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Premier brouillon

Virée dalmatienne et d’ailleurs 2007

On se devient tout nerveux, perplexe, appréhensif à la veille d’un


voyage, surtout sur terroirs étranges constituants ce qu’était la
vielle et défunte Yougoslavie – et toujours vivants, parfois violents,
Balkans, une région jurée dans une façon et bénie dans l’autre, un
paradoxe d’être expliquée. Comme Palestine, ce coin de l’Europe fut
au carrefour du mouvement des tribus où les gens combattirent
depuis les êtres sapiens en pagnes et jetant lances évincèrent leurs
cousins néanthertaliens, aussi africains en descente. Le conte que
l’on raconte des montagnes, collines, vallons, îles, calanques et
garrigues desquelles on va parcourir est des contestations
sanglantes mais ne pas dépourvues de la beauté et de l’espoir qui
exsudent et exaltent aussi l’esprit de la race, la race humaine
remplie des défauts et des vertus. Plus d’un souci pédestre
cependant est celui de la qualité culinaire, le caprice de météo, le
comportement des natifs et soit le train va ponctuellement en Italie
en face de la Yougoslavie d’où le seul achèvement de note pendant
le règne de folie de Benito Mussolini fut comment il l’eut fait courir
à temps. L’Europe du sud et est fut le berceau de la civilisation
dehors l’Asie et l’Afrique et pourtant on s’étonne à l’habitude qui se
range de l’hostilité a l’avidité dans un continent qui semble avoir
inventé l’art de l’arnaque contre les visiteurs, commençant
sûrement avec la fraude des ouailles de pèlerins chrétiens qui
affluèrent aux sites sacrés de valeur douteuse, certains d’eux pour
des cures censément miraculeuses et pour les bénédictions et les
ablutions des péchés.
Comme typique pour mes viatiques d’un voyageur chevronné, je
me suis fourni d’un passeport canadien accueilli presque partout
sauf le Québec, une liasse d’euros et francs suisses, un tas de
cartes bancaires, plusieurs pages de guide touristique téléchargées,
une boussole, trois bagages, y compris une valise d’unique pour
mes attirails photographiques et vidéo, et trois langages d’usage
européen occidentale plus populaire, le français, l’anglais et
l’espagnol, le denier étant bien rouillé et rude. On apprend
rapidement des avantages qui s’accumulent à la culture de
familiarité et comment une langue ciblée à une bonne audience
peut ouvrir des portaux comme une clef. En Amérique du nord,
j’adresse des habitants du Chinatown dans la langue de mes
ancêtres, le toisanais, qui m’assure de bonté des restaurateurs
ravis de servir et alimenter un « compatriote » ; en Asie, le
mandarin, qui exhibe ou est égalé à une marque de distinction, et
parfois en cantonais pour profiter de la supposition comment les
gens de Hongkong sont riches, généreux dans leur aisance avec des
pourboires et donc dignes de bon traitement. Ce truc s’entraîne un
degré de hasard, une gaffe, puisque le cantonais quand adressé à
un Chinois qui venait de Pékin pourrait être une affronte. Je ne
souhaite jamais léser un coréen qui de temps en temps grince ou
blanchit à la bavure. Les Péruviens appellent leur président déchu,
Roberto Fujimori, maintenant en exil au Chili, « el chino » qui le
navrait et aussi les vrais Chinois dans le pays qui souffraient sous

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sa férule de corruption et d’incompétence. Bavarder c’est à marcher
sur coquilles.
Un proverbe chinois dit que chaque périple débute avec un
petit pas. Cette remarque plutôt banale est toujours ainsi attribuée
à un sage en Chine, chacun, lui, un maître en rendrant profonde
une platitude. Durant mes journées écolières, moi, le potache,
j’étais las assez d’avoir entendu souvent proclamer des professeurs
à l’ingéniosité des Chinois auquel le corollaire aurait eu d’être :
Maintenant quel dommage ne pas voir le même géminer dans ton
caractère, Bernard. Je minaudais invariablement en silence
delphique à ces énonciations condescendantes fondées sur
stéréotypes implicitement racistes qui sont construits comme
éloges, rien plus, rien moins. En revanche et en abri a l’ignorance
endémique, sinon académique, je rêvassais. Il y a cet élément
onirique lorsque je réfléchis sur l’ère en éducation qui était le temps
perdu ou gaspillé, une éducation essuyée de ma conscience et bon
débarras. Ces rêveries en survol de la corvée et de l’ennui habituel
demeurent alors que ces leçons au sérieux étaient longtemps vidées
comme purin d’un évier. Il suffit à noter dans la marge que mon
milieu à Vancouver dans le quartier de bourgeoisie personne
n’aspirait pas aux métiers insolites et ne voulait qu’une profession
accessible et respectable, à l’instar un avocat, un docteur, peut-être
un comptable avec un bureau dans le centre-ville, voilà au pinacle
de réussite.
La faute exprimée du manque de l’ambition et de l’accolade de
la conformité était peu ou prou estampée par d’autres, les
bravaches, qui d’abord bizutèrent et puis brimèrent chaque jeune
osant d’être différent. On n’œuvre jamais dans un tel climat et une
telle époque jusqu’atteindre un niveau de sophistication et de
maturité quand soudainement il était de rigueur d’agir le rôle d’un
dissident ou frondeur comme dicté par la mode en université dans
une certaine période. Rudoyé oui mais ne pas trop sévèrement, je
n’étais pas évertué ouvertement, me laissant flotter sur ces
courants qui cependant tournaient en cataractes et ressacs pour
ma sœur aînée, morte littéralement et figurativement de la noyade.
Maintenant je dois cesser à divaguer et entamer à décrire comment
je vaguerais en Europe dont chacune de ses escales évoque autant
de l’histoire, parfois tragique, parfois ironique, qui incarne ces
luttes éternelles et souvent en vain de l’espèce humaine pour la
prospérité, l’égalité, la dignité et la coexistence des classes et
ethniques diverses. Sur cette note de positif, c’est bon et propre de
conclure ces prolégomènes et foncer, commencer.

Au cœur des anciennes ténèbres et celui aussi de la nouvelle


lumière, on l’espère :

J’ai glané d’ici et de là-bas des pépites de connaissance sur les


affaires convolutées de ces Balkans, un lieu qui conjecture ces
images horrifiques de barbarie. La Yougoslavie était un creuset des
nationalités de rivalité intense, amère et périodiquement meurtrière
et un creuset aussi de cruauté pour ses victimes et rescapées. Le
sinistre de la désintégration nationale plus récente dans les années
1990 demeure vivement inoubliable, grâce aux rapports graphiques
et déchirants. L’ampleur des pertes humaines et matérielles se
révélait seulement après une ruée de médias et une pique forte de

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conscience d’explorer la vérité qui était tristement absente (racisme
peut-être) en Rwanda durant le génocide ignorée dans le reste du
monde. Encore frais sur l’étagère est un livre bien écorné et éculé,
le Vent mauvais de Salonique : La poudrière d’orient, par Pierre
Miquel, un expert de la première guère moniale en lamentation des
bousillages et carnages qui furent trop communs des batailles sur
boue et dans les maquis. Je ne peux pas encore distinguer ce fatras
de protagonistes, Serbes, Croates, Musulmanes, Turcs, Bulgares,
Hongrois, Grecs, Albaniens, Slovènes qui s’entassèrent et
guerroyèrent dans les noms de leurs fiefs et fois. Monsieur Miquel
désentortillait bien le fouillis d’alliances, comprenait les perfidies et
dramatisait les magouilles dans son roman historique mais quant a
moi, c’était, la poisse des Balkans, tout d’une devinette.
L’avion de Lufthansa, typiquement germanique d’un style
astiqué mais sans luxe, arrive à l’heure d’aube dans la grisaille
fraîche de Munich, site aussi d’intérêt d’où Adolphe Hitler eut lancé
son mouvement fameux pour bâcler son putsch d’une guinguette,
un « beerhaus » d’être précis, et bien elle fut la Bavière qui le mena
à la taule et à son tract, Mein Kampf, une diatribe composée en
furie blanche et un plan d’architecture pour le troisième Reich à
durer plutôt ambitieusement un millenium (en réalité quand il ne
perdura qu’une dizaine d’années.) Je me sens écroué aussi dans
l’avion, trop tendu à sommeiller, beaucoup moins à dormir, en
lorgnant l’écran qui dépeignait le progrès du vol en traversant trop
lentement les continents, une insomnie aggravée par les
ronflements d’autres passagers qui ont roupillé comme cochons. Le
décollage m’a buté, me lassant totalement désorienté et détraquée,
et le décalage ensuite m’a cogné. Je chancelle un peu en mes
premières enjambées en Allemagne et ceci était malgré ma fierté en
étant gigotté. L’effet approxime celui de l’inébriété et je vais me
dégriser avec une lampée de thé dans le salon de l’aéroport pendant
la courte attente pour le vol a la capitale de Croatie, Zagreb, la vraie
première escale, chez la Yougoslavie, maintenant pour moi une
figure de parole et aussi un cas de nostalgie pour les anciennes
cartes vues encore sur ma mappemonde. Dans ma poche, insérée
dans mon passeport, est un lé sur lequel j’ai gribouillé pour
déclencher la tension qui monte une pochade de Croate façonnée
comme un têtard dont la longue queue est la côte dalmatienne qui
l’itinéraire dicte qu’on cabotera en car. Je redoute chaque trajet
dans la compagnie d’étrangers mais je n’ai pas de choix puisqu’il
fallait suivre le programme mandaté et pour lequel Esther, ma
femme, a payé une petite fortune.
La Croatie avait fait sécession de la fédération yougoslave en
1991et donc précipitée un conflit qui s’était résolu en 1996 avec la
déroute des forces constituantes principalement des Serbes qui
occupaient la bande côtière et qui étaient brutalement
évincés. L’expulsion semble maintenant être permanente.
Beaucoup s’est amélioré depuis et le progrès continue d’un jour à
l’autre grâce au flux d’investissements, une portion desquels vient
de la communauté croate outre-mer, alors que l’aboutissement
économique n’est pas évident dans l’aéroport à Zagreb auquel
l’ambiance est rustique, spartiate, provinciale. Le vol de Munich
était exactement 45 minutes en traversant les Alpes autrichiennes
et slovènes et, en route, les nuées se sont amincies et tôt le ciel
s’est éclairci. En volant, ma gamine a repéré son objet de l’envie

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plus récente, l’Iphone de l’autre passager, et moi, j’ai admiré le
paysage qui s’est épandu au-dessous, indicatif, non, de nos
priorités contrastantes. Les jeunes greffiers pour l’immigration
s’avèrent patauds et lents en examinant les documents d’identité et
il est donc approprie que le flux touristique n’advienne pourtant, à
moins à la frontière aérienne. L’entrée recommandée demeure du
trafic routier comme prouvé par la parade de plaques
minéralogiques sur ces chaussées. L’aggravation s’empire car la
Croatie n’adopte pas l’interdit de fumée dans les endroits publics
malgré la tendance ailleurs de l’Union européenne à laquelle ce
gouvernement aspire. Dehors du hall, dans la chaleur, prêt nous à
saluer est un large bus blanc capable d’asseoir 44 personnes quand
nous ne nombrons que 19, y compris la grosse et grossière guide,
Sofa, et aussi un essaim de taons mais seulement à l’ombre. La
cavale commence donc envers le centre de Zagreb dont les feuillues
banlieues semblent pratiquement désertes à ceux de nous
acclimatés aux cohues de Hongkong, New York, Londres, Paris et
Tokyo, oui, nous, tous vétérans de voyage et citadins chevronnés.
Le car vire de la grande route via rocade et, sous 25 minutes, il
s’approche à la cité marquée par un flux de voitures dans la
direction d’un obélisque, une stèle et des beffrois jumeaux ornés
surplombent une pente de ruelles pavées et, d’où aussi, un pâté de
bâtiments, vieux, sinon médiévaux. Bus et fourgons de tourisme
sont partout, causants un bouchon au cœur urbain. Ces véhicules
charrient plus que juste de peuple mais aussi l’argent et l’espoir du
pays. Sofa se hâte à parler et le reste du groupe se hâte à
photographier. Voici est l’âme de la patrie et de patrimoine croate,
l’aire de la Cathédrale de l’Assomption de la Vierge et des rois
Stephen et Ladislav ou, simplement, miséricordieusement, la
Cathédrale. L’édifice central apparaît rupin au degré opulent en
juxtaposition à la simplicité de style et de moyens partout, une
simplicité soulignée, ponctuée, par l’uniformité des toits construits
de l’ardoise rouge, d’une teinture à cochenille.
Attendant-nous dans l’agora, dans dont centre est une statue
durée de la Vierge Marie (photo 1) sur plinthe au ciment, est notre
guide local, une svelte, souriante, femme âgée à trentaine, Cathy
(photo2), avec une voix douce, yeux gris, minois gentil, cheveux
bruns, mèches desquels pendillant sur front un peu long. Elle nous
salue, parlante un anglais lyrique et mou, sans accent discernable,
un accent qui se tourne d’être ontarien, oui, une ressortissante
canadienne qui est revenue à la patrie ancestrale pour frayer une
carrière et aider le pays où ses parents sont nés. Cathy nous
explique bien la localité en anglais qui notre groupe comprend mais
qui n’arrête pas notre Sofa loquace en embellissant le conte avec ce
babillage cantonais. Notre jolie Croate est trop gracieuse à protester
ou rechigner à l’interférence de sa performance de laquelle elle peut
rendre aussi en français et japonais, elle, une mathématicienne par
éducation, dotée de quatre langues. Elle et moi négligeons les
autres de la couvée touristique et nous jasons en français, le sien
d’un ton mélodique sans excès de grasseyements parisiens ni de
nasalisation québécoise, et elle, en retour, me vante. Pas de
baratin, juste de conversation sincère. J’elle commende durant le
cours de notre causette pour les sacrifices faits dans sa quête ne
pas d’un pot d’or a la fin de l’arc-en-ciel, plutôt pour la
connaissance, et elle, par vocation aussi une tutrice en français et

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anglais et voire mathématiques, est ainsi d’un type duquel j’adore,
m’engoue en fait, et auquel je gravite instinctivement pour nous
sommes dans la même poursuite.
Dans la nef de la cathédrale, sombre et solennelle, on entend
des échos et voit une haute voûte et des vitraux qui filtrent les
lumières, un tribut à l’ouvrage de la verrerie et des artisans. A
l’arrière demeurent une fresque, un reliquaire et un mural gravé du
texte écrit de la calligraphie native, sinon païen, avant son
éradication ou supplantation par le script latin Dans le centre,
devant l’autel, gisant une figure béatifique mise en caisse, une
vitrine, vêtue d’une soutane et mitre, voici est enfermée la dépouille
mortelle du saint martyr résident, comment macabre à l’instar de la
momification au mausolée de Vladimir Lénine a Moscou et de Mao
Zedong à Pékin. Cathy me murmure presque que le corps de
l’archevêque du diocèse à Zagreb de la conscience des Croates
contre la dictature de Tito est en fait de la cire moulée dans l’image
de l’évêque révéré, quoi soulagement sinon à moi, à Yo-yo.
Cette version croate à celle polonaise de Karol Jozef Wojtyla, et
postérieure, à l’ascension à la papauté, est dite d’avoir été la
béquille de l’identité de sa nation durant et avant le régime de Josip
Broz Tito, aussi un Croate. Le prélat, quand il ne fut qu’un prêtre
d’une paroisse, eut pris de risques en appuyant la cause de justice
et dénonçant à la persécution des Serbes et des juifs sous les
poings de l’Oustachi, un gouvernement allié aux Nazis. N’il se
concilia pas aux méthodes brutales de Tito et ses partisans, un
conflit qui se devina pourtant l’autre épisode de la lutte perpétuelle
d’être l’autorité ecclésiastique il incarna et celle qui fut étatique
communiste. Le cardinal n’accepta jamais qu’un homme, Tito,
cependant héroïque fût sa résistance aux fascistes, ait dû
manipuler la foi afin de mater les gens, s’insistant sur la séparation
des domaines de Dieu et de César, pour lequel sa conviction lui
coûta sa liberté sous l’arrêt de maison ou d’évêché où il est ébruité
d’avoir été envenimé. Un pasteur ainsi lésé fit se rallier et s’accoler
le peuple en prouvant à nouveau que messager d’espoir soit plus
puissant en mort que dans la vie, veule de physique mais forte
d’idéalisme, un point jamais appris par les tyrans.
Quant à la cathédrale, elle fuse des styles architecturaux divers
et des époques diverses, du gothique au baroque, étant d’abord
construite entre le 13ieme et le 17ieme siècle, d’autours dont la
ceinture une bourgade grandit et s’étendit, testament aux liens
inextricables entre l’ordre religieux et le quotidien des gens
bûcheurs et fiers. On peut bien arpenter l’aire et observer comment
le commerce, surtout dans le marché de fruits, légumes, fromages
et volaille, simplement les vivres, complémente l’église et y tire
beaucoup de piétons, certains touristes branchés dans vêtements
de marque et encombrants de cameras. D’ici on trouve toutes
sortes de denrées et métiers, barbiers, fraters, électriciens,
charcutiers, bricoleurs et dépanneurs. La nouvelle façade (photo 3)
décalée de l’excès tarabiscoté soi-même était rebâtie après le séisme
du 19ieme siècle et ainsi trahit une modernité incongrue. Le
résultat est un méli-mélo qui émane un charme insolite et
certainement distinct dans ces parages.
Cathy nous emmène à une ruelle de pavés ronds et craqués
dont fissures cédantes aux poussées d’herbes envers une grotte
sacrée, presque une planque, comme manifeste par pèlerins qui

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allument leurs bougies votives à une dalle et une sacristie. Cette
chapelle survécut presque sans tache de roussi de l’incendie
précipitée par le séisme qui eut rasé beaucoup de bâtiments et
terrassée la population. Ceci la grande échappe d’émerveille du
sinistre inspira les rescapés du nadir de déboires à reconstruire
leur ville, raviver leur espoir et approfondir leur foi. On est sorti de
l’ère de superstition et pourtant on n’efface pas cette vague
croyance dans des miracles, épiques ou personnels, pour chacun
aurait besoin de bienveillance et faveur divine ou, simplement, un
peu de veine. Nous reposons après une courte montée sur terrasse
(photo 4) avec une vue de Zagreb dont les toits font l’illusion d’une
mer de rouge à l’horizon distant, certains de nous sur une
banquette proche à une statue argentée (mais vraiment aciérée
polié qu lustre) d’un flâneur fondu par un sculpteur supposément
fameux. Je ne les joins pas, l’autrui, étant toujours un peu
insouciant de la foule et penche sur margelle d’un parapet qui
surveille la plaine, une fois peut-être une noue avant son
assèchement.
Avec Cathy allée, nous nous aventurons au marché pour
inspecter, assortir et acheter quelques produits locaux comme ces
juteuses poires, pommes, pêches, cerises, brugnons, prunes et
pains dont fraîcheur flaire l’air avec un arôme délectable voire
avant la première morsure. Yo-yo et Esther ne le quittent pas
bredouilles, dévalant à l’attrape-nigaud au palier de la colline sur
laquelle situe la cathédrale pour lésiner avec des marchands de la
bimbeloterie et antiquaires afin qu’assouvir leur impulsion aux
emplettes. Pour mère, l’intérêt de jour est l’encens et, pour fille,
celui d’un assortiment des aimants fabriqués sûrement en Chine et
bien diaprés. Gênant par insomnie durant le vol, je transis encore
du décalage et ronge une brioche tachetée de sésames et une
tranche de saucisse au porc pimenté, salé et tari, et c’est sage de
moi à chipoter afin de remplir les creux des estomacs car ce qu’est
promis, menacé, pour notre premier repos en Croate. Enfin, sous
un ciel d’azur rutilant, on grimpe sur carrosse, plus que deux
sièges à chacun du groupe. Nous trois occupons l’arrière quatre
rangs du car qui ravit Yo-yo toujours rapide d’y faire son gîte, son
repaire.
Le chauffeur, Miroslav, ou Miros pour abréviation, un joyeux
drille de cinquantaine, est habile en naviguant ces étroits lacets de
routes qui nous dirigent au nouveau quartier proche à la gare
centrale d’où se réunir des routards et au parc urbain d’où
apparaissent pourtant l’autre statue en tribut a un général et plus
heureusement un pavillon d’une zone boise. C’est le quartier de
banques, d’instituts de finance, de magasins et d’une promenade
flanquée de cafés et de crémeries glacées. Sofa bavarde et bavarde
en nous guidant à un restaurant censément chinois, une cuisine je
ne veux pas risquer à cause de mon respect pour l’art culinaire du
royaume moyen et de mon goût exquis. Elle tente de nous endormir
avec son radotage qui me tanne et m’agite. J’apprends bientôt de
redouter cette ritournelle résonnante de ses lèvres, « laissez-moi,
vous, de me répéter dans l’autre voie» quand, déjà, le premier essaie
à parole était asinien, qui me provoque de penser et frouer sinon
pour la touche lénifiante de ma femme. C’est toujours au moment
frustré et frustrant qu’on apprécie une épouse empathique. Pour
badiner et retenir aux abois de l’ennui, elle, Sofa, invente des jeux-

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concours qui égayent plus quelqu’une comme ma bambine déjà
barbée et obsédée de nouveau tome, le plus prisé, de Harry Potter
dont le début global est imminent. Cette guide de Hongkong nous
assure des prix bien dignes d’être « décernés » à ceux les plus
informés et plus attentifs. Je crois que seulement ma fillette serait
si férue de lui en rafler et j’ai lu un bulletin électronique chez un
blackberry de l’autre passager (le mien reste à HongKong) sur des
actualités, surtout avec une dépêche du début du Tour de France
dont les scandales de drogues pourrait encore le tourner en Tour de
farce.
Nous nous radinons au restaurant sur coin d’un vieux
bâtiment paré d’un décor ersatz oriental qui veut ces motifs affreux
de dragons et phénix auxquels je tressaille comme habitude et
contre lesquels je déplore aussi comme habitude. Assez caricatures
ont été faites de nous, asiatiques, dans ces navets de Hollywood de
nous souffrions plus de l’indignité ici en Croatie. Je compte le repas
d’être mauvais mais voire la plus pire de mon expectation est
excédée. Dressent ces Croates une espèce de canard dérobé de
chair et épais de préau ? Goûtent-ils avec jouissance et délice une
soupe qui ne contient qu’un œuf et deux grumeaux de tomates ?
Dévorent-ils un tas de laitue bouillie à la consistance de
pâtée ? Mangent-ils de riz réchauffé par micro-onde, se rendrant
ainsi une forme de la fécule qui colle au palais et qui pourrait bien
amidonne le col d’une chemise ? Grignotent-ils des cacahuètes
rassises ? Acceptent-ils une serveuse qui aboie à nous en mandarin
brusque simplement parce que nous lui demandons un thé chaud
plutôt que tiède comme de rigueur pour nous, les Asiatiques, soit
Chinois, Japonais, Coréens, Vietnamiens ? Nous qui avons
déboursé à la prime, méritons-nous un service, sinon gracieux,
moins rude. Quel soulagement je ressens d’échapper l’oubliette
d’une gargote lugubre sur rez-de-chaussée après d’avoir été chié
mais puis les crottes sont aussi sur le gazon d’un parc où les
chiens courent dehors de laisse, certaines desquelles se finissent
sur ma semelle. Pas de peur. Je l’essuie sur tapis et perron du ledit
restaurant (photo 5) en revanche pour la même sorte de service.
Sofa, bien, elle se lance encore sur l’autre laïus et ainsi le supplice
continue.

Les lacs de Mozart

Nous paressons, nous, 18 touristes, laissant tout aux mains très


compétentes de Miros qui ne comprend pas d’un mot de cantonais
ni anglais mais qui conduit bien le bus en travers la foison qui
constitue sa Croatie, une cocagne abîmée par l’enfer de violence
durant les années de la guerre pour l’indépendance. Deux rangs
devant nous est Gigi, une jolie mijaurée et trop pomponnée, âgée de
jeune vingtaine, habituée de l’admiration masculine, sur miel de
lune avec Albert, qui est beaucoup plus aîné. Elle ne s’arrête pas à
se mirer en reflet de la vitre et son mari ne cesse pas de lui donner
des bisous et caresses. Il lui lorgne, il la flatte, il lui roucoule, et ils
se pelotonnent, oublieux au monde qui n’existe pas dans leurs
yeux. La vue d’eux sous l’emprise de ce qui passe pour l’amour est
gênante. Je ne souffre jamais ainsi de la toquade ni affolement de
l’autre qui j’avais perdu de contrôle de soi pour un moment, duquel
je remercie mon grand-père, Lloyd, avec son mépris de

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l’exubérance, la passion trop acharnée et évidente qui ne sied
personne. « Il ne sied personne de responsabilité à déchaîner ses
inhibitions, » fut son avis qui je prends encore au cœur. La fringale
n’est pas d’une partie de mon caractère et voire la velléité j’ai appris
de le masquer avec mon air d’insouciance sophistiquée.
Assez de la photographie pour le moment avec le paysage
tournoyant dans le bus en ébranle et cahots sur chaussées au
macadam tordues, craquées et défoncées. Je gaine mes attirails
photographiques et vidéo, sachant que l’on ne voit rien vraiment en
bornoyant d’un oculaire. La contrée projette une certaine familiarité
plutôt différente de l’ambiance exotique et enchantée de Tasmanie.
Certes la flore de la zone tempérée est routinière – d’ici et a
l’ailleurs ces vergers de pomme et poire, champs de tournesols, un
guéret et un rang de peupliers les séparants et bosquets d’orme,
ypréau, if, érable et ciguë, leurs feuilles toutes sont frémissantes et
bruissantes dans la brise montagneuse – aux yeux bien ajustés a
celle de l’Amérique du nord. Sur latitude septennale de 44 degrés,
le milieu est égal a celui de Vancouver, pas de Vancouver, la
Colombie britannique, mais Vancouver de l’état de Washington. Ce
qui m’ébahit n’est pas de l’abondance verdoyante mais plutôt des
ruines de maisons, leurs toits effondrés, murs écrasés, avec traces
de suie et pillage, testaments chacune à la violence de la guère
pour l’indépendance qui rageait de 1991 a 1996. Sont-ce les épaves
de résidences et de vies des Serbes boutées de leur terroir pour
accommoder et assouvir le nationalisme des Croates dont partisans
agitaient comme leurs prédécesseurs du régime d’Oustachi. Les
rapports des années 1990 citaient et condamnaient justement la
cruauté des milices serbes en Croatie et Bosnie Herzégovine mais
étaient généralement de motus envers celle des Croates contre les
Serbes et les musulmanes. Mais une histoire ainsi biaisée n’aide
plus à la réconciliation des Balkans et les futures générations
seront fautées de réfléchir sur le passé et percevoir les actions de
leurs aïeux en travers d’un prisme donc déformé.
Dans le vestibule de l’hôtel, là-bas de nous saluer, est un ours
brun, un animal ours bien mort et empaillé, en vitrine, d’une
férocité fausse, mascotte lui, de la région forestière. Yo-yo s’amuse
en moquant la bête et en rêvant des activités, qui est à dire des
cabrioles, puisqu’elle soit bien blasée du paysage. Ce qui éblouit un
adulte ne fait pas la moindre d’une impression sur un adolescent
qui ne veut pas être observateur passif, plutôt participant. Après
un parcours de quatre heures c’est déjà tard dans l’après-midi et
presque le moment des vêpres et chaque personne est éreintée de la
durée et des secousses en route de Zagreb. Durant la promenade à
bus le ciel s’est changé du plein azur de la capitale aux nuées
champêtres qui semblaient avoir déboulées des rochers escarpés.
La région de Plitvice est dans le bassin des falaises à chaux qui
piége des orages qui dérivent de l’Adriatique. L’air est maintenant
soudainement lourd et prégnant de tempête ; disparu sont le soleil
et sa chaleur ; le vent souffle en bourrasque, engendrant le son de
soufflets dans les bois mais ne pas déguisant le vacarme des
épeiches et cigales. Yo-yo inspecte notre chambre dont la terrasse
apparaît dans une forêt et choisit son lit avant dévalée au foyer en
cherche du restaurant puisqu’elle ait la faim et soif. La fringale
s’aggrave toujours quand on est sédentaire en bus. Ceci apparaît
bizarre puisqu’on doive supposer ces pincements sont produits des

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exercices les plus rigoureux. Enfin, après une attente dans un
restaurant qui ressemble plus à une cantine, dîner est servi, y
comprenant un bol de la soupe plutôt aqueuse de légumes, une
écuelle de salade principalement de tranches de tomate et la laitue
d’ubiquité toutes noyées dans huile d’olive, un plat de bifteck,
mince et sec, et un tas de frites. Yo-yo mange chaque morceau avec
délice, indifférente-elle au goût, et moi, je ne suis pas repu et veux,
comme Oliver Twist, protagoniste orphelin du roman par Charles
Dickens, aller à la cuisine avec une gamelle et demander : plus, si
vous plait, un peu plus. Je n’ai pas de peur de gloutonnerie après
d’avoir entendre Sofa nous assurer que ce voyage soit dur et donc
provoque la freinte, mais fait ou fiction ?
On entend bien dans les bois. Il y avait brièvement la pluie. J’ai
écouté ces gouttes crépitantes contre les vitres durant la nuit
lorsque ma femme et ma gamine pionçant comme deux bûches.
C’est toujours dur de roupiller sur la literie hôtelière, bien pour
moi. J’étais assoupi mais mon cerveau était trop alerte aux sons
qui brisaient le silence sauvage. Fermant mes yeux, j’ai réfléchi sur
mes expéditions sous le velum du ciel quand camping était ma voie
d’échappe au soin de la nature et de l’oppression et les querelles
domestiques. Je suis toujours citadin et pourtant je convoite autant
les forêts qui abondent partout à la bordure de Vancouver.
Beaucoup de mes vacances estivales en jeunesse étaient ainsi
passées dans l’accolade des senteurs de sapins et des vents
nocturnes qui descendaient des pics, débusquaient la chaleur du
jour et éclairaient ma tête de ses tracas quotidiens, bien comme en
Croatie dehors l’orbite urbaine. Ces fuites étaient ma forme de
thérapie. Rien mais rien surpasse jamais la sensation d’être content
dans la pleine tranquillité. Je chérais le feeling de calme de la nuit
dernière et je réalisais qu’il soit un présage pour le matin à venir.
Lisant une page téléchargée de l’Internet avant le voyage sur
l’histoire des Balkans dans la lumière faible de la veilleuse, cette
place semblait soudainement plus vivante. C’était exactement
comme ça, la puissance de l’imagination avivée, quand mes potes et
moi palabrions autour le feu de camp, croisant que nous,
adolescents, avions dans nos étreintes toutes des solutions à tous
des problèmes mondiaux. La candeur était notre style alors. On
n’effleurait pas tout et on exsudait la conviction, la conviction née
de l’idéalisme et également de la naïveté. Etant jeune, on savourait
bien l’audace à croire et à vouloir sauver l’humanité de ses folies.
Les noms exacts de mes copains sont tombés dans l’oubli
maintenant faute de changements à la vie mais jamais est ce sens
de camaraderie, un sens vaporisé. J’ai attendu l’aube.
Le but de notre balade matinale quand les rosées de la nuit
collent encore aux feuilles et pétales est un chapelet de lacs
desquels les Canadiens narguent comme des flaques. Mais encore
ces lacs de Plitvice sont un trésor domanial de Croatie pour
lesquels ses soldats saignaient terriblement durant la lutte dans les
années 1990. La vue qui nous (photo 6) salue pendant notre
descente à l’arrêt de bus de tour est féerique. Je me demande s’il y
a des oréades dans ces aires loin de la civilisation et je tâte mon sac
pour sentir la présence de mon Olympus. Le parc, qui contient les
lacs et leur série de 92 cascades et un réseau de ruisseaux
culminants à la rivière Korana, se mesure d’une superficie de 295
kilomètres couverte des arbres à l’instar des hêtres et pins nains

9
des planques parfaites pour la faune. Le paysage est une émerveille
de géographie et de géologie, de couleurs vertes, perses, glauques et
turquoises et une véritable nappe de minéraux karstiques
constamment lavés, sculptés, corrodés, ponctués et transformés
par l’eau. La zone abrite beaucoup des animaux sauvages et
menacés dans le reste du pays mais d’ici ils gagnent et prospèrent
de l’interdit contre la chasse. La guide nous dit qu’il y a des ours,
loutres, loups et daims qui sont trop timides et trop malins de faire
leur apparence dans la pleine lumière du jour. Yo-yo, souriante
après le plein petit déjeuner, mangeant des jambons fameux dans
la région, est plus férue que le reste à échapper à l’ennui de la
compagnie des adultes et entrer à la nature, sachant ses jambes
son fortes et qu’elle ne s’essouffle de la randonnée. C’est bon voir
comment une adolescente s’apprête avidement voire lorsqu’elle ne
s’attable avec aucun sens de décorum. Elle est, si naïve et niaise
d’une sorte, aussi l’incarnation de spontanéité qui nous anime et
nous avive au regret de l’innocence nous avions perdue pour
conformer aux règles sociales, règles étouffantes. Les autres ont le
choix de prendre un train panoramique pour traverser l’aire la plus
magnifique mais tous, y compris deux couples plus âgés et la paire
incessante de se bécoter, préfèrent le défi d’une promenade à pied
sur piste aménagée de planches de quatre kilomètres et un
parcours lent et élégant en bateau sur le grand lac puisque le
temps est beau et l’appel des bois est fort.
La guide locale Maria, un sosie de Sofa en taille, nous explique
en route à l’embarquement que la formation des dépôts de chaux
est due aux fontes graduelles des roches dolomitiques qui
blanchissent les falaises et escarpes et dissolvent le calcaire. Le
débit des courants est assez lent pour faire survenir
l’accumulation. Ce qui demeure du procès sont des « barrières de
travertin et des cavernes » en travers desquelles portions des
cascades percent, leur eau bien filtrée, fraîche. La lecture
m’intéresse plus qu’Esther et Yo-yo. Le groupe s’écartèle, bon
débarras, surtout quand un con en particulier aime trop attiger, et
bientôt nous, les trois, nous écartons sur notre fouille
indépendante sans atermoyer pour des traînards grevés de leurs
fourbis de photographie et, oui, pébrocs dans le rôle de parasols à
bougeotte. Sofa accourt pour nous rejoindre. Mais nous sommes
bien et déjà ennuyés de ses bobards desquels elle ne cesse pas
d’affabuler, les contes qui contredisent des détails des brochures
touristiques distribuées à la sauvette dans le foyer de l’hôtel et des
bouches de Maria dont la grosseur démentit sa prestesse de gazelle
en bondissant d’un pas à l’autre sur sandales élevées et une paire
de falzar trop étroit, faisant boudiner ses lignes généreuses, surtout
sa croupe, qui gigotèrent avec son mouvement rythmique. Son
agilité nous encourage à marcher au rebord des lacs contre lequel
l’eau douce, transparente, clapote en exposant des bancs de
poissons (ombles et truites), si proches qu’ils semblent traquer nos
ombres chipoter à nos ongles (photo 7). D’ici l’eau s’avère presque
de s’affleure aux sentiers et aux orées qu’elle y menace de
l’inondation régulière.
Ces lacs ne sont pas qu’un réseau d’étangs et une kyrielle de
rapides qui les lient comme échelons d’une échelle, chacun dans
son tour leur extrayant une couche de minéraux. J’aime
particulièrement leurs petites chutes, certaines d’elles ne pas plus

10
que des dégoulinades en juillet, un temps sec, qui éclaboussent sur
roches et mottes alluviales et en engendrent des brumes qui font
féerique le milieu, créent ces arcs-en-ciel et aspergent la terre en
travers de laquelle Yo-yo patauge. Je découvre en cours un
nouveau mot, plus précisément, une nouvelle (à moi) science, cela-
bas de limnologie qui est l’étude des fanges et marais, maintenant
en abondance, ressemblantes en essence aux marigots dans la zone
rurale de Hongkong. La verdure des végétations et de l’eau domine,
sinon aussi enivre. Ces vues sont une aubaine pour mes appareils
photographiques mais ce qui m’émeut également est la symphonie
des sons générés de la coulée qui bonde les sens. Je savais
longtemps que l’eau était comme des doigts au piano puisque la
vasque d’une fontaine retentit mélodieusement mais c’est
seulement d’ici qu’on écoute la pleine tessiture, chaque gouille (mot
suisse, cela) comme un diapason. Ces sons varient pourtant encore
d’une saison à l’autre, affectés par la fonte printanière, la neige
hivernale et le tarissement estival et automnal. Puis la musicalité
est brisée d’une distance lorsqu’une mignonne fillette âgée de six ou
sept, main en main avec sa sœur encore en layette, glatit à la vue,
je crois, d’un serpent, pas venimeux, une couleuvre peut-être, se
prélassant sur une branche sous le soleil. Un silence perdu y
revient d’emblée, une nature (photos 8 et 9) coite exceptée à
l’orchestration d’eau. J’entends toujours cette constante sérénade
jusqu’elle point à la réalisation d’une familiarité musicale. C’est la
symphonie no. 40 de Wolfgang Mozart qui résonne, provoquant en
moi la conviction que Mozart, ce gars de Salzburg, une ville
d’autours 400 kilomètres d’ici, écouta ces sons des futaies natives
et fut sous leur emprise, leur force majestueuse, une influence
manifeste maintenant dans ses compositions auxquelles ma
réponse est viscérale, spontanée et irrépressible.
En route donc on rencontre un édicule à la mémoire d’un héros
politique croate dont la plaque d’airain invite à la touche qui y
laisse une patine dorée contre laquelle beaucoup se posent pour les
prises photographiques maintenant attrapées avec l’abandon rendu
possible à cause de la technologie numérique. Le jour est idyllique
vraiment pour les cameras et appareils. On ne pourrait pas blâmer
la ruée vers la position avantageuse des amateurs de photographie
et leurs sujets et on n’aurait que le seul regret qu’on y arrivera en
octobre quand les fanes rougissent le paysage afin d’approfondir le
contraste entre les forets et les lacs, le ciel aussi. Je me promets de
surfer des sites sur Internet pour recueillir des images d’automne
de cet endroit enchanté afin de remplir mon imagination de la
magnificence qui règne sûrement dans le parc tel intrinsèque à
l’héritage croate et pour lequel ses soldats saignaient. Pour moi, ce
domaine est des vues paradisiaques et de Mozart dont la musique
fut aussi divinement inspirée. Mais puis le contentement s’effondre
lorsqu’on voit l’approche d’une cohue de touristes, vociférateurs la
majorité d’eux, se clamant dans un Babel de langues, basculant la
piste de planques et causant les poissons de se fuir, laissant donc
ces sillons sur eau ridée.
Enfin on parvient après une heure et demie de promenade aux
abatis et au grand lac d’où le groupe, une fois séparé et dévié, se
réunit pour embarquer au môle un ferry, vraiment une gabarre
convertie (photo 10), pour y traverser à l’autre verge. D’ici la forêt
est disturbée, un taillis de pines avec leurs buts alargués, le

11
détritus desquels, les picots, servent comme bûches. Le parcours
est lent sur lac ponctué de deux îlots. Arrivant en 28 minutes, on
voit un vaste gazon en pente douce qui se mène à l’eau. Il y a dans
cette chalandise plusieurs étals, un café et un restaurant avec une
cuisine exposée aux éléments. Une volute monte et le craquement
de braise est étendu. Un chef et son marmiton braisent plusieurs
de longues broches empalées de poulardes déjà roussies, l’arôme de
laquelle adoucit l’air et m’aguiche, aiguisant bien un appétit ravivé
des exercices. Yo-yo va à la crémerie glacée sur charrette pour sa
collation bien méritée et, moi, je me refournis d’une large bouteille
d’eau. Ces entreprises râtèlent beaucoup d’argent d’une clientèle
captive, fatiguée, assoiffée et affamée. La pause de récupération ne
dure que 22 minutes précises avant on reprend la marche, cette
fois envers l’étiage et la plus longue chute (photo 11) qui ne m’épate
puisqu’elle ne mesure qu’a une dégoulinade juxtaposée à celles-là
de Niagara, le drain pour les Grands lacs. « La crue en printemps
gonflera d’autant plus ces cascades, » énonce-t-elle, Maria. Puis
l’aventure se termine d’un point d’avantage où les visiteurs se
ressemblent, plusieurs d’eux s’essoufflent après la montée, montée,
pas de grimpée, dont milieu incluant une troupe de lascars
téméraires, bruyants, en tenue sportive d’Adidas. Heureusement
une ribambelle d’enfants se comporte avec plus de grâce. Se garent
ces cars dans une ligne qui apparaît les abouter. Ce qui coule n’est
pas juste de l’eau mais aussi de l’heure.
Nous prenons notre déjeuner en plein air (alfrasco) dehors le
parc dans un restaurant avec une terrasse drapée des vignes
vierges et nattes de fleurs (photo 12), lilas, coquelicots et lis, toutes
fleurissantes en luxuriance. Le plat du jour est porc rôti, un repas
favori dans la région, accompagne de la salade de tomate, olive et
laitue, une soupe de lentilles et pois et finalement une desserte
commune – une grande tanche de pastèque mise sur plateau. Ma
portion est du jarret, une délicatesse à moins pour les Allemands.
Nous commençons de festoyer et d’étancher notre soif avec boites
de l’eau, encore plus de l’eau douce, minérale gazeuse plutôt que le
vin qui est moins cher. Certains de nous relâchons en vidant nos
vessies dans une toilette qui ne nous coûte pas d’un kruna et
encore des autres cherchent leurs butins de photos sur leurs
appareils encore sanglés aux épaules du parc. Je n’arrete pas de
remercier ces génies en ayant inventé la photographie moderne qui
me peut le luxe de capter ces images sans effroi d’une disette de
pellicules. Ma gamine criaille, avec regard de dégoût, à l’essaim de
mouches qui plane sur son pain tartiné mais ne pas goûté et essaie
d’écraser une coccinelle qui atterrit sur écorce de pastèque, la
moitie de laquelle mangée. Esther feuillette son livre de tourisme en
chinois classique duquel elle a plus de confiance que celui en
anglais puisque l’écrivain hongkongais comprenne plus de ses
préférences, surtout dans les bibelots. Personne ne semble pas
avoir besoin de s’échiner dans cette zone d’aisance et abondance
relative, relative qu’est à la contrée qui nous sommes tôt de
parcourir, nous avertit Sofa, regardant l’horizon envers l’ouest
dehors ces champs et bocages alimentées des pluies et terre fertile
des vallons. Je me prépare de témoigner aux vues des masures qui
sûrement ne sont pas plus miteuses que des galetas couverts de
tôle ondulée à Soweto, des lotissements délabrés dans les banlieues
nord de Paris ou des baraques en réservations aborigènes en

12
Saskatchewan. Ainsi avec appréhension, nous, repus, estomacs
remplis, gravissons à bord notre bus conduit bien par Miros, notre
chauffeur timonier, en route au littoral dalmatien et en travers des
andains rasés, ravagés durant la guerre. On ne apparaît pas être su
ni certain du bilan de morts de la violence dans les années 1990.
Les figures semblent gonflées quand elles parviennent de 500 000,
la moitie des victimes en Bosnie Herzégovine rendue notoire par des
massacres, bombardements et inanition. Les noms de Sarajevo et
Srebrenica sont toujours hantés par mémoires de l’inhumanité et
ils riment avec cruauté comme, bien, Guernica, Dresde, Hanoi,
Hiroshima, Halabja, Cracovie, Nanjing, Babiyar, Sabra et Chetilla,
Fallujah. Compter les victimes est aussi reconnaître que certaines
d’elles ne sont pas nées, pas accouchées, bébés déniés voire une
chance de voir leur première lumière du jour. Le cœur s’alourdit
avec ces pensées moroses et ainsi j’en bloque de ma tête et me
concentrer sur les vues. La route sinueuse comme une anguille se
fraye. La température monte sans soulagement lorsque le véhicule
se dirige des montagnes jonchées des pierrailles et coupées des
gorges avec nuées de poussière arrière de lui, lentement, sûrement,
elle arrive, elle, la garrigue. Je peux déjà halener des brises les
pignes de pinastres et les olives qui grandirent en profusion
sauvage entre galets et rochers comme je louche contre la brillance
du soleil méditerranéen.

La route à la station balnéaire et au cœur historique, tragique

Esther tente de m’enduire avec lotion d’élastine ou pommade d’une


sorte, disant comment ma peau est tournée en écailles parce que de
la sécheresse à laquelle je rechigne, toujours m’énervent aux
cosmétiques. Yo-yo nous demande de lui donner une bouteille de
l’huile de carotte pour accentuer son hâle parce que son teint trop
blanc ne bronze bien pas car c’est comme routine pour ses
contemporaines de porter un tan perpétuel, cependant artificiel.
Elles veulent avoir le regard d’une gaupe, la tenue des chanteuses
pepées, Beyoncé Knowles et Christina Aguilera, qui abaissent la
culture pop. Mais ma fille est branchée, moi démodée, et le gouffre
entre nos générations s’accroît inexorablement. Esther examine une
flasque bien liégée, dont teneur est une substance aromatique, une
babiole pour sa collection sur nos étagères et vitrines comblées des
camelotes garnies de ses voyages. Elle se vétille facilement comme
ça qui m’aide préserver ma solitude. Mes yeux sont rivetés
pratiquement sans cligner au paysage de misère alors que ma
famille essaie de me distraire. Je me souviens : Quelqu’un s’est
plaint comment cher est le loyer voire pour une turne à Zagreb car
le pays (ou la ville) s’éprouve l’essor économique plus qu’une
décennie après l’indépendance et comment famille ne peut pas
survivre sur un seul salaire. La cherté est souvent un indice de
prospérité et déflation celui-la de misère. Mais clairement la fortune
ne percole pas, pourtant, aux villages désolés qui nous saluent
durant la virée envers la mer où les Européens riches gambadent,
privilégiant d’un taux de l’échange très avantagé à cause de la crue
de leurs euros. On voit plus que les pignons et haies en dilapidation
mais entières maisons délaissées, certes certaines d’elles comme
séquelle au conflit et encore d’autres de la pauvreté rurale qui
accule leurs habitants, les campagnards destitués, aux villes en

13
cherche de boulots. Il existe plus qu’une faille géologique d’entre
l’intérieur fertile, le rivage d’abondance en monnaie touristique et la
terre qui les coince, plutôt aussi celle sociale et matérielle. De plus
en plus du groupe se glisse au sommeil de sieste mais pas moi car
rien ne peut m’empêcher de l’observation du paysage qui se déroule
et qui m’assène avec un sens de curiosité si forte.
Le bus visant envers la mer de promesse des ébats entre un
village d’où la route vire abruptement. Les passagers courent pour
les toilettes et la buvette au seul hôtel. Je gribouille des notes sur
mon PDA (ordinateur mini) lorsque moi, je réfléchis sur l’abondance
de nouveaux tombeaux de marbre noir dans ces petits cimetières
en tribut aux martyres de la campagne et des reliques de chars,
douilles, obusiers et tertres sur prairie d’un terrain fait parfait pour
les batailles. D’ici l’on peut bien imaginer les mânes dans le vent.
La guerre est officiellement finie en 1996 et pourtant ses fantômes
ne cessent pas de hanter et de peiner. On voit aussi ces fiches du
leader nationaliste Franjo Tudjman, maintenant défunt, lui-même
(accusations réfutées) un prôneur et pratiqueur de la purge
ethnique des Serbes résidents en Croatie et d’autrui, les généraux
et partisans, lui-même aussi un autoritaire qui muselait ses
détracteurs (accusations ne pas déniées). La hantise semble être la
perpétuation des mythes en gloire et gore de la croisade pour
l’indépendance, une tendance qui aboutit à la croyance dans la
cause juste et sacrée d’une nation pure, malgré ces crimes contre
l’humanité ici, en Croatie, et dans l’état voisiner de Bosnie
Herzégovine. Je déteste, moi, le cru nationalisme, le laird
chauvinisme, qui fracture un pays, la Yougoslavie, quand l’entière
union aurait pu s’intégrer au sein de Europe sans la perte de sang
et la gaine de rancune. C’est digne de répéter l’avis des sensibles
que la fidélité aveugle envers une patrie ne compte qu’au « refuge
des canailles » ou pire. Beaucoup de violence est le résultat des
meneurs, menteurs, crapules, démagogues qui attisent leurs
compatriotes crédules à la frénésie sans frein. L’évidence du grief
abonde partout aux Balkans. C’est ici que l’épopée, de laquelle je
lis, vive pour moi dans toutes de ses horreurs et heurts.
En route encore, j’entends Sofa réciter l’histoire des Balkans
mais beaucoup de sa narration est fausse. Esther me prévient de la
corriger, surtout sur l’origine exacte de la Première guerre mondiale
dont l’éclat fut le double assassinat de l’archiduc François
Ferdinand et sa femme Sophie Chotek à Sarajevo en Bosnie
Herzégovine le 28 juin 1914. On ne clapit pas publiquement et
n’embarrasse d’autres est le comportement désiré dans sa culture.
Mais moi, je suis plus impétueux, un cabot et cuistre dans les yeux
d’une femme plus gentille. Elle ne veut jamais froisser l’autre et la
quiétude dans la face de torts est d’or. Pour apaiser mon épouse, je
reste muet et graduellement sourd. Nous sommes maintenant
proche au site de l’incident qui incita une série de séquelles et
causa un carnage européen dont les réverbérations, erreurs,
bousillages et folies ne cessent pas jusqu’à ce moment aux Balkans
où les mémoires sont éléphantines et la haine est profonde. Les
plaies sont pansées, oui, mais leurs cicatrices refusent de guérir
totalement. Je partage le sentiment du sage Mahatma Gandhi
qu’un œil pour un œil, une dent pour une dent, n’atteint rien
excepté en rendant le monde borgne et édenté. Alors que lésé, on
n’oublie jamais les douleurs mais pourtant on pardonne ceux

14
inculpés si seulement à dresser les poids du passé qui grève le
cerveau, le cœur.
Dehors la fenêtre du car parqué deux efflanqués garçons sur
vélos trop grands pour leurs tailles passent, riants, oublieux aux
visiteurs asiatiques, contents dans leur milieu privé. Un galeux
clebs est dans leur sillon, sa langue ballante. Un vieux, un journal
dans sa main, boite envers une banquette dans l’ombre d’un ancien
chêne sous laquelle s’asseyent deux de ses potes, visages burinées,
fumants leurs cigarettes, près une pizzeria qui indique l’influence
italienne forte. Au parvis une paire de femmes, brunettes, sveltes,
cheveux en chignons et robes de coton gris fané, tenantes de cabas,
déambulent et jasent mais arrêtent de lire, gloussantes maintenant,
une affiche punaisée au bulletin sur un mur. Ce qui est absente est
la présence de jeunes hommes. Espionnant, contemplant la scène,
nous sommes intrus qui ne déboursent que peu de kruna de notre
passage. Ils semblent aussi trop fiers de nous dorloter, nous, les
citadins, avec nos habitudes étrangères et ils nous laissent ainsi à
ceux, leurs confrères, des zones touristiques. Les gens d’ici
s’enorgueillissent dans leur stoïcisme et font vertu de leur
indépendance dans leurs voies de vie un longtemps avant leur
nation l’avait achevée en fait par force d’armes.
A la virée finale du chemin, l’Adriatique apparaît en pleine
gloire d’azur, le ciel clair et la mer calme semblent presque
conjoints, et déjà l’heure de vêpres est arrivée malgré la brillance
du soleil dont reflets font rutiler tout, soit plantes, soit pistes. Je
peux flairer encore les embruns marins et la saumure, ne pas,
pourtant, les goémons, les détritus desquels jonchent ces plages de
galets, et je me trouve nostalgique pour les calanques de la
Colombie britannique et celles aussi de la Californie où ces forêts
de fucus donnent aux loutres en repos leur amarrage des ressacs et
des vagues orageuses et aussi aux otaries et phoques folâtres leurs
abris des requins. On contemple bien la nature du point
d’avantage, attrapant ces vues et les juxtaposant à celles préservées
en souvenir des autres lieux et temps, oui, bien jadis. Pourquoi, je
me demande, on n’accepte guère la beauté d’un endroit dans sa
valeur d’unique et on n’évite pas la tendance à conjecturer des
comparaisons injustes afin que réaffirmer la supériorité « avérée »
d’une contrée qui reste la première, le suprême dans son affection.
Est-il Mark Twain qui observa comment, et je paraphrase, on
n’apprécie assez de sa patrie jusqu’on se prenne aux vacances
étrangères ? Sinon lui, bien c’était sûrement moi qui l’avais exprimé
à mon jeun cousin, Calvin, dépaysé après un mois en Asie, son
initial voyage outre-mer. Je ne dois pas divaguer trop pour
m’épargner du style de Bernard-Henri Lévy, l’Alexis de Tocqueville
moderne, qui aime tramer de plus en plus fils au texte et me
focaliser encore sur l’escale prochaine.
La station balnéaire de Makarska est confinée par la mer sur
une côte et les montagnes l'autre. On peut la décrire comme une
bourgade au palier d'une énorme escarpe au granit avec des
éboulis encore présents. Etant donc encadrée, elle attrape la
chaleur qui est devenue infernale en juillet, voire dans le soir,
quand le vent ne remue guère, quand les feuilles ne frémissent
plus. Sofa nous assure que les touristes y aillent presque par
défaut en route au fort de Dubrovnik pour un peu de récupération
après le long cabotage. Dans l’horizon on regarde le coucher du

15
soleil arrière plusieurs d’une mille d’îles qui lignent la rive
dalmatienne dentelée et qui bloquent les brises de l’ouest, une aire
déchiquetée par la glaciation durant ces époques périodiques de
gel, la plus récente fut il y a dix milles d’années, vraiment naguère
en termes géologiques. C’est difficile de l’imaginer, les banquises au
moment lorsque le débat est sur le degré du réchauffement
planétaire et lorsque la température courante monte à 35 à
l’ombre. Miros navigue le bus en travers ces étroites rues, certaines
d’elles sont allées, et les véhicules parqués au gré de leurs
chauffeurs dont respect aux règles de trafic est pratiquement
italien.
L’hôtel est construit avec chaque pièce commandante une vue
de la mer et les étages s’entassent au mode de pyramide qui
ressemble à celui typique au Waikiki, Honolulu. L’humilité
maritime et la canicule persistante ensembles exacerbent l’air
étouffant dans la chambre, nous contraignants y quitter pour la
brise de l’esplanade (photos 13, 14 et 15) arborée de palmes afin
que projeter l’ambiance tropique quoique la latitude soit d’autours
42 à 43 degrés pareils à celle à Boston. Nous, Esther, Yo-yo et moi,
flânons sur grève envers le sud et remarquons comment la zone des
étals de cafés, restaurants, bimbeloterie et brimborions gouille à la
montée de la lune et aux sons de cigales – et aussi de la musique,
invariablement américaine pop et jazz, des tavernes qui encourage
des bougres au congé de faire des bringues et des gringues dans
l’humeur grivoise. Dans cette façon Makarska est un modèle mais
plus modique d’Oahu. J’entends Frank Sinatra gazouiller à
crooner: « Fly me to the moon and let me play among the stars»;
Tony Bennett chantonner: « I left my heart in San Francisco, high
upon a hill, it calls to me », et Mick Jagger beugler à rocker: « I told
you once and I told you twice, it’s got to be the last time, baby,
maybe it’s the last time, I don’t know; oh no. » Nous faisons halte
où l’esplanade se termine aux points des roches qui bornent les
limites de la station et qui situe une jetée et reversons la cours afin
de prendre notre dîner au buffet dans le restaurant de l’hôtel
auquel l’alimentation est abondante mais ne pas toujours
délectable.
Apres un médiocre repas chez hôtel, nous reprenons notre
« arpentage » de Makarska au crépuscule (photo 16) pour fouiller
ces ébats nocturnes mais cette fois dans l’autre direction envers le
nord de la promenade. Je hume les senteurs de pizza et de fruits de
mer frits en huile d’olive – encornets, blanchailles et praires – touts
sont les délicatesses régionales desquelles je suis friand. L’air se
rafraîchit et les brises tournent en vent, faisant bruire les feuilles et
frondes. Je vais rapidement en longue foulée. Esther et Yo-yo se
luttent pour maintenir le pas. Ma femme piaille et ma fille râle
jusque je ralentisse. Elles saisissent mes mains, Esther timide
comme une musaraigne et Yo-yo savourant simplement le sens
d’assurance du contact. Nous arrivons de nous accouer d’une sorte
en passants un rang de restaurants et bars vibrants d’un vacarme.
C’est vendredi et les fêtards réjouissent, certains d’eux déjà saouls
ou pompettes, chantants ensembles, regardants un grand écran
sur lequel un matche de boxe est télévisé, amusants avec boutades
dans le Babel de langues, croate, allemand, italien, anglais. Il y a
une imbrication ou embrouillage de parties puisque les invités
semblent glisser d’une à l’autre en apportant leurs chopes ou

16
bouteilles de bière et puisque les locaux ne respectent pas de
bornes. Un noceur peut facilement essuyer chacun des
établissements sur cette promenade à l’aube quand il se dégrise
sans conscience des endroits il ait ou aurait pu visiter.
Pas une goutte d’alcool ne touche mes lèvres quoique la
senteur d’elle envahisse bien mes narines. Je m’égaie et m’éberlue
déjà assez simplement étant l’observateur toujours détaché et
sobre, moi amateur anthropologiste des tribus européennes qui se
ressemblent ici sur littoral dalmatien. Un couple se querelle en
italien ? Je ne peux pas comprendre pas d’un mot de leur brouille
mais la paire se fait d’un guignol, un acte de comédie impromptu.
Dans la distance encore sous la lumière de la lune, un voilier
commence à se dégréer, pliant son spinnaker. Ma gosse est attirée
à un magasin en plein air comme un blaireau est au miel. Esther la
rejoint là-bas. Les deux y quittent bredouilles. Je suis
soudainement seul encore avec mes pensées qui dérivent loin de
Makarska et envers Hobart en Tasmanie, Australie, dont l’ancien
quai de Salamanca est converti aussi à une zone de chalandise et
de jouissance, ses vielles raisons d’être commerciales éculées. Ces
contemplations ne sont qu’une brisure et tôt le bruit m’emmène à
la réalité. Nous avons marchés deux kilomètres puisque notre dîner
et donc nous chaloupons pour parvenir l’hôtel pour un repos
critique car demain verra nous nous diriger pour Dubrovnik, le
plus renommé des fortins dalmatiens et le prétendu Venise des
Balkans. La visite sera un délice mais je ne souhaite pas de me
cotiser avec ma coterie de voyageurs. Si l’on dit que je suis roque, il
serait ainsi et sans pardons. En route à l’hôtel, j’écoute encore ces
sérénades américaines, Billy Joël, « Uptown Girl » (comme l’une qui
je m’étais mari) et « Somewhere Beyond the Sea » par Harry
Connick Jr., la sienne est une reddition d’une chanson française de
Charles Trenent appelée simplement « La mer », une mélodie
évocatrice, légère, pourtant hantée et imbues de mémoires,
quelques mélancoliques, pour moi. Au moment, voilà, je suis
pesanteur, solennel, et je convoite plus de l’autre type de musique,
celle-ci de guinguette d’antan quand les femmes furent grimées
plus discrètement, donc plus envoûtantes, et s’accoutrèrent des
vêtements moins affriolants, quand la séduction fut plus coquette,
plus d’une forme d’art et moins comme ceci, de provocation, sinon
prostitution. A l’entrée à notre destination, juste de hors du foyer,
nous, Yo-yo et moi, nous déchaussons pour cabrioler sur la plage
(photo 17) mais une telle étendue couverte pas de sable, plutôt
juste de caillasse, n’y emprunte bien ces gambades. J’apitoie encore
ces touristes européens qui doivent se contenter, en se vautrant,
aux littoraux sans la plage d’argile. Beaucoup des gens de ce
continent oublient tout quand ils s’égayent et s’égarent avec leurs
ribotes interminables et bien leurs « ménades ». Nous, les
Asiatiques, en évitons généralement et, face aux buveurs robustes,
nous ne sommes que badauds. Nos péchés sont plus inclinés
envers les paris, les jeux de chance, nous, bien, excepté les
hommes d’affaires et cadres en Chine et au Japon qui grenouillent
pour faciliter leur business ou se pistonner. A l’insistance de notre
maîtresse de tâche, notre sergent-chef, Esther, nous abandonnons
la nuit de Makarska à ceux sans besoin de sursis ni rêves afin que
s’engagent aux bacchanales du week-end. Je ne les aimais jamais
en jeunesse mais quant à ma fille dans l’avenir, on ne peut pas être

17
certain. Durant la nuit, après une douche, j’entrouvris la contre-
porte en face de la mer dans l’effort d’entendre les rythmes des
vagues seulement l’avoir fermé par ma femme qui préfère, elle, l’air
frigidaire et la sécurité de l’enclos complet. Une nuit sous les étoiles
la chamboulerait et donc il n’y aucune expérience de bivouac tout
naturel pour nous durant notre mariage, juste ces hôtels.

Tracer un sillon des conquéreurs, clowns et vauriens

Cette étendue de la route s’améliore avec chaque kilomètre conduit


envers la forteresse de Dubrovnik, grâce à la voirie et au revenu de
tourisme. Le trafic du matin monte comme le soleil. On voit plus de
camions et de roulottes, une mode de voyage plutôt plus américaine
de clichés qu’européenne du jour. Mais éventuellement ce qui va
sur la côte de l’Atlantique est émulé, si cela était le mot d’apte.
Beaucoup de véhicules arborent les insignes étrangers, allemands,
autrichiens, italiens et tchécoslovaques. Un des aimants chez
croate est le taux d’échange entièrement favorable aux euros et
l’autre serait la qualité des hôtels, nouveaux ou bien aménagés en
contraste aux bouges aux coûtes exorbitants ailleurs en Europe
censément plus développée. Je crois que cette fraude d’être un
outrage ; et ces visiteurs, dans leur ruée en Croatie des surcharges
et aussi des pluies des pays riches européens, partageraient mon
sentiment. Leur joie durant l’échappe est manifeste dans leurs
sourires et saluts à nous quand ils nous entrevoient aller dans la
même direction et pour le même but. J’adore cet esprit de corps
routier qui, cependant, s’évapore souvent quand nos pieds sont sur
la terre mais alors il y ait une exception de laquelle je vais illustrer.
Mais pour accéder à la citadelle de Dubrovnik, on doit
traverser le chemin qui longue l’anse séparant le nord et le sud de
la côte dalmatienne croate. Ce coin est bosnien par vertu d’une
concession territoire afin que donne à cette république de majorité
musulmane. Ce petit morceau pris et prisé est le trophée d’une
lutte d’un pays pour un exutoire et est la concession plutôt
hésitante, pourtant généreuse, de Croatie qui accepte une coupure
de 22 kilomètres à la contiguïté de sa côte. Les politiques
balkanisées sont compliquées. Il faut suffire à dire qu’une pauvre
nation frappée par une telle période de violence, comme Bosnie
Herzégovine, avec ces charniers qui attestent aux souffrances,
mérite un peu de dispense, d’avantage pour se restaurer. On y
entre sans soumettre aux contrôles d’immigration ni douane.
L’abandon de formalité accueillit les voyageurs et, également
importante, leurs euros et kruna, une source de revenu requis pour
une économique étripée, bosnienne, qui survit encore sur la
largesse internationale plus qu’une décennie après la fin officielle
de la guerre, une charité mondiale puisée trop longue, un appui
pratiquement drainé du surcroît en sinistres. La pensée de cela
fonce l’esprit et écœure l’âme; ainsi c’est nécessaire de contempler
d’autres sujets. Notre bus rejoint une queue au parking d’un café et
supermarché dont la terrasse commande un panorama d’une baie
qui devient le background pour nous, les visiteurs en passage.
Nous dévalons du carrosse avec impatience pour nous dégourdir.
C’est bon d’esquiver le confinement. Une famille française (homme,
sa femme et leur fille), avec laquelle je diverse si seulement de
surmonter la monotonie de cantonais et anglais, prend cette image

18
de nous (photo 18) en troc pour le même service de nous. Il n’y
aucune industrie ici sauf la conchyliculture, donc assurant la
pureté de l’eau et l’abondance des aculs. J’aurais resté pour un
goût des huiles, moules et clovisses si je n’avais pas de besoin de
maintenir notre itinéraire strict. Nous déboursons notre argent
contentement avec le sens que nos kruna puisse les aider, les
Bosniens, qui avaient bravé le long siège et enduré trop, avant,
durant et dès le conflit. Je ne souhaite pas m’embringuer dans la
politique de l’autre pays mais je ne m’arrete pas d’acclamer ces
musulmans européens qui peinent de retenir l’espoir dans le sens
de justice.
Le vent est du suroît qui indique la canicule s’empirera. On
notifie la canalisation romaine encore en usage. Ces génies de
l’antiquité érigèrent leur empire ne pas seulement sur remparts,
parapets, légionnaires et outils de guerre mais aussi sur l’aiguade
grâce au réseau élaboré de conduites. On peut encore étancher sa
soif aux fontaines et robinets qui ils construisirent ou inspirèrent.
Ce sont les émerveilles d’une époque dont l’emprise persiste encore
en défiance des temps écoulés et ce sont les achèvements qui, en
somme, rivalisent ceux affilés aux grandes murailles en Chine. Je
brave ceux qui croient comment le monde romain ne nous lègue
rien sauf des ruines. Ces littoraux méditerranéens demeurent
testaments aux ambitions et à l’efficacité du règne des césars
malgré leurs folies et excès. As-je tort de croire que l’empire
continue, ses traces et legs crochés aux toiles de modernité ? Les
témoins à ma théorie sont partout, regardez-vous à la fausse
grandeur des édifices, des monuments, au nouvel empire dont
coeur est Washington, DC, un andain de colonnes doriques, de
plinthes corinthiennes, de frontons néoclassiques et l’obélisque,
bien, romanesque. L’aiguille de ma montre touche l’heure de midi.
Nous sommes bien aux franges de Dubrovnik, un fort bâti en tribut
aux Romains qui demeure habité, un musée vivant. L’apparence
encore des toits d’ardoise rouge en abondance nous avertit des
banlieues au centre de notre intérêt. On entend un véritable ronron
d’excitation lorsque les photographes saisissent leurs appareils,
fignolent les cadrans et rajustent les sangles en anticipation. Ce qui
bouge aussi le tiraillement de l’estomac déjà vide, un estomac ne
pas rempli d’un piètre petit-déjeuner.
La forteresse beige surgit au fond d’une escarpe et est située
sur promontoire qui lui rend un air d’inviolabilité, clairement une
illusion comme son histoire faite cruelle preuve. Dans le soleil le
fortin chatoie et reflète aussi ces lueurs miroitantes de la mer d’un
azur qui nous éblouit, moins comme touristes et plus comme
pèlerins en recherche de magnificence. Dubrovnik se munit d’un
pont-bascule, une douve, maintenant sèche, sur la portion qui se
lie à la terre. Qu’était au lieu d’une écurie et une étable est la zone
de garer ? Les tourelles se détiennent à une haute position, très
formidable, parfaire pour marmiter le calvaire envahissant avec
huile chaude, décocher une fusillade de flèches et les lapider avec
ces pierres recueillies des plages. Ceux d’avoir été salués à la
citadelle y compris les sarrasins, l’armée d’Ottoman, les Français,
les Allemands et les Autrichiens qui découvrirent à leur chagrin que
cette pilule est facile de convoiter et difficile d’avaler. Ce fief, qui
une fois servir et protéger le trafic maritime commercial du Levant à
l’ouest, prospéra et périclita mais, comme le milieu romain, il ne

19
fane pas, ne pas totalement, endurant cycles de bons et mauvais
temps, oui, et survirant. Nous sommes frappés aussi ne pas par la
pluie de fusées ou charbons ardents plutôt par le paysage qui nous
appelle de lancer nos fourbis de photo et vidéo. De chacun des
angles émit une source d’un cliché (photo 18) par excellence ou un
métrage onirique. Nous captons des images qui en leur tour nous
captent. Sofa ne pause pas de nous seriner certaines faits (qui
s’avèrent inexacts) et les autres guides dans les autres groupes
bêtisent aussi, causants ensemble le barouf, joignants la grande
cacophonie, voilà un cercle touristique. C’est facile de se paumer
dans l’affreuse cohue compressée et désorientée à l’entrée sans
ombre de s’abriter du soleil. Je louche malgré portant mes lunettes
de Ray-band et une casquette de base-ball équipée d’une longue
visière puisque toutes des pointes de vue semblent estomper par
une buée d’évaporation. On reste initialement avec le groupe,
cependant gênant.
Quand on a la faim, sa cervelle ne fonctionne pas. Quelques-
uns sont perpétuellement affamés. Je sais que grâce à l’emploie
d’un écervelée qui m’abrutit avec ses fadaises et foutaises
incessantes, sa bouche de l’égout mental. Je bouffe au bureau et je
ne soigne quoi et quoi est souvent japonais. Nous sommes
cependant vraiment faméliques en entrant les portaux et nous
trouvant dans l’agora dominée au centre par une fontaine qui jaillit
un geyser d’eau ne pas seulement potable mais rafraîchissante. Yo-
yo asperge sa bouille, ses joues déjà rouges de la chaleur qui
n’arrête pas de monter. Enfin Sofa pause son babillage et s’emmène
au restaurant (photo 19) caché dans un couloir. Le décor est
basique, une sorte de réfectoire opéré par une famille qui offre à la
clientèle un service lénifiant et une cuisine délectable. Ma fille fait
un ordre spécial à la carte, une casserole de moules, pour
complémenter la soupe de légumes, une salade épaisse de romaine
et le plat du jour de calmars, sardines et crevettes toutes mitonnées
en l’huile d’olive, minces tranches de patate bouillie en sauce de
beurre et panais, et fèves mélangées avec pois qui elle engloutit trop
voracement, repentante et affirmant après chaque bouchée presque
sans mordre comment ceci doit être le repas plus délicieux dès le
commencement du voyage, une assertion de laquelle je ne dispute
pas.
Finalement une guide d’expert, Anna, nous rejoint pour narrer
sur l’histoire et des faits insolites du fort construit d’abord dans le
huitième siècle et subséquemment aménagé et augmenté par une
succession, ou d’être précis, un ménage de maîtres et conquéreurs,
chacun lui ajoutant ses touches d’excentricité, ainsi de touts une
mixture éclectique de l’architecture. Je l’aime, Anna, une vingtaine,
petite et potelée dans sa chemise blanche et pantalon brun, visage
encore joli, maintien d’un vieux professeur des classiques, riche en
diction et également en connaissance. Elle jouit autant sa
performance, et c’est vraiment cela, qu’elle tance des mouflets trop
bruyants dans leurs jeux à l’entrée d’un musée. Leurs parents
apparairent embarrassés par le rudoiement censément visé aux
enfants, sûrement justifié, et encore ils les conduisent du hall.
Parfois une haute voix et un regard courroucé sont requis pour,
sinon discipliner, effaroucher des mômes dans l’ère d’indulgence.
Le nom propre croate pour Dubrovnik est Raguse dont fut le phare
de l’identité du pays et la vénération de lui reste centrale aux

20
idéales nationales. Dans l’ombre de Venise, la ville acheva son
zénith, profitant des routes d’affaires qui connectaient l’Europe et
l’Ottoman et luttant souvent de préserver un équilibre précaire
d’une région inévitablement volatile parce que des forces rivales. Le
pactole des argents recueillis assura la sécurité plus que le navire
mais périodiquement le système de balance fut basculé, parfois
voire s’effondra, à cause des étrangers et des magouilles parmi
l’élite domestique. L’analogie est cela d’un galion (photo 20) qui
navigue bien quand tout est tranquille et chaque marin fait bon son
devoir mais qui tangue sous les rafales ou si les matelots se
chamaillent ou, pire, se mutinent. On voit dans le palais un rang de
portraits des recteurs (doges) qui régnèrent, rendrent mécénat aux
arts et furent élus, oui, élus, mais ne pas par une démocratie,
plutôt une plutocratie, un modèle pareil auquel à Hongkong, Venise
de cette époque. Anne, sonnante dégoûtée, bafoue ces peintures
comme répliques puisque les soldats de Napoléon Bonaparte y
eurent pillés, leurs butins maintenant dans les mains des Français.
[Ce thème de l’Empereur se comportant comme un caïd et ses
soldats comme truands se renouvellera durant ce voyage. La férule
française échoua encore de broyer l’échine de resistance chez
Dubrovnik et ailleurs qui sapa éventuellement l’esprit de la Grande
armée, résultante dans sa retraite et défaite voire avant son recul
de la Russe. ] Ces troupes qui eurent englobée et violée ce qu’elles
ne comprirent pas du monde, en écho des bidasses américains. Sa
lamentation résonne sur ces murs qui restent témoins aux ravages
de guerres, y compris le conflit en 1991 qui éventrait à nouveau
Dubrovnik et qui galvanisait ses habitants de le ressusciter en
efforts héroïques et herculéens, prouvant qu’un peuple soit a son
mieux quand la situation serait au nadir. Anna, chère Anna, a droit
d’être furax. Le vandalisme napoléonien fut étendu au point que
voire les carreaux sur lesquels on bouge eurent eu d’être remis
après les planchers et les tapis furent volés ensembles avec bien
sûr l’or, argent, bijoux et tels objets d’héritage. La dernière tuile,
sinon estocade, pour Dubrovnik, une trésaille remuée de la noue,
fut l’éviscération de sa seule raison d’être, cela de la viabilité
commerciale de la zone déjà éclipsée irréversiblement par les routes
maritimes trans-Atlantique plutôt que trans-Méditerranéen. Le
dernier glas des cloches de temps et d’obsolescence vint finalement
ne pas de violence plutôt de l’évolution naturelle qui fit s’encroûter
une mode de commerce trop dépendante sur sa géographie et le
caprice de politiques internationales. J’ai, moi, cette compulsion
soudaine de consoler Anne à lunettes en plein thrène contre les
injustices affligées à sa patrie. L’autrui de mon groupe veut
seulement la bannir pour reprendre leur photographie et entamer
leur promenade de trois kilomètres en circonférence (photos 21, 22
et 23) sous un soleil sans merci sur les remparts et parapets
cernant le fort, un lieu encore habité et choyé.
Hissant son ton, émanant une fierté incandescente, elle nous
raconte des voies du gouvernement façonnées sur celles-là à Venise
sur l’autre berge de l’Adriatique. A la cime de puissance, la
noblesse de marchands nomma une clique de conseillers qui eurent
déjà établis leurs statuts, compétence et autorité en gérant bien
leurs fortunes et, parmi eux, ils votèrent pour un recteur à la durée
d’une année. Le dirigeant, un de facto doge, fut puis installé et
confiné au palais, son cloître, pour quatre semaines afin qu’il se

21
concentra sur formation de lois pour délibération et résoudra telles
questions comme le budget et la taxation sans peur de l’influence
ni intimidation externe. Il manqua tout du contact social avec le
monde sauf pour cela de ses serveurs et sbires qui lui passèrent
des bribes de nouvelles et ragots. Cela quelqu’un eût pu se faufiler
arrière le barrière de sécurité nonobstant ou chaque telle brèche, le
système fonctionna, et il certainement élimina l’excès d’embrouilles
politiques, manigances personnelles, sabotages et malice qui
empoisonnent l’air de la vie publique moderne. Je souhaite beau
qu’une cabale de sages écrouent le Président impérial et bouffon,
George W. Bush, au cahot de la Maison Blanche pour un mois avec
le premier mandat d’extraire les soldats américains du bourbier
auquel ils sont enlisés à cause de ses mensonges et de machination
des barons voleurs de guerre et de pétrole, le second de rebâtir le
« Big Easy », Nouvelle Orléans, le troisième de lever un plus égal
taux d’impôts sur les magnats et le quatrième de corser les règles
contre la pollution et le réchauffement planétaire provoqué par
l’efflux des gaz de serre. On doit retenir le droit à rêvasser pour
adresser des problèmes intraitables dans ce monde car, sinon,
l’espoir s’étiole sur la vigne. Quoique George n’effectue rien, l’acte
simple de son emprisonnement dans chaque guise serait une
revanche pour nous et une pénitence pour lui d’une sorte. J’adore
aussi une gravure d’injonction et d’exhortation sur linteau de
l’embrasure au bureau du recteur qui lit, et je paraphrase :
« Destituo tui fatigo privatus, vindico tui officium publicus. »
Durant la promenade, du juchoir des aguets (photos 24 et 25),
on aperçoit une bande de nageurs grimper sur une falaise au-
dessous de la forteresse et plonger de 20 mètres dans l’eau claire et
bleue de l’Adriatique, une acte de bravade qui entraîne Yo-yo à
déclarer comment elle souhaitait d’être avec eux plutôt nous,
personnes décisivement sans l’entrain d’aventure. Ces gambades
semblent trop hasardeuses à Esther qui ne peut voire nager mais
invitantes à notre fille, garçon marque, qui avait bien maîtrisée
chacun des styles, la brasse étant son mieux. Au mi-chemin, moi,
je me flétris dans la chaleur, achète une verre de limonade et
cherche l’abri sous un pergola de vignes (photo 26), une image dans
laquelle les couleurs sont telles exquisément balancées et les
formes telles géométriquement tissées qui je l’ai pose au site de
woophy.com dès que mon retour. Mais crédit pour la prise
appartient à mon épouse dont instincts pour ces facettes de
photographie sont plus habiles que les miens. Dans ma fougue à
m’emparer la photo plus éblouissante, j’oublie souvent d’observer
des détails qui n’éludent jamais les yeux d’Esther. Pourrait-il être
qu’une femme est par intuition plus consciente, plus sensible, aux
subtilités auxquelles moi, pataud, suis aveugle, sourd, indifférent ?
Pendant nos bisbilles, elle semble se souvenir des heurts, griefs et
avanies en provenance de ma bêtisse qui elle utilise comme
munitions et, moi, rien ne s’écoule sauf l’accès de colère.
Notre flânerie des murailles conclut à l’estacade (photo 27)
passante de piétons et de passagers prêts d’embarquer sur
chaloupes qui les retournent aux paquebots cossus (photo 28)
ancrés à l’embouchure, un service par navette. Le secret est
dévoilé. Dubrovnik, ayant guéri sur sa surface de la guerre, est
devenu une escale connue pour ce trafic qui lui apporte l’argent, un
revenu facilement égrené comme celui d’antan quand les caravelles

22
voguèrent ces mêmes vagues, comblés des frets d’Ottoman. La ville
se vante comme Nice de l’Adriatique qui est encore plus d’une
aspiration qu’un avertissement. En attente pour des traînards à la
zone de parking, musant, je repère et je lorgne une statue en
marbre blanc sculptée d’une déesse ou héroïne, le conte de laquelle
reste une énigme puisqu’il n’y un guide, Anna, de m’expliquer. Les
galbes de l’idole dépeinte ressemblent à celles de ma femme qui se
désespère parfois ses lignes charnues faites exagérées, boudinées,
par ces fringues estivales. Modeste, bégueule, se vêtant parfois de
vêtements lâches comme une housse avec encolures montées, elle
rêve d’avoir une figure ciselée de sa jeunesse malgré mes paroles
comment la sensualité de sa forme est vraiment classique,
appropriée pour son âge et préférable a celle qui est mince et
promue comme l’essence de chic grâce aux magazines de Vogue et
Claire, pratiquants de la tyrannie à la mode. J’oppose fortement et
je suis fâché aux efforts, faux, de s’amaigrir pour arriver aux
stéréotypes de perfection quand naturellement une femme à 50 ans
s’arrondit et s’adoucit, apportant son bonheur sur sa peau. Enfin le
troupeau au lasso, nous commençons notre virée de 18 kilomètres
au sud pour éprouver la station la plus de luxe sur le Riviera
croate.

L’Hôtel de Croatie et l’anse de charme

Sofa ne se pause pas à répéter à l’énième fois ses éloges, sinon


panégyriques, à la prouesse censée des Croates en ressuscitant
leur économie avant moribonde et leur espoir brisé durant et dès à
la fin des combats. Le conflit sanguinaire, qui saignait aussi les
trésors étatiques, n’éreintait, ni éteignait, ni défait pas l’optimisme
qui est la nature du peuple qui s’endurcit aux infortunes et
déveines, si souvent vécues, surmontées et rappelées. Nulle part n’y
atteste qu’au bourg boisé une fois reculé et une fois riche de
pêcherie, Cavtat, qui se blottit à l’anse cachée de la pleine vue de la
grande rue. On y va via une rocade qui n’est pas bien marquée
d’aucun panneau, une grâce de négligence momentanée
l’épargnante de l’influx touristique, bien au moins, c’était le cas
d’antan. Un motoriste peut facilement fonce sur route sans
conscience de ceci reculade des vacarmes et viciations du
quotidien. Etant de 18 kilomètres sud de Dubrovnik, il existe dans
une large ombre en publicité. Notre bus vire à l’ouest sur un
promontoire dans un paysage rustique envers le soleil déjà en
descente. Les bois sont jeunes, abondants des cépées. Le jour est
plus court ici qu’à Zagreb et on apprend bientôt de profiter plus des
heures de pleines lumières ou l’inverse pour les noctambules.
L'histoire du village « bordés de citronniers et mandariniers »,
d’après une brochure touristique, est intéressante car elle miroite
celle de la berge croate dans son entièreté, la côte adriatique
orientale. Ceux qui d’abord colonisèrent de ce qu’est maintenant
Cavtat furent des pêcheurs grecs qui l’appelèrent « Epidaurus »
mais, comme presque toutes des contrées une fois helléniques, le
hameau fut conquis par les légionnaires romains en 228 avant JC
et fut renommé « Civitus Vetus » . Ceci fut simplifié à Cavtat quand
les Slaves y arrivèrent dans le septième siècle. Mais les derniers des
rescapés de l’horde sauvage résistèrent et se réfugièrent sur
certains des îlots dalmatiens et encore des autres fuirent au nord, à

23
Dubrovnik, une déviance qui dura un couple de siècles. Les Slaves
furent finalement victorieux et pourtant leur triomphe aboutit à
leur abjuration de leurs voies et leur acquisition, sinon
s’assujettissements, aux cultures, rites, religions et gènes des races
bannies (comme les envahisseurs mongols en Chine). Une telle est
l’ironie de force brutale en concours contre celle qui est douce,
molle et absorbante. Ceci réaffirme bien la thèse que l’Europe reste
romaine.
Je ne cesse pas de réfléchir sur le passé, soit personnel soit
dans le contexte des événements jadis qui affectent encore le
monde moderne et sont ainsi toujours vivants et pertinents. On a
droit de sentir de peine en voyant l’insouciance des jeunes envers
les marées, remous et vagues qui clapotent sur les sables (voici, les
galets) du temps. Je contemple l'histoire, oui, quoique je me trouve
glisser aussi envers une humeur plus béate. C’est une joie d’être
ici, un endroit si serein qu’il émet un air de zen qui me relâche et
éclaircit des pensées plutôt mornes, tel est ce qui surgit en
évoquant les passages des empires dont traces ne sont que
monuments. Je ne veux plus me châtier durant un voyage
invariablement anxiogène parce que des incertitudes routières et je
veux une nuit de repos total, étant gentiment bercé par les
cadences de la mer et les ébranles des brises. On entre en nirvana
qui est à dire le foyer vert et si vaste, décoré avec des vases de
orchidées et pots de palmes nains, dans lequel sonnent des échos
de pieds sur planches marbres dans la colère de jade (photo 29) et
bien sûr la voix de stentor de Sofa. Différent aux hôtels de
convention, ceux que l’on oublie heureusement voire avant le
moment du départ, ceci se vante d’un bureau de réception et l’aire
sociale, sur le cinquième étage puisque au-dessus sont salons de
séances, spas, deux piscines réchauffées, l’une intérieure et l’autre
extérieure, (photos 30, 31. et 32) et toutes des chambres, chacune
fournie d’un patio avec une vue de la mer (photo 33), sont situées
sur la face de la falaise de granits bien lacérés et hâlés. On peut
donc vaquer, varapper ou végéter à son gré quelque part en clôture
gardée sans besoin d’accéder à la sortie centrale, voila l'intimité
pratiquement absolue. En route à l’esplanade on traverse sur
venelle un bosquet de sapins et passe un préau doté des manèges,
balançoires, pivots et un bac à sabre et plus, plus étant un coin
comblé des agrès au gym, tous des amusements requis pour les
enfants, soit jeunes, soit murs. A l’orée des bois, à la berge, sur
roches bien cachées des yeux voyeurs se borde la plage nudiste
pour ceux, peu parmi nous, qui osent s’exposer à la crue nature.
Ceci étant l’Europe, ou les femmes n’hésitent pas s’habiller en
monokini, le besoin d’un tel havre d’exhibitionnisme semble plutôt
redondant, vieillot car tout serait révélé partout sauf la toison et le
tif pubien n’est pas un ouvrage d’art en évolution, une niche
vraiment faite pour des puces, poux et tiques, auxquels le couvercle
parfait serait la feuille de figue.
La qualité de l’alimentation à cet hôtel est infiniment
meilleure qui reflète les hauts prix chargés. Pour dîner, les pâtes
goûtent fraîches voire au buffet et il y a un tas de côtelettes du veau
et de l’agneau de la région qui complémentent bien ces filets de
saumon. Quant au petit déjeuner, les jambons, bacons et saucisses
ne dégoulinent pas de la graisse. La sélection de jus s’y inclut le
nectar de pamplemousse au-delà ceux-ci typiquement d’orange et

24
de pomme. Donc assouvis, nous entamons en groupe de notre corn
d’abondance à Cavtat pour notre virée au Monténégro, la plus
nouvelle nation en Europe qui avait gagné ou, plutôt, regagné son
indépendance grâce au plébiscite de juin 2006, un scrutin retardé
afin qu’accommoder le Coup de monde durant lequel ses joueurs
étaient confères aux Serbes sur leur équipe unie. Les résultats,
malgré l’étroitesse de la marge de victoire, n’étaient pas disputés
pour clairement les nationalistes serbes étaient épuisés de ces
conflits. J’ai déjà bien scanné une accroche punaisé au bulletin à
Dubrovnik dehors d’un kiosque de babioles touristiques qui
avertissait des virtus de cette république de laquelle je ne savais
pratiquement rien, sauf pour sa mise dans le film de thriller
d’espionnage, James Bond, Casino Royale, une maison de jeux
censément située dans ce petit pays avec une superficie un peu
supérieure à celle de Luxembourg et un revenu beaucoup moins en
somme ou par tête (et il y a d’autours 613 500 en 2003) âmes
recensées, une population égale a celle dans juste un lotissement à
Hongkong. [La création d’un casino fictif pour le tournage est un
mensonge hollywoodien, pur et simple. Le directeur n’a
qu’emprunté le nom du pays pour faire plus exotique l’endroit pour
des trucs publicitaires afin que promouvoir le nouvel acteur dans le
rôle de dragueur débonnaire et agent extraordinaire avec une
licence à tuer, une figure de fantaisie pour des hommes totalement
dépourvus de chacun de ses traits.] Sofa annonce que cette
excursion ne dure qu’une journée qui sera un taquin et une
introduction plutôt qu’une exploration.
Avec un battement de cils, le bus roule à la frontière entre la
Croatie et un ennemi voisin jadis le Monténégro d’où l’armée
fédérale de l’ancienne Yougoslavie. Peut-être il est fait que la
majorité des Monténégrins ne voulait pas s’enferrer dans la
campagne lancée par Slobodan Milosevic et sa cabale à Belgrade
mais l’inquiétude n’essuie pas cette tache sur la conscience ni
l’histoire quoiqu’elle la mitige un peu. L’hostilité s’est finie en 1996
avec le recul des forces principalement serbes mais le rapproche
n’évapore totalement duquel la tension et le manque de
coordination au contrôle d’immigration et douane prouvent a notre
chagrin. L’acte d’une issue des visas pour une visite qui ne dure
que six heures exige plus que 60 minutes de nos temps, permis
pour lesquels nous payons en espèces d’euros – une monnaie de
Monténégro alors qu’il n’appartient pourtant à l’Union européenne.
Cette anomalie est expliquée comme une bizarrerie. Le Monténégro
était le seul domaine en Yougoslavie d’avoir se lâcher au mark
allemand et quand l’euro était adopté pour le remplacer en 2002,
voila la pièce neuve se devenue a la pleine circulation dans un petit
pays dont l’économie était et est de la tiers monde.
L’agence de tour laquelle Esther nous a souscrite prend comme
son cachet un itinéraire d’avant-garde. La stratégie y justifie un
coût plus élevé que celui de la compétition qui colle plus au goût
conventionnel. Nous sommes devenus juste le troisième groupe de
Hongkong d’entrer Monténégro dans son nouveau statut d’état
indépendant et le premier d’avoir franchi les confins dans moins
qu’une heure, mais juste, pour satisfaire la paperasserie
compulsive. C’est prou ou peu ma règle cardinale d’observer et
d’éprouver les coutumes d’un pays visitée sans m’empêtrer dans
ses affaires ni me plonger en critique trop instante. Cette décision

25
de réserver le jugement et rétrécir l’arrogance, selon moi, me sépare
de certains Américains (l’emphase est sur « certains » puisqu’ils ne
doivent pas être caricaturés) hargneux et insensibles, une attitude
de grâce, encore selon moi, et démentit mon accent souvent jugé
d’entre la Californie du nord et l’état de Washington qui bien sûr
avoisine la province canadienne de Colombie britannique. L’interdit
contre la tentation de m'embringuer et narguer une culture
étrangère souligne, je l’espère, ma compréhension des et empathie
aux griefs que d’autres, y compris une ligne d’aïeuls chinois qui
eurent eu d’endurer les injures à leur souveraineté sous les armes
et à leur héritage sous le prétexte de l’évangélisme. Personne n’a
pas de droit en imposant ses voies ailleurs surtout lorsqu’elle
n’aborde ni résoudre ses problèmes domestiques. L’air calleux des
agresseurs en prônant sa supériorité empeste de l’hypocrisie. Le
terme ne prononçait naguère et encore n’est jamais désuet est
« cagot », quelqu'un qui palabre trop de la justice, la démocratie et
la raison sans en se pratiquer guère, voilà la nature humaine soi-
même en somme.
Il y a un tas de mythes sur qu’est l’identité nationale du
Monténégro et qui sont ses gens. Le nom de l’endroit dériva depuis
antiquité aux montagnes, une fois épaisses boisées, une chaîne qui
s’appelle les Dinarides et qui est vraiment une branche
septentrionale des Hellenides veillant la frontière grecque. L’entité
fut un fief qui glissa de l’autonomie, à la pleine indépendance, à
l'union chez la fédération slave et à la conquête d’autres. Le pays
établi de nouveau et dans la présente incarnation se vante d’une
superficie de juste moins que 14 000 kilomètres, équivalente à la
portion wallonne en Belgique et une langue officielle de Serbe
parlée avec un mélange d’accents. La guide Nana remarque
comment sa tenue est typique des Monténégrins natifs (ne pas
qu’elle est charnue) qui veut des cheveux noirs de jais et des yeux
verts ou gris cristaux. Son type constitue de 43 pour-cent de la
totalité contre de 32 des Serbes, 7.8 des Bosniaques, 5.3 des
Albanais, 3.97 qui s’identifient « musulmans » (sûrement un badge
de fois plutôt que d’ethnie) et 1.1 pour-cent Croates, un pot-pourri
qui lui fait, le Monténégro, une reddition de la Suisse avec ses
cantons.
La composition ethnique dans cette zone est certes une riche
maille dont trames s’imbriquent. Les contes cités dans les annales
anciens grecs s’adressèrent aux autochtones comme les « Illyriens »,
une race dite d’avoir peuplée la région des Balkans de l’ouest
depuis l’aube d’historie. Ils résistèrent, dépitèrent et repoussèrent
Philipe de Macédoine quand ce roi essaya de se frayer du sud
jusqu’à sa conquête éventuelle par le fils Alexandre, a lequel une
légion d’eux, les vaincus, gaga son allégeance et joignit son armée
dans la compagne pour saisir le monde connu et la marche a l’Inde.
Je ne doute pas cette version de la genèse des Illyriens et je
souscris à la conviction que des gens pourraient servir bien leurs
maîtres, s’ajuster a leur servitude et ne pensent pas à leur traîtrise
de leur mémoire collective, comme les Gurkhas guerriers avaient en
fidélité aux Britanniques qui les forgé en « lances » de l’Empire
victorien. C’est croire que les Illyriens auraient été les vrais
aborigènes qui défient la crédulité car ce terroir qui embrasse ce
qu’était la Yougoslavie est remplie des fosses et fouilles des signes
de l’habitation humaine de l’aube de l’ascendance de la sapience, le

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Cro-Magnon. Ce qui suivit du règne éclairant grec qui planta la
semence d’une haute culture est moins bénigne, plus nocif.
Stopper à divaguer, moi, stopper a tisser et plisser ces faits
glanés plutôt trop sélectivement en toile de patchwork. Laisse dire
que les vagues successives du sud s’arrêtèrent ensuite au déclin du
domaine grec. Cette emprise relativement gentille fut accablée par
celle qui fut plus brusque et agressive. Ce fut aux Grecs qui
émoussèrent bien l’impact de leur colonisation veloutée. La prise
grecque faiblit avec le passage du temps quand enfin la berce des
philosophies faillit. Les arrivants et arrivistes de la péninsule
d'Italie en éclipsant leurs enseignants grecs réclamèrent aussi ces
restes des enclaves civilisées, y postèrent leurs casernes, y
érigèrent leurs temples, parvis, agoras, bains publics, arènes pour
les bagarres de gladiateurs et bêtes (jamais de lions et tigres qui
furent la franchise exclusive à Rome), aqueducs et forteresses, une
desquelles nous visitons sous ciel sans merci, simplement y
répliquèrent une version du monde parfaitement discipliné et civil.
Je ne cesse pas d’être étonné à la transition facile des manières
grecques à celles romaines, quoique les premiers optent de
gouverner avec la puissance de ses raisons et les seconds cela avec
son ingéniosité. Mais voire la gloire des césars ne se prouva qu’une
chimère alors que leurs monuments ne soient pas si fugaces,
demeurant ainsi taquins et aperçus de la splendeur qui fut, soit.
Subséquent à l'effondrement romain, les hordes barbares, les
Visigoths et Huns, raflèrent des richesses. Une sorte de tranquillité
se restaura dans les siècles septième et huitième quand des tribus
slaves essuyèrent tout et peut-être métissèrent des descendants
des illyriens dont devint la progéniture des Yougoslaves, les
Monténégrins parmi eux, ceux en conversion à la foi chrétien
orthodoxe et s'agenouillèrent au synode à Constantinople, à
Byzance, alors que leurs voisins croates déférèrent à la papauté à
Rome, un schisme qui tel attise et aigrit encore les Balkans.
Plusieurs siècles après les doges à Venise sanctionnèrent la
saisie de Monténégro, un procès qui perpétue encore la mouvance
italienne aujourd’hui. C’est ainsi que Nana m’avoue sans hésiter
comment l’Italien est sa première langue avant celle de berce, de
serbe, autant plus que l'anglais. Ses paroles dans le langage de la
Reine sonne mignons marrants malgré deux années d’étudie à
Londres âpre son éducation universitaire à Bologne, une ville à
laquelle elle, une jolie vingtaine, ne cache jamais sa nostalgie. Le
rapport historique de Monténégro à la péninsule à l'ouest fut
cependant fracassé bien sûr par les forces orientales musulmanes
et par les marauds de la grande armée de Napoléon. Benito
Mussolini dans les années avant la seconde guerre mondiale eut
vacillé en y courtisant et conquerrant, un terrain il convoita comme
une partie intégrale du Pax romain dans sa poursuite folle et en
vain du nouvel empire. Mais alors Il Duce trouva en travers ses
gâchis étrangers comment ces prémices facilement égrenées ne
furent pas si facilement empochées ou mangées, soit aux Balkans
soit en Ethiopie. L’affinité aux voies italiennes ne les empêcha pas
de la lutte contre le fascisme forgé par Mussolini et son régime
maffieux. Les résultats auraient été différents cependant eurent ces
Chemises noires agressèrent avec chaque degré de flair. Mais
comme Bush et compagnie de gâcheurs, le gang ne foutra que des
échecs et embarras serials – une sorte de farce chaplinesque mais

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sans le charme du clochard. Les Monténégrins et leurs frères
Serbes ont droit encore de s’enorgueillir de leur opposition d’abord
aux Italiens et après aux Nazis. Maintenant encore le petit pays
détient bien des empreintes dans son alimentation, preuve étant la
prolifération de la trattoria, la prévalence de la musique pop,
l’émission des jeux de football de la ligue italienne et l’ubiquité des
panneaux qui apporte le langage si mélodique.
En route au fort à Kotor à l’origine romaine notre coterie pause
près d’un kiosque occupant l’accotement de gravier d’où nous nous
posons et au même temps esquivons des guêpes attrapées à notre
lotion de tan. Arrières de nous est une anse cernée des falaises
juste dehors le village de Novi (photos 34 et 35). J’y ai acheté mon
premier souvenir du voyage, une épinglette arborant (maintenant
perdue) le boucle héraldique de Monténégro. On entend que toutes
des babioles apportant les symboles de la Yougoslavie se sont
écoulées en juin 2006 à la veille du plébiscite pour l’indépendance.
Sofa exulte que l’on est arrivé à la rive de la baie censément la plus
profonde en Europe, un abîme qui plonge voire plus au fond marin
que ces fjords norvégiens. Je ne suis pas dans une position à
disputer l’assertion incroyable puisqu’il n’y aucun accès
électronique, ni téléphone mobile ni l’Internet parce que de
l’isolation. Nous sommes dans la cuvette des montagnes de granites
qui agissent comme murailles étanches. L’enclos comme ça peut
engendre deux effets psychologiques opposés, d’incarcérer ou
libérer selon le tempérament. Certains de ceux dans notre
compagnie fignolent leurs gadgets de tester en vain leurs
connexions et ce sont les uns qui se ressentent pièges comme dans
un bagne. Le reste du groupe est serein d’être dehors la portée de
communication, et nous sommes ceux qui sont émancipes des
bidules et chamailles du quotidien. C’est étrange de croire qu’une
fois j’appartenais à l’autre moitie avec un besoin, une compulsion
vraiment, d’être au bout d’une chaîne ou laisse. Comment
surgissait cette transformation reste un mystère. Ai-je décidé un
jour de quitter cette assujettissement ou suis-je réveillé après un
cauchemar pertinent au métier dans la conviction neuve de
regagner le contrôle de ma vie domestique ? Difficile vraiment à
connaître mais éventuellement on se met au parfum. C’est établi,
fait accompli, je suis dégagé en ne sombrant plus à l’attaque de
panique aux manques de messages et d’appels qui régentaient mon
existence et occultaient mes propres priorités. Comme les
Monténégrins de la tutelle des Serbes, je m’apprête bien de secouer
le joug qui est la technologie intruse, d’affranchir, c’est à déclarer,
de la frousse qui, sans contacts, on est perdu.
Ces lames de herbes s’affaissent et ces fleurs au bord de la
route se flétrissent sous le soleil brillant et or brutal. Le chauffeur
annonce que la température touche de 33 ou 34 degrés voire avant
le midi. Le bus roule, non, vogue, pour la motion approxime celle de
la mer ridée des vagues parce que du virage. La route de bitume
cahoteux longe la verge d’une baie, vraiment une lagune, son eau
calme et humidifiant l’air qui étouffe les passagers sinon pour le
climatiseur. Encore les tourtereaux n’arrêtent pas de se mignoter
dans une performance considérée d’obscène parmi les asiatiques
qui blêmissent aux câlins publics car l’affection conjugale est mieux
rendue discrète. J’essaie de ne me renfrogner et me focaliser sur le
paysage (photo 36), y voyant, sur îlot, surgir une chapelle

28
orthodoxe. Est-ce placement pour protéger l’église des raiders ou
pour impressionner les pèlerins qui, les deux, peuvent seulement
l’accéder en bateau ? Nana ne répond pas à la question puisque sa
veule commande de l’anglais ne lui permet une explication nuancée
qui est requise dans ce cas. Elle minaude doucement aux requêtes
trop difficiles, son sourire suffisant de m’apaiser, moi, le cavalier et
baratin. Les déclics des appareils photographiques sonnent comme
les clics des grillons. Mon Olympus s’accours pour joindre un
Nikon et un Canon qui rivalisent.
Kotor est moins érigé que biseauté dans un coin de la baie car
il est si étroitement serré d’entre la mer et les montagnes qui
l’encadrent et le surplombent. Nous marchons rapidement dans
longues foulées pour gagner l’abri. Deux des femmes déferlent leurs
parasols bigarrés. Nous ignorons les gravats et déchets jonchés en
route. Il n’y aucune vue de valeur chez Kotor que son fortin dont la
borne fut mise dans le quatrième siècle presque la fin de l’époque
romaine quand l’empire bascula et éventuellement se brésilla sous
ces assauts successifs des hordes. Il faut sentir ce sens de vétusté
à cause du manque de préservation et restauration, du manque de
largesse publique. Le Monténégro est pauvre. Ce qui demeure est
beaucoup plus qu’un monument, plutôt testament à la volonté, en
vain, des derniers des défenseurs à retenir un peu du royaume
dont principe est maintenant en ascendance grâce à l’Union
européenne et sa vision de l’unité continentale. Certes la fondation
construite initialement est rasée, sinon enfouie par couches des
plus récents bâtiments comme trahis dans l’architecture médiévale
et renaissante. On, archéologue, peut encore y creuser pour fouiller
ces traces romaines. Mais gardant le flanc du sud, sur pentes
raides, court une enceinte de 2.5 kilomètres, une fois crénelée des
tourelles et cloisonnée des parapets formidables, maintenant
réduite à une ligne de murettes, partiellement en ruines. Nous, Yo-
yo et moi, payons quatre euros pour le privilège de grimper sur
cette relique, un cours qui nous ne complétons qu’un tiers parce
que de la chaleur, notre manque de fluide et le danger des pas
étroits et labiles avec certaines des pierres craquées et friables. Ce
que surprend est une section de la route pavée pour aider le trafic
de brouettes, charrettes, voire, incroyablement, chevaux et bœufs.
Le fort lui même est un dédale d’allées et venelles et aussi une
garenne de appartements encore habités. Une gamine très
mignonne en robe grise tachée, frimousse angélique aussi
maculée, nous emmène au bon chemin lorsque nous nous
paumons dans le labyrinthe. Je veux lui donner un pourboire d’un
euro mais soudainement elle est partie, partie comme une
apparition. Est-elle mon hallucination, un mirage conjecturé des
reflets du soleil ? Du perchoir plusieurs cents mètres au-dessus
Kotor, je scande l’horizon (photo 37) et repère dans l’ancrage un
paquebot mais est-il le même un vu d’hier à Dubrovnik ? Rien de
sublime ne l’affecte, Yo-yo, qui lèche son cône de glace comme
récompense pour un mauvais essaie sur grimpette, elle, varappeuse
à l’âge tendre à Whistler longtemps avant sa conscience des
hasards, et pour un mauvais déjeuner dans une gargote.
Après Kotor, on perdrait le dernier de son intérêt dans ces forts
qui se jonchent d’un bout des Balkans à l’autre mais encore on
endure car l’itinéraire est mis. C’est une faute de donner aux
visiteurs un tel dosage ou surdosage en archéologie dans jours

29
consécutifs. On s’épuise quand il n’y aucune variété. Ma velléité à
l’étude des ruines, déjà plus élevée que celle de la majorité, est bien
délayée puisque ma préférence, sinon fringale, soit des êtres
vivants. Juchée sur talons élevés, Nana, plutôt blasée aussi, pointe
à l’évidence de Napoléon comme l’équivalent d’Atilla, roi des Huns,
dont les cavaliers marauds sévirent en rafles en travers du monde
romain. Ces murs grêlés des obus de la grande armée durant un
siège, annonce-t-elle. Mais il faut raconter aussi que les fantassins
menés par les Français laissèrent un legs moins sinistre, cela d’une
tour d’horloge dont dôme cependant reste sur terre à cause du
recul rapide ne leur donna le temps pour compléter le projet.
Amusant cela, la déroute des forces de Napoléon à cause de la folie
en Russe leur dénia une chance de créer une image bénigne et
sauver une réputation. C’est une bévue vraiment pour Sofa
d’embellir (encore) de ce qu’explique la guide puisque la narration
nous barbe à l’extrême. Je manque l’érudite à Dubrovnik car la
vraie connaissance ne peut pas être feinte. C’est soulagement de
quitter Kotor et rouler envers le riviera monténégrin, au préau des
visiteurs folâtres de loin, à la station balnéaire de Budva. Ringarde,
bien elle est jeune, Nana grogne aux changements d’une sorte
qu’elle ne semble pas accueillir, tel l’afflux des immigrants, russes
et britanniques en particuliers, qui accrochent ces achats
d’aubaine, bouchonnent des chemins avec leurs colosses de
rouage, défrichent des occasions financières pour profiter à la
carence de règles testées, provoquent de ressentiment local et
exacerbent l’inflation, surtout dans le marché de logis, et retarde
son plan immobilier et la contraint de bosser à deux boulots. Elle
maudit ces expatriâtes mais elle n’a pas de notion de ce qu’agiotent
les asiatiques rusés qui n’ont pas découverts ce pays jusqu’au
moment. Sûrement les citoyens renchérissent tout aussi pour
gagner du boum, cependant éphémère. Expertiser avec l’aide de
savoir de l’histoire de l’agiotage, on n’a que la prémonition de la
fuite des lucres quand la venture flanche ou si l’autre, meilleure
attraction surgit sur le prochain horizon. Ma question d’urgence
reste sans personne y répondre : Est-ce voici la ruée d’y investir
une toquade pour eux dotés de l’argent plutôt que la conscience, le
biais, et le cœur de tricherie, les « escrocs » dans un mot, mais pas
de passion pour l’endroit et donc pas d’engagement à la longue
durée ? Rien que des profiteurs.
Notre guide nous exprime son ambivalence au phénomème des
étrangers qui affluent dans un pays sans soin ni sensibilité aux
coutumes, et costumes (regardant la presque nudité commune sur
ces 17 plages de Budva) locales mais qui apportent aussi d’euros.
L’inquiétude juxtaposée l’accueil avec un prévalant contre l’autre en
accord avec l’humeur et la lubie. On comprend, compatit
également, ce mélange de sentiments parce qu’il soit universel si
partout est affronte avec une invasion via la carte bancaire d’or qui
boute des natifs et accélère des prix. Ceux des Monténégrins qui
affleurent de la fortune neuve ont tendance d’être ceux qui sont
déjà privilégies, les bougres et bougresses accusées d’avoir
accaparées le pouvoir, politique et économique, et protégées leur
racket via moyens moins que scrupuleux, moyens voire frauduleux.
L’élite adore ce riviera où les beaux et belles poursuivent plus de
pognon et corsent leurs rapports. Aux dépens du reste ? Je ne suis
pas certain. La jalousie aux parvenus, envie de la classe riche et

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crainte que leur patrie est volée et violée font rancunier l’air social
au Monténégro sauf d’ici, une poche de l’isolation. Cela ce pays
condamné une fois au purgatoire pour ses liens serbes est libre de
mouler son destin n’est qu’une mineure consolation lorsque le
revenu demeure maigre pour beaucoup de gens sans preuve
immédiatement tangible que leurs vies matérielles s’abonniront tôt.
Cueillir des bienfaits est être entreprenant et hardi, qualités rares
et étouffées durant les années communistes, quoique le régime de
Tito fut moins strict et dogmatique que ceux sous la tutelle
soviétique. On discerne d’ici et maintenant une manifestation de
cela à l'entrée à la ville hérissant des enseignes, panneaux, affiches
et banderoles qui arborent et avertissent l’événement du jeune
siècle, oui, un concert demain soir de la bande plus notoire et
presque la plus vieille et virile, les Rolling Stones. Nous passons
l’endroit de rendez-vous, un chantier abrité mais encore accessible
de la mer. Il y a plusieurs fourgons et camions remplis des attirails.
Une équipe de travailleurs maniant tenailles, marteaux, égoïnes et
tournevis appliquent les dernières touches à l'estrade. Nous
entrons la cité dont le centre est un fort converti à la chalandise de
babioles adjacente a l'esplanade et à la mer d'étale. Inévitablement
on trouve un kiosque (photo 38) de vendre les billets de
performance, souvenirs et chemisettes des Stones. Mais alors les
images ne s’agitent pas à la reddition moderne des rockers, ridés et
secs comme pruneaux, mais à la version jadis dans les années
1960 quand le monde s’ébranla aux sons étourdissants (éprouvants
d’après mes parents) de « Satisfaction », « Brown Sugar », « Let’s
Spend a Night Together » et « Get Off My Cloud », etc. Etais-je
mordu d’eux, jamais. J’aimais beaucoup plus la musique noire a
laquelle la variation blanche et pop était ersatz. Glousse-t-elle, ma
Yo-yo, il n’importe plus, mais un jour dans l’avenir ses filles et fils
la moqueront car le temps qui change ne change pas.
Nana nous invite gracieusement de la rejoindre demain soir à
l’estacade pour embarquer en bateau de ses parents afin que voir
ces anciens rockers sans besoin de frais, une offre pas de réaliste
puisque nous ne puissions pas nous attarder à cause de notre
férule d’itinéraire. Rien d’intérêt digne d’un rapport à Budva sauf
l’abondance de palmes et de femmes qui osent ôter leurs maillots et
exposer leurs seins. J’évite la tentation de les regarder, beaucoup
moins que de les lorgner, et certainement de la photographie
voyeuse; moi aussi profite aux lunettes de soleil qui masquent
totalement mes yeux et émotions. On ne risque pas l’aigreur ni
bisbille conjugale en toisant des baigneuses. Ce qui je n’hésite pas
espionner est une flottille de yachts mouillés au quai (photo 39) et
une clique d’hommes d’une tenue chafouine. Quelques d’eux
s’accoutrent en pleins ensembles, insouciants à la chaleur et
l’humidité, escortes par des voyous musclés et conduits en quatre-
quatre des marques d’Audi, Mercedes et BMW, aussi une
« hummer », véhicule une fois militaire américaine favorite des
gangsters rappeurs. Je susurre à ma gamine qu’ils soient des caïds
russes cernés des gardes avec le regard de forçats mais je rate
d’évidence excepte mon soupçon. Elle et moi promenons sans
Esther qui glisse dans le dédale de magasins et galeries plutôt que
risquer l’exposition solaire et l’exhibitionnisme des femelles friandes
et fières d’étaler leurs dons naturels, quels dons. Yo-yo arrête à la
crémerie pour bouffer plus de glace et remplir son estomac laissé

31
presque vide d’un repas dégoûtant, d’une pâtée. La joie de sa
binette est totale au moment, elle chérubique, bronzée enfin (qui
fane rapidement a sa peau au teint de lait) et séparée de sa mère et
ses harcèlements. Je sirote mon eau minérale gazeuse sous un
parasol au retour à l'entrée du fort et elle se prélasse sur murette
proche aux bateaux pour absorber plus des rayons d’un ciel d’azur.
Voici notre coin de paradis, nous qui sommes relâches et dégagés
des soucis si seulement à l’interlude avant Sofa resurgit, précédant
par un cri a réveiller le diable. Apparentement quelqu’un d’ici adore
la cuisine de Hongkong autant qu’il, Monténégrin, a lancé un
restaurant (photo 40) rempli des symboles et fétiches d’un endroit
dont cuisine est exquise. Je ne peux pas attester à l’authenticité
des plats puisqu’un festin à Cavtat est sur ma recette.
On jeune dans un sens d’un repas loupé et on puis se gave en
récompense et parfois à l’outrance. J’ai juste parvenu au point
d’excès au dîner dans le vaste restaurant du vaste Hôtel de Croatie
et je sens plus que repu mais gonflé des trois coutelets de veau, un
magret de poularde, un tas de spaghetti, soupe de poisson, étanche
de saumon fumé, salade, tourte de pomme avec confiture de fraise.
Maintenant assouvis, au coucher, nous trois voudrons finir ce qui
reste du soir à la flânerie pour explorer plus de l’anse à Cavtat dans
dont sortilège nous sommes tenus depuis le premier aperçu. Je
marche, non, me dandine travers l’étage des piscines, du gymnase
et du salon à méditation. Ce semble que mon corps est guidé
vraiment, à l’instar d’une noctuelle tirée à une bougie, vers la
terrasse qui mène à l'esplanade. L’effet est enchantant, bougeant
sur une rangée de balises avec lumières légèrement bleues. On ne
peut pas profiter aux aménagements puisque tout ferme à 20.00
tapant, au chagrin de quelqu’un revenu d’une pleine journée de
tour d’ici et alentour. Ce qui nous attire au moment est sur l’autre
côte de l’anse d’ou déjà les restaurants et tavernes sous les étoiles
grouillent et la musique, des sons de rires et générale gaieté, est
clairement écoutée dans un milieu silencieux de voitures qui sont
interdites, oui une zone heureusement piétonne. L’'ambiance
évoque cela dépeinte dans la peinture de Vincent van Gogh à
laquelle le chanteur cum composeur Don McLean avait tinté un
tribut hantant, inoubliable, une mélodie de ma jeunesse, « Starry,
starry night ». J’apporte mes appareils, Sanyo et Olympus, pour
m’éprouver et améliorer des méthodes à la photographie à
l’approche de la nuit. Un moment crépusculaire est difficile de
capter sans mains habiles et stables. C’est vrai lorsqu’on n’utilise
pas la béquille de tripote. Je suis résolu de pendre l’avis glané de la
lecture des articles de photo et voici sont des résultats (photos 41,
42 et 43) auxquels je me targues. A la fin de la voie situe un quai
bien amarré des yachts et voiliers, y compris l’un venu de Nice,
selon sa pancarte, ayant vogué d’une mille de kilomètres pour
achever cette bannette en idylle encore obscure. Sur sa coque est
une phrase plus apte : « C’est la vie ». J’aime toujours ces voiles
d’envergure et comment elles gagnent de la mer éventée, ces
émerveilles de l’ingénuité mécanique qui recueillent une force de
nature sans la gâchent. La puissance éolienne est notre salvation,
ensemble avec le soleil, pour tapoter l’énergie. On ne peut pas
avancer pour la route se finit au portal d’une belle chapelle à
laquelle est une annexe d’où l’on entend le début d’un concerto.
Une jolie ouvreuse nous invite d’y entrer, à une sorte de musique

32
plus à mon goût à mon age que celle des Stones, mais nous lui
déclinons avec une risette. Esther et Yo-yo reposent un peu en
chaises longues sur plate-forme d’où la vue de l’hôtel est
magnifique sous la lune dans une direction et dans l’autre, dans
une piscine attachée a la mer, un match de water-polo est joué aux
foules, peut-être plus attirées par les femmes athlétiques dans le
jeu que le sport soi-même. Nous ne voulons pas déambuler plus.
Durant la nuit, avec Esther et Yo-yo dormantes, l’horloge disant
une heure après minuit, j’ouvris le rideau, vois déjà que les
flâneurs se sont égaillés et pense encore de Vincent et son angoisse
suicidaire sur cette starry, starry night.

Ces verges romaines

« Qu’est-ce que vous voulez cela me fasse ? » fut prou ou peu quoi
Jésus eut demandé à Dieu à la veille de son dernier calvaire et
reddition aux persécuteurs, gens d’armes mais en frousse d’une
fronde spirituelle des disciples à une secte en Judée. Je voudrais
poser la même question à notre meneuse Sofa qui me cloue à son
itinéraire rigide comme des bourreaux voulurent le messie à la
croix. Je redoute d’avoir eu à visiter chaque temple, voire sans prier
ni m’agenouiller devant l’autel, certainement ne pas depuis mon
apostasie. [Ceux qui ont la puissance de la loi sont souvent effarés
des autres dotés d’idées et d’idéales. Vous tuez ce que vous ne
comprenez pas, ne contrôlez pas, car cela est la nature d’une
dictature depuis le temps immémorial.] Mais alors la Croatie
abonde de chapelles et de cathédrales desquelles un touriste, voire
le païen avéré, ne peut pas esquiver et doit donc endurer. J’ai
bravé beaucoup pire tels ces séances de travail durant lesquelles,
comme confiné à la nef, je me rêvasse sans faute. Un matin il y a
longtemps nous étions, ma mère et moi, à l’aumônier. La tenue
d’une réunion soudaine nous avait apeurées. Avais-je lésé l’ordre de
Saint Pierre dans quelque voie, profané un objet révéré ou
blasphémée si sans malice ? Chacune de ces infractions exigerait
une punition dont la plus sévère étant l’expulsion moins du jardin
d’Eden mais de l’école paroissienne, sûrement une cause de
cauchemar, consternation ou honte. Et à ma virago d’une mère,
elle-même une agnostique et opportuniste complète, la raison d’être
de ma religion imposée plutôt qu’endoctrinée était simplement de
m’y enrôler ou, d’être exact, m’y écrouer pour profiter à l’éducation
de prestige et de rigueur sous la tutelle des jésuites. Pas de doute
que l’érudition de la Société de Jésus était, est, exemplaire malgré
ou parce que de leur besoin temporel et intellectuel de réconcilier
des dogmes aux enseignements de science, d’éclaircissement – ceci
une vraie recette a la schizophrénique. On ne peut pas éterniser
une fraude et éventuellement on se fraie dans le monde laïc, dos a
l’église, au passé de superstition et bigoterie, face au futur et aux
plaisirs désavoués censément par la prêtrise, ne pas compter ces
cas du clergé péchant de pédérastie. Le primat, Père provenu du
comte de Cork. Patrick Parnell, nous avait salué à l’embrasure de
son abbaye et nous avait conduit à son bureau lambrissé et comblé
de livres, une division assez égale d’entre des tomes pédestres et
ceux de théologie. Gris, maigre en soutane, à binocle et gracieux,
voix encore rauque du rhume, il nous avait offert tasses de thé
pour calmer Maureen qui était renfrognée et prête de gronder, son

33
tempérament toujours volatil, certaine que son môme, moi, l’avait
gêné dans une façon ou l’autre. C’est toujours un article de foi que
son gars aîné reste un galopin et s’est destiné de faillir au moment
d’accouchement sinon de conception loin de miraculeuse. « Nous
croyons, madame, votre fils et notre élève à la manifestation dans
son âme l’appel divin pour rendre service à l’église et gloire a Dieu, »
pontifié avait il après plusieurs minutes de papotage. La parole
faisait sonner qu’un jour je me soumisse d’être une source de
mense pour le Vatican, des biens sacerdotaux. Tristement pour le
curé et heureusement pour moi, le Seigneur dans le ciel n’avait pas
décroché le combiné pour lui répondre à la requête pour mon
induction et exaucer l’orémus de son recruteur monseigneur, ainsi
m’épargnant du poids d’une croix que je ne voulais pas épauler. Je
frissonne à la prouesse de l’empreinte catholique car je me souviens
si vivement de la liturgie et je ne repousse pas aux noyaux de sa
sagacité. Ceci est l’évidence, plus affreuse, de catéchisme qui
m’avait étiqueté, m’avait cautérisé. « Pourquoi tu bouderais comme
ça, dada? » enquête-t-elle, ma chouette, perturbée par mon regard
distrait ou plutôt riveté à quelque distance, ne pas d’espace mais de
temps, et essaie-t-elle de m’entraîner à l’ici et maintenant, cela bien
étant ce long trajet du sud au nord, de Cavtat à la prochaine escale
de Split, à mi-chemin du littoral dalmatien. Elle me contraint ainsi
de retourner au présent, enrêner mes pensées en pleine galope et,
plus pertinemment encore, l’amuser avec des boutades et
anecdotes sur son sujet favori de hockey, une tradition sportive
estampée sur la conscience canadienne, une religion dans un mot.
On peut regarder à l’horizon parce que de la pureté de l’air et
la brillance du soleil. Il y a une série de criques creusées de la
retraite des banquises à la fin de la dernière époque glaciale et la
même de montagnes burinées, un drame de nature difficile
d’imaginer maintenant lorsque la température grésille, à 32 et
encore montante, puisque la montre lit 10.30. Des enfants
tapageurs canotent et encore d’autres pataugent dans l’eau, leurs
gardiens en baignade, toutes des cabrioles ma fille raffole et
auxquelles elle observe du carrosse avec envie. Une meute de clebs
prend aussi la gambade de plage. Une flottille hétéroclite de skiffs
et yoles glisse plus loin de la verge. Les costauds Croates sont
ardents de leurs sports, surtout de tennis et de batelage auxquels
ils s’emportaient des championnats et médailles olympiques.
L’aviron élevé (d’un rameur) ou la raquette en salut (d’un joueur à
Roland-Garros) pourrait bien être un symbole apte du pays comme
son étendard. Mais alors la mer n’est pas simplement un préau des
vacanciers car il y a des pêcheurs en baraques qui pourraient
pourtant approvisionner les cuisines des auberges communes dans
cette région. Split est la capitale censée de l’athlétisme et est
festonné des panneaux en tribut à leurs héros, leurs adonis et
amazones. Cette ville industrielle ou post-industrielle est aussi la
berce du club de football, le Hajduk, un nom en honneur des
bandits qui harcelèrent les Ottomans et Vénitiens depuis le Moyen
Age, aussi connu comme Torcida en émulation des fans cariocas de
Brésil. Ce club émaillé d’un siècle de fierté communale, rivale
farouchement celui, le Dinamo Zagreb, un niveau de compétition
s’apparente à l’haine d’être les Rangers de Glasgow et les Celtiques
d’Edinburgh en Ecosse. Les adeptes de chacun professent d’être les
vraies avant-gardes de la guerre de l’indépendance. Les nixes des

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partisans Dinamo et Hajduk sont presque ritualisées mais encore
sanglantes, une source de violence trempée dans le grief des
habitants de Split qui ont l’envie de la prospérité relative de leurs
confrères a Zagreb, un lieu plus sophistiquée auquel le pognon, le
revenu, coule sans assez de largesse en retour. Les gradins du
stade sont les champs de bataille. Un grand drapeau national d’un
blason en équerres de blanches et rouges qui ressemble à
l’échiquier sur un arrière plan des trois bandes à la russe, quoique
déferlé, flétrit dans l’air chaud, étouffant et stagnant. Ces Croates
aiment pavoiser les endroits en couleurs patriotiques, un geste qui
me gêne, surtout quand il était ce que flottait par-dessous des
ruines de Mostar en 1993 dans le siège de le bourg historique, un
conflit qui rivalisaient eux, les musulmanes et les Serbes.
L’ambiance présente est celle d’un four. Mais encore le large
dalmatien foisonne de joie dans la saison de villégiature et tinte de
rires. Ce que résonne soudainement est aussi une diane de
sonnerie des phones mobiles interrompant la tranquillité qui me
froisse, qui me tenaille. Mais encore on doit confesser que ces jours
la tonalité est plus diverse, grâce aux ritournelles téléchargées pour
un modique frais des sites. Je veux les atrophier car il est entend
être un séjour relâchéé, une détente, en sortie des vacarmes de la
vie de boulot et business. Mais puis certains des passagers sont
enchaînés à leur commerce et leurs carrières ou peut-être ils
aiment frimer, faisant des chichis, pour impressionner ou
convaincre leurs femmes comment importants ils sont sans soin
ces appels importunent les autres. Sofa devait saisi ces
instruments d’intrusion. N’ai-je pas renoncé à mes gadgets comme
PDA et Blackberry ? Si je me sevrais de mon système de soutien
sans trauma, ils pourraient aussi.
Vues d’une distance, ces calanques sont des havres de
plaisir total, n’étant pas trop loin de la ville et pourtant retirées,
idylles, oui, embrassées par le soleil, rafraîchies par les embruns,
soufflées par le vent, excepte a la canicule, comme maintenant. On
peut bien gîter dans les hôtels ou, meilleur, loyer des carlingues
proches de la mer aux coûtes très raisonnables, voire souscrire au
bail, selon des brochures. Je ne regretterais pas si je m’échouais
dans une cabane pour la dureté d’un été entier ou vieillissais.
Certes le paradis au Hawaii ou Tahiti serait supérieur à cause de sa
plage de mou sable de coquilles et coraux écrasés, blanches comme
flocons de neige. Mais encore l’on ne grogne pas aux cailloux,
quoique ces galets seraient plut durs sur les croupes – et sur les
corps des demis nus se vautrant pour leurs hâles qui sont plus
signes de santé que de fortune. Les membres de mon groupe les
appellent « homards humains » en cantonais a cause de leur tenue
après plusieurs heures de bronzage avec un ou deux essaies à la
nage. Mon attention glisse ces jours des pépées minces et délurées
qui étaient les objets obligatoires d’envie dans ma jeunesse aux
femmes mûres alors que blêmes et taches sont leurs peaux,
bedaines qui pendillent, poitrines qui s’affaissent et chairs qui se
boudinent de leurs maillots pour dans elles vivent une âme et
exsude une abondance des expériences vécues, toutes desquelles
j’ai appris enfin d’apprécier. La différence est celle d’entre un dessin
colorée (les jeunes) et un roman nuancé (les dames), le premier
pour scanner et le second pour contempler. Je m’ahuris de savoir
que mes goûts sont vraiment plus sublimes qu’auparavant et cela,

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bien, est le don d’âge et sensibilité. Comment fous sont ceux qui ne
se mirent et ne déceler une forme de beauté qui s’approfondir avec
le passage de temps ?
J’ai lu quelque part un écrivain sardonique qui dénigre ces
hordes de touristes comme des essaims de sauterelles, un gens de
monnaie mais sans sensibilité aux sites sur lesquels ils descendent.
L’auteur est, je crois, Sir Harold Acton, ressortissant britannique et
esthète professé de soi, qui déplore dans un de ses tracts, non, qui
raille une pléiade littéraire américaine aussi professée de soi pour
envahir et empester son Rome après la seconde guerre mondiale,
profitante des charmes des natifs, males et femelles, et leur
offrirant de rien mais des lires et maladies, vénériennes peut-être.
C’est facile à narguer des visiteurs avec accusations amères et
parfois ces dards frappent bien la cible. Il y a certainement un peu
de cela quand les touristes de la zone d’euros peuvent vraiment
batifoler à bonne marché avec la devise à leur avantage de plus en
plus. Mais je suis sûr que l’inverse pourrait être dit des
autochtones qui n’hésitent pas à plumer leurs convives. Je pense
de cela lorsque Sofa s’élance en diatribe contre des étrangers et
comment ils rudoient leurs hôtes. Ceci est la nature du trafic, non,
avec ses participants qui troquent leur argent pour un peu du goût
local. On entend discuter de la prévalence de prostitution dans les
aires de tourisme en Croatie, un pays où le taux de chômage reste
haut et beaucoup des citoyens survirent ainsi sur leur astuce,
entreprise, débrouillardise. Je ne suis personne qui dénonce au
commerce sexuel entre adultes de volonté voire quand je ne lui
participe. Mais la vraie horreur de la pratique s’agit du transport et
de l’esclavage de femmes, quelques très jeunes, de l’Europe
orientale pour apaiser clients par syndicats maquereaux organisés,
mafieux. On ne peut pas se leurrer car il est déjà établi que voire
des troupes de l’ONU en patrouille pour la trêve se sont souillés,
impliqués dans ce crime, soit en Croatie, Bosnie Herzégovine et
Kosovo. L’abomination ne pouvait pas se perpétrer sans un rôle
dans le pays et a ceci l’aveuglement délibéré n’est jamais
pardonnable. C’est hantant de réfléchir sur ces tragédies, grandes
et petites, qui surgissent sur chaque coin d’une terre torturée.
Le groupe arrive à la frange de Split plutôt assoupi mais sans
encombre. Dans un champ dehors de la seconde ville croate sont
vaches bramées broutantes et une nuée de punaises voltige. L’air
est épais de l’odeur de fumier. Le bus se détourne de la berge sur
laquelle il a caboté depuis la sortie de Cavtat à l’intérieur. Le
paysage est littéralement bucolique. Nous avons faim aussi
puisqu’il est déjà 13 00 et sommes prêts de prendre notre pâturage.
Le déjeuner se déroule dans d’un hôtel qui servit aussi comme
centre aquatique (photo 45) avec les piscines dehors, gradins à un
côté, et adjacentes au restaurant. On pourrait prendre son repas,
lamper de la bière et regarder des tournois à nage ou water-polo.
Ma gosse admire des nageurs à l’entraînement et bafoue leurs
coaches, une fois peut-être athlétiques et sveltes, qui sont ces jours
gros. Elle est si capable de cruauté spontanée, protégée dans sa
jeunesse et son innocence. Comment privilégié est quelqu’un qui ne
se soumet pas au tact et ne craint pas d’ire ? Le plat du jour est
bœuf rôti, une bidoche trop cuite qu’elle est sèche comme le terroir
sur lequel les vaches pâturent, un repas médiocre cependant mitigé
par ce que le bétail aime manger, qui est à dire, la salade. Le

36
manque de qualité est rédimé, si cela est le mot, pour la quantité.
Yo-yo ne grogne pas, un palais apparentement moins fastidieux que
le mien. Elle savoure toujours la pastèque et voire plus la glace de
quelconque flaveur et elle gagne aussi de ma mansuétude quoique
sa mère s’inquiète qu’elle demeure trop friande des sucres. A la fin
il n’y aucune bribe laissée sur les vaisselles pour la faim nous faite
des gloutons.
Split, le verbe, en anglais veut « fendre » de la signification
formelle et « déguerpir » de celle qui est argotique. La seconde est ce
que nous faisons après le repas dont le seul but est de remplir les
estomacs de nous, les ruminants humains. Notre prochain arrêt est
du palais et fort de l’empereur romain fortuit, un soldat de la
descente grecque né presque Salona, une bourgade proche de Split,
qui Jules César eut déclaré une colonie d’autours trois siècles plus
avant. Le monarque fut Diokles dont le nom fut subséquemment
latinisé à Gaius Aurélien Dioclétiens intronisé en novembre 284 qui
régna pour deux décennies – un remarquablement longtemps dans
l’ère de magouilles et meurtres, usurpations et exécutions par les
prêteurs, prétoriens et pouvoirs. Las des brigues de la cour
impériale et nostalgique pour sa patrie, il abdiqua pour gagner sa
retraite au palais érigé sur la verge dalmatienne qui est aujourd’hui
le cœur de Split. Durant sa tenure Diokles révoqua la chartre
octroyée aux croyants de la foi chrétienne qui souffrirent
horrifiques persécutions. Son recul cependant ne prouva pas serein
et une série de tragédies familiales et personnelles fut son sort –
une revanche divine d’après des catholiques des siècles après.
Chaque vague successive de colons rasèrent, creusèrent,
imposèrent leurs formes architecturelles sur ce site, y rendrant une
touche d’une chantier jamais vraiment, pleinement viabilisé jusque
maintenant quand tout demeure est une myriade de styles souvent
incongrus sauf pour des traces des frontons, colonnes, arches et
plinthes corinthiennes qui sont sans doute romaines d’origine. Pour
tout ceci qu’en 1979 l’UNESCO avait décrété ce dédale (photos 46,
47 et 48) un site d’héritage. Chaque jour, à 15.00 heure tapante,
un héraut, s’accoutrant en toge et un rouleau en sceau de
manuscrit dans la main, gardes à ses flancs, émerge du mausolée
de Diokles pour annoncer aux visiteurs de l’ouverture officielle du
sanctuaire, un peu de théâtre apprécié par les fantômes des
Romains qui y hantent.
Notre guide est jolie, petite, blonde Ivana (photo 49) qui nous
présente sans atermoyer des contes sur la vie intrigante de Diokles.
Je repère aussi une vraiment belle rouquine (photo 50), des
pommettes formées comme pommes rouges, magique dans la voie
elle alimente et valse avec cette couvée de pigeons et bisets, y
compris des colombes, un mélange comme les touristes eux-
mêmes. A mon approche les oiseaux sont tous en émoi comme la
chamade du cœur de quelqu’un qui voit une beauté. Oui, certes, je
me suis enjouée de celles avec la rutilance dans leurs tresses,
demandez-vous à Sarah Jane Whitam et Susan Bicks. Furent les
occupants du palais blonds comme Ivana ou roux comme cette
damoiselle ? On n’a pas d’évidence de l’apparence de la population
du passé puisqu’il n’y aucun mural reste ni, voire, d’une statue, de
laquelle les Romains furent ardents, de l’empereur parce que les
raiders eurent pillés et détruits quand finalement le dernier défense
se fut effrité aux attaques des hordes. Qu’est-ce vraiment le destin

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inévitable d’une civilisation, écrasée par forces étrangères et
érodées par celles à l’intérieure ? Est-il d’autours nous le futur des
Etats-Unis ? Est la gloire provisoire et l’envie pour perpétuation
illusoire ? J’adore ces questions rhétoriques et, oui, ironiques.
L’intendance romaine laissa plus que les legs de culture et
d’architecture aux quartiers qui définissent Split car elle eut légué
aussi la tradition des squatters dans cette garenne de bâtiments
desquels ils ne peuvent pas être évincés. La loi depuis l’antiquité
stipule que ces habitants aient acquis une résidence d’une sorte et
protégés de l’expulsion sans récompense. Le sens de civilité ne
permet pas délaisser jacent quelqu’un d’une loge il est connu
d’avoir occupé. Il y a une tradition rurale aussi qui constate
quelqu’un pourrait affourager et défricher un champ en jachère et
récolter ses moissons d’être partagées avec le seigneur, un exil ou
contumace. Ce système féodal de partage et de fouage persiste donc
dans l’autre forme. Ni l’état croate ni la mairie de Split n’a de
moyens de reloger ces familles, certaines desquelles ont racines ici
depuis sinon avant l’ère de Bonaparte, un attachement domestique
sans déchéance qui leur donne presque de facto le droit de
perpétuation, de veto au développement pour les biens publics.
Cette tolérance, endossée avec siècles de pratique et précédence,
empêche cependant le déblaiement du lieu et la restauration ou
préservation complète du site de héritage, menant donc au
délabrement. Le gouvernement est responsable pour la gestion et il
y a des efforts à la conservation et à l’aménagement mais encore
durant notre visite aux boyaux, où la maçonnerie semble fragile et
prête de brésiller, nous avons peur des débris tombants sur nos
têtes. Mais l’effroi n’est seulement pas des décombres en s’effritant
à la force de gravite et à l’effet de négligence mais aussi celui en
mesure égale de ces monuments leurs mêmes.
C’est un soulagement d’échapper des confins d’albâtre et
pierre, du labyrinthe de allées et boutiques, et atteindre encore la
lumière, cependant brutalement brille elle est dans l’après-midi
quand les ombres sont rares. Je comprends que mon professeur
d’histoire, Monsieur Alfred ( ?) Klassen, de mon lycée, Eric Hamber,
n’approuve pas mon attitude cavalière ces jours envers ces
testaments au passé auquel il est (si vivant) référentiel. Il sévissait
pas, ne me déplorait jamais, dans la voie que Zeus foudroya les
êtres et dieux minus, plutôt il me reprochait pas avec un regard de
grief et déception qui ne me peinait tout le plus. Klassen, jeune
refugié de la région du fleuve Don, où habitée une colonie de
fermiers allemands depuis le règne de Catherine, quand les
partisans russes avec l’appui de Josef Staline voulurent venger
leurs pertes sanglantes durant l’invasion, la campagne que les
Nazis désignèrent « Barbarossa », incarnait l’histoire de laquelle
l’homme avait le droit d’être ardent. J’étais et suis imbu de la même
fougue mais au degré d’un observateur plutôt qu’un participant
direct dans les affaires telles intenses et pourtant d’antan. L’émoi
est encore pour moi plus d’une abstraction voire des événements
que mon grand-père me racontait de temps en temps pour me
tremper dans la tradition. Les contes de M. Klassen et de Lloyd
Fong restent gravés dans ma cervelle mais ces existent et persistent
comme mythes et ne pas de conviction. Je crois qu’il était André
Gide qui avait noté que pour d’autres l’approche est moins de
croyance que d’assentiment. La leçon est donc : Une génération ne

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peut pas vraiment veiller, boucler ni mouler l’autre, surtout dans
l’ère moderne, et parfois il faut que chacune apprendre à nouveau
et errer à nouveau.
Ma gosse achète et lèche contentement sa glace, oui, encore
l’autre, sans un regard pour sa mère qui reconduit son tour des
échoppes et étals afin que lésiner sur des vétilles, rejoignant ceux
de notre groupe et de l’autre, allemand, une langue bourrue de
laquelle elle parle un peu. Tout le monde semble féru de chicaner et
se retrancher dans les creux commercial dans la façon de tiques
sous la peau. Cachée du parvis se trouve une salle de lecture
parrainée par le gouvernement français et sous l’égide de l’Alliance,
faite distincte avec un drapeau de trois couleurs. J’y va pour
chercher refuge du soleil, un oasis vraiment, baratiner une jolie
brunette, de parentage français et croate, feuilleter des copies du
journal, l’Equipe, et écouter chansons rendues inoubliables par qui
que la môme, Edith Piaf, oui, je ne regrette rien, la vie en rose,
Johnny. Mais alors l’interlude se termine comme l’embellie de la
canicule sans merci puisque précisément à 17.00 l’antre doit
former ses portes. Eventuellement le contingent qui s’est fondé
dans la foule de touristes se réunit, voire avec des traînards
habituels, (les mêmes suspects, je marmonne à Yo-yo). Notre partie
de 18 foule ensemble, fatiguée et grevée de babioles, en jambées
courtes et lentes envers Miros et le bus. J’ai essayé plusieurs fois,
les premières frustrées et bloquées par ce couple trop passionnée,
toujours bras en bras, se comportant comme matelots saouls,
brimbalant devant ma viseur au moment à la pousse du bouton,
avant finalement mon succès en capturant une image prisée (photo
50), la vue de l’esplanade encadrée d’un palme et l’entrée a l’endroit
de l’empereur au crépuscule d l’époque romaine, un milieu parfait
pour le tournage de Hollywood qui ne se lasse jamais du péplum,
de « Ben Hur » à « Gladiateur ».
Nous arrivons, vannés et suants, au centre de nouveau Split,
un quartier plus industriel que touristique, sur l’autre large de la
baie et proche de l’embouchure de la rivière. Miros, seulement lui,
peut naviguer bien ces rues pleines des bâtiments qui semblent
uniformément mornes. La nuit déferlera dans un hôtel de boutique
qui est à dire neuf, exigu, moderne, utilitaire. Le foyer ici ressemble
à une ruche avec nous, les abeilles en essaim. Plusieurs carrosses
parviennent à l'adresse au même temps. Les valises et bagages
débarqués sont jonchés sur coulisse et tiroir. La cohue s’empire par
l’humidité. Les clients s’empressent mais en vain. Personne ne doit
avoir attendue sans exception. Le climatiseur est en panne dans les
couloirs mais fonctionne bien dans les chambres, la concierge
assure ses clients, ses minois en lutte de masquer une anxiété bien
trahie par sa voix crispée et ses excuses rabattues. Un gueulard,
son visage rébarbatif, de notre groupe ne cesse pas de grogner et,
plus vexant encore, en cantonais, un babillage qui perce les
tympans puisqu’il sonne toujours au décibel d’un avion en train
d’atterrir. Ces aboiements navrent et énervent tous des autres. Les
nerfs déjà rendus crus par la faim et la soif deviennent plus éraillés
dans la mêle aggravée par la fumée des cigarettes qui la Croatie
n’apprend encore d’interdire pour épargner les lieux publics, un
signe de comment elle demeure en retard de l’Union européenne de
laquelle son gouvernement aspire de joindre. Sofa réussit enfin à
dénouer la pagaille et nous fournir de nos clefs. Apres une douche

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et un changement de fringues, nous dégringolons au palier pour
notre rendez-vous et sommes prêts pour notre dîner dans le
restaurant d’hôtel mais sommes dits qu’il est déjà réservé à l'autre
escouade, allemande, je crois, et désolé pour la confusion. Le
contrat signé d’entre l’agence de tour et l’auberge contient une
échappatoire qui donne à cet établissement le droit à faire des
ajustements dans un cas d’urgence. Nous n’avons pas de choix que
suivre notre meneuse au restaurant de la cuisine croate plusieurs
rues de l’hôtel, l’hôtel de honte, passants une pissotière payé en
route.
Sofa me côtoie et me demande pourquoi je gribouille sur
cahier lorsque d’autres aiment fraterniser. Dans ce monde il y a
ceux qui ne se mixent bien avec d’autrui jamais pour la raison de
rebuffade ni hauteur ni maussaderie, plutôt que du souhait de
maintenir une paix de l’esprit. Je ne soigne pas mes camarades de
ce voyage car je ne les en ai choisi et ce qu’ils disent dans ces
causettes desquelles ils s’indulgent ne m’intéressent jamais. Leurs
ragots et rumeurs sur les vies des acteurs, actrices, chanteurs et
chanteuses, stars de la culture pop cantonaise, me tannent.
L’essence n’est pas de mon mépris qui explique pourquoi je ne
daigne pas leurs aborder mais de mon insouciance. Je m’enfile une
expression d’ennui et continue de rédiger des notes. Rogue suis-je,
non, pensif, oh oui, plus certainement. Voilà pour la moitie des
dîneurs, les serveurs apportent deux carafes de vin, l’un de rouge,
l’autre de blanc ; pour nous, trois, une bouteille de l’eau, qui en
croate est « voda », gazeuse qui m’étanche et divertit mon attention
de notre guide au repas de salade, soupe de légumes, pâtes vertes
en sauce de beurre, ail, huile d’olive avec des morceaux de thon et
le majeur plat, plus bœuf rôti, avant une desserte de glace et une
tranche de pastèque naturellement. Alors Sofa paie le couvert, bien
sûr de nos frais, et nous, les pourboires. Je m’hâte de revenir à
l’hôtel et regarder un peu de télévision sur le tournoi de tennis à
Wimbledon et m’esquive de ceux qui se relâcher au bar, plantant
bien leurs fesses sur tabourets sans soin à l’heure, à chacun sa
voie à détente. On écoute toujours des rengaines américaines.
Vous, Président Bush, le monde entier adore la créativité qui si
foisonne dans votre pays et pourtant vous le gâchez en
aguerrissant votre société pour la violence afin qu’enrichir vos
copains déjà trop riches de leurs exemptions en impôts, surtout vos
profiteurs de guerre. Sur télévision, oui, il y a le CNN et une chaîne
de films, oui, américains doublés en croate.
Lors d’autres se sont abreuvés hier nuit, j’étais au gym de
l’hôtel dont les agrès étaient basiques et les haltères ne pas
existants. Mais encore tout comptait pour faire une heure de
l’exercice pour lequel mon torse et mes bras ont convoités depuis le
début du périple qui ne me permettait d’allonger mes membres sauf
mes jambes. On avoue prendre comme un rite le régime spartiate
et, voila, aussitôt, il se transforme à une obsession. C’est comme
ça. J’en atteste puisqu’une journée sans cette routine dérange mon
rythme physique et mental. Une des séquelles, au-delà ces foulures
et contusions, est la tendance de subir la faim et soif constante. Je
me suis réveillé aux peines des mollets et du ventre. C’est
maintenant notre chance pour nous alimenter après les allemands
voraces. Napoléon eut raison a dire l’armée marcha sur son
estomac. Nous devons nous contenter avec les restes, les miettes,

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comme du lait caillé, des fruits talés et des viandes rassises mais le
thé est d’accord et il y a en une variété. Quant les oeufs, je les évite.
Dehors plus de la commotion. L’aire d’arrêt pour les bus est fermée,
étant occupée par un camion géant et une niveleuse de chemin.
L’air est piquant avec l’odeur de bitume et les cris de Sofa. Un seul
efflanqué garçon trimbale et pousse les affaires du groupe qui
choisit de ne foutre rien. En s’échine-t-il, le jeune m’élicite la pitié.
J’ôte ma chemise, habillant juste en t-shirt, et donne aide au jeune.
Quelqu’un remarque sarcastiquement comment je voudrais monter
mon état costaud et impressionner les femmes. Nous ne sommes
pas des éboueurs et tacherons, nous, les professionnels et
voyageurs de luxe, serait la vue de standard, mais je n’oppose pas a
trimer ni a faire solidarité a la classe travailleuse pour, sous la
peau, chaque est également humain, également digne d’aide,
d’empathie, d’amour. Ce jeune est le fils d’un homme, homme
comme moi, et je ne discrimine jamais, au moins ne pas sur le fond
de race, de statut conventionnel, de genre. Moi, bien ces jours, je ne
milite guère, ne saisis l’appât, ne réagis plus, ces railleries. On
peste et gronde lorsqu’on soit passionne et acharne des pensées et
avis de l’autre. Moi, bien, je suis insouciant aux notions d’une
buse. La visée pour moi est de lancer plus rapidement ce trajet au
nord et, avec un espoir et une prière, échapper de la canicule qui
échauffe le sud et aboutir à l’arrivée plutôt prompte à la prochaine
escale. Il y a déjà un voile de nouage pour nous donne un peu d’un
couvercle et sursis. On sent d’ici l’impact affligeant le monde ou la
chaleur ne pause pas et la sécheresse persiste en contraste aux
déluges épiques, sinon bibliques, en Europe du nord. Mais encore
le ciel ne s’alourdit pas assez de m’arroser. Ce qui nous moitit n’est
que ma perspiration, le fluide qui attire trop ces taons et mouches
aussi altérées.
En route maintenant envers Sibenik, juste de 45 minutes de
Split sur le chemin littoral. On repère encore abondants ces signes,
drapeaux, panneaux, qui se pavoisent et, plus menacants, un affut
remorqué par un camion militaire qui prononcent du zèle de
nationalisme croate, un patriotisme acharné, non, le chauvinisme
qui perce le coeur de l’humaniste comme un coup de dague. Moi,
qui me suis affaissé, je m’érige et regarde le défi militariste avec
inquiétude et tristesse. Un des trucs de nationalisme est fausser
l’histoire, déformer la mémoire tribale, encourager l’amnésie, attiser
la paranoïa. C’était précisément le verdict d’un professeur et
dissident intellectuel, Norman Finkelstein, récemment dérobée,
encore, de sa chance à tenure, cette fois à l’Université de DePaul à
Chicago Ce natif de New York, un fils d’un couple de rescapés des
horreurs du Shoah, son écheveau familial tragique étant long, avait
répondu promptement à ma lettre d’appui dans le printemps de
2006 lorsqu’il était encore dans l’œil de l’ouragan académique.
Normalement chaque dispute universitaire ou médiatique ne
m’intéresse pas pour la raison simple que je n’en appartienne plus.
Certes d’autres dans ma jeunesse, sûrement naïve sinon naisse, les
idéalistes reprochaient aux cyniques dans dont rangs j’étais prêt
recru puisqu’il est le doute soit toujours la seule défense contre
trop d’enthousiasme qui rend fous de nous. Quant au martyr,
figuratif ou littéral, je ne suis pas fan de lui jusqu’à la cause
justifiée qui veut typiquement la protection de la famille et de la
personne, voilà, la résistance. Tuer pour voler ce qu’est de l’autre

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semble répugnant à chaque fibre de mon être. J’abhorre cette
violence des maraudeurs quoique j’admire l’ambition d’Alexandre
quand la conquête fut une visée respectable d’un roi de guerre.
Mais le calvaire de Norman m’émouvait beaucoup, et l’effet reste le
même voire maintenant, parce qu’il est un juif qui refuse de
souscrire à la tyrannique de pensée et à la monopole d’identité
imposée par une forme de nationalisme européen, le sionisme, une
stance de la sienne antagoniste et impardonnable dans sa
communauté. Sa conviction comment ces divisions raciales,
ethniques et religieuses ne sont que factices et fratricides est aussi
celle qui je chéris. C’est la vérité que l’humanité est plus riche pour
sa diversité et de forme pourtant unité d’âme. Ces vues résonnent à
moi et évoquent mon épisode chez Roxane, une sioniste fervente et
croyante fidèle orthodoxe. Je me souviens de nos querelles
épistolaires sur la guerre de Yom Kippour quand elle sévissait
contre « tous des Arabes » pour leurs attaques qui elle réclamait
était, ne pas aurait été le début de l’autre holocauste en train, un
tel mélodrame de panique et désespoir d’une fille ordinairement
composée, grâcieuse, douce, si ringarde. Je ne l’avais pas reconnu
comme fanatique, partisane et hargneuse. Rosie était patriote, oui,
mais du Canada, le pays de sa naissance, ou de l’Israël, duquel elle
n’avait pas vue avec ses yeux. Elle était ardente de l’idée de la
sainteté divine d’Israël, le grand Israël, avalant de « Judée et
Samarie », dont la sécurité était, est, sera assurée, et moi, j’étais
ardent d’elle. Il n’y aucun lapsus qu’elle parlait du grand Israël
incluant du terroir encore habité des Palestiniens après leur
défaite, leur déroute, en juin 1967 dans la poursuite de
« lebensraum », un terme qu’Adolf Hitler eut cité pour l’invasion de
la Russe. Mais dans son état affolé, Rosie semblait incapable de
logique, affectée, je crois, par ces affreux contes de pogroms sous
les glaives des cosaques et des sabots de leurs montures qui
coulèrent des lèvres de sa grand-mère. Je suppose que mon
absence de soutien total l’avait atterrée au nadir de la crise, « crise
de survie », « crise existentielle » de l’état juif et elle avait trouvé
trahison personnelle dans mon appel au calme et à comprendre, ne
pas compatir, ce conflit de revanche pour la persécution des
Arabes, vaincus bien sûr en 1967 après juste six journées de
conflit, humiliées en 1956 durant cela du Suez et en 1948 quand
une campagne de foudre et terreur sioniste bouta ces musulmanes
et aussi chrétiens de Palestine, un peuple éparpillé comme ces
Juifs après le siège de Massada, une nouvelle diaspora de la terre
promise. C’est bien que l’on prenne d’intérêt dans l’histoire de
l’ancestrale tribu sans faire toute de cela d’être sa tuile et, pire, ses
œillères qui s’aveuglent aux souffrances de l’autre race. C’est bien
que l’on hisse un drapeau de choix auquel on attache son identité
mais il ne serait pas propre de dénigrer cela de l’autre. A cette
jonction de va vie, je désavoue aux fidélités nationalistes, souvent,
sinon invariablement ataviques et antithétiques à la raison
lorsqu’elle, la raison, m’affranchisse. Elle était adepte, croyante,
moi, cynique et iconoclaste, et nos attitudes opposées avaient
fendues notre rapport, rendantes impossibles voire notre amitié.
Roxane m’avait accusé absurdement de la maladie chrétienne
d’anti-sémitisme qui était impossible puisque mes ancêtres ne
furent jamais responsables pour les griefs aux Juifs et je l’aimais
dans la voie d’un premier amour, l’amour de chiot. Comment

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bornée devenait-elle, comment cruelle, conne et calleuse ? La
rupture après tout ça devenait inévitable puisque la distance
d’entre nous n’était plus simplement géographique mais moral,
intellectuel, un « chasme » dans un mot, vair contre vair. Pour moi,
en 1973, la rose s’était étiolée sur cette tige d’épines, une rose
encore en deuil au massacre à Munich de l’an dernier. J’apprécie
Norman pour son courage en bravant le lobby sioniste mais moins
pour la stridence de ses polémiques, moi, souvent taquiné comme
un juif par Louis Kraar et par Ed Harris, les deux descendants
d’Abraham, le premier était pratiquement mon parrain et le second
mon premier employeur de l’été, moi du Tomah Torah. Je prie que
le complot l’heurte mené par le professeur éminent et emphatique
de loi à Harvard, Alan Dershowitz, ne réussit jamais en l’étouffant,
écourtant sa carrière académique et freinant ses critiques vives, ne
pas seulement contre la politique injuste envers des Palestiniens,
plutôt aussi de certains leaders des Juifs qui exploitent les
souffrances de leurs confères. [Ce ne fut que l’écrivain et sociologue
français, chroniqueur de l’Amérique jeune et crue, Alexis de
Tocqueville, qui remarqua comment ces citoyens des Etats-Unis,
quoique calmes et délibères dans leur dialogue de commerce,
eurent tendance à gonfler leur rhétorique en politique sans soin du
ton plus sublime, plus nuancé. Presque deux siècles après, cette
note reste apte. Mais fut Emile Zola coupable du même pour l’effet
de choc avec son pamphlet d’outrage, « J’accuse » ? On ne divague
plus.] J’espère que cette clique, cabale, ne mate pas l’honnêteté de
lui, de Noam Chomsky, de Howard Zinn dont l’audience est
l’humanité totale et dont l’arme n’est que cela de raison,
compassion et puissance contre la bigoterie dans chaque forme et
contre quiconque. A lui, Norman, qui pâtit pour sa conscience, ma
solidarité. Ne serait-ce que pour Roxane, je ne parle plus de ce sujet
controversé; à qui je dédie ce passage et pense …je me
leurre ?...tendrement à moi s’elle se rappelle mon nom. Le
patriotisme est le dernier refuge des pendards, andouilles aussi,
oui, sans doute.
Le flot est gentil en clapotant le rivage de Sibenik parce qu’il
s’abrite arrière d’une barrière de îlots dalmatiens et sa baie ne
manque qu’une petite bouche à la mer. Miros nous conduit au
cœur d’une ville qui n’a pas besoin d’un fort pour sa protection car
cela est provenu de sa géographie gardée. La nature veille bien donc
la fortune de l’endroit qui regarde à l’ouest, à l’Italie, spécifiquement
à Venise pour son inspiration. La vie d’ici ne s’axe pas donc sur le
crénelage plutôt sur l’église (photo 52) avec un flanc étant
néogothique et l’autre florentin pour sa construction eut enjambée
deux époques et sous deux influences. La structure est sculptée
des blocs de marbres et moellons italiens qui furent transportés de
leurs carrières, une indication de la fortune de Šibenik quand il fut
un des centres de commerce de la berge centrale dalmatienne et
une preuve comment une politique vouée à la poursuite d’avidité
plut que grandeur militaire fut plus sensible. Comme Venise,
Sibenik s’enorgueillit de son cosmopolitisme qui lui apporta sa
richesse, un regard international reflète sur une frise de l’église a
laquelle reste un rang de bustes des habitants de la bourgade dans
le 16ieme siècle, figures de marchands locaux, commerçants
vénitiens, matelots maghrébins, voyageurs arabes et russes,
personnages turques, etc. La prospérité n’y quitte pas puisqu’en

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floraison est encore cet assemblage de halls aux arts et musées. Le
passage de temps efface certaines des traces d’antan mais encore il
n’affouille pas l’accueil que Sibenik tendre et étendre au monde.
Notre guide Karina, une chanteuse de jazz, nous emmène en
travers d’un parc proche aux quais domine par une paire de frênes
ou plutôt ornes, les demeures à la troupe d’écureuils quasi-
domestiques qui, gazouillants, sans exprimer pas de peur de nous
dans leur fourrage frénétique pour leurs noix, pignes et déchets des
êtres humains.
Nous filons dans notre carrosse et nous nous soumettons à la
dépouille de notre rôle, de cela comme touristes à celui de
chasseurs de notre prochain repas, un déjeuner au restaurant d’un
décor traditionnel, ses murs lambrissés et tables de bois durs, dans
les alentours de Sibenik. C’est réclamé que l’endroit adjacent au
parc de nature régionale est le plus renommé pour sa cuisine
croate authentique d’être couronnée avec une tranche épaisse du
gâteau au chocolat le plus délicieux et, pour Yo-yo et moi,
irrésistible. L’attente est longue qui exacerbe la faim et aiguise
l’appétit, surtout au dessert. Je souscris et suis séduit du nom
d’une chaîne de cafés à Vancouver qui s’appelle la Mort au
chocolat. Ceci un menu amorce avec une aguiche qui est d’une
photo et une recette pour ce gâteau trempé d’une couche noire et
riche, pas trop sucrée, plutôt légèrement amère. Notre entrée après
la salade et la soupe obligatoire est une plaquette de thon au pâté
sur laitue avec lequel nous tartinons le pain beige de seigle, très
délectable. La prochaine est un choix du porc rôti, un peu sec mais
est restauré dans une sauce de vin rouge, ou la goulache qui je
pensais était la platée de signature hongroise. Il y a une corbeille de
prémices gratuites récoltées des vergers voisins, les abricots et
pêches, parfaitement mûries de la canicule sans pause ni merci. Je
ne mange qu’une moitie du gâteau avant, ayant dévorée la sienne,
ma gosse goinfre m’en saisit en léchant ses babines avec un regard
de louve. Ce n’est pas grave car je me contente avec l’autre pièce de
pain et galette, la fouace est ce que les Français proclament. Repu,
relâche, j’observe le passage du paysage qui regorge encore de la
richesse du terroir en route au nord d’extrême de la Croatie, voilà,
la fin de la garrigue. Les champs abondants sont verts encore grâce
à l’arrosage et les vignes bien marcottées sont lourdes des racines,
encore la cagne. Le trajet ainsi entamé s’est déjà promis d’être le
plus distant du voyage puisqu’il coure de 275 kilomètres de Sibenik
à Rijeka, une bourgade portuaire et chantier naval, une sorte du
Havre en France, de Liverpool en Angleterre ou de Halifax au
Canada.
La fouille de Rijeka, dont le nom signifie « rivière » en croate,
débute dans les banlieues au sud sur chemin qui longue le rivage
de la baie de Kvarner et monte, puis descend, plusieurs escarpes.
En route on voit une centrale électrique géante et site marin et des
bâtiments délabrées, certaines de leurs toits de tôles ondulées
percés et tachés comme toiles mitées, testaments à la gloire écoulée
et au déclin industriel de ce qu’était un fleuron urbain de
l’ancienne Yougoslavie. L’ambiance de ceci semble morne lorsqu’on
regarde ces longerons rouillés, tréteaux abandonnés et grilles
cadenassées mais alors c’est comment un pays moule son destin
des ruines qui sont le prix de son indépendance. L’argent qui s’est
écoulée durant la guerre, oui, la perte des fonds investis dans le

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chantier, les usines et les quais pourrait encore être retourné via
tourisme, à moins cela serait le plan. J’aime d’emblée la cité qui
émet l’optimisme américain comme des villes des Etats-Unis voire
plus miteuses et désespérées quand des changements économiques
les éviscèrent. Le plus pire creux n’est pas parfois celui du revenu à
la trésorerie mais de l’espoir. Apres notre installation à l’hôtel plus
vieux et opulent, grâce au nouvel aménagement, nous trois flânons
à l’heure avant notre dîner et captons des images (photos 53, 54 et
55) de la corniche dans l’ombre d’une forteresse qui y surplombe.
Notre balade est solitaire puisque les rues sont tranquilles. C’est
une ville qui ne grouille pas. Les piétons sont peu. Un vol de
mouettes, plutôt plus petites que les goélands de l’océan pacifique,
une senteur de saumure et la vue de voiles, grues et un phare à la
distance balisent mon esprit et évoquent mes mémoires du littoral,
surtout celui-la de Vancouver et de Nanaimo de ma jeunesse. Nous
arrivons au parc devant le théâtre plutôt ornée, Place Ivan Zajc,
construit en 1765 (photo 56), dont le dôme rutile tantôt dans la
faible lumière, et après nous traversons le boulevard à la
chalandise centrale de la ville (population : 150 000) dont les
magasins ne sont pas trop fréquentés parce que de la disette et le
chômage. Même que l’état ne diverse trop de largesse à
l’infrastructure, les gens ne veulent pas débourser ce que le pognon
ils ont pour l’épargne est nécessaire quand la condition de vie est
précaire et la cherté ne cesse pas de se dresser, ayant été conduite
par l’impact des euros trop forts, au grief des ménagères. Sont-ils,
les habitants, agoraphobes, non ? La quiétude qui prévaut
représente un net contraste à l’esclandre du sud de Cavtat et
Dubrovnik, la différence tant qu’ici est un centre de commerce et
que là-bas est celui de plaisir. Mais la joie existe, abonde, encore
mais plus sublimement et plus muette que la gaieté combustible
méridionale pour les voies septentrionales sont ainsi, raffinées,
modiques, plutôt plus proche de mon expérience canadienne, un
peuple généralement plus réservé. Un homme râblé, son visage
buriné, de vingtaine bredouillant, tenant une serviette noire en
cuir, m’approche au coin d’une rue à la sortie d’un building pour
pratiquer son anglais brisé et en train d’effrayer ma gamine
audacieuse envers nous et timide en public qui se rétrécit et se
cache arrière de moi. Je peux jauger par son haleine et
dandinement qu’il est poivrot et ne pose pas de menace sauf à lui
même. La rencontre est triste mais à moins il ne me rabiote pas.
Encore Rijeka, cité dans des textes grecs, est une place culturelle
dont l’université presque il y a quatre siècles, une académie
contemporaine à celle de Harvard et qui se vante des musées et
galeries. Ceci est ma dernière soirée en Croatie et je m’avoue qu’elle
me manque un peu. La promenade me corse, moi facilement égayé
d’un parcours étendu. Là-bas de me régaler aussi est ma gamine
avec ses boutades mais sans malice sur l’absence de bonne cuisine
depuis Dubrovnik et celle aussi de la bonne emplette – et alors il y
aura l’Italie sur l’horizon pour résoudre ces problèmes de
consommation. Certainement j’évite la nuit sur trottoirs qui se
transforment au domaine des prostituées et leurs proxènes alors
que sûrement de moins évident qu’à Paris, Bruxelles, Londres ou
Genève. La mairie doit contempler des changements au tourisme
comme celui d’un convoi de calèches hippomobiles que l’on trouve
à Manhattan, à la frange du Parc central, qui attire des visiteurs

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romantiques et bien-lotis, donc débroussaillant, non, débusquant
ces éléments de leur pègre.
Sofa nous avait avertie ou nous avait enjoint au début que l’on
risque la freinte qui est actuellement bonne nouvelle à ma femme
mais mauvaise à d’autres qui sont déjà frêles et faibles. La perte de
laquelle l’on redoute aussi serait de la poche, surtout en Italie. Ma
gosse se toque des marques et coches. Elle braque ses yeux sur ses
objets d’envie bouclée par la vitre d’une devanture à l’intensité
d’une tigresse fixée sur une proie dans les buissons. Mais alors,
selon Esther, on accepte qu’une adolescente soit programmée de
nuire aux épargnes parentales et acquiesce à sa lubie sans la
résister, sans grognes. L’amour d’un père pour sa fillette est absolu,
sinon abject. Cette indulgence la laisse m’appauvrir et au même
temps accroître et ramifier sa collection de vêtements qui rivalisait
celui de Versace. C’est une phase, proclament ces mères qui
néanmoins se souviennent de leur jeunesse étant beaucoup moins
bombardées des symboles de richesse. Je les vois, ces femmes,
Esther inclue, causer après le dîner, disant comment leurs enfants
s’attifent des fringues trop exposées, exhibitionnistes, à l’encolure
trop décolletée, à l’entournure trop évasée et au denim trop étroit.
Ces fillettes qui s’accoutrent sont flirteuses, oui, en voulant de
blouser les garçons et vexer leurs parents. J’ose dire que de plus en
plus il n’y aucune différence d’atours entre ces pauvres femmes qui
maraudent aux coins des rues nocturnes et ces chouettes dorlotées
qui taquinent et provoquent. Esther me déteste lorsque j’en parle
dans une façon si durement franche mais alors cela est la vérité,
n’est-ce pas ?
Apres on a passé une semaine dans un pays, certes modique
de superficie, on ne gagne ni glane qu’en vague impression. Je n’ai
pas d’enjeu émotif en Croatie quoique je ne sois pas honnête si je
ne confesse à mon infatuation à la splendeur du paysage qui
demeure toujours gravée dans ma conscience grâce à l’aide
photographique. On ne doute jamais de la volonté et la fierté d’un
peuple déjà victorieux en surmontant un conflit sanglant pour
achever leur état, l’incurie produite du mal nationalisme
aiguillonné par un sens de pureté fausse ethnique et les luttes
économiques qui sont préludes à l’entrée éventuelle dans l’Union
européenne. Une contrée comme ça manifeste une certaine naïveté
à la Cendrillon avec le leurre qui le prince charmant, l’EU, arrivera
pour l’essuyer de ses pieds, quand il n’y aucune facile solution, ni
conte de fée, ni rédemption instante. A ceci beaucoup de nations
neuves au club à l’origine de l’Europe orientale peuvent attester.
Esther m’a demandé hier nuit après mon tour au gymnase et
douche, notre princesse distraite par ces images clignotantes sur
télévision, si je considérais une retraite ou voire un retour en
Croatie. La réponse n’était pas dans l’immédiat plu tout avec une
longue réflexion et délibération. Je n’hésite pas acquérir des atouts
fiscaux, pas aiguiller un courtier d’enquérir sur l’avenir du marche
immobilier strictement pour des profits et pas planifier de l’autre
visite mais rien ne me motiver d’y emménager. En habitant dans un
pays voire comme ressortissant canadien, on partage et épaule le
fardeau de ses tragédies. Ces sinistres cependant ne sont pas les
miennes et à dont futur je n’appartiendrais pas. Ce que l’on parie
avec l’argent, le bidou comme dit un Québécois, ne nécessite pas à
la mise du coeur. Pour moi, la Croatie est un lieu d’intérêt

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touristique ou académique mais jamais personnel. J’adore le soleil,
la flore, la mer voire sans houle typique de mon océan, le Pacifique,
le ciel, les calanques, les villes et les citoyens d’ici, surtout ces
guides qui incarnent l’esprit et exsudent l’aspiration de leurs gens
mais peu des événements me touchent viscéralement. Le tapis qui
est cette portion des Balkans rate aussi la grandeur impériale
comme celle qui est effusive dans les Etats-Unis ou voire au
Canada ou en Australie, les deux étant legs du règne britannique.

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