au


débiteur des frais abusivement réclamés ou des paiements faits par lui avant la
conclusion d'une vente à tempérament. En plus, le consommateur pourra se voir
autorisé à garder les fonds qui lui auraient été prématurément versés par le prêteur
(avant la conclusion du contrat de prêt)...
Le prêteur pourra aussi voir réduire ou effacer les pénalités ou dommages qu'il
réclame à l'emprunteur et que le tribunal estimerait excessifs, les intérêts débités en
compte sans information appropriée (ouvertures de crédit), et les intérêts de retard
si le prêteur a manqué à ses devoirs d'information, de prudence ou de consultation
obligatoire de la centrale des risques.
L'emprunteur qui n'a pas fourni des renseignements corrects ou complets au départ
pourra de son côté voir le contrat résolu à ses torts.
La caution envers qui les formalités prescrites n'ont pas été respectées peut être
déchargée de ses obligations.
L'intermédiaire de crédit peut se voir privé de sa commission s'il n'a pas fourni les
informations prévues au prêteur et que l'emprunteur fait défaut.
Le vendeur à tempérament peut se voir obligé d'annuler la vente et de rembourser
l'acheteur s'il se prévaut abusivement de la clause de réserve de propriété.
Tout ceci sans préjudice de sanctions pénales (prison et/ou amendes) plus ou moins
lourdes pour les prêteurs, intermédiaires et teneurs de fichiers en défaut de
respecter les multiples dispositions précitées.
Conclusions
Déjà dans le régime antérieur à 1991, on pouvait se poser la question, en regard de
l'arsenal juridique qui le caractérisait, de savoir dans quelle mesure les protections
organisées en faveur du débiteur n'étaient pas excessives. En effet, l'emprunteur
de mauvaise foi ou tout simplement en difficulté pouvait en tirer parti pour éluder
ses obligations. Le coût élevé de récupération des créances sur des débiteurs de ce
genre se trouve en fait répercuté statistiquement sur le niveau global des
chargements exigés par les prêteurs, rendant les opérations plus onéreuses pour la
communauté dans son ensemble.
La nouvelle loi a étendu le champ d'application et augmenté la charge
administrative, bien au-delà des exigences européennes alors que certaines
observations comparées sur les retards de paiements et les défaillances en Belgique
tendent à montrer que le surendettement y est relativement bas, quoique plus
sensible en période de crise.
En définitive, il reste à soumettre à l'épreuve du temps le nouveau régime, fondé au
départ sur des considérations humaines très légitimes, mais que certains estiment
avoir été exagéré pour des motifs idéologiques, consuméristes, voire électoralistes.
A l'heure actuelle, de nouveaux dispositifs sont envisagés pour alléger le fardeau
des personnes surendettées : constitution d'"observatoires de crédit" pour
monitorer l'environnement du crédit, possibilité pour les défaillants de consulter
des personnes compétentes en restructuration de dettes, instauration d'un régime

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

de "faillite personnelle" avec remise de dettes à l'instar de ce qui existe dans certains
pays étrangers.

ANNEXE A

Une bonne façon d'aborder la compréhension du crédit d’acceptation est d'en


retracer les trois stades principaux qui l'ont amené à sa forme actuelle.

GENESE DU CREDIT D'ACCEPTATION :

Dans la section précédente, il a été question du crédit documentaire par


acceptation, où le banquier émet une lettre de crédit en faveur d'un exportateur
étranger et s'engage, contre présentation de documents dûment spécifiés, à accepter
une traite à un certain délai de date. Par là, le banquier substitue, sur la traite à
accepter, sa propre signature (plus connue) à celle de son client importateur.
A l'origine c'étaient souvent des marchands notoires qui substituaient leur signature
à celle d'importateurs moins connus : ils devenaient ainsi à la fois marchands et
banquiers d'où le nom de "merchant bankers"; depuis lors, c'est la fonction
bancaire qui a primé, mais la dénomination est restée.
L'exportateur dispose donc à ce stade d'une traite acceptée par le banquier de
l'importateur; s'il souhaite l'escompter, il peut avoir intérêt à la faire escompter dans
le pays de l'importateur car la signature du banquier accepteur y est plus connue ce
qui aura au demeurant un impact favorable sur le taux. En fait, c'est le banquier
accepteur lui-même qui se chargera de trouver un acquéreur pour cette traite, et qui
enverra le net produit de l'escompte à l'exportateur ("négociation de la traite pour
compte du tireur").
Sur le marché de Londres, sont ainsi nées les "accepting houses", les maisons de
banque qui apposaient leur signature, en tant que tiré, sur les traites (qui du fait de
cette signature prennent le nom d'acceptations bancaires), et d'autre part les
"discount houses" qui escomptaient ces acceptations (tout comme les traites
commerciales ordinaires) en fournissant les fonds qu'elles recueillaient elles-mêmes
sur le marché du call-money36 ou encore, en dernier ressort, au moyen de
réescompte auprès de la banque centrale. Aujourd'hui, les banques anglaises
assurent l'ensemble de ces opérations.

EVOLUTION ULTERIEURE

La technique de l'acceptation comme source de financement s'est détachée du


crédit documentaire qui lui a donné naissance : en principe elle se bornera à la

36 argent emprunté au jour le jour auprès de professionnels.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

conclusion d'une convention par laquelle un banquier autorisera son client à tirer
des traites sur lui, sans qu'il y ait nécessairement livraison de biens et de services à la
base du tirage : il s'agira de traites de nature purement financière.
Ainsi donc, le client de la banque tire une traite sur son banquier qui l'accepte, et
celle-ci devient un instrument à négocier sur le marché monétaire; le banquier met
le produit de cette mobilisation à la disposition de son client jusqu'à l'échéance, à
laquelle date le client devra lui restituer la somme nécessaire pour que le banquier
puisse lui-même faire face à la présentation de l'acceptation par le porteur dans le
marché.
L'obligation du client de fournir la provision à l'échéance à son banquier résulte de
la convention de crédit d'acceptation entre banquier et client, et non d'un recours
cambiaire relatif à la traite même : c'est le porteur (et non le banquier tiré) qui peut
éventuellement se retourner contre le tireur du fait de la traite (en cas de défaillance
du banquier !).

EVOLUTION ULTIME :

Après avoir accepté l'effet, et alors même qu'il remet directement le net produit de
sa négociation théorique de l'effet à son client, le banquier accepteur conserve
l'acceptation bancaire en portefeuille jusqu'à ce qu'il ait lui-même (éventuellement)
un besoin de trésorerie : ainsi il prête sa signature et des fonds sur cette même
signature, même s'il ne mobilise pas effectivement cette acceptation dans le marché.

USAGE :

Dans la pratique des choses, les banquiers belges n'accordent de crédit


d'acceptation que pour le financement d'opérations de commerce extérieur, tant
pour les exportations que pour les importations, et la mention de l'opération
commerciale sous-jacente figurera sur l'acceptation.
Si une entreprise se livre à de nombreuses opérations du genre de relativement
faibles montants, elle pourra, pour réduire les frais administratifs, émettre des
acceptations "globales" couvrant des lots identifiables de ces opérations dont les
caractéristiques sont similaires.
Les acceptations bancaires jouissent en Belgique de la réescomptabilité auprès de la
Banque Nationale de Belgique lorsqu'elles financent des exportations, ou encore
des importations de produits non trouvables en Belgique.
Comme pour les effets commerciaux la mobilisation des acceptations bancaires se
faisait précédemment auprès de l'Institut de Réescompte et de Garantie et
aujourd’hui directement auprès de la BNB. Cet Institut escomptait les acceptations
soit dans le cadre des adjudications de la Banque Nationale (acceptations
bancables), soit pour les revendre à des acheteurs institutionnels : autres banques,
caisses d'épargne, compagnies d'assurance ... (acceptations bancables et non
bancables).

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

L'Institut de Réescompte et de Garantie a joué, depuis sa fondation en 1935 et


jusqu’à son absorption par la Banque Nationale de Belgique en 1999, le rôle des
discount houses anglaises beaucoup plus anciennes. Pour ses opérations pour
compte propre, l'I.R.G. se finançait comme les discount houses sur le marché de
l'overnight et par réescompte auprès de la Banque Nationale de Belgique.
Pour assurer la discrétion des relations commerciales individuelles des banques
avec qui il traitait avec, l'I.R.G., en revendant des acceptations d'une banque à une
autre, ne s'en dessaisissait pas : il les conservait dans ses caisses pour compte de
l'acquéreur en ne lui divulguant que le nom du banquier accepteur et non celui du
client tireur de ce dernier (le recours cambiaire de l'acquéreur demeurant cependant
intact en cas de défaillance du banquier accepteur).
Très en vogue après la guerre 1940-45, le financement du commerce extérieur par
acceptation a bénéficié d'encouragements de la Banque Nationale de Belgique, par
le biais d'un visa préalable donnant ouverture à un réescompte à taux privilégié. Le
système de visa a été abrogé au début des années 1970.

DUREE :

En matière d'exportation, la durée de l'effet correspond généralement au délai de


paiement accordé à l'importateur étranger (si le paiement est reçu par l'exportateur
avant l'échéance de l'acceptation, celle-ci doit être retirée auprès de son escompteur,
sous peine de voir l'exportateur jouir pendant le temps restant à courir d'un double
financement pour une seule opération - avec les tentations que cela provoquerait
dans son chef); en matière d'importation, la durée n'excédera pas le délai estimé de
stockage et de revente par l'importateur local.

COUT :

Le coût de l'opération reflète sa dualité d'acceptation et d'escompte : d'une part la


signature de l'effet donne droit à une commission d'acceptation (variable selon les
pays) généralement de l'ordre de 0,5 % à 1,5 % l'an; d'autre part, il sera prélevé un
intérêt d'escompte, qui sera parmi les plus favorables en vigueur sur le marché eu
égard à la qualité de la signature du banquier qui est notoire et appréciée sur son
propre marché. Les acceptations bancables (certifiées) jouiront en Belgique de taux
plus favorables que les autres.

ANNEXE B

On peut distinguer trois périodes successives en matière d’aide publique aux crédits
d’investissement :
9 1939-1959
9 1959-1970

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9 1970-maintenant
Au cours de la première période, plusieurs arrêtés et lois ont été promulgués
successivement qui ont tissé une sorte de toile de fond pour les étapes ultérieures :
9 Arrêté No 81 de 1939 (qui n'a d'ailleurs été appliqué qu'après la guerre),
prévoyant que la garantie de l'Etat pouvait être accordée pour couvrir la
défaillance de bénéficiaires de crédits octroyés pour financer des industries
nouvelles, favorisant les grands intérêts de la nation (en matière économique
et sociale, ou en matière de défense du territoire).
9 Loi du 7/8/1953 : celle-ci prévoyait non seulement la garantie de l'Etat, mais
aussi la réduction d'intérêts pour les crédits donnés par les institutions
publiques finançant des investissements qui favorisent l'intérêt économique
général.
9 Loi du 1/7/1954 : celle-ci inaugure des allègements fiscaux : déductibilité
pendant deux ans de l'amortissement de 30 % de l'investissement réalisé.
9 Lois des 31/5/1955 et 10/5/1957, étendant les avantages fiscaux par
l'immunisation de la contribution foncière pendant cinq ans et coordonnant
les dispositions antérieures.
En résumé, au cours de cette période, le champ d'application de l'intervention s'est
élargi à toutes les industries et l'artisanat en général, pour les investissements
favorisant la création et la modernisation de leurs installations, par voie de garantie
de l'Etat, de la subvention en intérêts, et de l'allègement fiscal.
En raison de la récession économique de 1958, une nouvelle phase est inaugurée
par l'Etat en 1959, par l'introduction de mesures préconisées par le bureau de
programmation, et par la prise en compte de considérations régionales.
Il s'agit principalement de la législation suivante :
9 Loi du 24/5/1959 visant surtout le crédit professionnel et à l'artisanat, par
lequel est institué un fonds de garantie pour les petites et moyennes
entreprises, géré par la CNCP.
9 Loi du 15/7/1959, loi fiscale ayant pour but de détaxer les plus-values des
sociétés sur les investissements non seulement immobiliers mais aussi
mobiliers : le taux d'imposition est ramené à 50 % du taux normal pour les
plus-values réalisées sur la vente d'immeubles ou de titres détenus depuis plus
de 5 ans.
9 Lois des 17 et 18/7/1959 : il s'agit respectivement d'une loi nationale et d'une
loi régionale (par laquelle ont été créées des zones qui donnent droit à des
avantages différenciés). Outre des subsides en intérêt en faveur de celui qui
emprunte, on prévoit également une assistance équivalente pour celui qui
utilise ses propres fonds, en octroyant une prime en capital, valeur actualisée
du subside en intérêt que l'Etat aurait accordé dans le premier cas.
L'application des modalités de subvention est assortie de règles complexes
pour assurer une certaine uniformité de traitement : c'est ainsi que l'on
commencera par ramener le plan d'investissement pour lequel la subvention
est accordée, à une durée de financement théorique fictive de 10 ans,
remboursable par dix versements égaux. Les modalités de subventionnement

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

(durée, taux, quotités) sont appliquées à ce plan fictif et ensuite transposées et


actualisées en fonction du plan réel. Une autre nouveauté est l'incitation
accordée au financement des prototypes industriels, par des avances qui sont
soit remboursables sans intérêt si le prototype débouche sur une application
positive, soit non remboursables en cas d'échec. Les facilités en matière
fiscale s'élargissent à nouveau : exonération du précompte immobilier,
exonération des droits d'enregistrement pour des apports en société, qu'ils
soient en nature ou en espèces , faculté d'amortissements accélérés.
En troisième lieu, à la fin des années 60, sous l'empire d'une volonté accrue de
régionalisation et de planification, de nouvelles dispositions ont été imaginées :
9 la loi du 31/12/1970 abroge la loi régionale de 1959, tout en maintenant en
vigueur les arrêtés royaux d'application pris en fonction de cette dernière loi.
La loi de 1970 a une orientation plus sectorielle et plus technique : on prévoit
différentes catégories d'aides à la fois classiques et nouvelles (toujours
d'application aujourd'hui). En résumé, on peut synthétiser ces dispositions
comme suit :
ƒ aide financière :
o réduction de taux d'intérêts (de 2 % à 7 % l'an), pendant une
période pouvant aller jusqu'à 6 ans, pour les crédits accordés sous
forme de billets à ordre, d'obligations et même d'obligations
convertibles;
o primes de capital, pour les investissements financés par fonds
propres;
o avances sans intérêt récupérables pour le financement de prototypes
technologiques;
o garantie de l'Etat et actuellement également des régions (garantie
accordée à titre supplétif des autres garanties que peut fournir
l'entreprise débitrice);
ƒ aide fiscale :
o exonération de précompte immobilier;
o exonération de droits d'enregistrement pour les restructurations de
sociétés37;
o faculté d'amortissements accélérés;
ƒ aide commerciale :
o octroi par l'Etat de contrats de progrès (engagement de l'Etat à long
terme pour l'achat de certains équipements vis-à-vis de certaines
industries);
o octroi de polices Ducroire dans des conditions d'exception : ce sera
le cas pour des opérations de fournitures à l'étranger, là où sinon il
n'aurait pas pu se conclure certains marchés.

37Cette exonération a depuis été généralisée : il ne s'agit plus d'une faveur accordée dans le seul
cadre d'un crédit à promouvoir

- 107 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Depuis lors, la loi du 4/8/1978, dite Loi Anticrise, a organisé de nouvelles aides,
semblables à celles prévues dans les lois du 17/7/1959 et 31/12/1970,orientées
plus spécifiquement vers les petites et moyennes entreprises (entreprises
commerciales et industrielles employant au plus 40 et 50 personnes
respectivement).
Ces aides spécifiques aux PME prévoient :
9 une diminution temporaire de cotisations à la sécurité sociale;
9 une intervention dans les coûts des prestations d'un secrétariat social;
9 l'octroi de primes d'emploi.
En vue d'obtenir les facilités prévues par les pouvoirs publics, les entreprises
doivent fournir des indications permettant de composer un dossier : il s'agit en
ordre principal de décrire les caractéristiques industrielles et financières de
l'entreprise, et de justifier de l'utilité et des répercussions de l'investissement à
financer.
Les pouvoirs publics donnent leur assistance par priorité aux investissements qui
favorisent :
9 le développement économique d'une manière générale;
9 le maintien ou le développement de l'emploi;
9 la rationalisation;
9 l'exportation;
9 l'économie d'énergie;
9 la réduction de la pollution;
9 la construction sociale, éducative ou hospitalière.
A noter qu'il y a des sanctions si les données sur lesquelles le dossier est basé sont
inexactes : des justifications doivent être données au moment des prélèvements, et
des vérifications sont faites ultérieurement pour contrôler si les objectifs ont été
atteints. Si les subsides ne sont pas utilisés pour les usages prévus, ou si certains
des objectifs (par exemple le niveau d'emploi) ne sont pas respectés, l'entreprise est
exposée à rembourser les subsides obtenu.
En définitive, si l'on perçoit clairement les objectifs économiques, sociaux et
éventuellement politiques des pouvoirs publics dans l'octroi des avantages précités,
ils peuvent coûter fort cher à la collectivité et surtout engendrer des effets
secondaires peu heureux : distorsion de concurrence et maintien artificiel de
situations difficilement soutenables à plus long terme. Il s'ensuit des difficultés
pour des entreprises saines ne bénéficiant pas desdits avantages.

ATTITUDE DES POUVOIRS PUBLICS VIS-A-VIS DES ETABLISSEMENTS PUBLICS DE CREDIT (I.P.C.)
Les crédits d’investissement aux entreprises et aux collectivités, ainsi d’ailleurs que
d’autres crédits à long terme comme le crédit au logement, ont été longtemps un
domaine où la puissance publique a joué un rôle important.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

C’est de la sorte qu’en Belgique sont nés, dans la décennie 1860 - sous un
gouvernement résolument libéral - les premiers établissements publics de crédit (et
d’épargne). Il s’agit de la C.G.E.R. (Caisse Générale d’Epargne et de Retraite,
active dans le financement du logement social) et du C.C.B. (Crédit Communal de
Belgique, pourvoyeur de fonds aux provinces et communes). Après la Grande
Guerre, d’autres I.P.C. ont vu le jour : la S.N.C.I. (crédit industriel), la C.N.C.P.
(crédit aux classes moyennes) et l’I.N.C.A. (Institut National de Crédit Agricole).
Enfin l’O.C.C.H. (Office Central du Crédit Hypothécaire) fut créé pour servir de
relais aux caisses hypothécaires.
La constitution de ces I.P.C. procédait de l’idée qu’il y avait des secteurs
(reconstruction industrielle, logement social, épargne populaire, P.M.E.,
agriculture, ...) à stimuler par les pouvoirs publics, alors que les mécanismes de
marché ne permettaient pas de rencontrer les besoins de ces secteurs à des
conditions suffisamment attrayantes.
Donc, pour que les I.P.C. puissent accorder des concours à des conditions plus
favorables, on leur a octroyé des privilèges de fonctionnement, par exemple :
9 économiques :
ƒ monopoles de fait ou de droit
ƒ exigence limitée quant au niveau et à la rémunération des fonds
propres
ƒ garantie de l’Etat sur les ressources collectées
ƒ régime fiscal avantageux (exonération partielle de l’impôt de société)
ƒ exclusivité de publicité sur les ondes nationales
9 prudentiels
ƒ contrôle différent du secteur privé
Ces I.P.C. subissent aussi certaines contraintes propres (commissaires du
gouvernement, cadre linguistique, ...)
Si les I.P.C. étaient, à l’origine, créés dans un but spécifique, les plus dynamiques
ont progressivement débordé de leur cadre initial et sont devenus de plus en plus
semblables aux autres établissements de crédit.
A l’occasion, cette tendance a d’ailleurs été sanctionnée par le pouvoir :
proclamation de la C.G.E.R. comme “banque publique” en 1978; autorisation
donnée à l’O.C.C.H., en 1984, de récolter lui-même des fonds sous forme de
carnets de dépôt.
Or parallèlement à cette déspécialisation progressive des I.P.C., la même évolution
- en sens inverse - se manifesta dans le secteur privé : extension des activités des
établissements de crédit privés aux formes antérieurement délaissées de crédit à
long terme - d’autant que l’Etat s’était résolu, à partir des années 50, à faire
canaliser ses incitants (subventions, fiscalité, garantie) par l’ensemble des
intermédiaires financiers qu’ils soient publics ou privés.
Enfin, sur le plan européen, des mesures inspirées du principe de la libre
concurrence ont de manière plus précise proscrit les aides économiques directes et
indirectes au ou par le secteur public.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Depuis le milieu des années 1980, il résulta de cette évolution une demande du
secteur privé que les conditions de fonctionnement soient harmonisées, d’autant
que l’ensemble des intermédiaires auraient prochainement (1993) à subir les effets
de l’ouverture des marchés financiers aux autres pays de l’Union Européenne.
Dans un premier temps, l’Etat se montra hésitant, désirant garder un secteur public
fort - d’abord pour des raisons idéologiques (propension à l’intervention dans le
cadre d’une politique industrielle publique), ensuite pour des raisons pratiques (le
secteur public de crédit pouvait à l’occasion être appelé à financer hors budget
certains projets gouvernementaux), et aussi parce que parmi les I.P.C., il y en avait
qui craignaient d’être plus vulnérables sans le rempart de leurs privilèges - d’autant
que d’aucuns connaissaient déjà des problèmes de résultats (O.C.C.H., I.N.C.A.),
de parts de marché (S.N.C.I.) ou de structure (C.N.C.P.).
Progressivement, l’Etat procéda à l’harmonisation des conditions entre secteurs
public et privé du crédit, tout en souhaitant étudier le regroupement des I.P.C. les
plus faibles en deux pôles, autour du C.C.B. (peu empressé) et de la C.G.E.R. que
le pouvoir désirait toujours garder à l’abri du capital privé pour la formation de
leurs fonds propres.
C’est finalement pour des raisons mi-idéologiques et mi-budgétaires que l’Etat a
accepté l’ouverture de l’actionariat des I.P.C., à partir de 1995 :
9 par la vente en trois étapes du capital de la C.G.E.R. à un groupe d’assurance
belgo-néerlandais;
9 par la cession à la C.G.E.R. de la part de l’Etat dans la S.N.C.I.;
9 par la cession en deux étapes de l’I.N.C.A. à un assureur suisse et une caisse
d’épargne belge;
9 par la cession fin 1999 de la CNCP à une banque mutualiste française.
9 par la cession des activités de l'OCCH à une banque hollandaise et une
banque d'épargne belge, en 2001.
De leur côté, les provinces et communes, jusqu’alors seuls actionnaires du C.C.B.,
ont depuis 1996 procédé à la mise en bourse d’une partie importante du capital de
cette institution, qui entre-temps s’est alliée avec le Crédit Local de France, pour
former une nouvelle banque rebaptisée Dexia.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 5.

AUTRES OPERATIONS ACTIVES AVEC LE SECTEUR PRIVE

SOUSCRIPTION D'OBLIGATIONS DE SOCIETES INDUSTRIELLES

INTRODUCTION

Plutôt que faire des crédits dans les formes décrites dans les chapitres précédents,
les intermédiaires financiers peuvent apporter leur concours au secteur privé sous
forme de participation à des émissions d'obligations. Ces obligations sont des
reconnaissances de dettes, généralement souscrites pour de longues durées (5 à 15
ans, voire davantage).
En raison de leur risque plus élevé, les obligations d'entreprises ("corporate")
seront émises avec des coupons supérieurs à ceux des fonds d'état, toutes autres
caractéristiques étant égales.

TYPES D’OBLIGATIONS CORPORATE

Les émissions d'obligations corporate peuvent être de deux types :


9 Emissions publiques, destinées au grand public, et la plupart du temps
cotées en bourse.
9 Emissions privées : elles sont destinées essentiellement aux investisseurs
institutionnels (compagnies d'assurance, fonds de pension, sociétés
financières, etc ...), et ne sont pas en principe destinées à être cotées en
Bourse. En Belgique, ce type d'émissions n'est réalisé que par des sociétés de
premier ordre ainsi que, parfois, par des sociétés de moindre envergure mais
avec lesquelles les investisseurs souscripteurs ont déjà des relations
commerciales sur d'autres plans : cas des compagnies d'assurance qui
assurent les immeubles, les transports, les accidents de travail ou la pension
"groupe" de l'émetteur.

- 111 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

EXISTENCE D’UN MARCHE SECONDAIRE ?

Les obligations corporate posent parfois un problème quant à leur mobilisation :


il n'y a pas de marché secondaire38 organisé en Belgique où quelques sociétés de
bourse et banques offrent leurs bons offices pour trouver des contreparties à ceux
qui souhaitent acheter ou vendre de telles obligations.
La situation est différente en Grande-Bretagne, aux U.S.A. ou dans divers pays
européens, où les marchés secondaires sont plus importants, ou encore sur les
euro-marchés39, où les obligations d'entreprises (euro-bonds) sont cotées sur une
place financière (Luxembourg par exemple, où les conditions d'admission à la cote
sont moins contraignantes qu'ailleurs).
Pour les autres caractéristiques des obligations d'entreprises, nous vous renvoyons
aux autres parties du cours qui les traitent.

ACTIONS DE SOCIETES

PRESENCE A DES DEGRES DIVERS, SELON LA VOCATION DE


L’INTERMEDIAIRE FINANCIER

On retrouve des actions de sociétés à l'actif de divers types d'intermédiaires


financiers. Les holdings, les fonds communs de placement et sicavs d'actions
en détiennent par vocation première. Les investisseurs institutionnels comme
les compagnies d'assurances et les fonds de pension en acquièrent souvent à

38 Marché primaire : marché sur lequel est placée une émission lors de son lancement. Marché
secondaire : marché sur lequel sont négociés les titres déjà émis (bourses officielles de valeurs
ou marchés officieux tenus par certains professionnels)
39 Euro-marchés : marchés où se traitent les euro-devises ou les euro-bonds (euro-obligations)
(a) définition d'une euro-devise : il s'agit d'une monnaie dans laquelle est libellé un
avoir financier qui est détenu au travers d'un organisme bancaire établi en dehors du
pays de la devise en cause :
- du dollar US lorsqu'il se rapporte à un dépôt détenu au travers d'une agence
bancaire située hors USA (à Londres, à Francfort, à Tokyo,...)
- du Yen lorsqu'il se rapporte à un dépôt détenu au travers d'une agence bancaire
hors du Japon (en Belgique, en Suisse, aux USA,...)
(b) définition d'un euro-bond : obligation émise par une société et destinée à être
souscrite et détenue par un non-résident du pays de la devise dans laquelle est
libellée l'obligation, par exemple :
- obligations en dollars US émises par Ford International S.A., Luxembourg, mises
en souscription auprès de non-résidents américains.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

titre de placements à long terme et on les retrouve également dans le portefeuille


d'établissements de crédit, soit à titre de participation (avec association à la
gestion), soit à titre de placement (ce que l’on appelle parfois « proprietary
trading »), soit encore dans le cadre d'opérations de tenue de marché, pour faciliter
l’exécution d’ordres de clients.

REFLEXIONS SUR LE BIEN-FONDE DE LA DETENTION D’ACTIONS


POUR LES INTERMEDIAIRES FINANCIERS

Les déboires des années '30 ont amené à une réflexion sur les causes du grand
nombre de faillites bancaires, plus particulièrement au vu de leurs répercussions
sur les déposants qui n'ont pas pu récupérer les fonds confiés en banque. Les
réglementations nombreuses introduites à l'époque se fondent sur des analyses
qui ont été menées essentiellement selon deux axes principaux :

ADEQUATION DES REMPLOIS PAR RAPPORT AUX RESSOURCES ?

Premièrement, on s'est interrogé sur l'adéquation des remplois par rapport aux
ressources, au vu du type de transformation financière réalisé par l'intermédiaire
financier. On a mis en exergue le principe que l'investissement en capital à
risque ne peut être financé que par des capitaux permanents, alors que la
contrepartie normale du dépôt à court terme doit être le crédit commercial ou le
placement en actifs d'une liquidité suffisante et d'un risque acceptable. De plus, on
peut mettre en doute la pertinence de l’investissement par des sociétés, même des
banques, en action d’autres sociétés. Leurs capitaux permanents devraient avoir
d’autres usages, et surtout être à l’abri des fluctuations de marché.

CONFLITS D’INTERETS POTENTIELS ?

Le deuxième axe concerne les conflits d'intérêt potentiels : la possession d'actions


dans des sociétés industrielles ou commerciales peut, en cas de difficultés de ces
sociétés, susciter chez l'actionnaire banquier la tentation de sauver sa mise par
l'octroi de crédits inconsidérés au moyen des dépôts à sa disposition. De plus, il
pourrait utiliser ces divers financements pour défendre des intérêts particuliers et
pour justifier à cette fin sa participation aux organes de contrôle des sociétés
détenues en portefeuille, sans même parler de l'intérêt économique propre pour les
dirigeants de la banque(tantièmes) à détenir des mandats d'administrateur.

ADOPTION DE DIFFERENTS PRINCIPES

Ces réflexions ont conduit à l'adoption de divers principes : spécialisation,


autonomie, transparence, compétence/honorabilité, contrôle, dont la mise en
application devait empêcher la récurrence des déboires bancaires généralisés vécus
au cours de la grande crise. Pour ce qui concerne la détention d'actions, ce sont les
principes de spécialisation et d'autonomie qui sont particulièrement pertinents :

- 113 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

SPECIALISATION

Ce principe n'était pas neuf, puisqu'il s'appliquait déjà de longue date à diverses
catégories de professions chargées exclusivement de certaines opérations à
caractère financier comme les agents de change et les notaires, à qui on a octroyé
un monopole et pour lesquelles existent des règles particulières d'accès à la
profession. Dans cette optique, de nombreux pays ont décidé d’octroyer
l’exclusivité du recueil des dépôts à court terme (2 ans maximum) aux “banques
commerciales” et aux caisses d’épargne. Entre autres contreparties à ce
monopole, ces banques n’étaient plus autorisées, à des degrés divers, à s’occuper
des opérations sur actions, ou à en détenir en propre (abrogation de la “banque
mixte”). C’est notamment le cas des USA (Glass Steagall Act de 1933), et de la
Belgique (Arrêté Royal n° 2 de 1934)40.
L'arrêté royal n° 185 de 1935 précise l'arrêté royal n° 2 de 1934 en énonçant
certaines exceptions au principe de l'interdiction de la détention d'actions par les
banques.
9 une exception de bon sens : l'autorisation de détenir des actions de filiales
spécialisées dans le prolongement d'activités bancaires (filiales bancaires à
l'étranger, sociétés de leasing, de factoring, de gestion de fonds communs de
placement) ;
9 une exception pour des actions non destinées à rester en portefeuille :
participation des banques à des syndicats d'émissions d'actions, en vue de
leur replacement dans le marché (la Belgique s'est montrée sur ce point plus
souple que les Etats-Unis où les banques commerciales furent exclues de
cette activité);
9 une exception visant la situation spéciale de la faillite d'un débiteur : les
banques peuvent accepter que leurs créances soient remboursées sous forme
d'actions dont le client failli était propriétaire.

AUTONOMIE

La législation de 1934 et 1935 visait à établir une stricte autonomie de gestion des
banques par rapport à des sociétés financières ou industrielles qui en étaient
actionnaires, afin d’éviter les confusions d’intérêt. (l'arrêté n° 185 de 1935 a aussi
introduit une incompatibilité entre la détention d'un siège d'administrateur auprès
d'établissements de crédit d'une part et de sociétés industrielles et commerciales
d'autre part. Ici aussi, certaines exceptions furent admises; notamment pour les
banques constituées sous forme de sociétés de personnes, ou pour l'un ou l'autre
mandat exercé par un banquier dans des sociétés purement familiales).

40 A remarquer que certains pays (dont l’Allemagne et d’autres pays germaniques, ainsi que
le Japon) n’ont pas prohibé la détention d’actions par leurs banques.

- 114 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

La Commission Bancaire a ensuite renforcé le principe de l'indépendance par


l'imposition d'un protocole sur l'autonomie de la gestion bancaire aux grandes
banques d'abord, et au restant du secteur bancaire ensuite à travers la loi
"Mammouth" du 30 juin 1975.
Dans ce régime d'autonomie renforcée, le Conseil d'Administration des
banques a été scindé en deux parties. D'une part, certains administrateurs,
banquiers de plein exercice, assurent la gestion courante et constituent entre eux
le comité de direction, décidant en collège. D'autre part, des administrateurs liés
aux actionnaires ou des indépendants choisis pour leurs compétences, qui ne
participent pas à la gestion courante de la banque, complètent le conseil
d'administration de celle-ci; il n'entre dans leurs attributions que les éléments de
politique générale et de haute surveillance de la banque.

UN ASSOUPLISSEMENT …

Dans la même loi du 30 juin 1975, le législateur assouplit sa position en matière de


détention d'actions par les banques. En fait, certaines sociétés industrielles belges
qui étaient en proie à des difficultés, avaient de la peine à trouver des capitaux frais
ou à assainir autrement leurs bilans, par exemple par la conversion de créances en
capital. Alors que l'Etat souhaitait favoriser leur reconversion, les banques se
retranchaient derrière l'interdiction de détenir des actions pour refuser l'invitation
qui leur était faite de consolider leurs créances en capital de ces sociétés en
difficulté. De nombreuses banques ont donc vu dans l'assouplissement de la loi les
prémices d'un éventuel dirigisme destiné à renflouer les canards boiteux soutenus
pour des motifs socio-politiques. Elles ont donc freiné la promulgation de l'arrêté
d'exécution prévu dans la loi.

ET ENSUITE UN REVIREMENT

Dans les années '80, un revirement s'est amorcé au plan mondial en matière de
détention d'actions par les banques. D'une part, on estimait pouvoir se fonder sur
la théorie qu'un portefeuille d'actions convenablement diversifié peut ne pas être
plus risqué qu'un portefeuille d'obligations. D'autre part, l'opinion politique a
penché pour un retour aux mécanismes du marché, dans un but d'efficience
globale, entraînant dérégulation et déspécialisation, tant aux U.S.A. qu'en
Europe.
Aux U.S.A., des atténuations ont été apportées au Glass Steagall Act qui a
finalement été abrogé fin 1999. En Union Européenne, les directives bancaires
prises en vue de l'établissement du grand marché intérieur des services ont consacré
le principe de la banque mixte qui avait été maintenu en vigueur dans une partie
importante de son territoire. Ces directives permettent donc aux pays membres
d'autoriser leurs banques à détenir des actions de sociétés non financières mais en y
apportant néanmoins certaines limites : la détention de "participations qualifiées"
(c'est-à-dire de possession de blocs de plus de 10 % dans le capital d'une société
déterminée) se voit limitée à 15 % des fonds propres de la banque pour chaque

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

participation qualifiée prise individuellement et à 60 % pour l'ensemble des


participations qualifiées - pour le reste les actions sont mises sur le même pied que
les crédits au secteur privé.
Devant cette évolution et la perspective d'une concurrence d'autres banques de
l'Union Européenne pouvant offrir à des sociétés clientes de prendre part à leur
capital, les banques belges ont, à partir de 1987, changé d'attitude et demandé aux
autorités une relaxation des contraintes en matière de détention d'actions. Ceci a
conduit d'abord à la promulgation en mai 1990 de l'arrêté d'exécution en attente
depuis 15 ans : autorisation de détenir des actions (à concurrence de 35 % des
fonds propres seulement) mais maintien de l'interdiction d’en faire des
participations et de s'immiscer dans la gestion des sociétés dont des actions étaient
détenues.
Par la loi du 22 mars 1993, une révision beaucoup plus fondamentale a été
apportée puisque le principe de telles participations et de détention de mandats
d'administrateurs est maintenant admis, et a permis un rapprochement progressif
des normes belges aux normes européennes.
L’étendue de la baise des cours de bourse en 2001-2002, et les pertes encourues par
de nombreuses banques européennes sur leurs portefeuilles d’action en ont amené
plus d’un à regretter que les interdictions anciennes aient été levées.

- 116 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 6.

OPERATIONS DE FINANCEMENT DU SECTEUR PUBLIC

On peut classer les opérations de financement du secteur public (mise à disposition


de ressources aux pouvoirs publics) selon divers critères.

LES EMETTEURS

On distinguera :

AU NIVEAU NATIONAL :

9 le pouvoir public fédéral (l'Etat) et les Communautés;


9 les pouvoirs publics subordonnés (régions, provinces, communes);
9 les établissements para-étatiques ayant (ou non) la garantie de l'Etat pour
toutes ou une partie seulement de leurs opérations;

AU NIVEAU ETRANGER :

9 les pouvoirs supra-nationaux (Union Européenne, ...) et les agences inter-


gouvernementales spécialisées (Banque Européenne d'Investissement,
CECA, Banque Mondiale, ...);
9 les pouvoirs nationaux et ceux qui leur sont subordonnés (états, provinces,
cantons, municipalités), ainsi que leurs agences et les para-étatiques garantis
ou non par eux.

LES FORMES DE FINANCEMENT

Ces financements peuvent prendre la forme :


9 d'obligations destinées à l’ensemble des investisseurs. En Belgique on parle
d’OLO (obligations linéaires obligaties), en France d’OAT (obligations
assimilables du trésor), en Allemagne de Bunds, aux Etats-Unis de
Treasuries, …

- 117 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 de certificats de trésorerie, dont le terme va jusqu'à 1 an ("treasury bills");


9 de "bons du trésor" ou bons d’Etat émis de façon spécifique, comme
l’emprunt dit « de crise » émis en Belgique en 1981, assorti d’avantages
fiscaux, ou encore en France l'Emprunt "Balladur" de juin 1993, préfinançant
certaines privatisations et conférant à leur titulaire des droits de souscription
préférentiels dans les sociétés à privatiser. En Belgique, des bons d’Etat
réservés aux particuliers et assortis de conditions fiscales restrictives sont
émis périodiquement.

- 118 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 7.

CRITERES D’APPRECIATION DU PLACEMENT


OBLIGATAIRE

Nous étudions ici la politique d’amortissement suivie par les intermédiaires


financiers41.

INTRODUCTION

Les emprunts non mobilisables (sans marché secondaire organisé) seront


considérés avec moins de faveur par les intermédiaires financiers, même si le
rendement des titres non cotés est supérieur, précisément pour compenser la
moindre liquidité. La politique d'amortissement comptable est importante. Il s’agit
de déterminer dans quelle mesure il faut acter au bilan la réduction de valeur en cas
de moins-values du portefeuille.
Pour illustrer : soit une obligation achetée à 100, donnant au moment de
l'acquisition un intérêt de 5 % ; supposons en outre que les taux exigés par le
marché pour des obligations de même échéance soient entre-temps passés à 7 %, et
que le cours actuel de l'obligation acquise soit donc descendu à, mettons, 90; faut-il
ou non acter dans les comptes tout ou partie de la moins-value de 100 - 90 = 10 ?
Les politiques d'amortissement ont varié selon la nature des intermédiaires
financiers en cause.

LA POLITIQUE TRADITIONNELLE D’AMORTISSEMENT

C'est ainsi que les compagnies d'assurance ne font pas nécessairement


d'amortissement sur les obligations qu'elles détiennent en portefeuille. L'argument
qui sous-tend cette attitude est que les titres d'emprunts sont la contrepartie de
réserves mathématiques ou techniques42 et non de dettes exigibles à court terme.

41Pour l’étude des autres aspects liés aux obligations, nous renvoyons le lecteur à la partie du
cours consacrée aux marchés financiers.
42 Provisions au bilan de ces compagnies représentant leurs engagements envers les assurés
calculés actuariellement ou statistiquement - en moyenne à très long terme.

- 119 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

En fait, les compagnies d'assurance (et les fonds de pension) font de la


"transformation d'échéance négative" en ce sens que l'échéance moyenne de
leurs placements est plus rapprochée que celle de leurs engagements.
En ce qui concerne les banques, le portefeuille de obligations est, en très grande
partie, la contrepartie de dépôts, que les déposants peuvent retirer à vue ou à
relativement brève échéance, et dont le coût est sensible à des variations de taux
d'intérêt. Ils peuvent aussi être la contrepartie d'obligations ou bons de caisse à
long terme émis par la Banque, dont le coût est alors plus stable. Néanmoins, une
totale orthodoxie commanderait d'amortir la totalité du portefeuille, d'autant que :
9 si la banque n'amortit pas ses moins-values, le rendement sur fonds d’état en
portefeuille reste inchangé, puisque leur valeur d’inventaire est inchangée - or
dans un contexte ambiant de hausse des taux du marché, le coût des
ressources de la banque pourrait augmenter ; il y a donc économie de
réduction de valeur instantanée mais perte de rendement pour l’avenir. Cela
ne sera évidemment pas le cas si la banque réduit la valeur d’inventaire des
fonds d’état, augmentant ipso facto leur rendement futur ;
9 si la banque n'amortit pas régulièrement son portefeuille après des hausses de
taux, et que les taux continuent à monter, une correction éventuelle de la
situation sera de plus en plus pénible à enregistrer, puisqu'il faudrait alors
accumuler les redressements afférents à plusieurs exercices;
9 si la banque n'a pas amorti son portefeuille, et qu'elle peut réaliser un
arbitrage économiquement intéressant sur base des différences de rendement
réel entre deux titres d'emprunt, la perte comptable qu'elle pourrait devoir
enregistrer en vendant ses titres non amortis pourrait être dissuasive malgré
les gains économiques réels que l'arbitrage aurait générés.
La conclusion que l'on peut tirer de ce qui précède est que l'amortissement du
portefeuille de fonds publics est de bonne gestion. Toutefois, la réalité
économique (hausse tendancielle des taux d'intérêts de 1969 à 1981 et de 1989 à
1994) a conduit les banques belges à déroger à la politique d'amortissement sur
une partie de ces titres; en effet, les amortissements qu'elles auraient dû appliquer si
elles avaient choisi une politique d'amortissement intégral pouvaient être à ce point
importants par rapport au bénéfice d'exploitation, qu'ils auraient entraîné l'affichage
- jugé inopportun - d'une chute de rentabilité, ou même d'une perte globale.
Les banques ont craint qu'en laissant apparaître cette faible rentabilité voire ces
pertes à leur bilan, cela aurait pu leur causer un préjudice par la méfiance que celles-
ci auraient provoquée auprès de leurs clients. Cela explique l'abandon au cours des
années 70 par presque toutes les banques belges d'une politique d'amortissement
intégral.
Devant cette situation, la Commission Bancaire et Financière a statué par analogie
avec ce qui a été dit plus haut pour les compagnies d'assurance : elle a donné aux
banques la faculté de scinder en deux le portefeuille de fonds d'Etat, laissant à la
direction des banques le soin de distinguer entre d'une part le portefeuille de
placement (stable à long terme, qui ne risque pas de devoir être mobilisé sauf
circonstances exceptionnelles), et le portefeuille de liquidité (servant à une
gestion plus dynamique de trésorerie). Dans un premier stade, la Commission

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Bancaire et Financière n'a imposé d'amortir que cette deuxième partie du


portefeuille (portefeuille de liquidité).
Le portefeuille de liquidité doit être constamment réévalué (à la hausse comme à
la baisse) au cours du marché ("marked to market"). En revanche, le portefeuille
de placement peut être réévalué que de manière actuarielle (quasi linéaire), pour
résorber progressivement la différence entre le prix d'achat et le montant à
encaisser à l'échéance.
En raison des différences de politiques d'amortissement entre établissements, et
malgré les indications fournies dans les notes et commentaires des rapports et des
bilans de banques, il était souvent difficile à leur lecteur de porter un jugement sur
les rentabilités réelles de ces banques, encore plus de les comparer entre elles.
Une question particulière se pose sur le point de savoir comment on doit évaluer
les titres non cotés : n'ayant pas la référence extérieure objective d'un cours de
bourse, comment porter un jugement sur la valeur d'inventaire de ces titres; le cas
échéant, doit-on pratiquer des réductions de valeur ?
En fait, on peut parfaitement calculer une valeur théorique pour les obligations non
cotées, en procédant par analogie avec des titres de même qualité, de même
échéance et de même intérêt nominal mais qui sont cotés. Même s'il n'existe pas de
titres parfaitement comparables dans le marché, la variété des instruments qui sont
cotés permet de cerner la valeur des titres d'emprunts non cotés avec suffisamment
de précision. Cette manière d'aborder le problème est tout à fait admise par le fisc
pour autant que l'on justifie convenablement les références prises pour cette
valorisation.
REMARQUE
Pour ce qui concerne la politique d'amortissement, la législation fiscale prévoit
que, lorsqu'on amortit des titres (en réduisant la base taxable à due concurrence) et
que par la suite leur cours se redresse, on est obligé de calculer un
"désamortissement" sur ces titres, c'est-à-dire de déterminer les plus-values par
rapport à la valeur amortie (jusqu'à rattraper le prix d'achat), même si ces plus-
values n'ont pas été effectivement réalisées : l'impôt sur ces "désamortissements"
sera dû.

LES REGLES FUTURES

Les règles comptables dites IAS imposeront bientôt une réévaluation régulière de
tous les actifs, y compris les obligations et actions détenues comme placement à
long terme. Les marchés le demandent déjà, ainsi que les règles comptables ou les
règles prudentielles dans divers pays. La Belgique est encore assez frileuse à cet
égard, mais devra suivre le mouvement.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 8.

OPERATIONS A L'EGARD D'AUTRES INTERMEDIAIRES


FINANCIERS PROFESSIONNELS

Dans leur gestion d'actifs, les intermédiaires financiers font des opérations entre
eux. On peut distinguer, encore que cette distinction soit ténue, entre :

LES OPERATIONS DE MARCHE INTERBANCAIRE

Il s'agit d'avances consenties à des professionnels pour le financement de leurs


opérations; ce sont pour la plupart des opérations à terme fixe (1 jour à 12 mois),
traitées sur le marché (au téléphone ou sur écran). Les taux sont souvent fixés
autour d'un taux pivot, le taux offert lui étant supérieur de 1/16 % et le taux
demandé inférieur de 1/16 %.
Le taux offert entre banques s'appelle, comme déjà dit précédemment le "LIBOR"
(London InterBank Offered Rate) et par analogie le ZIBOR (Zürich), le
EURIBOR (Euro) (Bruxelles), etc ... Le taux demandé s'appelle "LIBID" (pour
"bid rate"), et le taux pivot ou moyen "LIMEAN" (pour "mean rate").
Ces avances entre professionnels sont parfois accordées dans le cadre
d'arrangements négociés bilatéralement pour de longues durées, appelés crédits
stand-by, dont l'échéance est parfois éloignée de plusieurs années.
Les avances entre professionnels peuvent éventuellement se faire sur base
d'actifs remis en garantie (nantissements de titres, d'effets de commerce, ou de
contrats de ventes à tempérament), lorsqu'il ne s'agit tout simplement pas de la
mobilisation pure et simple de ces actifs (réescompte, prise en pension
communément appelée repurchase agreement ou « repo »).
Ces avances sont en principe traitées à deux jours (ouvrables) de délai.

LES OPERATIONS DE TRESORERIE

Ce ne sont plus des opérations de crédit à proprement parler des intermédiaires


financiers, mais plutôt des éléments de gestion de leurs liquidités immédiates.
On parle ici d’opérations de « call money », ou de dépôts « overnight », pour des

- 122 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

dépôts du jour au lendemain, ou de dépôts « tom/next » (tomorow-next day) sur


des dépôts du lendemain au surlendemain.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 9.

LES ENCAISSES

Les intermédiaires financiers gardent une certaine encaisse en monnaie (encaisse


billets) dont l'importance est minime par rapport à l'actif total.
Cette encaisse a pour but la satisfaction des besoins de liquidités, en monnaie
locale ou en devises étrangères, de la clientèle et il importe que les intermédiaires
financiers puissent faire face aux désirs de retraits de leur clientèle en espèces.
Comme leurs encaisses sont stériles (c'est-à-dire qu'elles ne rapportent pas
d'intérêts à leur détenteur), et exposées à des détournements et agressions, les
intermédiaires financiers réduisent leur importance autant que possible, contribuant
par-là à la tendance perceptible auprès de tous les agents économiques de se
rapprocher d'une "cashless society".
D'une manière générale, le rôle du billet se réduit, vu le développement de la
monnaie scripturale favorisé par les banques et renforcé par l'extension des moyens
de paiement électroniques. Aussi en 1988 la Banque Nationale, émettrice des
billets en Belgique, a-t-elle jugé nécessaire de requérir des moyens élargis
d'intervention pour pouvoir continuer à assumer son rôle monétaire par rapport
aux banques.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES OPERATIONS PASSIVES DES


INTERMEDIAIRES FINANCIERS

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

REMARQUE LIMINAIRE

Les opérations passives des intermédiaires financiers sont celles par lesquelles ils
récoltent, auprès de leurs bailleurs de fonds, les ressources nécessaires au
financement de leurs opérations actives.
Parmi les bailleurs de fonds, il importe de distinguer entre les bailleurs de fonds
non professionnels (qu'ils appartiennent au secteur privé ou public) et les
intermédiaires financiers professionnels, ces derniers constituant entre eux divers
marchés particuliers. Il en est ainsi du marché interbancaire et du marché du call
réservés traditionnellement aux banquiers; à noter, dans le cadre de la tendance à la
déspécialisation, l'élargissement ou les tentatives d'élargissement de certains de ces
marchés (par exemple aux sociétés de bourse, aux compagnies d'assurance voire
même aux non professionnels).
A remarquer qu'entre professionnels, les opérations passives des uns correspondent
aux opérations actives des autres et on se reportera pour celles-ci au chapitre
précédent.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 10.

LES DIFFERENTS INSTRUMENTS DE COLLECTES DE


RESSOURCES DES INTERMEDIAIRES FINANCIERS

LES DEPOTS

DEPOTS EN COMPTE COURANT A VUE

RAPPEL : CONVENTION DE COMPTE COURANT

Une convention de compte courant est celle par laquelle deux parties qui sont
destinées à posséder l'une à l'égard de l'autre des créances et des dettes réciproques
conviennent de les inscrire au fur et à mesure de leur genèse en un compte unique
et de n'en exiger que le solde à une date fixée de commun accord.
Remarquons aussi qu’il n'est pas nécessaire qu'une des parties d'un compte
courant soit un intermédiaire financier. Un fournisseur et son client commercial
établissent souvent entre eux des accords de compte courant. Une société et
certains de ses actionnaires ou administrateurs y ont aussi recours, de façon parfois
entachée d’ailleurs d’indélicatesses ou même d’illégalité.

CARACTERISTIQUE DU DEPOT A VUE

Le dépôt de fonds en compte courant "à vue" auprès d'un intermédiaire


financier est l'instrument de gestion de trésorerie des ménages et des entreprises
par excellence : chaque recette y est immédiatement disponible pour de nouvelles
dépenses, le solde étant prélevable à tout moment, sans délai. Le dépôt à vue est
donc assimilé à de la monnaie dans le sens le plus strict.

DEPOTS EN COMPTE A TERME

Contrairement au déposant en compte à vue, le déposant à terme ne peut disposer


du solde du compte qu'à l'échéance convenue (à moins que le banquier
compatissant ne permette un retrait anticipé - moyennant une indemnité de dédit
toutefois). En contrepartie de ce gel de fonds, le taux d’intérêt accordé est
supérieur à celui des dépôts en compte à vue. Le terme ou échéance du compte
peut être fixe ou mobile (à préavis).

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

COMPTES A TERME FIXE

Pour le compte à terme fixe, l'échéance est définie dès la date du dépôt. Le terme
le plus court est 1 jour. En Belgique, pour les ménages et pour les entreprises qui
ne sont pas intermédiaires financiers, le terme le plus court est normalement de 15
jours; des termes inférieurs sont parfois consentis sous la pression de la
concurrence : ainsi, pour certains déposants très importants, le délai minimum a été
ramené à 7 jours, voire moins. A l'autre bout de l'échelle, le terme maximum
rencontré dans la pratique pour les dépôts en compte n'excède guère deux ans, sauf
cas spéciaux - on préfère alors la formule des obligations et bons de caisse.

COMPTES A PREAVIS

Pour les comptes à préavis, l'échéance est définie à partir du moment où le


déposant aura notifié au dépositaire un préavis d'une durée convenue lors de la
constitution du dépôt (le plus souvent, préavis de 48 heures - en principe réservé
aux professionnels -, 15 jours, 1, 3 ou 6 mois); cette catégorie de dépôts est tombée
en désuétude.

COMPTES RUBRIQUES

Certaines professions sont amenées à recevoir et même à détenir temporairement


des fonds pour compte de tiers : c'est le cas des notaires et des avocats. Ces
dépositaires sont des clients désirables pour les intermédiaires financiers, qui y
trouvent des masses de dépôts unitaires intéressantes. Des comptes spéciaux ont
été imaginés pour attirer les titulaires de ces professions.
En Belgique, ces comptes sont tenus par "rubriques", c'est-à-dire que sous un
libellé au nom du notaire ou de l'avocat, des sous-comptes sont ouverts par
"affaire". Ces sous-comptes bénéficient de régimes spéciaux de termes et de
rémunérations. Pour éviter que le notaire ou l'avocat n'intègre ses propres fonds
dans les montants bénéficiant du régime spécial, les sous-comptes rubriqués
doivent être bien identifiés. Le bénéficiaire des taux spéciaux accordés est en
principe le propriétaire réel des fonds chez le notaire; en ce qui concerne les
avocats, il existe une convention entre banques et l'Ordre des Avocats aux termes
de laquelle la rémunération spéciale est versée à un fonds de secours pour les
avocats dans le besoin.

FIXATION DES TAUX DES COMPTES DE DEPOTS

Une série de facteurs influencent le taux des comptes de dépôt :

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LE TERME

Le terme convenu influe directement sur la rémunération. En principe, plus le


terme est éloigné, plus la rémunération est élevée, puisque le déposant consent un
sacrifice plus grand et court, en théorie, un risque plus important.

L'OFFRE ET LA DEMANDE

Le principe d’une rémunération plus élevée pour un terme plus élevé peut
cependant être déjoué par la loi de l'offre et de la demande influencée par les
anticipations des agents économiques et il arrive couramment que les taux des
termes les plus courts soient plus élevés que les taux des termes plus éloignés
(inversion de la "yield curve".

LE MONTANT DES DEPOTS

La rémunération sera aussi fonction des montants des dépôts : en principe, plus le
montant est important (du moins à partir d'un certain seuil), plus le taux aura
tendance à se rapprocher du taux "demandé" du marché interbancaire (bid rate).

LA DEVISE

Enfin, la rémunération dépendra de la devise du dépôt, puisque les taux dépendent


de la situation propre des pays émetteurs de monnaie.

REGULATION

La liberté pour les parties de fixer leur taux sur dépôts - qui était la règle avant les
années 30 - a connu des évolutions divergentes selon les pays et dans le temps.
Après que des banques eurent connu de grosses difficultés au cours de la grande
crise, de nombreux pays ont légiféré pour mettre les déposants à l'abri de
problèmes de remboursement par les établissements dépositaires, désastreux dans
leurs effets sociaux. Parmi ces mesures, retenons ici l'attribution de l'exclusivité
de la prise de dépôts à certaines catégories d'institutions, et la limitation des
niveaux de rémunération que ces établissements pouvaient allouer à leurs
déposants.
Les plafonds fixés aux taux ont varié au cours du temps, en fonction des
impératifs de la politique économique, mais toujours bien en dessous des taux du
marché monétaire pour des termes équivalents : de cette manière, on assurait une
marge de rentabilité - une rente de situation en somme - au secteur bancaire, ce
qui réduisait sa vulnérabilité aux accidents tout en émoussant son dynamisme
concurrentiel.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Aux Etats-Unis, les plafonds imposés d'autorité aux taux alloués aux dépôts
bancaires le furent en vertu de la "Régulation Q", prise en vertu du Banking Act
de 1933, qui succédait à des règlements anciens sur l’interdiction de l’usure.
En Belgique, les taux ont été fixés par concertation cartellaire du secteur bancaire
au sein de l'Association Belge des Banques (ABB), créée en 1936 comme
instrument de dialogue avec les autorités, en particulier pour la détermination des
taux d'intérêts créditeurs sur dépôts (TIC).
Dans les années d'après guerre, cette situation a évolué, notamment sous la
pression de la concurrence, surtout lorsque les taux du marché avaient tendance à
s'élever, et que la disparité entre ces taux de marché et les taux de rémunération des
dépôts se creusait : cela poussait les déposants à chercher des rémunérations plus
élevées et donnait aux dépositaires la tentation d'attirer avec peu d'effort des
moyens d'action élargis.
Un premier pas important dans cette direction a été franchi après la guerre (années
50) par l'apparition du marché de l'Eurodollar, né des versements du Plan
Marshall entre les mains d’Européens. Les taux pratiqués y étaient libres - hors
d’atteinte des réglementations.
En plaçant leurs dépôts dans les succursales étrangères, londoniennes notamment,
de leurs propres banques, les déposants américains suffisamment importants et
sophistiqués purent recevoir des rémunérations plus élevées que les plafonds
fixés par la Régulation Q. Pas plus que les règles intérieures britanniques ne
s'appliquaient aux dépôts autres qu'en sterling, la Régulation Q ne s'appliquait pas
aux succursales anglaises des banques américaines.
Plus tard, avec l'explosion inflationniste des années 70 et, corrélativement, celle
des taux d'intérêt, l'apparition des Money Market43 Funds (fonds communs
d’instruments financiers courts), permit à leurs promoteurs de proposer au public
une alternative aux dépôts bancaires, non soumise à la limitation de la Régulation
Q et offrant de manière alléchante des rémunérations bien plus en phase avec les
taux du marché. Les déplacements des dépôts qui s'ensuivirent et la nécessité de
recourir, en substitution, à des formes plus onéreuses de ressources, furent une des
causes majeures du début des déboires de certaines institutions - celle des caisses
d’épargnes, les S & L notamment, vu la fixité du taux sur leurs actifs à long terme.
L'extension de la concurrence à l'égard des dépôts de type bancaire, due à
l'existence d'instruments alternatifs mieux rémunérés et une vision plus libérale de
l'économie (Reagan), a finalement conduit à l'abrogation de la Régulation Q
dans les années 80.
En Belgique, les dispositions cartellaires sur les TIC (encouragées depuis les
années 30, on l'a vu, pour les mêmes raisons de sécurité bancaire et dont les
plafonds étaient concertés avec la Banque Nationale de Belgique) ont connu,

43 Marché monétaire = marché des instruments financiers à court terme, c.à.d. marché
interbancaire pour dépôts et avances jusqu’à un an, marché du papier commercial et de
l’escompte, marché des certificats de trésorerie.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

surtout à partir des années 60, des aménagements progressifs, généralement après
la constatation que certains membres du cartel succombaient aux tentations
d'enfreindre de manière discrète les règles fixées par le cartel.
Les dépôts en BEF subirent, surtout après l'instauration du précompte, l'attraction
des taux de pays limitrophes où les règles étaient différentes. Les coups de canif
aux conventions TIC frappèrent d'abord les "gros dépôts" (définis au départ
comme ayant BEF 25 millions minimum, ce seuil fut régulièrement abaissé).
Ensuite les dépôts en devises. Enfin les autres catégories de dépôts y compris les
dépôts à vue, en principe très faiblement ou pas rémunérés du tout.
De son côté, l’Union Européenne avait dès 1962 imposé, dans le cadre des
articles 85 et suivants du traité de Rome, la communication des accords
cartellaires du secteur bancaire qui pouvaient exister dans les états membres.
L'ABB avait communiqué les siens, en faisant valoir que les rémunérations des
services bancaires relevaient de la politique monétaire (à preuve la concertation
avec les autorités pour fixer les taux maximums) et qu'elles étaient donc couvertes
par l'exception spécifiquement prévue à cette fin dans le traité de Rome.
Mais des plaintes de clients - jugées fondées par la Cour Européenne de Justice
dans les années 80 - ont amené l’Union Européenne à exiger l'abrogation des
conventions sur les rémunérations payées sur services prestés par les
établissements financiers : d'abord en 1985, en matière de commissions sur les
services autres que les dépôts (par ex. location des coffres-forts, commission sur
transferts, etc...) (abrogées en Belgique en 1986) et puis plus récemment en matière
de TIC sur dépôts (abrogées en Belgique depuis juin 1991, avec le démantèlement
de la structure de concertation entre les établissements de crédit et la B.N.B.).
Il est vrai que les faits avaient chaque fois précédé la règle - le marché s'était
libéralisé sous la pression de ses facteurs les plus dynamiques, les plus imaginatifs et
aussi ... le moins respectueux des accords pris - les joueurs étrangers (américains
entre autres) s'étant d'ailleurs souvent prévalu de l'impossibilité juridique de
respecter les accords pris, compte tenu des législations antitrust de leur pays
d'origine.
Fondamentalement, on retiendra que lorsque la disparité entre marché et
conditions réglementées s'exacerbe, la pression concurrentielle devient telle que
le carcan réglementaire s'adapte, voire disparaît. En l'occurrence la
déréglementation des taux a provoqué le renchérissement global des ressources
du secteur au profit du déposant; en soumettant l'intermédiaire financier à une
pression sur sa marge, cette déréglementation lui fait retrouver une partie de sa
vulnérabilité antérieure aux années 30 et engendre :
9 une reréglementation compensatoire sur le plan prudentiel (renforcement
de la surveillance, règles sur les fonds propres...);
9 un retour de certaines ententes sur les tarifs, de façon inofficielle cette fois,
afin de limiter la concurrence. La concentration consécutive aux fusions
des années 1996-2000 en Belgique a permis le retour de pratiques
oligopolistiques discrètes.
9 une recherche de rémunération complémentaire : renchérissement du coût
du crédit pour rétablir la marge, tarification à un plus juste prix des autres

- 131 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

services (change, transferts,...) prestés antérieurement gratuitement ou en


dessous du prix de revient, tant que la sous-rémunération des dépôts le
permettait. Ceci était particulièrement vrai pour les comptes à vue qui
n'étaient et ne sont parfois que très peu ou pas rémunérés.
En effet, pour ce qui concerne les soldes créditeurs en comptes à vue, les
conventions belges prévoyaient un taux de 0,50 % l'an. En temps de stabilité, tant
que l'ensemble des taux restait bas, cette modicité de rémunération pouvait se
comprendre, d'autant plus que le compte à vue est le véhicule d'opérations souvent
prestées par les banques à titre gratuit (transferts, retraits, dépôts, ordres
automatiques, etc.
Cependant, comme exposé plus haut, la pression concurrentielle du marché (et le
désir d'accroître la masse de ces dépôts à vue d'autant plus intéressants que la
marge d'intermédiation s'élevait parallèlement aux taux d'intérêts) a incité des
établissements financiers à faire entorse au principe de la non-rémunération ou de
la rémunération faible du compte à vue, soit indirectement (création de comptes à 1
jour ou à quelques jours de terme) soit directement en accordant des taux plus
élevés sur les comptes à vue.
Fondamentalement, le problème de la rémunération des comptes à vue se pose
en ces termes : en dehors du besoin de couvrir le coût afférent à la réserve de
trésorerie à conserver par les banques pour faire face aux retraits de leurs clients,
est-il légitime de n'accorder sur ces comptes qu'une rémunération bien inférieure au
taux du marché, voire nulle, en contrepartie d'opérations prestées à titre gratuit ou
largement en-dessous du prix de revient ? Certes non, disent les uns, car il y a
confusion de genre (qu'il s'agit d'éliminer) dès lors qu'on fait subsidier par la sous-
rémunération des déposants, les services rendus à d'autres clients. Il faut donc
rémunérer mieux les comptes à vue, quitte à faire payer le prix des autres services
par ceux-là mêmes qui y recourent. Attention, disent d'autres, la gratuité de
diverses opérations est devenue une mission sociale des intermédiaires financiers
qui ont créé le besoin de ces services chez le client.
L'évolution récente tend à établir une tarification des rémunérations et des prix
plus réalistes par dégroupage ("unbundling") des opérations effectuées par les
banques pour leurs clients. Mais tant le poids de la tradition et la peur de "tirer le
premier" chez certains intermédiaires financiers que le poids politique des
associations de consommateurs constituent encore une résistance au
changement des usages tarifaires qui s'opère progressivement.

REMARQUE :
Pour les comptes à préavis, les taux varient en fonction de la durée du préavis. Au
départ, les taux appliqués seront ceux en vigueur pour les comptes dont le terme
fixe équivaut à la durée du préavis; ensuite, en cas de variation du tarif, un nouveau
taux est fixé dont la date d'entrée en vigueur dépendra de la durée du préavis
convenue. Du fait de la plus grande volatilité des taux depuis la fin des années 60,
ces comptes à préavis sont tombés en désuétude.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES LIVRETS OU LES CARNETS D'EPARGNE

PRINCIPE

Il s'agit à l'origine de petits carnets brochés, personnalisés au nom du titulaire, dans


lesquels s'inscrivent les dépôts et les retraits successifs et dont le solde est porteur
d'intérêts.
Les livrets accueillent les dépôts à tout moment; les retraits sont soumis à divers
préavis, qui sont fonction du montant du retrait souhaité par le titulaire.
Il en est cependant des préavis comme des taux d'intérêts : sous la pression de la
concurrence, certains établissements avaient pris l'habitude de ne pas les respecter à
la lettre à tel point que les titulaires en étaient arrivés à considérer ces carnets
comme de véritables instruments à vue, tout en jouissant d'une rémunération bien
supérieure à celle accordée aux comptes courants.
D'ailleurs certaines techniques ont été proposées qui apparenteraient de plus en
plus les carnets d'épargne aux comptes à vue : telle la velléité d'instaurer des carnets
à feuillets mobiles ou de permettre au départ du solde en carnets d'autres
opérations que le simple retrait ou virement vers un compte courant. Aussi, pour
remettre un peu d'ordre dans le système, la Commission Bancaire et Financière a-t-
elle restreint les opérations permissibles et codifié les conditions de retrait pour
ceux des carnets qui bénéficient de l'exonération fiscale et sur lesquels la
Commission a autorité, ainsi que l'a consacré l'arrêté royal du 30 décembre 1983.

FISCALITE

Jusqu’à concurrence de 1.500 € par ménage44, les intérêts sur les carnets répondant
aux normes de la Commission Bancaire et Financière sont exonérés d’impôt pour
le déposant, ce qui, à un taux de 3%, correspond à un dépôt de plus de 45.000 €. La
partie des intérêts qui rapporte plus que 1.500 € est soumise au paiement du
précompte mobilier de 15%. Remarquons que certains arrivent à contourner ce
plafond, de manière certes illégale, en ouvrant plusieurs comptes auprès de banques
différentes.

REMUNERATION

La rémunération de ces carnets de dépôt comprend deux éléments : un taux de


base actuellement de l'ordre de 2 à 3 %45. S'y ajoute, le cas échéant, une prime

44 Le fisc retient également les revenus éventuels de l’épargne des enfants et du conjoint.
45 Décembre 2002

- 133 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

d'accroissement46 (sur les nouveaux montants déposés) et de fidélité47 (sur la part


du dépôt restée stable pendant toute une année), pouvant atteindre 1 %. Le net
perçu par l'épargnant - qui équivaut en raison de l'exonération fiscale au coût
effectif de l'organisme collecteur - peut aller jusqu'à environ 3,75% à 4% l'an.
Les conditions attachées à l’octroi de ces primes sont parfois très contraignantes, et
peu explicites, ce qui a amené les autorités à intervenir, et les associations de
consommateurs à accuser certaines banques de publicité mensongères. Le coût
pour les banques de ces livrets d’épargne est généralement faible, inférieur au coût
des autres dépôts.

MOYEN D’ENCOURAGEMENT DE L’EPARGNE OU … ?

Ainsi, les carnets de dépôts - moyens d'action traditionnellement stables malgré les
facilités de retraits - sont, grâce à l’exonération de précompte48, relativement bon
marché pour les établissements de crédit. Il était dès lors tentant pour certains
intermédiaires financiers de vouloir accroître leur part de ce marché attrayant, au
point d’en perdre parfois la déontologie de base.
A remarquer qu'en tout état de cause, l'exonération fiscale sur carnets, introduite à
l'origine pour favoriser l'épargne populaire, est devenue une rente pour les
banques, rente provenant entre autres du cartel toléré par les autorités, et qui
maintient le taux de base des livrets des grandes banques à 2 % depuis 1998, quelle
qu'ait été depuis lors l'évolution des taux de marché.
Il semblerait que malgré les espoirs de "grand marché européen", la concurrence en
matière bancaire a plutôt diminué ces dernières années dans les pays (Belgique,
Suède, Pays-Bas) où les fusions bancaires ont été nombreuses. La Commission
Européenne examine de plus en plus sévèrement les pratiques oligopolistiques
des banques européennes, et en 2001 s'est pour la première fois opposé à une
fusion de Banques (en Suède) afin d'y préserver la concurrence.
L'exonération fiscale même fait aussi l'objet d'un débat de fond au niveau de
l'Union Européenne qui y voit un mécanisme de distorsion de la concurrence.

46 On parle de prime d’accroissement pour l’intérêt payé sur toutes les sommes qui se sont
ajoutées à la mise de départ et est ensuite resté sur le livret durant au moins six mois.
47On parle de prime de fidélité pour l’intérêt payé sur les sommes qui sont restées douze mois
consécutifs sur un même compte.
48 Ramené de 25 % à 10 % en février 1990, et reporté à 13,39 % en 1994, puis à 15 % début
1996.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CERTIFICATS DE DEPOT, BONS DE CAISSE ET OBLIGATIONS

NATURE

Un bon de caisse est une reconnaissance de dette par laquelle une institution
financière déclare avoir reçu une somme déterminée et s’engage à la rembourser
après un terme convenu, ainsi qu’à payer un intérêt convenu. Il s’agit en quelque
sorte d’une obligation émise par une banque. On différentie les certificats de dépôt,
les bons de caisse et les obligations (émises par la banque) sur base de la durée de
l’emprunt (voir infra).
Ces instruments de collecte d'épargne sont - en tous cas en Belgique - des titres de
dettes au porteur, contrairement aux dépôts et aux carnets qui sont nominatifs.
Qu'il s'agisse d'émissions "au robinet" (émissions en continu aux guichets des
intermédiaires financiers, sans marché secondaire organisé), ou d'émissions
ponctuelles par souscriptions larges en vue d'une cotation en bourse, ces émissions
d'obligations et de bons de caisse sont publiques; les émetteurs doivent se
soumettre aux règlements sur l'émission publique de valeurs mobilières, à savoir en
Belgique introduire un dossier auprès de la Commission Bancaire et Financière,
publier une notice, et tenir un prospectus d'émission à la disposition des
souscripteurs.

TYPES DE BONS DE CAISSE ET D'OBLIGATIONS

OBLIGATIONS ORDINAIRES

Un intérêt fixe est payé annuellement ou semestriellement; le bon de caisse est


remboursé dans son intégralité à l'échéance finale convenue.

BONS DE CAPITALISATION OU BONS DE CROISSANCE :

Dans ce cas les intérêts ne sont pas payés annuellement mais capitalisés et payés en
une seule fois, avec le principal, à l'échéance finale.
Une variante de ces bons de capitalisation est le "zero coupon bond" ou "zero bond"
(obligation à coupon zéro), par lequel le souscripteur verse au comptant la valeur
actuelle, calculée à un taux convenu, d'un capital qu'il touchera intégralement à
l'échéance.
Cette technique de capitalisation pose des questions fiscales intéressantes :
9 quand déclarer le revenu ? chaque année - au fur et à mesure de son
accumulation théorique - ou bien à l'échéance quand on touche effectivement
les intérêts capitalisés ?

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 la cession avec bénéfice de bons de capitalisation avant l'échéance fait-elle


naître dans le chef du vendeur des revenus ou une plus-value ?
Ces caractéristiques ont été exploitées par des investisseurs imaginatifs, mais ont
simultanément éveillé l'attention des autorités fiscales de divers pays, qui n'abordent
pas toujours le problème de manière identique. En Belgique, une loi du 20 juillet
1990 a pour la première fois soumis les assujettis à l'impôt des personnes morales
(les A.S.B.L. notamment, donc de nombreux fonds de pension) au paiement du
précompte sur la quote-part d'intérêt recueillis lors de la cession avant l'échéance de
titres à revenus fixes (qui comprennent les obligations à revenus capitalisés; les
modalités techniques de calcul de ce prorata d'intérêts de nature actuarielle a fait
l'objet d'une circulaire administrative à la fin de 1993).

BONS A TAUX PROGRESSIFS

Pour ces bons de caisse, le remboursement pourra être exigé annuellement, au gré
du souscripteur, mais si celui-ci consent à proroger sa détention pour une nouvelle
année, le taux qu'il perçoit sera augmenté selon un tarif convenu au départ.

REMUNERATION

Les bons de caisse procurent une rémunération fort axée sur celle des fonds
publics d'échéances correspondantes, avec des adaptations qui reflètent les
particularités propres aux types de bons de caisse dont il s'agit.
Les banques ne retiennent aucun frais, ni à la souscription, ni lors de l’encaissement
des coupons, ni à l’échéance. On comprend aisément ce traitement préférentiel,
étant donné qu’il s’agit là de sources de financement des activités de l’institution
émettrice.

LIQUIDITE

Le porteur de bons de caisse non cotés (cas le plus fréquent) pourra éventuellement
négocier, moyennant décote, le rachat de son papier par l'émetteur ou encore
s'adresser à certains intermédiaires (sociétés de bourse) qui tiennent un marché
officieux pour certains de ces titres.

FISCALITE

Dans les opérations passives, les intermédiaires financiers ont un rôle à jouer
pour compte du fisc : ils doivent éventuellement retenir un impôt ("withholding
tax"), là où la loi le prévoit, sur les revenus qu'ils distribuent en rémunération de
leurs ressources.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

En Belgique, c'est le cas du précompte mobilier, institué en 1962, en vue de


prélever à la source une partie de l'impôt dû à l'Etat sur les revenus d'intérêts :
l'objectif était d'en accélérer la perception et, dans une certaine mesure, de
compenser au moins partiellement l'éventuelle omission par le bénéficiaire d'en
faire la déclaration à laquelle il était tenu en vertu du principe de la globalisation des
revenus (supprimé dans les années 80).
D'une manière générale, ne sont pas soumis au précompte les non-résidents
(étrangers) qui fournissent une attestation à cet effet, ni les autres intermédiaires
financiers professionnels. Ceux qui en sont exonérés reçoivent dès lors l'intégralité
de la rémunération, sans défalcation du précompte.
Rappelons aussi l'exonération des premiers 1500 Euros de revenus des carnets de
dépôt, et le régime favorable des SICAV, dont l'émission de parts peut tendre à se
substituer aux instruments de placement sous-jacents (comptes de dépôts,
obligations, ...).

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 11.

LES RESSOURCES EN CAPITAUX PROPRES DES


INTERMEDIAIRES FINANCIERS

INTRODUCTION

Les fonds propres d'un intermédiaire financier - comme pour toute entreprise -
représentent la part des actionnaires dans le financement de l'ensemble de ses
activités, par opposition à la part des tiers créanciers (obligataires, déposants,
fournisseurs, etc..).
Ces fonds propres supportent au premier chef le risque de l'entreprise, c'est-à-
dire qu'en cas de pertes, celles-ci viendront s'y imputer par priorité, réduisant
d'autant les droits des actionnaires. Si les pertes excèdent les fonds propres, les
créanciers (dont les déposants) seront atteints à leur tour : il importe donc que les
fonds propres soient d'un niveau suffisant pour absorber les chocs éventuels et
sous-tendre l'activité menée par l'intermédiaire financier.
La structure des actifs des intermédiaires financiers - en particulier la part
immobilisée équivalente à l'outil industriel (les participations, les immeubles et le
matériel d'exploitation) - sera un premier élément à prendre en considération. La
nature des risques de crédits inhérents aux créances qu’ils détiennent à leur actif
importe aussi.

REGULATION ET FIXATION DE FONDS PROPRES MINIMUM

Les accidents subis par les intermédiaires financiers ont suscité depuis les années
30 des réglementations qui se sont préoccupées de fixer des fonds propres
minimums en valeur absolue pour différentes catégories d'institutions - les
banques, les caisses d'épargne, les compagnies d'assurance - et d'imposer de
surcroît le maintien de certains équilibres (ratios) entre ces fonds propres et divers
postes d'actifs et de passifs. Ces exigences (les "capital adequacy
requirements"), ont été déterminées par la loi et les autorités prudentielles de
chaque pays.
Les plus anciens de ces ratios de structure ont visé le rapport entre fonds propres
des actionnaires et fonds de tiers créanciers, c'est-à-dire le "gearing ratio"49.

49 "Gearing" ou "leverage" = bras de levier financier

- 138 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Dans divers pays (la Belgique a dès 1965 joué en la matière un rôle précurseur) on a
donc imaginé des ratios entre, d'une part, l'ensemble des actifs figurant dans le bilan
et les comptes d'ordre (chaque élément étant pondéré selon sa densité de risque) et,
d'autre part, les fonds propres : c'est le "risk assets ratio".

LE RISK-ASSETS RATIO

Cette approche requiert évidemment que l'on définisse les actifs, droits et
recours à pondérer et qu'on leur assigne une quotité de risque par catégorie.
En effet, un dépôt chez un correspondant, une créance hypothécaire, une
obligation d'état, un débit en compte-courant, une garantie donnée, une opération
swap ou un "future" ne présentent pas le même degré de risque. Il faut aussi fixer
les contours des fonds propres, ce qui n'est pas évident (inclusion des provisions,
des plus-values latentes?).

DEFINITION DE STANDARDS INTERNATIONAUX …

Les différences de vues entre pays sur l'organisation du système bancaire, sur le
régime du coefficient des fonds propres et sur la définition de ses facteurs ont
conduit à des dispositifs diversifiés - plus laxistes ou rigoureux selon les régions.
Du fait que le coût du capital propre exigé pour les activités d'un niveau de risques
donné est un facteur du prix de revient de ces activités, des différences quant au
minimum requis seront autant de facteurs de distorsion de concurrence. Aussi
depuis 1988, dans un contexte d'internationalisation croissante, tant un groupe
d'experts de banques centrales des principaux pays industrialisés (comprenant les
USA et le Japon) réunis en marge de la BRI à Bâle ("Comité Cooke") que l’Union
Européenne ont élaboré diverses recommandations et directives fixant des
normes minimums à respecter en la matière par les établissements bancaires de
leurs pays respectifs.
Des standards internationaux ont ainsi été fixés quant à :
9 La définition des fonds propres : Scission entre "capital primaire" (tier
one) : capital, réserves, provisions générales non affectées exprimées dans le
bilan, ..., et "capital secondaire" (tier two) dont le montant pris en
considération ne dépasse en principe pas 50 % du capital primaire :
provisions générales non affectées mais non exprimées en tant que telles (les
provisions affectées, exprimées ou non, sont exclues, même du capital
secondaire), plus-values latentes sur portefeuille, emprunts subordonnés50
dont l'échéance dépasse une certaine durée...; des sous catégories sont aussi
apparues, bénéficiant de règles d’incorporation spécifiques.

50 Les créanciers d'un emprunt subordonné sont remboursés après les autres créanciers au
cas où le débiteur tomberait en faillite ou serait mis en liquidation avant l'échéance de cet
emprunt.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 la classification des actifs au bilan et des autres opérations reflétées dans


les comptes d'ordre, en affectant à chaque catégorie un degré relatif de
risques, sous forme d'un coefficient de pondération (à majorer pour les
"gros" débiteurs individuels représentant eux-mêmes plus d'une certaine
fraction des fonds propres);
9 l'exigence minimum à rencontrer, par combinaison des éléments précités :
les fonds propres doivent couvrir entièrement certains actifs (participation,
immeubles d'exploitation p. ex.) et, pour le surplus, atteindre 8% minimum
de l'ensemble des autres risques pondérés;
9 l'application de ce système au bilan consolidé s'il s'agit d'un groupe
bancaire.
Un établissement de crédit n'atteignant plus le minimum requis doit soit
augmenter ses fonds propres, soit réduire ses activités (ce qui peut se faire par
cession d'actifs, par exemple par le biais d'une titrisation).

MAIS DES ARBITRAGES DELICATS …

Le dispositif d'ensemble (que chaque pays membre peut renforcer s'il le souhaite) a
fait l'objet d'études approfondies et d'arbitrages délicats - pour tenir compte de
considérations contradictoires : les pays participant à son élaboration ont voulu à la
fois renforcer la sécurité globale du système bancaire et en même temps ne pas
défavoriser, en termes relatifs, la position concurrentielle historique de leurs
établissements bancaires nationaux découlant de leurs contingences locales.
Par exemple, le sort réservé aux plus-values latentes sur portefeuille est
particulièrement important pour les pays à régime d' "Universalbanken" comme le
Japon et l'Allemagne, et la pondération accordée aux fonds d'état intéresse les pays
comme la Belgique où ils occupent une forte proportion de l'actif des bilans
bancaires.
Après une phase de transition, le dispositif prédécrit est entré pleinement en
vigueur en 1993.
Ainsi donc, inscrite dans le mouvement de la globalisation toujours plus
accentuée des activités bancaires au plan mondial, l'ouverture du grand marché
intérieur de l'Union Européenne - à tous les établissements de crédit51 et à de
nombreux produits financiers52 de chaque état membre - se fait dans des conditions
relativement harmonisées d'exigences en fonds propres vis-à-vis des établissements
bancaires qui y sont actifs.

51 Principe du libre établissement d'une institution de crédit agréée par un état membre, dans
chacun des autres pays de l'Union Européenne.
52 Principe de la reconnaissance réciproque, dans toute l'Union Européenne, des services
financiers s'ils répondent à la réglementation du pays membre dont ils émanent.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

PERSPECTIVES DE REGULATION

Par analogie avec ce qui se passe pour les établissements bancaires, des exigences
sont également fixées dans différents pays pour d'autres types d'intermédiaires
financiers : sociétés de bourse, gérants de fortune, ...
Une directive européenne a été promulguée en mars 1993 afin d'imposer à partir
de 1995 des normes minimales communes : celles-ci visent notamment les
risques de contrepartie et les risques de marché sur instruments financiers et
leurs dérivés. A leur tour, ces normes ont été également ajoutées aux normes
bancaires antérieures qui, s'étant surtout concentrées sur les risques de crédit, ne les
avaient guère prises en ligne de compte.
Certaines activités bancaires se sont développées de façon parfois anarchique ces
dernières années, et sont accusées de provoquer ou d’amplifier les crises
économiques que connaissent certains pays et certains marchés. Les prêts
bancaires accordés parfois fort légèrement à certains pays d’Asie et d’Europe de
l’Est, ainsi qu’aux Fonds spéculatifs (« hedge funds ») sont visés ; l’usage mal
contrôlé des produits dérivés aussi.
Les recommandations de la BRI sont en révision depuis 1999, et ont fait l'objet en
2001 de conclusions très concrètes. Les principales modifications portent sur un
accroissement des catégories de risques, un recours important aux ratings
internes des banques, et à l'introduction de la notion de risque opérationnel. Ces
conclusions ont donné lieu à un débat intense, et l'objectif de mise en application
de ces accords de "Bâle II" a été retardé, de 2004 à 2005 puis à 2006. Les
directives de l’Union Européenne sont en phase de discussion afin d’être amendées
en fonction des évolutions des recommandations de la BRI.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 12.

AUTRES MOYENS DE COLLECTER L’EPARGNE

LES ASSURANCES-VIE

Techniquement parlant, des polices d'assurance-vie appartiennent à la sphère


d'activités des compagnies d'assurances et non à celles des banques.
Néanmoins, il s'agit de l'activité d'assurance qui se prête le mieux au croisement
d'activités (« cross selling ») entre la banque et l'assurance, afin de déboucher
sur une collecte de dépôts bon marché.
Ceci, à nouveau grâce à une exemption fiscale qui devrait bénéficier aux
"assurés", mais bénéficie en pratique plutôt aux compagnies d'assurances. Le
privilège fiscal est combiné également à une limitation de concurrence encouragée
par les pouvoirs publics.
Le schéma de l'assurance-vie est simple : "l'assuré" souscrit à une assurance-vie,
dans le cadre d'un contrat qui l'amène à payer régulièrement des primes, dont
certains montants peuvent être déduits de son revenu imposable. Ceci constitue un
capital à ses héritiers s'il décède, ou à lui-même s'il est encore en vie. Les intérêts
servant à constituer ce capital sont très faiblement taxés, voire totalement détaxés.
Instrument de protection familiale au départ, l'assurance-vie est dans une large
mesure devenue un moyen d'épargne dont l'attrait fiscal a permis aux compagnies
d'assurances de concurrencer les banques et surtout les fonds de pensions dans
l'activité de constitution de pensions complémentaires. Depuis le début des années
90, les banques ont d'ailleurs constitué des compagnies d'assurances propres, afin
de développer elles-mêmes ces activités, qui n'ont souvent plus qu'un lointain
rapport avec l'assurance proprement dite. Le cynisme atteint son maximum depuis
que les banques et les compagnies assurances ont développé des bons d'assurance,
dépôts déguisés sous forme de contrats d'assurance à 5 ou 7 ans, qui ne sont en fait
que des bons de caisse à fiscalité réduite, ainsi que des fonds d'investissement
déguisés sous forme de "contrats d'assurance" pour raison fiscale également.

- 142 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES ORGANISMES DE PLACEMENT COLLECTIFS (OPC)

DEFINITION ET INTRODUCTION

Le terme « organismes de placement collectifs » (OPC) est une appellation générale


qui désigne des organismes financiers dont les parts sociales sont destinées à
être vendues au public, et qui ont pour objet le placement de l’épargne et pour
objectif la répartition des risques de l’investissement.
Des distinctions53 entre OPC peuvent être faites selon :

LA NATIONALITE :

Ce n’est pas parce que des parts d’un OPC sont commercialisées en Belgique que
l’OPC est belge. La globalisation des marchés, l’évolution des réseaux
d’information et de commercialisation, l’introduction de l’euro et la tendance à
l’uniformisation des procédures réglementaires permettent aux OPC étrangères de
commercialiser leurs parts sociales. Nous verrons qu’une partie des OPC est
soumise à la réglementation européenne, alors qu’une autre partie est réglementée
par la Commission Bancaire et Financière.

LA FORME JURIDIQUE : LES FONDS DE PLACEMENT ET LES SOCIETES


D’INVESTISSEMENT

Les OPC se présentent sous deux formes juridiques principales et cette distinction
aura des conséquences déterminantes en matières fiscale, commerciale,
réglementaire que nous analyserons par après :

• LES FONDS DE PLACEMENT


Ils sont constitués d’un patrimoine indivis (de valeurs mobilières et de liquidités),
sans personnalité juridique, et sont gérés par une société de gestion pour le
compte des indivisaires.

• LES SOCIETES D’INVESTISSEMENT


Elles sont le plus souvent constituées sous la forme de sociétés anonymes (SA) ou
de société en commandite par actions (SCA), ayant la personnalité juridique.

53 Ces distinctions n’ont pas de caractère exhaustif, la famille des OPC étant très large et
présentant d’énormes variantes.

- 143 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LE CARACTERE OUVERT OU FERME DE L’OPC :

Les OPC ouverts présentent un nombre variable de parts émises, fluctuant selon
les demandes de souscription ou au contraire les demandes de remboursement de
la part des investisseurs.
Les OPC fermés présentent quant à eux un nombre fixe de parts émises, dont la
négociation, après constitution et en dehors d’une augmentation de capital
ultérieur, ne peut s’opérer qu’en bourse.
Remarquons par ailleurs que les fonds de placement, contrairement aux sociétés
d’investissement, choisissent presque uniquement la formule du capital variable.
Pour les sociétés d’investissement, on distingue communément les SICAV
(Sociétés d’Investissement à CApital Variable) et les SICAF (Sociétés
d’Investissement à CApital Fixe), dont les plus connues sont les SICAFI, les
SICAF immobilières.

INTERET ET UTILITE D’UN OPC

POUR L’INVESTISSEUR

La diversification entre les différents instruments de placement (actions,


obligations, liquidités), la diversification géographique (Europe, Amérique, Asie,
pays émergents) et la diversification sectorielle (distribution, télécoms, finance,
énergie, …) constituent la meilleure manière de diminuer les risques du portefeuille
d’un investisseur.
Toutefois, cette diversification optimale du portefeuille n’est généralement
possible que si sa taille dépasse quelquefois plusieurs millions d’€, rendant l’accès
aux bénéfices de la diversification difficile aux « petits » porteurs. Les
intermédiaires financiers ont depuis quelques années répondu à ce segment du
marché en proposant aux investisseurs une gamme de produits adaptés à leur
stratégie d’investissement, tenant compte à la fois des risques consentis et des
objectifs poursuivis en termes de rentabilité.
Le succès des organismes de placement collectif a été colossal durant ces dernières
années. Les caractéristiques propres aux OPC expliquent largement leur succès :

• REDUCTION DES FRAIS :

Qu’il s’agisse de frais de transactions et de tarification ou de frais fixes tels que


certains frais de gestion, ces frais seront répartis sur une plus grande somme
d’argent, ce qui évite au particulier de supporter des charges importantes en regard
du montant investi.

• GESTION PROFESSIONNELLE :
La gestion du portefeuille est confiée à des spécialistes qui suivent les
développements économiques et politiques et étudient les particularités des

- 144 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

différents marchés dans lesquels ils investissent. Cela évite à l’investisseur


particulier de devoir suivre régulièrement l’évolution de son portefeuille.

• DIVERSIFICATION DES PLACEMENTS


Cette diversification permet d’optimiser le couple risque-return, permettant aux
petits porteurs de minimiser les méfaits ponctuels de certaines fluctuations sur les
marchés financiers et d’ainsi diversifier leur risque pour une mise pouvant être
limitée. La diversification peut être géographique au sein d’une même catégorie de
placements, monétaire, sectorielle, ...

• ACCES A CERTAINS MARCHES


Il s’agit par exemple d’investissements dans des pays où il est difficile, pour des
raisons légales ou encore purement pratiques, d’investir. Il peut par ailleurs
également s’agir d’investissements dans des pays développés mais où l’accès direct à
certains segments de marché est impossible au particulier. Tel est le cas par
exemple du marché des certificats de trésorerie ou celui des obligations linéaires, de
l’investissement en immeubles de bureaux pour un particulier modeste, etc....

• LIQUIDITE
L’investisseur peut à tout moment vendre sa participation. Cette liquidité peut être
assurée par la négociation en bourse ou par l’engagement même de l’OPC de
racheter les parts. Cette opération demande toutefois très souvent le paiement
d’une commission de sortie.

• TRANSFERT D’UN COMPARTIMENT A UN AUTRE


Certains OPC présentent différents compartiments caractérisés par une politique
d’investissement spécifique. Ainsi, à la base, l’investisseur qui désire déterminer lui
même sa stratégie d’investissement peut alors allouer son épargne à différents
compartiments d’un même OPC. Aussi le régime des OPC offre-t-il la possibilité
de passer d’un compartiment à l’autre moyennant des frais réduits voire inexistants,
permettant ainsi à l’investisseur de revoir sa politique en cours d’année.

• AVANTAGES FISCAUX (VOIR INFRA)


Par ailleurs, si les avantages sont nombreux, les OPC ne sont pas dénués
d’inconvénients. A titre d’exemple, nous pouvons citer le montant élevé des frais
de gestion annuelle, frais d’entrée, frais de sortie. De même, la politique
d’investissement suivie n’est pas toujours très transparente. La valeur d’inventaire
de la société d’investissement ou du fonds n’est pas toujours claire. Enfin, une trop
grande diversification peut diminuer la rentabilité du portefeuille.

POUR L’INTERMEDIAIRE FINANCIER

• DES FRAIS DE GESTION


Les promoteurs (banques ou sociétés de gestion spécialisées) sont liées à ces
sociétés d'investissement par un contrat de gestion qui leur permet d'encaisser des
droits divers lors de la souscription, parfois lors de la vente des parts, et en tout cas

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

en rémunération de leurs activités de gestion. Des rémunérations moins visibles


sur les opérations des sociétés d'investissement (commissions sur transactions,
droits de garde, etc.) sont souvent prélevées également par les promoteurs.

• MEILLEURE ADEQUATION ACTIF/PASSIF ET DIMINUTION DU RISQUE


D’INTERMEDIATION

En orientant leurs clients vers des OPC plutôt que vers des produits bancaires
classiques, les banques réduisent leur risque d’intermédiation, leur consommation
de fonds propres, etc…
Etant donné les différentes commissions prélevées à divers stades sur
l'administration et la gestion des sociétés d'investissement, cette activité est devenue
une des plus rentables qui soient pour les banques. C'est d'ailleurs là une des
raisons pour laquelle les banques semblent peu motivées à trop accroître la
rémunération sur les livrets d'épargne, car de l'argent placé par les épargnants dans
les sicav leur laisse une plus grande rentabilité, sans plus aucun risque ni aucune
consommation de fonds propres.

LES ORGANISMES DE PLACEMENT COLLECTIF EN VALEURS


MOBILIERES (OPCVM) : LA DIRECTIVE DU 20 DECEMBRE 1985

La Communauté Européenne, par le truchement du Conseil des Ministres, a le


droit d’imposer aux Etats membres des directives qui ont primauté sur la législation
et la réglementation nationales et qui induisent ainsi de nombreux changements
dans la législation.

HARMONISATION MINIMUM : LE « PASSEPORT EUROPEEN »

Depuis de nombreuses années, les différents Etats membres ont exprimé le souhait
d’une harmonisation. Les négociations se sont basées sur deux principes
essentiellement :
9 l’harmonisation des principales règles relatives aux OPCVM ;
9 l’harmonisation des conditions de concurrence ;
9 la création d’un passeport européen pour les OPCVM agréés dans les pays
membres : lorsque un OPCVM est agréé dans son pays, il peut
commercialiser librement ses parts dans les autres pays de la Communauté.
Toutefois, les OPCVM doivent respecter les règles de commercialisation et de
publicité du pays d’accueil.
La Directive a choisi la voie des règles minimales. Et donc, les Etats membres
peuvent ajouter des dispositions plus exigeantes, à condition bien sûr qu’elles ne
contredisent pas la Directive.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CONDITIONS D’APPLICATION

La Directive s’applique à tout OPCVM situé sur le territoire d’un Etat membre de
la Communauté Européenne. Ces OPCVCM doivent être ouverts et recueillir
l’épargne publiquement.
La Directive couvre ainsi à la fois fonds communs de placement ouverts et les
sociétés d’investissement à capital variable. Les autres OPCVM ne sont pas
couverts. Autrement dit, leur commercialisation n’est pas libre mais est
systématiquement conditionnée par une autorisation de l’autorité financière
compétente du pays d’accueil.

AGREMENT DE L’AUTORITE DE CONTROLE COMPETENTE DU PAYS D’ORIGINE

L’OPCVM doit seulement être agréé par l’autorité de contrôle compétente du pays
dans lequel il se situe et cet agrément vaut pour tous les Etats membres, en vertu de
ce principe de reconnaissance réciproque. Cet agrément porte sur des critères
clairement déterminés.

OBLIGATIONS CONCERNANT LA STRUCTURE DE L’OPC

Le capital de la société de gestion doit être suffisant pour assurer une gestion
efficace de ses activités.
Les activités de la société de gestion doivent se limiter à la gestion de fonds
commun de placement et de sociétés d’investissement (spécialisation de leur
activité) mais ces sociétés peuvent gérer des fonds provenant de différents OPC,
voire des OPC non soumis à la Directive.
La garde des actifs du fond doit être confiée à un dépositaire unique,
généralement une banque ou une institution financière. Sa responsabilité est
entièrement engagée. Les activités et responsabilités du dépositaire ne se limitent
pas uniquement à la garde des actifs du fond. Le dépositaire doit également prendre
en charge : la vente, l’émission, le rachat, le remboursement et l’annulation des
parts pour le compte du fonds ou de la société de gestion. Il doit également
s’assurer de la correction des calculs de la valeur des parts et s’assurer de
l’affectation des fonds.
Les fonctions de société de gestion et de dépositaire ne peuvent pas être
exercées par la même société.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

QUELQUES ELEMENTS DE POLITIQUE DE PLACEMENT DES OPCVM

Un OPCVM doit investir (comme son nom l’indique) ses fonds essentiellement
dans des valeurs mobilières, telles qu’elles sont énumérées dans la Directive54.
Cette dernière introduit quelques dérogations particulières.
Remarquons qu’un OPCVM ne peut pas détenir de liquidités à titre principal
d’objectif de placement. Toutefois, il est permis d’en détenir à titre accessoire et
temporairement. Cette possibilité vise à légitimer une pratique courante des
gestionnaires, qui préfèrent rester liquides dans les moments d’incertitudes
boursières. Le recours aux produits dérivés n’est pas interdit, pour autant que
l’OPC s’assure d’une couverture adéquate. L’OPC peut également se prémunir
contre le risque de change au moyen d’instruments appropriés.
Un certain nombre de règles55 relatives à une bonne répartition des risques sont
énumérées.
Les OPCVM peuvent placer leurs fonds dans des Fonds Publics à concurrence de
maximum 35%. A cet égard, les Etats membres peuvent par dérogation et en
respectant le principe de répartition des risques, permettre aux OPCVM d’investir
jusqu’à 100% de leurs actifs dans des Fonds Publics. Mention doit en être
clairement faite.
Un OPCVM peut placer ses fonds dans un autre OPCVM à concurrence de
maximum 5% d’une part et pour autant que ce dernier ait été reconnu comme tel.
Remarquons enfin que la Directive énonce un principe qui vise à interdire à un
OPCVM de poursuivre une prise de contrôle d’une société.
Il ne faut pas perdre de vue que, dans certains cas, l’autorité de contrôle nationale
peut déroger aux règles de la directive, sans que ce principe de répartition des
risques ne soit remis en question.

OBLIGATIONS CONCERNANT L’INFORMATION DES PARTICIPANTS

La société de gestion du fonds commun de placement, pour chacun des fonds


gérés par elle, et la société d’investissement doivent publier un prospectus, dont
les indications minimales ont été précisées, ainsi que des rapports annuels et
semestriels.
Les données comptables doivent être contrôlées et communiquées aux autorités
compétentes.

54 Nous renvoyons l’étudiant intéressé aux textes de la Directive du 20 Décembre 1985


55 Par exemple, Un organisme de placement ne peut placer plus de 10% de ses actifs dans des
valeurs mobilières d’un même émetteur. D’autre part, les placements en valeurs mobilières d’un
même émetteur, qui représentent plus de 5% de la valeur des actifs de l’organisme de placement,
ne peuvent excéder globalement 40% de la valeur des actifs de l’organisme de placement.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Le prospectus et les rapports annuels doivent être offerts gratuitement.


Le prix d’émission, de vente, de rachat ou de remboursement des parts doivent être
clairement rendus publics au moins deux fois par mois.

OBLIGATIONS GENERALES DE L’OPCVM

Il est interdit à un OPCVM d’emprunter. Toutefois, les Etats membres peuvent


autoriser un emprunt à court terme à concurrence de 10% des actifs (pour les
sociétés d’investissement) ou de la valeur du fonds (pour les fonds communs de
placement).
De même, il leur est interdit d’octroyer des crédits ou des garanties en faveur de
tiers, ou encore de pratiquer des ventes à découvert sur leurs valeurs mobilières, car
ces dernières opérations présentent un caractère spéculatif.
Ils sont enfin obligés de racheter des parts à la demande du participant, sur base
de la valeur d’inventaire du jour de la demande.

DISPOSITIONS SPECIALES APPLICABLES AUX OPCVM QUI COMMERCIALISENT


LEURS PARTS DANS DES ETATS MEMBRES AUTRES QUE CEUX OU ILS SONT SITUES.

En règle générale, un OPCVM qui commercialise ses parts dans un autre Etat
membre doit respecter les dispositions législatives, réglementaires et administratives
qui sont en vigueur dans cet Etat et qui ne relèvent pas du domaine régi par la
présente directive, à savoir :
9 des règles relatives à l’inscription dans le registre de commerce ;
9 des règles en matière de promotion ;
9 des règles en matière de concurrence déloyale ;
9 des règles en matière de démarchage ou autre méthode de commercialisation.
Et le pays d’accueil n’a pas à intervenir quant à l’agrément des OPCVM, sur les
règles relatives à leur structure, sur les règles en matière de gestion, sur les règles
concernant les informations, sur les règles relatives au contrôle (voir principe du
passeport européen).
Tout OPCVM peut faire de la publicité dans l’Etat membre de
commercialisation. Dans le cadre de ces dernières activités, il doit respecter les
dispositions régissant la publicité dans cet Etat.
D’autre part, l’OPC doit disposer d’un service financier dans le pays d’accueil
pour assurer le paiement, le rachat ou le remboursement des parts aux participants.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CLASSIFICATION LEGALE DES OPC : LA LOI BELGE DU 4 DECEMBRE


1990 RELATIVE AUX OPERATIONS FINANCIERES ET AUX MARCHES
FINANCIERS

Cette loi prévoit sept catégories différentes de placement et précise bien qu’un
OPC ne peut choisir qu’une seule de ces catégories. Il s’agit des organismes de
placement en :
9 placements conformes à la Directive européenne (OPCVM) ;
9 valeurs mobilières et liquidités ;
9 matières premières, options et contrats à terme sur matières premières ;
9 options et contrats à terme sur valeurs mobilières ou sur devises et contrats à
terme sur indices boursiers ;
9 biens immobiliers ;
9 capital à haut risque ;
9 autres placements autorisés par le Roi.
Par organisme de placement, cette loi entend « tout organisme dont l’objectif
exclusif est le placement de capitaux recueillis auprès du public ».
Sont donc exclus du cadre de cette loi :
9 des organismes qui s’occupent de placement collectif mais dont ce n’est pas
l’objectif exclusif (ex : caisses d’épargne, compagnies d’assurance, fonds de
pension)
9 des organismes qui ne recueillent pas leurs capitaux auprès du public (ex :
clubs d’investissement)
Ainsi, un OPC destiné à des compagnie d’assurance ou des fonds de pension ne
sont pas régis par cette loi.
Il est également précisé que le contrôle des OPC est réalisé par la Commission
Bancaire et Financière.

OPCVM

Nous renvoyons à ce qui a été déjà dit. La loi belge renvoie presque complètement
à la directive européenne.

OPC EN VALEURS MOBILIERES ET LIQUIDITES

Il n’y a pas de très grandes différences entre le régime des OPCVM et celui des
autres OPC en valeurs mobilières et liquidités. La politique de placement est très
similaire, si ce n’est que la deuxième catégorie peut détenir des liquidités de
manière permanente et conformément à sa politique d’investissement.. Mention
doit être faite dans les statuts ou le règlement de gestion. De plus, cette dernière
catégorie d’OPC peut également détenir des titres de créance, mais avec une
limitation de 10% de son capital ou de la valeur de son fonds. Les règles de

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

répartition des risques sont similaires à celles des OPCVM. Notons toutefois une
plus grande souplesse par rapport à ces dernières.
Remarquons aussi que les autres OPC en valeurs mobilières et liquidités peuvent
placer leurs actifs dans des OPC monétaires (liquidités et autres instruments du
marché monétaire, des OPC indiciels (valeurs d’un indice de référence) et des fonds
de fonds (OPC qui investissent dans d’autres OPC). Les interdictions auxquels ils
sont soumis sont très proches des celles qui s’appliquent aux OPCVM.

AUTRES

Les cinq autres types d’OPC énumérés par la loi belge font également l’objet d’une
définition, d’une énumération des conditions d’inscription, de fonctionnement et
d’émission et de commercialisation des parts. Ces cinq types divergent
essentiellement en termes de politique de placement, comme le suggère d’ailleurs
leurs dénominations respectives.

CLASSIFICATION DES OPC OU DE LEURS COMPARTIMENTS SELON


LE TYPE D’INVESTISSEMENT REALISE ET CLASSES DE RISQUE

Nous pouvons classer les OPC selon le type d’investissement qu’ils réalisent.

OPC D’OBLIGATIONS :

Ils investissent en valeurs mobilières à revenus fixes, dont l’échéance est supérieure
à trois ans.

OPC A MOYEN TERME :

Ils investissent en valeurs mobilières à revenus fixes, dont l’échéance est comprise
entre six mois et trois ans.

OPC MONETAIRES :

Ils investissent essentiellement en liquidités et en valeurs à court terme (moins de


six mois), telles que les dépôts à terme, les certificats de trésorerie, les obligations
ayant une échéance rapprochée, le papier commercial et les certificats de dépôt..

OPC D’ACTIONS :

Ils investissent principalement en actions de sociétés, belges ou internationales,


diversifiées sectoriellement ou géographiquement..

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

OPC INDICIELS :

Leur performance est liée à l’évolution d’un indice boursier, à celle de devises ou
d’un panier d’actions.

OPC MIXTES :

Ils investissent tant en actions qu’en obligations.

OPC IMMOBILIERS :

Ils investissent principalement en biens immobiliers.

FONDS DE FONDS

Ce sont des OPC qui investissent dans d’autres OPC.


Dans le prospectus d’émission se trouve un indicateur du risque de
l’investissement dans un OPC. Il correspond à une classe de risque comprise entre
0 et 5. Cette classification est établie sur base de l’écart-type des returns
mensuels (mesure de la dispersion autour d’une moyenne) observés durant un
certain nombre d’années précisé dans le prospectus.

classe 0 écart-type compris entre 0 et 2,5%

classe 1 écart-type compris entre 2,5% et 5%

classe 2 écart-type compris entre 5% et 10%

classe 3 écart-type compris entre 10% et 15%

classe 4 écart-type compris entre 15% et 20%

classe 5 écart-type supérieur à 20%

La classe de risques étant déterminée sur base des observations du passé, elle
doit être interprétée avec prudence. La volatilité évolue au fil du temps et la classe
de risques du passé n’engage nullement la responsabilité de l’OPC sur l’évolution
future. En cas de changement de classe de risque, mention en est faite au rapport
suivant.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

QUELQUES OPC BIEN CONNUS DES INVESTISSEURS

SOCIETES D’INVESTISSEMENT

• SICAV
Ce sont celles que l’investisseur connaît probablement le mieux. Ces SICAV sont
généralement spécialisées dans un créneau particulier (voir supra)

• SICAF
L’investisseur est moins familiarisé avec les SICAF que les SICAV. Les SICAF sont
presque exclusivement utilisées en Belgique pour un investissement dans
l’immobilier. On parle d’ailleurs de SICAFI (SICAF immobilières). Cette dernière a
ainsi dans son portefeuille des bâtiments et des terrains, mais aussi une série de
droits reposant sur des actifs immobiliers (actions émises par des sociétés
immobilières, certificats immobiliers, droits d’option sur des biens immobiliers,…).
Une SICAFI est tenue de distribuer au moins 80% de son bénéfice net à ses
actionnaires.

FONDS DE PLACEMENT

Il s’agit de formules d’investissement qui bénéficient d’avantages fiscaux pour


autant que le capital ne soit prélevé qu’après une certaine période, liée au statut du
personnel.

• LES FONDS D’EPARGNE PENSION

• LES HEDGE FUNDS


On voit également, depuis le milieu des années 90, proliférer des Fonds de
placements poursuivant des politiques moins sectorielles, et annoncer simplement
qu'elles pratiqueront les formes de placement et de spéculation qui leur semblent
les plus rentables, de préférence en mettant à profit les effets de levier que
procurent les instruments de couverture. Ces Fonds de placements,
particulièrement répandus aux Etats-Unis, s'appellent des Hedge Funds. Il en
existe aussi un grand nombre en Europe, adoptant la forme de fonds de placement
ou de sicav.

REGIME FISCAL DES OPC

Le régime fiscal des OPC est très complexe et matière à de nombreux


changements. Il n’est de plus pas uniforme et de nombreuses exceptions y sont
introduites. Par ailleurs, il est important de bien distinguer, d’une part, la fiscalité
dans le chef de l’investisseur belge, et d’autre part, le régime fiscal dans le chef de
l’OPC. Nous ne pouvons, dans le cadre de ce cours, traiter cette matière. L’étude
du régime fiscal est traitée – de manière partielle certes – dans les cours de droit
fiscal I (impôt sur les personnes physiques) et de droit fiscal II (impôt sur les

- 153 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

sociétés). Le cours de droit commercial fournit également de précieuses


informations.

FISCALITE DANS LE CHEF DES OPC DE DROIT BELGE

Les éléments qu’il convient de garder à l’esprit lorsque l’on analyse la fiscalité dans
le chef des OPC de droit belge est la distinction entre fonds de placement et
société d’investissement.
La première catégorie ne possède pas la personnalité juridique et le principe de
transparence fiscale est appliqué : il est donc taxé à travers ses participants. Dès
lors, un fonds de placement s’acquitte non seulement des impôts étrangers à la
source sur ses revenus, mais aussi du précompte mobilier belge. A cet égard, on
peut déjà noter une exception : les fonds d’épargne-pension, dont les revenus sont
exonérés de précompte mobilier belge.
Les sociétés d’investissement possèdent quant à elle la personnalité juridique et
sont normalement soumises à l’impôt des sociétés. Toutefois, dans la pratique,
leur base imposable est presque nulle. Les sociétés d’investissement bénéficient
d’une exonération de précompte mobilier pour tous les revenus mobiliers qu’elles
perçoivent, sauf pour les revenus d’actions d’origine belge. Toutefois, dans ce
dernier cas, elles peuvent entièrement récupérer le précompte retenu. D’autre part,
elles peuvent bénéficier des conventions préventives de la double imposition
conclues par la Belgique et récupérer de cette manière tout ou partie des retenues à
la source effectuées à l’étranger.

FISCALITE DANS LE CHEF DE L’INVESTISSEUR BELGE

Si l’on se penche sur les investisseurs personnes physiques, il est important de


distinguer les OPC qui émettent des parts ou actions de capitalisation56 et ceux
qui émettent des parts ou actions de distribution57.
Les dividendes payés par les sociétés d’investissement subissent la retenue du
précompte mobilier, alors que les plus-values réalisées lors du rachat de parts de
capitalisation ou de distribution sont exonérés d’impôts pour les particuliers et pour
les personnes assujetties à l’impôt des personnes morales.
Les revenus des parts de distribution58 des fonds de placement sont encaissés nets59
et ne sont plus assujettis à aucun autre impôt pour les personnes physique et les

56L’OPC ne distribue pas de revenus mais les capitalise, ce qui permet dans certains pays
comme la Belgique d’éviter tout impôt et précompte.
57 L’OPC distribue annuellement un dividende.
58 La loi ne prévoit rien pour le régime fiscal des fonds de capitalisation. Il est en effet peu
probable que de tels fonds soient créés, car ils ne pourront capitaliser que les revenus nets après
perception du précompte mobilier, ce qui efface immédiatement l’avantage de cette deuxième
formule par rapport aux fonds de capitalisation.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

personnes assujetties à l’impôt des personnes morales. Les plus-values réalisées lors
du rachat de parts sont exonérées d’impôts. Les fonds d’épargne-pension
constituent une catégorie distincte de fonds de placement ayant un statut fiscal
propre. Les sommes qui sont affectées à l’acquisition de parts peuvent donner lieu
à une réduction d’impôts pour les personnes âgées de18 à 64 ans.

59 Les revenus mobiliers sont soumis au précompte mobilier, comme nous l’avons vu, au
moment de la perception (par la société de gestion). Par conséquent, le PM n’est plus applicable
au moment de la distribution de ces revenus aux participants.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

AUTRES OPERATIONS TRAITEES PAR LES


INTERMEDIAIRES FINANCIERS

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

En dehors des opérations par lesquelles les intermédiaires financiers mettent à la


disposition d'utilisateurs les ressources financières qu'ils ont récoltées auprès des
détenteurs de fonds excédentaires, ils rendent à la communauté une série de
services ayant trait à la circulation de fonds ou de titres financiers.

L'impact de ces opérations de services se traduira, pour une très grande partie, non
dans des activités liées au bilan proprement dit et génératrices de marges d’intérêt,
mais dans des activités de prestations de services et de commerce,
génératrices de commissions ou de bénéfices sur différence de prix.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 13.

CONSERVATION DE VALEURS

INTRODUCTION

Il s'agit en fait d'opérations qui se retrouvent très tôt dans l'histoire des institutions
financières. En particulier, dans le cadre des foires commerciales du Moyen Age,
certaines personnes faisaient profession de recevoir en dépôt les moyens de
paiement des marchands qui ne souhaitaient pas circuler en possession de leurs
valeurs et qui retiraient les sommes nécessaires aux paiements de leurs transactions
au fur et à mesure de leurs besoins. Dans un deuxième stade, ces marchands
prirent l'habitude de disposer sur leurs dépôts au moyen de tirages.
La matière de transaction sur titre, les fonctions premières des intermédiaires
financiers concernent d’une part le courtage, fonction mise en présence d’un
acheteur et un vendeur, d’autre part le dépôt-titre.
Le recours à un dépositaire spécialisé peut accroître la sécurité des transactions.
Le client recevra confirmation d’un ordre d’achat ou de vente non seulement de la
part du courtier qui a reçu l’ordre, mais aussi de la part du dépositaire (que l’on
appelle d’ailleurs « custodian » en anglais). Ceci le protège contre une négligence ou
une fraude de la part du courtier. Un recours à des dépositaires agréés est d’ailleurs
une des conditions d’agréation d’organismes de placement en valeurs mobilières.
Examinons les caractéristiques de cette seconde activité.

2 TYPES DE DEPOTS

En fait, on distingue deux types de dépôts de valeurs :


9 le dépôt irrégulier : il s'agit du dépôt de choses fongibles, c'est-à-dire que
rien ne permet de les distinguer par rapport à d'autres objets de la même
sorte. Puisqu'elles sont librement interchangeables entre elles, le
dépositaire ne doit pas restituer la chose même aux déposants, mais
uniquement une même quantité et qualité par rapport à ce qu'il a reçu.
9 le dépôt régulier : il s'agit du dépôt de choses non fongibles, c'est-à-dire qui
doivent être restituées telles quelles aux déposants. Le dépositaire ne peut
donc en aucun cas faire usage de ce dépôt.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES DEPOTS DE TITRE

Aujourd'hui, le déposant de titres se voit demander s'il consent à les remettre en


"pot commun", c'est-à-dire de les voir s'ajouter à l'ensemble des autres titres
semblables en dépôt auprès de l'établissement financier, et à ne pas nécessairement
recevoir, lors du retrait, les titres portant les numéros de ceux qui avaient été
déposés. En rendant ainsi fongibles les dépôts de titres, les dépositaires peuvent
abaisser sensiblement le coût administratif de la conservation, diminution qui est
répercutée sur la rémunération du dépositaire (abaissement relatif des "droits de
garde").
A remarquer qu'en matière de titres, la fongibilité ne peut pas s'appliquer dans
tous les cas. Citons le cas des obligations à lots, où l'individualisation par numéro
est capitale puisque c'est ce numéro qui fait l'objet du tirage, et donne
éventuellement droit à l'attribution du lot.
Possédant les installations nécessaires à la conservation de valeurs (galeries de
coffres-forts), les établissements financiers mettent parfois une partie de celles-ci à
la disposition de leur clientèle : ils ne sont alors plus dépositaires de valeurs, mais
simplement bailleurs de coffres-forts (de tailles fort diverses) dont les clients sont
locataires.

LE RESPECT DE CERTAINS DEVOIRS

En matière de conservation, les intermédiaires financiers ont un certain nombre de


contraintes à respecter :
9 devoir de sécurité, qui s'exerce dans diverses directions :
ƒ protection physique : disposition de salles blindées, sous contrôle
électronique avec, le cas échéant, des gardes armés en surveillant
l'accès;
ƒ protection administrative : introduction de procédures d'accès aux
salles de coffres, tenue de registres constatant les allées et venues, accès
aux coffres par deux personnes différentes ayant chacun une clé
distincte, pose du chiffre secret par le titulaire du coffre en isolation
totale, ...
ƒ protection économique : conclusion d'assurances contre l'incendie,
l'inondation, le vol.
9 devoir de discrétion : les valeurs conservées dans les coffres loués aux
clients ne concernent que ceux-ci : soit que les clients ne désirent pas que
d'autres aient connaissance des valeurs entreposées, soit que les documents
ainsi mis en sécurité soient strictement personnels et confidentiels. Aussi les
dépositaires ménagent-ils fréquemment de petits isoloirs, dans la salle des

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

coffres même, où les déposants peuvent se retirer et manipuler le contenu de


leur coffre à l'abri de regards indiscrets.

EVOLUTION : LES CENTRALES DE DEPOT ET DE LIVRAISON


DE TITRES

Une étape nouvelle a été franchie par la création d'organismes de conservation


interprofessionnels : c'est ainsi que, en Belgique, les banques et les agents de change
ont créé la C.I.K. (Caisse Interprofessionnelle des virements de titres) à laquelle ils
apportent la plupart des titres pour lesquels ils ont l'accord de fongibilité de la part
de leurs clients. Ces titres sont remis en pool, la comptabilité permettant
d'attribuer à tout moment les quantités physiques aux établissements dépositaires
participants. En cas de transaction (en bourse par exemple) impliquant une
livraison de titres entre deux établissements participants, il suffira d'une
transcription comptable pour acter la mutation.
Cette technique a été étendue au plan international : deux organismes (Euroclear
à Bruxelles et Cedel à Luxembourg) assurent la conservation de titres de
professionnels du monde entier. Ils ont également développé une activité de
compensation en titres qui va plus loin que le simple transfert en compte, et permet
entre autres la liquidation des transactions par « livraison contre paiement » (en
anglais Delivery against payment). Ceci permet de fortement réduire le risque de
contrepartie.
Ces organismes agissent essentiellement comme des prestataires de services
comptables, et ne détiennent souvent pas les titres physiquement lorsque ceux-ci
sont au porteur : ils en confient le dépôt à des banques équipées pour cela.
En 2000, Cedel et la centrale de compensation de la "Deutsche Börse" ont
fusionné sous le nom de Clearstream. Une fusion de celle-ci et de Euroclear
permettrait une consolidation et une rationalisation de cette activité en Europe,
mais elle semble peu probable.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 14.

LES PAIEMENTS

INSTRUMENTS

En dehors de paiements comptant en espèces, les règlements financiers se font


essentiellement par ordre de transfert donné par le débiteur d'une transaction à un
établissement financier d'effectuer le paiement à son créancier, ou par mise en
recouvrement par le créancier d'un titre de créance à encaisser auprès de son
débiteur ou de l'établissement financier auprès duquel ce titre de créance pourrait se
trouver domicilié.

TRANSFERTS : LES VIREMENTS

Pour ce qui concerne les transferts, la forme la plus courante est le virement, qui
requiert l'intervention de deux établissements financiers : celui du donneur
d'ordre du paiement et celui du destinataire.

TITRES FINANCIERS

LE CHEQUE BANCAIRE

Pour ce qui concerne le titre financier mis en recouvrement par le destinataire,


l'instrument le plus fréquent est le chèque bancaire qui lui aura été remis par le
débiteur.
Dans ce cas, il ne faut pas nécessairement deux établissements financiers,
puisque le créancier peut encaisser directement le chèque en se rendant
personnellement auprès du banquier du débiteur; toutefois, cette procédure lourde
(et souvent impraticable en raison des distances) peut être évitée par le créancier
par la remise du chèque à son propre banquier, qui procédera à son encaissement
pour le compte du créancier et le cas échéant créditera immédiatement celui-ci
"sauf bonne fin" (= sous réserve de la récupération effective des fonds du
débiteur).
A l'instar des effets de commerce (qui sont généralement des titres de créance que
les établissements financiers sont aussi chargés d'encaisser pour compte du
créancier, lorsqu'ils ne les ont pas escomptés), le chèque est soumis à une
législation qui précise son usage.
On distingue les parties suivantes :

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 - le tireur, qui est le débiteur de la somme à payer et le titulaire du compte


auprès de l'établissement financier;
9 - le tiré, établissement financier qui paiera le chèque pour compte du tireur
pour autant que la provision existe;
9 - le bénéficiaire, qui est le destinataire du paiement.
Tout comme l'effet de commerce, le chèque est endossable par le bénéficiaire à un
endossataire, qui peut lui-même en transmettre le bénéfice à un nouvel
endossataire, et ainsi successivement.
L'émission de chèques sans provision est sanctionnée pénalement; la provision
découle soit de l'existence d'un montant disponible sur le compte, soit de la place
disponible dans le cadre d'une ligne de crédit accordée au titulaire du compte.
La certitude du paiement par celui qui accepte un chèque en règlement d'une dette
n'est pas absolue. On peut pallier à cette incertitude par la création du "chèque
certifié", sur lequel le banquier tiré appose avant sa remise au bénéficiaire une
inscription promettant d'honorer à sa présentation le chèque émis par le tireur, ou
encore par la création de "chèques de banque", émis à la demande du donneur
d'ordre par la banque elle-même sur ses propres caisses ou celles d'un de ses
correspondants : dans ces cas l'établissement financier tiré débitera le compte de
l'émetteur, dès la certification du chèque de son client ou l'émission de son propre
chèque, pour s'assurer de la provision.
La circulation des chèques est très intense dans les pays anglo-saxons. Après la
guerre, constatant le faible développement de ce moyen de paiement en Belgique,
un Comité pour la promotion du chèque a été créé dans le sein de l'Association
Belge des Banques; ce comité a procédé à des campagnes publicitaires, en même
temps que les établissements financiers faisaient proliférer leurs agences et
succursales pour se rapprocher de clientèles de plus en plus étendues en leur
ouvrant largement l'accès aux carnets de chèques.
Plus tard ont été inventées les cartes de garantie de chèque, auxquelles ont été
associées les facilités de crédit "automatique" dont question précédemment.
Les conséquences ont dépassé les prévisions des promoteurs : d'une part, il y a eu
pas mal d'abus en matière de chèques sans provision, les tribunaux se montrant
indulgents du fait même de l'agressivité commerciale dans la mise à disposition de
ces méthodes de paiement vis-à-vis d'un public insuffisamment formé; d'autre part
le circuit de recouvrement entraîne des manipulations nombreuses, génératrices de
frais fixes importants, d'autant moins supportables que les chèques sont de faible
dénomination.
C'est la raison de l'avènement des cartes personnalisées de paiement
électronique permettant le règlement d'achats aux points même de vente (Points
of Sale = POS) par raccordement de ceux-ci à des centraux électroniques, eux-
mêmes branchés sur les centres informatiques des banques des titulaires de compte.
Grâce à une identification magnétique, la carte permet le transfert instantané du
compte du client au compte du fournisseur, les frais d'infrastructure étant en partie

- 162 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

du moins compensés par la réduction de frais et de risques des manipulations


physiques60.

AUTRES TITRES FINANCIERS

On peut également citer comme moyens de règlements financier le mandat,


l’assignation ou le chèque circulaire, qui sont des titres de paiement émis par un
établissement financier (ou par la poste) d'ordre d'un débiteur envers son créancier;
ainsi que les quittances, émises en particulier par les compagnies d'assurance pour
l'encaissement de leurs primes, qui sont mises en recouvrement comme des effets
de commerce. Il y a enfin les documents commerciaux eux-mêmes, qui peuvent
être mis en recouvrement, par recours aux services documentaires des
établissements financiers, sans pour autant qu'il existe de crédits documentaires
sous-jacents.
L'expéditeur d'une marchandise confie la facture et l'ensemble des documents
d'expédition ayant trait à la marchandise vendue à un établissement financier, à
charge pour celui-ci de les présenter au destinataire contre paiement au comptant
(dans ce cas la remise des documents est fréquemment accompagnée d'une traite à
vue) ou à terme (dans lequel cas la remise des documents sera accompagnée d'une
traite à échéance, que l'on priera l'établissement financier de faire accepter par le
débiteur au moment de lui remettre les documents) : c'est ce qu'on appelle un
encaissement documentaire. Ce système, contrairement au dispositif du crédit
documentaire, ne donne pas à l'expéditeur de certitude d'être payé puisqu'il n'y a
aucun engagement bancaire a priori d'honorer les documents présentés.

MECANISMES UTILISES

PAIEMENTS LOCAUX

PRINCIPE

Depuis que plusieurs établissements financiers ont eu à se faire des règlements


entre eux pour compte de leurs clients respectifs (du fait des transferts et

60 Dans ce sillage, le dernier né des moyens de paiement est le “porte-monnaie électronique”,


petite carte à puce acceptée dans divers points de vente. Non personnalisée, on l’acquiert pour le
montant pour lequel il est chargé (on peut le recharger après épuisement). Evitant les
inconvénients des cartes classiques qui requièrent l’introduction d’un numéro code
d’identification, le porte-monnaie électronique est destiné au règlement de petites sommes. La
carte Proton en est une des premières concrétisation, la Belgique bénéficiant d’une des premières
expériences au monde dans ce domaine.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

encaissements que ceux-ci ordonnent), ils ont pris l'habitude de se rencontrer


journellement en un même lieu pour des raisons de commodité.
D'informelles, ces rencontres en "clearing house" ou "Chambre de
Compensation" ont été formalisées. En Belgique, elles se tiennent auprès de la
Banque Nationale de Belgique qui met à disposition une série de services
administratifs pour faciliter le dénouement des opérations.
En fait, toutes les créances et les dettes réciproques des établissements financiers
sont inscrites dans un tableau unique, qui fait apparaître par différence pour chaque
établissement le solde que celui-ci doit soit payer à l'ensemble de ses confrères, soit
recevoir d'eux.
Des problèmes peuvent d'ailleurs se poser aux établissements financiers qui ont
par solde un déficit, c'est-à-dire qui doivent payer à l'ensemble de leurs confrères
plus qu'ils n'en reçoivent : ils peuvent à cet effet utiliser leurs avoirs disponibles
auprès de la Banque Nationale, ou recourir aux avances que la Banque Nationale
est disposée à leur consentir dans le cadre de lignes individuelles, à taux
croissants61, accordées établissement par établissement.

EVOLUTION DU SYSTEME

Différents systèmes sont venus améliorer le fonctionnement de la Chambre de


Compensation :

• CHEQUE « TRUNCATION »
Pour les chèques de faible importance, il n'y a plus remise matérielle à la banque
domicile des chèques par la banque chargée de l'encaissement, ainsi que cela se
ferait normalement en Chambre de Compensation. Les chèques restent entre les
mains des banques chargées de l'encaissement, la banque domicile ne recevant que
les indications de montant, de numéro du chèque et de numéro de compte
permettant de débiter le compte de l'émetteur du chèque.
Il en résulte des gains substantiels en manipulations, mais des inconvénients
quant aux difficultés de retrouver les erreurs éventuelles, signalées la plupart du
temps par le client émetteur du chèque après réception de l'extrait de compte le
débitant; on remarquera en particulier que quand le chèque n'est plus transmis à
l'établissement financier domicile, celui-ci n'est plus en mesure de vérifier la
signature de l'émetteur, ce qui peut retarder la découverte d'abus éventuels. Il
n'empêche que dans l'ensemble, les gains provenant des avantages du cheque
truncation ont été de loin supérieurs aux conséquences des inconvénients cités.

• CHAMBRE ELECTRONIQUE DE COMPENSATION


A la tradition manuelle des documents de virements et de transferts, il tend à se
substituer l'usage de remise de bandes ou autres supports magnétiques, voire de

61 Jusqu'à un certain plafond : taux ordinaire, un peu plus élevé que le taux des adjudications sur
effets de commerce; au-delà : taux pénalisateur (2 % plus élevé que le taux ordinaire).

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

leur transmission télématisée, formatés de manière standard, ce qui facilite


énormément leur traitement. Le développement de ces techniques a commencé, il
y a déjà plusieurs années, par les plus grands établissements financiers, mais son
extension aux autres s'est poursuivie au fur et à mesure de l'adaptation de chacun
aux techniques informatiques nécessaires.

PAIEMENTS ELOIGNES

Dès le début, pour des raisons de sécurité, on a tenté de minimiser la nécessité de


transports effectifs de fonds. C'est ainsi qu'est né le système de correspondants
entre marchands - mués ensuite en établissements financiers - opérant sur des
places distinctes, qui permettait aux uns de disposer auprès des autres de fonds
sans devoir procéder à un transport physique pour chaque transaction isolée.
La disposition sur ces comptes se faisait précisément par les "lettres de change",
dont l'usage s'est transformé au cours des siècles.
Aujourd’hui encore, lorsque le transfert ou encaissement ne se fait pas sur la place
même où se trouve situé l'établissement financier qui initie l'opération, celui-ci en
chargera sa succursale, sa filiale ou son correspondant situé sur l'autre place
concernée. Ce dernier y utilisera les mécanismes de compensation locaux.
Lorsque le bénéficiaire ou le débiteur sont localisés en dehors des rayons d'action
des banques locales, l'acheminement ou le recouvrement s'effectue par pèlerin
spécial ou, plus simplement, par la poste.
Là où les courants de transferts et d'encaissements le justifient, des comptes
réguliers sont entretenus par les établissements financiers auprès de leurs
correspondants, ce qui pose le problème de l'alimentation de ces comptes et des
méthodes de prélèvement.
A cet effet, des comptes croisés sont généralement ouverts par les deux
établissements financiers en cause : un établissement financier ouvrira, dans ses
propres livres (généralement dans sa propre monnaie), un compte appelé
"vostro" (ou "loro") à son correspondant éloigné. Il y inscrira en crédit les dépôts
faits par ce correspondant auprès de lui et en débit les retraits ordonnés par ce
correspondant. A l'inverse, l'établissement financier ouvrira auprès de son
correspondant (et généralement dans la devise de celui-ci) un compte appelé
"nostro" dans lequel seront enregistrés au débit les dépôts que cet établissement
aura fait auprès de son correspondant et au crédit les retraits qu'il lui aura ordonnés.
A noter que les comptes vostri peuvent présenter des soldes débiteurs ou les
comptes nostri des soldes créditeurs, dès lors que soit l'établissement financier, soit
son correspondant aura consenti des avances à l'autre : c'est ce qui se passera par
exemple, lors de transferts ou de retraits, quand l'approvisionnement du compte
n'aura pas été fait à temps pour couvrir le règlement demandé.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

COUT - REMUNERATION

DES FRAIS ELEVES

Comme on le voit, l'ensemble des services de règlements financiers sont


générateurs de frais directs et indirects qui peuvent être élevés : il y a les frais
d'écritures, la disposition d'un réseau de guichets, l'entretien du réseau de
correspondants, le développement des programmes et réseaux informatiques, les
frais de courrier ou de télécommunications, les frais périodiques de clôture du
compte et de calcul des intérêts, ainsi que le coût entraîné par le maintien d'une
provision suffisante en moyens de trésorerie pour permettre à tout moment les
règlements ordonnés par les clients des établissements financiers.

LE SYSTEME DES « DATES DE VALEUR »

Ce dernier élément justifie d'ailleurs le système de "dates de valeur", c'est-à-dire


les dates conventionnelles, distinctes des dates de transactions effectives, à partir
desquelles elles sont enregistrées en comptabilité d'intérêt : ainsi un transfert
ordonné le jour J auprès d'une banque sera inscrit en comptabilité le jour J (date de
l'opération) mais avec en regard une deuxième date J - 1, qui est la date de prise en
considération pour le calcul des intérêts. De même la réception d'un transfert en
faveur du compte le jour K sera enregistré ce même jour K, mais avec en regard
une date valeur K + 1 pour les besoins des calculs d'intérêt.
En fait tout se passe comme si l'établissement financier devait avoir à sa disposition
la trésorerie nécessaire pour exécuter l'ordre de paiement un jour entier avant son
exécution ou comme s’il n'avait pu disposer de la trésorerie reçue lors de l'arrivée
du paiement en faveur de son client que le lendemain de cette réception. La
justification du système des dates valeurs est actuellement mise en cause par les
associations de consommateurs et par le législateur, à fort juste titre.

TARIFICATION DES SERVICES

La couverture des frais liés aux règlements pose le problème de la tarification de ces
services. Avant que les ententes ne soient proscrites par l'Union Européenne en
matière de services bancaires (années 80), des barèmes assez uniformes existaient
dans divers pays pour les encaissements d'effets de commerce, les encaissements
documentaires, les virements et encaissements de chèques internationaux; en
matière de transferts et d'encaissements de chèques nationaux, la situation était plus
variée, allant de la gratuité totale y compris les frais de port (OCP)62, jusqu'à

62 Office des chèques postaux.

- 166 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

l'application de commissions de complet des frais de port, de télécommunications,


de clôture périodique, etc.
La notion de gratuité ou quasi gratuité procède de l'idée que certains services
comme le transfert ou l'encaissement de chèques doivent être supportés par
l'établissement financier qui bénéficie de la jouissance des soldes débiteurs ou
créditeurs laissés en compte par ses clients et lui procurant une marge
rémunératrice. L'intermédiaire nourrit d'ailleurs l'espoir qu'une fois clients, ceux-ci
auront recours aux autres services rémunérés de la banque. Il y a paradoxe lorsque
divers établissements ont des notions différentes du type de service qui peut être
presté gratuitement : dans certains établissements on ne percevra pas la
rémunération couvrant les frais afférents aux opérations de change, tandis que dans
d'autres ce seront précisément les opérations de règlements financiers qui ne seront
pas tarifés : les clients perspicaces profiteront des contradictions, ce qui sera par le
jeu de la concurrence un facteur de réduction globale des prix facturés aux clients
des établissements financiers. Les clients perspicaces sont cependant trop peu
nombreux, et les ententes tarifaires ne sont pas inconnues.
Aussi en Belgique, diverses tentatives d'harmonisation de la tarification des
prix des services parallèlement au taux d'intérêts créditeurs ont eu lieu entre les
différents types d'établissements financiers, ainsi qu'entre les établissements
financiers d'un même type : la Banque Nationale de Belgique a même tenté dans le
courant des années 70 de favoriser certains aspects de cette harmonisation.
Ces tentatives avaient cependant été abandonnées, vu l'évolution de la
jurisprudence et dès lors de la pratique européennes, qui ont conduit à
l'abrogation obligatoire de toutes conventions tarifaires des services bancaires - à
l'exception de certaines facturations entre banques elles-mêmes - avec effet au 1er
avril 1986 pour ce qui concerne la Belgique.
Depuis lors, de telles tentatives de tarifer leurs services relatifs au fonctionnement
des comptes-courants ont été reprises par de nombreux autres établissements
financiers sous la pression d'une rentabilité érodée. Cependant le pouvoir
politique (Ministère des Affaires Economiques) désireux de protéger un
consommateur irrité a longtemps retardé les autorisations qu'il décernait dans le
cadre de la réglementation des prix.
Un compromis a été atteint en janvier 1991, par lequel les clients se sont vus
reconnaître le droit de réaliser gratuitement à travers leurs comptes un nombre
minimum de transactions ("paquet de base"), la tarification - néanmoins plafonnée
- s'appliquant facultativement aux opérations au-delà du minimum.
La réglementation des prix a finalement été abrogée en avril 1993, et les
établissements de crédit sont depuis lors entièrement libres de fixer leurs tarifs, qui
sont plutôt en hausse, probablement du fait de concertations plus discrètes que les
conventions officielles d'antan.
Le coût des transferts internationaux étant resté globalement élevé en 2002, même
au sein de la zone Euro, la Commission Européenne a imposé une limite au coût
que peuvent facturer les banque pour ce type d’opération : à partir de 2003, les
transferts au sein de la zone Euro ne pourront coûter plus que des transferts
nationaux.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 15.

LES OPERATIONS DE CHANGE


Si les opérations bancaires de conservation et de transport de fonds sont fort
anciennes, le change est peut-être la plus vieille de toutes, remontant à l'origine
même de la monnaie. En effet, celle-ci revêtait des formes différentes selon les
aires (parfois fort restreintes : ville ou village) où elle était en usage. Déjà chez les
anciens Egyptiens, Mésopotamiens et Grecs, les changeurs florissaient, ancêtres des
cambistes contemporains.

BILLETS DE BANQUE - CHEQUES DE VOYAGES

De nos jours encore, les opérations de change les plus simples sont celles qui
concernent la fourniture de moyens de paiement pour voyageurs se rendant à
l'étranger. Les intermédiaires financiers font à leurs guichets le commerce de
billets de banque étrangers, voire la fourniture de chèques de voyages.
Ces derniers sont des chèques de montants pré-déterminés, émis par des
organismes notoires sur leurs propres caisses et internationalement acceptés
comme moyen de paiement par de nombreux organismes (banques, hôtels,
compagnies aériennes, restaurants, commerçants, etc.).
Les émetteurs sont des organismes spécialisés (American Express, Thos
Cook, ...) ou des banques de grande dimension (Bank of America, Crédit
Lyonnais, Banco di Roma, ...) qui approvisionnent en formules vierges un réseau
international de banquiers revendeurs. Ces derniers les vendent à leur tour, contre
perception d'une commission de l'ordre de 1 % flat, à leurs clients, qui les signent
une première fois pour identification à l'achat et une deuxième fois, à l'ordre du
bénéficiaire, lors de leur utilisation comme instrument de paiement.
La commission est partagée entre le revendeur et l'émetteur, à qui est
immédiatement retransmise la contre-valeur des chèques vendus. Celui-ci bénéficie
donc de la trésorerie flottante ("float") tant que les chèques ne lui sont pas
présentés au remboursement, ce qui peut durer longtemps.
Les opérations sur billets de banque et chèques de voyages en devises ne
représentent cependant qu'une infime partie des opérations en monnaies
étrangères.

- 168 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES REGLEMENTS EN DEVISES

FONCTIONNEMENT

Pour leur partie essentielle, les règlements en devises des agents économiques
s'effectuent par virements ou remises de chèques ou d'effets, se dénouant en fin
de compte par transferts bancaires internationaux.
A cette fin, les agents économiques acquièrent ou cèdent leurs devises au travers de
leurs banques; celles-ci les acquièrent ou les cèdent à leur tour sur les marchés
des changes interbancaires et les reçoivent ou en disposent auprès de
correspondants dans les pays des devises en cause.
C'est donc au départ de comptes entretenus auprès de correspondants du pays de la
devise acquise que les règlements en cette devise s'effectuent pour compte des
donneurs d'ordre étrangers.

EXPOSITION AU RISQUE DE CHANGE

Le maintien de tels comptes expose les banques à des risques de position de


change lorsqu'elles sont titulaires pour leur compte propre des devises qui s'y
trouvent.
Le calcul de ce risque de change et des plus- ou moins-values qui résultent à chaque
instant des fluctuations constantes des cours de change sur les marchés s'effectue
au moyen de techniques comptables appropriées, au travers de comptes internes
dits "de contrepartie" ou "de conversion".

CONTROLE ET REGLEMENTATION

S'agissant de soldes en devises qui influencent les réserves de change du pays de la


banque titulaire, il est compréhensible que les autorités monétaires de certains pays,
dont de nombreux pays en voie de développement tentent de réglementer et de
contrôler le maintien et l'usage de ces avoirs. Aussi existe-t-il de par le monde un
florilège de méthodes de réglementations et de contrôles de change à travers
lesquels les intermédiaires financiers doivent se mouvoir pour l'exécution de leurs
opérations. Les pénalités financières d'un non-respect des réglementations en
cause peuvent être très lourdes car les sanctions peuvent aller jusqu'à obliger les
intermédiaires à dénouer des opérations conclues et à les recommencer dans les
conditions réglementaires, les cours pouvant avoir changé dans l'entre-temps; ceci
sans préjudice d'amendes ou confiscations éventuelles infligées aux contrevenants
des réglementations.
En Belgique, à l'issue de la dernière guerre, le législateur a confié la gestion des
réglementations et du contrôle des changes à un organisme autonome : l'Institut
Belgo-Luxembourgeois du Change (I.B.L.C.), qui dépendait en fait de la Banque
Nationale de Belgique où il se trouvait d'ailleurs logé.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Le principe de base sur lequel s'appuyait la réglementation belge entre 1944 et 1990
était l'institution d'un double marché des changes :
9 le marché réglementé, où se sont traitées uniquement les opérations
d'achat et de vente de devises relatives aux règlements d'opérations
commerciales (livraison de biens et de services internationaux); la Banque
Nationale de Belgique intervenait dans ce seul marché pour maintenir le
cours du franc belge dans le voisinage de parités déterminées par rapport à
d'autres monnaies : dans le cadre du système de Bretton Woods de 1944
jusqu'en 1970, du "serpent monétaire" ensuite jusqu'en 1979, et enfin du
Système Monétaire Européen (SME) de 1979 jusqu'en 1990;
9 le marché libre, où se traitaient les opérations de ventes et d'achats de
devises relatives aux règlements d'opérations financières : investissements et
désinvestissements en actifs financiers, immobiliers, etc ...; la Banque
Nationale de Belgique n'intervenait pas sur le marché libre qui était dès lors
entièrement soumis à la loi de l'offre et de la demande.
Malgré certaines osmoses entre les deux marchés, ce système isolait les transactions
commerciales, qui représentaient l'essentiel et avaient besoin de stabilité, des
opérations financières, plus erratiques et spéculatives que la Banque Nationale de
Belgique n'estimait pas devoir protéger.
Il s'ensuivait une disparité de cours pour une même devise selon que l'on passait
par l'un ou l'autre marché. Faible en période normale, l'écart pouvait devenir
substantiel en cas de tension (on a atteint 16 % d'écart en novembre 1981).
Quoique ayant donné de bons résultats depuis la guerre, et ayant inspiré à
l'occasion des tentatives similaires à l'étranger, ce système de double marché a été
abrogé en mars 1990 dans le cadre des mesures de libération de mouvements des
capitaux imposé par l'Union Européenne.
Le passage à Euro depuis 1999 pose de très importantes questions politiques, telles
que convergence des politiques économiques des pays concernés, pouvoirs de la
future Banque Centrale Européenne, introduction de nouveaux billets de banque,
exclusion des banques privées des pays hors-Euro des mécanismes de clearing,
mais il a simplifié pur les pays en cause la gestion des problèmes de change.

TYPES D'OPERATIONS DE CHANGE

LES OPERATIONS AU COMPTANT

Lors d'une acquisition de devises "au comptant", la livraison des devises et la


contre-livraison en monnaie propre n'ont en fait lieu que deux jours ouvrables
bancaires plus tard; ce sont plutôt des opérations à très court terme que du
comptant véritable. Aux deux jours de base, s'ajoutent le cas échéant les week-ends
et les jours fériés qui sont différents d'un pays à l'autre ce qui peut compliquer les
opérations.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES OPERATIONS A TERME

Celles-ci ont pour but la couverture de risques de change différés dans le chef
des agents économiques. Le principe est le suivant : on achète (ou on vend)
aujourd'hui, à un cours fixé aujourd'hui également, une certaine quantité d'une
devise qui ne sera livrée et payée qu'à un terme ultérieur (correspondant
normalement à une échéance de règlement dans la devise en cause).
La différence positive (négative) entre le cours du terme et le cours du comptant
d'une devise s'appelle le report (déport) ; ces report et déport reflètent les
différences des taux d'intérêts existant dans les deux devises en cause ; cet
élément est marginalement influencé, d'une manière ponctuelle, par l'offre et la
demande pour la devise en cause sur le marché, par exemple pour des raisons
spéculatives en cas d'événements politiques.

EXEMPLE ILLUSTRANT LA RELATION ENTRE LES TAUX D'INTERETS ET LE COURS DU TERME :


Soient :
9 le cours au comptant entre l'Euro (XEU) et le dollar (USD) : 0,90 USD pour
1 XEU.
9 une opération à terme de 3 mois
9 un taux d'intérêt prévalant sur le marché du XEU de 4 % l'an
9 un taux d'intérêt prévalant sur le marché du USD de 2 % l'an.
Au bout de trois mois,
9 un placement en XEU sera devenu 1 XEUx 1,01 (0,01étant l'intérêt sur le
XEU pour trois mois) = 1,01
9 un placement en USD sera devenu 0,90 x 1,0050 (0,0050 étant l'intérêt sur le
USD pour trois mois) = 0,9045
Le cours du comptant est de 0,90 : 1 = 0,90 pour USD pour 1 XEU; le cours du
terme à trois mois sera de 0,9045 : 1,01 = 0,8955 pour 1 XEU
En effet, si on a besoin d'acquérir du XEU à terme de trois mois que l'on compte
régler avec du USD à recevoir à ce moment, on peut emprunter dès à présent du
USD à trois mois, qui coûte 2 % l'an; avec ce USD on achète du XEU comptant au
cours de USD 0,90 pour 1 XEU ; on replace ensuite ce XEU à 4 % l'an pendant
trois mois; à l'échéance on livre les USD reçus pour éteindre l'emprunt et on prend
livraison des XEU dont le placement est arrivé à terme.

En effet, liées aux opérations à terme en devises, il y a les swap de trésorerie ou


swap court terme : il s'agit d'une opération de trésorerie, dans laquelle on acquiert
une devise au comptant pour la revendre simultanément à terme, en la plaçant ou
l'utilisant dans l'intervalle. On revient donc en fin de compte à la devise dont on
était parti, et ce à un cours connu d'avance.
Si on reprend les hypothèses de l'exemple cité plus haut, le taux d'intérêts étant plus
élevé pour le XEU (4%) que pour le USD (2 %), on tire un bénéfice apparent d'un

- 171 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

achat au comptant de XEU dont le placement bénéficierait de la différence de taux


d'intérêts (2 % l'an); cependant à terme, en revenant en USD à 0,8955, on fait une
perte de change qui compense en fait le gain sur les taux d'intérêts.
Des opérateurs feront des transactions, dans un sens ou dans l'autre, s'il y a des
déséquilibres entre les cours du comptant et du terme : on voit qu'ainsi ces
opérations d'arbitrage feront tendre les cours du terme vers le cours théorique
de départ tel qu'il devrait être déterminé par les différences des taux d'intérêts. Il y
a donc inter-relation entre les opérations de change à terme et les opérations
swap, qui se bâtissent les unes par rapport aux autres.
Il existe une grande variété de swaps, car on appelle ainsi toute opération
financière d’échange. Il y a des swaps de devises à long terme, des swaps
d’intérêt (taux fixe contre taux flottant), des options sur swaps, etc…
Pour réaliser ces opérations, les intermédiaires doivent pouvoir trouver des
contreparties; à cet effet, les intermédiaires financiers disposent les uns auprès des
autres d'une ou plusieurs lignes63 pour les opérations au comptant et à terme et
pour leurs emprunts en devises; le nombre et l'importance de ces lignes varieront
en fonction de la qualité, de la taille et de la réputation de chaque établissement;
parfois aussi de la nervosité du marché dont les membres peuvent réagir
brutalement à la nouvelle d'un accident bancaire : ils répercutent alors sans
discernement sur certains groupes de contreparties des mesures conservatoires, ce
qui peut paradoxalement provoquer de nouvelles difficultés dans le marché,
aggravant la situation résultant de l'accident lui-même, tout en paraissant justifier a
posteriori la pertinence des mesures prises.
Depuis le début des années 80, aux opérations à terme et de swaps se sont ajoutées
des variantes plus sophistiquées, portant sur des contrats d'options d'achat et
de vente à terme de devises, ou de fixation de taux d'intérêts pour des
opérations de trésorerie différées ("forward rate agreements" = FRA).
Un autre aspect des opérations de change, qui s'est surtout développé ces derniers
temps face à l'internationalisation des marchés, est le fait que ces marchés restent
ouverts 24 heures sur 24. A tout instant, on peut trouver une place ouverte
quelque part dans le monde; par conséquent, les intermédiaires financiers se sont
souvent, eux aussi, organisés pour être présents sur les différentes places "around
the clock". Ainsi se réalisent des arbitrages qui régularisent les marchés.
Parallèlement, les centres responsables de la gestion de la position globale en
devises des établissements financiers multinationaux se déplacent-ils d'un siège
d'exploitation à l'autre au cours d'une même journée, en général trois fois, en
fonction des fuseaux horaires, d'Extrême-Orient vers l'Europe, puis vers
l'Amérique, pour recommencer le cycle ensuite.

63 lignes : montants maxima pour lesquels un intermédiaire financier accepte de traiter avec un
autre sur le marché.

- 172 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

SURVEILLANCE DES OPERATIONS DE CHANGE :

Les transactions sur devises sont nombreuses et importantes; celles réalisées par
des banques pour compte de clients ne forme plus qu’une partie réduite du marché
des changes, ou plus de 95 à 99 % des opérations sont des opérations
d’arithmétique ou de spéculation entre banques. La plupart des opérations sont
traitées oralement par téléphone (le surplus l'étant par télex ou par fax ou écran) ;
leur confirmation par écrit ne vient que plus tard. Les montants en cause sont
considérables et il en découle des risques importants car :
9 lorsqu'on se parle par téléphone, on peut mal s'exprimer ou être mal
compris (notamment entre "étrangers");
9 il peut y avoir des collusions entre arbitragistes de différentes maisons
(bancaires ou non), qui peuvent subir la tentation de dériver à leur profit
personnel le bénéfice de certaines opérations. Le cas des courtiers en devises
a posé problème à différentes reprises : vu leur intermédiation dans des
transactions de grande importance, ils peuvent être tentés de recourir à des
pratiques douteuses en connivence avec les opérateurs bancaires. Aussi, en
Belgique, la loi du 4 décembre 1990 les soumet à une réglementation à l'instar
d'autres prestataires de services financiers ;
9 il se peut qu'un arbitragiste, ayant fait une perte, souhaite ne pas la révéler à
son organisation tant qu'il n'a pas pu la couvrir par d'autres opérations en
bénéfice : c'est en quelque sorte la situation du joueur malheureux qui tente
"de se refaire" mais qui si souvent ne fait qu'aggraver son cas.
Pour pallier ces écueils, il faut soigneusement sélectionner et former les
opérateurs, et appliquer un certain nombre de principes de gestion parmi lesquels
la séparation des fonctions : ce seront des personnes différentes qui concluront
les opérations dans le marché, qui les enregistreront en comptabilité, et qui en
effectueront le contrôle, notamment pour vérifier que les positions globales et par
contrepartie sont conformes aux limites fixées. En outre, des surveillances de
conversations téléphoniques ont été instaurées, leur enregistrement pouvant servir
à élucider d'éventuelles contestations - et à éviter certaines tentations.
Il faut aussi éviter que les bonus ne créent des stimulants asymétriques, les
opérations bénéficiaires des arbitragistes générant le droit à des primes, et les
opérations déficitaires n’occasionnant aucune pénalité. Ceci encourage
évidemment la spéculation.

LES DELAIS DE TRANSFERT

Les délais de transfert entre un donneur d'ordre d'un paiement et son destinataire
sont souvent importants.
Pour les banques intervenant dans le règlement, de tels retards peuvent paraître
intéressants, car pendant le délai de transfert elles disposent gratuitement de la
trésorerie en transit (le "float") : certaines peuvent donc être tentées sinon de les
allonger, du moins de ne rien faire pour les réduire. Mais de ce fait, certaines

- 173 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

banques, désireuses de prouver la qualité de leurs services à leur clientèle et d'en


faire un élément de promotion commerciale, ont réalisé des études approfondies
pour essayer de raccourcir ces délais de paiement, surtout pour les gros montants,
ce qui sera d'autant plus important pour le client que les taux d'intérêts sont élevés
et que tout retard est évidemment préjudiciable au destinataire des fonds, voire à
l'expéditeur lui-même. Les systèmes élaborés dans ce cadre par les banques
prennent le nom de "cash management".
Les banques ont imaginé des services spéciaux dans ce domaine : par exemple le
"same date value" : la banque et l'entreprise cliente conviennent que pour les
opérations de change au comptant (où en fait il y a un délai de 2 jours ouvrables
pour l'acquisition de la devise et la livraison de sa contrepartie en monnaie locale),
l'entreprise ne sera effectivement débitée en monnaie locale que le jour où la
livraison de la contre-valeur en devises sera effectuée, voire mise à la disposition du
bénéficiaire.
Dans le même ordre d'idées, les banques aident les entreprises à s'occuper de la
gestion et de la surveillance de leur risque de change - "exchange risk
management".
Les entreprises multinationales ou plus simplement les entreprises importantes qui
ont à manier de grandes quantités de devises différentes, se prévalent de ces
services et demandent aux banques de s'occuper de la gestion et de la centralisation
de leurs opérations en devises; les gains sont tels que, pour les maximiser, certaines
entreprises très internationalisées ont même acheté des banques.
Ainsi donc, on peut voir que quand un système secrète des abus, la lutte contre
ces abus peut fournir une arme commerciale efficace de concurrence.
Ceci dit, sur le plan européen, l'Union Européenne s'est dernièrement émue de la
lenteur de certains transferts internationaux dont les économiquement faibles
(PME, particuliers) pâtissent le plus - aussi envisage-t-elle d'instaurer un système
de clearing européen pour accélérer les paiements intraeuropéens - sujet fort
controversé tant que la monnaie commune européenne n'aura pas vu le jour.

COMMUNICATIONS

En matière de change, les communications jouent un rôle très important et les


techniques se sont fortement développées : télex, téléfax, lignes téléphoniques
directes, etc ... (une salle d'arbitrage quelque peu importante est d'ailleurs très
impressionnante à voir).
Il existe depuis longtemps des systèmes de sécurité qui permettent d'authentifier
les messages : codes et clés télégraphiques, et les ordres de paiement : papiers de
sécurité, impression des montants ou des signatures par des machines spéciales.
Plus récemment, des normes standardisées de présentation des messages télex
ont été établies pour accélérer le traitement et renforcer la fiabilité d'exécution des
instructions transmises.

- 174 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Enfin, des banques très nombreuses s'interconnectent dans le réseau SWIFT64.

ROLE DES INTERMEDIAIRES FINANCIERS EN MATIERE DE


REGLEMENTATION

Si dans le domaine des changes le rôle primaire des intermédiaires financiers est de
procurer des devises à leurs clients, de les transférer là où elles doivent être
utilisées, et d'assurer des systèmes de protection contre les risques de change (ce qui
est couramment possible pour des termes jusqu'à 12 mois dans la pratique des
choses), les intermédiaires financiers jouent également un rôle important dans
l'assistance à fournir à l'autorité dans la poursuite de ses objectifs de politique
monétaire en servant de canaux privilégiés pour faire passer et appliquer les
règlements. A cette fin, les intermédiaires se voient déléguer une autorité, qu'ils
n'ont pas choisie, mais qui leur est imposée. La réglementation peut être renforcée
en période de tension monétaire.
En Belgique, ces tâches étaient fort astreignantes et coûteuses. L'abrogation du
double marché en 1990 ne les a pas totalement éliminées; les banques doivent
continuer à requérir des informations de leurs clients pour les opérations réalisées
avec l'étranger - cela permet de poursuivre la tenue à jour des statistiques du
commerce extérieur et conserve une infrastructure prête à intervenir s'il devenait un
jour nécessaire de remettre en vigueur un système de contrôle des changes plus
rigoureux.

64Réseau de télécommunications autonome accélérant encore la transmission des ordres et des


positions comptables, et permettant l'interrogation réciproque entre correspondants financiers.

- 175 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 16.

LA GESTION PATRIMONIALE

GENERALITES

La fonction de gestion patrimoniale est double :


9 donner des conseils aux clients des intermédiaires financiers détenteurs de
patrimoines mobiliers pour la gestion de ce patrimoine;
9 mettre en oeuvre les conseils donnés, cette mise en oeuvre pouvant être :
ƒ décidée unilatéralement par le client;
ƒ décidée en concertation entre l'intermédiaire financier et le client;
ƒ décidée par l'intermédiaire financier seul, à qui le client a donné carte
blanche (mandat de gestion discrétionnaire).
Ces prestations sont réalisées principalement par :
9 les trust departments des banques commerciales anglo-saxonnes ou les
services fiduciaires des banques commerciales européennes;
9 les investment banks aux U.S.A., les merchant banks en Grande-Bretagne,
les banques privées en Suisse et ailleurs;
9 certains agents de change ou maisons de bourse;
9 des institutions ou personnes spécialisées, dont le rôle est confiné à la
seule fonction de conseils et de gestion, et qui ne sont en principe pas partie
à l'exécution des opérations qui en découlent ;
9 des organismes de placement collectifs en valeurs mobilières (OPCVM) ou
en autres valeurs, organismes parfois indépendants, mais souvent gérés par
des institutions relevant des catégories décrites ci-dessus, dans le cadre de
contrats de gestion.

PRINCIPES SUIVIS PAR LES INTERMEDIAIRES FINANCIERS


DANS CE DOMAINE

DETERMINER LES OBJECTIFS DE CELUI QUI DETIENT LE


PATRIMOINE

Les objectifs diffèrent selon que le client est une personne physique (épargner
pour acheter une maison, placer une somme pour doter une fille, etc .) ou qu'il est

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

un investisseur institutionnel (rencontrer les sinistres pour une compagnie


d'assurance, faire face aux droits des pensionnés pour une caisse de retraite ou un
fonds de pension, accorder des subsides pour une fondation caritative).

PERSONNE PHYSIQUE

Pour une personne physique, sa situation de famille, l'âge et la santé d’elle-même et


de ses proches, ses revenus professionnels, ses ambitions, ses craintes, etc. seront
autant de facteurs à tenir en ligne de compte pour la détermination des objectifs.

INSTITUTION

Pour une institution, son objet social orientera le gestionnaire : les finalités d'une
fondation universitaire, d'un fonds de pension, d'une compagnie d'assurance, ou
d'un fonds commun de placement sont différentes par nature.
Par ailleurs, deux individus ayant les mêmes objectifs accepteront, par
tempérament, des degrés de risques différents.
EXEMPLE
A et B ont les mêmes objectifs personnels, mais A vise 5 % l'an (avec une faible
probabilité de ne pas s'en écarter de beaucoup - disons de 4 % à 6 %), et choisira
des formes de placement à risques limités; B par contre vise 8 % l'an, mais est prêt
à accepter de plus gros risques (disons d'atteindre en probabilité de 4 % à 12 %); il
peut gagner plus, mais aussi perdre davantage.
A noter que la fourchette de risques dépendra aussi de l'horizon temporel dans
lequel le return doit être réalisé, ainsi que du degré de diversification qu’on pourra
introduire dans le portefeuille.

LES OBJECTIFS UNE FOIS DEFINIS, DETERMINER UNE COMPOSITION


ADEQUATE POUR LE PATRIMOINE

REPARTITION PAR NATURE D'INSTRUMENT :

Il s'agit de déterminer les types et les combinaisons d'actifs dans lesquels on se


propose d'investir : des dépôts en banque, des valeurs mobilières à revenus fixes
et/ou à revenus variables, des instruments dérivés, des actifs immobiliers, des
métaux précieux, des matières premières, des oeuvres d'art, etc.

REPARTITION PAR DEVISE :

Détermination des devises dans lesquelles peuvent être libellés les titres financiers à
acquérir. Ceci pose le problème de la devise de l'évaluation globale du patrimoine à
gérer, car en raison des fluctuations des cours de change, la perspective dans
laquelle on examine le return global sera singulièrement différente selon la devise
de base retenue.

- 177 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

REPARTITION GEOGRAPHIQUE :

Détermination de la localisation de l'actif d'investissement; ce n'est pas


nécessairement la même chose que d'en déterminer la devise puisqu'un émetteur de
titres financiers peut les libeller dans une devise différente de celle du pays où il se
trouve établi.

REPARTITION PAR SECTEUR ECONOMIQUE :

Détermination de secteurs à privilégier ou écarter, p. ex. haute technologie, énergie,


services publics, ...

CHOIX DES VALEURS INDIVIDUELLES REPONDANT AUX CRITERES DEFINIS.

Une des questions qui se pose est de savoir quel est le nombre optimum de valeurs
différentes qu'il faut loger dans un portefeuille pour atteindre une diversification
suffisante tout en limitant le coût du maintien et du suivi de chaque "ligne" dudit
portefeuille.
De plus s'imposera la détermination des domaines que chaque organisme
gestionnaire pourra suivre en propre, parmi l'ensemble des champs
d'investissement possibles - sans multiplier à l'infini le nombre de spécialistes qui
serait sinon nécessaire.
Aussi, en dehors de leurs propres services de recherche et d'étude dont les
dimensions varient fort d'un organisme de gestion à l'autre, ceux-ci se baseront sur
les concours d'experts extérieurs ou de correspondants proches des marchés qu'ils
ne peuvent couvrir directement eux-mêmes : soit sous forme de conseils (obtention
d'analyses économiques et financières et de recommandations de placement) soit
même à titre de sub-délégation de gestion : par exemple en plaçant partie des fonds
à investir dans des fonds communs de placement gérés par des tiers et spécialisés
par région (Extrême-Orient, U.S.A., ...) ou par objet (junk bonds, venture capital,
matières premières, oeuvres d'art, opérations croisées...).

MODE DE DETENTION DU PATRIMOINE

Il faut étudier la meilleure structure de détention du patrimoine, c'est-à-dire


déterminer le "véhicule" dans lequel le client va le cas échéant loger ses actifs.
Si le patrimoine est de petite dimension, des parts d'OPCVM (fonds communs
de placement, SICAV, ...) apportent parfois la solution désirée; à l'autre bout de
l'échelle, le propriétaire très fortuné peut se faire constituer une société holding
propre pour détenir certains actifs; il s'agit de formules souvent complexes et
coûteuses, justifiées par des patrimoines d'une certaine dimension.
Le propriétaire peut encore recourir au système des "trust" (d'usage dans les pays
anglo-saxons) ou "fondation" (Anstalt); il s'agit de dispositifs juridiques par
lesquels le propriétaire apporte son patrimoine à une entité confiée à un "trustee"

- 178 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

qui devra le gérer au profit des bénéficiaires désignés en respectant les volontés du
"fondateur".
Ce seront ses objectifs, ainsi que différents éléments juridiques, successoraux et
fiscaux - ayant une influence sur le coût, la performance, la fiabilité, mais aussi
l'éventuelle irréversibilité de l'affectation des biens aux véhicules (irrévocabilité de
certains trusts) - qui interviendront pour guider le propriétaire dans le choix du ou
des véhicule(s) à retenir.

OPERATIONS

La mise en oeuvre d'une gestion patrimoniale consiste à acheter, vendre, arbitrer


sur les marchés et bourses de valeurs les actifs retenus en fonction des objectifs du
propriétaire. Le cas échéant, il réalisera en outre, par des opérations de futures et
d'options, la couverture ("hedging") du risque de positions prises dans certains
titres, certaines devises ou certains marchés globaux.
Le gestionnaire, qui effectue souvent des opérations pour son client pour des
sommes considérables, est exposé au risque de voir naître un conflit d'intérêts
entre lui-même et son client. Par exemple en augmentant le nombre de
transactions qui génèrent dans son chef des courtages ("churning"). S'il est partie
à une opération d'émission qui marche mal, il pourrait être entraîné à "gaver"
("stuffing") certains portefeuilles sous gestion du reliquat de titres avec lequel il
serait resté collé. S'il bénéficie d'informations privilégiées, il pourrait être tenté
de racheter à ses clients des titres dont il sait qu'une opération intéressante sera
annoncée sous peu. C'est pourquoi le niveau déontologique exigé de ce type
d'intermédiaire financier est très élevé.
L'exposition aux conflits d'intérêts se retrouve d'ailleurs dans de nombreuses
opérations qui sont confiées aux intermédiaires financiers. La nécessité de
préserver la pérennité de leur fonds de commerce constitue, en dehors de toute
considération morale, un certain frein naturel aux abus auxquels ils seraient
éventuellement tentés de succomber, mais pas nécessairement suffisant...
Aussi les autorités se soucient-elles davantage aujourd'hui de cet aspect des choses
et sont amenées à susciter des normes de bonne conduite, voire à imposer de
nouveaux règlements dans ces domaines sensibles.

EVALUATION DE LA PERFORMANCE

Les bases techniques d'une bonne évaluation de la performance des portefeuilles en


gestion afin d'en rendre compte à leurs propriétaires se sont développées au cours
des trois dernières décennies.
Les investisseurs institutionnels surtout, par leur nombre, leur ampleur et leur
sophistication croissants, on fait progresser ces techniques.
C'est en particulier le cas des fonds de pension des entreprises privées. Au départ
les dirigeants de ces entreprises ont eu tendance à assumer eux-mêmes la gestion de
leurs fonds de pension, sinon d'en investir tout ou partie dans l'entreprise elle-

- 179 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

même. Mais cette gestion n'est ni de leur finalité, ni de leur compétence premières.
D'autre part les contributions à ces fonds de pension se font souvent par des
cotisations versées tant par les employés que par l'employeur. Les fonds de
pension peuvent porter sur des sommes élevées (certains fonds de pension
d'entreprise atteignent aux Etats-Unis plusieurs dizaines de milliards de dollars).
En tout état de cause, il y a une grande responsabilité attachée à la bonne fin des
engagements à très long terme des fonds de pension vis-à-vis des pensionnés
présents et futurs de l'entreprise. Il n'est donc pas étonnant que les organes
d'administration des fonds de pension (composés souvent de manière paritaire)
aient de plus en plus souvent confié leur gestion à des gérants professionnels, mis
d'ailleurs en concurrence. Curieusement, la législation réglementant les actifs des
Fonds de pension était restée laxiste dans les pays anglo-saxons, leur permettant
d’investir des proportions importantes en actions de la société. Il a fallu les
scandales Maxwell en Angleterre (en 1990) et Enron aux Etats-Unis (en 2002) dans
lesquelles les Fonds de pension ou Plans de pension des employés ont été ruinés,
pour que des mesures plus contraignantes de saine diversification leur soient
imposées.
Les organes responsables de ces fonds doivent évidemment pouvoir mesurer aussi
objectivement que possible la performance de gérants de Fonds en vue de décider
de leur engagement, leur maintien ou leur remplacement éventuels.
Des techniques de mesure de performance se sont développées en conséquence qui
ont bénéficié aux autres catégories d'investisseurs, devenus eux-mêmes plus
exigeants en la matière.
En dehors des différences de performance qui peuvent naître de disparités de
contraintes imposées aux gestionnaires (tel se voyant par exemple attribuer un
portefeuille à investir en obligations, tel autre en actions), ou qui peuvent résulter
de degrés de risques différents assignés à chaque portefeuille, la comparaison des
performances peut donner lieu à diverses difficultés (en Belgique notamment)
lorsque :
9 les organismes de gestion de patrimoine établissent leurs comptes selon des
méthodes différentes;
9 les méthodes suivies n'aboutissent pas à l'établissement de résultats réels;
9 la devise de référence n’est pas la même;
9 le volume des actifs est trop faible pour permettre une diversification
semblable à celle réalisée pour les grands portefeuilles.
Parmi les méthodes d'évaluation qui ont été développées, il faut retenir celle dite
du "time weighted rate of return" (taux de rentabilité pondéré par le temps) :
pour une période donnée, ce procédé mesure la rentabilité successivement durant
chaque sous-période où la dotation est restée inchangée (pas d'apport de capitaux
nouveaux, pas de retrait de fonds à distribuer).
Encore faut-il s'accorder sur les modalités d'application : comptabilisation de
plus ou moins-values non réalisées, manière d'évaluer les actifs non cotés, fixation
de la devise de comptabilisation, détermination des indices ou autres étalons de
référence ("bench-marks") appropriés, etc.

- 180 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Un des grands sujets de controverses théoriques est de savoir si un gestionnaire


peut, sur une longue période, "battre les marchés", c'est-à-dire atteindre une
performance supérieure aux indices représentatifs des marchés (benchmarks)
auxquels les portefeuilles gérés se comparent. Plusieurs auteurs affirment que si les
marchés sont efficients, cela est impossible et que le gestionnaire ferait donc
mieux d'"acheter l'index" (corbeille de valeurs représentatives des marchés visés);
d'autres prétendent qu'il est possible de détecter, fût-ce marginalement, des
inefficiences à l'intérieur des divers marchés, de même que de prévoir les facteurs,
macro-économiques notamment, qui inciteront les gestionnaires à se dégager de
certains marchés pour se réorienter vers d'autres.
Quoi qu'il en soit, il existe, depuis les années 70, une nouvelle profession : celle
d'évaluateur professionnel de performances de patrimoines, à qui s'adressent
volontiers les responsables de fonds de pension qui mettent les gestionnaires en
concurrence. Les évaluateurs professionnels sont facteurs d'harmonisation des
méthodologies de calcul de performance suivies par les gestionnaires qui se
soumettent à leur examen.

REMUNERATION DES GESTIONNAIRES

Certains gestionnaires ne sont rémunérés que pour la gestion globale, sans être
partie à l'exécution des opérations d'investissement; ils n'ont dès lors pas de conflit
d'intérêt à cet égard.
Dans la plupart des cas cependant, les gestionnaires sont également rémunérés sur
les transactions ce qui leur permet de bénéficier de deux catégories de revenus :
9 une commission de gestion, qui s'élève souvent de 0,5 à 1,5 % du
patrimoine géré, selon le volume des fonds sous gestion - parfois, mais plus
rarement, il s’y ajoute ou s’y substitue une participation à la performance;
9 une part des courtages et commissions sur les achats et les ventes d'actifs
qui contribue à rémunérer les services opérationnels, les droits de garde qui
rémunèrent le service de conservation, et la marge d'intermédiation sur la
fraction du patrimoine conservée sous forme de dépôts d'espèces.

REGLEMENTATION DE LA PROFESSION

En dehors des réglementations plus générales dont font l'objet les banques et les
sociétés de bourse, la gestion patrimoniale avait été jusqu'à récemment peu visée
par les autorités.
Des mesures existent en Grande-Bretagne dans le Financial Services Act mis en
place en février 1988 et l'Union Européenne a introduit des dispositions à ce
sujet dans sa propre directive sur les services financiers de mai 1993. La Belgique
a anticipé sur celle-ci dans la loi du 4 décembre 1990 réformant le régime et les
marchés de valeurs mobilières, et dans son arrêté d'application du 5 août 1991.
L'objectif des réglementations touchant à la gestion patrimoniale est
évidemment de voir si, dans l'intérêt de l'investisseur, des dispositions

- 181 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

contraignantes ne doivent pas être imposées aux conseillers et gestionnaires, qu'ils


agissent à l'intérieur ou en dehors de structures définies : l'établissement d'un
régime déontologique et l'imposition de mesures pratiques telles que la
séparation entre ces activités et les autres du même établissement, l'identification
des responsables, la nécessité de recourir à des dépositaires qualifiés, la définition
d'incompatibilités, la bonne information réciproque (objectifs, contrats, reddition
de compte), etc.

- 182 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 17.

SERVICES FINANCIERS DES ENTREPRISES

Parmi les services rendus par les intermédiaires financiers, plus particulièrement par
les banques, il y a, pour compte des entreprises émettrices des titres,
9 le paiement des coupons - dividendes des actions et intérêts d'obligations -
ainsi que les remboursements du principal (fonction de "paying agent");
9 l'estampillage ou l'échange des titres qui doivent être modifiés;.
9 l'enregistrement des noms des titulaires propriétaires des titres nominatifs
(fonction de "registrar", d'usage dans les pays anglo-saxons sinon en Europe
continentale).

NOTE
Cette dernière fonction de "registrar" est lourde, et se fait toujours avec un certain
retard sur les événements, causant divers problèmes administratifs qui peuvent
avoir des répercussions financières pour les titulaires des titres. Tel est le cas par
exemple dans l'attribution de coupons à un titulaire qui a vendu ses titres, mais
dont la cession au nouveau titulaire est encore ignorée de la société au moment de
la mise en paiement du dividende.

- 183 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 18.

LES OPERATIONS FINANCIERES

OBJET

Il s'agit en l'occurrence pour les intermédiaires financiers :


9 de donner des conseils aux pouvoirs publics et aux entreprises privées
quant à l'adéquation de leurs moyens de financement ainsi que de leur
structure financière et d'actionnariat, aux correctifs et compléments qu'il y
aurait lieu d'y apporter, et aux méthodes à suivre pour y parvenir;
9 d'aider les pouvoirs publics et les entreprises privées dans la mise en oeuvre
des mesures décidées pour améliorer ou redresser leur structure financière et
réunir les moyens financiers requis par émission de titres, obligations
(représentatives de dette à long terme) ou actions (représentatives de fonds
propres).
Dans cette fonction, les intermédiaires financiers aident au transfert des flux
financiers entre agents économiques, sans que ces flux financiers entrent
(durablement en tout cas) dans leur bilan. Les banques peuvent être actives
dans ces transactions, tant les banques commerciales que les banques d’affaires,
ainsi que des agents de change, courtiers ou parfois simples conseillers.

POUVOIRS PUBLICS

Les pouvoirs publics Etats, et pouvoirs subordonnés connaissent des décalages


entre leurs recettes (discontinues), et leurs dépenses courantes (continues), ainsi que
certains déficits conjoncturels et certaines dépenses ponctuelles importantes en
matière d'investissement. Ces décalages doivent être financés et ils le sont
généralement par des emprunts, dont les conditions dépendront de la situation
financière et économique générale, des réserves de change, de la balance des
paiements, de la situation des finances publiques des pouvoirs concernés.

ENTREPRISES

Pour les entreprises, ce sont les structures financières qu'il convient d'équilibrer en
fonction des investissements à financer et des besoins en fonds de roulement, par
rapport aux capitaux permanents et aux éléments de cash flow prévisionnels. Les
intermédiaires financiers conseillent les entreprises en cette matière; ils les aident à
analyser les structures vers lesquelles il faut tendre. Les comptes d'exploitation et
bilans prévisionnels permettront de projeter les possibilités de rémunération et de

- 184 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

remboursement futurs des capitaux recueillis, ainsi que l'éventuelle dilution des
bénéfices et du pouvoir votal causée par l'émission nouvelle.
Si dans les opérations de crédit, le financement de transactions commerciales, de
fonds de roulement, bref, le court terme concerne essentiellement les activités de
banque commerciale, pour ce qui concerne les opérations financières, ce seront les
formes d'apport en capitaux à long terme - propres ou empruntés - qui seront
presque exclusivement au centre des préoccupations.

LES SOLUTIONS

Elles varient suivant :


9 la nature de l'utilisateur;
9 le type de problème à résoudre.
On peut avoir besoin de procéder à un endettement nouveau, à une
consolidation ou un rééchelonnement ("rescheduling") d'une dette existante, à
une cession d'actifs et de passifs ou de flux de revenus futurs, à une fusion avec
une autre entité ou à l'éclatement d'une entité existante.
On peut avoir recours aux emprunts, aux augmentations de capital, ou aux deux
à la fois, ainsi qu'aux techniques d'échange de titres financiers.
On peut s'adresser à des types d'investisseurs différents.
On peut choisir la voie privée ou publique; les législations en cette matière varient
suivant les pays : en Belgique, pour qu'une émission soit considérée comme privée,
il faut en principe remplir deux conditions : ne pas toucher plus de 50 personnes, ni
procéder par offre en souscription ou en vente en utilisant des moyens publicitaires
ou en recourant à des intermédiaires non habilités (les banques et sociétés de
bourse sont des intermédiaires habilités).

LE MARCHE PRIMAIRE : LES OPERATIONS D'EMISSION

Que les émissions soient du type privé ou public, les intermédiaires financiers
procèdent en plusieurs phases.

ANALYSE DE L'EMETTEUR

Les intermédiaires financiers qui envisagent de mettre l'opération sur le marché


commencent par analyser la situation du candidat-émetteur :

- 185 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

POUVOIRS PUBLICS

Analyse de la situation politique, sociale et économique, des réserves de change, de


la balance des paiements et de la situation des finances publiques;

ENTREPRISES

Analyse de la situation juridique, commerciale, technique, sociale et surtout


financière, notamment par l'examen des bilans et des comptes de résultats passés et
prévisionnels.

IMPORTANCE DE L’ANALYSE : INDEPENDANCE, PROFESSIONNALISME, CREDIBILITE

Cette analyse est un aspect très important de la fonction de l’intermédiaire


financier. En effet, lorsqu’il patronne une émission, il engage son nom vis-à-vis
du marché (autres intermédiaires, investisseurs, analystes, …), et il est essentiel que
cette analyse soit faite avec l’indépendance et le professionnalisme nécessaires ;
indépendance quant à des liens d’actionnariat ou d’affaire avec l’émetteur,
professionnalisme quant à la connaissance du secteur et de l’entreprise, vérification
des données (« due diligence »). L’intermédiaire est souvent amené à justifier le
prix d’une opération publique, (émission, mais aussi fusion, cession, etc…) et peut
dans ce cadre émettre un jugement formel appelé « fairness opinion ».
La crédibilité du chef de file (« lead manager ») peut être un élément important
dans le succès d’une émission, particulièrement d’une émission d’actions.

EMISSIONS D’OBLIGATIONS : - DEVELOPPEMENT DES AGENCES DE RATING

Dans certains pays, les émetteurs d’obligations sont évalués par des agents
indépendants, appelés "rating agencies" ou agences de classement d'émissions
(Moody's, Standard & Poor's;...).
Ces agences classent les émetteurs après les avoir étudiés et interrogés; elles
attribuent des cotes ou "ratings" aux obligations émises par entreprises et aux Etats.
Cette classification est très importante pour les mises sur le marché d'émissions
nouvelles, car certains investisseurs institutionnels se sont fixés, ou se voient
imposer une limite inférieure quant au classement acceptable pour les
investissements auxquels ils procèdent. Par exemple, certains investisseurs
n'accepteront pas de papier dont la cote serait inférieure à BBB. L'absence de cote
ou une cote insuffisante restreint donc de manière significative le marché potentiel
d'une émission, et augmente le coût du capital recueilli.
REMARQUES
Premièrement, le rating attribué à l'émetteur au départ n'est pas immuable : il peut
varier dans le temps suivant l'évolution de la situation de l'émetteur qui doit se
soumettre périodiquement à une réévaluation de la part des examinateurs des
agences de rating.

- 186 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Deuxièmement, dans les grands marchés de capitaux, les emprunts de l’Etat hôte
de ce marché établissent le taux d’intérêt « sans risque », et les autres émetteurs
doivent payer un rendement supérieur. Cette « prime » varie en principe selon le
rating (lorsqu’il est pratiqué dans ce marché), mais son niveau et fluctuant, et la
hiérarchie logique (par exemple 40 « points de base » pour un AAA,60 pour un
AA,80 pour un A, etc) n’est pas toujours respectée.
Il faut classiquement que l'émetteur prévoie une durée, c'est-à-dire des échéances
précises pour le paiement des intérêts et des remboursements en capital.

EMISSION D’ACTIONS- CAPITAL A RISQUE

Pour une émission d'actions ordinaires, il pourra y avoir dilution des résultats et du
pouvoir votal pour les actionnaires préexistants. De plus, afin de faciliter le
placement des actions nouvelles, leur prix d’émission est généralement inférieur (de
quelques pourcents à 15 ou 20 %) au cours de Bourse. Pour ces raisons, dans la
plupart des marchés, les émissions d’actions nouvelles réservent aux actionnaires
existants une priorité de souscription, au moins temporaire, des actions nouvelles.

FORMES INTERMEDIAIRES

Entre le capital à risque et les obligations classiques, il y a des possibilités


intermédiaires : obligations convertibles, obligations avec warrants donnant
droit à une souscription à des actions nouvelles, obligations participatives,
actions privilégiées, éventuellement avec dividende cumulatif, etc ...

DETERMINATION DU MODE DE DISTRIBUTION

En fonction de l'instrument retenu, on déterminera le mode de distribution :


émissions publiques à large diffusion ou émissions privées.

EMISSIONS PRIVEES

Ces émissions sont destinées à un groupe plus restreint d'investisseurs,


généralement institutionnels.

EMISSIONS PUBLIQUES

Dans le cas d'une émission publique, la cotation en Bourse sera en principe


demandée. L'avantage d'une cotation est de favoriser la liquidité du titre et de
créer de surcroît une référence extérieure de marché pour sa valorisation; ces
facteurs augmentent substantiellement sa diffusion potentielle, certains
investisseurs institutionnels n'acquérant d'ailleurs que des titres qui sont admis à la
cote d'une bourse officielle. La cotation favorise aussi la notoriété de l'émetteur.
Ces avantages aboutissent à abaisser le coût du capital.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Si on opte pour la cotation, il y a lieu de déterminer la ou les bourse(s) les plus


appropriées : bourse, nationale, internationale ? La réponse dépendra :
9 de la nature des émetteurs : les titres d'émetteurs nationaux seront cotés
principalement sur les bourses nationales ou alors sur des bourses présentant
des avantages spécifiques (règlements souples, largeur de marché,
investisseurs et intermédiaires sophistiqués); les titres d'émetteurs
internationaux ou multinationaux se coteront souvent sur plusieurs places;
9 de la devise de l'émission : les titres libellés dans une devise déterminée
sont souvent cotés sur une bourse du pays de la devise en cause; d'autre part
la cotation d'euro-bonds se fait souvent à Luxembourg, car les coûts et les
formalités y sont plus réduits.

MISE EN FORME DE LA DOCUMENTATION DE DISTRIBUTION

La documentation à préparer à l'appui de la diffusion de l'émission dépendra du


mode de distribution choisi : il s'agira d'un prospectus pour une émission
publique (document très élaboré) ou d'un mémorandum pour un placement
privé (document plus succinct).
Afin d'assurer la bonne information du public souscripteur, des prescriptions très
strictes existent dans de nombreux pays quant au contenu des documents qui
doivent être soumis à l'agrément des autorités avant de pouvoir être diffusés.
La diffusion de titres sur plusieurs places financières pose le problème des
exigences différentes des diverses autorités nationales. Aussi, l'Union
Européenne a-t-elle instauré par directive la reconnaissance mutuelle par tous ses
états membres des prospectus autorisés dans un état membre d'après ses normes
propres, pour autant que ces normes satisfassent aux critères minima définis dans
la directive, instaurant ainsi le principe du « passeport européen ».

MISE EN PLACE DE CIRCUITS DE DISTRIBUTION

Après avoir procédé à l'étude préliminaire, l'intermédiaire financier retenu par


l'émetteur sera normalement le "lead manager" de l'émission. Il réunira, le cas
échéant, d'autres "co-managers" autour de lui, en vue de la constitution d'un
consortium ou syndicat d'émission. Lorsqu'elle sera ainsi constituée, la direction du
syndicat recherchera des partenaires pour le lancement de l'émission.
Dans la technique de la garantie de bonne fin(« underwriting »), ces partenaires
seront de deux types :
9 d'une part, les "co-souscripteurs" qui sont appelés "underwriters"; ceux-ci
garantissent à l'émetteur la bonne fin de l'émission, c'est-à-dire que l'émetteur
touchera l'intégralité du montant de l'émission projetée; à ce titre, les
underwriters doivent reprendre la partie de l'émission qui n'aurait pas été
prise par les vendeurs, et ce en proportion de la part que chacun a souscrite
dans le total;

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 d'autre part les "vendeurs", appelés membres du "selling group"; ceux-ci


achètent une fraction de l'émission pour la placer en clientèle ou la recéder à
leur tour à des sous-traitants, qui sont donc des revendeurs.
En fait, ces deux fonctions de "underwriting" et de "selling" se recouvrent
partiellement : en acceptant d'être "underwriter", il est fréquent que l'on accepte
d'assumer une partie du placement proprement dit, si cela entre dans les fonctions
habituelles de l'underwriter (ce qui n'est pas toujours le cas : compagnies
d'assurance p. ex.).
Il s'agit donc d'une structure pyramidale :

Emetteur

Lead Manager
Co Manager

Underwriters Selling group Revendeurs

Investisseurs

Cette structure a des répercussions importantes sur celle des rémunérations


allouées à chacun des membres de la chaîne, en fonction du rôle qu'il assume.
L'obtention du mandat de "lead manager" ou de "co-manager" d'une émission
importante fait l'objet d'une vive concurrence en raison des rémunérations et du
prestige considérable qui y sont liés, mais aussi du fait qu'une opération réussie
(elles ne le sont cependant pas toutes !) entraîne un avantage psychologique certain
pour l'obtention d'autres.
Aussi des "palmarès" ("league tables") sont-ils publiés par des périodiques
financiers, listant et classant les intermédiaires les plus actifs selon les opérations
("deals") réalisées par nature et par volume. Parfois, les intermédiaires publient
dans la presse des "encadrés" ("tombstones") claironnant leur participation aux
opérations.
La plus grande part des émissions du secteur privé sont distribuées selon ce
schéma. Les émissions d'emprunt d'Etat dans la plupart des pays industrialisés
sont plutôt réalisées par adjudication directe, selon diverses techniques de mise
aux enchères.

CLOSING

Les conditions d'émission, d'approximatives, sont ensuite définitivement


arrêtées : prix pour l'action, taux d'intérêt et prime d'émission pour les obligations,

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

prime de conversion pour les convertibles et ce en fonction des dernières données


prévalant sur les marchés la veille du lancement. Dès lors peut avoir lieu la
conclusion du contrat ("closing") entre le syndicat et l'émetteur, accompagnée
de la signature d'une série de documents, dont, par exemple pour les émissions
d'obligations, le contrat d'engagement de l'émetteur à l'égard de ses futurs
obligataires ("indenture"). La complexité de tels contrats et les formalités légales
obligatoires préalables à ces émissions sont loin d'être négligeables et entraînent
d'ailleurs des frais de consultation juridique fort élevés, surtout en pays anglo-
saxons.

PLACEMENT

Après le closing, le placement effectif de l'émission est en principe réalisé et, le


cas échéant, il sera procédé à la cotation sur les bourses retenues. Si l'émission est
difficile et que les titres refluent au marché, la cotation se situera en-dessous du
prix d'émission. Souvent, la direction d'un syndicat d'émission disposera d'une
marge de manœuvre pour reprendre une partie des titres qui se présentent de la
sorte.
Ces interventions de "after market" font l'objet d'une stratégie concertée entre les
managers et l'émetteur, afin de soutenir ou régulariser les cours pendant une
période raisonnable, mais une grande prudence s'impose pour ne pas être accusé
d'avoir procédé à des manipulations, allant à l'encontre de la tendance
fondamentale du marché.

LES INTRODUCTIONS EN BOURSE, OU IPO («INITIAL PUBLIC


OFFERING »)

Une introduction en Bourse d’actions non encore cotées se fait généralement à


l’occasion d’une émission d’actions, et est en fait un cas particulier, car la société ne
possède pas encore d’actionnariat de marché, et il n’y a pas de prix de référence
pour fixer le prix d’émission. L’analyse détaillée de la société à introduire en
Bourse est donc très importante, et le lead manager qui en est responsable y engage
sa crédibilité. Les Banques en ont tiré argument pour fixer les rémunérations à un
niveau très élevé. Les scandales des années 1997-2002 ont montré que ses
rémunérations très (trop) élevée ont souvent amené les banques à introduire en
Bourse des sociétés de faible qualité, dans l’espoir que l’euphorie du marché
permette de vendre n’importe quoi aux investisseurs.

LES SECONDARY OFFERINGS

Lorsqu’un actionnaire important souhaite vendre des titres par une émission
publique ou pas, d’une société cotée ou dans le cadre d’une introduction en Bourse,
les démarches sont fondamentalement identiques, mais souvent un peu simplifiées,
car il ne fat pas créer de titres nouveaux. On parle alors d’offre secondaire ou
« secondary offering »

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

INFORMATIONS

Tout d'abord l'information sur l'émetteur et l'émission doit être correcte et


complète. La responsabilité première en incombe à l’émetteur, mais le lead
manager doit dûment la vérifier (procédure dite de « due diligence »), et les autorités
de contrôle (Bourse, Commission bancaire en Belgique, SEC aux Etats-Unis)
également.

INTERDICTION DE L’INSIDER TRADING

Ensuite personne, qu'il appartienne à l'émetteur, aux intermédiaires financiers dans


le circuit d'émission ou aux autorités ou qui soit proche d'eux, et qui à ce titre
bénéficie d'informations privilégiées, ("insider" information), ne peut intervenir
pour son compte dans des transactions sur les titres de l'émetteur en cause déjà
émis antérieurement ou en cours d'émission ("insider trading").
Cette interdiction se justifie car les intérêts des intermédiaires financiers (vendeurs)
et de leurs clients (acheteurs) sont opposés; en plus, il existe des possibilités de
manipulations : rétention d'information, gonflement ou restriction de l'offre, etc.
Toutefois la base légale de cette interdiction varie de pays à pays. Elle a été
seulement récemment introduite en Belgique et au niveau européen (directive du
13 novembre 1989), et a déjà fait l'objet de diverses modifications des modalités
d'application.
La tendance au renforcement de la législation dans ce domaine est partout
perceptible, tant sur le plan des principes que dans les mesures d'investigation et de
répression instaurées. Y ont contribué des scandales majeurs, ainsi que la
sensibilisation de l'opinion publique, politique et professionnelle quant aux
conséquences néfastes d'un dysfonctionnement et d'une décrédibilisation des
marchés financiers.
En dehors de mesures "négatives" (interdictions), des mesures "positives" sont
prévues pour réduire les possibilités d'insider trading :
9 séparation physique et organisationnelle des départements Opérations
financières, Crédits et Gestion patrimoniale, dont les membres sont tenus au
secret ("Chinese Walls");
9 obligation faite à la direction des sociétés cotées d'informer le public plus
fréquemment sur la marche de leurs affaires : informations périodiques
régulières, informations ponctuelles à l'occasion d'événements importants
susceptibles d'influencer le cours - mais une divulgation prématurée de
certaines informations peut être préjudiciable, commercialement par
exemple, à la société et par conséquent à ses actionnaires : les dirigeants
seront donc à l'occasion confrontés à des dilemmes.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

REGLEMENTATION DES OPERATIONS FINANCIERES

Les règlements édictés par les diverses autorités compétentes en matière


d'opérations financières portent sur :
9 les opérations :
EXEMPLES :
Imposition de certaines formalités et exigence d'une autorisation préalable
pour l'émission publique projetée (de la Commission Bancaire et Financière
en Belgique);
Imposition de la fourniture de diverses statistiques, telles celles que les
intermédiaires financiers belges doivent fournir à la Commission Bancaire et
Financière sur le nombre et le contenu d'opérations d'émissions privées
auxquelles elles participent;
9 les émetteurs : mise sur une liste d'attente de certaines catégories de
candidats émetteurs en cas d'encombrement du marché ou de numerus
clausus;
9 les intermédiaires financiers instrumentant :
EXEMPLES :
Il y a certaines conditions d'accès à la profession : examen de compétence
pour l'agent de change, agrément et capital minimum pour les banques et
sociétés de bourse en Belgique;
Interdiction pour certains types de banques de participer au lancement d'une
émission d'actions ou d'obligations industrielles : aux U.S.A. les banques
commerciales sont exclues de ces opérations; interdiction de vente de valeurs
mobilières par démarcheurs en Belgique.

REMARQUE : LE GLASS-STEAGALL ACT

Aux U.S.A., le Glass-Steagall Act de 1933 aboutit à distinguer entre trois types
d'opérateurs en transactions financières :
9 les commercial banks;
9 les investment banks;
9 les stockbrokers (agents de change).
Ce régime prévoyait qu'en matière d'actions, seuls les deux derniers peuvent
intervenir dans la préparation, l'underwriting et le selling des émissions, alors que
les commercial banks ne peuvent intervenir que dans des fonctions de service
financier relatives aux émissions : registrar, paying agent. Dans ce cadre les
deuxièmes et troisièmes fonctions sont compatibles entre elles mais incompatibles
avec la première fonction.
En Belgique les premières et deuxièmes fonctions étaient compatibles entre elles
mais, jusqu’en 1996, incompatibles avec la troisième fonction; en Allemagne, au

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Luxembourg et en Suisse, il y a toujours eu compatibilité complète entre les trois


fonctions.
De fait, là où les incompatibilités existaient, il y a eu des évolutions depuis un
certain temps dans le cadre de la déréglementation et la déspécialisation des
intermédiaires financiers. L'élargissement des sphères d'activités qui leur sont
permises a été soit direct, soit indirect. Il y a par exemple eu autorisation pour
certains types d'intermédiaires de prendre des participations dans des
établissements pratiquant des opérations en principe incompatibles avec leurs
activités. Le cas type est la possibilité offerte sur une échelle grandissante pour les
établissements de crédit de prendre des participations partielles puis totales dans
des sociétés de bourse (firmes d'agents de change) : Grande-Bretagne (1982/86),
France (1987/91), Espagne, Italie (1988/92), Belgique (1991). Depuis 1996, les
banques européennes peuvent exercer elles-mêmes les fonctions des sociétés de
bourse. D'autre part, le Glass-Steagall Act organisant les incompatibilités d'activités
de banque commerciale et d'investissement aux U.S.A. a fait l'objet d'atténuations
diverses dans les années 1980 et 1990, et à été finalement abrogé à la fin de 1999.

REMUNERATIONS

Il y a de grandes différences de commissionnement entre les différents types


d'émissions, notamment selon qu'il s'agit d'instruments de dettes ou de capital,
d'émissions publiques ou privées.
Il varie de 0,25 % ou 0,5 % flat pour le placement privé de certaines obligations
d'émetteurs de premier ordre auprès d'investisseurs institutionnels à 3 ou 4 % flat
ou même plus pour les émissions publiques d'actions, et le pourcentage sera
d'autant plus élevé que la notoriété de l'émetteur et l'ampleur de l'émission sont
faibles. Les commissions couvrent le risque et le travail de distribution. Elles
sont identiques pour tous les membres du syndicat, seul le ou les chefs de file
bénéficiant d’un préciput généralement limité à quelques dizaines de points de base.
Les commissions peuvent être en partie rétrocédées par des membres du syndicat à
des sous garants ou des professionnels placeurs de papier, mais en principe pas
à des investisseurs. Les introductions en Bourse et autres émissions d'actions
sont particulièrement rémunératrices pour les intermédiaires financiers
(Investement Banks et brokers) à New-York, où leur volume est considérable, et
où les grandes investment banks semblent cartelliser le marché afin d'éviter que la
concurrence ne porte sur le niveau de commissions, qui est depuis la fin des années
90 fixé à 7 %.
Aux commissions, l'émetteur doit le cas échéant ajouter les frais de consultation
juridique, les frais d'impression des titres, les frais d'impression des
prospectus, les frais de publicité dans les journaux, les dîmes perçues par les
autorités de contrôle et les organismes boursiers pour leurs interventions et
surveillance, les honoraires des agences de rating, ainsi que les frais objectifs
(out of pocket expenses : voyages de présentation ("road show"), représentation et
divers) exposés par les managers pour la mise sur pied de l'émission.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES MARCHES SECONDAIRES

INTRODUCTION

Il s'agit des marchés où s'achètent et se revendent les titres après l'émission.


Ces marchés peuvent être plus ou moins organisés et structurés.
Il y a les marchés boursiers, aux règles généralement strictes, qui peuvent eux-
mêmes se subdiviser en compartiments (en Belgique : terme, comptant; nouveau
marché65; obligations, actions; titres belges et étrangers; titres physiques ou
notionnels).
Il y a aussi les marchés "over the counter" (O.T.C.), tenus par des sociétés de
bourse ou autres intermédiaires spécialistes (OLO, certificats de trésorerie en
Belgique).
Il y a encore les marchés pour instruments financiers spéciaux (futures,
options).
Il y a en outre des marchés peu ou non organisés (marché hors-bourse en
Belgique).
Si les bourses étaient au départ des lieux de rassemblement physiques où les
enchères se font à la criée, les progrès des télécommunications ont permis la
création de marchés sur "écrans" auxquels sont reliés les opérateurs.
Ce phénomène de marchés télématisés ("automated quotation" systems -
NASDAQ aux U.S.A., EASDAQ devenu Nasdaq Europe en Belgique, SEAQ en
Grande-Bretagne66 ) a tendance à supplanter le parquet ("floor") ou les "corbeilles"
("pits") où les intermédiaires boursiers se sont traditionnellement rencontrés face à
face.
Parallèlement à l'électronisation de la négociation sur les marchés, le traitement
des opérations évolue : plusieurs essais d'informatisation intégrée ont été tentés sur
diverses places en matière de prises d'ordres, de leur "routage" (processing) et de
liquidation des opérations (livraison et paiement de titres). Mais ces tentatives se
heurtent encore au cloisonnement des marchés en compartiments, aux conceptions
parfois antagonistes des opérateurs et des autorités, à la multiplicité des
intervenants et aux investissements énormes que requiert en hardware et software
la mise en place de systèmes, qui souvent doivent encore recevoir le baptême du
feu.

65 nouveau marché : marché pour des entreprises de moindre dimension ou ancienneté.


66 NASDAQ : National Association of Securities Dealers Automated Quotations system.
EASDAQ : European Association of Securities Dealers Automated Quotations system
SEAQ : Stock Exchange Automated Quotations system.

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NEGOCIATION ET FORMATION DES PRIX

Deux conceptions de base très différentes sous-tendent les marchés boursiers :


les « brokered markets » et les « dealer markets ».

BROKERED MARKETS : ORDER-DRIVEN MARKETS

Les intermédiaires s'y présentent comme commissionnaires, c'est-à-dire qu'ils ne


se portent pas, en principe, comme contre-parties des ordres qu'ils reçoivent mais
les apportent au marché moyennant rétribution sous forme de commission : ce
sont les "order driven markets" (marchés mus par les donneurs d'ordre). Un client
transmet un ordre à un broker. Celui-ci transmet l'ordre pour la centralisation.

DEALER MARKETS : MARKET MAKING MARKETS

Les intermédiaires se présentent comme contreparties ("market makers"), cotant


en permanence pour leur compte propre des cours offerts ou demandés ("bid"
and "asked") pour des quantités raisonnables de certaines catégories de titres : il
s'agit alors de "quote driven markets" (marchés mus par la cotation).
Les market makers, par leur engagement de coter des quantités raisonnables à
l'achat et à la vente, assurent en période normale une bonne liquidité du marché.
En revanche, en cas de tension, les écarts entre bid et asked s'élargissent et
excluent parfois toute transaction. C'est ce qui explique que les deux systèmes ont
leurs défenseurs qu'il est parfois difficile de départager.

EXEMPLES

Aux Etats-Unis, la bourse de New-York est toujours restée fidèle au système


order driven, alors que le Nasdaq est un système de market makers
interconnectés par un réseau informatique.
La Place de Londres s'était, avec le "Big-Bang" (achèvement de la réforme
boursière en octobre 86) plus résolument engagée dans la voie du market making,
alors que divers pays d'Europe continentale, notamment ceux de tradition de
droit napoléonien, ont toujours gardé une préférence explicite ou implicite pour le
système du commissionnaire, et sa conséquence logique, le order driven market.
La place de Londres est dans une large mesure revenue à un système order
driven, et depuis 1998, en préparation de l’Euro, les bourses européennes
harmonisent leurs opérations et envisagent des rapprochements et fusions. La
fusion des bourses de Paris, Amsterdam et Bruxelles est réalité depuis fin 2000,
mais les autres rapprochements restent difficiles.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

NEGOCIATION

En matière de négociation, deux questions supplémentaires méritent d'être


relevées :
D'abord, le degré de centralisation, à savoir l'exécution obligatoire, dans un
marché organisé et réglementé, des ordres sur valeurs mobilières par une
corporation investie d'une exclusivité (monopole du bordereau), au motif que
seulement ainsi, par la rencontre de toutes les offres et demandes, un prix juste et
transparent peut s'établir. Il n'en reste pas moins que des ordres très importants
peuvent causer des déséquilibres et porter préjudice au vendeur ou à l'acheteur s'il
doit passer par un marché où des contreparties insuffisantes se présenteraient, au
lieu de pouvoir négocier de gré à gré. D'où des dérogations, pour ce que l’on
appelle des « blocs » de titres; ceci d'autant que par la taille même de ces opérations
les parties en cause sont considérées comme suffisamment averties et requièrent
moins la protection d'une réglementation contraignante.
D'autre part, la transparence des opérations, à savoir la très prompte publication
des prix, notamment pour celles qui ne passent pas par la Bourse. La question est
d'importance pour les market makers qui, s'ils viennent d'acquérir une position
importante, ne souhaitent pas que le marché joue contre eux avant qu'ils aient pu la
dénouer : ils demandent donc de bénéficier d'un délai de quelques heures ou
quelques jours, avant de devoir afficher leurs transactions.
Pour le surplus, les autorités poursuivent leur mission de promouvoir des
marchés efficients et honnêtes, protégeant les parties en cause par l'énonciation
de principes comme l’exclusivité de la prise d'ordres et de leur exécution à des
institutions définies et contrôlables, la comptabilisation distincte de ces opérations
dans leurs livres, l'obligation de meilleure exécution, la possession d'un capital
minimum (remplaçant là où elle existe - comme avant 1991 en Belgique - la
responsabilité illimitée de l'agent de change personne physique), le respect de
certains ratios de structure, la séparation de fonctions, la soumission à des autorités
prudentielles et de marché.
Il y a deux sortes d'autorités :
9 l'autorité publique (Commission Bancaire et Financière en Belgique,
Securities Exchange Commission aux U.S.A., Commission des Opérations de
Bourse en France, etc ...);
9 les autorités que la profession se donne à elle-même - souvent selon des
modalités fixées par voie légale ou réglementaire - en les élisant par exemple
parmi ses pairs : National Association of Securities Dealers aux U.S.A., les
SROs (self regulatory organisations) en Grande-Bretagne, la Commission de
la Bourse en Belgique,... Les autorités professionnelles peuvent être chargées
d'organiser les examens à présenter pour accéder à la profession
d’intermédiaires sur titres, promulguer des codes de bonne conduite, en
surveiller l'application, ou encore composer des chambres disciplinaires pour
juger et sanctionner certaines infractions. Dans certains pays, les autorités
boursières ont d’importantes responsabilités de détermination des
conditions de cotation. Dans certains cas, le dispositif subordonne les

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

autorités professionnelles “de première ligne” (en prise directe avec le


marché) à des conditions d’indépendance de fonctionnement et à une
supervision étroite par une autorité de contrôle publique “de seconde
ligne” (cas de la Belgique - loi du 5 avril 1995).

LARGEUR DES MARCHES

Pour qu'un marché soit efficient, il faut qu'il soit large et liquide, c'est-à-dire qu'il
s'y effectue de nombreuses transactions sur une valeur donnée. C'est le cas des
grandes bourses mondiales, comme New-York, Londres ou Tokyo.
En Belgique par contre, on a pendant longtemps assisté à une anémie des marchés
des titres locaux. Certains freins en matière de fonds d'état et de certificats de
trésorerie ont déjà été évoqués; la création des OLO et l'introduction du système
des primary dealers (market makers) y remédient en partie.
En ce qui concerne les actions, de nombreuses valeurs ont un marché restreint de
quelques titres par jour seulement; il y a aussi quelques valeurs vedettes comme les
sociétés financières ou les quelques sociétés industrielles belges qui subsistent.
Depuis décembre 1981, on a observé un redressement sensible des cotations sous
l'effet non seulement de la baisse mondiale des taux d'intérêt depuis 1981, mais
aussi de la demande nouvelle émanant d'un public élargi.
Depuis la fin des années 80, et durant l’essentiel des années 90, les marchés
boursiers dans l’ensemble des pays industrialisés connaissent un succès croissant,
tant de la part des investisseurs que de la part des entreprises, qui y ont recours
pour trouver des capitaux et élargir leur actionnariat. Dans divers pays en voie de
développement, les marchés dits « émergents », les marchés boursiers connaissent
un développement parfois spectaculaire, mais souvent très erratique, entre autres
du fait du comportement parfois brutal d’investisseurs et de spéculateurs
internationaux.

EVOLUTION DES INTERMEDIAIRES EN VALEUR MOBILIERES

Dans les marchés de type order-driven, les courtiers (brokers) ont une mission de
conseil du client et d’exécution administrative. La centralisation des ordres est
assurée par la bourse, où la formation des prix était généralement assurée par des
intermédiaires spécialisés (« jobbers » à Londres, « specialist » à New York,
« hoekman » in Amsterdam,…). Des systèmes électroniques de centralisation des
ordres assurent aujourd’hui cette fonction dans certaines bourses.
Dans la plupart des marchés boursiers, les courtiers ont été longtemps rémunérés
par un système de commissions barémisées non négociables (% fixe) sur capitaux
traités – ce qui a pu entraîner l’apparition de rentes de situation avec en corollaire
un manque d’efficacité du système par rapport à ses coûts pour la collectivité. Un
changement d’optique à cet égard s’est fait jour dans les années 70.
Le 1er mai 1975, les bourses américaines ont abrogé la fixité de la commission sous
l’aiguillon des investisseurs institutionnels dont les transactions importantes

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

s’accommodaient mal du système en vigueur, contourné d’ailleurs de diverses


manières indirectes. Cette abrogation a entraîné une exacerbation de la
concurrence, amenant l’élimination des moins adaptés et une concentration des
intermédiaires qui d’autre part avaient besoin de fonds propres de plus en plus
importants pour couvrir les risques de transactions de volume unitaire croissant.
Cette dérégulation des courtages, aux Etats-Unis en 1975 a lancé un mouvement de
modification profonde du rôle des courtiers.
Dès 1979, la place de Londres a voulu se moderniser aussi pour demeurer, au
centre des marchés financiers internationaux ; elle a mis à l’étude la réforme
boursière qui s’est achevée en 1986 (« Big Bang ») : autorisation pour un
intermédiaire de pratique, diverses fonctions, acceptation de la détention de capital
des maisons de bourse par des établissements bancaires, etc.
Ce mouvement s’est propagé en Europe continentale et a fini par atteindre la
Belgique en 1991 : remplacement des charges d’agents de change, personnes
physiques indéfiniment responsables, par des sociétés de bourse.
Les établissements de crédit, qui canalisaient traditionnellement plus de 50 % des
ordres de bourse, ont reçu l’autorisation d’entrer dans le capital des sociétés de
bourse. En Belgique comme ailleurs, il y a eu concentration de la profession (il y
avait encore quelque 300 agents de change repartis entre 200 charges avant la
réforme – contre 64 charges pour toute la France juste avant la sienne ; elles sont
tombées à une cinquantaine aujourd’hui).
Dès 1979, la place de Londres a réagi devant le danger de déplacement d'opérations
vers la place de New-York qui devenait ainsi plus efficace et donc plus attirante;
elle a mis à l'étude la réforme boursière qui s'est achevée en 1986 ("Big Bang") :
fusion des fonctions de "broker" et "Jobber" (équivalent du « specialist » à New-
York) ; acceptation de la détention de capital des maisons de bourse par des
établissements bancaires.
Les courtages peuvent aujourd’hui être barèmisés, ou librement négociés entre
parties, ceci en fonction du volume pour les transactions importantes - tendance
croissante sous l'impulsion de la dérégulation.
En Belgique, il a fallu attendre le 19 octobre 1994 pour voir se libérer les courtages.
Ceux-ci varient en général de 1 % (achat de quelques actions pour un particulier) à
0,1 % (ou moins encore, quelques points de base67 pour des achats importants de
fonds d'état pour un investisseur institutionnel).
Aux courtages s'ajoutent des frais - notamment en cas de livraison ou retrait
physique des titres - et un impôt de bourse.
Si la transaction est ordonnée sur une bourse étrangère, au courtage étranger, fixé
selon les us et coutumes des bourses locales s'ajoutera un courtage local (souvent
50 % du courtage local ordinaire), majoré des frais de communication et des frais
de livraison réclamés sur certaines places. Mais de telles structures de rémunération
sont battues en brèche par la facilité de transmission des ordres et des informations

67 1 point de base = 0,01 %

- 198 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

permettant à des intermédiaires étrangers de servir leur clientèle à distance


("délocalisation des opérations").

ROLE DE CONSEIL DES COURTIERS

Les courtiers et les banques pratiquent le courtage, offrent traditionnellement un


service de transaction et un service de conseil. Ce service de conseil prodigué par
les analystes financiers au sein des banques doit être conçu comme étant au service
des investisseurs, qui surtout dans le cas des particuliers, ont besoin d’avis
spécialisés pour les aider à comprendre les monceaux d’informations disponibles.
Il est apparu de façon croissante au cours des années 90 que de nombreux analystes
financiers étaient forcés par leur employeur à utiliser la crédibilité que leur donnait
leur fonction pour inciter les investisseurs à acheter des titres de sociétés qui
avaient confié à la Banque des missions très rentables, d’IPO de fusions et
acquisitions, ou d’émissions de titres. Ceci servait de contrepartie à la générosité de
ces entreprises en faisant monter leur cours de Bourse, et en facilitant leurs
acquisitions payées en action. Ces confusions d’intérêts, pourtant sensées être
interdites par les séparations de fonction et « chinese walls » entre départements,
ont fait l’objet d’actions en Justice depuis l’été 2002, et doivent mener à une plus
grande indépendance des analystes à l’avenir.

LES DISCOUNT BROKERS

Certains courtiers spécialisés indépendants des banques ont échappé à ces


pratiques, ainsi bien sûr que les « discount brokers » qui n’offrent aucun service de
conseils, mais la simple exécution des transactions à des tarifs très faibles. Ce
dernier type de service convient particulièrement aux investisseurs avertis et très
actifs.

CESSIONS, FUSIONS D'ENTREPRISES

Les départements d'opérations financières des intermédiaires financiers ont souvent


une division "fusions/cessions d'entreprises" ("mergers and acquisitions" ou
encore "M & A"), qui s'occupe de ces opérations particulières pour compte
d'investisseurs désireux d'acquérir ou de vendre des participations importantes
conférant le contrôle dans les entreprises grandes ou petites.
Les membres des équipes de ces divisions sont généralement de qualification
élevée. Ils suivent des procédures fort variées dans l'accomplissement de leur
mission. Typiquement, si on les charge d'une cession d'une entreprise, ils suivront
un schéma qui peut se décrire comme suit :

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

ANALYSE ET EVALUATION

Après avoir vérifié qu’il n’a pas de conflit d’intérêts à accepter la mission de cession
(p. ex. autre mission en cours qu’il aurait dans le même secteur) l’intermédiaire
financier commence par analyser et évaluer la société à céder. Il procédera de
même à divers examens pour s'assurer qu'il a en face de lui une entreprise de bon
aloi, dont il peut promouvoir la cession.
Il existe différentes méthodes d'évaluation pour cerner la valeur d'une entreprise :
9 valeur de liquidation :
ƒ liquidation ordonnée;
ƒ à casser.
9 valeur de going concern :
ƒ valeur patrimoniale basée sur la valeur de l'actif net redressé, affecté
éventuellement d'un goodwill;
ƒ valeur de rendement basée sur l'actualisation des cash-flows libres (ou
des bénéfices) futurs, majorés de la valeur de cession des actifs non
nécessaires à la réalisation desdits cash-flows ou bénéfices (discounted
free cash-flow model);
ƒ valeur actualisée des dividendes futurs (dividend discount model).
9 valeur sur base de ratios boursiers
 prix prix prix 
EXEMPLE :  ou ou
dividende cash− flow 
sectoriels et géographiques
 bénéfice
9 valeur sur base de critères acceptés dans une profession déterminée (ex.
assurances, sucreries, ...).
Aucune de ces valeurs ne correspond nécessairement au prix qu'il sera possible
d'obtenir de la cession : le prix dépendra notamment de circonstances propres
tant à l'acquéreur (valeur de convenance, valeur synergétique, valeur de nuisance)
qu'au vendeur (p. ex. : rétention ou non d'une position minoritaire, continuation
d'une fonction active dans l'entreprise).
Souvent des éléments non monétaires, inchiffrables, entreront en ligne de
compte, comme le fait de céder une majorité68 ou minorité de blocage69, le
maintien du nom de la firme cédée, l'imposition de clauses de protection de tout
ou partie du personnel, le fait pour l'une des parties d'être pressée de conclure, la
stipulation envers l'acquéreur de contraintes d'exploitation (cas fréquent en matière

68 Des calculs empiriques ont été faits ces dernières années pour tenter d'objectiver la "prime de
contrôle", mais qui démontrent un large spectre en fonction du lieu, du moment et des
circonstances de la cession.
69 Minorité de blocage : quotité de votes qui, aux Assemblées générales extraordinaires, peuvent
empêcher certaines opérations qui leur sont soumises : augmentation de capital, fusion,
modification des statuts (25 % en Belgique, 33 % en France).

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de privatisations où le vendeur est un pouvoir public désireux d'assurer au-delà de


la cession le maintien d'un service public).

RECHERCHE D'UN PARTENAIRE (DANS LE CAS D'UNE CESSION :


L'ACQUEREUR)

Il s'agit de localiser les candidats probables qui pourraient se trouver intéressés


par l'acquisition. Peuvent entrer en ligne de compte certains fournisseurs ou
certains clients (intégration verticale), des entreprises du même secteur
(intégration horizontale) ; des groupes financiers ou des conglomérats en veine
de diversification, etc. Le grand public peut aussi devenir l’acheteur par une
introduction en bourse. La direction même des entreprises constitue un acquéreur
possible, pour lequel des montages financiers spéciaux ont été conçus (LMBO =
leveraged management buy-out) ou bénéficient même d'encouragements légaux et
fiscaux ("RES" = rachat d'une entreprise par les salariés, en France).
La recherche de partenaire peut rester bilatérale, et dans ce cas les négociations
n’ont lieu qu’avec un acheteur à la foi ou multilatérales, divers candidats étant mis
en concurrence. Une mise en concurrence peut aller jusqu’à une mise aux enchères
formelle.

NEGOCIATIONS

Une fois localisés n ou plusieurs candidats intéressés, s'entameront des


négociations. L’intermédiaire financier peut être en première ligne, ou simplement
aux cotés de son client.
Dans le cas ’une enchère formelle, les offres sont remises en deux temps : une offre
indicative remise sur base d’un prospectus d’information, offre qui sert à établir
une lise de quelques candidats (« short list »). Ceux-ci sont admis à consulter des
informations plus détaillées (contrats, données confidentielles) dans une pièce
isolée (« data room »). Toutes ces informations sont transmises sous couvert de la
confidentialité, et aucun document ne peut être emporté. Ils remettent alors une
offre ferme qui permet la sélection et la négociation finales.
Une grande discrétion est nécessaire à ce stade, tant vis-à-vis de l'extérieur de
l'entreprise à céder (fournisseurs, clients, concurrents) que vis-à-vis de l'intérieur
(cadres, personnel : encore qu'à un certain stade dont le moment est délicat à fixer,
ceux-ci devront être avertis car ils sont évidemment concernés, ô combien, par la
cession projetée - une information au conseil d'entreprise est d'ailleurs exigée en
Belgique avant la conclusion définitive).

FINANCEMENT

Arrivée à un stade avancé, la négociation cernera de plus près les problèmes de


fixation du prix et des modalités de paiement.
Il peut se poser dans le chef de l'acquéreur des problèmes de financement :

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 paiera-t-il contre espèces - au comptant ou à terme - ou bien, en tout ou en


partie, contre ses propres titres, dans le cadre de ce qu’on appelle alors une
offre d’échange ?
9 le prix sera-t-il fixe ou révisible en fonction de paramètres préétablis (chiffre
d'affaires, cash flows, bénéfices, ...) ?
9 doit-il procéder lui-même à une augmentation de capital ou doit-il s'endetter
et, dans ce cas, auprès de qui et dans quelles conditions?

L’ACQUISITION OU « LEVERAGE BUY OUT »

Les formules de financement d'acquisition se sont fort sophistiquées ces deux


dernières décennies. En particulier, les techniques de leveraged buy-out (LBO) se
fondent sur un surendettement contracté pour compte de cet acquéreur, par la
société acquise ou encore par une structure complexe spécifiquement mise en place
pour la circonstance.
Les bailleurs de fonds acceptent ce surendettement en considération de la
couverture offerte par les cash flows attendus de la société acquise ou par ses
actifs dont certains peuvent éventuellement se vendre rapidement (asset
stripping").
Les obligations émises dans le cadre du surendettement sont par nature à haut
risque, d'où leur nom de "junk bonds" (obligations « pourries ») - les taux des
obligations de ce type seront corrélativement élevés. En outre, le risque peut
s'accroître par d'éventuelles clauses de subordination; ces obligations se situent
alors, dans le bilan, entre les fonds propres et le passif ordinaire. Cette position
d'entre-deux a conduit à leur appellation de "mezzanine financing".
Ayant connu un développement explosif au cours des années 80, surtout aux
U.S.A., diverses opérations ainsi financées ont rencontré des difficultés à partir de
1989. Ces difficultés se sont répercutées sur les investisseurs (par exemple
certaines Savings & Loan Associations qui croyaient y trouver un surcroît de
rentabilité pour redresser leur situation rendue difficile par la fixité de taux de leurs
actifs et la hausse de leurs coûts de refinancement) et sur les intermédiaires
financiers actifs dans ce domaine (faillite de Drexel Burnham Lambert). Depuis le
milieu des années 90, ce type d’opération a connu à nouveau une croissance parfois
importante, croissance qui encourage, tant aux Etats-Unis qu’en Europe, le
développement de marchés plus ou moins liquides d’instruments financiers
spécialisés, allant des actions classiques ou crédits bancaires classiques aux diverses
formes de meyganine financing.

STRUCTURATION DU CONTRAT DE CESSION

Compte tenu du prix et des modalités de paiement, l'attention se portera sur la


rédaction de projets d'accords. On procède souvent par phases successives :
signature d'un pré-accord synthétique (« letter of intent ») à transformer ensuite
en accord détaillé définitif.

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Des problèmes complexes et souvent délicats d'ordre juridique, fiscal et humain


interviennent, requérant le cas échéant le concours d'experts extérieurs. Vendeur et
acheteur tenteront de se sécuriser:
9 Le vendeur veut être rassuré quant au paiement du prix par l'acquéreur et
être certain que l'acquéreur ait accompli les formalités légales ou
réglementaires pour conclure la cession (obtention d'autorisations officielles
dans certains pays, satisfaction aux lois sur la concurrence (dispositions anti-
trust), obtention des autorisations de change en cas d'acquisition par un
étranger). Il souhaitera éventuellement obtenir certaines promesses pour les
membres du personnel, etc.
9 L'acheteur souhaitera éviter d'acheter un chat dans un sac. Il demandera au
vendeur certaines garanties et procédera souvent lui-même à certaines
vérifications de conformité de l’information transmise ("due diligence"),
quant à la régularité des formalités administratives accomplies par la société
pour les besoins de son fonctionnement, la tenue de la comptabilité,
l'existence des actifs et passifs, et la possibilité de survenance de litiges. Des
garanties directes ou bancaires seront éventuellement exigées et on pourra
prévoir le blocage provisoire d'une partie du prix de cession qui sera restituée
à l'acheteur s'il s'avère que certaines déclarations du vendeur sont inexactes,
que certains actifs font défaut ou que certains passifs occultes (notamment en
matière fiscale) se révèlent. L'acheteur se souciera également de vérifier
l'existence de conventions d'actionnaires, au niveau des filiales notamment,
qui pourraient restreindre sa marge de manœuvre future. L'acheteur peut
aussi tenter de se prémunir contre la disparition de certains contrats avec des
fournisseurs ou clients, ainsi que contre des surprises - fort coûteuses - en
matière d'environnement.

CLOSING

En cas d'accord définitif, celui-ci sera finalement scellé au cours d'une cérémonie de
"closing" comme en matière d'émissions.
Ici aussi, les documents à signer sont souvent complexes et volumineux, les
banquiers, juristes et fiscalistes des parties y ayant consacré une attention
considérable.

REMUNERATIONS DES INTERMEDIAIRES

Les rémunérations attachées aux opérations de cessions proprement dites sont


souvent composées de deux parties : l'une fixe ou fonction d'un barême horaire
pour l'ouverture du dossier et l'analyse préliminaire ("retainer"), l'autre variable en
fonction du succès éventuel de la négociation et du prix obtenu ("success fee").
(Ces rémunérations seront, le cas échéant, complétées par celles dues pour la mise
au point et l'exécution du financement de l’opération).

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

On applique souvent pour la partie variable, selon le cas, un tarif dégressif (de 5 %
à 0,5 %) par tranches du prix atteint; parfois au contraire on accorde à
l'intermédiaire un tarif progressif pour le stimuler à se dépasser ("incentive").
La commission variable a tendance à se scinder elle-même en deux parties, l'une
rémunérant la localisation du partenaire ("finder's fee"), et l'autre l'aboutissement de
la négociation ("success fee" stricto sensu).
Au cas où l'intermédiaire financier s'occupe non de céder, mais au contraire
d'acquérir une entreprise pour compte de son client, il adoptera des techniques
différentes, mais les rémunérations seront du même ordre. Un problème
déontologique et pratique se pose dans ce cas quant à la partie variable, car
paradoxalement mieux il négocie, plus faible sera le prix et dès lors sa
rémunération. De même, si en cours d’examen, il acquiert la conviction que son
client n’a pas intérêt à réaliser l’acquisition, ce système de rémunération ne l’incite
pas à conseiller son client à y renoncer. Il est en fait incongru qu’un intermédiaire
rémunéré ainsi soit considéré par un conseiller, par les dirigeant et par le Conseil
d’administration de l’acquéreur.
Diverses formules peuvent obvier à cet inconvénient. Enfin il faut noter qu'il n'est
pas, en général, considéré comme déontologique que l'intermédiaire financier
partage ses notes d'honoraires entre acheteur et vendeur; il en résulterait une
ambivalence quant aux intérêts qu'il défend au cours des tractations et il vaut dès
lors mieux qu'il soit clairement situé d'un côté ou de l'autre de la table des
négociations. Ceci à moins qu'il ne soit requis comme arbitre.

CAS PARTICULIER DES SOCIETES COTEES EN BOURSE

Dès lors que la société est cotée en Bourse, une partie de la procédure décrite ci-
avant est impossible, car des négociations de fusion ou de cession d’un bloc de
titres – même majoritaire – ne peuvent se baser que sur des informations
disponibles pour le public. De plus il y a des actionnaires minoritaires non au
courant de la cession projetée, et il faudra tenir compte de leurs intérêts. En
Belgique, la Commission Bancaire et Financière a traditionnellement veillé à ce que
les acheteurs d'une participation de contrôle fassent une OPA sur les titres des
minoritaires. Ceci pour que tout les actionnaires soient sur le même pied. Le
caractère obligatoire de pareil traitement et le seuil à partir duquel on considère qu'il
y a eu acquisition d'une participation de contrôle diffère de pays à pays : 25%,
30 %, etc. et il est prévu qu'une directive vienne harmoniser cette notion dans
l'Union Européenne. Le corporatisme des milieux d'affaires allemands à empêcher
l'adoption d'une telle directive en été 2001.
Il peut y avoir des tentations d'acquisition contre le gré des administrateurs ou
dirigeants en place : ce sont les OPA hostiles. Tant dans l'"attaque" que la
"défense", les intermédiaires financiers, forts de leur expérience assisteront les
parties car les embûches sont nombreuses : les législations sont complexes ou
lacunaires, variables de pays à pays, voire d'état à état (U.S.A.), et en évolution
constante (directive en préparation à l'Union Européenne, législation récente en
Belgique).

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

L'attaque requiert souvent la mobilisation rapide de fonds importants et le


respect de dispositions telles que la déclaration obligatoire de positions importantes
acquises dans les sociétés cotées, l'introduction d'un dossier auprès des autorités,
l'information du Conseil d'Administration de la société cible préalablement au
lancement.
Le cas échéant, la défense doit aussi pouvoir mobiliser d'importantes sommes et a
souvent cherché à prévenir des velléités de reprise brutale par des dispositions
protectrices (pactes d'actionnaires, restrictions statutaires à la nomination
d’administrateurs, à la transmission de titres et autres "poison pills" dissuasives).
On s'accorde sur ce qu'une certaine défense est utile et raisonnable, mais non au
point où elle rend impossible la cession de sociétés dont les actions sont répandues
dans le public, cession qui devrait permettre le cas échéant une meilleure allocation
de ressources et la sanction éventuelle d'une direction déficiente.
Aussi la matière est-elle délicate, puisqu'elle met en jeu d'énormes intérêts,
souvent contradictoires entre les actionnaires de la société visée et sa direction,
son personnel - voire le pays dans lequel elle est active. La notion d'intérêt social
(au sens d'intérêt de la société cible en tant que telle) est au centre de cette
problématique - selon certains économistes, et selon la tradition américaine reflétée
dans sa jurisprudence, c'est avant tout l'intérêt des actionnaires invités à céder leurs
titres qui compte; selon d'autres, vision plus européenne, l'emploi, la pérennité de
l'entreprise, l'intérêt général (aussi difficile à définir que l'intérêt social) doivent aussi
être partiellement pris en considération.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

ELEMENTS DE GESTION ET CADRE LEGAL ET


REGLEMENTAIRE DES INTERMEDIAIRES

FINANCIERS

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 19.

ELEMENTS DE GESTION DES


INTERMEDIAIRES FINANCIERS

INTRODUCTION

La gestion des intermédiaires financiers n'est qu'un cas particulier de la gestion


des entreprises. On y retrouve les grandes fonctions de vente, de production, de
personnel, etc., telles qu'elles s'appliquent au secteur tertiaire.
Cependant, il existe un certain nombre de particularités propres aux
intermédiaires financiers stricto sensu dont les principales sont la gestion des
risques et la gestion de la liquidité. Ces particularités, de même que certains
aspects du marketing financier, feront l'objet de quelques considérations dans cette
partie du cours.

LA GESTION DES RISQUES DIVERS

Les risques encourus par les intermédiaires financiers et les moyens pour y faire
face sont fort divers.

RISQUE DE LA CONSISTANCE DES ACTIFS FINANCIERS

DELEGATION DE RESPONSABILITES

L'organisation par l'organe supérieur (en général le Conseil d'Administration) de


l'attribution interne des pouvoirs pour prendre les décisions en matière
d'investissement ou de crédit variera selon les cas :
9 un comité d'investissement ou de crédit peut être institué, délibérant en
collège;
9 des individus peuvent avoir l'autorité d'acquérir des titres financiers
("investment officers") ou d'accorder des crédits ("lending officers"), soit
seuls, soit conjointement avec un homologue;
9 des systèmes mixtes peuvent exister : l'autorité sera déléguée, et le cas
échéant subdéléguée, à des comités régionaux, à des responsables d'agences,
à des personnes investies de responsabilités particulières, et ce en fonction

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

des montants à placer ou à prêter d'une part, et des instruments de


placement, des formes de crédits ou des garanties déterminées d'autre part.

POLITIQUE GLOBALE

Les investissements ou les crédits éligibles sont sujets à des restrictions en fonction
des objectifs plus ou moins larges de l’établissement financier qui les réalise. Il
déterminera ses spécialisations et expertises éventuelles dans ses statuts ou dans les
axes stratégiques fixés par ses dirigeants. Dans ce cadre, le risque s’abaissera par
une politique de diversification.
Cette diversification s'opère par l'imposition d'une limite supérieure au montant
d'un risque pris sur un débiteur ou groupe de débiteurs déterminé par rapport à
l'ensemble des risques assumés ou à certains d'entre eux, ou par rapport aux fonds
propres de l'intermédiaire financier. Si une opération dépasse cette limite, elle
pourra éventuellement être partagée avec d'autres confrères.
Les limites imposées aux groupes de débiteurs se font selon divers critères,
sectoriels ou géographiques. Depuis les problèmes nés en 1982 relatifs aux
engagements sur certains pays (Mexique, Brésil, Argentine, Pologne, Roumanie) les
autorités tendent vers un plus grand formalisme dans le traitement des "risques-
pays".

ANALYSE DE L'UTILISATEUR DES FONDS

Avant de faire un crédit, l'organe de décision fera procéder à une analyse de


l'utilisateur. Il étudiera sa personnalité et sa situation économique et financière,
commerciale, technique, sociale et juridique propre de même que l'environnement
politique, économique et social dans lequel il oeuvre ainsi que son secteur. Il
examinera la destination projetée des fonds. Il comparera le risque, selon des
techniques diverses, avec d'autres utilisateurs de secteurs et de localisations
géographiques analogues. Il mesurera la rentabilité espérée de l’opération par
rapport à celle que pourraient lui procurer des placements alternatifs, de nature
similaire ou différente.
L'acceptabilité d'un risque crédit dépendra aussi du volume et de la bonne fin des
engagements financiers déjà pris par le débiteur. En matière de crédits bancaires,
il existe en Belgique une "Centrale des Risques" - positive - instaurée il y a une
vingtaine d'années sous l'égide de la Banque Nationale de Belgique, à qui tous
les établissements de crédit affiliés sont tenus de communiquer bimensuellement
toutes les ouvertures de crédit octroyées aux entreprises dépassant BEF 1.000.000,
et trimestriellement les utilisations qui en sont faites.
En matière de crédits à la consommation, il existe la Centrale "négative" sur les
débiteurs en défaut de leurs engagements, également tenue à la Banque Nationale
de Belgique. Est venue s'y ajouter la Centrale négative sur les crédits
hypothécaires. Un projet de loi en discussion en 2001 prévoit l'établissement
d'une centrale positive des emprunteurs particuliers, véritable cadastre de
l'endettement des Belges.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

En matière commerciale, il y a le Moniteur du Commerce, journal privé publiant


les protêts.
Les services d'études, d'expertises, d'analyses sont donc très développés chez les
intermédiaires financiers pratiquant le crédit.
A noter que des techniques se sont développées comme aide à la détermination de
la capacité de crédit du candidat-emprunteur et des garanties à fournir le cas
échéant. Il s'agit notamment du "credit scoring" des particuliers : au moyen de
paramètres prédéterminés (âge, état civil, situation familiale, profession, stabilité
d'emploi et de résidence, niveau de revenus et de fortune, ...) on établit une série de
cotes qui pondérées et additionnées fournissent le degré de présomption de la
capacité de faire face au plan de remboursement envisagé.
Aura une cote élevée, par exemple, une personne de 40 ans, mariée avec trois
enfants, cadre d'entreprise avec 20 ans d'ancienneté, propriétaire de son propre
appartement. A l'inverse aura évidemment de mauvaises cotes, un homme divorcé
de 25 ans, ayant déjà eu trois emplois successifs, sans domicile fixe.
Ces techniques se prêtent bien à l'informatisation. Elles ont été étendues, grâce
aux "systèmes experts", à l'analyse des éléments de bilans et de comptes
d'exploitation des entreprises, dont elles facilitent les projections dans l'avenir.

STRUCTURATION CONTRACTUELLE

La qualité des contrats destinés à organiser les relations futures entre


l'intermédiaire financier et l'utilisateur des fonds sera un élément important de
sauvegarde pour l'intermédiaire financier contre les aléas que peut rencontrer son
débiteur à l'avenir. C'est de la mise au point de clauses et conditions générales
adéquates, de la bonne rédaction des clauses particulières des contrats et de
l'observance des formalités nécessaires pour rendre opérantes ces clauses que
dépendra en partie le bon déroulement des opérations et du recours éventuel aux
garanties qui y sont attachées.
Ceci n'empêche pas certaines traditions en déviance avec ces principes : en France
notamment, il est d'usage fréquent de ne pas consigner par écrit les dispositions
régissant les crédits courants aux entreprises, ce qui laisse plus de souplesse, mais
aussi plus d'inconnues en cas de problème.

PRISE DE GARANTIES

Là où l'analyse en indiquera la nécessité, l'intermédiaire financier se protégera


contre la dégradation de la solvabilité de l'utilisateur de fonds en prenant les
garanties appropriées (voir plus haut), ou encore, le cas échéant, en prenant une
assurance-crédit ou ducroire.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

REVISION PERIODIQUE

Une fois les opérations mises en route et tout au long de leur existence, des
procédures internes de révision périodique de la consistance des actifs
financiers basées sur des informations publiques, des visites d'inspection in situ et
des analyses des états financiers de l'utilisateur des fonds ainsi que sur le suivi de
la conjoncture et des marchés seront organisées afin de surveiller l'évolution des
risques et, le cas échéant, de procéder en temps utile à la prise de mesures
conservatoires ou à leur liquidation.
Dans le même but, une surveillance des utilisations (limites, dépassements, retards,
etc.) est nécessaire - des outils comptables doivent être élaborés, le cas échéant
consolidés au niveau du groupe pour vérifier que les politiques globales (quant aux
classes de débiteurs) aussi bien que les applications particulières (limites
individuelles) sont respectées.

SUIVI DU CONTENTIEUX

Si malgré les mesures de prévention prises, la valeur de certains actifs financiers est
compromise, l'intervention du service du contentieux permettra, le cas échéant,
d'éviter ou de limiter les pertes potentielles. Vigilance, compétence, promptitude,
fermeté, diplomatie, réalisme, psychologie, autant de qualités requises des
responsables pour une tâche souvent ardue et complexe contrecarrée par de
nombreux intérêts divergents, notamment ceux de créanciers concurrents.

DECLENCHEMENT DE L’EXIGIBILITE

Lorsque le crédit d’une entreprise est ébranlé, chaque créancier a intérêt à ce que
son ou ses crédits soient exigibles immédiatement (même si leur échéance est
encore éloignée), car il peut alors demander le remboursement immédiat, si la
société en est incapable demander des garanties complémentaires, et en dernier
recours demander la faillite de la société s’il croit que sa situation se dégrade.
Les circonstances dans lesquelles un crédit ABC devient éligible sont multiples :
9 lorsque le débiteur est en défaut de paiement (intérêt ou principal) lors d’une
échéance de ce crédit
9 lorsque le débiteur est en défaut sur un autre crédit, si les contrats du crédit
ABC prévoient une clause de défaut simultané (« cross-default clause »)
9 lorsque certains développements prévus au contrat ABC se manifestent.
Traditionnellement il s’agissait de l’apparition de problèmes opérationnels ou
financiers, tels que pertes importantes et répétées, ratios d’endettement
excessifs, affaiblissement de la situation de fonds propres.
De façon croissante, les banques exigent l’obtention d’un rating par les sociétés
d’une certaine importance, et tant les contrats de crédit que des contrats
d’émissions obligataires peuvent prévoir que des réduction de rating en dessous
d’un certain niveau entraînent un accroissement des taux d’intérêt à payer et en

- 210 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

dessous d’un niveau plancher, l’exigibilité immédiate. Ce niveau plancher est


souvent le niveau en dessous duquel un prêt est considéré acquérir le statut de
« junk », qu’il n’a plus ce que l’on appelle un « investment grade ».
De telles clauses (« covenants ») donnent un rôle très important aux agences de
rating, mais sont parfois salutaires.

CONSTITUTION DE PROVISIONS

Pour parer aux pertes qui s'avéreront un jour, et en dehors des réserves exprimées
apparaissant visiblement à leur bilan, les établissements financiers constituent des
provisions pour risques qui ont un caractère interne.
On distingue entre les provisions "affectées", qui concernent des risques individuels
identifiés (participations ou débiteurs spécifiques sur lesquels on éprouve des
craintes précises, parfois regroupés par catégorie - risques sur un pays déterminé
par exemple) et les provisions non affectées, qui constituent un "matelas" global
pouvant servir à amortir le choc de risques non encore identifiés, mais dont on
peut craindre statistiquement la survenance au fil du temps.
Annuellement des dotations seront faites à ces provisions sur lesquelles il sera
prélevé, si nécessaire, pour atténuer l'impact qu'une perte importante aurait sur les
résultats d'un seul exercice. Des traitements statistiques permettant dévaluer les
risques de survenance de sinistres sont utiles et même nécessaires pour évaluer le
besoin de provisions.
Le traitement comptable de la constitution et de l'affectation de ces provisions et la
publicité qui leur est donnée varient sensiblement d'un pays à l'autre. Certains
(USA) mettent par priorité l'accent sur le principe d'une information complète des
tiers et des actionnaires et d'une parfaite comparabilité des bilans et comptes de
résultats de la profession, tandis que d'autres (Allemagne) estiment qu'une
discrétion raisonnable favorise plutôt le calme et la confiance dont la profession
financière a besoin dans un climat souvent avide de sensationnel. La prise en
considération de ces provisions pour le calcul du coefficient de fonds propres n'est
pas uniforme dans tous les pays.
Une directive européenne et les travaux complémentaires du Comité de Bâle visent
à harmoniser ces conceptions différentes en matière de provisions pour éviter des
distorsions de concurrence entre pays.
Les aspects fiscaux de ces provisions sont aussi fort différents selon les législations
nationales. Dans certains pays, ces provisions - même générales - sont largement
exonérées car considérées comme inhérentes à la nature du métier; dans d'autres -
notamment en Belgique - très peu de latitude est donnée à cet égard, tant que la
présomption suffisante d'une perte réelle n'aura pu être établie. C'est notamment le
cas pour les créances sur pays en voie de développement, objets d'un
rééchelonnement mais non abandonnées définitivement : aussi un marché
d'échange s'est-il créé dans lequel les banques créancières se cèdent mutuellement
leurs risques à prix écornés, les pertes étant alors avérées et acceptées par le fisc.

- 211 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

RISQUES SUR CONTREPARTIES PROFESSIONNELLES

Dans leurs relations suivies avec leurs correspondants attitrés comme dans leurs
rapports avec leurs contreparties occasionnelles sur les marchés, notamment pour
ce qui concerne les dépôts, opérations de change et sur titres, les intermédiaires
financiers encourent des risques de restitution ou de livraison d'actifs. Aussi, les
intermédiaires font-ils, comme pour les utilisateurs finals de fonds, des analyses
explicites ou implicites de leurs contreparties régulières ou potentielles
(établissements de crédit, sociétés de bourse, courtiers, assureurs, ...), et tenteront
de limiter leurs risques. A cette fin, ils établissent pour leurs opérateurs des listes
de contreparties autorisées et fixent périodiquement pour celles-ci des lignes par
type d'opération (dépôts, avances, opérations de change ou sur titres, au comptant,
à terme, confirmations de crédits documentaires, ...).
En raison de la globalisation croissante des marchés et de leurs interpénétrations, la
défaillance d'une contrepartie importante peut en entraîner d'autres en chaîne
("effet domino"). Par nature, ce risque "systémique" est plus géré par des autorités
de marché et les organismes professionnels que par les établissements individuels
(renforcement de la réglementation prudentielle, organisation de mécanismes plus
fiables et rapides de liquidation des transactions).

RISQUE DE VOIR SE DEGRADER OU DISPARAITRE PHYSIQUEMENT


LES ACTIFS MATERIELS

Dans la partie précédente du cours, il a déjà été question de la conservation


matérielle et du transport de valeurs. Outre le recours aux dispositifs de sécurité
physique (par exemple salle forte, gardes armés, voitures blindées, systèmes
d'alarmes, liaison avec un poste de police), et d'organisation (par exemple accès
conjoint à certains locaux, mesures d'identification, variations d'itinéraires), ce type
de risque est couvert par des assurances.
Une des questions qui se pose, en fonction du coût de l'assurance (niveau des
primes), est le montant qu'il convient d'assurer : risque maximum possible ou
risque raisonnable, avec ou sans franchise ? Ce sera question d'appréciation.

RISQUES TECHNIQUES DES OPERATIONS

Il s'agit de se prémunir contre les erreurs de parcours - par ignorance, négligence,


omission ou malentendu - qui peuvent se produire dans l'exécution des opérations
financières souvent complexes.
Il importe en premier lieu que la haute direction perçoive et comprenne la nature et
l’étendue des risques techniques. Cela n’est pas toujours le cas, notamment lors de
l’introduction d’instruments financiers nouveaux tels que les dérivés. Il s’est en
effet trouvé des établissements où les opérateurs prenaient des risques
insoupçonnés par leurs patrons ignorants.

- 212 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Il faut en outre une étude organisationnelle poussée, accompagnée de la mise en


place de procédures d'exécution rigoureuses, à laquelle doit être associée une
attribution claire des responsabilités, le tout faisant l'objet de tableaux de bord et de
contrôles appropriés.
La qualification du personnel (par le soin apporté au recrutement, à la formation et
à l'information) jouera dans ce domaine un rôle primordial de prévention :
EXEMPLES
9 méthodes de vérification des documents en matière de crédits documentaires;
9 modalités de consultation préalable de la position en devises à observer et
méthodes de calcul et d'enregistrement à suivre, lors de la conclusion
d'opérations de change;
9 procédures à respecter avant la mise en paiement d'un capital ou d'une rente
par une compagnie d'assurance ou un fonds de pension.
Une mention spéciale doit être faite pour ce qui concerne l'informatique, la
télématique et la bureautique, qui dans le domaine de l'intermédiation financière
jouent un rôle prépondérant et dont le dysfonctionnement peut entraîner des
conséquences graves. Outre les mesures préventives, les mesures de surveillance
(contrôles) et de secours (back-up) feront l'objet de soins particuliers.

RISQUE DE MALVERSATIONS, DE FRAUDE ET DE MALHONNETETE

En raison des sommes énormes qu'ils encaissent, conservent, transfèrent et


redistribuent, les intermédiaires financiers forment par excellence un champ de
convoitise pour les manœuvres frauduleuses, non seulement de tiers mais aussi de
membres de personnel, de dirigeants ou d'actionnaires peu scrupuleux, talonnés par
une situation personnelle pressante ou tout simplement cupides.
Parmi les mesures préventives, on peut compter diverses précautions dans
l'organisation comme la limitation d'accès aux caisses et aux salles d'ordinateur,
l'attribution de codes d'accès individuels aux fichiers informatiques, l'emploi de clés
télégraphiques pour les messages télex ou téléfax confiées à la garde de personnes
étrangères à celles de la conclusion des opérations, l'exigence de plusieurs
signatures pour la validation d'ordres ou d'engagements de l'intermédiaire financier,
l'emploi de papier de sécurité pour l'établissement de chèques, la séparation entre
l'exécution, l'enregistrement et le contrôle des opérations, la fixation de limites de
lignes et de positions.
Parmi les méthodes curatives, on peut compter les contrôles internes (service
d'inspection portant sur la régularité des opérations et de leur comptabilisation, et
service d'audit interne portant sur l'existence d'une organisation adéquate,
l'observance des procédures fixées et l'exécution des décisions prises) et externes
(réviseurs, inspecteurs des autorités). Le but est de détecter les imperfections et de
prendre des mesures correctives. Il y a aussi la prise d'assurances qui couvrent dans
des limites convenues les sinistres éventuels.

- 213 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Ici se pose encore une fois la question des limites au coût du contrôle et des polices
d'assurance, et il faudra exercer son jugement quant à l'optimum considéré comme
désirable.
Ces deux derniers risques sont globalement appelés risques opérationnels. Dans le
cadre des règles dites de Bâle II, le risque opérationnel devra être quantifié par
chaque banque, et faire l’objet d’une affectation de fonds propres.

RISQUE INHERENT AUX RESPONSABILITES PROFESSIONNELLES


ENCOURUES PAR LES INTERMEDIAIRES FINANCIERS

Cette responsabilité découle de la nécessité d'exécuter des opérations complexes


avec ou concernant des tiers dans un cadre légal, réglementaire, jurisprudentiel et
déontologique touffu, voire parfois contradictoire.
Il en résulte que cette responsabilité est à la fois importante et difficilement
cernable.
EXEMPLES :
9 Responsabilité du banquier donneur de crédit : un crédit a été accordé à une
entreprise, qui connaît par la suite des difficultés.
D'une part, l'établissement de crédit peut être tenté de dénoncer le crédit
pour sauver de sa créance ce qui peut l'être. En effet, la banque a une
responsabilité de solvabilité vis-à-vis de ses propres déposants, et doit veiller
à préserver la valeur de ses actifs. De plus, s'il prolonge indûment ses crédits
alors que la situation du débiteur ne le mérite pas, le banquier encourt une
responsabilité vis-à-vis des tiers créanciers du débiteur car ceux-ci pourraient
prétendre que la prolongation du crédit les a induits en erreur : maintien
artificiel de la vie et de la notoriété de l'entreprise, qui "apparaît" solvable
grâce au crédit "immérité" dont elle dispose.
D'autre part, par une dénonciation précipitée du crédit, le banquier peut
provoquer la faillite de son débiteur alors que sa situation n'est pas vraiment
désespérée. Il encourt alors une autre responsabilité, cette fois vis-à-vis de
l'entreprise, et aussi éventuellement vis-à-vis des tiers créanciers de celle-ci.
9 Surendettement des particuliers. Le prêteur doit songer à se prémunir contre
le risque d'allégation qu'il a manqué à son devoir de bien s'informer au
préalable sur la situation de l'emprunteur; et donc de refuser le crédit si celle-
ci pouvait être considérée comme précaire (selon quels critères ?).
9 Une société veut procéder à une émission de titres. La banque assiste cette
société émettrice dans la réalisation du prospectus exigé par l'autorité. Si par
la suite on découvre que le prospectus est erroné, la responsabilité de la
banque peut être mise en cause.
9 Le département opérations financières d'un intermédiaire financier prête son
concours à une société dans la mise au point d'une nouvelle émission. Les
informations privilégiées qu'il détient à ce titre ne peuvent être

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

communiquées au département gestion de fortunes sous peine de le voir


soupçonné d'"insider trading" répréhensible.
9 Le département ordres de bourse-conseil aux investisseurs doit baser ses
conseils de placement sur son analyse et ses convictions professionnelles, et
surtout ne pas se laisser influencer par les souhaits du département
opérations financières qui lance une émission.
9 Un intermédiaire financier peut être sanctionné si celui-ci a pris part à des
opérations dont l'autorité établit qu'elles ont pour but ou pour effet de
favoriser la fraude fiscale, ou s'il a accepté des dépôts de fonds qui se révèlent
être d'origine criminelle.
La détection, le suivi et le contrôle de ce genre de risques ont nécessairement des
limites pratiques et économiques - qu'il sera pourtant difficile d'invoquer s'il s'avère
que la vigilance de l'intermédiaire financier a été déjouée : où commence la
"négligence coupable"?
Aussi, la gestion de ces risques ne peut se faire qu'avec un sens aigu des
conséquences des différentes actions que peuvent poser les intermédiaires
financiers. Ce sens se développe tant par une connaissance théorique approfondie
des opérations traitées, que par le suivi de la législation et de la jurisprudence qui,
localement et internationalement, évoluent rapidement dans tous les domaines
Cette gestion est également étayée par l'expérience - parfois chèrement acquise -
qu'il y aura lieu de transmettre sous forme d'information et de formation aux futurs
gestionnaires.

LA GESTION DE LA LIQUIDITE DES INTERMEDIAIRES


FINANCIERS

PROBLEME GENERAL

Le but de la gestion de la liquidité sera de faire en sorte qu'à aucun moment,


l'établissement financier ne se trouve en situation de ne pas pouvoir faire face à ses
engagements, faute de trésorerie pour rencontrer une échéance, ce qui équivaudrait
à le mettre en cessation de paiements.
Cette gestion de la liquidité dépend en premier lieu du type d'activités exercées, des
objectifs propres de l'établissement, et des besoins auxquels celui-ci veut répondre.
D'une manière plus précise, elle dépendra du degré de transformation financière
auquel il se livre (rappel : transformation financière = placer des fonds dans des
actifs à des échéances ou dans des devises différentes de celles des ressources au
moyen desquelles ces placements sont réalisés : en bref, dans le cas le plus fréquent,
financer du "long" avec du "court").

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Comme premier élément de la gestion de la liquidité, l'établissement financier fixe


une stratégie d'ensemble qui définira des objectifs de structure financière adaptés à
son activité70. Par structure financière, il faut entendre l'ordonnancement des
grandes masses des actifs et des passifs d'après leur duration71 . Dans le cadre de
cet ordonnancement, l'établissement rajustera périodiquement ses échéanciers
d'actifs et de passifs en fonction de considérations sur l'évolution probable des
marchés ("asset and liability management").
Par rapport à cette stratégie globale, des mesures doivent être prises pour
rencontrer les variations qui se présenteront dans ces masses et dont l'impact se
répercutera dans la trésorerie courante.
Il y a des variations :
9 prévisibles, notamment celles que l'établissement ordonne lui-même;
9 imprévisibles, qui dépendent exclusivement de la volonté des tiers bailleurs
et utilisateurs de fonds.
Parmi les variations prévisibles, il y a celles que l'on peut prévoir avec précision
(liquidations de contrats de change, échéances d'acceptations bancaires, paiements
d'emprunts pris ferme, versements périodiques de rentes, remboursements de prêts
à terme fixe, d'effets de commerce et d'obligations en portefeuille, paiements de
loyers, salaires, sécurité sociale, impôts, paiement ou encaissement de dividendes et
d'intérêts, transactions de clientèle connues grâce aux informations recueillies
auprès de celle-ci, ...).
D'autres variations peuvent être prévues, quoique avec moins de précision, en
raison de leur récurrence statistique (prélèvements des particuliers au moment des
vacances, liquidités déposées par des sociétés avant le 31 décembre pour la toilette
des comptes annuels, paiements à faire périodiquement par la clientèle à l'O.N.S.S.
et au fisc).
Des écarts peuvent se manifester par rapport aux prévisions et ce dans les deux
sens; c'est-à-dire qu'il peut se constituer :
9 une trésorerie excédentaire : son inconvénient est de ne pas permettre à
l'établissement d'optimiser sa rentabilité, soit qu'il y ait un simple manque à
gagner, soit qu'il y ait réellement une perte (une rentrée prématurée de fonds

70 Une banque, un holding, une compagnie d'assurance, une société de bourse auront par nature
des contraintes de liquidité et donc des structures financières radicalement différentes.
71 Plus subtile et mieux adaptée comme concept que l’échéance finale pour la gestion d’actifs
et de passifs d’un portefeuille diversifié, la duration d’un actif (ou passif) financier mesure la
durée moyenne pondérée de tous les flux monétaires futurs (non seulement le principal mais
aussi les intérêts) que cet instrument procure. La pondération se fait sur base des valeurs
actuelles de chaque flux individuel et la duration est donc sensible au niveau (et à la variation)
des taux d’intérêt, aussi bien qu’au moment où les flux sont encaissés (ou payés). La notion de
duration “simple” a fait l’objet de nombreux raffinements mathématiques pour la gestion de
divers instruments financiers composant un portefeuille.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

qui ne pourraient pas être replacés à des taux suffisants pour couvrir les coûts
des passifs non échus qui finançaient la transaction remboursée);
9 une trésorerie en déficit : son inconvénient majeur, s'il perdure, est de
risquer un ralentissement, voire une cessation des paiements, et, dans le cas
des banques, de provoquer alors un "run" sur les dépôts (c'est-à-dire une
demande massive de remboursements, accélérés par un effet panique
d'entraînement); les équilibres statistiques ne joueront plus.

MECANISMES PERMETTANT DE FAIRE FACE AUX RUPTURES DE


LIQUIDITES

En dehors de l'utilisation des avoirs disponibles (encaisses, avoirs en comptes à vue


à la Banque Nationale, à l'Office des Chèques Postaux et chez d'autres
intermédiaires financiers) et de la constitution d'un échéancier raisonnable des
actifs par rapport aux passifs qui les financent, il y a deux principales voies pour
faire face aux ruptures de liquidité (trésorerie en déficit) : la cession d'actifs
mobilisables (qui seront donc recherchés comme instruments de placement) et le
recours aux passifs de substitution.

LES CESSIONS D'ACTIFS MOBILISABLES

Certaines cessions d'actifs peuvent se faire librement sur les marchés financiers :
9 cession de fonds d'état, d'obligations, d'actions (en bourse ou sur d'autres
marchés organisés);
9 cessions de certificats de trésorerie (en bourse aux U.S.A., auprès de primary
dealers en Belgique);
9 cessions ou mobilisation d'effets de commerce;
9 cession de créances titrisées, telles que créances hypothécaires ou créances
sur détenteurs de cartes de crédit,...
9 cession de crédits d'exportation mobilisables.
Divers titres (fonds d'Etat, effets, … peuvent aussi faire l'objet d'une cession
temporaire appelée convention de vente-rachat, "repurchase agreement" ou
"repos", qui donnent de la liquidité temporaire à de très bonnes conditions.

LE RECOURS AUX PASSIFS DE REMPLACEMENT

Il s'agit ici de recourir à l'emprunt de fonds de tiers.


On peut, de même que pour la cession d'actifs, faire la différence entre
l'augmentation de passifs selon des mécanismes institutionnalisés ou selon des
mécanismes de marchés libres :
9 selon des mécanismes institutionnalisés :
ƒ lignes d'avances obtenues auprès de la Banque Nationale de Belgique (à
condition de lui apporter des titres en garantie);

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

ƒ lignes "stand-by", garanties ou non, obtenues auprès de collègues


intermédiaires financiers moyennant commissions;
9 selon des mécanismes libres de marchés : il s'agit essentiellement de recours
aux marchés monétaires, principalement le marché interbancaire : prêts
généralement de 1 jour (overnight) à 12 mois; il y a nécessité pour
l'intermédiaire financier d'être crédible pour avoir accès à ce marché dont les
membres peuvent, dans le cas contraire, refuser de lui prêter. Les
intermédiaires financiers actifs du marché font en effet l'étude des
contreparties qu'ils sont susceptibles d'y rencontrer et déterminent des limites
pour chacune d'elles en fonction de leur taille, de leur standing et de leur
affiliation. Ces limites ne sont pas nécessairement communiquées par les
intermédiaires financiers entre eux.

MARKETING DES INTERMEDIAIRES FINANCIERS

INTRODUCTION

Le marketing est une notion relativement récente en matière d'opérations


financières surtout en Europe. Si la démarche de clientèle a de tout temps été
pratiquée en assurance, elle était, il y a 30 ans encore, considérée comme allant à
l'encontre de la déontologie professionnelle en matière bancaire.
D'ailleurs, dans le sillage de déboires financiers tels ceux des années 30, l'opinion
désapprouvait les techniques trop agressives de vente; aussi la législation belge de
1935 prévoyait qu'une surveillance devait être exercée dans ce domaine, en
spécifiant notamment que, parmi les frais généraux, le poste "publicité" devait
apparaître de façon distincte dans les comptes de résultats des banques - cette
disposition devenue anachronique n’a été abrogée qu’en 1993.
De fait, avec la multiplication des agences des établissements nationaux, et les
implantations nouvelles des établissements étrangers, le marketing a fait son
apparition en matière bancaire sous la pression de la concurrence, sub-
consciemment d'abord, de manière structurée ensuite.
On peut distinguer entre le marketing par marchés et le marketing par produits.

LE MARKETING PAR MARCHES

On segmente les cibles, par exemple :


9 les particuliers,
9 les exportateurs,
9 les investisseurs institutionnels,
9 les professions libérales,
9 les expatriés,

- 218 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 les grandes entreprises,


9 les P.M.E.,
9 les jeunes,
dont on identifie les besoins par rapport aux produits et services offerts, produits
et services que l'on s'efforcera d'ailleurs de tailler sur mesure si cela se justifie.
Des campagnes de publicité et de promotion (primes et cadeaux à l'ouverture de
comptes, à l'accroissement des avoirs, ...) s'adressent aux publics visés.

LE MARKETING PAR PRODUITS

TYPES DE PRODUITS

Ces produits et services financiers peuvent être :


9 des crédits spéciaux : crédits à l'exportation, crédits d'installation, crédits
permettant de profiter de dispositions fiscales (versements anticipés);
9 des instruments de dépôts ou d'investissements : des obligations ou bons
de caisse attractifs (bons de croissance, zero bonds); des titres
d'investissements à avantages fiscaux ou de concepts nouveaux (SICAV,
fonds communs de placement spécialisés en matières premières ou en titres
de marchés exotiques, de venture capital, de sociétés novatrices);
9 des moyens de paiement : cartes de paiement, cartes de crédit;
9 des instruments de couverture : opérations à terme, swaps, options; ...
9 des services annexes : gestion de portefeuilles, cash management des
entreprises, conseils financiers, ...
9 des techniques d'accès : distributeurs automatiques, coffres de nuit, drive
in, self banking, phone banking, home banking Internet et autres liaisons
télématiques, ...

MAKE OR BUY ?

Un établissement financier peut se poser la question : doit-il développer lui-même


ses produits originaux, ou ferait-il mieux de prendre des produits élaborés par
d’autres (“make” or “buy”) et d’agir alors comme distributeur (p. ex. création
d’une SICAV spécialisée en actions japonaises) ?
De même pour les services, l’établissement financier doit-il assurer toutes les
prestations lui-même, ou en sous-traiter certaines (p. ex. la garde des titres de la
clientèle) ? Cela dépend des moyens disponibles par rapport aux objectifs
stratégiques à mûrir avec soin : problème éternel d’allocation de ressources rares,
d’économies d’échelle et de concentration des efforts sur les métiers considérés
comme de base.
Tout comme les produits industriels, les produits et services financiers peuvent
faire l'objet de commercialisation sous marques (Compte orange, Carte bleue,

- 219 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Bancontact, Plan G, Telelink), quoique les concepts sur lesquels ils s'appuient
soient difficilement brevetables.
Des techniques de cross-selling pourront être mises en oeuvre; dans la politique
de prix, un lead product pourra être agressivement proposé dans l'espoir qu'il
entraîne à la consommation d'autres plus rentables (cf. p.137) - mais dans les limites
qui sont tracées dans la loi sur les pratiques du commerce qui a été rajeunie en 1991
restreignant notamment les formules de ventes liées.

CONSEQUENCES SUR LA GESTION

Certains produits ou services sont mieux administrés et certains marchés sont


mieux approchés ou desservis à partir d'une base centralisée alors que l'inverse est
vrai pour d'autres.
Sont centralisés :
9 les services à haute technicité (qui s'adressent aux personnes fortunées, aux
grandes entreprises, aux pouvoirs publics);
9 les services de relations avec l'étranger.

SONT DECENTRALISES :

9 les services au grand public ayant besoin de produits de masse;


9 les services aux P.M.E.

IMPACTS

C'est ce qui a entraîné, surtout depuis la guerre, la prolifération des agences,


succursales et sièges au point d'atteindre aujourd'hui une certaine saturation
renforcée par le phénomène des guichets automatiques (ATM, POS) et les
initiatives en matière de phone- et home-banking.
Il n'est d'ailleurs pas nécessaire de disposer d'un réseau propre pour un
intermédiaire financier qui peut également songer à recourir à des réseaux libres
composés d'agents agréés, qui sont en fait les démarcheurs et antennes
périphériques de ces intermédiaires financiers; ce système est utilisé tant par des
banques que par des sociétés de financement, compagnies d'assurance, etc. Souple,
il pose néanmoins des problèmes particuliers : surveillance de personnes qui
agissent au nom d'organismes financiers dont ils ne dépendent pas
hiérarchiquement au sens strict du terme, propriété de la clientèle en cas de
cessation de la représentation.
A noter enfin les systèmes de vente directe par correspondance ou Internet,
rencontrés notamment dans les pays anglo-saxons, et scandinaves pour la
distribution d'assurances et de fonds communs de placement.

- 220 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

DEVELOPPEMENTS

Dans le développement du marketing des établissements financiers, divers moyens


ont été utilisés pour atteindre les cibles convoitées :
9 une meilleure information et une plus grande pénétration (sur le plan des
groupements professionnels : manifestations, expositions, campagnes de
presse; sur le plan individuel : publicité, mailing, démarchage, encore que ces
approches de clients aient été plus étroitement réglementées);
9 une plus grande convivialité (amélioration de la décoration et de
l'accessibilité des locaux, meilleur accueil humain, clarification des contrats et
des formulaires);
9 une multiplication des produits, souvent lancés à bas prix;
9 la recherche de rationalisations techniques et administratives (informatique,
self-banking, ...) permettant de devenir "low cost producers" efficients de
certains produits et services et d'augmenter corrélativement les parts de
marché par des politiques de prix et de qualité (rapidité, fiabilité, ...) ainsi
rendues possibles ;
9 une spécialisation, permettant de mieux rencontrer certains besoins
particuliers dans un créneau donné (politique de “niches” et de “boutiques”);
9 une déspécialisation, permettant d'offrir sous un même toit une gamme de
produits financiers divers; ce mouvement a trouvé ces derniers temps une
faveur accrue dans certains pays (USA), avec l'apparition de "supermarchés
financiers" ;
9 une recherche de l'utilisation optimale à faire des techniques de
communication à distance, afin de trouver et satisfaire le client au mieux. Les
formules de type "banque à distance" ou "banque Internet", après une vogue
passagère en 1999-2000, n'ont pas tenu leurs promesses. Les techniques
Internet devraient cependant permettre aux banques de compléter leurs
canaux de distribution, et de simplifier certaines transactions.
Comme dans tout secteur économique, la disposition d'un réseau efficace de
distribution de produits financiers, notamment auprès du consommateur final,
revêt une importance majeure : c'est un des principaux attraits, à côté de la
capacité d'opérer et de la créativité dans la génération des produits nouveaux, qui
est convoité par les établissements financiers cherchant à s'étendre par croissance
externe dans le cadre de l'unification européenne, et, de manière plus large, de la
globalisation des marchés.

CADRE D’ACTION CONCERNANT L’HARMONISATION DE LA


CONCURRENCE ET LA VENTE A DISTANCE DES SERVICES
FINANCIERS

Le 28 octobre 1998, la Commission européenne a adopté une communication


intitulée « services financiers : élaborer un cadre d’action ». Celle-ci vise à
compléter l’introduction de l’Euro en créant les conditions nécessaires pour

- 221 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

permettre au secteur financier de développer tout son potentiel dans un marché


mondial de capitaux de plus en plus intégré. Cette nécessité a notamment été
rappelée au Conseil européen de Cardiff des 15 et 16 juin 1998. Dans ses
conclusions, la présidence du Conseil invite en effet la Commission à présenter un
cadre d’action visant à améliorer le marché unique des services financiers, en
examinant notamment l’efficacité de la mise en œuvre de la législation actuelle et en
recensant les points faibles qui pourraient rendre nécessaire une modification de la
législation.
Cette modification repose sur deux grands axes :
9 la réalisation des marchés de capitaux européens liquides et profonds
répondant davantage aux besoins des investisseurs ;
9 la suppression des obstacles relatifs aux prestations transfrontalières des
services financiers de détail afin d’offrir un plus grand choix au
consommateur tout en lui assurant un niveau de protection plus élevé
notamment par la mise en place de moyens de recours.
A cette fin, la Commission n’a pas l’intention de refondre les règles
communautaires relatives aux services financiers mais de les compléter dans
certains domaines précis notamment la fiscalité des produits financiers. Le
programme envisagé a également pour vocation d’alléger et d’assurer une mise en
œuvre effective de la législation existante grâce à une meilleure transposition du
droit communautaire par les Etats membres. Enfin, une action plus rigoureuse de
la Commission et une interprétation claire et uniforme de la législation
communautaire seront mises en place dans le cadre d’une coopération grandissante
entre les autorités de surveillance des Etats membres.

« PROPOSITION DE DIRECTIVE CONCERNANT LA VENTE A DISTANCE DES SERVICES


FINANCIERS »

Présentée le 14 octobre 1998, la proposition de la Commission complète la


directive 97/7/CE relative à la vente à distance de biens et de services autres que
des services financiers. Ce projet est destiné à établir un cadre juridique clair en
harmonisant les règles relatives aux contrats de vente à distance des services
financiers (bancaires, d’assurance, d’investissement, etc…). La Commission
souhaite garantir au consommateur une protection de qualité en matière de services
financiers de détail en posant des limitations et des conditions d’utilisation des
moyens de commercialisation à distance. A cet effet, la proposition énonce toute
une série de dispositions détaillées quant aux procédures à respecter avant la
conclusion d’un contrat, notamment le respect d’un délai de réflexion et de
possibilité d’user d’un droit de rétractation pour le consommateur. L’adoption
d’une telle directive permettra aux consommateurs d’accéder plus facilement aux
services financiers dans d’autres Etats membres, tout en étant assurés que leurs
intérêts sont protégés. Par conséquent, elle encouragera l’essor de nouvelles
formes de commercialisation des services financiers au sein de l’Union européenne.

- 222 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

« PROPOSITIONS DE DIRECTIVES CONCERNANT L’ACCES A L’ACTIVITE DES


INSTITUTIONS DE MONNAIE ELECTRONIQUE ET SON EXERCICE AINSI QUE LA
SURVEILLANCE PRUDENTIELLE DE CES INSTITUTIONS »

La Commission a présenté le 29 juillet 1998 des propositions visant à mettre en


œuvre le marché unique des services financiers en supprimant les entraves à
l’exercice d’activités transfrontalières, notamment par une harmonisation des règles
concernant des questions prudentielles et réglementaires concernant les émetteurs
de monnaie électronique.
La première proposition vise à inclure des entreprises émettant de la monnaie
électronique parmi les établissement de crédit, en les intégrant dans les directives de
coordination bancaire (77/780/CEE et 89/646/CEE), afin de leur permettre d’agir
dans tout le marché unique sur la base d’un agrément unique délivré par un seul
Etat membre (passeport européen), et de préserver ainsi la concurrence avec les
établissements de crédits institutionnels.
Dans sa seconde proposition de directive, la Commission définit tout d’abord la
monnaie électronique comme un montant monétaire stocké sur une carte à
microprocesseur ou une mémoire d’ordinateur et qui est l’émetteur. Elle précise
ensuite que les institutions concernées ne seront pas soumises à l’ensemble des
directives bancaires mais aux règles spécifiques posées par la proposition sur
l’émission de monnaie de capitaux. A ce titre, des exigences quant aux montants et
l’utilisation du capital initial et des fonds propres permanents seront à respecter
ainsi que des obligations destinées à assurer une gestion saine et prudente. Les
Etats pourront néanmoins accorder des exemptions pour certaines dispositions des
propositions de directives en proportion des risques inhérents aux systèmes de
petite taille.

« PROPOSITIONS DE DIRECTIVES SUR LES SIGNATURES ELECTRONIQUES »

Une proposition de directive (5) instituant un cadre juridique pour l’utilisation des
signatures électroniques a été présentée par la Commission européenne le 16 juin
1998. Elle s’inscrit dans le prolongement de la communication relative au
commerce électronique adoptée par la Commission en octobre 1997 dans laquelle
le manque de sécurité était présenté comme l’un des principaux obstacles au
développement rapide du commerce électronique. Afin de pallier notamment les
problèmes liés à la preuve du paiement, la Commission propose d’instituer des
règles minimums de sécurité et de responsabilité dans toute la Communauté, mais
aussi un système de coopération avec les pays tiers. En effet, les signatures
électroniques permettent à une personne qui reçoit des données par réseau
électronique de déterminer l’origine des données (identité) et de vérifier si les
données ont été modifiées ou non (intégrité). Les données sont accompagnées
d’un certificat, délivré par le prestataire du service de certification qui permet au
destinataire de s’assurer de l’identité de l’expéditeur. La proposition définit les
conditions essentielles d’émission de ces certificats afin d’assurer leur libre
circulation dans tout le marché unique. Les prestataires de services seront
responsables de la validité et du contenu du certificat. Ces services d’accréditation

- 223 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

pourront être fournis sans autorisation préalable, les Etats étant libres d’instaurer
des régimes volontaires d’accréditation afin d’élever le niveau du service. Enfin,
indépendamment de la technologie utilisée, les signatures électroniques doivent
avoir les mêmes effets légaux qu’une signature manuscrite.
En Belgique, la loi du 17 juillet 2002, relative aux paiements électroniques
transpose en droit belge la recommandation européenne de 1997.
Initialement, la charge de la preuve reposait entièrement sur les émetteurs
d’instruments de transfert, mais des amendements supprimant la définition
restrictive de la négligence grave et précisant la mission du juge et les éléments de
preuve pouvant être utilisés ont partiellement réduit ce problème.
La loi prévoit aussi que les titulaires auront la possibilité de définir les plafonds
d’utilisation de leur carte de paiement en fonction de leurs besoins propres et des
risques qu’ils sont prêts à assumer.

- 224 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CHAPITRE 20.

CADRE LEGAL ET REGLEMENTAIRE DES


INTERMEDIAIRES FINANCIERS

INTRODUCTION

On a déjà observé que les intermédiaires financiers se meuvent dans divers


domaines touchant à l'intérêt général et qu'ils font donc l'objet, de la part du
législateur et des divers pouvoirs réglementaires, de nombreuses attentions. A
l'origine de celles-ci :
9 des événements ou nécessités macro-économiques et monétaires qui
dépassent les acteurs individuels sur la scène financière et que les forces du
marché ne peuvent seules rencontrer;
9 un désir des pouvoirs publics d'orientation, d'intervention et de
redistribution, d'ordre politique ou social, qui peut être de nature idéologique;
9 des déboires jugés intolérables économiquement et socialement, dans la
mesure où leur source peut être attribuée à l'absence d'une autodiscipline
professionnelle individuelle ou collective. Cette absence elle-même peut
résulter de la pression concurrentielle, de l'appât du gain, du goût de
puissance, de la recherche de prestige, de l'individualisme excessif, de
l'ignorance, de l'aveuglement ou de la bêtise ...;
9 des problèmes réels ou potentiels soulevés, à raison ou à tort, par divers
organismes (associations de consommateurs, partis politiques, autorités
prudentielles, associations professionnelles, groupes d'études).
Cherchant à concilier efficience économique, sécurité juridique, justice
sociale, équité professionnelle et crédibilité politique, les accents
réglementaires fluctuent dans le temps et dans l'espace d'autant qu'ils visent des
équilibres s'avérant instables par nature en regard d'impératifs souvent
contradictoires.
Après des courants dominants divers, la tendance la plus répandue veut aujourd'hui
que dans le cadre d'économies de marché, une certaine déréglementation
économique permette aux forces de la concurrence de s'exprimer davantage que les
velléités interventionnistes ou monopolistiques, compensée par un certain
renforcement sur le plan prudentiel. A cet égard, il faut aussi noter des tendances à
l'harmonisation réglementaire pour assurer l'égalité des chances des joueurs
(promotion de "level playing fields").

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CLASSEMENT DES MESURES LEGISLATIVES ET


REGLEMENTAIRES

Les dispositifs mis en place affectant les intermédiaires financiers peuvent s'analyser
selon :

LES BUTS DES LOIS ET REGLEMENTS

RENCONTRER DES OBJECTIFS ECONOMIQUES ET MONETAIRES;

EXEMPLES
9 renforcer ou restreindre la concurrence;
9 procurer des fonds à l'Etat;
9 stimuler des investissements;
9 brider l'inflation;
9 casser la surchauffe économique;
9 préserver les réserves de change;

VISER DES BUTS SOCIAUX ET CULTURELS;

EXEMPLES
9 promouvoir l'emploi;
9 favoriser les constructions scolaires ou hospitalières;
9 encourager la construction de logements sociaux;
9 combattre la pollution;
9 endiguer la criminalité;

ASSURER LA STABILITE DES INTERMEDIAIRES FINANCIERS;

EXEMPLES
9 imposer des conditions minimum d'accès à la profession;
9 instaurer des normes de structure;
9 veiller à l'adéquation du contrôle interne et externe;

PROTEGER LES PARTIES CONTRACTANTES AUX OPERATIONS FINANCIERES;

EXEMPLES
9 conférer la sécurité juridique aux transactions financières;
9 éviter que les forts n'abusent de leur puissance ou de leur savoir;

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 faciliter la défense des plus faibles.


9 respecter la vie privée;

LES POUVOIRS DONT EMANENT LES LOIS ET REGLEMENTS

On distingue plusieurs niveaux :

LE NIVEAU SUPRA-NATIONAL :

Il s’agit soit des organismes officiels : Union européenne (directives), soit des
institutions privées : Chambre de Commerce Internationale (règles et usances en
matière de crédits documentaires).

LE NIVEAU NATIONAL :

Il s’agit soit des pouvoirs traditionnels : législatif, exécutif et judiciaire, soit des
magistratures économiques ou autres autorités publiques qui en dérivent
(Commission Bancaire et Financière, B.N.B., ...); soit des organismes
professionnels (Association Belge des Banques, Association des Fonds Communs
de Placement); soit des organismes mixtes officiels mais cependant composés de
membres de la profession (Commission de la Bourse).

LES NIVEAUX REGIONAUX ET LOCAUX :

Législation par états aux U.S.A., par cantons en Suisse, par communautés ou par
régions en Belgique.

LE CHAMP D'APPLICATION DES LOIS ET REGLEMENTATIONS

DANS L'ESPACE

Ici aussi, on distingue les niveaux supra-nationaux, nationaux ou régionaux avec


tous les problèmes de conflits de compétence qui peuvent en résulter : quelle
réglementation s'applique au produit financier offert : celle du pays de
l'intermédiaire qui le commercialise ou celle du pays du client à qui il est proposé ?
quelle autorité régit la filiale ou la succursale locale d'une banque étrangère :
l'autorité locale ou celle du pays de la maison-mère ? la législation belge sur
l'escompte de facture est-elle opposable au débiteur cédé étranger ? quelles
contraintes s'appliqueront à la décision d'une région belge d'emprunter, localement
ou internationalement : les impératifs de l'état central, gardien de l'unité monétaire
ou les critères de la région, obligée de boucler son budget ?

- 227 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

DANS LE TEMPS

De nombreuses lois et réglementations sont conçues pour être appliquées pendant


une période sinon infinie, du moins fort longue et sans limitation de durée; d'autres
au contraire ne sont promulguées qu'à titre temporaire, pour assurer une transition
ou pour faire face à une situation momentanée.

QUANT A LA MATIERE SAISIE

Les dispositifs légaux et réglementaires peuvent porter sur :


9 l'opération ou l'instrument : par exemple contrats d'assurance, ventes à
tempérament, carnets de dépôt, crédit hypothécaire, lettre de change, chèque,
valeurs mobilières, etc.
9 les acteurs économiques : les banques, les compagnies d'assurance, les
holdings, les maisons de bourse, les actionnaires, les agents-délégués, etc.
9 le cadre institutionnel : organisation des bourses, du contrôle des changes,
etc.
9 les régimes globaux : protection de l'épargne, régime de la faillite, lois
coordonnées sur les sociétés commerciales, codes des impôts, ...
En fait les législations et règlements sont souvent hybrides, en ce qu'ils touchent à
plusieurs de ces niveaux à la fois, par exemple la législation sur le crédit à la
consommation, qui s'adresse tant aux opérations qu'aux opérateurs, ou la législation
sur les valeurs mobilières qui porte autant sur les titres que sur les intermédiaires
qui les négocient et les marchés où ils sont traités.

TYPES DE MESURES LEGALES ET REGLEMENTAIRES


CONCERNANT LES INTERMEDIAIRES FINANCIERS

MESURES ECONOMIQUES ET MONETAIRES

ACTION SUR LES AGREGATS MONETAIRES

9 encadrement du crédit (limitation quantitative des crédits que les


intermédiaires financiers peuvent dispenser, en fonction de leurs ressources
et de niveaux de référence antérieurs);
9 astreinte de remployer une partie des moyens d'action en actifs bien précis
(en fonds d'état par exemple);
9 stérilisation d'une partie des moyens d'action (par constitution obligatoire de
dépôts en comptes non rémunérés auprès de la banque centrale);

- 228 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 imposition de maxima ou minima aux intérêts débiteurs ou créditeurs


(pouvant aller jusqu'à l'obligation de prélever des intérêts négatifs (!) sur les
dépôts : ceci a été mis en vigueur en Suisse à un certain moment pour
protéger le pays contre un afflux excessif de capitaux étrangers, dont les
répercussions intérieures auraient été exagérément inflationnistes).

FISCALITE :

Pénaliser ou favoriser certaines opérations par le renforcement ou l'atténuation des


impôts et taxes y afférentes; (exonération des intérêts sur carnets de dépôt;
déductibilité d'intérêts hypothécaires, de primes d'assurances-vie ou de souscription
d'actions : sociétés novatrices, épargne-pension; création de "centres de
coordination" jouissant de régimes spéciaux quant aux intérêts payés aux
intermédiaires financiers; ...).

ACTION SUR LES CHANGES

Obligation de passer par tel ou tel marché selon le type d'opération; interdiction
pure et simple de faire certaines opérations; imposition de formalités préalables
avant d'autoriser certaines opérations; fixation de délais limites pour
l'accomplissement de certaines opérations.

SUBSIDIATION :

Promouvoir diverses opérations par l'attribution de subventions en capital ou en


intérêts (crédits d'investissements, ...).

ACTION SUR LA CONCURRENCE

• DANS LE SENS RESTRICTIF :


9 octroi de monopoles de droit (monopole des opérations de banque, de
bourse) ou de fait (prêts aux communes belges sur base d'un privilège
accordé au Crédit Communal sur les dotations financières de l'Etat aux
communes);
9 acceptation de concertations sur les prix ou uniformisation réglementaire des
prix (intérêts créditeurs, courtages boursiers);
9 mesures protectionnistes limitant ou excluant des opérateurs étrangers sur les
marchés nationaux;
9 imposition d'un numerus clausus de droit ou de fait (obligation de fournir la
justification économique pour l'ouverture de nouveaux établissements, voire
de nouvelles succursales ou agences, octroi ou refus arbitraire des autorités
d'accorder la licence d'opérer).

• DANS LE SENS EXTENSIF :

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 abolition de dispositions cartellaires (abrogation en 1986 par l'Association


Belge des Banques des conventions interbancaires sur la plupart de leurs
opérations rémunérées à la commission, à l'instigation de la C.E.E. par
application des articles 85 et suivants du Traité de Rome; abrogation en 1991
des conventions en matière de taux d'intérêts créditeurs);
9 abrogation aux U.S.A. de la Regulation Q (intérêts créditeurs) au début des
années 80 et du système des commissions barèmisées sur transactions
boursières en mai 1975;
9 décloisonnements progressifs des opérations réservées à tel ou tel type
d'opérateurs : possibilités pour les banques d'acquérir l'intégralité du capital
de sociétés de bourse en Grande-Bretagne depuis octobre 1986 (Big Bang) et
en Belgique depuis 1991;
9 couverture des marchés nationaux européens aux opérateurs des autres pays
de l'Union : liberté de circulation des capitaux, droit d'établissement de
succursales et filiales dans les autres pays membres, reconnaissance mutuelle
des produits financiers.

• DANS LE SENS DE L'EGALISATION :


9 harmonisation des dispositions sur les coefficients de fonds propres;
9 cadre commun aux opérations de crédit à la consommation;
9 normes unifiées pour les prospectus d'émission.

MESURES DE PROTECTION DES DEPOSANTS

Divers dispositifs, qui peuvent être coordonnés à l'échelon supra-national


(directives européennes, recommandations de Bâle) existent à travers le monde.
Très souvent, il y aura des lois ou arrêtés-cadres, comme par exemple en Belgique
l'arrêté n° 185 de juillet 1935 déjà mentionné, amendé à diverses reprises et
aujourd'hui supplanté par la loi du 22 mars 1993 transposant en droit belge les
directives bancaires européennes. De telles législations édictent les mesures à
observer par les établissements de crédit et prévoient quels organismes seront
chargés de leur contrôle "prudentiel". En Belgique, ce sera un organisme ad hoc :
la Commission Bancaire et Financière, mais ce rôle est souvent joué par les
banques centrales à l'étranger.

MESURES PREVENTIVES

Les mesures préventives sur lesquelles de telles lois portent comprennent


généralement les suivantes :
9 agrément par les autorités pour l'accès à la profession, honorabilité et
capacité des groupes propriétaires (communication des gros actionnaires
possédant plus de 5 % du capital en Belgique) et des gestionnaires effectifs;

- 230 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 disposition d'un capital minimum (5 millions d'Ecus pour les établissements


de crédit en Union Européenne), destiné à assurer une certaine capacité de
résistance aux accidents ;
9 maintien de certains ratios de structure comme par exemple des maxima
tolérables pour les engagements envers les tiers par rapport aux fonds
propres (ratio de solvabilité ) ; des maxima autorisés pour tel ou tel type
d'actifs (ou de risques) par rapport au total des actifs (maxima permis
d'investissement en actions étrangères, en actions locales, en obligations
étrangères, en obligations industrielles locales dans le portefeuille de
compagnies d'assurance) ou par rapport au total des fonds propres ;
9 régime d'incompatibilités soit dans les opérations des intermédiaires
financiers (scission de la banque mixte), soit dans les fonctions occupées par
leurs dirigeants (protocole sur l'autonomie bancaire), destiné à éviter des
conflits d'intérêt, partant à promouvoir l'indépendance de jugement des
intermédiaires financiers dans leurs activités (cf supra p. 103);
9 publicité quant à la situation des intermédiaires financiers : en Belgique, pour
les banques, un schéma particulier a été rendu obligatoire en 1935 - bien
antérieur à ce que la loi comptable de 1975 a introduit pour les entreprises en
général - imposant la présentation détaillée de leurs comptes annuels et revu,
à la suite d'une directive de l'Union Européenne, par un arrêté royal du 11
février 1992;
9 obligation faite d'avoir un contrôle interne adéquat;
9 organisation du contrôle externe : en Belgique, ce contrôle a été
considérablement renforcé. Depuis 1935, les banques avaient des obligations
de reporting approfondi envers des commissaires-réviseurs indépendants
choisis en assemblée générale sur une liste agréée par la Commission
Bancaire et Financière; les commissaires-réviseurs contrôlaient les
informations reçues et faisaient d'une part rapport aux actionnaires en tant
que commissaires aux comptes, et d'autre part étaient soumis à l'encadrement
de tutelle de la Commission Bancaire et Financière. Dans les années 70, la
fonction révisorale a été scindée en deux : commissaires-réviseurs nommés
par l'assemblée générale, réviseurs agréés désignés par la Commission
Bancaire et Financière et soumis à ses directives; en outre, la Commission
Bancaire et Financière s'est vu donner un corps d'inspecteurs propres qu'elle
peut envoyer en mission dans les établissements qu'elle contrôle.
Aujourd'hui on en est revenu au système d'une seule catégorie de reviseurs,
mais en augmentant le degré d'intervention des inspecteurs propres de
l'autorité de contrôle;
9 obligation pour les groupes bancaires multinationaux d'avoir une société
faîtière localisée effectivement dans le pays de son enregistrement, dont les
autorités auront la responsabilité du contrôle sur base consolidée. Les
autorités prudentielles de différents pays coopèrent d'ailleurs entre elles par
l'échange de renseignements et d'expériences;
9 sanctions civiles, pénales et administratives en cas de manquements.

- 231 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

MESURES CURATIVES

Malgré l'ensemble de ces mesures préventives, il se peut qu'un établissement


financier connaisse des difficultés susceptibles de se transformer en problèmes de
solvabilité. Dans ce cas, les autorités et la profession pourront intervenir pour en
prévenir ou en pallier les conséquences pouvant rejaillir sur la confiance dont la
communauté a besoin pour son bon fonctionnement. Les systèmes d'aide
préventive aux institutions financières en difficulté de liquidité sont légion dans le
monde. Il n'en va de même qu'à des degrés divers pour les systèmes curatifs -
mutuelles, assurances collectives, pools de sécurité, ... - destinés à protéger, du
moins partiellement et pour les cas les plus méritants, les co-contractants
(déposants, obligataires, créanciers, débiteurs, assurés) des institutions financières
obligées de suspendre leurs activités.
Ainsi donc, aux U.S.A., les banques et les Savings and Loan Associations sont
depuis les années 30 affiliées à un système officiel d'assurance (Federal Deposit
Insurance Company et Office of Thrift Supervision qui a repris la suite de la
défunte Federal Savings and Loan Insurance Company), obligatoire pour la plupart
d'entre elles et destiné à indemniser dans une certaine limite les déposants victimes
d'un accident de solvabilité éventuel.
En Europe, les systèmes d'indemnisation de victimes de l'insolvabilité
d'intermédiaires financiers sont pour la plupart de création récente et parfois
tâtonnent encore; ils y ont parfois un caractère volontariste marqué, organisés par
la profession (en Allemagne) ou résolument contraignant, imposé par l’autorité
(système des Pays-Bas). Certains pays n'en ont tout simplement pas du tout.
La Belgique a depuis 1975 un système de protection des déposants résultant
d'arrangements contractuels conclus entre les banques, les caisses d'épargne et
l'I.R.G., sous les auspices des pouvoirs publics. Ce système a subi à la lumière de
l'expérience des modifications au début de 1985 dans le sens d'un caractère plus
contraignant, et vient de connaître une mutation plus profonde au vu de la
Directive européenne du 30 mai 1994 qui impose un dispositif commun minimum
à chaque Etat membre. Aussi, en Belgique, un nouveau protocole est entré en
vigueur le 1er janvier 1995. L'I.R.G. reste le gardien du système où néanmoins la
profession bancaire possède, à côté des représentants de l'autorité, un droit de co-
gestion sur le Fonds d'Intervention, alimenté à hauteur de 2 ‰ annuels sur les
dépôts couverts. Les indemnisations sont restreintes aux dépôts en Euro’s des
particuliers et PME, avec un plafond de 20.000€ en l'an 2000 pour respecter le
minimum européen.
En fait, les problèmes de base de tels organismes d'intervention curative sont les
suivants :
9 quand intervient-on : à titre préventif, ou seulement à titre curatif, lorsque la
faillite ou le concordat a été prononcé ?
9 comment composer l'organe de décision quant aux éventuelles
interventions ? par des représentants des autorités, des membres de la
profession, des indépendants ?

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 qui indemnise-t-on : les particuliers, les commerçants, les sociétés, les


professionnels de la finance ? (ces derniers sont généralement exclus);
9 quelles dettes indemnise-t-on ? les dépôts en devises aussi bien qu'en
monnaies locales ? les bons de caisses au porteur aussi bien que les dépôts
nominatifs ?
9 combien indemniser : à concurrence d'un plafond ? avec une participation
partielle de la victime à la perte ?
9 comment financer les interventions : par des primes, des cotisations
obligatoires ou des droits de tirage sur les participants ? sur quelles bases :
tout ou partie des dépôts existant à des moments déterminés, les opérations
traitées ou les rémunérations perçues sur une certaine période ?
9 quelles limites fixer aux interventions ? Peut-on exiger des contributions
extraordinaires des participants à l'occasion de sinistres dépassant les
ressources du système ?
Quoi qu'il en soit, si ces différents systèmes - fort utiles - paraissent adéquats pour
faire face à des cas limités de moyenne ampleur, ils ne peuvent répondre à des
défaillances majeures. La probabilité d'une telle éventualité s'est posée avec acuité
depuis 1982 dans un contexte de crises locales ou internationales où certains
secteurs économiques (exploration pétrolière, promotion immobilière), de grands
débiteurs privés (industriels et financiers) et publics (divers états d'Amérique Latine
et de l'Est Européen) se sont avérés vulnérables. Comme la communauté
financière internationale est étroitement imbriquée par des liens tissés au travers
des marchés des changes et des prêts et avances interbancaires - et ce pour une
proportion croissante de leurs bilans respectifs - une difficulté ponctuelle mais
d'importance pourrait se propager, en chaîne, au travers du réseau mondial par ce
qui est convenu d'appeler l'"effet domino". En dehors de la défaillance des
débiteurs, d'autres causes peuvent affecter la solvabilité des intermédiaires
financiers comme les pertes sur positions propres ou les déséquilibres structurels -
comme ce fut le cas pour les Savings and Loan Associations aux U.S.A. depuis la
fin des années 70.
Les prises de conscience de ces phénomènes incitent d'une part les autorités
monétaires nationales et internationales à se pencher sur divers palliatifs en liquidité
voire parfois des interventions propres en solvabilité. C'est dans ce contexte
qu'une très grande banque américaine, tombée en difficulté en 1984 après avoir
accordé des crédits malheureux, a sous l'aiguillon décidé et rapide des autorités reçu
une aide massive tant du secteur financier public que privé, en attendant de se
réorganiser. Ce cas soulève des questions profondes de nature politique,
notamment en matière de propriété et de gestion des organismes financiers; ces
questions sont très difficiles à résoudre en raison de leur diversité, de leur
complexité et de leur caractère idéologique (limite du rôle de l'Etat dans une
économie de marché, distorsion de concurrence, ...).
Dans ce contexte, les établissements financiers les plus sérieux ont-ils réexaminé
eux-mêmes depuis la fin des années 80 leurs portefeuilles, réduit ou tenté de réduire
leur exposition en même temps qu'ils ont augmenté sensiblement leurs provisions
pour les risques qui se sont avérés excessifs, et renforcé leurs fonds propres.

- 233 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Mais d'autres, comme de nombreuses Savings & Loan Associations aux U.S.A. -
dont les fonds propres avaient été fortement entamés mais qui avaient continué à
travailler avec des dépôts chèrement rémunérés - ont préféré miser sur un
rétablissement par la prise de nouveaux risques parfois inconsidérés (achat de junk
bonds, crédits à l'immobilier, ...).
En effet, les directions de ces institutions qui n’avaient souvent “plus rien à perdre”
ont pris ces risques d’autant plus facilement qu’en cas de mise en faillite effective,
leurs déposants seraient indemnisés par le système. Cette attitude constitue ce qu’il
est convenu d’appeler un “moral hazard”.
La débâcle des Savings & Loans qui s'ensuivit, l'incapacité du système curatif d'y
faire face (le coût de quelque 500 milliards de dollars a été pris en charge par le
contribuable américain) et la crainte de l'extension de ce phénomène au secteur
bancaire des U.S.A. y ont fait naître une controverse sur l'adéquation de systèmes
curatifs qui font supporter par l'Etat (le contribuable) la charge ultime de
l'indemnisation des déposants. Ceux-ci se sentent en effet en sécurité en confiant
leurs fonds à l'établissement qui leur en offre la rémunération la plus élevée, sans
avoir égard à la qualité de sa gestion : ce sentiment de sécurité a été d'autant plus
grand que les organismes d'indemnisation ont fait tant et plus pour sauver les
établissements défaillants, et pour indemniser les déposants même au delà des
plafonds officiels, de crainte de difficultés plus grandes encore et de réactions
socio-politiques... qui sont tout de même venues.
Aussi une moindre complaisance dans le sauvetage des établissements défaillants
(et l'exclusion de l'indemnisation de dépôts jugés sur-rémunérés) est-elle à l'ordre
du jour. Mais cela ne résout pas le problème d'une discrimination latente qu'une
telle attitude porte en germe en faveur des établissements les plus importants : les
autorités pourront-elles jamais permettre aux grands établissements de tomber en
faillite ?
Outre les systèmes collectifs d'indemnisation, on notera aussi les privilèges spéciaux
organisés au profit de déposants dans divers pays; en Belgique : privilèges sur
certains remplois pour les déposants de caisses hypothécaires;
On observera que, en miroir aux mesures de protection des déposants des
établissements de crédit, des mesures analogues existent visant mutatis mutandis à
protéger les créanciers d'autres établissements d'épargne (fonds de pension,
compagnies d'assurance, fonds communs de placement), ou d'autres agents
susceptibles d'avoir professionnellement la charge temporaire de patrimoines
d'autrui (sociétés de bourse72, gérants de fortune).

72 La Belgique dispose ainsi d'une Caisse de Garantie, à régime obligatoire, pour indemniser
les clients de sociétés de bourse défaillantes, instaurée en 1987.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

MESURES DE PROTECTION DES INVESTISSEURS EN VALEURS


MOBILIERES

Des mesures de nature et d'intensité variable de pays en pays ont été édictées pour
protéger les investisseurs en valeurs mobilières contre les abus éventuels des
émetteurs de titres, de certains vendeurs ou acquéreurs, des opérateurs
professionnels et des intermédiaires. En Belgique, c'est la loi du 4 décembre 1990
qui a complètement remodelé le dispositif, en y intégrant diverses dispositions
antérieures en la matière. En mai 1993, une directive européenne - Investment
Services Directive (“ISD”) - est venue encadrer les services financiers prestés dans
la communauté, qui a entraîné une adaptation de la loi belge en avril 1995.
La supervision de l'activité en valeurs mobilières a été confiée à des organismes
spécifiques dont par exemple la Securities and Exchange Commission (SEC) aux
Etats-Unis; le Take-Over Panel et le Securities & Investment Board (SIB) qui
supervise les Self Regulatory Organizations (SRO) en Grande-Bretagne; la
Commission des Opérations de Bourse (COB) en France; la Commission Bancaire
et Financière, la Commission de la Bourse en Belgique. Une organisation
internationale réunit les instances de supervision : IOSCO.
Les mesures protectrices des investisseurs visent en ordre principal les
préoccupations suivantes :
9 fourniture aux souscripteurs de titres financiers d'une information claire,
complète et impartiale sur les émetteurs; ces informations ne portent pas
seulement sur la situation de la société elle-même mais aussi sur la position
personnelle de certains actionnaires et dirigeants (hauteur de leur
participation, montant de leurs émoluments, opérations dans lesquelles ils
peuvent avoir des intérêts opposés);
9 fourniture périodique (annuelle, semestrielle, trimestrielle selon les cas) aux
porteurs de titres financiers d'informations actualisées, avec vigilance
particulière à l'égard des sociétés émettrices de titres cotés;
9 signalement ponctuel (et prompt) des événements qui peuvent avoir un
impact “sensible” sur l’appréciation du titre par les investisseurs;
9 interdiction aux détenteurs d'informations privilégiées ("insider information")
sur les émetteurs d'opérer ("insider trading") sur les titres desdits émetteurs,
ou encore de véhiculer ces informations à des tiers;
9 réglementation des méthodes de sollicitation de l'épargne en vue d'un
investissement en valeurs mobilières :
ƒ interdiction ou réglementation du démarchage à domicile, par
correspondance ou par publicité;
ƒ limitation de ce qui est toléré comme émissions privées (en Belgique,
pour être considérée comme émission privée, il ne peut être fait appel à
plus de 50 personnes; l'usage de moyens publicitaires est en outre
interdit, de même que le recours à des intermédiaires non habilités);
ƒ obligation de publications (dans les journaux officiels, dans la presse
privée, dans des prospectus spéciaux);

- 235 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 encadrement des professions traitant les valeurs mobilières pour autrui


(agents habilités à recevoir les ordres de bourse, opérateurs sur les marchés,
gérants de patrimoine) sur base de différents principes :
ƒ agrément des opérateurs (examen)
ƒ agrément des administrateurs (caractère "fit and proper")
ƒ capital minimum et coefficients de fonds propres
ƒ isolation comptable et organisationnelle des opérations de négoce des
valeurs mobilières
ƒ obligation de la meilleure exécution
ƒ publicité (prompte) des cours et des volumes de transactions
ƒ centralisation des ordres dans le cadre de marchés organisés
ƒ limitation éventuelle des opérations de contrepartie
ƒ supervision par des autorités de contrôle
ƒ protection curative par des mécanismes d'indemnisation73 ;
9 traitement égal des actionnaires; en particulier protection des actionnaires
minoritaires, notamment en cas d’augmentation de capital (droit de
préférence aux actionnaires en place) ou en cas de changement de contrôle
(obligation de procéder à des OPA lors d’une acquisition dépassant un seuil
donné dans la détention du capital);
9 imposition de procédures à observer en cas de mise en liquidation, de
concordat ou de faillite des sociétés émettrices; à noter que la protection des
investisseurs et d'ailleurs de certains créanciers pourrait être mise en danger
par certains projets périodiquement envisagés (projet de loi sur la gestion
assistée d'entreprises en difficulté, conçu dans l'optique de la poursuite de
leurs activités plutôt que dans le respect des droits de leurs actionnaires et
créanciers, projet de révision de la loi sur la faillite);
9 responsabilisation des organes de gestion vis-à-vis des actionnaires (plus
encore aux U.S.A. qu'en Europe);
9 sanctions civiles, pénales et administratives pour les contrevenants.

MESURES DE PROTECTION DES DEBITEURS

Outre des mesures générales qui visent à protéger les débiteurs vis à vis de leurs
créanciers, on a vu que de nombreuses mesures particulières imposent des normes
minimales dans l'Union Européenne pour tenter de protéger les personnes
physiques agissant pour leurs besoins privés, plus spécialement en matière de crédit
hypothécaire et de crédit à la consommation.
Ces mesures générales et particulières concernent notamment :

73 Voir note page 197

- 236 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

9 la limitation des intérêts débiteurs : aux interdictions très anciennes de l'usure


(taux abusifs) et de l'anatocisme (composition des intérêts), sont venues
s'ajouter, selon le type d'opération, des limitations de taux et de leur
variabilité, ainsi que des obligations dans les méthodes de calcul;
9 la limitation de frais que l'on peut imposer au débiteur, en dehors des marges
d'intérêt;
9 l'interdiction de contrats liés;
9 l'accès à la profession (agrément ou inscription des prêteurs et autres
intermédiaires de crédit, imposition d'un capital minimum);
9 la bonne information du débiteur : normes à respecter dans la promotion
publicitaire (affichage des prix, des taux) et dans les procédures contractuelles
(mentions obligatoires, délais de réflexion);
9 la consultation obligatoire des centrales de renseignements, mais aussi la
limitation de l'accès à celles-ci et des données qu'elles sont autorisées à
enregistrer, à maintenir ou à communiquer (centrales officielles de risques,
fichiers privés);
9 l'interdiction de recourir à certains moyens coercitifs : interdiction de l'usage
de la traite et du billet à ordre, de certaines saisies sur salaires, ...;
9 la responsabilisation et le contrôle des prêteurs, la poursuite et le
sanctionnement rigoureux des infractions .

DEONTOLOGIE

La loi et la réglementation ne peuvent saisir tous les cas de figure envisageables.


Aussi chaque profession secrète elle-même ses usages, ses normes de
comportement qui sont fondés sur un consensus plus ou moins explicite et elle
s'attend à ce que ses membres s'y conforment.
Ces normes déontologiques viennent donc compléter les dispositions légales et
réglementaires, sans en avoir le caractère officiel.
Récemment, les lois prévoient et les autorités recommandent que de telles normes
soient codifiées pour les rendre plus transparentes, et qu'elles servent de guide dans
l'appréciation du comportement des professionnels d'une branche donnée de
l'intermédiation financière en cas de mise en question. Aussi des études sont-elles
en cours au niveau des groupements professionnels et des entreprises elles-mêmes
pour tenter de décanter cette matière souvent subtile qui ne se laisse pas toujours
enfermer dans des formules précises.

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INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

CONCLUSION GENERALE

- 238 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

En guise de conclusion générale, il convient de tirer certaines synthèses des exposés


faits tout au long du cours.
Tout d'abord, on rappellera que les intermédiaires financiers sont des agents de
transfert de ressources financières depuis les détenteurs de fonds en excès vers les
utilisateurs potentiels des mêmes fonds :
9 lorsqu'il s'interpose entre eux à titre durable, l'intermédiaire financier court le
risque d'illiquidité et d'insolvabilité de l'utilisateur des fonds;
9 lorsqu'il s'interpose entre eux de manière non-durable, l'intermédiaire, ayant
conclu avec l'un, risque de ne pas pouvoir conclure ou consommer la
conclusion avec l'autre - l'intermédiaire sera "collé" jusqu'au dénouement
effectif de l'opération, ce qui peut résulter en une moins-value si ce
dénouement ne peut se faire dans les conditions initialement espérées par
l'intermédiaire.
En outre, les intermédiaires financiers sont des transformateurs :
9 de volumes
9 d'échéances
9 de taux
9 de devises.
Les intermédiaires financiers sont également des prestataires de services : alors
que ces services ont été longtemps peu sensibles aux progrès technologiques,
l'informatique, la bureautique et la télématique sont en train de transformer la
nature des services offerts, les conditions de travail et jusqu'à l'image des
intermédiaires financiers, en même temps que se modifie la nature de leurs relations
internes et externes.
Ces transferts, transformations et services - qui sont soutenus par l'accumulation
des connaissances et expertises y associées et continuent à faire l'objet
d'innovations créatives - sont générateurs d'une part d'efficience économique et
d'autre part de risques. Ces risques se manifestent sur le plan de la rentabilité, de
la liquidité et de la solvabilité individuelles des intermédiaires financiers mais
aussi sur le plan systémique, tant il est vrai que ces intermédiaires sont devenus
tributaires les uns des autres, et dépendants des technologies sur lesquelles ils
fondent leur exploitation.
Les risques entraînent diverses contraintes de gestion interne qui sont
complétées par d'autres contraintes imposées de l'extérieur par les autorités eu
égard à leur rôle de gardien de l'intérêt général : protection des parties en cause et
exercice d'une influence sur la situation économique et sociale des communautés
dans lesquelles ces parties se meuvent.
A partir des années 30, les intermédiaires financiers ont été soumis à un
interventionnisme croissant des pouvoirs publics, qui s'est manifesté à la fois sur
le plan économique et monétaire et sur le plan prudentiel. A cet égard, les
règlements et les contrôles préventifs de même que les systèmes curatifs
d'indemnisation se sont multipliés. Une question délicate se pose en permanence :

- 239 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

déterminer jusqu'à quel point le renforcement des règlements et des contrôles


justifie les coûts croissants ainsi que les distorsions de marché et la perte
d'efficience qui en sont la rançon : la limite n'a pu en être tracée avec certitude.
Aussi, la plupart des pays - anglo-saxons d'abord - sont-ils entrés depuis les années
70 dans une certaine désescalade en la matière ("dérégulation") avec aujourd'hui
une tendance à la "re-régulation" partielle pour corriger principalement sur le plan
prudentiel ce que la dérégulation semble avoir eu d'excessif et en raison de
tendances consuméristes plus affirmées :
9 pour ce qui concerne les mesures préventives, les dispositifs de coefficients
de fonds propres ont été codifiés, favorisant les mécanismes de
marchéisation et de titrisation. La fonction d’intermédiaire stricto sensu
se déplace donc en partie vers l’intermédiation lato sensu, renforçant les
devoirs et risques fiduciaires des intermédiaires envers leurs contreparties, par
rapport aux devoirs traditionnels de restitution aux déposants classiques des
fonds empruntés pour compte propre.
9 quant aux mécanismes de sauvegarde curative, leur inadéquation en cas de
crise importante a déjà montré qu'elle peut entraîner l'intervention publique
directe pour éviter des conséquences économiques et sociales insupportables
de défaillances majeures sur le plan national ou même international, au risque
même de fausser la concurrence.
Au cours des récentes décennies, les intermédiaires financiers se sont fortement
diversifiés, tant dans leurs activités que dans leurs localisations. La tendance à la
"déspécialisation" a été fort marquée depuis les années 60 en même temps que
proliféraient agences, succursales et filiales, aussi bien sur le plan international que
national.
La concurrence, internationalisée et intersectorialisée, s'est exacerbée, entraînant
concentrations et luttes d'influence non seulement entre groupes, mais aussi entre
places financières et états, conscients de l'importance économique croissante du
secteur tertiaire dans le produit national, l'emploi et les recettes "invisibles" de la
balance des paiements. C'est ainsi que le GATT74 a consacré dans la résolution de
l'Uruguay Round à fin 1993, un chapitre spécial à la libéralisation des services
financiers au niveau mondial.
Dans ce contexte, les intérêts des grands blocs - U.S.A., Japon, Europe - se sont
affrontés. La position de cette dernière, fondée sur le principe de la libre
concurrence du Traité de Rome, s'affermit par la cohérence croissante de sa
politique communautaire s’appuyant sur quatre piliers : la liberté de mouvement
des capitaux, le libre établissement de succursales et filiales d'un intermédiaire
financier dans n'importe lequel de ses états membres, la surveillance prudentielle au
niveau de l'état membre de la maison-mère (et non des pays d'accueil des filiales ou
des succursales) et la reconnaissance mutuelle par tous les états membres d'un

74 General Agreement on Tariffs and Trade, prédécesseur de l’OMC (Organisation Mondiale du


Commerce)

- 240 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

grand nombre d'opérations et produits financiers conformes aux règles en vigueur


dans l'un d'entre eux.
Pour éviter néanmoins que les pays aux réglementations industrielles et fiscales
les plus laxistes ou les plus protectionnistes ne jouissent d'une situation
concurrentielle inéquitable, on conçoit que les autorités et les intermédiaires des
états les plus rigoureux aient souhaité qu'un minimum d'harmonisation des
règlements - à instaurer progressivement malgré les intérêts particuliers qu'elle
dérange - soit réalisée parallèlement à l'avènement de la globalisation des marchés
financiers.
Sous l'effet de ces facteurs conjugués, la modification du paysage de
l'intermédiation financière dans le monde s'accélère : il y a une redistribution des
cartes par regroupements et disparitions de nombreux intermédiaires indépendants
et par déplacements des marchés dominants. Survivront sans doute les très
grandes institutions disposant de vastes réseaux, les établissements régionaux bien
implantés avec une part suffisante de leurs marchés locaux et les maisons
spécialisées dans les créneaux où leurs qualités particulières trouveront à s'exploiter.
La principale composante de la survie et du succès sera cependant la capacité de
chaque institution à se structurer de façon à garder des coûts compétitifs, et à
offrir des services de qualité à ses clients. Ceci exigera une capacité à mettre en
cause les habitudes et les idées reçues, à pratiquer et contrôler la sous-traitance, et,
peut-être surtout à motiver et contrôler les ressources humaines.
En définitive, la profession d'intermédiaire financier est complexe et
multiforme : elle requiert des connaissances étendues et approfondies dans de
nombreuses disciplines générales - économie, droit, fiscalité, comptabilité,
informatique. Elle postule en même temps la maîtrise des caractéristiques propres
des techniques en application dans le champ d'activité de l'institution particulière
où elle s'exerce.
Etant donné l'évolution importante et permanente du contexte ambiant,
l'intermédiaire financier doit avoir de bonnes capacités d'adaptation. Mais par-
dessus tout, étant interposé dans les circuits qui répartissent les moyens d'action des
ménages, des entreprises et des pouvoirs publics, il détient souvent lui-même un
élément de puissance économique et peut se trouver au centre de conflits
d'intérêts. Cela requiert de sa part, au-delà du simple respect des
réglementations, un sens élevé de l'éthique.

- 241 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

TABLE DES MATIERES


CHAPITRE 1.......................................................................................................1
INTRODUCTION GENERALE .......................................................................1
DEFINITION ........................................................................................................1
MENAGES ...........................................................................................................2
ENTREPRISES......................................................................................................3
ETAT ..................................................................................................................3
LES INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ......................................................................4
Naissance : besoin ou nécessité ? .................................................................4
Efficience opérationnelle et efficience allocative, réduction des problèmes
d’asymétrie informationnelle ........................................................................4
Un rôle essentiel dans le traitement des déséquilibres financiers ................5
DES FLUX MONETAIRES ......................................................................................6
Trois rôles de la monnaie..............................................................................6
La monnaie facilite et sécurise l’épargne .....................................................6
Les monnaies dominantes – les monnaies parallèles....................................7
le seigneuriage ..............................................................................................7
MONNAIE, INTERMEDIATION FINANCIERE ET INTERVENTION DES POUVOIRS
PUBLICS ..............................................................................................................8
LES TAUX D’INTERET ..........................................................................................9
Les composantes du taux d’intérêt..............................................................10
LA COURBE DES TAUX D’INTERETS ...................................................................11
3 FORMES D’INTERMEDIAIRES FINANCIERS ET LES REGULATEURS DE LA
PUISSANCE PUBLIQUE .......................................................................................11
Les intermédiaires financiers stricto sensu.................................................11
Les intermédiaires financiers lato sensu.....................................................11
Les intermédiaires financiers "autres" .......................................................12
les régulateurs monétaires ou économiques ...............................................12
les régulateurs prudentiels..........................................................................12
LES MARCHES FINANCIERS ...............................................................................13
CHAPITRE 2.....................................................................................................14
MARCHES FINANCIERS ..............................................................................14
OBLIGATIONS ...................................................................................................14
Définition et introduction............................................................................14
Identité, Qualité et Solvabilité de l’émetteur ..............................................15
Identité ....................................................................................................15
• les pouvoirs publics.....................................................................15
• les entreprises : obligations corporate .........................................15
• les emprunteurs de pays émergents.............................................15
Qualité et solvabilité ...............................................................................15
Valeur nominale, taux d’intérêt de l’obligation et coûts ............................16
intérêts fixes ............................................................................................16

- 242 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Intérêts « charnière » :.............................................................................16


taux variables et soumis à révision : .......................................................16
Coût pour l’émetteur ...............................................................................16
• charges financières ......................................................................16
• commissions................................................................................16
• frais accessoires...........................................................................17
le mode d’amortissement ............................................................................17
les obligations avec remboursement intégral à l’échéance (« balloon
repayment ») ...........................................................................................17
les obligations à coupon nul ou « zero bond » ........................................17
les obligations à remboursement anticipé ...............................................17
les obligations à remboursement intermédiaire.......................................18
• remboursement par tirage............................................................18
• rachat ...........................................................................................18
• Les obligations avec option put ..................................................18
Le choix de la devise ...................................................................................18
Les marchés des obligations .......................................................................18
Rendement ...................................................................................................19
taux de rendement courant ......................................................................19
taux de rendement actuariel ....................................................................19
Formes particulières d’obligations.............................................................20
Obligations avec participation au bénéfice .............................................20
Obligation indexée ..................................................................................20
Obligation zero coupon ...........................................................................20
Obligation convertible.............................................................................20
« Obligation convertible inverse » ..........................................................20
Obligation avec warrant ..........................................................................21
Obligation à double devise ou « dual currency »....................................21
Obligation gouvernementale ...................................................................21
Obligation linéaire (OLO).......................................................................21
Fiscalité.......................................................................................................22
ACTIONS ..........................................................................................................23
Définition et introduction............................................................................23
Emission d’actions ......................................................................................23
Dividende ....................................................................................................24
Evaluation des actions ................................................................................24
La valeur comptable et la valeur intrinsèque .............................................25
Ratios financiers .........................................................................................25
PRODUITS DERIVES...........................................................................................25
Les warrants................................................................................................25
Définition et introduction........................................................................25
Prix des warrants .....................................................................................26
• Valeur intrinsèque .......................................................................26
• Valeur d’attente (time value) ......................................................26
Utilité des warrants .................................................................................27
• Instrument de couverture.............................................................27

- 243 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

• Effet de levier important .............................................................27


• Instrument de diversification du portefeuille ..............................27
Différences entre warrants et options......................................................27
Les options ..................................................................................................28
Les « futures » .............................................................................................28
Définition et introduction........................................................................28
Fonctionnement.......................................................................................28
Différence essentielle entre futures et options ........................................28
utilite .......................................................................................................29
CHAPITRE 3.....................................................................................................30
QUELQUES PRINCIPES GENERAUX ET PARAMETRES
CARACTERISANT LES OPERATIONS DES INTERMEDIAIRES
FINANCIERS....................................................................................................30
EMPLOIS DE FONDS, CREDITS ET OPERATIONS "ACTIVES" EN TOUT GENRE .......30
L'utilisateur du financement........................................................................30
Critères individuels .................................................................................30
• Identité ........................................................................................30
• Etat-civil......................................................................................30
• Age ..............................................................................................30
• Nationalité ...................................................................................31
• Domicile / Résidence ..................................................................31
• Profession / Objet social .............................................................31
• Capacité juridique .......................................................................31
• Pouvoirs de représentation ..........................................................31
Risque du financement............................................................................31
• Entreprises...................................................................................31
• Pouvoirs publics ..........................................................................31
• Particuliers ..................................................................................32
• garanties ......................................................................................32
L’objectif du financement............................................................................32
Le temps dans le financement .....................................................................33
Objet et sujet ...........................................................................................33
Sortie de l’opération................................................................................33
Echéance .................................................................................................33
• Aléatoire......................................................................................33
• Déterminée ..................................................................................33
• Clauses de remboursement anticipé ............................................34
Nature et forme du titre financier ...............................................................34
Rémunération ou prix du financement ........................................................34
Rémunération calculée en fonction du temps d’utilisation des fonds :les
intérêts .....................................................................................................35
• Taux fixes....................................................................................35
• Taux variables .............................................................................36
• Rémunérations aléatoires et Formules mixtes.............................36

- 244 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Rémunération calculée indépendamment du temps d’utilisation des


fonds : les commissions ..........................................................................36
Indemnisation des débours à encourir.....................................................37
Facteurs de distorsion sur le coût réel .....................................................37
Fiscalité.......................................................................................................38
RECOLTE DE FONDS, DEPOTS, OPERATIONS « PASSIVES » EN TOUT GENRE ......39
Les dépôts bon marché................................................................................39
Caractéristiques du déposant.....................................................................40
Objectifs du déposant..................................................................................41
Facteur temps..............................................................................................42
Nature et forme des titres financiers émis par les intermédiaires financiers
.....................................................................................................................42
Rémunération ..............................................................................................42
Fiscalité.......................................................................................................43
Risque..........................................................................................................44
Conditions annexes .....................................................................................44
LES OPERATIONS ACTIVES DES INTERMEDIAIRES FINANCIERS46
CHAPITRE 4.....................................................................................................47
LES OPERATIONS DE CREDIT...................................................................47
INTRODUCTION.................................................................................................47
TYPES DE CREDIT SELON LEUR FORME..............................................................47
Crédits par décaissement ............................................................................48
Avance (ou credit) de caisse ("overdraft facility") .................................48
• Volume :......................................................................................48
• Durée :.........................................................................................48
• Rémunération : ............................................................................49
• Rôle du crédit de caisse :.............................................................50
• Caractéristiques pour l'utilisateur :..............................................50
• Caractéristiques pour le banquier :..............................................51
Avances à terme fixe ("straight loans") ..................................................51
• Définition : ..................................................................................51
• Volume :......................................................................................51
• Durée :.........................................................................................51
• Coût :...........................................................................................51
• Usage :.........................................................................................52
L'escompte ..............................................................................................52
• Remarque liminaire : les effets de commerce .............................52
• Notion d'escompte.......................................................................53
• Le billet à ordre ou promesse ......................................................54
• La traite commerciale ou lettre de change ..................................55
• Le warrant-cédule........................................................................61
• La facture ....................................................................................62
Crédits par signature ..................................................................................64
crédits par garantie ..................................................................................64

- 245 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

• Définition : ..................................................................................64
• But :.............................................................................................64
• Montant : .....................................................................................64
• Durée :.........................................................................................64
• Coût :...........................................................................................65
• Quelques types de garanties bancaires :......................................65
Crédits documentaires.............................................................................67
• Définition : ..................................................................................67
• Protagonistes : .............................................................................67
• But :.............................................................................................67
• Idée de base :...............................................................................67
• Technique :..................................................................................68
• Types de crédits documentaires (qui peuvent être combinés entre
eux) : ...................................................................................................68
• Durée ...........................................................................................69
• Coût :...........................................................................................70
• Règlement de litiges....................................................................70
Crédits d'acceptation ..................................................................................70
Définition : ..............................................................................................70
GARANTIES DONT SONT ASSORTIES LES OPERATIONS DE CREDIT ......................71
Les engagements ou promesses de gage .....................................................72
Engagement de garantie pris en faveur du créancier : ............................72
Engagement de ne pas aliéner ni hypothéquer (davantage) un bien en
faveur de tiers :........................................................................................72
Les garanties réelles ...................................................................................73
Garanties immobilières ...........................................................................73
Gage sur marchandises............................................................................73
Gage sur fonds de commerce ..................................................................74
Clause de réserve de propriété ................................................................74
Gage sur titres .........................................................................................75
Gage sur créances....................................................................................75
Délégation du bénéfice de polices d'assurance .......................................75
Autres garanties ..........................................................................................76
Caution ....................................................................................................76
Lettre de soutien......................................................................................76
Engagement de faire, de ne pas faire ......................................................77
TYPES DE CREDIT SELON LEUR USAGE ..............................................................77
Crédits finançant les besoins des entreprises .............................................78
Les crédits d'investissement ....................................................................78
• Objet :..........................................................................................78
• Volume :......................................................................................78
• Temps :........................................................................................78
• Sortie du crédit : ..........................................................................80
• Instruments :................................................................................80
• Coût :...........................................................................................80
• Fiscalité : .....................................................................................81

- 246 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

• Garanties : ...................................................................................81
• Attitude des pouvoirs publics vis-à-vis des crédits
d'investissement : ................................................................................82
les crédits à la grande exportation...........................................................82
• Objet :..........................................................................................82
• Temps :........................................................................................82
• Sortie de l'opération : ..................................................................82
• Instruments :................................................................................82
• Coût :...........................................................................................83
• Garantie :.....................................................................................83
• Montage : ...................................................................................83
Crédits de campagne ...............................................................................84
• Objet :..........................................................................................84
• Durée :.........................................................................................84
• Sortie : .........................................................................................84
• Instruments :................................................................................84
• Coût :..........................................................................................84
• Garanties : ...................................................................................84
Crédits de fonds de roulement ................................................................85
• Objet :..........................................................................................85
• Durée :.........................................................................................85
• Sortie : .........................................................................................85
• Instruments :................................................................................85
• Coût :...........................................................................................85
• Garanties : ...................................................................................85
Crédits finançant les besoins des particuliers ............................................86
Le crédit hypothécaire.............................................................................86
• Introduction .................................................................................86
• Technique....................................................................................86
• Protection des débiteurs ..............................................................87
• Centrale des Risques ...................................................................89
• Sanctions .....................................................................................89
• Principales autres caractéristiques du crédit : .............................90
Le crédit à la consommation ...................................................................91
• Introduction :...............................................................................91
• La réglementation........................................................................94
ANNEXE A .....................................................................................................103
Genèse du crédit d'acceptation :...............................................................103
Evolution ultérieure ..................................................................................103
Evolution ultime :......................................................................................104
Usage :...................................................................................................104
Durée :...................................................................................................105
Coût :.....................................................................................................105
ANNEXE B......................................................................................................105
CHAPITRE 5...................................................................................................111

- 247 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

AUTRES OPERATIONS ACTIVES AVEC LE SECTEUR PRIVE ........111


SOUSCRIPTION D'OBLIGATIONS DE SOCIETES INDUSTRIELLES .........................111
Introduction...............................................................................................111
Types d’obligations corporate ..................................................................111
Existence d’un marché secondaire ? ........................................................112
ACTIONS DE SOCIETES ....................................................................................112
Présence à des degrés divers, selon la vocation de l’intermédiaire financier
...................................................................................................................112
Réflexions sur le bien-fondé de la détention d’actions pour les
intermédiaires financiers ..........................................................................113
Adéquation des remplois par rapport aux ressources ?.........................113
Conflits d’intérêts potentiels ? ..............................................................113
Adoption de différents principes ...............................................................113
Spécialisation ........................................................................................114
Autonomie.............................................................................................114
Un assouplissement … ..............................................................................115
Et ensuite un revirement............................................................................115
CHAPITRE 6...................................................................................................117
OPERATIONS DE FINANCEMENT DU SECTEUR PUBLIC................117
LES EMETTEURS .............................................................................................117
Au niveau national : ..................................................................................117
Au niveau étranger : .................................................................................117
LES FORMES DE FINANCEMENT.......................................................................117
CHAPITRE 7...................................................................................................119
CRITERES D’APPRECIATION DU PLACEMENT OBLIGATAIRE ...119
INTRODUCTION...............................................................................................119
LA POLITIQUE TRADITIONNELLE D’AMORTISSEMENT .....................................119
LES REGLES FUTURES .....................................................................................121
CHAPITRE 8...................................................................................................122
OPERATIONS A L'EGARD D'AUTRES INTERMEDIAIRES
FINANCIERS PROFESSIONNELS.............................................................122
LES OPERATIONS DE MARCHE INTERBANCAIRE ..............................................122
LES OPERATIONS DE TRESORERIE ...................................................................122
CHAPITRE 9...................................................................................................124
LES ENCAISSES ............................................................................................124
LES OPERATIONS PASSIVES DES INTERMEDIAIRES FINANCIERS
...........................................................................................................................125
CHAPITRE 10.................................................................................................127
LES DIFFERENTS INSTRUMENTS DE COLLECTES DE
RESSOURCES DES INTERMEDIAIRES FINANCIERS.........................127

- 248 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

LES DEPOTS ....................................................................................................127


Dépôts en compte courant à vue ...............................................................127
Rappel : convention de compte courant ................................................127
Caractéristique du dépôt à vue ..............................................................127
Dépôts en compte à terme .........................................................................127
Comptes à terme fixe ............................................................................128
Comptes à préavis .................................................................................128
Comptes rubriqués ....................................................................................128
Fixation des taux des comptes de dépôts ..................................................128
Le terme ................................................................................................129
L'offre et la demande.............................................................................129
Le montant des dépôts...........................................................................129
La devise ...............................................................................................129
Régulation .............................................................................................129
LES LIVRETS OU LES CARNETS D'EPARGNE .....................................................133
Principe .....................................................................................................133
Fiscalité.....................................................................................................133
Rémunération ............................................................................................133
Moyen d’encouragement de l’épargne ou … ? .........................................134
CERTIFICATS DE DEPOT, BONS DE CAISSE ET OBLIGATIONS ............................135
Nature........................................................................................................135
Types de bons de caisse et d'obligations...................................................135
Obligations ordinaires ...........................................................................135
Bons de capitalisation ou bons de croissance : .....................................135
Bons à taux progressifs .........................................................................136
Rémunération ............................................................................................136
Liquidité ....................................................................................................136
FISCALITE ......................................................................................................136
CHAPITRE 11.................................................................................................138
LES RESSOURCES EN CAPITAUX PROPRES DES INTERMEDIAIRES
FINANCIERS..................................................................................................138
INTRODUCTION...............................................................................................138
REGULATION ET FIXATION DE FONDS PROPRES MINIMUM ...............................138
Le risk-assets ratio ....................................................................................139
Définition de standards internationaux …................................................139
Mais des arbitrages délicats ….................................................................140
Perspectives de régulation ........................................................................141
CHAPITRE 12.................................................................................................142
AUTRES MOYENS DE COLLECTER L’EPARGNE...............................142
LES ASSURANCES-VIE.....................................................................................142
LES ORGANISMES DE PLACEMENT COLLECTIFS (OPC) ..................................143
Définition et introduction..........................................................................143
la nationalité :........................................................................................143

- 249 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

la forme juridique : les fonds de placement et les sociétés


d’investissement....................................................................................143
• Les Fonds de Placement............................................................143
• Les Sociétés d’Investissement...................................................143
le caractère ouvert ou fermé de l’OPC :................................................144
Intérêt et utilité d’un OPC ........................................................................144
Pour l’investisseur.................................................................................144
• réduction des frais : ...................................................................144
• Gestion professionnelle :...........................................................144
• Diversification des placements .................................................145
• Accès à certains marchés ..........................................................145
• Liquidité ....................................................................................145
• Transfert d’un compartiment à un autre....................................145
• Avantages fiscaux (voir infra)...................................................145
Pour l’intermédiaire financier ...............................................................145
• Des frais de gestion ...................................................................145
• Meilleure adéquation actif/passif et diminution du risque
d’intermédiation ................................................................................146
Les Organismes de Placement Collectif en Valeurs Mobilières (OPCVM) :
la Directive du 20 Décembre 1985 ...........................................................146
Harmonisation minimum : le « passeport européen »...........................146
Conditions d’application .......................................................................147
Agrément de l’autorité de contrôle compétente du pays d’origine .......147
Obligations concernant la structure de l’OPC.......................................147
Quelques éléments de politique de placement des OPCVM.................148
Obligations concernant l’information des participants .........................148
Obligations générales de l’OPCVM......................................................149
Dispositions spéciales applicables aux OPCVM qui commercialisent
leurs parts dans des Etats membres autres que ceux où ils sont situés. 149
Classification légale des OPC : la loi belge du 4 décembre 1990 relative
aux opérations financières et aux marchés financiers..............................150
OPCVM ................................................................................................150
OPC en valeurs mobilières et liquidités ................................................150
Autres ....................................................................................................151
Classification des OPC ou de leurs compartiments selon le type
d’investissement réalisé et classes de risque ............................................151
OPC d’obligations :...............................................................................151
OPC à moyen terme : ............................................................................151
OPC monétaires : ..................................................................................151
OPC d’actions : .....................................................................................151
OPC indiciels : ......................................................................................152
OPC mixtes : .........................................................................................152
OPC immobiliers : ................................................................................152
Fonds de fonds ......................................................................................152
Quelques OPC bien connus des investisseurs...........................................153
Sociétés d’investissement .....................................................................153

- 250 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

• SICAV.......................................................................................153
• SICAF .......................................................................................153
Fonds de placement...............................................................................153
• Les fonds d’épargne pension.....................................................153
• Les Hedge Funds.......................................................................153
Régime fiscal des OPC..............................................................................153
Fiscalité dans le chef des OPC de droit belge .......................................154
Fiscalité dans le chef de l’investisseur belge ........................................154
AUTRES OPERATIONS TRAITEES PAR LES INTERMEDIAIRES
FINANCIERS..................................................................................................156
CHAPITRE 13.................................................................................................158
CONSERVATION DE VALEURS ...............................................................158
INTRODUCTION...............................................................................................158
2 TYPES DE DEPOTS ........................................................................................158
LES DEPOTS DE TITRE .....................................................................................159
LE RESPECT DE CERTAINS DEVOIRS ................................................................159
EVOLUTION : LES CENTRALES DE DEPOT ET DE LIVRAISON DE TITRES ............160
CHAPITRE 14.................................................................................................161
LES PAIEMENTS ..........................................................................................161
INSTRUMENTS ................................................................................................161
Transferts : les virements ..........................................................................161
Titres financiers ........................................................................................161
Le chèque bancaire................................................................................161
Autres titres financiers ..........................................................................163
MECANISMES UTILISES ...................................................................................163
Paiements locaux ......................................................................................163
Principe .................................................................................................163
Evolution du système ............................................................................164
• Cheque « truncation » ...............................................................164
• Chambre électronique de compensation ...................................164
Paiements éloignés....................................................................................165
COUT - REMUNERATION .................................................................................166
Des frais élevés .........................................................................................166
Le système des « dates de valeur » ...........................................................166
Tarification des services ...........................................................................166
CHAPITRE 15.................................................................................................168
LES OPERATIONS DE CHANGE...............................................................168
BILLETS DE BANQUE - CHEQUES DE VOYAGES ................................................168
LES REGLEMENTS EN DEVISES ........................................................................169
Fonctionnement.........................................................................................169
Exposition au risque de change ................................................................169
Contrôle et réglementation .......................................................................169

- 251 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Types d'opérations de change ...................................................................170


les opérations au comptant ....................................................................170
les opérations à terme............................................................................171
Surveillance des opérations de change :...................................................173
Les délais de transfert ...............................................................................173
Communications........................................................................................174
Rôle des intermédiaires financiers en matière de réglementation............175
CHAPITRE 16.................................................................................................176
LA GESTION PATRIMONIALE .................................................................176
GENERALITES .................................................................................................176
PRINCIPES SUIVIS PAR LES INTERMEDIAIRES FINANCIERS DANS CE DOMAINE .176
Déterminer les objectifs de celui qui détient le patrimoine ......................176
Personne physique.................................................................................177
Institution ..............................................................................................177
Les objectifs une fois définis, déterminer une composition adéquate pour le
patrimoine .................................................................................................177
Répartition par nature d'instrument :.....................................................177
Répartition par devise : .........................................................................177
Répartition géographique :....................................................................178
Répartition par secteur économique :....................................................178
Choix des valeurs individuelles répondant aux critères définis. ...........178
Mode de détention du patrimoine .............................................................178
Opérations.................................................................................................179
Evaluation de la performance...................................................................179
Rémunération des gestionnaires ...............................................................181
Réglementation de la profession ...............................................................181
CHAPITRE 17.................................................................................................183
SERVICES FINANCIERS DES ENTREPRISES .......................................183
CHAPITRE 18.................................................................................................184
LES OPERATIONS FINANCIERES ...........................................................184
OBJET.............................................................................................................184
Pouvoirs publics........................................................................................184
Entreprises ................................................................................................184
LES SOLUTIONS ..............................................................................................185
LE MARCHE PRIMAIRE : LES OPERATIONS D'EMISSION.....................................185
Analyse de l'émetteur ................................................................................185
pouvoirs publics ....................................................................................186
entreprises .............................................................................................186
Importance de l’analyse : indépendance, professionnalisme, crédibilité
...............................................................................................................186
Emissions d’obligations : - Développement des agences de rating ......186
Emission d’actions- capital à risque......................................................187
Formes intermédiaires...........................................................................187

- 252 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Détermination du mode de distribution ....................................................187


Emissions privées..................................................................................187
Emissions publiques..............................................................................187
Mise en forme de la documentation de distribution..................................188
Mise en place de circuits de distribution ..................................................188
Closing ......................................................................................................189
Placement..................................................................................................190
Les introductions en bourse, ou IPO («Initial Public Offering ») ............190
Les secondary offerings ............................................................................190
Informations ..........................................................................................191
Interdiction de l’insider trading.............................................................191
Réglementation des opérations financières...........................................192
Remarque : le Glass-Steagall Act .........................................................192
Rémunérations ..........................................................................................193
LES MARCHES SECONDAIRES ..........................................................................194
Introduction...............................................................................................194
Négociation et formation des prix.............................................................195
Brokered markets : order-driven markets ............................................195
Dealer markets : market making markets..............................................195
Exemples ...............................................................................................195
Négociation ...........................................................................................196
Largeur des marchés.................................................................................197
Evolution des intermédiaires en valeur mobilières...................................197
Rôle de conseil des courtiers ....................................................................199
Les discount brokers .................................................................................199
CESSIONS, FUSIONS D'ENTREPRISES ................................................................199
Analyse et évaluation ................................................................................200
Recherche d'un partenaire (dans le cas d'une cession : l'acquéreur).......201
Négociations..............................................................................................201
Financement..............................................................................................201
L’acquisition ou « leverage buy out ».......................................................202
Structuration du contrat de cession ..........................................................202
Closing ......................................................................................................203
Rémunérations des intermédiaires............................................................203
Cas particulier des sociétés cotées en Bourse ..........................................204
ELEMENTS DE GESTION ET CADRE LEGAL ET REGLEMENTAIRE
DES INTERMEDIAIRES FINANCIERS ....................................................206
CHAPITRE 19.................................................................................................207
ELEMENTS DE GESTION DES INTERMEDIAIRES FINANCIERS ...207
INTRODUCTION...............................................................................................207
LA GESTION DES RISQUES DIVERS ...................................................................207
Risque de la consistance des actifs financiers ..........................................207
Délégation de responsabilités................................................................207
Politique globale ...................................................................................208
Analyse de l'utilisateur des fonds..........................................................208

- 253 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Structuration contractuelle ....................................................................209


Prise de garanties...................................................................................209
Révision périodique ..............................................................................210
Suivi du contentieux..............................................................................210
Déclenchement de l’exigibilité .............................................................210
Constitution de provisions ....................................................................211
Risques sur contreparties professionnelles...............................................212
Risque de voir se dégrader ou disparaître physiquement les actifs matériels
...................................................................................................................212
Risques techniques des opérations............................................................212
Risque de malversations, de fraude et de malhonnêteté ...........................213
Risque inhérent aux responsabilités professionnelles encourues par les
intermédiaires financiers ..........................................................................214
LA GESTION DE LA LIQUIDITE DES INTERMEDIAIRES FINANCIERS ...................215
Problème général ......................................................................................215
Mécanismes permettant de faire face aux ruptures de liquidités..............217
Les cessions d'actifs mobilisables .........................................................217
Le recours aux passifs de remplacement...............................................217
MARKETING DES INTERMEDIAIRES FINANCIERS .............................................218
Introduction...............................................................................................218
le marketing par marchés .........................................................................218
le marketing par produits..........................................................................219
Types de produits ..................................................................................219
Make or buy ? .......................................................................................219
Conséquences sur la gestion .....................................................................220
Sont décentralisés :................................................................................220
Impacts ..................................................................................................220
Développements....................................................................................221
Cadre d’action concernant l’harmonisation de la concurrence et la vente à
distance des services financiers ................................................................221
« Proposition de directive concernant la vente à distance des services
financiers » ............................................................................................222
« Propositions de directives concernant l’accès à l’activité des
institutions de monnaie électronique et son exercice ainsi que la
surveillance prudentielle de ces institutions ».......................................223
« Propositions de directives sur les signatures électroniques ».............223
CHAPITRE 20.................................................................................................225
CADRE LEGAL ET REGLEMENTAIRE DES INTERMEDIAIRES
FINANCIERS..................................................................................................225
INTRODUCTION...............................................................................................225
CLASSEMENT DES MESURES LEGISLATIVES ET REGLEMENTAIRES...................226
Les buts des lois et règlements ..................................................................226
Rencontrer des objectifs économiques et monétaires; ..........................226
Viser des buts sociaux et culturels; .......................................................226
Assurer la stabilité des intermédiaires financiers;.................................226
Protéger les parties contractantes aux opérations financières;..............226

- 254 -
INTERMÉDIAIRES FINANCIERS ERIC DE KEULENEER

Les pouvoirs dont émanent les lois et règlements.....................................227


le niveau supra-national : ......................................................................227
le niveau national : ................................................................................227
les niveaux régionaux et locaux : ..........................................................227
Le champ d'application des lois et réglementations .................................227
Dans l'espace .........................................................................................227
Dans le temps ........................................................................................228
Quant à la matière saisie .......................................................................228
TYPES DE MESURES LEGALES ET REGLEMENTAIRES CONCERNANT LES
INTERMEDIAIRES FINANCIERS .........................................................................228
Mesures économiques et monétaires.........................................................228
Action sur les agrégats monétaires........................................................228
Fiscalité : ...............................................................................................229
Action sur les changes...........................................................................229
Subsidiation :.........................................................................................229
Action sur la concurrence......................................................................229
• Dans le sens restrictif : ..............................................................229
• Dans le sens extensif : ...............................................................229
• Dans le sens de l'égalisation :....................................................230
Mesures de protection des déposants........................................................230
Mesures préventives..............................................................................230
Mesures curatives..................................................................................232
Mesures de protection des investisseurs en valeurs mobilières................235
Mesures de protection des débiteurs.........................................................236
DEONTOLOGIE................................................................................................237
CONCLUSION GENERALE ........................................................................238
TABLE DES MATIERES ..............................................................................242

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