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Commentaire de texte

Afin de se constituer en un socialisme scientifique valide et une théorie révolutionnaire


qui dépasse les utopies socialistes qui l’ont précédé, la pensée de Marx & Engels eut d’abord
besoin d’opérer le renversement de la philosophie hégelienne ainsi que de procéder à la
critique de l’idéalisme de son temps. C’est l’une des tâches de « La Sainte Famille » qui occupe
une place théorique importante dans le corpus marxiste. En effet, étant publiée en 1845, ce
texte précède donc le Manifeste du Parti Communiste qui viendra trois ans plus tard, en 1848.
Il s’agit pour Marx et Engels d’opérer la critique contre les idéalistes, comme Bauer, qui font
des Idées le moteur du procès historique, en affirmant à la place le caractère premier et
formateur des conditions matérielles et sociales des hommes dans leur vie concrète et
tangible, donc contre l’affirmation idéaliste d’une autonomie des Idées dans un ciel intelligible
et indépendant à l’égard des hommes. Le chapitre IV dont est tiré le texte est plus
spécifiquement une attaque à l’encontre de la philosophie anarcho-individualiste de Max
Stirner, c’est-à-dire celle d’un solipsisme absolu qui place l’Unique, l’ego individuel comme
étant la seule cause à laquelle se fier, le problème étant qu’il en oublie presque être un individu
concret pris dans des conditions matérielles héritées du passé par d’autres individus.
Néanmoins, le texte à étudier n’évoque pas Stirner, il s’agit plutôt d’une analyse du capitalisme
avec identification de la richesse et du prolétariat comme étant différentes étapes d’un même
processus dialectique, avec un côté positif et un côté négatif. Il semble donc y’avoir pour objet
l’analyse de deux catégories existantes en contradiction sous le capitalisme, la richesse et le
prolétariat, et le texte nous fait progressivement monter de l’avènement du prolétariat par la
propriété privée jusqu’à la disparition du prolétariat lui-même dans son auto-négation. Ainsi,
nous identifions la question que pose le texte comme étant : quel est ce processus dialectique
qui doit amener à la liquidation de la propriété privée, c’est-à-dire à la fin du capitalisme ?
Nous verrons que la propriété privée en tant que richesse, c’est-à-dire le capital, constitue le
premier côté positif du processus dialectique qui va générer le second côté négatif, celui du
prolétariat qui aura la tâche de détruire la propriété privée et avec elle abolir le régime
inhumain du capitalisme, ce qui en fin de compte aura pour conséquence sa propre disparition
progressive. Il ne nous semble pas important de souligner une quelconque aporie à l’œuvre
dans le texte, puisque le propos de Marx nous apparaît comme étant clair, méthodique et
aboutissant à une résolution certaine, et même si notre histoire est toujours une histoire de
contingence et donc la possibilité du socialisme elle-même contingente, il s’agit simplement
pour Marx de faire remarquer une tendance de l’auto-négation du capitalisme par ses propres
contradictions. Nous découpons artificiellement le texte en deux parties : une première qui
porte sur le développement des déterminations de chacune des deux étapes du processus
dialectique, puis une seconde sur la condition sensible du prolétariat vis-à-vis du capitalisme.

Le texte débute par une évocation de deux termes comme étant des « contraires », il
nous faut donc expliciter chacun de ces termes. Déjà « le prolétariat » renvoie à la classe
sociale constituée historiquement par la bourgeoisie au sein du mode production capitaliste,
mais ce processus débute déjà durant la période de gestation de celui-ci pendant la féodalité
qu’on nomme usuellement l’accumulation primitive. La fin de la propriété communale, la
clôture de certaines terres agricoles par de nouveaux propriétaires et les expropriations
paysannes vont constituer progressivement une armée industrielle de réserve composée de
paysans qui furent contraint de se déplacer dans les villes, formant par là une main d’œuvre
utile et peu-coûteuse pour les patrons des nouvelles manufactures, et finalement la
constitution d’un nouveau prolétariat. Là où le paysan possédait encore ses moyens de
production dans le petit artisanat, le prolétaire des manufactures et des usines ne les
possèdent plus et est contraint de vendre la seule chose qui lui reste : sa seule force de travail,
qu’il parvient à peine reconstituer quotidiennement en échange de son salaire à l’usine.
Ensuite « la richesse » renvoie à un concept qui exista sous différents modes de production
mais avec des spécificités différentes. Il vient étymologiquement du latin res riccae avec pour
signification « biens abondants », mais on pourrait également le subsumer sous le concept de
propriété en son sens générique, c’est-à-dire la possession collective ou personnelle d’un
certain bien. Il nous semble qu’étant placé en face du terme de « prolétariat », ce terme
économique de « richesse » renvoie à sa détermination sous un mode de production bien
spécifique, celui du capitalisme caractérisé par la possession de capitaux. Néanmoins la
question se pose donc de savoir en quoi cette nouvelle classe sociale qui n’a que sa seule force
de travail, le « prolétariat » et la « richesse » sous forme de la circulation de capitaux sont des
« contraires » ? Sont-ils contradictoires et ne peuvent co-exister dans le même temps, ou bien
les contradictions peuvent exister ensemble malgré une tension et une opposition constante ?
Déjà, la somme de ces contraires constitue une « totalité », c’est-à-dire que ces deux termes
ont beau s’opposer, ils n’en constituent pas moins dans leur addition mutuelle une unité
totalisatrice, c’est donc qu’ils sont deux catégories génériques qui co-existent dans un même
système en tension à cause de ses parties. Plus précisément, « ils sont tous deux des
formations du monde de la propriété privée », ainsi cette unité totalisatrice peut être nommé
comme capitalisme, puisqu’elle est le régime où la propriété privée peut s’exploiter librement.
La suite de ce premier paragraphe nous indique la rigueur scientifique et le travail méthodique
propre à Marx & Engels quant aux analyses politiques et économiques : il ne s’agit pas de
spéculer librement avec des concepts obtus comme ont pu le faire des philosophes du passé,
mais d’ancrer l’analyse philosophique de cette contradiction dans un véritable contexte
historique et économique. Dans un premier temps, l’analyse de la propriété privée comme
côté positif du processus dialectique. Cette propriété privée est celle des moyens de
production, c’est-à-dire les forces techniques et matériels qui permettent aux hommes de
produire ressources, biens de consommations et service par une action transformatrice sur la
nature. Elle semble être héritée, sous cette forme, du passé contingent des hommes,
néanmoins même si la propriété privée en tant que capital n’est pas responsable de sa
naissance (elle ne s’est pas auto-engendrée à l’image d’un dieu tout-puissant), elle est capable
de s’auto-perpétuer une fois bien établie. En elle-même il ne semble pas que la contradiction
existe, la dialectique ne peut se faire qu’avec un terme suivant dans la série qui viendra en
temps et en heure. Le capital est donc « forcé de perpétuer sa propre existence », le capital
une fois bien établie politiquement ne peut que s’accumuler économiquement, la richesse
appelle la richesse, au point où à terme elle se voit dans le capital financier déconnecté de la
production réelle des hommes. Mais, c’est que le capital, ce premier côté positif, ne se
contente pas de vivre et de s’auto-perpétuer indéfiniment, son existence implique une
nouvelle étape dans le processus dialectique, catégorie qu’elle crée d’elle-même étant donné
son caractère positif d’affirmation : ce sera le prolétariat. Dans un second temps, l’analyse du
prolétariat comme côté négatif du processus dialectique. Nous avions vu plus haut que le
prolétariat était rendu possible par un certain mode de production, celui de l’exploitation de
la propriété privée, mais c’est que celui-ci a pour rôle de commettre le parricide contre le père
qu’il a engendré et le maltraite. Néanmoins contrairement à un parricide, le prolétariat ne peut
pas exister sans la propriété privée : non seulement celle-ci l’a rendu possible mais elle
continue toujours de l’entretenir et de le faire vivre, c’est-à-dire que la propriété privée est la
condition de possibilité nécessaire et intemporelle du prolétariat. Néanmoins, même si nous
avons expliqué en quoi consistait matériellement la phase positive qu’est la propriété privée
en tant que richesse, nous n’avons pas explicité ce qu’est cette phase négatif qu’est le
prolétariat. C’est que celui-là est négatif car il constitue dans le plein développement du
processus dialectique, la majorité du genre humain, et même pourrait-on dire, de la quasi-
totalité de l’humanité contrainte de devenir salariée ; et qu’en tant que majorité, il est
contraint de faire la révolution contre un système qui le contraint de plus en plus, de par sa
nature même, notamment avec le problème de la baisse tendancielle du taux de profit qui
contraint la pression progressive et continue des conditions de travail salariales. Dans cette
perspective donc, l’idée que « le prolétariat est force […] de s’abolir lui-même et du coup
d’abolir son contraire dont il dépend ». La tendance même du prolétariat à rentrer dans un
processus révolutionnaire pour liquider l’ancien ordre capitaliste, le contraint à détruire la
condition qui le rend possible, et donc à s’auto-détruire, mais pour le mieux ! C’est
positivement qu’il faut voir la disparition du prolétariat, puisque la signification de ce
processus est la libération du genre humain. Nous devons donc à présent voir, comment ce
processus dialectique aboutit à un monde meilleur.

Le second paragraphe se présente sous une forme peut-être plus littéraire et morale,
puisqu’elle vise à analyser la condition sensible des hommes dans ce processus dialectique.
Nous avons explicité en quoi consiste « la classe prolétaire » mais peut-être pas « la classe
possédante », tâche à laquelle nous nous adonnons ici. La classe possédante sous le mode de
production capitaliste, correspond à la bourgeoisie d’abord marchande puis industrielle dans
le contexte de la révolution industrielle et du passage des manufactures aux usines. C’est cette
classe capitaliste donc qui a produit le prolétariat en procédant à des expropriations paysannes
durant l’accumulation primitive afin de trouver, plus ou moins directement, une force de travail
dans les villes qu’elle pouvait exploiter à bas-coût. Mais fondamentalement, cette classe
capitaliste souffre tout autant de cette « aliénation humaine » que la classe prolétaire, dans la
mesure où elle est elle-même humaine. Certes, ce n’est pas elle qui vend sa force de travail et
qui souffre de son labeur dans les durs conditions des usines et de la soumission à la machine,
mais en tant qu’elle est humaine, elle souffre du même mal universel qui aliène le prolétariat
au fétichisme de la marchandise et a un rapport mercantile à l’altérité. La dialectique
hégelienne du maître et de l’esclave aurait certainement sa place ici, mais nous ne
développons pas plus par manque de temps. La classe possédante se sent donc « à son aise
dans cette aliénation » même si paradoxalement elle en souffre aussi, c’est qu’elle devient
incapable de voir dans l’autre son équivalent humain, un même altéré, une fragmentation du
genre humain mais qui dans le même temps renforce « sa propre puissance ». C’est qu’elle
accepte volontiers d’échanger l’humanité pour des intérêts économiques directs qui vont dans
son sens. Ainsi, il semble que cette aliénation dont parle Marx & Engels, c’est une
fragmentation de l’humanité qui amène nécessairement à la destruction de l’humanité qui ne
peut qu’être une : la bourgeoisie devient incapable de reconnaître dans le travailleur exploité
une altérité humaine, et se coupe par-là de sa propre humanité. C’est donc seulement
« l’apparence d’une existence humaine » qu’elle possède, c’est-à-dire une vie prospère contre
une aliénation au capital, une obsession pour l’accumulation de la richesse. Ce thème de
l’aliénation de l’humanité pourrait jusqu’aller à l’expropriation de la bourgeoisie par la
bourgeoisie, laissant à la place une valeur abstraite guider le sort d’un genre humain qui a
perdu sa souveraineté. Néanmoins, là où cette classe possédant se complaît dans l’aliénation,
la classe prolétaire en souffre dans sa chair la plus sensible et concrète : « la seconde se sent
anéantie dans cette aliénation, y voit l’impuissance et la réalité d’une existence inhumaine ».
Les enjeux matériels et directs ne sont pas les mêmes entre les deux classes : la première en
souffre d’une façon presque spirituelle ou métaphysique puisqu’il n’est pas rare non plus de
voir des capitalistes s’offusquer devant les conditions de travails de leurs salariés, certains avec
un véritable soucis d’améliorer leurs conditions sans aller jusqu’à la perte de leur intérêt
premier ; la seconde en souffre d’une façon sensible, puisqu’elle est contrainte d’aller travailler
quotidiennement et d’avoir un temps de repos qui est à peine suffisant pour retourner à la
tâche. Ensuite, la référence à Hegel souligne surtout la condition de l’ouvrier comme
contradiction dialectique entre sa nature organique humaine et sa situation quotidienne sous
le capitalisme, le poussant à se révolter contre un tel état de choses. Il faut entendre par
avilissement la dégradation physique, intellectuelle et morale quotidienne qui ont pour source
le mode de production capitaliste. La révolte qu’il mène est déjà une négation de cet état de
fait, et une prise de conscience de sa condition humaine et de sa possibilité à s’émanciper de
l’aliénation. Ainsi il est logique d’assigner au « propriétaire privé », celui des moyens de
production, « le parti conservateur » puisqu’il cherche à conserver cet état de choses, même
s’il rend indirectement possible sa destruction ; et au « prolétaire » celui du « parti
destructeur » puisqu’il tend naturellement à se révolter contre l’inhumanité que lui fait subir
ce système présent. Deux temps d’un même processus, l’un qui est positif et l’autre négatif.
Enfin, ce troisième paragraphe vient insister sur le caractère dialectique entre ces deux termes,
l’un est à l’origine de l’autre, donc à l’origine indirectement de sa propre liquidation. Nous
avons tâché de montrer en quoi l’avènement du prolétariat coïncide avec une volonté de la
bourgeoisie de faire fonctionner ses usines et donc l’existence du prolétariat impliquant celui
de la bourgeoisie et vice-versa, deux catégories antagonistes qui n’existent pas l’un sans l’autre.
La propriété privée implique donc sa propre négation à travers la production du prolétariat, et
le prolétariat n’a lui-même plus lieu d’exister sans la classe qui l’exploite dans ses usines. Cela
se déroule aussi à un niveau des affects : le capitalisme produit une série d’affects qui tendent
à révolter les prolétaires contre lui, d’où « la misère consciente de cette misère morale et
physique ». Il faut néanmoins souligner une chose, la victoire du prolétariat est en elle-même
contingente comme l’indique « Si le prolétariat remporte la victoire », Marx n’a donc pas une
vision mécaniste et entièrement déterministe du procès historique, il revient aux hommes eux-
mêmes de s’assembler entre eux et d’abattre cet état de chose inhumain, du moins le
capitalisme assure au moins qu’ils auront conscience physiquement et moralement de leur
misère humaine. Le renversement du capitalisme implique donc aussi la disparition du
prolétariat, puisqu’il n’est plus possible de conserver une classe exploitée sans une classe pour
l’exploiter, impossible de conserver un monde inhumain sans les conditions qui le rende
possible, et finalement pas de prolétariat sans propriété privée. C’est donc que ce processus
dialectique débouche sur un état du monde nouveau et radical avec la disparition complète
du prolétariat devenu majorité de l’humanité, bien qu’il repose sur les bases de l’ancien (les
conditions du socialisme sont permises par la dernière technique la plus perfectionnée du
capitalisme). Finalement, c’est la lutte de classes elle-même qui disparaît avec l’avènement du
socialisme puisque l’ensemble du genre humain est unifié, et sans intérêts divergents plus de
classes antagonistes et opposées ne sont possibles.

Ainsi, Marx & Engels permettent de penser le dépassement du capitalisme à travers un


processus dialectique entre la propriété privée et le prolétariat, qui doivent finalement par se
dépasser dans leur contradiction : la propriété privée est la condition du prolétariat, et le
prolétariat vient liquider la propriété privée à cause des déterminations sensibles et
matérielles de cette même propriété privée. La contradiction est surmontée par la disparition
du prolétariat avec la propriété privée, dans un nouvel état de choses où le genre humain est
unifiée sans être aliéner à l’accumulation obsédante du capital, ou à des conditions de travails
inhumaines.

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